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Les cahiers n° 204 j u i n - j u i l l e t 2 0 1 3
Des liens pour aimer, partager, servir
International
Quarante jeunes Vincentiens à Turin Reportage
Un peu d’amour pour les prostituées
L’invité
Atanase Périfan, créateur de la Fête des Voisins
Magazine
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Le réseau de charité fête son bienheureux Ozanam Le spectacle de la misère
Service
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Spiritualité
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Actus SSVP
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Quels moyens pour rétablir un lien social ? 6
Actus juridiques et sociales
Réflexion : « Heureux les pauvres » 24
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Entretien : Jean Vanier, fondateur de l’Arche 9
International 20
L’invité : Sœur élisabeth, « Nul n’est trop pauvre pour n’avoir rien à partager » 27
L’invité : Atanase Périfan « Ma vocation : développer la solidarité de proximité » 35 Album photos
Dossier : Le lien social
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Un peu d’amour pour les prostituées
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Carnet de route : Ozanam & la SSVP Vietnam 21
Contemplation 28 Prier en Conférence
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Ce numéro comprend un encart d’abonnement entre les pages 2-3 et un bon de commande entre les pages 38-39.
édito
« Une fraternité nouvelle est en marche »
© SSVP
«S
ervons la fraternité », voilà la devise choisie par l’Église de France pour le rassemblement Diaconia. À Lourdes, l’Église a rappelé qu’il fallait écouter la voix des pauvres de notre temps. Ceux qui souffrent ont pris la parole et nous les avons entendus. Mais ce rassemblement n’était qu’une étape, et comme nous y exhorte le pape François, nous sommes tous appelés à nous mettre en route pour construire une société plus fraternelle. Dans un même esprit, la SSVP a décidé de lancer cette année un grand message d’espoir dans tous les départements, lors de la campagne solitude 2013 : « Une fraternité nouvelle est en marche. »
Sans nier la situation de crise qui bouleverse de nombreux pays, la Société de Saint-Vincent-de-Paul, qui fête ses 180 ans de charité de proximité, préfère mettre l’accent sur les bienfaits du bénévolat et de la gratuité. C’est également ce que nous avons voulu mettre en valeur dans ce numéro. De l’investissement des citoyens dans de nombreuses associations, à ceux qui s’efforcent d’être simplement une présence auprès de ceux qui souffrent, vous découvrirez au fil des pages l’espérance qui est la nôtre. À l’école d’Ozanam, les Conférences jeunes et aînées de la SSVP agissent dans une fraternité renouvelée et servent dans l’espérance. Bertrand Ousset Président national
n°204 - juin-juillet 2013 - Les cahiers Ozanam
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Magazine L’événement
Le réseau de charité fête son bienheureux Ozanam Trois jours de colloque marqués par la joie et la jeunesse de la Société de Saint-Vincentde-Paul ont réuni des Vincentiens venus des quatre coins de la Terre à Paris, berceau de la SSVP. Spectacles, forums, repas festifs et conférences, les héritiers de Frédéric ont rendu grâce pour tous les fruits du réseau de charité mondial qu’est devenue la SSVP. Par Benoît Pesme – photos Mario Ponta
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âteaux, discours, bal et concert, messe solennelle : mais qui était donc le fêté de cette fin d’avril 2013 ? Entouré d’une famille polyglotte animée d’une joie manifeste de se réunir, l’homme du jour se nomme : Frédéric Ozanam. À l’heure de ses 200 ans, il en paraît 180 de moins : 20 ans !
L’esprit juvénile Toute la vigueur de la SSVP vient de là : Frédéric Ozanam avait 20 ans lorsqu’il l’a fondée avec quelques amis. C’est dans cet esprit juvénile que les invités du Conseil Général International, de la SSVP France et du Conseil de Paris sont venus à ces trois jours de colloque tenu à Paris, au Palais d’Iéna. Du Chili, du Liban, d’Irlande, de Singapour, du Des Vincentiens des quatre coins du monde entourent Frédéric Ozanam.
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Les cahiers
Ozanam - n°204 - juin-juillet 2013
Bénin ou d’Espagne et de plusieurs régions de France, les cinq continents étaient représentés à l’image de l’étendue du réseau de charité voulu par Ozanam. Pour certains, ces trois jours ont été l’occasion de retrouvailles, pour d’autres d’une découverte de Paris, le berceau de la SSVP. Précédé d’une soirée de lecture des lettres de Frédéric Ozanam à la chapelle de la Médaille Miraculeuse de la rue du Bac, le colloque a illustré les facettes de la personnalité d’Ozanam à la fois précurseur de la pensée sociale de l’église (Gérard Cholvy) et homme animé d’une profonde spiritualité et d’un charisme entraînant les hommes à sa suite (Austin Fagan de l’université de Manchester). Chaque conférence a rencontré un public attentif dans la salle, mais aussi sur le réseau internet des Brésiliens d’« Ozanam TV ».
Le rêve d’Ozanam Les forums thématiques « nouvelles pauvretés » et « recrutement des jeunes » ont permis d’entendre des témoignages forts comme celui de la SSVP du Québec avec Louise Larivière pour son projet « le rêve d’Ozanam », et à Paris avec Madeleine Tiberghien et Jérôme Soprano qui, dans leur Conférence ou Association spécialisée, mettent en œuvre l’inventivité de Frédéric Ozanam pour réinsérer des personnes en difficulté. Les pauses ont permis à chacun de profiter de l’exposition du bicentenaire, présentant en huit panneaux quelques grands domaines d’action des Conférences, visite à domicile, aide aux devoirs, épicerie sociale, vestiaire ainsi que l’extension de la Société à travers le monde au cours de
Un amphithéâtre polyglotte découvre les facettes d’Ozanam.
ses 180 ans d’existence. Une exposition prête à sillonner la France au cours des mois qui viennent et dont un exemplaire est installé pour l’été dans la cour de la chapelle de la Médaille Miraculeuse de la rue du Bac.
L’exposition attire les regards des curieux.
Côté détente et culture, les invités ont pu se rendre à l’église Saint-Sulpice pour un récital donné par Ana Vega Toscano, interprétant des œuvres pour piano de Franz Santiago Marsanau, ami d’Ozanam et fondateur de la SSVP en Espagne en1850. Les après-midi étaient consacrés à la visite du Paris d’Ozanam et de saint Vincent de Paul. Enfin, le Cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris, a célébré la messe à Notre-Dame en présence de tous les invités, au premier rang desquels les descendants de Frédéric Ozanam. Un moment intense sur les lieux mêmes de sa béatification en 1997 par le pape Jean-Paul II. Un mes-
© Mario Ponta / SSVP
Un moment intense
sage du pape François a été adressé à l’occasion à tous les disciples d’Ozanam les invitant à « ne pas avoir peur de sortir d’eux-mêmes pour regarder avec affection et tendresse les plus pauvres, les plus faibles, les plus petits, et leur annoncer que Dieu les aime, leur apprenant à lire les signes de son amour dans leur vie, et travaillant à plus de justice dans le monde à la lumière de la doctrine sociale de l’Église » (message complet p.29).
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Dossier Ils ont aussi besoin d’une présence, de personnes qui n’aient auprès d’eux aucun souci d’efficacité.
Quels moyens pour rétablir un lien social ? 83 % des Français affirment que la cohésion sociale est faible dans le pays, et le sentiment de ne pouvoir compter que sur soi-même pousse l’individualisme à son comble… Le moral des Français est en berne. Dans une telle situation, que peut-on apporter d’autre que des biens matériels qu’il devient difficile de donner ? Texte et photos par Charlotte d’Ornellas, journaliste
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’heure est à la crise. Crise économique, crise de confiance, crise d’identité… plusieurs thèmes sont déclinés, mais la peur du « chacun pour soi » les accompagne toutes. Dans une enquête menée en mars dernier par Recherches et Solidarités auprès de quelque trois mille bénévoles de plus de 18 ans, ces derniers affirment compter sur
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Les cahiers
la solidarité. Plus largement, les Français aspirent au respect des lois et à la réduction des inégalités.
L’État ne peut pas tout Alix, une jeune bénévole auprès de personnes en difficulté, soulève ce problème : « Aujourd’hui, les gens veulent compter sur l’État pour supprimer des situations qu’ils
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jugent inacceptables. Je suis intimement persuadée que les choses changeront par le bas. » L’État ne peut pas tout. Plusieurs formes de solidarité existent, certains ont de gros moyens, d’autres aucun. À écouter tous ces bénévoles, les deux ont toute leur place. Jean a 25 ans et se rend une fois par semaine avec quelques amis auprès des
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personnes qui vivent dans la rue. Ils ne donnent rien d’autre que leur temps : « C’est évidemment important que de grosses associations distribuent des repas chauds, proposent des lieux ou dormir, des soins… Mais ces gens-là ont aussi besoin d’une présence, de personnes qui leur parlent, qui les écoutent, et qui n’aient auprès d’eux aucun souci d’efficacité. » Frère Samuel est religieux dans la communauté Saint-Jean, en tant que prêtre il est un jour appelé au chevet d’un mourant. Assis, il prie, et attend. Le malade n’a alors que ces mots, quelques jours avant de mourir, « merci de votre présence ». Ces mots ont marqué le jeune frère. « N’ayez pas peur de ne servir à rien ou d’être nuls, on ne vous demande pas d’être bons, on vous remercie d’être là. » C’est avec ces mots qu’il accueille les nouveaux bénévoles de l’association Magdalena qui depuis des
années rend visite aux prostituées du bois de Boulogne, aux personnes de la rue pour un dîner le mercredi, et qui, une nuit par semaine, sillonne les rues à leur rencontre.
Nous sommes au même niveau Maud a 28 ans, il y a trois ans elle a décidé de partir à la rencontre des « amis de la rue » avec une amie et deux anciens de la rue. « Au début, ils nous ont fait gagner beaucoup de temps, ils savaient comment parler, de quoi parler, comment aborder les amis de la rue. » Après ces années à sillonner
«Il faut redonner à ces personnes le goût d’elles-mêmes
»
Ne pas avoir peur de ne servir à rien ou d’être nuls.
Prise de conscience En 2011, on comptait 16 millions de bénévoles en France. En 2009, en début de crise, 47 % d’entre eux se disaient plus concernés et plus actifs, ils sont aujourd’hui 72 %. Et 36 % d’entre eux sont désormais volontaires pour accompagner un jeune recruté par l’association à laquelle ils appartiennent, et l’aider à se former – considérant même que c’est une partie de leur engagement. La pratique régulière du bénévolat est aujourd’hui en hausse (40 %), même si 27 % des bénévoles avouent ressentir une certaine morosité au sein de leur association, due au manque de moyens, de personnes, ou à leur moindre disponibilité.
les rues, ces amitiés qui se sont liées, elle affirme : « Mon regard a totalement changé, je suis beaucoup plus naturelle et je n’ai plus de mal à parler avec les personnes que l’on rencontre, rapidement nous échangeons ensemble sur nos vies et nous sommes très rapidement au même niveau. » Arrive un moment où l’échange devient facile parce qu’il n’y a plus d’aidant ni d’aidé, il y a deux personnes qui se parlent. Maud l’explique : « Quand je vois une personne dormir dans la rue depuis la vitre de mon bus, je trouve ça toujours aussi insupportable, mais lorsque l’on s’approche on se rend vite compte que derrière une situation insupportable il y a une personne. Ce n’est pas tant la misère humaine que la misère de cœur que nous rencontrons. Et celle-là nous parle, puisque nous venons nous aussi avec nos problèmes. L’échange se fait naturellement. »
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Dossier un point important : « Mais quand je mets l’uniforme de la CroixRouge française, je sais que je ne suis pas seul, je sais que je serai soutenu, formé, encadré et que des principes inébranlables vont guider chacun de mes pas. »
Le but de ce bénévolat
Derrière une situation insupportable, il y a une personne.
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle tous les bénévoles s’accordent à dire que ce qu’ils font est accessible à tous. Maud est formelle : « Quand on a compris ça, on comprend du même coup qu’il n’est pas difficile d’aller à leur rencontre, tous peuvent le faire. » Dans une vidéo réalisée par la Croix-Rouge pour faire connaître l’action de ses bénévoles, la voix off ne dit pas autre chose : « Je ne suis pas différent du reste de la population, je n’ai pas de supers-pouvoirs qui me rendraient plus disponible, je ne suis pas plus généreux ou aimable, plus dévoué, humble ou efficace. » Mais elle poursuit sur
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Les cahiers
Ces bénévoles aspirent tous à changer le monde, par petites touches, mais ensemble, en se soutenant, avec l’expérience des plus anciens pour affiner ce regard, pour dépasser l’inacceptable, pour parvenir à rencontrer un cœur. « Elle m’a regardée comme une personne », cette belle phrase de Bernadette Soubirous est devenue le leitmotiv du père JeanPhilippe, à l’origine de l’association Magdalena. Et ce regard n’est pas un simple don, il devient un échange. Dans son enquête, Recherches et Solidarités relève des chiffres étonnants. Quand les Français sont 46 % seulement à penser que l’on peut faire confiance aux autres, les bénévoles sont 79 %. Un joli cadeau en échange du temps donné. Le but de ce bénévolat ? « Porter sur les personnes rencontrées un regard différent qui leur dit qu’elles sont aimables pour ce qu’elles sont, séparer la personne de sa situation », confie Alix.
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Alors ces visites sans autre moyen que le temps donné peuvent sembler dérisoires, mais Louis, qui rend visite régulièrement aux personnes démunies est convaincu de leur bien-fondé, et de leur nécessité. « Il y a des professionnels de la solidarité que sont les grosses associations avec de grands moyens et elles sont évidemment nécessaires pour subvenir aux besoins vitaux de ces personnes démunies, mais avant de penser réinsertion il faut redonner à ces personnes le goût d’elles-mêmes. » Maud acquiesce largement : « Il n’y a aucune frustration à ne faire rien de plus. Nous constatons souvent que les aides ne correspondent pas, à ce moment-là, à ce qu’attendent les personnes que nous rencontrons. Elles refusent ces aides, parce que ce n’est pas la priorité. Il faut d’abord guérir leur cœur. »
Charlotte d’Ornellas journaliste
Contacts Association Magdalena : contact@magdalena92.com 06 88 93 54 20 44 rue de l’Est 92 100 Boulogne-Billancourt Croix-Rouge française : 01 44 43 11 00 98 rue Didot 75 694 Paris Cedex 14
Entretien
Jean Vanier :
«Tu es important, tu comptes et tu es beau» Jean Vanier, philosophe et écrivain, est le fondateur de l’Arche, une association créée en août 1964 pour accueillir des personnes souffrant d’un handicap mental. À 84 ans, après une vie passée auprès des plus faibles, il livre avec tendresse ce qu’il pense être le secret d’un service réussi. Propos recueillis par Charlotte d’Ornellas, journaliste
Difficile de s’approcher des plus pauvres sans moyen ?
les personnes nous révèlent aussi nos propres blessures. À force de chercher à approcher des personnes au-delà de leurs situations, nous sommes nous aussi aidés à devenir une personne, et non le fruit d’une éducation ou d’une famille. Il ne faut pas avoir honte de cette gêne et persévérer. Il ne s’agit par de « faire pour eux »… mais de découvrir que nous pouvons « faire avec eux ». Il faut pour cela pouvoir s’appuyer sur d’autres.
Les personnes que l’on va rencontrer parce qu’elles sont pauvres, alcooliques, prostituées, handicapées… ont avant tout besoin d’un regard de tendresse qui ne porte aucun jugement. La seule chose qui nous est demandée de faire est de leur dire : tu es mon frère ou ma sœur, je ne suis pas là pour te changer, mais pour te reconnaître comme un être humain. Cette rencontre-là ne coûte absolument rien.
Pourquoi pleures-tu ? Dis-moi où est ta souffrance ? Écouter n’est pas facile, accepter est encore moins évident, mais il faut s’approcher des personnes avec un respect tout entier. La situation que nous voyons est, la plupart du temps, le résultat de nombreuses violences ou souffrances. Pour ne pas avoir peur, il ne faut pas vouloir changer ces personnes, mais les approcher… jusqu’à atteindre la personne derrière son état de vie. C’est un regard qui s’affine, qui prend du temps. Quel est le secret de votre regard ?
La vérité. Je crois fermement que la rencontre entre deux personnes ne peut se faire qu’en vérité. Si nous choisissons d’aller
Ne pas vouloir changer les personnes, mais les approcher.
à la rencontre de ces personnes les plus humiliées par la vie et par la société, il faut le prendre comme une mission. Il faut accepter de n’être que là, avec un regard d’amour qui dit : tu es important, tu comptes et tu es beau. L’amour est patient, il se met au service, il supporte tout parce qu’il espère tout. On éprouve parfois de la gêne à être si aisé à leurs côtés…
Cette gêne est normale, mais lorsque la rencontre se fait, avec un peu de temps,
© DR
Par où commencer quand les situations nous semblent trop inacceptables ?
C’est-à-dire ?
La communauté est primordiale. Tout seuls nous ne pouvons pas faire grand-chose. Il faut des personnes pour nous écouter, à qui raconter, qui puissent conseiller. Il ne faut pas tenter de porter tant de souffrances seul, c’est impossible. Il faut accepter de les écouter, et chercher à se convertir à l’humain, à la souffrance humaine. À plusieurs, il est nettement plus facile de briser l’humiliation dont ces personnes souffrent. Se porter les uns les autres est essentiel si l’on veut réussir à dire en vérité : tu es plus important que tu n’oses le croire.
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Dossier Reportage
Un peu d’amour pour les prostituées
© François Gu
enet
Magdalena, c’est près de deux cents bénévoles qui vont toute la semaine auprès des plus démunis à Boulogne, en banlieue de Paris. Un dîner pour les SDF, des visites dans la rue, un thé chaud et une oreille attentive, depuis huit ans maintenant. Guidés par le père Jean-Philippe, de la communauté Saint-Jean, les bénévoles se multiplient. Ce soir, comme chaque soir de la semaine, trois d’entre eux s’apprêtent à rendre visite aux filles du bois de Boulogne. Texte et photos par Charlotte d’Ornellas, journaliste.
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«Elle m’a regardée comme une personne.» Les filles et les bénévoles savourent ensemble une boisson chaude dans la caravane.
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ingt-deux heures trente, et Boulogne s’endort paisiblement, sauf son bois dans lequel déambulent de nombreuses filles plus ou moins dénudées dans le froid, attendant leurs clients. Ce soir encore, comme chaque soir de la semaine, quelques bénévoles préparent des thermos de thé ou de café, quelques tranches de pain, vérifient que la caravane contient tout ce qu’il faut. Avec le père Jean-Philippe, ils filent quelques minutes à l’oratoire, et le père donne sa bénédiction pour les bénévoles et toutes celles qu’ils rencontreront. Un seul souhait dans la prière : « Que votre regard soit un regard d’amour inconditionnel pour elles. »
En talons vertigineux Premier arrêt. En quelques secondes, les filles grimpent les marches du haut de leurs talons vertigineux, embrassent les bénévoles comme du bon pain, puis se laissent offrir un thé ou un café ! Elles s’assoient, et profitent d’un moment entre elles, avec les bénévoles… Rien d’autre ne leur est demandé que d’être elles-mêmes. Le choc est saisissant entre les bénévoles et les filles. Il ne semble pourtant gêner personne. Femmes, hommes opérés ou non, elles livrent ce qu’elles sont, avec une exubérance vestimentaire et verbale déroutante. Une chose est sûre, les filles ne doivent
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Les cahiers
Ozanam - n°204 - juin-juillet 2013
l’embrasser. Puis elles repartent travailler, souhaitant à tous une bonne soirée, dans l’espoir de se revoir bientôt. La caravane poursuit sa route, quelques mètres plus loin. Une nuée de jeunes femmes latinos se ruent, gelées, dans le camion. Chaque centimètre carré est occupé… Un thé à la main, elles refont le monde en espagnol, après avoir embrassé la vierge de la caravane.
© François Guenet
Ici, elles n’ont pas peur L’une d’entre elles raconte qu’elle a été agressée la veille, des coups pour attraper son sac à main, une nuit passée dehors. Les autres sont écœurées… Mais elles ne disent rien, la police leur fait peur. Ici, dans la caravane, elles n’ont pas peur. Ni du jugement ni des conséquences de leurs actes, moins encore de leur situation. Depuis quelques années, elles ont compris qu’elles étaient accueillies sans condition. Les bénévoles ne leur demandent rien, aucun compte, ils sont doux dans leurs regards et leurs questions. Une délicatesse qui rompt avec la violence de leur quotidien. Elles sont à moitié nues, mais ce sont leurs visages que l’on regarde. Elles le savent tant elles sont simples et directes. Une parenthèse avant qu’elles ne repartent travailler, qui s’achève par la prière pour celles qui le veulent. Ensemble, La caravane du père Jean-Philippe ils s’adressent à la Sainte Vierge en espagnol, puis en franest un havre de paix, sans jugement et plein d’amour. çais pour que tous suivent. Sur la caravane, il est écrit « Elle m’a regardée comme une absolument pas se sentir jugées tant elles abordent parfois personne ». Par leur sourire, leur naturel et leurs remerciecrûment les sujets qui sont leur quotidien. ments, les filles Un quotidien bien éloigné de celui d’Antoine, Ségolène et du bois semblent Marie, qui, comme les autres bénévoles, se rendent une fois le dire aussi. tous les quinze jours dans le bois. Ils connaissent les préSans autre moyen noms des filles, demandent des nouvelles de celles qui ne que quelques sont pas là. Les conversations se tissent, naturellement. Les thermos, ces bénévoles ne s’obligent à rien, ils accueillent les filles, mais jeunes bénévoles échangent aussi sur leurs vacances. Le climat est détendu. posent un regard Ils ne font rien de plus qu’être là et disponibles. Les filles aimant sur ces en feront ce qu’elles voudront. filles. Et mois après Pour l’heure, elles ont besoin de se réchauffer. Elles mois ou année demandent un thé, un gâteau, quelques préservatifs, des après année, ils chaufferettes pour affronter le froid. Elles parlent d’actuane cherchent pas à lité, de météo, de leurs chaussures, ou du voyage annuel être autre chose que Marie est béné être une présen vole, sa mission : à Lourdes que leur a proposé le père Jean-Philippe. Elles cette présence. ce, un regard ai mant. demandent de ses nouvelles, chargent les bénévoles de
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Service Actus SSVP
Courir pour des prisonniers
© SSVP
Six sportifs ont couru le Marathon de Paris pour soutenir l’action de la Société de Saint-Vincentde-Paul à Angers en faveur de la réinsertion des personnes sortant de prison. Par Clotilde Lardoux
Six généreux marathoniens ont relevé le challenge.
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our un détenu, être enfermé signifie rupture avec sa famille et ses amis, et par conséquent une désocialisation. Et lorsque les portes de la prison s’ouvrent à sa libération, il est sans logement et sans emploi. La rue devient presque inévitable,
ruinant le plus souvent l’espoir d’une réinsertion. Le 7 avril dernier, six amis angevins et nantais ont couru le 37e Marathon de Paris, avec pour défi de réunir un maximum de promesses de dons, afin d’aider la SSVP d’Angers à apporter son soutien à davantage de prisonniers venant de terminer leur peine. Elle tente depuis peu de briser le cercle de la fatalité en offrant, à une de ces personnes, un hébergement et le soutien d’une assistante sociale. Les donateurs
s’engageaient sur un coureur ou sur l’équipe pour des montants et selon des défis que chacun était libre de définir.
Près de 10 000 € de défis Par exemple, verser 100 € si tous les membres de l’équipe commencent le marathon et 10 € supplémentaires pour chaque personne terminant la course, soit un engagement de 160 € maximum. Mais bien d’autres défis étaient envisageables. Un beau challenge qui a permis à ce jour de récolter la somme de 9 943 €, et d’atteindre plus de 11 000 € de promesses de dons. Grâce à cette somme, ce n’est pas une, mais plusieurs personnes qui vont pouvoir se réinsérer plus facilement dans la société.
L’UGSEL : les élèves mobilisés contre la pauvreté L’UGSEL (Union générale et sportive de l’enseignement libre), la Société de Saint-Vincent-de-Paul et Enfants du Mékong ont lancé du 2 au 5 avril 2013 un projet éducatif « Jeu ici, Toi ailleurs » auprès des écoles.
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Les cahiers
multiplié les actions : « bols de riz », collectes, ateliers chants, danses ou calligraphies, jeux de société, activités sportives…
Jouer contre la pauvreté Chacun des enfants a pu donner le meilleur de lui-même, collaborer en équipes et apprendre à respecter ses partenaires de jeux, agir contre la pauvreté. Ils ont découvert, grâce aux témoignages des bénévoles, que chacun peut être attentif à l’autre, que des « lointains » ont besoin de beaucoup, mais aussi des personnes qui vivent à leur porte. Clotilde Lardoux
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es actions solidaires au profit de deux associations ont été mises en place dans les établissements scolaires. Une vingtaine de Conseils départementaux de la SSVP ont ainsi organisé plus de cent opérations à travers toute la France et les DOMTOM. Dans le CD d’Angers, des écoles ont collecté des produits d’hygiène ; dans celui du Calvados, l’équivalent d’une camionnette de denrées ainsi qu’un chèque ont été remis à la SSVP ; à Châteaubriant, des élèves ont revendu des jouets et ont offert les bénéfices à l’association, etc. Pleins d’imagination, les Vincentiens ont
Pleins d’imagination, Vincentiens et élèves se sont mobilisés.
Compta’ SSVP, une richesse pour les CD
2 La presse parle de nous
Danielle Rebeyrotte © SSVP
C
e sont plus de soixantecinq trésoriers départementaux qui ont participé aux formations décentralisées de comptabilité associative, proposées par la SSVP. L’objectif de ces formations était à la fois de présenter les principes de base de la comp- La SSVP forme tabilité associative, et de 65 trésoriers au nouveau logiciel. découvrir le nouveau logiciel Lancé depuis plus de cinq mois, l’outil est de comptabilité Compta’SSVP Conférence. aujourd’hui utilisé par plus de trois cent cinUne formation progressive quante Conférences ! La version adaptée « La formation est progressive et le logiciel aux CD sera lancée en juin. est vraiment adapté aux néophytes, ce qui Les Conseils départementaux qui souest une bonne chose pour nos trésoriers haitent s’inscrire ou bénéficier d’un accomde Conférences », souligne René-Domi- pagnement spécifique peuvent contacter le nique Chrétien, trésorier de Saône-et-Loire. siège de la SSVP. David Barreteau
Brèves
nouvelle présidente du CD 19 (Corrèze) À la suite d’une rencontre à la messe en Corrèze, où elle prend sa retraite, elle a décidé d’ouvrir ses yeux et son cœur aux personnes au bord du chemin : une belle et bonne activité pour la paix de l’âme. Son objectif : faire de son mieux pour rajeunir les Conférences.
Gilles de Moncuit nouveau président du CD 35 (Ille-et-Vilaine) Après une carrière militaire suivie d’une mission à « Solidarité Défense », il a rejoint une Conférence dans le 78, puis dans le 35, où on lui a confié la présidence. Son objectif : continuer l’action de ses prédécesseurs et découvrir les pauvretés cachées, par pudeur ou dignité, afin d’aider à s’en relever, à sortir de l’assistanat.
Patrick d’Arcangues
x 20-21/04/2013
x 03/05/2013
À l’occasion du bicentenaire de Frédéric Ozanam, un dossier spécial consacré au bienheureux. Retrouvez aussi le portrait d’un couple de jeunes bénévoles vincentiens et l’interview du président national.
Dans le cahier central, une double page intitulée « L’héritage si actuel de Frédéric Ozanam » recueille les témoignages d’une douzaine de jeunes bénévoles de la SSVP qui visitent des personnes isolées, des étudiants dans le besoin, etc.
L’émission Hors les murs nous invite à redécouvrir la figure de Frédéric Ozanam à travers un portrait spirituel. On y ressent la modernité de son message, grâce à des interviews et reportages sur les actions de la SSVP et surtout des jeunes Vincentiens.
Famille Chrétienne
La Croix
KTO TV
Il y a huit ans, cet ancien responsable de magasins, puis formateur en RH et conduite de projet, a découvert la charité mise en œuvre au quotidien, grâce à un ami, président de Conférence, et avec Françoise, octogénaire pleine d’entrain, par la visite à domicile. Avec six Conférences, le défi de la charité est immense dans le CD.
n°204 - juin-juillet 2013 - Les cahiers Ozanam
© DR
x 20/04/2013
nouveau président du CD 77 (Seine-et-Marne)
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Service Face à face
Il était une fois… une journée intergé Fin avril 2013, trois cent cinquante enfants et seniors, bénéficiaires de Conférences de la Société de Saint-Vincent-de-Paul, des petits frères des Pauvres ou du Secours Islamique, se sont retrouvés pour une journée inoubliable à Disneyland Paris. Cette journée intergénérationnelle, financée par le service mécénat d’EuroDisney, a vite pris des airs de conte de fées. Par Capucine Bataille
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Jimmy, 74 ans (et demi) – Paris Je suis accompagné par les petits frères des Pauvres depuis l’année 2000. Habituellement, nous faisons des petites sorties et des activités de loisirs, mais nous restons toujours dans Paris. Nous faisons, par exemple, des ateliers dessins, de la photo et nous avons aussi le droit à en deux sorties par mois. vraiment du bi « Cela me fait enfants ! » Mais cette journée à Disneyland, ça n’a de voir des rien à voir avec ce que nous faisons d’habitude. C’est la première fois que j’y viens ! Ce matin, j’ai pu participer à la chasse au trésor. Dans mon équipe, il y avait six gamins, tous venus avec le Secours Islamique France (SIF). Cela me fait vraiment du bien de voir des enfants ! C’est bien moins emm… que les adultes ! Je suis très heureux d’être là.
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Les cahiers
Ozanam - - n°204 - juin-juillet 2013
ix heures du matin, dimanche 28 avril, trois cent cinquante enfants et seniors, tous aussi intimidés les uns que les autres, se retrouvent devant le château rose bonbon du monde féérique de Disneyland. Accompagnés par la Société de Saint-Vincent-de-Paul, les petits frères des Pauvres et le Secours Islamique, tous sont parés pour passer ensemble une belle journée intergénérationnelle dans le parc de loisirs, en Seine-et-Marne. Quelques minutes pour faire connaissance, des liens se tissent déjà, et c’est parti pour une grande chasse au trésor en neuf étapes au « Pays des contes de fées ». Après un rapide déjeuner dans une salle réservée spécialement pour les accueillis, petits et grands s’échappent à nouveau pour profiter ensemble de leur après-midi. Malgré une météo mitigée, les mines réjouies des enfants et des personnes âgées, qui découvrent le parc pour la première fois, traduisent leur joie de sortir, le temps d’une journée, de leur quotidien difficile ou de leur solitude.
nérationnelle à Disneyland Océane et Anne, presque 8 ans et déjà 9 ans – Honfleur Océane : Nous sommes parties ce matin de Honfleur, avec le bus de la Société de Saint-Vincent-de-Paul. Nous nous sommes levées à six heures du matin, mais on n’est même pas fatigué. Anne : Maman nous a fait la surprise ! « On n’est C’est une jour pas déçu ! Elle ne nous avait pas dit où on allait. née magique… » C’est la première fois que nous venons à Disneyland. Océane : Ce matin, nous avons fait une chasse aux trésors. Les personnes âgées de notre équipe étaient sympas, on s’est bien amusé. Anne : Elles étaient surtout très fortes aux questions ! Océane : Maintenant, j’espère que nous allons voir des princesses. J’aimerais voir ma préférée, Cendrillon, parce qu’elle a une longue robe… Anne : Moi je préfère Arielle ! Parce que c’est une sirène ! Après je vais aller faire des manèges qui vont très vite. Je n’ai même pas peur ! En tout cas, on n’est pas déçu ! C’est une journée magique…
Je vis seule chez moi, et des bénévoles des petits frères des Pauvres viennent me rendre visite. C’est agréable. Il y a Kamel, qui vient toutes les semaines, et un couple, qui vient tous les quinze jours. C’est important pour moi d’avoir quelqu’un qui est là pour m’aider moralement. Pour aujourd’hui, c’est la première fois que je viens à Disneyland. C’est un décor féérique, mais je suis un peu perur tous po t » t n ie due ! La journée a commencé avec la chasse au trésor. Au a t dispu oulan « Ils se on fauteuil r début, les enfants de mon équipe étaient un petit peu intimirm pousse dés. Mais ça n’a pas duré ! Quelques minutes après, ils se disputaient tous pour pousser mon fauteuil roulant (rire). C’était très agréable. Vous savez, je n’ai pas de petits-enfants… Ce genre de journée intergénérationnelle devrait être organisée plus souvent ! Ces petits bouts de choux qui courent partout, ça fait du bien. C’est déjà la moitié de la journée… Et je suis prête à attaquer l’après-midi !
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Andrée, 82 ans (mais chut, c’est un secret) – Paris
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Service Initiatives
Une fraternité nouvelle est en marche ! Bénédicte Jannin, responsable de la communication de la SSVP, chargée de la campagne de lutte contre la solitude, nous raconte l’histoire de l’édition 2013. Dans un monde en crise, pourquoi choisir de faire passer un message si paradoxalement positif ?
N
e nous voilons pas la face : c’est la crise. Rien ne va plus, le monde ne tourne plus très rond et la solitude s’installe tranquillement au cœur de la société. Et en attendant des jours meilleurs, nous nous replions sur nousmêmes, nous développons « l’entre nous » en famille, entre amis, entre collègues. Parce qu’on s’y sent en sécurité et on y est bien. Cela n’est pas facile de donner aujourd’hui. Donner de son temps, de sa patience, de son énergie. Cela n’est pas facile non plus de partager. Partager son temps, son argent, son confort, son réseau. Cela n’est pas facile de dire qu’une fraternité nouvelle est en marche. Il faut être sacrément optimiste pour l’affirmer.
Ainsi, notre campagne engage les bénévoles et les donateurs dans ce même projet d’espérance. Ensemble, changeons le monde dans le bon sens ; ensemble, une société nouvelle est possible. Car près de chez vous 17 000 bénévoles apportent plus de chaleur dans le quotidien d’une personne fragile ou isolée.
que les bénévoles de la SSVP sont à l’œuvre, et ce depuis 180 ans, pour relever l’homme dans cette essence sociale fondamentale. Pour être quelqu’un, il faut au minimum quelqu’un d’autre. Cela n’est pas pour rien que les visites à domicile se multiplient et se développent dans notre association.
Une fraternité nouvelle est en marche
La charité attrayante
Le psychologue Sébastien Dupont dans un article La solitude, condition de l’individu contemporain, rappelle que « c’est par autrui et avec autrui que l’homme advient, existe, se construit, s’épanouit et acquiert éventuellement quelque liberté et quelque autonomie ». Ne soyons pas timides et osons dire
Nous voulions l’espérance Mais à la SSVP nous croyons ! Et de surcroît, nous agissons ! Parce que nous avons l’intime conviction que la fraternité et la charité sont la solution à la lutte contre la solitude. C’est pourquoi nous devons le clamer haut et fort, et pour la neuvième année consécutive nous avons lancé notre campagne nationale contre la solitude le 9 juin dernier. Nous voulions l’espérance. Nous voulions la joie. Et l’agence de communication 31ème arrondissement nous a mis au défi.
La joie d’être bénévole. La joie de donner et, par la même occasion, celle de recevoir. Parce que juste à côté de nous la solitude s’est installée. Mais avec les petits pas que nous faisons, l’espérance prend toute sa place dans nos quartiers.
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Les cahiers
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Votre don fait notre action
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Nous avons osé relever le défi. Loin du misérabilisme, nos visuels joyeux et colorés placent l’espoir au cœur de la communication. Ils rendent la charité de proximité plus attrayante et à portée de main. La SSVP peut être fière de ses 180 ans d’histoire et elle affirme aujourd’hui qu’elle est à l’œuvre dans un esprit de fraternité renouvelée.
Actus juridiques et sociales
L’été approche, les vacances s’organisent Ce sont les derniers préparatifs avant le départ des groupes pour la mer, la montagne ou la campagne. Mais attention, faire partir un groupe de personnes en vacances ne s’improvise pas ! Voici quelques rappels quant aux règles à respecter lorsque l’on accompagne des enfants ou des adultes pour des vacances ou en journée de loisirs. Par Sophie Rougnon Encadrement d’adultes Il n’existe pas de normes spécifiques pour l’encadrement d’adultes dépendants ou en situation de précarité. Des professionnels salariés et des bénévoles peuvent ainsi constituer l’équipe d’encadrement. La présence de bénévoles contribue au taux d’encadrement du séjour, soit en complément des équipes salariées, soit comme pilier de l’encadrement du séjour. Mais il faudra bien sûr veiller à compenser les heures supplémentaires effectuées par les salariés pendant ces séjours. L’association, organisatrice du séjour, sera couverte par son assurance responsabilité civile. Avant le départ, il est important de se rapprocher de son assureur pour vérifier les détails du contrat.
Encadrer des enfants ne s’improvise pas !
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Encadrement d’enfants Pour les mineurs, les normes d’encadrement de groupe sont très précises.Il faut prévoir un animateur pour douze enfants, ou un animateur pour huit enfants de moins de six ans. Au moins 50 % des animateurs doivent être titulaires du BAFA (brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur) ou d’un diplôme équivalent. Le directeur du séjour doit être titulaire du BAFD (brevet d’aptitude aux fonctions de directeur), stagiaire BAFD, titulaire ou stagiaire d’un titre ou diplôme équivalent. Les organisateurs sont tenus de vérifier que toutes les personnes encadrantes ne figurent pas sur la liste des personnes fai-
sant l’objet d’une mesure d’interdiction. Les organisateurs demanderont aux parents de l’enfant mineur de signer une autorisation de séjour.
Le point sur
Réduction d’impôt de 75 % Par l’arrêté du 25 février 2013, la Société de Saint-Vincent-de-Paul est habilitée au niveau national à recevoir des contributions publiques destinées à la mise en œuvre de l’aide alimentaire. Cette habilitation confirme le caractère d’organisme
d’aide aux personnes en difficulté portant secours aux plus démunis à travers la fourniture gratuite de repas. C’est pourquoi les donateurs de la SSVP pourront bénéficier, sans ambiguïté, dès 2013 d’une réduction d’impôt de 75 % pour les dons en faveur de la SSVP, dans la limite de 521 € en 2013, puis 66 % au-delà de cette somme, et ce, dans la limite de 20 % du revenu imposable.
Exemples : Un don de 100 € ne coûte en réalité au donateur que 25 €. Un don de 500 € ne coûte au donateur que 125 €. Bertrand Decoux
Pour aller plus loin : Site de la Direction générale des finances publiques : http://www2.impots.gouv.fr/documentation/
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Service Actus juridiques et sociales
Les 10 clés d’une bonne écoute « Celui qui a des oreilles qu’il entende… » Oui, mais. Il ne suffit pas d’avoir des oreilles pour écouter. Encore faut-il savoir se mettre à l’écoute et pour cela, prendre le temps de se former. Quelques conseils avisés pour aider à se rendre réellement disponible. Par Benoît Pesme
1 Commencer par se taire
7 Être un écoutant actif
Le meilleur moyen de laisser de la place à son interlocuteur est de lui laisser l’espace pour prendre la parole.
Pour garder le fil, reprenez les mots importants de votre interlocuteur avec des relances comme « quand vous dites… », « Je reprends le mot que vous venez de dire », etc.
2 Adopter une attitude d’écoute Tournez-vous vers votre interlocuteur, ni en retrait ni trop en avant. Regardez-le.
8 Préférer les questions aux affirmations
3 Créer une atmosphère d’écoute
Plutôt que de dire à quelqu’un ce qu’il doit faire, invitez-le à réfléchir sur ce qui se passe et écoutez-le.
Laissez à l’autre le temps de respirer et de structurer ses pensées. Respectez sa parole. Il n’y a rien de pire que de parler à quelqu’un qui manifeste de l’impatience.
4 Rester concentré Respirez calmement pour vous détendre et restez concentré. La qualité de votre écoute dépend de votre réceptivité.
5 Garder un esprit ouvert Ne jugez pas ce que dit votre interlocuteur. Vivez le moment présent, et pensez à la question que vous allez lui poser, pour l’aider à se dire.
6 Être curieux
9 Éviter de combler les blancs Ils sont nécessaires pour faire cheminer la pensée, vivre ses émotions, mais veillez à ne pas laisser s’installer un silence trop long qui risque de mettre votre interlocuteur dans l’embarras.
10 Accepter de ne pas être tout-puissant Votre rôle n’est pas de résoudre ses difficultés à sa place, mais simplement de montrer par votre écoute que vous l’estimez, qu’il vaut la peine d’être aimé. Ainsi, la personne peut retrouver confiance en elle et l’énergie pour faire face.
Valorisez ce que dit votre interlocuteur. Montrez que sa parole a de l’importance pour vous.
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Les cahiers
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Entretien
Marie Vasti,
Présidente de SOS Chrétiens Marseille Provence
C
haque jour, au bout du fil, les écoutants se relaient. Le motif des quelque 8 000 appels annuels ? D’abord, la solitude. Mais aussi des problèmes familiaux, des idées suicidaires, le chômage, la violence, les agressions sexuelles, l’alcoolisme… Le plus important, c’est d’abord d’être là. Il faut renoncer à soi pour être dans une attitude de disponibilité et d’ouverture d’esprit. En tant que bénévoles, nous ne sommes pas là pour donner des conseils ou faire la morale, même si ce n’est pas toujours simple de garder une certaine distance. L’écoute parfaite n’existe pas. Il faut accepter le fait d’être impuissant. C’est une école d’humilité ! Derrière notre téléphone, nous sommes solitaires. Les groupes de parole entre bénévoles nous permettent de partager les difficultés. Sans faire aucun prosélytisme, l’étiquette chrétienne peut aussi servir d’entrée en matière pour les appelants. Une personne nous demande une prière. Cela l’amène à parler d’elle et de sa souffrance. Certains nous demandent de prier pour eux ou avec eux. Souvent, les personnes qui appellent partent sur quelque chose d’anodin. En parlant librement, elles arrivent au cœur du problème. On perçoit très bien le moment où l’appelant se sent entendu : « Oui, c’est vraiment ça ! » Contact : Centre Le Mistral, 11 impasse C. Flammarion - 13001 Marseille Tél. 04 91 70 91 00
Jennifer Le Garrec : « Je ne suis pas
une technicienne avec sa boîte à outils » Jennifer Le Garrec travaille depuis cinq ans comme conseillère en économie sociale et familiale à l’Accueil Frédéric Ozanam de Lille. Elle témoigne de son désir d’aider les gens, de mettre ses compétences à leur service, de leur transmettre ses connaissances. Propos recueillis par Capucine Bataille
Créer du lien social ?
C’est effectivement un des objectifs de mon métier. À l’Accueil Ozanam, nous sommes deux conseillères, et ma collègue anime des ateliers collectifs. Il y a ceux de cuisine, où les participantes confectionnent des repas bons et pas chers, qu’elles rapportent chez elles pour les déguster en famille, ceux de couture et d’autres encore. Ces ateliers sont surtout des prétextes pour échanger et créer du lien social avec les participants. De mon côté, je reçois les gens en entretien individuel, pour évaluer
La mission principale des bénévoles est d’être disponible pour l’écoute.
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Quel est le rôle d’une conseillère en économie sociale et familiale ? C’est un métier très mal connu. Pour beaucoup, un conseiller en économie sociale et familiale se limite à aider les gens à gérer leur budget. Mais c’est bien plus complet ! C’est très ancré dans le quotidien : on s’intéresse à tout ce qui touche à la maison, le budget bien sûr, mais aussi la cuisine, la nutrition, la couture, etc. Au fond, nous avons des compétences dans des domaines très variés. C’est passionnant ! Notre but est de donner aux gens tous les outils nécessaires pour s’en sortir, et de créer avec eux du lien social. L’objectif de mon métier, c’est, comme l’indique le nom, le conseil : leur donner les meilleures options possibles pour améliorer leur situation, tout en les laissant faire leurs propres choix.
avec eux leur situation, leurs besoins, leurs difficultés, leurs compétences. Mais comment les gens en viennent-ils à franchir votre porte ?
Principalement par le bouche-à-oreille, mais aussi sur les conseils d’assistantes sociales, de la mairie, d’autres associations qui connaissent bien l’Accueil, etc. Pour la majorité, ce sont des femmes, mères célibataires et allocataires du RSA. Mais il y a aussi des personnes au chômage, des retraités… Je les aide et les guide pour retrouver un emploi. On essaie aussi de les accompagner, de les sortir de leur solitude, car souvent la famille n’est pas toujours le meilleur interlocuteur lorsque l’on traverse ce type de difficultés.
Vous jouez aussi le rôle de psychologue et de conseillère conjugale ?
Il y a de l’écoute. Cela représente 90 % de mon travail. Je dois m’asseoir et prendre le temps d’écouter les personnes quand elles me confient leurs malheurs et leurs inquiétudes. Mais je ne suis pas une psychologue. J’ai choisi l’humain. Je ne suis pas non plus une simple technicienne avec sa boîte à outils, qui gère des dossiers ! Proposer un service de qualité est difficile, car il y a de plus en plus de monde. Heureusement, les bénévoles sont un très bon relais. Leur mission principale est d’être disponible pour l’écoute. Et nous restons à leur disposition s’ils ont repéré quelque chose que nous n’avons pas vu. Nous travaillons main dans la main, salariés et bénévoles.
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Service International
Ascension : Verso l’alto !
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Lors de l’Ascension, plus de quarante jeunes Vincentiens sont partis pour cinq jours de vie fraternelle à Turin. Un seul objectif : marcher sur les pas du bienheureux Pier Giorgio Frassati et franchir avec lui des sommets : Verso l’alto* ! Par Emmanuel Schielin, Conférence jeunes de Saint-Jean-Eudes – Paris XIIe.
Quarante jeunes Vincentiens à la motivation inébranlable.
M
a motivation s’était précisée au fur et à mesure que nous préparions l’aventure. D’un côté se présentait l’occasion de découvrir l’Italie et ce Pier Giorgio Frassati, bienheureux jeune Vincentien dont j’avais déjà entendu parler à maintes reprises, par mon engagement de maraudeur à la SSVP. D’autre part, c’était également une chance de mieux connaître certains et de rencontrer d’autres, dans cette communauté joyeuse de Vincentiens venus de toute la France ! Enfin et surtout, ce séjour accompagné par le père Emmanuel Coquet, notre aumônier, promettait d’être riche en temps spirituels, de ceux que l’« on veut toujours faire, mais dont on n’a jamais le temps ».
La route tracée vers le ciel Et je n’ai pas été déçu ! La beauté des sites qui ont jalonné notre parcours à la suite de Pier Giorgio, la météo, l’ambiance du groupe, l’organisation... Tous les ingrédients
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Les cahiers
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étaient réunis pour un séjour détonnant ! De Turin à Pollone et au sanctuaire d’Oropa, nous avons découvert une Italie vivante et riche de son histoire, où les clochers côtoient les montagnes, et la route tracée vers le ciel par Pier Giorgio. Une vie emplie de charité, au service des plus démunis, ancrée dans le Christ : « Jésus me rend visite chaque jour par la communion, et moi je la Lui rends modestement en visitant ses pauvres. » Une vie également pleine de joie, où toute tristesse était bannie : « Un catholique ne saurait manquer de gaîté ; la tristesse doit être bannie des cœurs catholiques ; la douleur n’est pas la tristesse, qui est une maladie, la pire de toutes. » Bref, une vie qui inspire ! De tous ces aspects, celui de la foi m’a particulièrement touché, et la présence dans notre
groupe de nombreux chrétiens convertis, à la foi vive et affermie, y est sûrement pour quelque chose.
Un Vincentien bon vivant Le jeune Vincentien italien était aussi connu pour son côté bon vivant : amateur de cigarettes et de cigares — j’essaie donc depuis peu de m’y mettre —, alpiniste plutôt coriace, il gravissait des sommets avec ses amis. Nos mollets s’en souviennent ! Enfin, le jeune homme n’hésitait pas à proclamer « une foi à défendre, une espérance à rejoindre ». Dans un monde où aller simplement à la messe toutes les semaines peut paraître étrange, voilà un message plein de force, et toujours d’actualité. Ces quelques lignes sont trop peu nombreuses pour dire toute la joie que nous avons eue à vivre ensemble ces cinq jours, pour remercier tous ceux qui ont contribué à la beauté de ce séjour. Je conclurai par cette forte ambition de Pier Giorgio Frassati, comme un appel à la joie, et à toujours plus de charité envers son prochain : « À nous, il n’est pas permis de vivoter ; vivre est notre devoir ! Trêve donc à toute mélancolie ! » * Vers le haut ! (devise de Pier Giorgio Frassati)
Carnet de route
À l’école de Vung Tao, les enfants sont avides de connaissances.
Ozanam & la SSVP Vietnam
à cuisiner. ennent aussi Les élèves appr
L’hiver dernier, les responsables du pôle pays Vietnam se sont envolés pour l’Asie, à la rencontre de confrères et consœurs vincentiens. Récit de voyage. Texte et photos par Maryse Giraud-Renucci
L
e 22 janvier 2013, la France grelotait sous un manteau de neige quand notre avion a décollé pour nous emmener au Vietnam. Nous étions trois Vincentiennes : Geo Yézou, Nadine Rinaldi et moi-même accompagnées par le père Guy Casseron, archiprêtre de la Cathédrale de Toulon Notre-Dame-de-la-Seds. Après onze heures de vol, nous voilà à Hô-Chi-Minh-Ville (anciennement Saïgon), dans une chaleur moite de 28 °C où nous avons retrouvé Jean-Noël Gallois, animateur de la Commission Internationale.
Maryse Giraudrenucci membre du CA de la SSVP
Dès le lendemain, nous prenions la route de Vung Tao, ex-Cap Saint-Jacques. Nous y avons retrouvé une petite communauté de Filles de la Charité, qui dirige une école des enfants de la rue.
Espérer avoir un métier C’est la seule chance ici pour sortir de la misère : apprendre à lire, à écrire et espérer avoir un métier. De retour à Hô-Chi-Minh-Ville, nous sommes allés visiter l’ouvroir des Filles de la Charité, financé en partie par le CD du Var,
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Service Carnet de route qui regroupe plus d’une trentaine de brodeuses, dont les doigts agiles ornent les chasubles. Sœur Béatrice, ancienne visitatrice, nous parle de son projet de construction de deux écoles maternelle et primaire dans une nouvelle ville en construction, car au Vietnam les villes poussent comme des champignons ! Cette construction d’écoles donnerait une image positive de la représentation catholique dans cette nouvelle cité.
Amélie et Frédéric au Vietnam Nous avons ensuite pris la direction du Mékong, à Vinh Long, afin de visiter l’école Amélie et Frédéric Ozanam et la maison des grands-mères, financées en partie par la SSVP France et les CD des Yvelines et du Var. Notre comité d’accueil était composé des représentants des différentes Conférences de la ville de Can Tho et des bourgs voisins, des Équipes Saint-Vincent (AIC, très nombreuses au Vietnam, plus importantes encore que les Conférences composées essentiellement d’hommes). Comme nous étions samedi, les enfants n’étaient pas présents, mais nous avons pu inspecter les classes et constater avec admiration la propreté des lieux : rangement impeccable des jouets, cahiers, etc. Ce sont les écoliers (orphelins, enfants des rues ou très pauvres) qui assurent le ménage de leur classe, dont ils sont très fiers. Les repas sont pris sur place, ainsi les enfants rentrent chez eux l’estomac bien rempli. Le coût annuel de la nourriture s’élève environ à 3 200 €€, soit 1€ par repas et par enfant. Sœur Armelle nous lance un appel pour prendre en charge ce coût.
La petite communauté de Vinh Long : des institutrices pour l’école et des infirmières pour les grands-mères.
La maison des grands-mères Nous visitons ensuite la maison des grands-mères. Cette maison de retraite pour douze femmes très âgées sans famille ni ressources est une première au Vietnam. Ici aussi, tout est d’une propreté exemplaire ! Des Vincentiennes s’occupent bénévolement du ménage et de la confection des repas. Pour prendre soin de ces vieilles dames, il faut acheter nourriture, médicaments, produits d’hygiène à un coût important de 8 400 € par an : somme qui tourmente aussi Sœur Armelle. Retour à Hô-Chi-Minh-Ville, où nous sommes reçus dans la petite communauté de Sœur Marthe Dê pour assister à la messe de fin d’année, car nous sommes à la veille de la fête
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À la maison des grands-mères, douze femmes âgées sont accompagnées avec douceur.
du Têt (année du serpent). Elle est célébrée par un prêtre de la Mission, père Joseph Tran Van Trung, qui organise les rassemblements de la grande famille vincentienne : Lazaristes, Filles de la Charité, Conférences Saint-Vincentde-Paul, Équipes Saint-Vincent et les jeunes « Enfants de Marie ». Après la messe, les jeunes enthousiastes nous ont entraînés dans une fête : chants, danses et repas festif. C’est sur cette image d’un Vietnam jeune, dynamique, plein d’espérance et de foi que nous rentrons en France.
Les « Enfants de Marie » de Hô-Chi-Minh-Ville touchent les visiteurs par leur joie.
Des Conférences et la SSVP France financent l’école Amélie et Frédéric Ozanam de Vinh Long.
À l’école Amélie et Frédéric Ozanam, les petits élèves font leurs premiers pas.
«C’est sur cette image
d’un Vietnam jeune, dynamique, plein d’espérance et de foi que nous rentrons en France.
»
Le Vietnam est en pleine expansion. Conversions et vocations se multiplient, mais il y a encore beaucoup à faire.
Les Filles de la Charité accueillent les enfants de la rue dans leur école de Vung Tao.
7 % de la population sont catholiques pratiquants et 77 % de Vietnamiens avouent ne pas avoir de religion. Cette population catholique vietnamienne est la seule à venir en aide à une population (veuves âgées, isolés, enfants des rues…) dont le gouvernement ne s’occupe pas. C’est ce qui fait sa force et elle compte sur notre aide. À notre retour, nous avons retrouvé une France enneigée, mais nous avions chaud au cœur de tout ce que nous avions vu.
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Spiritualité Réflexion
«Heureux les pauvres» Choisi comme saint patron par le Saint-Père, imité par Frédéric Ozanam qui, rappelons-le, était tertiaire franciscain, Saint François d’Assise bouscule notre approche de la pauvreté. Sa spiritualité en fait pour nous, chrétiens et Vincentiens, un compagnon de chemin, un grand frère dans notre démarche envers les plus pauvres. La vie du poverello d’Assise nous crie : « Heureux les pauvres de cœur. Le royaume des cieux est à eux ! » Par Jérôme Delsinne, c.m.
à
vingt et un ans, en novembre 1202, François s’engage avec le reste des notables d’Assise contre les troupes de Pérouse. Il est fait prisonnier à la bataille de Ponte San Giovanni et passe une année en prison. Libéré à prix d’or grâce à son père, François s’en retourne honteux d’avoir été vaincu. Il doit alors calmer ses ardeurs, puis traverse une phase de maladie de deux ans. François vient de faire l’épreuve de la durée et de la passivité, de l’échec et de la souffrance : il a découvert certaines de ses limites. De plus, si son monde extérieur change, l’image qu’il se fait de Le renoncement aux biens, fresque de Giotto di Bondone (Assise, Basilique Saint-François)
© Luisa Ricciarini/Leemage
Jérôme Delsinne conseiller spirituel national de la SSVP
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lui-même en est affectée : tout tournait jusque-là autour de lui, même dans les geôles pérugines. Le monde tourne désormais sans lui. On n’est pas loin de la dépression. Enfin, ce changement se marque par une perte du charme, du goût – un sens particulièrement important pour lui – et le stupéfait : il ne comprend pas ce qui lui arrive.
Découvrir sa propre fragilité François commence alors à changer. Sa faiblesse physique ne lui ouvrirait-elle pas les yeux du cœur sur sa propre fragilité, celle de ce corps, de cet égoïsme que nous nous devons toujours de tenir captif comme François nous y encourage ? Quoi qu’il en soit, le corps sera un lieu sur lequel François travaillera toute sa vie, avec les excès qu’on lui connaît, mais également toute la dimension d’apprivoisement de ce « loup* » intérieur qui qualifie l’ascèse dans la vie chrétienne. Mais François continue à rêver de s’élever au-dessus de sa condition « bourgeoise » : le voilà un instant oublieux de la leçon paternelle qu’il vient de recevoir. Une nouvelle occasion se présente au printemps 1205 : il s’équipe pour rejoindre les troupes papales de Gauthier de Brienne. Il va vivre une conversion de l’idéal et elle ne vient pas que de lui. Le jeune homme est riche et un peu « m’as-tu vu », mais il est habité d’un profond souci de vérité qui lui fait donner ses armes à un chevalier pauvre. Au fond, il veut devenir chevalier et ne pas seulement le paraître. Dans les deux songes, Dieu le travaille par une pédagogie du désir : il acquiesce – « Que veux-tu que je fasse ? » – puis il entre
Le don du manteau au pauvre, fresque de Giotto di Bondone (Assise, Basilique Saint-François)
© Electa/Leemage
progressif sur le Christ. Solitude, retrait et silence sont également mis en avant. François, dans sa caverne, s’enfouit dans la terre comme dans une matrice. Il ne vit pas là un temps de béatitude, mais de profonds combats qui le déchirent. Il rumine son péché, perçoit son incapacité à avancer, mais semble également découvrir que quelque chose continue à le tirer en avant. Il est là au cœur de l’expérience spirituelle dans ce qu’elle peut avoir de plus paradoxal : l’épuisement et l’incapacité à avancer du fait de l’ouverture du regard sur le réel de nous-mêmes, inséparable de cet appel profond à avancer. Même quand plus aucune voix ne se fait entendre, le fait même de durer dans le questionnement est signe que Dieu appelle silencieusement. François ne sait pas où il va.
dans l’obéissance – « Ce qu’on te dira de faire » –. Enfin, le travail du corps continue : François est fiévreux lors du premier songe, maladif lors du second.
Faire ses premiers pas de créature François nous montre le caractère central d’un véritable dialogue, avec une écoute, une altérité : il accepte de se recevoir d’un autre et fait ses premiers pas de créature. La joie est un signe de la conversion et de l’œuvre de Dieu, mais pas toute joie. Celle de François à la fin du second songe ne le fait pas sortir de lui-même. Elle se place justement là où tous les éléments extérieurs devraient l’amener à la honte et à l’embarras. Elle apparaît dans l’action résolue et pas seulement dans des chimères, des plans sur l’avenir. Avec son retour à Assise s’ouvre une période d’intense recherche et d’intériorisation pour François qui va s’étendre sur toute l’année 1205 : entrée dans la prière et centrage
«En se rapprochant de ces exclus, François devient lui-même un exclu, un marginal.» Il sent les résistances en lui et, peu à peu, il est conduit à placer toute sa confiance en Dieu, à s’abandonner.
Deux rencontres célèbres Deux rencontres nous sont célèbres : il s’agit de celle du lépreux et de celle du crucifix de Saint-Damien. Deux expériences extérieurement différentes – l’une éthique, l’autre spirituelle – mais qui se répondent pour former un même événement dans la vie de François. François donnait déjà largement aux pauvres. C’était un jeune homme prodigue dans l’esprit courtois : il montrait ainsi sa grandeur d’âme. Mais là, en rencontrant le lépreux, il s’engage dans une démarche toute différente : il se rend
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Spiritualité La prédication aux oiseaux, fresque de Giotto di Bondone (Assise, Basilique Saint-François)
– « faire miséricorde » – suivi d’une rupture de vie – « dire adieu au monde ». Une expérience que François relit comme l’œuvre de Dieu en lui. En allant parmi les lépreux et en les soignant de manière régulière, en se rapprochant de ces exclus, François devient lui-même un exclu, un marginal. Cette fraternisation l’oblige à une communauté de destin avec ses « frères chrétiens » : il doit quitter le monde.
© Luisa Ricciarini/Leemage
Se sentir devenir tout autre
présent parmi les pauvres et adhère à ce mouvement de la miséricorde fait de sensibilité à la souffrance et de compassion qui a marqué toute la fin du XIIe siècle et qui a amené à la fondation d’hospices, de léproseries. Et il vit là un changement intérieur radical : il entre dans une fraternisation profonde avec les pauvres et découvre en eux des frères. Cette expérience entraîne chez lui un agir concret
Anecdote Frédéric Ozanam, auteur de l’ouvrage Les Poètes franciscains en Italie au treizième siècle, traducteur français et commentateur spirituel des Fioretti, a été marqué par cette vie toute donnée aux frères et à Dieu. Il fut affilié à l’Ordre séculier de Saint-François à la suite d’une lettre qu’il reçut du Ministre Général peu de temps avant sa mort et dont il parla lui-même avec fierté : « Le Père Général me met au nombre des bienfaiteurs de la Famille franciscaine et m’associe aux mérites des Frères mineurs qui travaillent et prient par tout le monde, ce n’est pas le moins touchant de mes titres », cf. Missel franciscain, Éd. Franciscaines.
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Les cahiers
Ozanam - n°204 - juin-juillet 2013
Nous sommes à la fin de l’année 1205 et François « se sentit devenir tout autre », il est « égaré », « stupéfait ». Est-ce le crucifix qui lui a parlé ou une voix intérieure, nous ne saurions trop le dire. Ce qui apparaît certain en revanche, c’est que François a été marqué au plus profond par le crucifié de la petite église : son regard sur Dieu a changé. François découvre Dieu comme il ne l’avait jamais rencontré : dans son incarnation, dans le don total de son amour pour chaque homme. C’est parce qu’il a fraternisé avec le souffrant que François peut être touché par ce Christ qui opère le même mouvement pour nous en se laissant ranger au rang des malfaiteurs. C’est le visage du lépreux que François retrouve sur le crucifix, un lépreux transfiguré par le Père. L’illumination se complète donc d’une ouverture, d’un chemin. Le jeune homme en quête se transmue alors en maçon réparateur d’églises, en mendiant de pierres et de ciment. Il y passe de longs temps à prier et à mûrir cet appel et ce nouveau regard sur le Christ. François a été touché par le lépreux et par le Christ en croix – il a porté les stigmates dans ses mains qu’il a cachés et qui ne furent révélés, d’ailleurs, qu’après sa mort – mais il ne réduira jamais sa vocation au soin des lépreux, ses « frères chrétiens ». Il refusera concrètement en 1220 ce choix restrictif opéré par un frère de son Ordre. L’important reste le mouvement de conversion : son origine divine, le changement de vie qu’il entraîne et la fraternisation avec les plus petits. *Je fais ici référence à l’épisode (chant XXI des Fioretti) de la rencontre et de l’apprivoisement du fameux loup de Gubbio et en fait une lecture spirituelle.
Témoignage
Sœur élisabeth : « Nul n’est trop pauvre
pour n’avoir rien à partager »
Sœur Élisabeth Drzewiecki, sœur de Saint-François d’Assise et membre de l’équipe de la coordination nationale de Diaconia, raconte sa vision d’« une Église pauvre avec les pauvres ». Propos recueillis par le P. Jérôme Delsinne c.m.
Un missionnaire jésuite, élu pape, et qui choisit François comme prénom en référence au poverello, c’est surprenant non ?
« Je porte le nom de François, car je voudrais une Église pauvre, pour les pauvres. » Qu’est qu’une « Église pauvre » selon vous ?
Une Église qui accueille chacun dans sa différence, simplement présente à tous, respectant la dignité de chacun, comme le Christ s’est rendu présent à chacun. Une Église qui écoute jusqu’au bout chacun d’entre nous, particulièrement les personnes dans leurs fragilités, pour y découvrir le Royaume de
© DR
Notre pape François nous a manifesté combien « être proche » est une de ses priorités. Cet homme de foi, élu pape, vivait déjà de cette proximité avec les habitants de son diocèse, au cœur des favelas de Buenos Aires. Il n’hésite pas à entrer en relation, particulièrement avec les plus pauvres. Dans son propre chemin de vie, par cette promiscuité, il a sans doute compris quelque chose du mystère du Christ. Comme saint François d’Assise, il souhaite aujourd’hui nous le transmettre à tous. Il nous invite ainsi à vivre une Église pauvre avec les pauvres, dans une société en crise, à annoncer la bonne nouvelle aux pauvres. Mais ces personnes pauvres ont aussi quelque chose de précieux à nous dire de la part de Dieu. Elles ont des richesses à partager sur le Christ, comme sur la manière dont nous pouvons les aider dans les moments rudes de leurs vies.
Une église qui invite à faire confiance
Dieu à l’œuvre. Une Église qui invite à faire confiance aux uns et aux autres pour que chacun puisse trouver sa place, vers cette communion à laquelle Dieu a trouvé bon de nous inviter. Une Église qui nous rappelle que la joie de vivre ensemble passe aussi par le chemin courageux de la justice et de la réconciliation. Une Église qui aime chacun de manière unique, ressent douloureusement la détresse de ses membres et initie des solidarités nouvelles. Cette Église pauvre vit et partage avec les pauvres, et s’appuie sur eux pour vivre la diaconie.
Après Diaconia 2013, que reste-t-il encore à parcourir pour que l’Église révèle mieux au monde la richesse des pauvres ?
La démarche Diaconia s’est construite à partir « des personnes d’en bas », celles qui discrètement sont au service dans de petites choses. Elle a permis à beaucoup d’entre nous de (re) découvrir que la vie était faite de ces toutes petites choses sans éclat, mais pétries d’attention, d’écoute de l’autre, notamment par les groupes de partage. Par ces actes, c’est le Royaume de Dieu que nous faisons advenir. Le rassemblement a permis d’expérimenter à grande échelle combien il est bon de vivre en frères, lorsque les plus fragilisés ont toute leur place. L’écoute de leur parole, le compagnonnage avec eux nous permettent de penser la vie en société autrement. De plus, il a donné à voir que la solidarité est d’abord une histoire de cœur et de justice, une histoire collective qui part de chacun, quel qu’il soit. Lorsque nous préservons la dignité des petits, nous gagnons un peu plus de dignité pour tous. Enfin, la reconnaissance des plus pauvres et des plus fragiles a montré le chemin pour une reconnaissance mutuelle de tous, y compris dans le respect de la création. L’après-rassemblement est donc une invitation à poursuivre la démarche et à intensifier la vie fraternelle dans nos communautés. Un appel à destination de la société pour qu’ensemble nous osions. La suite est entre nos mains !
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© AGF / Leemage
Spiritualité Contemplation
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Extrait du message du pape François aux Conférences SSVP Inspirez-vous du modèle de foi et de charité incarné par le bienheureux Frédéric Ozanam, durant toute sa vie d’étudiant, puis de professeur. Nourrissez votre service des plus pauvres à la source de l’amour divin, prenant exemple sur le Seigneur Jésus Lui-même. N’ayez pas peur de sortir de vous-mêmes pour regarder avec affection et tendresse les plus pauvres, les plus faibles, les plus petits, et leur annoncer que Dieu les aime, leur apprenant à lire les signes de son amour dans leur vie, et travaillant à plus de justice dans le monde à la lumière de la doctrine sociale de l’Église. En confiant les personnes participant aux célébrations du bicentenaire, ainsi que tous les membres de la Société de Saint-Vincent-dePaul, à l’intercession de saint Vincent de Paul, du bienheureux Frédéric Ozanam et de la bienheureuse Rosalie Rendu, je vous adresse de grand cœur ma Bénédiction apostolique.
À l’occasion du bicentenaire de la naissance du bienheureux Frédéric Ozanam Vatican, 8 avril 2013
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Spiritualité Parole de Dieu Par Juliette Asta, Vincentienne
«M
on fils, accomplis toute chose dans l’humilité » Si, 17-18, 20.28-29
«E
t tu seras aimé plus qu’un bienfaiteur. La condition de l’orgueilleux est sans remède, car la racine du mal est en lui. » « Qui s’élève sera abaissé. Qui s’abaisse sera élevé », reprend Luc (14, 1a 7-14). Il ne s’agit pas d’anéantir ses capacités et ses qualités personnelles, mais de les mettre en œuvre sans vanité ni orgueil. Être orgueilleux, c’est être autosuffisant, c’est fermer ses oreilles aux autres et à la Parole. À l’inverse, dans le mot « humilité » il y a le mot « humus », et l’homme humble garde les pieds sur terre. Il sait que tout ce qu’il possède vient de Dieu et il sait ouvrir ses oreilles : « L’idéal du sage, c’est une oreille qui écoute. » C’est cette humilité qui fait la grandeur aux yeux de Dieu et nous fait aimer de Lui. Sachons imiter en ce sens notre saint Patron : « L’humilité amène à l’âme toutes les autres vertus ; et de pécheur qu’on était, en cela qu’on s’humilie, on devient agréable à Dieu » (Saint Vincent de Paul, XII, 210, 18 avril 1659).
«L
e Seigneur est mon berger, je ne manque de rien »
«C
’est Marie qui a choisi la meilleure part » Lc, 10, 38-42
S
ur la route de Jérusalem, Jésus s’arrête dans un village, invité par deux sœurs, Marthe et Marie. Marthe s’active pour la préparation du repas. Marie, elle « se tient assise aux pieds du Seigneur, écoutant sa Parole ». Marthe, dont on comprend sans peine l’agacement, intervient auprès de Jésus pour demander l’aide de sa sœur : « Cela ne te fait rien ? Ma sœur me laisse seule à faire le service. Dis-lui donc de m’aider. » Loin de répondre à sa demande, Jésus lui dit qu’elle se tracasse trop, « qu’elle s’inquiète et s’agite pour bien des choses. Une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part ». L’évangéliste souligne ici l’importance de l’écoute de la Parole. Ce serait une erreur de vouloir faire de ce texte une opposition entre « vie contemplative » et « vie active », alors qu’il nous met surtout en garde contre soucis et inquiétudes de la vie, de nos actions, en oubliant l’essentiel : l’accueil de la Parole de Dieu. Seigneur, nous sommes souvent débordés par les soucis de la vie quotidienne et nos diverses activités. Apporte-nous ton aide pour être à la fois Marthe et Marie et savoir garder un juste équilibre entre la prière, l’écoute de la parole et notre action auprès des plus pauvres.
Ps 22, 1-2ab, 2 c-3, 4, 5, 6
© Didier Descouens
Q
uelle fraîcheur que ce psaume plein d’optimisme ! Relisons-le en toute occasion, dans la joie comme dans la peine. Il nous redit la confiance que nous devons mettre dans le Seigneur, ce berger si proche que l’on peut tutoyer : « Je ne crains aucun mal, car tu es avec moi. » Car Il nous connaît bien et sait nous conduire sur le bon chemin, nous les brebis parfois perdues. Gardons au cœur la conviction que Son amour fidèle nous protège. Le Pasteur sait trouver pour nous les bons pâturages, les lieux reposants où se ressourcer — « Je restaure ma vie » — et nous permettre de trouver, en paix, « la maison du Seigneur ».
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Les cahiers
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Statue de bronze de saint François d’Assise (Trévise)
Prier en Conférence Par Jean-Claude Peteytas, diacre et Vincentien
Prier, c’est se reconnaître pauvre Dans un précédent article, nous avons relaté une expérience : celle de prier avec les pauvres (n° 201, novembre – décembre 2012). Mais il est important pour nous-mêmes de se reconnaître pauvre lorsque l’on prie. à l’école de saint Vincent de Paul, faisons oraison.
D
eux hommes montent au temple pour prier. L’un est devant l’autel et n’arrête pas de faire des éloges de luimême. Il pense être parfait et le meilleur des hommes. L’autre, qui est demeuré au fond du temple, se reconnaît pécheur et s’abaisse devant Dieu. Et Jésus dit que c’est lui, qui ne se prend pas pour le nombril du monde, qui est dans la véritable attitude du priant.
prière, nous ne pouvons pas nous considérer comme des « parfaits », car le Seigneur sait de quoi nous sommes faits, nous n’avons pas à prendre un masque. La prière nous met en vérité devant Dieu. Se reconnaître tels que nous sommes, avec nos limites, est la première condition pour entrer dans la véritable prière.
« Tu me scrutes, Seigneur »
Saint Vincent de Paul, maître spirituel, était un grand priant. Il fait appel à Dieu, auquel il s’attache comme un pauvre en détresse. Il est conscient de son péché, de ses limites d’homme et c’est pour cela que pour lui prier c’est « s’anéantir en la présence de Dieu ». Saint Vincent a un grand sentiment de révérence et de soumission vis-à-vis du Seigneur : « À proportion que nous l’estimerons, nous l’aimerons aussi, et cet amour produira en nous un désir insatiable de reconnaître ses bienfaits et de lui procurer de vrais adorateurs. » Il est conscient de l’immensité du travail qui l’attend. Comment faire face ? Son secret, c’est la prière, l’oraison.
Le psaume 138 nous fait dire à Dieu : « Tu me scrutes, Seigneur, et tu le sais ! » et cela depuis le sein de notre mère. Ainsi donc, quand nous entrons en
« Nous anéantir en présence de Dieu »
« Se consommer pour Dieu » Le chrétien qui s’est engagé au service des pauvres à la suite de saint Vincent et du bienheureux Frédéric Ozanam est appelé à
vivre cette vertu évangélique de l’humilité. Comme le publicain resté au fond du temple, nous devons prendre conscience de nos faiblesses, de nos limites et, dans une attitude de pauvre, reconnaître que Jésus-Christ est le sauveur qui nous libère de l’esclavage de l’égoïsme. Prier, c’est laisser l’Esprit de Dieu nous envahir. Et selon la belle formule de saint Vincent : « C’est se consommer pour Dieu, c’est ce que Notre Seigneur a fait lui-même qui s’est consommé pour l’amour du Père. »
Devenir l’instrument de Dieu Le chrétien – et donc le Vincentien – est l’hôte et le serviteur de l’Esprit de Jésus. Le savoir et le vouloir font de lui un pauvre selon la première des Béatitudes : « Heureux les pauvres en esprit, le Royaume des cieux leur appartient. » Prier en se reconnaissant pauvre, c’est ne pas s’opposer à Dieu et faciliter l’investissement de notre vie par Dieu. Le grand cardinal Emmanuel Suhard, précurseur du Concile Vatican II et fondateur de la Mission de France, fut une belle âme de prière. Prier était pour lui « devenir l’instrument missionnaire de l’amour de Dieu ». Prier, c’est se mettre devant Dieu pour se laisser convertir et devenir apôtre en vérité. « Être apôtre c’est donc s’ouvrir au don de Dieu pour pouvoir, modeste instrument de son œuvre, le communiquer au monde. » Prier, c’est se reconnaître pauvre, « car qui s’abaisse élève le monde ».
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Magazine Histoire
Le spectacle de la misère « Compte tenu du contexte actuel marqué par l’élection du pape François et sur son discours prophétique sur la pauvreté, j’aimerais réfléchir au rapport de Frédéric Ozanam avec la misère. Voici une étude historique sur la manière dont Ozanam a répondu à la misère de son époque, nous éclairant sur l’attitude à adopter aujourd’hui. » Par Charles Mercier, historien - Illustration Mathieu Jourdain de Muizon
L
a misère, l’extrême pauvreté, à l’époque d’Ozanam, est très importante. Si elle se cantonnait jusque-là aux campagnes, au début du XIXe siècle, par l’industrialisation qui fait naître le prolétariat, par l’urbanisation qui engendre un entassement dans les villes des populations venues des campagnes, la misère s’est déplacée en ville.
Synthèse de la conférence du 20.04.13
Ainsi, le quartier Mouffetard devient ce qu’Ozanam dépeint tristement en septembre 1848 : « Des deux côtés d’un ruisseau infect s’élèvent des maisons de cinq étages, dont plusieurs réunissent jusqu’à cinquante familles. Des chambres basses, humides, nauséabondes […] Les étages supérieurs n’offraient pas un aspect plus consolant. Sous les combles, un grenier mansardé, sans fenêtres, percé seulement de deux ouvertures fermées chacune par un carreau, abritait un pauvre tailleur, sa femme et huit enfants […]. » Avec la Révolution et la fin des corporations, les solidarités traditionnelles disparaissent, fragilisant les liens sociaux et laissant apparaître les débuts de l’individualisme.
lors du colloque international pour le bicentenaire de Frédéric Ozanam
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Les cahiers
À cette époque, Paris compte environ un million d’habitants en 1848 et Ozanam évoque deux cents soixante-sept mille « individus sans travail qu’il faut sauver de la faim » ! Frédéric connaît cette misère, car il a fait le choix de partir à sa rencontre, de s’y confronter.
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C’est toute la démarche de la Société de Saint-Vincentde-Paul naissante : contrairement à l’usage, ces étudiants, guidés par la sœur Rosalie, vont au domicile des miséreux. Ils les voient donc dans leur décor et le choc n’a dû en être que plus violent. Une fois face à la misère, quelle posture Frédéric adoptet-il ? On peut distinguer quatre grandes attitudes.
1. Une assistance qui honore La première de ces attitudes transparaît dans un texte qu’Ozanam a écrit en 1848 : « L’assistance humilie, si elle n’a rien de réciproque, si vous ne portez à vos frères qu’un morceau de pain […]. Mais l’assistance honore quand elle prend l’homme par le haut, quand elle s’occupe, premièrement de son âme, de son éducation religieuse, morale, politique, de tout ce qui l’affranchit de ses passions, et d’une partie de ses besoins, de tout ce qui le rend libre, et de tout ce qui peut le rendre grand. L’assistance honore […] quand elle traite le pauvre avec respect, non seulement comme un égal […]. »
2. Ne pas juger : voir la misère derrière certains comportements Amélie Ozanam raconte la réaction de son mari lorsqu’un pauvre Italien, à qui il avait trouvé un travail et qui s’était fait chasser pour son mauvais comportement, revint le voir. Frédéric commence par le renvoyer sans rien lui donner, avant de se raviser : « Il se repentit de sa dureté, disant qu’on ne devrait jamais pousser un homme au désespoir, qu’on n’avait pas le droit de
- Rendre service à quelqu’un dans la misère aide à relativiser sa propre misère : « Oh ! Combien de fois moi-même […] je suis entré plein de tristesse dans la demeure du pauvre confié à mes soins, et là, à la vue de tant d’infortunés plus à plaindre que moi, je me suis reproché mon découragement, je me suis senti plus fort contre la douleur, et j’ai rendu grâces à ce malheureux qui m’avait consolé et fortifié par l’aspect de ses propres misères ! »
refuser un morceau de pain même au plus vil scélérat et qu’enfin il aurait besoin un jour que Dieu ne fût pas inexorable pour lui, comme il venait de l’être pour cet homme. N’y pouvant plus tenir, il prend son chapeau et court de toutes ses forces jusqu’au milieu du Luxembourg où il rejoint cet homme et lui donne ce qui lui était nécessaire. » Parfois, nous sommes tentés de rompre les relations avec le miséreux qui a un comportement condamnable. Nous sommes tentés de faire la distinction entre « bon » et « mauvais » pauvre, entre celui qui essaye de s’en sortir et celui qui est dans la misère par sa faute. Frédéric, au contraire, voit derrière ce comportement une preuve supplémentaire de misère, sans perdre pour autant sa lucidité.
3. Se nourrir spirituellement du spectacle de la misère Cela peut paraître paradoxal, voire choquant, mais Frédéric contemple le spectacle de la misère. Dans un discours de 1853, il explique :
- Le spectacle de la misère réveille les âmes endormies. Dans une lettre de 1853 à un prêtre italien qui se désole de l’état des jeunes nobles, Frédéric écrit : « Bientôt vos meilleurs jeunes gens […] vont monter l’escalier de l’indigent. Vous les verrez revenir à la fois tristes et heureux, tristes du mal qu’ils auront vu, heureux du peu de bien qu’ils auront fait. Quelques-uns s’y porteront froidement, sans intelligence. Mais d’autres s’y embraseront d’un feu ». - Pour Ozanam, ce qui réveille les âmes des ces étudiants à la vue du miséreux, c’est le signe et sacrement de la présence du Christ : « Vous êtes nos maîtres et nous serons vos serviteurs, vous êtes pour nous les images sacrées de ce Dieu que nous ne voyons pas, et ne sachant pas l’aimer autrement, nous l’aimerons en vos personnes. »
4. Combattre les causes de la misère Ozanam ne tombe cependant pas dans un écueil qui voudrait qu’à trop sacraliser le pauvre, on ne veuille plus réellement lutter contre la misère. S’il récuse la solution communiste, il prône une solution dans une morale individuelle et collective. Pour lui, la morale du riche veut qu’il donne volontairement. C’est ce à quoi il les exhorte dans un article de L’Ère nouvelle en septembre 1848 : « Riches […] vous fûtes excusables de prévoir l’avenir, de songer à vos enfants, et de réunir l’épargne nécessaire pour les
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La morale du prêtre exige qu’il sorte de sa paroisse bourgeoise : « Prêtres français […] Le temps est venu d’aller chercher ceux qui ne vous appellent pas, qui relégués dans les quartiers mal famés n’ont peut-être jamais connu ni l’Église, ni le prêtre, ni le doux nom du Christ. […] Épuisez le crédit qui vous reste auprès de tant de familles chrétiennes, pressez-les à temps, et à contretemps ». La morale du pauvre l’appelle à espérer : « Vous, dont la rigueur des temps a retranché le superflu, et vous qui manquez de nécessaire, vous pouvez plus que les autres pour des maux que vous connaissez. Tous ceux qui ont l’expérience de la bienfaisance publique savent que les
Charles Mercier lors du colloque international donne une conférence sur Frédéric Ozanam et la misère.
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Ozanam - n°204 - juin-juillet 2013
pauvres ne sont jamais mieux servis que par les pauvres. » Mais Frédéric voit aussi la nécessité d’une action politique, par le biais de la loi. Il se prononce pour un impôt progressif, selon les richesses possédées, et invite également les représentants du peuple à faire preuve d’imagination contre la misère : « Représentants du peuple […] vous n’aurez pas travaillé pour un jour, si vous négligez cette formidable question de la misère, qui ne souffre pas de retard. »
La solution : la conversion La solution d’Ozanam pour combattre la misère, c’est la conversion des individus à l’esprit de partage et de service, plus qu’à l’esprit de jouissance et de domination. C’est la morale individuelle et collective. Dans leur lutte contre la misère, Frédéric et ses amis ont été des héritiers et des novateurs. Ils se sont enracinés dans l’expérience de Vincent de Paul en l’adaptant aux réalités du XIXe siècle. Les Vincentiens d’aujourd’hui, héritiers d’Ozanam, doivent être fidèles à son message : rester inventifs comme il l’a été et créer de nouvelles manières de faire face à la misère du XXIe siècle.
© Mario Ponta / SSVP
chances de la spoliation et de l’exil. Mais la prévoyance a ses limites, et Celui qui nous a appris à demander le pain de chaque jour ne nous a jamais conseillé de nous assurer dix ans de luxe. » Il leur conseille de dépenser pour faire tourner l’économie : « Dépensez, ne vous refusez point vos plaisirs légitimes dans un moment où ils peuvent devenir méritoires » et le partage : « Faîtes l’aumône du travail et faîtes aussi celle de l’assistance. »
L’invité En 2013, c’est la 14e édition de la Fête des Voisins en France, la 10e en Europe et dans le monde. Soucieux de rétablir le lien social, son fondateur, Atanase Périfan, également maire adjoint du XVII e arrondissement de Paris, nous transmet son enthousiasme contagieux. Entretien. Propos recueillis par Capucine Bataille
© DR
Comment vous est venue l’idée de créer « la Fête des Voisins » ?
Atanase Périfan : C’était après un événement tragique. J’avais découvert une personne âgée décédée depuis quatre mois dans son appartement. Quatre mois ! J’ai compris qu’il se cachait derrière l’épaisseur des murs de nos immeubles, de nos maisons, des détresses qu’on ne voyait pas. C’est ainsi que j’ai créé la Fête des Voisins dans mon quartier dans les années quatre-vingt-dix. En 2000, je l’ai lancée en France, en 2003 en Europe et en 2007 sur le reste de la planète. C’est une association dont le but est de créer du lien entre des gens qui se parlent parfois à peine, qui se disent « bonjour », qui ne se connaissent parfois même pas. Dans un monde où il y a beaucoup d’isolement et de solitude, c’est important de pouvoir faire se rencontrer les gens. La Fête des Voisins, c’est d’abord une bonne pratique qui se diffuse. C’est très simple : sortir sa table, mettre trois cacahuètes, un jus d’orange, dire à chacun d’apporter quelque chose. C’est ouvrir sa porte, ouvrir son cœur.
Atanase Périfan « Ma vocation : développer la solidarité de proximité » n°204 - juin-juillet 2013 - Les cahiers Ozanam
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Magazine L’invité Comment s’est passée la première Fête des Voisins ?
Atanase Périfan : J’avais mis des affiches sur tous les halls d’immeubles de mon quartier. 19h30, personne. J’étais tout seul avec mon tréteau, l’air un peu sot… Je buvais mon petit jus d’orange, seul dans la rue. Je n’avais pas l’air fin ! à 20h30, une porte cochère s’ouvre. Une dame arrive, je lui saute dans les bras et elle me dit : « Mais c’est nul votre truc, il n’y a personne » et fait demitour. Puis finalement à 21h, on était vingt, à 22h on était quarante. Les gens disaient « Mais pourquoi a-t-on attendu si longtemps pour se rencontrer ! » et à 23h, plus personne n’avait envie de remonter chez soi. Et après ?...
Biographie Né en 1964, orthodoxe, il est marié et père de quatre enfants. 1989 : il est élu adjoint au maire du XVIIe arrondissement de Paris, chargé de la solidarité, de la famille et de la proximité. 1990 : il crée l’association « Paris d’Amis » avec le slogan « Pas de quartier pour l’indifférence ». 1999 : il lance la « Fête des Voisins », qui a désormais lieu le dernier vendredi de mai en France. 2005 : il publie le livre « Pas de quartier pour l’indifférence : pour en finir avec la France dépressive ». 2007: il fonde « Voisins Solidaires », dont il est toujours président. 2012 : sa « Fête des Voisins » réunit désormais quinze millions de personnes dans le monde.
Atanase Périfan : C’est là qu’arrive le plus important, c’est tout ce qui se passe derrière, tous les petits services, l’entraide, la solidarité entre les voisins qui se développe. L’objectif est là. Je ne suis pas le président des alcooliques non anonymes, qui aurait décidé qu’on allait tous picoler ce jour-là ! On est dans un monde de vraies souffrances relationnelles et de solitude. La Fête des Voisins, c’est un prétexte et un point de départ, car avant de s’entraider et d’être solidaire, il faut se connaître ! Voilà pourquoi est né ensuite « Voisins Solidaires », un programme qui toute l’année aide à développer cette entraide, ces petits services entre voisins. Selon vous, pourquoi ne le fait-on pas spontanément ?
Atanase Périfan : Il y a une défiance aujourd’hui ! Si je sonne chez vous et vous propose mon aide, vous allez immédiatement vous méfier. Si je veux aider une grandmère à porter ses courses dans la rue, elle va croire que je vais lui voler son sac à main. Si je parle à une petite fille en lui disant qu’elle est une princesse, je vais être pris pour un pédophile. Il y a une vraie défiance, de la solitude et du repli sur soi. Pourtant, il y a des gisements de générosité chez les gens ! J’en suis émerveillé ! Que ce soit le ministre ou le gardien d’immeuble, quand on leur parle de ces sujets-là, ça les touche. En tant qu’élu, pensez-vous que la politique peut apporter la solution ?
Atanase Périfan : Oui, mais avec des hommes et des
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Les cahiers
Ozanam - n°204 - juin-juillet 2013
« Notre bonheur passe par notre capacité à être en relation avec les autres ! Une société où il y a de moins en moins d’interactions entre les membres est une société fragile. »
femmes qui portent un projet basé sur l’enthousiasme ! Pas sur l’argent ou le matériel. D’abord, il faut commencer par une thérapie : « Allez, on décide ensemble qu’on est heureux. Voyons ce que nous voudrions partager les uns avec les autres. » Notre bonheur passe par notre capacité à être en relation avec les autres ! Une société où il y a de moins en moins d’interactions entre les membres est une société fragile. Pas plus à gauche qu’à droite, il n’y a d’homme politique qui ait une vision, qui nous dise : « Voilà ce que j’ai envie de faire. Voilà le projet que je voudrais partager avec vous Français. » Je crois fondamentalement qu’en s’attachant aux côtés matériels, chacun regarde ses propres intérêts, surtout en période de crise… Mais pourtant le gouvernement met des dispositifs de solidarité nationale en place…
Atanase Périfan : Il faut distinguer trois piliers complémentaires sur lesquels repose la solidarité : la famille, qui est aujourd’hui fragile et parfois éclatée ; la solidarité institutionnelle et organisée, je pense aux mairies, aux services sociaux, à l’Urssaf, à tout ce que l’on paye par nos impôts, mais aussi aux associations. Le troisième pilier, c’est la solidarité spontanée, de voisinage. C’est cette solidarité sans engagement, ciment de la société, qui soutient, qui crée du lien. Notre système est bon, mais on a souvent le sentiment qu’en payant nos impôts, on délègue notre devoir de solidarité. Voilà, c’est cela ma vocation :
temps et envie de se faire du bien. Il faut leur donner les outils pour mettre en œuvre leur générosité ! Je pense que la solidarité de proximité est une bonne pédagogie. Il faut reprendre petit pas par petit pas. Il faut les dépoussiérer, creuser pour faire jaillir ces gisements de générosité. Par des petits gestes, on va redonner aux gens le goût de la solidarité, et après, ils pourront s’engager. D’où vous vient cet enthousiasme à toute épreuve ?
Atanase Périfan : De plusieurs choses. Mon éducation, mes parents : ils sont réfugiés politiques, venus de Macédoine. J’ai donc grandi dans la diaspora, dans un combat, un engagement au service des autres. Mes dix-sept ans de scoutisme, qui
« Il y a
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des gisements de générosité chez les gens !
Atanase Périfan, c’est le succès d’une pédagogie de la solidarité de proximité.
faire que les gens deviennent plus solidaires entre eux, développer une solidarité de proximité. Comment éduquer les gens à une vraie solidarité ?
Atanase Périfan : Les gens ont envie de rendre service mais sans contrainte, sans engagement. Ils ont peu de
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m’ont permis de m’intégrer, où j’ai appris un projet d’amour. Et bien sûr ma foi, je suis orthodoxe. C’est elle qui anime mon combat. Sans la prière, entre la politique et le succès, je n’aurais sûrement pas pu garder la tête sur les épaules. La foi est au cœur de ma vie. J’ai besoin de l’Eucharistie tous les jours. Mais vous savez, ce n’est pas moi qui ai inventé la Fête des Voisins, c’est JeanPaul II. Souvenez-vous, il a écrit un jour : « N’ayez pas peur, ouvrez toutes grandes les portes ». Et moi, chrétien basique, je n’ai rien compris, j’ai cru qu’il parlait réellement de ma porte, de ma maison. Au fond, c’est vrai, mon prochain, c’est mon voisin ! Allez ! Ne restez pas derrière votre porte, vos digicodes… Prenez le risque !
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Magazine Album photos Agenda 18 - 21 juillet 2013
de Frédéric Ozanam
du 18 au 21 avril 2013 - Paris
23 - 28 juillet 2013
Journées Mondiales de la Jeunesse à Rio de Janeiro (Brésil)
30 août - 1er septembre
Rencontre nationale des jeunes de la SSVP (Versailles)
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Rassemblement de la jeunesse vincentienne à Belo Horizonte (Brésil)
Célébrations du bicentenaire Des Vincentiens du monde entier ainsi que les descendants d’Ozanam assistent heureux à la messe.
Le Cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris, célèbre la messe du bicentenaire à Notre-Dame. t
7 septembre 2013
Journée d’études de Frédéric Ozanam à la Sorbonne (Paris)
22 octobre 2013
Convention nationale pour le projet associatif (Paris)
Les Cahiers Ozanam, revue de la Société de Saint-Vincent-de-Paul, 120, avenue du Général Leclerc, 75014 Paris www.ssvp.fr Directeur de la publication : Bertrand Ousset l Rédactrice en chef : Capucine Bataille l Rédacteurs : Juliette Asta, Capucine Bataille, Bertrand Decoux, Jérôme Delsinne, Bénédicte Jannin, Clotilde Lardoux, Charlotte d’Ornellas, Benoît Pesme, Bertrand Ousset, Jean-Claude Peteytas. l Ont participé à ce numéro : David Barreteau, Maryse Giraud-Renucci, Valérie Grabé, Sophie Rougnon, Emmanuel Schielin. l Illustrations : Mathieu Jourdain de Muizon. l Service abonnements : Clotilde Lardoux, 01 42 92 08 17 l Photo de couverture : Capucine Bataille. l Fabrication/ production : CLD, 33 avenue du Maine, 75015 Paris l Graphisme : Florence Vandermarlière. l Impression : Imprimerie de Champagne, Z.I. les Franchises, 52200 Langres l Numéro C PPAP : 310G79517 l Dépôt légal : Juin 2013 – n°204 – 06/2013. l ISN : 1965 2917 l Abonnement 1 an, 5 numéros : 13 € l Toutes vos informations et photos sont à envoyer à la rédaction huit semaines avant la date de parution (édition sous réserve d’espace) à capucine.bataille@ssvp.fr
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Les cahiers
Ozanam - n°204 - juin-juillet 2013
Le concert aura refait vivre quelques instants Ozanam et son ami Masarnau. t
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Le colloque au Palais d’Iéna : trois jours de conférences, de rencontres et de réjouissances. t
Michael Thio, Président international et Bertrand Ousset, Président de la SSVP France, se réjouissent du succès de ce rassemblement.
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La lecture de lettres de Ozanam transportent les spectateurs dans le coeur du jeune Frédéric.
s La SSVP Bénin est au rendez-vous.
Animation et enthousiasme lors du dîner festif. t
Des jeunes Vincentiens brésiliens, français et libanais se retrouvent. t
n°204 - juin-juillet 2013 - Les cahiers Ozanam
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