Toucher le Rhône sous la falaise. Culoz de rives en digues

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Toucher le Rhône sous la falaise. Culoz, de digues en rives

Sullivan Doublet Projet de fin d’étude en vue de l’obtention du diplôme de paysagiste concepteur sous la direction de Bruno Tanant. Année Universitaire 2017-2020

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Remerciements La naissance de ma démarche de projet de paysage est le résultat d’une digestion tant de mes sentiments personnels que d’une succession de rencontres qui ont guidé mon travail et fait naître ce projet de fin d’étude. Pour cela, je remercie Bruno Tanant pour avoir trouvé les mots justes permettant de regarder ailleurs, de faire un pas de côté et faire tomber les certitudes injustifiées. Je remercie Esther Salmona pour m’avoir permis, à travers les mots, de parler de mes intuitions et sensibilités du paysage de Culoz. Je remercie Fabrice Darino et Dimitri Coulon pour m’avoir éclairé sur l’histoire du Rhône et de ses marais, mais aussi pour m’avoir communiqué leur enthousiasme pour ce paysage, ce qui, d’une certaine manière, rend légitime mon travail de projet de fin d’étude sur ce territoire. Je tiens à remercier profondément ma mère qui, en ces temps de confinement, a su faire preuve de souplesse pour me laisser envahir une grande partie de la maison de mes productions de projet. (Merci aussi pour la voiture). Merci à ma grand-mère de m’avoir permis de me retrouver dans mon travail à la maison des Avenières. Merci à tous mes camarades qui sont une grande source d’inspiration pour moi, merci pour tous les moments de discussion à remettre en question le métier de paysagiste concepteur et notre place dans une démarche de projet dans un paysage. Malgré le côté impersonnel de la vidéo conférence, je tiens à remercier Eric S. Yuan et son équipe, d’avoir eu un jour l’idée de créer l’application zoom et de nous permettre de garder un contact oculaire avec l’équipe pédagogique et mes camarades de la promotion Bali 2017/2020, promotion du confinement.

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Sommaire AVANT-PROPOS ...................................................................................................................... 9 L’EAU SOUS LA FALAISE ..................................................................................................... 11 CARREFOUR ENTRE LE RHÔNE ET L’HOMME ................................................................. 27 S’IMMISCER DANS LES FAILLES............................................................................................... 30 DU RHONEGLETSCHER A LA MÉDITERRANÉE....................................................................... 42

LE RHÔNE DERRIÈRE L’INFRASTRUCTURE ..................................................................... 65 COMMUNIQUER A TRAVERS LA MONTAGNE .......................................................................... 66 HISTOIRE D’UN BRAS DE FER .................................................................................................. 68 RESPIRATION DU RHÔNE, DÉNOUER LE NŒUD HYDRAULIQUE.......................................... 80 RÉCHAUFFEMENT DE LA PLAINE ............................................................................................ 90 LES ENJEUX................................................................................................................................ 92

L’ARC ET LA CLÉ DE VOÛTE ............................................................................................. 101 FRICTION

SÉDIMENTAIRE ................................................................................................... 108

DIGUES SEUILS......................................................................................................................... 113 RIVE DROITE............................................................................................................................. 121 RIVE GAUCHE........................................................................................................................... 128

DIGUE POINT DE SUTURE ................................................................................................ 137 CONCLUSION...................................................................................................................... 145 BIBLIOGRAPHIE.................................................................................................................. 147

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Dessin au fusain du cĂ´ne de dĂŠjection de Culoz


Le cône de déjection

À quoi tout cela va-t-il ressembler ? Le choix de ce site pour un projet qui traite le risque me semblait évident. Le risque c’est l’incertitude qu’un évènement se produise. Ce sont des moments de rupture. Il y a quelque chose à Culoz que je ne savais pas expliquer. Quelque chose à la fois anxiogène et fascinant. Quelque chose qui donne la sensation d’être vulnérable. Quelque chose qui parle de ces moments de rupture. Ce quelque chose, c’est la démesure et l’instabilité. La démesure dans la mesure où la ville est au pied d’un mur de 1 000 m de haut et l’instabilité dans l’érosion de ce dernier.

AVANT-PROPOS

Il me fascine. Je ne peux pas m’empêcher de le regarder. J’ai l’envie d’analyser toutes ces cicatrices laissant apparaître une roche jaune pâle qui dénote sur le gris de la roche calcaire fatiguée. Je ne vis pas loin de Culoz et je suis souvent amené à aller à sa gare. Chaque fois que je m’y rends, je le fixe avec insistance. Je le scanne du regard pour voir si les cicatrices ont changé, si le géant de pierre, Le Grand Colombier, a bougé. Il me ramène au monde du dessous, me questionne sur l’épaisseur et les profondeurs de cette densité sédimentaire. La falaise en oblique, jusqu’où s’enfonce-telle ? Quand va-t-elle s’effondrer ?

Des falaises et des montagnes qui s’effondrent, il y en a partout dans la région. En réalité, ce n’était pas le cône de déjection en soi qui me fascinait, mais le rapport qu’il entretenait avec le Rhône. Les deux sont indissociables et se sculptent l’un et l’autre. Ce plat d’où la montagne surgit est le terrain de jeu du Rhône. Il est le second corps liquide qui se dilate, transperce, suinte, arrache. Lui qui a sculpté cet horizon plat dans le fond de vallée en des centaines de milliers d’années, aujourd’hui semble tenir la plaine de tous ses membres. À Culoz, je tourne alors le regard pour m’échapper d’une lecture linéaire du fleuve et élargir ma perception transversale des espaces en eaux. Le rapprochement entre ces deux corps à Culoz crée un point d’intensité où les formes de ce paysage à deux fréquences permettent de se saisir des énergies à l’œuvre dans une temporalité dilatée. C’est sur cette épaisseur que les culoziens vivent, dans un paysage en tension où la ville tente de trouver des accroches entre ces deux corps. Cette démarche de projet vise à accrocher l’habitat et l’humain à ces deux corps liquides en suivant leurs pas de danse ente friction et dilatation.

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L’EAU SOUS LA FALAISE

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Où vais-je ? Qu’est ce qui est le plus pertinent ? Comment être efficace ? Trop de questions Se laisser surprendre Carte IGN 3331 OT , je lance un écrou dessus. Il tombe là, je vais là.

Premier lancé, première marche : le Marais de Lavours

Stop sur le bas-côté

Arrivée à Culoz. Je ne peux plus avancer avec ma voiture

La marche commence vers L’Ouest. Friction sous le pied chemin de gravier Je marche . . Marche . . Marche C’est long Je vois : les côteaux de Vongnes et de Ceyzérieu à gauche

Le grand colombier à droite

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Je vois un bleu grisé sur un jaune filasse Déséquilibre, je marche sur un tronc au-dessus d’un fossé. Bagarre avec les ronces Arrivée dans le marais. Il fait plus froid


Pied qui s’ e n f o n c e,

bruit de ventouse Je marche …… Puis ….

Un pas là ……et

un pas là

Je cherche

Flop !!! ma jambe s’enfonce dans un trou Hésitation. Crainte

Pause cheveux au vent, visage face au soleil je remets en question la place de mon corps dans le marais.

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Corps de pierre sur lit d’or


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Stop au bord du Rhône

Deuxième lancé, deuxième marche : Digue de Chautagne

Silence….

Sens l’eau stagnante. C’est frais, c’est agréable Traversée d’un barrage Ai-je le droit ? J’y vais Fascination, volonté de comprendre cette porte des eaux. à gauche, le bras naturel du Rhône,

De l’autre coté,

Je marche . . Marche . . Marche . . Marche ennuyeuse . . Marche très ennuyeuse Je vois : du gris, beaucoup de gris gris gris gris

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Un voile aqueux de gris.

à droite, le canal de dérivation de Chautagne


Je suis le grand canal. Fascination monumentale Horizon tendu :

A droite, silhouette du Colombier

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Au centre, ligne noire, porte ou muraille.

Le tapis d’eau m’y emmène. C’est beaucoup trop loin Demi-tour.

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Filtre gris aqueux


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Pas de lancer, juste une envie. Troisième marche : Ascension du cône de déjection au-dessus de Culoz. Parking de la gare, altitude : 236m Objectif : point de vue du Fenestré, altitude : 1193m Dénivelé : 957m

Traversée

du centre-ville Rue des Perouses Marche sur le trottoir gauche Beaucoup de boutiques fermées Bruits de voitures C’est pénible La rue des frères serpolet se resserre. Lesfalaisesserapprochent. Rencontre avec Le Jourdan. Cette rivière fait beaucoup de bruit. Murs [Elle est encadrée par les] Murs de la vieille ville Elle s’engouffre dessous. Je lui tiendrai compagnie durant mon ascension. Elle me guide.

La pierre calcaire roule sous Je monte J’ai chaud J’ai très chaud

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Je ralentis . . Je ralentis . . .

mon pied.


Inspiration

Inspiration expiration

de mon inspiration

Mon pied expiration

suit le rythme

Inspiration

Inspiration expiration

et de mon expiration.

expiration

je serpente à droite,

Puis à gauche

à droite Parfois des vues sur la plaine ici

Puis à gauche ici

Introspection regard vers le sol . . .

ou ici

En haut tout fusionne. Cette marche prend du sens.

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Être rouge entre vert et bleu : Les pieds dans l’eau face à la falaise, je suis fasciné


par cette ĂŠmergence bleue au milieu de ce plat silencieux. OĂš poser le pied sur ce territoire ?

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CARREFOUR ENTRE LE RHÔNE ET L’HOMME

Culoz

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Culoz est un carrefour géologique complexe traversé par deux flux, contraints par le relief alpin, qui restreint les possibilités de passage. Le premier fait partie d’un grand réseau qui se dessine par gravité, s’immisçant dans les plis géologiques des Alpes et du Jura. C’est la veine principale de ce réseau qui connecte d’un trait sinueux le glacier du Rhône à la mer méditerranée. Ce réseau c’est le Rhône. La portion du fleuve qui se situe dans le carrefour de Culoz fait partie du bassin versant du Haut-Rhône entre Lyon et Genève.

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Le deuxième flux fait partie d’une toile sur le territoire. Ce système tente de rattacher trois pays européens : la Suisse, l’Italie et La France. La Montagne comporte des failles dans lesquelles l’homme s’empresse de construire des routes. Culoz est à la sortie de la Cluse des Hôpitaux et s’ouvre sur la vallée du Rhône et le Synclinal du Bourget. C’est une position stratégique qui lui a valu pendant longtemps le rôle de ville carrefour, ville ferroviaire. Au développement du trafic ferroviaire, la ville, principalement agricole, devient un carrefour important entre les trois pays.

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1 00 k m

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LYON Culoz Aix les-bains Chambéry

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S’IMMISCER DANS LES FAILLES Le carrefour s’inscrit dans la figure de proue de l’arc Jurassien qui percute l’arc Alpin. Comme deux ondes qui se suivent, ces arcs en tensions se déchirent et des brèches s’ouvrent dans la chair de la montagne. Elle devient alors poreuse. Les vallées sont des couloirs qui permettent le passage. Pour comprendre ce déchirement dans lequel l’homme et le Rhône se glissent, il faut changer d’échelle pour comprendre le mouvement, c’est-à-dire changer d’échelle de temps et d’espace et les comprendre comme un tout. Le mouvement des montagnes et de l’eau à Culoz est le résultat de forces telluriques et cosmiques lisibles en surface. Ce travail de projet tente de lire le mouvement induit par ces forces. D’une rotation de 365 jours autour du soleil, de 24 heures sur elle-même et d’une oscillation de 25 560 ans, la terre trouve son équilibre dans le déséquilibre. La machine est en marche. Elle prend vie en surface et sous terre, observable par des mouvements de terrain et des cycles climatiques réguliers. Le corps humain est entre ces deux entités, entre terre et ciel, habitant cette zone de friction à la surface. Elle est une peau lacérée par la rencontre passionnelle et érosive entre deux corps, le corps de Gaïa et celui d’Ouranos. Le premier est un corps en torsion, blessé et plein de crampes. Il est sous nos pieds, emprisonné par la surface de la sphère terrestre. Le second corps est impalpable. Son humeur lunatique fait varier son rapport passionnel torturé avec le corps terrestre. Il glisse, dégouline sur sa peau pour la consommer. À travers l’image de ces deux corps, on peut se saisir des forces en œuvre qui ont formé ce nœud géologique et hydraulique qui fait carrefour.

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Comment l’homme peut-il trouver sa place entre ces deux forces inarrêtables dans cette friction entre terre et ciel ? Pour comprendre cette surface et son mouvement induit par ces deux forces, et donc les reliefs des Alpes et du Jura, il faut plonger dans ces deux corps.


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Massif de la vanoise

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Vallée du Rhône

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Vallée du Rhône et synclinal du Bourget

Le Rhône

Le Rhône Le grand Colombier 1531 m

Tout d’abord, entrons dans les entrailles de Gaïa. Dans cette partie du corps, deux organes se rencontrent par des forces de poussée titanesques. C’est l’organe Européen qui glisse sous l’organe Africain. L’épiderme en surface est soumis aux caprices des profondeurs et se tord, se plie et se replie. Le dessus devient parfois dessous et inversement. Des subtilités naissent dans cette pâte feuilletée notamment dans les couches calcaires. Plus souples, elles dévoilent parfois de magnifiques drapés de pierre pâle. Sous leur propre poids, les plis se fracturent, laissant apparaître la chair du monstre. Les organes pierreux de dimensions inimaginables tentent de s’échapper de la surface. Ce sont les Alpes et le Jura. Falaises, pics, pitons, failles, toutes ces blessures sont des écritures rapportées de la vie des fonds terrestres.

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Culoz s’inscrit dans une fréquence du massif Jurassien dont le profil est dessiné par des forces venant des profondeurs de l’Est. Une série de falaises font face à l’Ouest hormis le cône de déjection de Culoz tourné au Sud Est. Ces falaises font partie des magnifiques drapés de calcaire qui peuvent être lus aux endroits de rupture. Ce nœud géologique est une richesse de diversité topographique. Il est un paysage complexe et unique.

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Vallée du Fier

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La plaine inondable

L’horizon plat de la plaine évolue et respire par les débordement du Rhône. Quand les champs de maïs ou de céréales sont installés sur ces terres fertilisées par les dépôts alluvionnaires, l’espace s’ouvre pour lire, avec du recul, la résurgence des montagnes et permet d’en saisir l’entièreté.

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Grand colombier surplombant la plaine agricole


Les côteaux urbanisés

L’urbanisation se développe entre la montagne qui s’effondre et la plaine inondée par le Rhône. Les habitations s’accrochent le long d’une route sur les piémonts à quelques dizaines de mètres au dessus de la plaine. Elle marque, la plupart du temps, la rupture entre les forêts des coteaux et l’agriculture ou le pâturage qui descend dans la plaine.

Village de Béon depuis la plaine

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Les contreforts boisés

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La pente des contreforts est une frontière au développement humain. Seul les végétaux sont en mesure de s’adapter à ces terrains escarpés en déséquilibre. Dans ces tableaux verticaux, des taches de falaise calcaire ramène à la surface des discours du monde souterrain.


Les plateaux pâturés

Les plateaux sont des mondes suspendus où la vie semble plus lente en comparaison avec la plaine. Une liaison s’opère entre les forêts des coteaux qui coulent dans les joints d’un parcellaire pâturé jusque dans des points de densités et d’intensité, les villages.

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DU RHONEGLETSCHER A LA MÉDITERRANÉE Le second corps est insaisissable. Il se glisse dans chaque faille, chaque pli et même dans notre corps. C’est Ouranos. L’oscillation de 25560 ans de la sphère bleue donne à cet être, au-dessus de nos têtes, son humeur lunatique. Il se pose sur les blessures de Gaïa. Au contact de ses plaies, le ciel glisse sur sa peau. Un jour glacial et un autre tropical, le ciel dessine, sculpte, nivelle le visage du jura et des alpes par des passages climatiques oscillant entre périodes glaciaires et interglaciaires.

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De son corps nait le Rhône. Il s’étend de son glacier en Suisse à la mer Méditerranée. L’eau est le miroir du rapport entre Gaïa et Ouranos. Ce serpent aqueux change, se transforme, se durcit et s’étend en fonction des tensions entre la terre et le ciel.


Glacier du Rhône

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La mer Méditerrannée 43


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Naissance d’un nœud hydraulique.

(5) Lac du Bourget

Chronologie page précédente :

Les eaux du lac s’évacuent, petit à petit, par les gorges de la Balme. Le verrou glacier de Challes-les-Eaux ferme le lac au sud, les eaux sont prisonnières.

(1) Glaciation du Riss (-170 000 ans) : Le carrefour géologique de Culoz est un point de rencontre et de compression entre trois grands glaciers : le glacier du Rhône, le glacier de l’Arve et le glacier de l’Isère. La pression entre ces monstres de glace allant jusqu’à 1200 m d’altitude a créé l’ouverture entre le Grand colombier et le mont Landard. (2) Glaciation du Würm (-25 000 ans) : Le glacier de l’Arve fusionne en amont avec le glacier du Rhône et descend la vallée du Rhône pour fondre vers Lyon. Le glacier de L’Isère tourne autour du mont Landard puis, est poussé vers le sud par la rencontre du glacier du Rhône. (3) Début de l’interglaciation (-20 000 à -3 500) : Les glaciers fondent et reculent. Des lacs et mers intérieurs naissent. (4) Lac du Grésivaudan:

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À la fonte complète des glaciers, le Lac du Grésivaudan long de 125 km remplit la cluse de Savoie, la vallée du Grésivaudan, le synclinal du Bourget et la Vallée de L’Isère jusqu’à Rovon (38).

(6) Sédimentation : Le Rhône et le Séran charrient énormément de sédiments pour les déposer et combler la plaine formant un horizon plat. (7) Comblement de la plaine : La plaine est comblée de sédiments et accueille les méandres changeants du Rhône. Son lit est très large créant un paysage d’îles. Le lac est fermé au nord et communique avec le Rhône par le Canal de Savière. Le reste de la plaine est marécageux (marais de Chautagne à l’Est, marais de Lavours à l’Ouest). C’est alors une grande steppe. Ce processus long de formation du fond de vallée est à l’origine de la diversité de milieux en eaux de la vallée. Ces milieux évoluent sous l’influence du Rhône. En entrant dans ce territoire, il déborde, se dilate et vient habiter la plaine. Les espaces pouvant être habités par le Rhône sont : Le marais de Lavours, le marais de Chautagne, et le lac du Bourget. Face aux rivières torrentielles, aux marécages, au fleuve et au lac, Culoz est spectateur de ces mouvements incessants et des échanges entre ces organes.


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Les vaiations climatiques dues aux humeurs d’Ouranos sont à l’origine de la création d’une diversité de milieux hydrauliques dans ce carrefour géologique. Tout ces organes aquatiques forment un noeud hydrolique complexe qui évolue et se transforme par les variation du régime du Rhône.

Marais de Lavours

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4,73 km²

Marais de Chautagne 7,4 km²

Lac du Bourget 44,5 km²


Le Séran

Le Rhône

44,5 km²

70 km linéaire de Seyssel à Bregnier-cordon

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Marais de Chautagne Le marais de Chautagne n’est plus visible. Il a été drainé dans les années 30 pour créer la forêt domaniale de Chautagne, gérée par L’ Office Nationale des Forêts. Elle a été plantée sur un parcellaire en grille, dessiné par le réseau de drains et les voies forestières. Le centre de ce marais est tenu par un axe de 5,4 km dont une partie est traversée par la viarhôna (piste cyclable reliant le lac Léman à la méditerranée). Cette rigidité dans le paysage est démesurée. Très vite, la linéarité et la fermeture de l’espace cadrées par des arbres, positionnées en damier, peuvent être asphyxiantes et susciter un ennui mortel. Le regard ne peut pas s’échapper. Séran : Cette rivière torrentielle prend sa source sur le plateau du Retord dans le massif Jurassien. Elle descend ensuite le plateau du Valromey pour chuter dans la plaine de la vallée du Rhône. Cette chute est la cascade de Cerveyrieu. La rivière finit par se jeter dans le Rhône à Cressin-Rochefort. Dans la plaine, après son passage endigué à Artemare, le Séran devient difficile d’accès. À Laval, les rousses et le Mergeais, ses affluents, traversent le marais pour le rejoindre sous sa ripisylve dense. On le redécouvre à Cressin-Rochefort. Marais de Lavours : Le marais est alimenté principalement par les eaux du Séran et ses affluents, mais aussi par les débordements du Rhône. Cette réserve naturelle, créée en 1984, est un espace ouvert où les sols hydromorphes sont les refuges d’une grandes diversité faunistique et floristique. Cette richesse du vivant suscite l’intérêt scientifique de chercheurs en écologie notamment. Le marais permet de porter un regard et un recul sur la vallée depuis la plaine. C’est une respiration. Lac du Bourget : Relique du glacier de l’Isère, le lac du Bourget est un immense réservoir d’eau, allongé et bordé par le Mont du chat à L’ouest et le mont du Corsuet à l’Est. Le lac est très prisé pour le tourisme de par l’attractivité de sa ville thermale Aix-lesBains (environ 29 000 habitants). Le Rhône:

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Le visage du Rhône actuel est complètement artificialisé. La CNR (Compagnie Nationale du Rhône) a la volonté de maîtriser le fleuve au profit d’une productivité en énergie électrique. Le Rhône se résume à des linéaires d’endiguement sur chaque rive, sans arbre, ce qui confère à cette infrastructure des promenades usantes et monotones. Toutefois, l’héritage des gravières de chaque côté du Rhône est une opportunité pour les habitants de retrouver un contact indirect aux eaux du Rhône. Aujourd’hui, la gravière de Garvirhône est encore active.


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Les Rousses, affluent du Séran


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RĂŠserve naturelle nationale du marais de Lavours


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Le RhĂ´ne sous le pont de la Loi depuis la rive gauche.


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Forêt domaniale de Chautagne à Ruffieux


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Lac du Bourget depuis le train.


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LE RHÔNE DERRIÈRE L’INFRASTRUCTURE

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COMMUNIQUER A TRAVERS LA MONTAGNE

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L’humain entre dans la danse. Il cherche à traverser ces géants de pierre. Ils possèdent des failles dans lesquelles les troupeaux de bipèdes pénètrent pour les traverser ou sédimenter à l’intérieur. Le commencement de cette sédimentation humaine à Culoz est estimé à -8000 ans avant J.C. Elle a évolué jusqu’à aujourd’hui dans une volonté de connecter les trois pays Européen : La France, la Suisse et l’Italie. Culoz est devenu un carrefour important entre ces trois pays car il est le seuil qui permet de passer la cluse des hôpitaux et donc de traverser le massif Jurassien.


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HISTOIRE D’UN BRAS DE FER XVIII° Siècle

Le Rhône était une voie fluviale commerciale pour charrier du bois vers la ville de Lyon. Le fleuve s’ouvrait et prenait de la place dans la plaine après la sortie des gorges, en amont de Seyssel. Un paysage d’îles se déployait. Les villages s’implantaient en collier de perles sur les piémonts pour échapper aux caprices de ce monstre aqueux. Ici, le Rhône était une frontière ente deux pays : la France et la Sardaigne. Le passage le plus proche pour traverser cette frontière se trouvait à Seyssel par le pont de la vierge noire. La voie d’accès était la route royale qui traverse la ville de Culoz en son centre.

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CI-CONTRE : Tracé du Rhône et des marais au XVIII° siècle d’après la carte de st Villaret, 1760


Pont de la Viergenoire à Seyssel

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CI-DESSUS : Photographie ancienne de la place et de la grande (rue des frères Serpollet) et cône de déjection du Grand Colombier en arrière plan.


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XIX° Siècle Les premiers endiguements naissent en Chautagne (la digue de la loi, la digue de Picollet et la digue de Sarrière). Le fleuve change de visage et les terres, gagnées sur ses eaux, sont cultivées. En 1858, est inaugurée la dernière portion de la ligne de chemin de fer de Culoz à Modane. Cette ligne enjambe le Rhône par la construction d’un viaduc métallique. Puis, en 1860, sous le second empire de Napoléon III, le duché de Savoie est annexé à la France et devient un département français.

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CI-DESSUS : Photographie éditée en 1873 « CULOZ (Ain) - Nouveau Pont du Chemin de Fer sur le Rhône - Editeur : L.Zimmer. » CI-CONTRE : Tracé du Rhône et des marais au XIX° siècle d’après la carte d’état Major


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CI-DESSUS : Carte postale,1933, photographie du quartier de la gare au premier plan et du mollard de Vions en arrière plan.


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1930-1950 Le cours du Rhône se modifie par l’influence de l’endiguement en aval. Le marais de Chautagne est assaini par un maillage de réseaux de drainage de 200 km linéaire. Le volume drainé est estimé à plus de 35000m3/j. Le marais devient une grande peupleraie

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CI-CONTRE : Tracé du Rhône et des marais en 1950, d’après les vues aériennes de 1950


Artemare

Culoz

ForĂŞt Domaniale de Chautagne

Aix-les-bains

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1980 à aujourd’hui Projet de construction de 19 barrages sur la totalité du Rhône français dans les années 80 par la CNR (Compagnie Nationale du Rhône). Sur ce territoire, deux canaux de dérivation ont été construits pour alimenter l’usine hydroélectrique de Chautagne et celle de Belley. Le développement urbain s’accroît notamment à Aix-les-Bains et Chambéry, environ 125000 habitants dans la métropole de Chambéry pour 3071 habitants à Culoz.

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CI-DESSUS : Photo du barrage de Motz CI-CONTRE : Tracé du Rhône et des marais au XXème siècle d’après les vues aériennes de 1950


Barrage de Motz

Usine HydroĂŠlectrique de Chautagne Artemare culoz

Pont de la loi

Barrage de Chanaz

Centrale hydroĂŠlectrique et passerelle de la Chute de Belley

Aix-les-Bains

79 79


RESPIRATION DU RHÔNE, DÉNOUER LE NŒUD HYDRAULIQUE 1856, 1910, 1944 et 1990. Toutes ces dates correspondent aux crues centennales. En 1858, une loi est mise en place par Napoléon III pour préserver la ville de Lyon des inondations. Cette loi vise à préserver des terrains inhabités pour accueillir les crues du Rhône. Elles sont appelées les ZEC (zone d’expansion des crues). Les ZEC identifiées sur le territoire sont : Le lac du Bourget, le marais de Lavours et le marais de Chautagne.

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CI-DESSUS : Tableau de William-Adolphe Bouguerau, Napoléon III au chevet des victimes de l’inondation de Tarascon en juin 1856


CI-DESSUS : Photos de la crue centennale de 1990. Photo en bas : commune de Chanaz au premier plan. et Vions au fond Photo au dessus : Commune de Lavours.

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Culoz

82

DÉCENNALE


Culoz

TRENTENNALE 83


Culoz

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CENTENNALE


Culoz

EXCEPTIONNELLE 85


Artemare

86

La progression des crues sur la plaine est aujourd’hui influencée par les infrastructures qui réduisent les entrées sur les terres. Cette réduction augmente le débit des eaux qui tentent de s’engouffrer, coûte que coûte, sur la plaine. Cette accélération augmente les dégâts sur les sols par arrachement. De plus, la pression exercée sur la digue augmente le risque de rupture et donc d’une rentrée des eaux en catastrophe dans la plaine.


Inondation si rupture de digue

Troisième seuil d’infiltration Entre la digue de Serrières et de Picollet Béon

Deuxième seuil d’infiltration par les Gravières de Ruffieux

Culoz

Premier seuil d’infiltration par le canal de Savières

Vions Chindrieux

Infiltration des eaux du Rhône par Cressin-Rochefort . Zone de perturbation, rencontre avec le Séran.

Déversoir dans le lac du Bourget

Brison-saint-innocent

8787

Aix-les-bains


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CI-DESSUS: Coupe générique du risque lié aux inondations dans la plaine de Culoz


LA MÉCANIQUE DU RISQUE

Le profil actuel de la digue ne considère pas le mécanisme d’échange hydraulique d’origine entre le fleuve et ses marais. Avant le XVIIIème siècle, Le Rhône sortait de son lit 2 fois par an, en période hivernale et à la fonte des neiges. Par l’accumulation des constructions de digues, la plaine est inondée aujourd’hui moins d’une fois tous les deux ans. L’apport en eaux dans les marais est donc sévèrement réduit en trois siècles mais les marais sont aussi petit à petit asséchés. En effet, le profil de digue inclut le décaissement de contre-canaux pour récupérer les eaux du Rhône s’infiltrant dans la digue. Ces linéaires de fossé sont responsables de la baisse de la nappe phréatique qui provoque un assèchement du milieu et une rétractation de la tourbe par minéralisation (baisse de volume et tassement + tassement de la couche inférieure par diminution du volume de la nappe captive). L’activité des drains limite la capacité de rétention d’eau du terrain. Ces eaux, issues du drainage de la nappe superficielle et des apports météorologiques, pourraient être récupérées pour participer à la réhydratation des terrains, ce qui reviendrait, en quelque sorte, à restaurer un fonctionnement « naturel » des marais (rétention des eaux pluviales). Il faut aussi ajouter à cela, le risque de rupture de digue et l’arrêt des dépôts sédimentaires qui s’accumulent et demandent un entretien de curage et un suivi important.

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RÉCHAUFFEMENT DE LA PLAINE Paradoxe d’un trop plein d’eau, la plaine est touchée par une augmentation des durées et des intensités des sécheresses. La série de cartes de la Drias, ci-contre, démontre l’évolution des moyennes de température à l’année, à l’horizon 2100, avec une politique climatique visant à stabiliser les concentrations en CO² dans l’atmosphère. La vallée du Rhône est parcourue par un courant d’air qui s’engouffre par la méditerranée et remonte la vallée vers le nord. Ce courant fait progresser le climat méditerranéen le long des alpes et impulse un réchauffement et une évolution des paysages très rapide. Le climat méditerranéen se traduit par une modification des saisons passant de 4 cycles distincts à 2 et une augmentation des périodes de sécheresse caniculaires. De plus, les périodes de neige sont de plus en plus courtes et plus instables en altitude, suivies par une fonte rapide cumulée à des pluies diluviennes. Toutes ces réactions en chaine, naissantes d’un réchauffement global, amène une prévision d’une augmetation des crues et de leurs fréquences dans le temps.

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Au marais de Lavours, ces changements sont déjà observables, bien entendu dans le changement d’espèces animales et végétales, mais aussi dans l’activité humaine liées au marais. En effet, les plateaux étant de plus en plus arides en période estivale, les agriculteurs se retournent vers les marais pour s’approvisionner en foin. La réserve y trouve son compte car la fauche permet de maintenir les espaces ouverts et donc préserver la capacité de réservoir d’eau du marais. Il retrouve son rôle nourricier d’autrefois. De plus, ces espaces humides intriguent de plus en plus les populations. Dans la réserve, on compte environs 34 000 visiteurs par an. « Cette dimension esthétique du marais, on n’en parle pas assez. Les zones humides sont des lieux magiques qui peuvent faire peur, il y a une sorte d’attraction répulsion » me confie Fabrice Darinot conservateur de la réserve.


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LES ENJEUX Cet agglomérat d’infrastructures étouffe le rapport corporel de l’habitant au Rhône. C’est un acharnement dans une lutte insensée. Vouloir lutter contre le mouvement c’est lutter contre la vie. Cette subtilité d’interaction entre la terre et le ciel meurt. L’infrastructure, dans sa volonté de maîtrise, rend stérile les organes du Rhône, mais également le rapport de l’homme à son paysage. Pour développer un projet de paysage dans ce territoire, il est important de reconsidérer la place et l’action humaine entre ces deux forces et ne plus se considérer comme tiraillé dans un entre-deux, mais entrer dans la danse, suivant le mouvement. Cela passe par plusieurs enjeux : 1-Réduire le débit de la crue pour diminuer les risques d’arrachement des sols et de rupture de digue. 2-Valoriser les crues comme des évènements bénéfiques pour l’apport d’eau aux sols de la plaine et, par extension, pour une agriculture adaptée dans une perspective d’évolution du climat. 3-Supprimer la pente de la nappe phréatique responsable de son assèchement et ainsi redonner aux marais leur capacité de rétention en eau. 4-Retrouver les berges du Rhône depuis la ville par l’expérience physique du Rhône et ses marais.

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La main humaine ne serait plus dans un bras de fer avec le fleuve, elle serait une main qui apaise. Ce geste pourrait s’apparenter à un massage sur la surface du sol. L’action, ici, serait de repenser le profil des digues en passant d’un geste de lutte à un geste d’apaisement entre les deux corps en mouvement. Ces digues s’ancrent dans ce mouvement et en redéfinissent les seuils.


BÉON CULOZ

VIONS

CHINDRIEUX

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Promenade sur la digue.


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Longer la ligne Culoz-Genève, à Culoz.


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Pâturage roulant au bord de la Lône.


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Artemarre

MARAIS DE LAVOURS

Dent du chat

Brison-saint

100 100

Aix-les-Bains


Culoz

Vions

MARAIS DE CHAUTAGNE

L’ARC ET LA CLÉ DE VOÛTE

Grand Colombier

-innocent

101 101


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Lecture des forces dans l’arc. Peinture acrylique 200x100 cm

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104


Recherche du squelette de l’arc

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Artemare

Culoz

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Vions


Culoz est tenu dans un arc tendu entre Artemare et Aixles-Bains. Cet arc est impulsé, propulsé d’un bout à l’autre par les piémonts du grand Colombier et ceux du grand Foug. Il vibre, se dilate et se rétracte. C’est un tissu bougeant lentement, s’accrochant aux montagnes et traversant les organes du Rhône. Il grimpe sur les falaises pour parfois s’enfoncer dans les sols hydromorphes. Le Rhône, qui est la clé de voûte, tient cet arc. Cette clé de voûte, est une rotation entraînant avec lui Culoz sur sa rive droite, mais aussi Vions sur sa rive gauche. Les deux communes se font écho. À partir de ce moment là, Vions est inclus dans le projet comme le revers de Culoz.

Aix-les-bains

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FRICTION

SÉDIMENTAIRE


SÊdimentation cosmique, maquette d’observation des fluxs de la foule de particules

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110


Cette dynamique des dépôts sédimentaires se retrouve dans le dessin du parcellaire. A travers l’orientation de chaque terrain, il est possible de ressentir l’influence des anciens bras du Rhône. Aujourd’hui, ce dessin n’est plus aussi évident à comprendre et n’a plus de logique en disparaissant sous les nouvelles constructions urbaines et les infrastructures. Cette énergie est un témoin des capacités du fleuve à venir chercher les terres jusqu’au milieu de la ville. Pour cela, elle ne doit pas être oubliée. Dans cette démarche de projet liée aux risques, le Rhône doit revenir dans les consciences des habitants et, de ce fait, être pris en considération dans l’aménagement urbain des communes. Ci-dessus, les deux clichés de vue aérienne, à gauche cliché de 1950 et à droite de 2020, sont démonstratifs de ce basculement. L’exemple de Culoz est marqué par l’héritage d’un parcellaire oublié.

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DIGUES SEUILS Pour se réconcilier avec le Rhône, les digues actuelles sont repensées pour redonner de l’espace au fleuve et lui permettre de rentrer dans la plaine en périodes de crues. Cela passe par un recul et une division de ces infrastructures. L’équilibre de ce projet s’opère dans une considération pour les deux rives du fleuve. Il semble évident que le projet doit les traiter en relation. C’est pour cela que Culoz est indissociable du village de la rive opposée, la commune de Vions. Par le dessin en série, une recherche est impulsée pour trouver la structure des deux communes et comprendre comment elles se font écho tout en s’inscrivant dans la dynamique de l’arc. Cette structure naissante devient le dessin des nouvelles digues.

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Marais de Lavours


Digue révérence Culoz-marais de Lavours

Digue nouveau lit mineur rive droite

CULOZ

VIONS

Digue nouveau lit mineur rive gauche

Digue révérence Vions-marais de Chautagne

Marais de Chautagne

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BÉON CULOZ

RUFFIEUX

MARAIS DE L AV O U R S

VIONS

114 116

CHANAZ


Forêt Agriculture Pâturage Digues Îles Urbanisation

MARAIS DE C H A U TA G N E

LAC DU BOURGET

Plan projet - Culoz et Vions de digue en rives du Rhône

CHINDRIEUX

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Digues actuelles

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Les digues actuelles enserrent le Rhône de part et d’autre. Elles sont une réponse technique, construites par la CNR dans le but de produire de l’énergie électrique. Mais cet ouvrage présente des risques. Le parti pris dans ce projet est donc un recul des digues et une division par paliers.

Recul des digues

Le recul des digues permet une distribution des eaux pour réduire le débit et donc l’arrachement des sols et les dégâts humains. Le principe est de retrouver un étalement des crues sur le maximum du linéaire du fleuve. Ici, les digues sont comme des seuils qui limitent le débordement jusqu’à un niveau défini.


Digue contre-canaux

L’installation de ces nouvelles digues est aussi l’opportunité de redonner de l’espace au Rhône pour limiter le débordement et les ruptures de digues. Pour cela, les contre-canaux qui sont aujourd’hui la cause de l’assèchement des marais sont transformés en bras secondaires du Rhône où les eaux ralentissent. Ces milieux riches en diversité animale et végétale s’appuient sur le milieu humide existant et morcelé et dont les morceaux seront réunis en un tout et valorisés pour amener aux habitants un lien corporel avec le fleuve.

Digue de ville

En cas de crues, les digues de ville prennent le relais pour protéger la ville des crues les plus importantes. Ces digues s’inscrivent dans le tissu urbain et redessinent les espaces publiques liés à l’eau. Pendant les crues, le paysage se ponctue de nouvelles îles apaisant le rapport avec les paysages du passé.

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BÉON

CULOZ

Réseau de circulation douce. Connexion du déplacement transversal (Du centre ville aux digues du bord de Rhône)

Ripisylve de la Lône : milieu écologique à préserver.

Sylviculture en bande, couloirs de crue

Valorisation d’un petit parcellaire et du maraîchage. Parcellaire protégé des inondations

Pâturage sur les bords du Rhône pour conserver les espaces ouverts

Nouvelle digue des contre-canaux

120

Élargissement des contre-canaux et surélévation du fond


RIVE DROITE Culoz fait une révérence au fleuve. La main sur le cœur, puis, d’un geste, balaie devant pour finir derrière lui à droite dans le marais de Lavours. L’aménagement des digues à Culoz suit l’énergie sédimentaire induite par le parcellaire. Elle commence au nord en suivant la Lône sur le début du côteau (hors inondation) puis continue dans la plaine sous la forme d’un S. Elle est tenue par le tissu urbain faisant naître un parc inondable à développer comme un quartier sur pilotis. Puis, elle permet de s’y rattacher pour créer une continuité entre la ville et la plaine, voire le marais. Ainsi, Culoz inclut la richesse de la diversité aquatique en l’invitant à suivre,à travers son corps urbain, les variations incessantes du fleuve. Pour accepter cet accueil, les usages du parcellaire vont évoluer vers une adaptabilité à l’inondation. Cela passe par une reconfiguration des activités et une mise en place d’un système de régulation de l’inondation.

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122

Plan de circulation de Culoz BÉON

CULOZ

VIONS


Viaduc de l’île carrée, surélévation d’une partie de la voie ferroviaire.

Valoriser les axes sur les berges par des avancées sur le Rhône.

Nouvel axe doux vers les marais sur les digues, connexion avec le centre ville. Chemin pastoral, du parc urbain aux marais de Lavours.

Création d’une variante de la via Rhôna (Cressin-Rochefort, Seyssel par Culoz ) sur les nouvelles digues.

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Le réseau de digues permet de découvrir une diversité de milieux hydromorphes. Du parc urbain aux abord du Rhône, la marche se calque au rythme des eaux. La Lône qui avait disparu sous les infrastructures, prend des épaisseurs et rattache le centre ville aux rives du fleuve. Le cadrage, ci-dessous, correspond à cette transition, à l’artère qui rattache cette ville fragmentée.

Collège Henri Dunant

La Lône

Le Rhône

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Contre-canal


La crue dessine des espaces. Ce filtre horizontal qui pénètre dans Culoz souligne les rives éphémères qui se prolongent du centre de la ville au fleuve. Le temps d’un instant, le Rhône donne une valeur à des espaces exclusifs. Des îles naissent des digues.

L’île Carrée

L’île de l’ancienne digue

Les îles rubans

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Attacher l’habitat à la digue et donc au Rhône par la création de Chemins de traverses

QUARTIER DE LÎLE

QUARTIER DE LA DIGUE

Ru e

du

pé ag e

PARC DE LA LÔNE

Développement de l’activité maraîchère

124 126

Ru e d e l a

pla ine

BANDE MARAÎCHÈRE

Développement d’un quartier adapté aux inondations

Chemin de l’île


Le jardin delta est un espace de respiration dans lequel la Lône se détend. Ce milieu ouvert devient un jardin de contemplation de la vie sauvage aquatique.

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JARDIN DELTA Ru

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LE RHÔNE

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OUVERTURE PÂTURÉE

125 127


RUFFIEUX LA LOI

RIVE GAUCHE

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Sur la rive gauche du Rhône, la commune de Vions s’inscrit dans un point de convergence d’eau. En venant du nord, le fleuve rencontre le Mollard de Vions sur lequel il ricoche. Dans ses débords, ses eaux enveloppent cette émergence pour se retrouver de l’autre côté sur la commune de Vions. En effet, le village de plaine est comme un carrefour où les eaux convergent depuis le nord (par le grand canal de Chautagne), depuis l’Est (par le canal de Savières), et depuis l’Ouest en cas de crue (par le canal de Savières et les gravières du Mollard Dessus). Ce carrefour est complètement obstrué par le terrassement de la voie ferroviaire, ce qui limite la fluidité de l’étalement de la crue dans la plaine. C’est pourquoi, cette démarche de projet reconsidère ce carrefour hydraulique en rouvrant l’espace pour favoriser ces échanges.


Point de convergence des eaux

VIONS

CHANAZ

Bande forestière en sylviculture. Cadre et donne des directions vers les côteaux viticoles et les falaises de Ruffieux et Chindrieux

Ripisylve en bande le long du canal de Savière

Ouverture et valorisation du bord du canal de Savière par le pâturage Ceinture agricole renforcée autour de la digue (lieux moins soumis aux inondations)

MOLLARD DE VIONS

L’ archipel du Mollard est un bras du Rhône. il devient un espace de plaisance, pêche, randonnée ou navigation...

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Création du viaduc du marais pour permettre un meilleur étalement de la crue dans le marais.

Chemin pastoral du Lac du Bourget au Rhône

La digue de ville donne accés depuis le centre du village au marais à l’Est et l’accès aux berges de l’archipel du Mollard à l’Ouest. La digue de L’archipel est une berge aménagée pour donner accès aux eaux du Rhône. Valorisation de la viaRhôna (piste cyclable) Transhumance du plateau vers les marais

Extension du port de plaisance dans l’archipel du Mollard

130

CULOZ


CHÂTILLON

VIONS

CHANAZ

Plan de circulation de Vions

131


Cette nouvelle respiration remplaçant les contrecanaux actuels permet au Rhône d’enfanter des îles. La nouvelle rive, archipel du village de Vions, s’attache le long d’un paysage mouvant. Il devient la frange où l’homme touche le Rhône.

Canal de Savières

132

Le Rhône

Anciens contre-canaux


Quand la crue s’invite dans la plaine, elle passe à travers la digue. Vions la regarde passer en l’invitant à longer la digue de ville pour rejoindre les marais ou le Lac du Bourget. L’émergence rocheuse et son village deviennent l’île du Mollard.

Île du Mollard

Île de l’ancienne digue

Les îles rubans

133


in Chem e Bon des

tti

ARCHIPEL DU MOLLARD

132 134

LE RHÔNE


ed ev ille dig u La

CANAL DE SAVIÈRES

PÂTURAGE DES BERGES DE SAVIÈRES

D9

Dig

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Rh

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DIGUE POINT DE SUTURE

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Mollard de Vions

RhĂ´ne, archipel du mollard de vions

Marais de Chautagne

Canal de Savières

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Espace de chaloupage


Digue de ville de Vions Chaque construction de digue dans ce projet amène à la question des déblais et des remblais. Avec quelle terre former ces reliefs artificiels et comment l’immiscer dans le relief existant ? La recherche d’une forme de digue est un exercice de tissage dans le parcellaire. Ce tissage doit prendre en compte l’épaisseur par rapport à la hauteur de la digue. C’est donc une recherche de profils de digue dans laquelle des jeux de niveau permettent un travail de topographie fine sans délocaliser les terres de décaissements. Cette phase de sculpture d’un nouveau profil de digue est à penser par le mouvement. Cet ouvrage anthropique doit vivre et respirer. Il est une structure que Gaïa et Ouranos peuvent s’approprier pour sculpter avec la main de l’homme un nouvel horizon suspendu entre la plaine et la falaise. Cette respiration prend corps par l’accueil de la sédimentation dans les plis de la digue ou à travers les mailles forestières. Ainsi, le courant de la crue diminue à l’approche des habitations et l’eau est redirigée vers les marais. L’homme doit être attentif à cette danse qui s’opère pour transformer son action sur ce milieu en accord avec les mouvements de la terre et du ciel. C’est la deuxième phase de la sculpture de ces digues en dentelle à trois. Les digues deviendraitent des rubans où la marche est rythmée par une diversité de milieux à l’ombre des haies bocagères.

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Évolution d’un vestige de haie horticole à une haie bocagère gérée en taillis

D921

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Haie Bocagère, connection


Digue révérence Vionsmarais de Chautagne

de la plaine à l’habitat

Zone de fraîcheur, dépression humide gérée en prairie shygrophiles.

Maraîchage

Pâturage

Espace de chaloupage

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Soutenance de projet de fin d’étude le jeudi 10 septembre 2020 à l’ENSP Versailles


CONCLUSION

La main se relâche. Elle glisse sur la surface. Le Rhône pénètre entre ses doigts, il y a contact. Le corps retrouve sa place dans le mouvement entre terre et ciel. L’érosion et la sédimentation de la vie se manifestent par l’approche physique de ce paysage. La digue n’est plus, elle est une rive poreuse qui se prolonge dans la ville. La sédimentation humaine rencontre celle du Rhône et chaloupe avec elle pour sculpter ces rives. Des appuis, un équilibre ou un déséquilibre, un effacement ou une apparition, le pas est enclenché, l’écoute du mouvement de l’autre commence. C’est la naissance d’un ruban qui file vers le Rhône. Culoz et Vions redeviennent des rivières et, de digues en rives, les enfants des piémonts peuvent retourner au fleuve.

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-Veyrat-Charvillon Stéphane, Ponsero Alain. Modifications de l’hydrologie du Séran (affluent du Haut Rhône Français, Ain) de 1976 à 1995 / Modifications in the hydrology of the Seran river (tributary of the French Upper Rhône). In : Revue de géographie alpine, tome 85, n°2, 1997. pp. 23-32. -Mikolajczak Alexis, Darinot Fabrice. Évolution de la végétation du marais de Lavours (Ain, France) à quarante-cinq ans d’intervalle (1967-2012). In: Bulletin mensuel de la Société linnéenne de Lyon, hors-série numéro 3, 2014. Bilan de 30 ans d’études scientifiques dans le marais de Lavours (1984-2014) pp. 42-53. -Jean-Paul Bravard et Anne Clémens (Dir), Le Rhône en 100 Questions, Zones Ateliers Bassin du Rhône, 2006, 149 p Article de périodique:

BIBLIOGRAPHIE

Ouvrage:

-J.P. Bravard, « Le Haut-Rhône français Géographie histoire et gestion d’un fleuve », La Houille blanche-revue internationale de l’eau, N°1, 1988, pp.45-52 Document technique : -A. Brun (dir), Plan de gestion et restauration de la zone humide en forêt domaniale de Chautagne (73) – Diagnostic, juin 2013, 34 p -PPRI de Chautagne / Révision– Note de présentation - juin 2014 – projet

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