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Les lignes électriques perturbent-elles les systèmes de position par satellites

Les systèmes d’autoguidage et le contrôle des sections exigent des systèmes de positionnement précis par satellite et des signaux de

correction RTK. Photo : ldd

Les lignes à haute tension perturbent-elles les systèmes de positionnement par satellite ?

En agriculture, les systèmes de positionnement par satellite jouent un rôle essentiel dans la gestion modulée de la parcelle. L’influence des lignes à haute tension, aériennes ou enterrées, sur la précision et la disponibilité des récepteurs GNSS fait l’objet de controverses récurrentes.

Ruedi Hunger

Les applications de modulation intraparcellaire ainsi que les systèmes d’autoguidage et de contrôle de sections équipant épandeurs d’engrais, pulvérisateurs et semoirs sont tributaires des systèmes de positionnement par satellite, c’est-à-dire des récepteurs GNSS. Ces systèmes offrent de nombreux avantages: réduction de la pénibilité du travail, économies d’intrants et optimisation du temps de travail. La meilleure précision réalisable sur la durée est de l’ordre de deux centimètres. Les ondes émises par les satellites voient cependant leur trajet dévié par l’ionosphère, ce qui génère des écarts allant jusqu’à 30 mètres. Un correctif fourni par une station ou un réseau RTK permettra de rétablir la précision centimétrique nécessaire à certains travaux. Le signal RTK corrige à la fois les erreurs inhérentes au réseau de satellites et celles causées par l’environnement. Dans la pratique, la transmission du signal RTK par mobile a fini par s’imposer.

Des perturbations dues aux lignes à haute tension ?

En agriculture, les hommes de terrain accusent régulièrement les lignes électriques de perturber la réception des signaux GNSS et des données de correction. C’est notam-

ment le cas en Allemagne, où une forte extension/restructuration des réseaux électriques est actuellement en cours en raison du développement rapide des sources d’énergie renouvelable décentralisées. C’est dans ce contexte que l’École de machinisme agricole de Triesdorf et la Haute école de Weihenstephan-Triesdorf ont été mandatées pour étudier l’impact des lignes à haute tension sur la stabilité de réception.

État antérieur des connaissances

Jusqu’en 2018, on ne disposait que de peu d’éléments attestant d’erreurs de positionnement par un récepteur GNSS, imputables aux lignes à haute tension. En 2002, la littérature spécialisée mentionne deux cas de dégradation des performances du récepteur éventuellement attribuables aux lignes électriques, soit par les interférences électromagnétiques qu’elles génèrent et dont on soupçonne qu’elles perturbent l’électronique du récepteur, soit parce que les lignes font écran aux signaux du satellite. Les auteurs font valoir qu’ils n’ont pas poussé plus loin leurs investigations. En 2011, une étude sur la fiabilité des récepteurs GPS à proximité des lignes électriques de transport a été réalisée, au cours de laquelle les auteurs n’ont constaté aucune influence.

Triesdorf: aucune influence

L’École de machinisme agricole de Triesdorf et la Haute école de Weihenstephan-Triesdorf ont été chargées de réaliser de nouvelles études, cette fois basées sur des mesures au-dessous de deux lignes à haute tension aériennes (110 kV) et au-dessus d’une ligne à haute tension enfouie (également 110 kV). Dans ces essais, trois véhicules ont longé sans interruption pendant deux jours successifs les trois lignes de test à raison d’une heure chaque fois, matin, midi et soir. Les périodes étaient choisies de manière à tester les signaux de constellations de satellites différentes. Les véhicules roulaient à une vitesse comprise entre 5 et 20 km/h. Après évaluation des mesures, dont l’acquisition a été répétée six fois en utilisant trois systèmes de guidage différents sur deux sites, aucun impact négatif des infrastructures électriques sur la fiabilité des systèmes d’autoguidage n’a été relevé. Ni les lignes aériennes ni les câbles enterrés ne peuvent donc être incriminés de manière certaine pour les perturbations affectant les systèmes de guidage. En revanche, des différences nettes de fiabilité du positionnement ont été observées entre les différents systèmes de guidage. La conclusion qui s’impose est que la qualité des antennes et du traitement des signaux, ainsi que celle de l’installation ont un impact sur la fiabilité qui dépasse de loin l’impact de la distance par rapport aux lignes électriques.

Conclusion

Les mesures réalisées par l’École de machinisme agricole de Triesdorf et la Haute école de Weihenstephan-Triesdorf avaient pour but de déterminer l’influence sur les systèmes d’autoguidage des lignes électriques aériennes et des câbles enterrés. Les mesures n’ont pas permis d’établir une relation quelconque entre les perturbations du signal et la présence des lignes aériennes ou des câbles enfouis.

Abréviations

GNSS : de l’anglais global navigation satellite system, les systèmes de navigation globale par satellite sont utilisés pour la localisation, la navigation et l’acquisition de données de position. RTK: de l’anglais real-time kinematic, la cinématique temps réel utilise les mesures de la phase des ondes porteuses des signaux émis par les systèmes de navigation par satellites. La précision obtenue est comprise entre 1 et 2 cm. EMI : de l’anglais electromagnetic interference, le terme générique interférences électromagnétiques désigne les perturbations électromagnétiques et la somme des émissions électromagnétiques (EEM) et de la susceptibilité électromagnétique (SEM).

Aperçu des trois principaux systèmes GNSS Système GNSS Mise en service Fréquences des différents systèmes GNSS

Navstar GPS USA 1995 L5 L2 L1 1176,450 1227,600 1575,420 MHz Glonass Rus 1996/2011 (redémarrage en 2011 après perte en 1996 de la moitié de ses satellites pour obsolescence) L5R L3PT L2PT L1CR L1PT 1176,450 1201,500 1246,000 1575,420 1602,000 MHz Galileo EU 2020 (probablement complet) E5a/E5b

E4 E3 E6

L6 E2/L1/E1 1278,750 1215,000 1256,000 1278,750 1544,500 1575,420 MHz Source : Wikipédia, état en 2020

Précision de positionnement Source Erreur temporelle Erreur spatiale

Position du satellite De 6 à 60 ns* De 1 à 10 m Dérive temporelle De 0 à 9 ns De 0 à 1,5 m Ionosphère De 0 à 180 ns De 0 à 30 m Troposphère De 0 à 60 ns De 0 à 10 m Évanouissement dû aux trajets muliples De 0 à 6 ns De 0 à 1 m Précision de positionnement avec des mesures non corrigées (User Range Error, URE) : elle est meilleure en cas de réception d’un nombre de satellites supérieur à quatre. * Une nanoseconde (ns) est une fraction décimale de la seconde (1 s = 1 000 000 000 ns).

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