TASCHEN Magazine Hiver 2015/16 (Édition Française)

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Hiver 2015/16

la tête et les jambes Comment Gisele Bündchen a conquis son monde Page 120

l’allemagne revisitée

Un fantastique périple en couleurs à travers l’Allemagne du tournant du xxe siècle Page 36

Mad Men, saison 8

Les rebondissements, les tournants et les talents de la série campée dans l’univers de la publicité Page 96

tout ou rien

Gay Talese évoque son tête-à-tête manqué avec Sinatra et comment cette anecdote a donné naissance au Nouveau Journalisme Page 82

postures de paix

Le tour du monde du yoga de Michael O’Neill Page 62

trames de génie

L’incomparable univers des toiles de Vermeer Page 12

les liaisons dangereuses La captivante rétrospective de 35 ans de carrière de Bettina Rheims Page 26


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Souriez ! Le magazine TASCHEN spécial Noël est sorti !

Feuilletez-le, savourez-le, et n’oubliez pas de jeter un œil sur la nouvelle Édition collector de Bettina Rheims (page 26) Photo : Charlotte Gainsbourg par Bettina Rheims, 2007


Est. 1980

Never bore, always excite!

Couverture : Marthe en guêpière, février 1987, Paris © Bettina Rheims

82

Toutes les photos © TASCHEN GmbH sauf indication contraire : 12–17 © bpk | Gemäldegalerie, SMB | Volker Schneider; 18 © National Gallery of Art, Washington, DC; 19 © The Frick Collection, New York; 20 © National Gallery of Ireland, Dublin; 21 © Margareta Svensson, Amsterdam; 22/23 © The Frick Collection, New York; 25 © Kunsthistorisches Museum, Wien; 26–35 © Bettina Rheims; 50/51, 54/55, 61: © The Collection of Kendra and Allan Daniel; 52, 56b: © National Library of Norway; 62–74 © 2015 Michael O’Neill; 75 © Photo: Bia Setti; 76–80 ©

Carrie Solomon; 82/83 © John Bryson/Sygma/Corbis; 92–93t © Phil Stern Estate, courtesy of the Fahey/Klein Gallery, Los Angeles; 94 Photo: Burt Glinn; 96–107 © 2015 AMC Network Entertainment LLC. All rights reserved; 108–119 © 1998–2015 NK Guy; 122/123 © Rankin/Trunk Archive; 124 © Paulo Vainer, Vogue Brasil; 125 © Inez & Vinoodh; 126–127 © Mario Testino/Art Partner licensing; 128 © Henrique Gendre, Vogue Brasil; 129 © Mert Alas & Marcus Piggott/Art Partner licensing; 130 © Brett Doonan; 131 © Juergen Teller; 134/135 © Tó Mané; 136 © John Severson; 139 © Bev Morgan; 140 © Ed Freeman; 141 © Jeff Divine; 142, 145 © LeRoy Grannis; 144 © Earl Newman; 147 © Don Trunick

Texte : Agnès Guillemot, Alice Petillot et Arnaud Briand Conception : Andy Disl & Benedikt Taschen Coordination : Florian Kobler Fabrication : Claudia Frey & Ute Wachendorf Direction et production : Benedikt Taschen

Imprimé en Allemagne Publié par TASCHEN Hohenzollernring 53, D–50672 Cologne Tél. : +49-221-20 18 00 – contact@taschen.com Contact publicité : media@taschen.com

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DES LIVRES COUPs DE CŒUR

Les amis, la famille et les collaborateurs de TASCHEN dévoilent leurs titres préférés

UN AVANT-GOÛT DE NOËL

Des pépites du 7 e art aux photographies au clair de lune… un gisement de livres pour des fêtes de fin d’année magiques

L’HOMME AU PINCEAU D’OR

La monographie XL de l’œuvre de Vermeer

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BETTINA RHEIMS À FLEUR DE PEAU

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50

35 années d’une carrière insolente et provocante

NATION DE LUMIÈRE ET D’ESPOIR

Portrait en photochromes de l’Allemagne à l’orée de 1900

NIELSEN L’ENCHANTEUR

Joyaux de la littérature pour enfants du début du xxe siècle

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76

L’ŒIL DE LA CONSCIENCE

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LES CHEFS À FRIGOS OUVERTS

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Méditation d’un photographe sur l’essence du yoga

Des stars étoilées révèlent leurs ingrédients secrets

82 DANS

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50

96

LA PEAU DE « THE VOICE »

Le portrait de Sinatra par Gay Talese et l’avènement du Nouveau Journalisme

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LE RETOUR D’UN TOP MODEL SEXY

Gisele Bündchen : rétrospective luxuriante de la bombe brésilienne

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SUR LA CRÊTE DE LA VAGUE

L’histoire définitive des origines du surf

LE BEST OF DE TASCHEN

Les plus belles rééditions, de Peter Beard au Bauhaus

Bibliotheca universalis

Les incontournables références en matière de créativité dans une collection compacte : bientôt plus de 100 titres disponibles !

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Petite Collection 2.0

QUAND LE DÉSERT S’EMBRASE

Le meilleur de Burning Man en photos

PICTOGRAMMES ET CLICHÉS

Les stéréotypes de l’Orient et de l’Occident vus par Yang Liu

UN JOLI COUP DE PUB

Dans les coulisses de Mad Men, phénomène artistique du petit écran

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Quand les incontournables petits livres d’art de TASCHEN s’offrent une cure de jouvence

The TASCHEN Gallery

Les dernières nouvelles de notre espace d’exposition à L.A.

INVESTISSEZ DANS L’ART

Les dernières parutions de nos Éditions d’art, le nec plus ultra de notre catalogue

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Mon livre TASCHEN préféré, c’est… Des célébrités partagent leurs coups de cœur

Vivienne Westwood « Ce qui est bon pour la planète est bon pour les gens. »

Donna Karan

« C’est un magnifique voyage à travers l’univers du yoga qui saisit l’esprit et l’âme de ses maîtres, de leur pratique et de leur peuple. Étudier cet héritage et parcourir l’Inde à travers le regard de Michael est un régal pour l’âme, le corps et l’esprit, une expérience inoubliable qui m’a véritablement transformée. »

« C’est génial d’être là, dans ce magnifique livre, l’ultime sur les Polaroïds d’Andy. »

Bjarke Ingels Illustrations de Robert Nippoldt

Debbie Harry

« Burning Man est une sorte de mirage créé par l’homme, qui transforme les rêves irréels en réalité concrète. Ce livre offre un aperçu de cette civilisation artistique et architecturale éphémère, un éclair de fiction devenu fait réel. »


Ai Weiwei

« Cette histoire matérielle est tellement riche et si bien présentée. Son contenu et sa présentation vous don­ nent une impressionnante idée de la vie en RDA. »

Nastassja Kinski « Des jours sombres du début de la Guerre froide à sa fin jubilatoire, Beyond the Wall immortalise un monde qui nous a tous changés. Ses pages traduisent la peur, l’espoir, le deuil, la passion et l’amour des gens. » « Beyond the Wall offre un incroyable aperçu historique d’un pays et d’une culture qui ont disparu. C’est le seul livre sur notre table basse, et il finit toujours par être ouvert par nos invi­ tés qui sont immédiatement intrigués. Tout le monde trouve quelque chose de fascinant dans ce livre, qu’on soit mordu d’Histoire ou non. »

Oren Peli « Beyond the Wall présente une collection complète d’objets que l’on peut qualifier d’excentriques, d’humains et de curieuse­ ment émouvants. »

Steve Martin


« Un hymne précieux à la gloire de l’âge d’or de la télé. » — Empire Magazine, Londres

XL L’univers des séries TV. Le meilleur des 25 dernières années € 49,99

The Making of Stanley Kubrick’s 2OO1: A Space Odyssey Édition anglaise uniquement € 59,99

Offres spéciales Noël

à moins de « … un voyage mouvementé au pays des souvenirs, à travers le monde cinématographique du plus sophistiqués des espions de Sa Majesté. » — Classic Driver, St Albans

Les Archives James Bond. Édition 2015 Nouvelle édition mise à jour, seulement € 49,99 Édition originale € 150

« On peut sauver un Noël rien qu’en offrant ce beau livre sur Michel-Ange. » — Front, Berlin

Michel-Ange. L’œuvre complet Nouvelle édition, seulement € 49,99 Édition originale € 150


« Des photos envoûtantes qui changent notre point de vue sur la place que nous occupons dans l’Univers. » — buzzfeed.com

XL

Prix Sympa

Léonard de Vinci. L’œuvre peint et graphique Nouvelle édition, seulement € 49,99 Édition originale € 150

« Somptueusement conçue et magnifiquement réalisée, l’étude complète la plus approfondie jamais publiée sur Léonard de Vinci. »

Expanding Universe. Photographs from the Hubble Space Telescope € 49,99

100 € XL

— Soloarte, Londres

« Vous n’avez sans doute jamais possédé votre propre exemplaire du calendrier Pirelli, et voilà l’occasion de les posséder TOUS, réunis dans une rétrospective enrichie d’inédits. » —i-D Magazine, Londres

Andy Warhol. Polaroids € 74,99

« Le charisme qui émane du livre est stupéfiant, mais l’usage génial que Warhol fait des Polaroïds est tout aussi fascinant. » — Wired.com

« Ces images sont une messe. Elles célèbrent la préciosité de la vie. » — Stern, Hambourg

Pirelli - Le Calendrier. 50 ans et plus € 49,99


William Blake. Les dessins pour la Divine Comédie de Dante € 99,99

« Monstrueux, divin, le livre le plus scandaleusement beau que j’ai dans ma collection (et que j’ai jamais possédé)... » — Skin Deep, Londres Hieronymus Bosch. L’œuvre complet€ € 99.99

Mondes et merveilles

à partir de

NYT. 36 Hours. World (3/36/365) Édition anglaise uniquement € 99,99

« Partez avec un sésame numérique qui vous permettra, pendant votre voyage, d’accéder à tous les restaurants, toutes les aventures et les visites touristiques recommandés. » — InStyle.com

« Une somme de travail étourdissante, même à l’une du niveau de TASCHEN. » — Empire Magazine, Londres

Les Archives Charlie Chaplin € 150


« Si la satisfaction immense d’un super fan est ce que vous cherchez, cet ouvrage fera l’affaire. » — AP, New York

The Rolling Stones € 99,99

100 €

« Vous allez posséder un morceau d’histoire de l’art. » —Quintessentially, Londres

Helmut Newton. SUMO. Revised by June Newton € 99,99

« Un précieux apport à la recherche à tout point de vue… de magnifiques dépliants permettent de découvrir les œuvres en grand, tandis qu’une série d’agrandissements permet de se pencher sur les moindres détails. » — Kunstchronik, Munich Gustav Klimt. Tout l’œuvre peint € 150


“Testinostérone.” — Madame Figaro, Paris

Mario Testino. SIR Édition limitée à 1 000 exemplaires signés € 500

Éditions

de luxe

à partir de

Hugh Hefner’s Playboy Édition limitée à 1 500 exemplaires signés € 1 000 Nouveau prix 2016: € 1 200

« C’est l’histoire de quelqu’un qui a indubitablement changé le monde… le meilleur livre d’histoire que le XXIe siècle ait produit pour l’instant. » — The Independent, Londres

ue q s e pr isé épu

« Pour l’amour de Ziggy Stardust, ces photos vintage de Bowie sont tout simplement sublimes. » — The Huffington Post, New York

Mick Rock. The Rise of David Bowie, 1972–1973 Édition limitée à 1 772 exemplaires signés € 500 Nouveau prix 2016: € 750


Robert Crumb. Sketchbooks 1982–2011 Édition limitée à 1 000 exemplaires signés € 750

« Cette édition limitée accompagnée de son tirage signé s’apparente davantage à une œuvre d’art et à un investissement qu’à un livre d’art. »

300 € — Marevueweb.com

Ai Weiwei Édition limitée à 1 000 exemplaires signés € 1 000

« Consacré à l’un des artistes conceptuels les plus éminents au monde, ce livre réunit des images inédites, des interviews et des créations uniques dans une monographie complète. » — Arts & Collections, Londres

Annie Leibovitz Édition limitée à 9 000 exemplaires signés € 2 000

« Il s’agit sans conteste d’un des ouvrages les plus galvanisants que j’ai acquis depuis des années, qui me rappelle le pouvoir que détient une image simple et honnête. » —thesartorialist.com National Geographic. Le Tour du monde en 125 ans Édition limitée à 125 000 exemplaires signés € 399


Chefs-d’œuvre à la loupe De nouvelles prises de vue pour Vermeer. L’Œuvre complet

Gemäldegalerie Berlin, 29 juin 2015, 13h33. Photographe : Volker Schneider.


Chez TASCHEN, nous avons la fierté et le privilège de travailler aux côtés de certains des plus grands maîtres de l’art de tous les temps. Nous œuvrons pour leur accorder, à tous sans exception, le respect et le traitement qu’ils méritent, et que méritent nos lecteurs, qu’il s’agisse d’un contemporain bien vivant ou d’une star du xviie siècle. En particulier, nous ne ménageons pas nos efforts pour présenter l’œuvre d’un artiste sous le meilleur jour possible, et nous avons souvent effectué de nouvelles prises de vue des peintures en utilisant les dernières technologies pour que les reproductions de nos livres soient le plus fidèle possible aux originaux. Dans le cas de l’ouvrage Vermeer. L’Œuvre complet, nous avons fait rephotographier dix-huit peintures sur les trente-cinq existantes, travaillant main dans la main avec certains des plus grands musées au monde comme le Metropolitan Museum et la Frick Collection à New York, la National Gallery of Art à Washington, le Koninklijk Kabinet van Schilderijen Mauritshuis à La Haye, le Städel Museum à Francfort ou la Gemäldegalerie Alte Meister à Dresde.


Dans Le Verre de vin (env. 1658–1660, détail),

le rapport qu’entretiennent les deux personnages l’un avec l’autre est particulièrement subtil et perceptible à plusieurs niveaux. Cette peinture marque les progrès de Vermeer dans sa compréhension de la psychologie tout comme dans son rendu de l’espace intérieur.


Le Verre de vin a été photographié à la Gemäldegalerie de Berlin. Quand bien même il ne s’agit pas de shooter une diva, ce chefd’œuvre est minutieusement préparé avant la prise de vue qui requiert toutes sortes de dispositions supplémentaires et de grandes précautions. Il faut d’abord bien la planifier. À cause des contraintes techniques et logistiques importantes que nécessite une telle prise de vue, elle ne peut avoir lieu que lorsque le musée est fermé au public. Ensuite, l’œuvre doit être retirée de son cadre, une opération qui monopolise toute une équipe de curateurs, de photographes, de conservateurs et du personnel de sécurité qui s’assurent que l’œuvre est protégée en permanence contre le moindre dommage. Enfin, les photographes utilisent eux aussi des techniques complexes, telles que la polarisation croisée, pour éviter les reflets produits involontairement par les craquelures – ces fissures superficielles dues au vieillissement de la peinture – et pour immortaliser l’œuvre dans toute sa beauté. Une fois les prises de vue réalisées, notre département en charge de la production les compare aux originaux pour s’assurer que les couleurs et le moindre détail sont reproduits avec la plus grande précision. Ce qui arrive ensuite, vous le saurez la prochaine fois : nous vous raconterons comment un livre XL de TASCHEN est imprimé et relié.


L’œil infaillible Du moindre détail domestique aux regards pleins de mystère, Johannes Vermeer a donné vie à la peinture à l’huile.

« Il y a tant de mystère dans chaque peinture, dans chaque femme qu’il représente, tant d’histoires suggérées mais non racontées. » — Tracy Chevalier, 2014

Dans la Dame au collier de perles (env. 1663–1664, détail), nous apercevons une jeune femme

en train d’agrémenter sa toilette. Comme dans La Jeune Fille à la perle, la plus célèbre peinture de Vermeer, l’œuvre prouve sa maîtrise absolue de la surface et de la texture du tissu et des bijoux.




Trames narratives

L’œuvre renommé de Johannes Vermeer ne compte que trente-cinq peintures, mais l’extraordinaire illusion de la réalité qu’elles produisent et leur puissance suggestive lui ont assuré une place parmi les artistes les plus admirés de l’Histoire.

Né à Delft, où il passé toute sa vie et mené sa carrière, Johannes Vermeer est considéré, avec Rembrandt, comme le représentant le plus célèbre et le plus important du Siècle d’or néerlandais, période si florissante en art. Vermeer incarne en effet son époque de manière exemplaire et son œuvre réunit tous les traits caractéristiques et remarquables de l’art hollandais de ce temps : le sens du réel, l’observation minutieuse et le refus de toute idéalisation. À cela s’ajoute une maîtrise exceptionnelle des techniques et des moyens picturaux, comme l’éclat velouté de la peinture appliquée en de minuscules touches – spécialité de Vermeer –, qui rend si magistrale le caractère illusionniste des représentations. Mais l’extraordinaire lumière et la force des tableaux de Vermeer ne sont pas dues qu’à cette habileté technique. Après trois premières œuvres de jeunesse, Vermeer n’a pratiquement plus peint que des intérieurs. Dans des pièces toujours

de musique, de recevoir ou d’écrire une lettre ; des couples, jouant de la musique ou conversant devant un verre de vin. En dépit ou peut-être à cause de cette spécialisation thématique, Vermeer est considéré comme le témoin le plus important de la vie hollandaise durant le Siècle d’or. Grâce à des tableaux comme La Laitière, Vue de Delft ou La Jeune Fille à la perle, qui ont marqué la culture visuelle occidentale, il a aussi immortalisé l’image de la nation hollandaise, une image connue du monde entier dans laquelle elle se reconnaît. Il n’existe guère de tableau qui, à l’instar de La Laitière, symbolise autant le caractère hollandais. La Jeune Fille à la perle n’a pas

«  En dépit ou peut-être à cause de cette spécialisation thématique, Vermeer est considéré comme le témoin majeur de la vie quotidienne hollandaise durant le Siècle d’or. » différentes, mais assez similaires, il représente des scènes paisibles comportant fréquemment un ou deux personnages, parfois davantage. Le choix des motifs est restreint : le plus souvent des jeunes femmes, en train de jouer d’un instrument Page ci-contre : La Fille au chapeau rouge (env. 1665–1667, détail) mêle traits du visage expressifs, cadrés serrés et atours exotiques extravagants. Ci-contre : Soldat et jeune fille riant (env. 1657–1659) appartient à l’une des séries de scènes de Vermeer représentant le thème de la séduction associée au vin ou à la musique. — 19 —

attendu le film de 2003 pour être le tableau le plus connu de Vermeer. Vue de Delft, le seul paysage peint par Vermeer, montre à la fois sa ville natale et une ville typiquement hollandaise, sise au bord de l’eau, sillonnée de canaux et dominée par un ciel aux nuages défilant à vive allure. Pour Marcel Proust, ce paysage urbain était « le plus beau tableau du monde ». Vermeer est longtemps resté un inconnu ayant surgi du néant et n’ayant laissé aucune trace, si ce n’est quelques tableaux. Le mythe est né, qui vient nourrir le culte du génie cher au xixe siècle. Il n’a rien perdu de sa fascination, et Vermeer est encore considéré – désormais à tort –


La lumière du jour traverse le vitrail, dans ce détail d’intérieur

de la Femme écrivant une lettre avec sa servante (env. 1670–1671). Aujourd’hui célèbre à travers le monde, la peinture ne fut jamais vendue du vivant de Vermeer. À sa mort, sa veuve la donna à un boulanger de Delft pour payer ses dettes.

« La palette de cet étrange peintre contient du bleu, du jaune citron, du gris perle, du noir, du blanc … l’arrangement … lui est aussi caracteristique que le noir, blanc, gris, rose l’est à Velásquez. » — Vincent van Gogh, 1888


comme un peintre dont nous ne savons que très peu de choses et qui nous a laissé des œuvres énigmatiques. Et il est vrai que, en dehors de ses œuvres, aucun témoignage personnel ne nous est parvenu, aucune note écrite le concernant, ni aucune lettre de sa main. Les quelques rares documents dont nous disposons dessinent toutefois le portrait d’un peintre qui jouissait d’un certain prestige auprès de ses pairs. Il ne fut guère connu de son vivant qu’à Delft, sa ville natale, et d’un cercle restreint de commanditaires ; son nom tomba presque dans l’oubli après sa mort, sauf de quelques collectionneurs et marchands d’art hollandais. Hors des frontières des Pays-Bas, ses tableaux étaient attribués à d’autres peintres. Vermeer mourut à l’âge de quarante-trois ans ; et de ses vingt-deux ans d’activité n’ont été conservés que trente-

« Vermeer est longtemps resté un inconnu ayant surgi du néant et n’ayant laissé aucune trace, si ce n’est quelques tableaux. » cinq tableaux, la plupart de petites ou de moyennes dimensions – un œuvre restreint qui ne traite en outre que quelques sujets issus de la vie de la bourgeoisie hollandaise. Il ne fut redécouvert qu’en 1860, mais connut alors, en quelques décennies, une gloire posthume spectaculaire.Les plus grands progrès dans la connaissance de la famille de Vermeer et de son environnement, dans celle des conditions de vie d’une ville hollandaise n’ont été comprises que lorsque l’Américain John Michael Montias, historien de l’art et de l’économie, étudia la situation matérielle des artistes hollandais au xviie siècle et chercha des informations dans les archives de la guilde de Saint-Luc de Delft. Nous savons depuis que le père de Vermeer n’était pas seulement tisserand de soie mais qu’il travaillait aussi comme aubergiste et marchand d’art, et nous avons fait plus ample connaissance avec sa belle-mère, Maria Thins. Un nombre incalculable d’ouvrages sont Ci-dessus : La perle chatoyante et le regard de La Jeune Fille à la perle (env. 1665–1667). Le plus célèbre sujet de Vermeer se tourne vers nous, les lèvres humides légèrement entrouvertes, semblant nous dire quelque chose… mais quoi ? Peu après sa redécouverte à la fin du xixe siècle, La Jeune Fille à la perle fut saluée comme la « Mona Lisa hollandaise ». Le mystère fascinant de sa composition sommaire a inspiré ultérieurement le roman éponyme, puis son adaptation au cinéma.

consacrés à Vermeer. Ils offrent un large éventail d’interprétations : selon certaines, ses scènes de la vie quotidienne n’auraient aucune signification au-delà d’une restitution fidèle de la scène ; selon d’autres, elles ont une signification profonde, philosophique ou religieuse. La première théorie, la plus ancienne, a perdu de plus en plus de terrain, tandis que la thèse du sens caché des tableaux de Vermeer est unanimement reconnue depuis les dernières décennies. Ces dernières années, deux thèmes ont particulièrement occupé les chercheurs : d’une part, la question, très controversée, de savoir si Vermeer avait utilisé des instruments d’optique telle que la camera obscura pour mettre au point ses compositions ; d’autre part, la discussion, menée dans le contexte des études contemporaines sur le genre, sur le rôle central des femmes dans ses tableaux, et la puissance d’expression de ses œuvres en ce qui — 21 —

concerne la position de la femme dans la société hollandaise du xviie siècle. Contrairement à ces récentes études spécialisées, le présent ouvrage se veut une monographie exhaustive, abordant tous les aspects de la vie et de l’œuvre de ce génie artistique universel.



Un soupçon de doute ou d’hésitation semble planer dans l’atmosphère de

La Maîtresse et la Servante (env. 1666–1667, détail), une des premières œuvres de Vermeer dans laquelle son habileté à mettre en scène les attitudes et les regards est déjà perceptible.


Grâce aux nouvelles prises de vue réalisées pour l’occasion, cette monographie XL de Vermeer célèbre un fascinant mélange de mimétisme et de mystère. Ci-contre : L’Art de la peinture (env. 1666–1668, détail) montre un modèle féminin de l’artiste posant habillée en Clio, la muse de l’Histoire. Cette représentation fait figure d’exception dans l’œuvre de Vermeer, à plusieurs titres. Elle ne dépeint pas un épisode de la vie quo­ tidienne de la société hollandaise contemporaine, mais est plutôt une œuvre allégorique abordant l’acte de peindre en lui-même.

Johannes Vermeer. L’œuvre complet Karl Schütz Relié, avec 3 pages dépliantes, 29 x 39,5 cm, 258 pages € 99,99

Cette édition XL rassemble le catalogue complet de l’œuvre de Vermeer, regroupant ses scènes tranquilles et pourtant captivantes, trésors des galeries et musées européens et américains. Grâce à de nouvelles reproductions, les peintures de Vermeer se dévoilent en grand format et à travers trois doubles pages dépliantes. De nombreux détails mettent en valeur le talent extraordinaire de l’artiste à témoigner des traditions et modes de l’âge d’or néerlandais, mais aussi à raconter toute une histoire à partir d’une simple attitude ou d’une expression fugace, qu’il s’agisse du regard envoûtant de La Jeune Fille à la perle ou de la mystérieuse correspondance de La Liseuse à la fenêtre.

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XL



L’inclassable Bettina Rheims Plus de 500 photographies tirées de 35 années d’une carrière insolente et provocante


Madonna Blue, smiling in shiny blue underpants, septembre 1994, New York.


Ci-dessus : William, juillet 1990, Paris. Page ci-contre : Lara, janvier 2008, Paris (Édition d’art nos 1 à 100). — 28 —



À ne pas manquer : la rétrospective sur Bettina Rheims à la Maison européenne de la photographie, à Paris, du 27 janvier au 27 mars 2016 Page ci-contre : Rose McGowan sinking in a bath of roses, septembre 1996, New York. Ci-dessus : Nu de dos attaché à mon lit, février 1981, Paris. Ci-dessous, à gauche : 20 février I, février 1991, Paris. Ci-dessous, à droite : 20 février III, février 1991, Paris.

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Ci-dessus : Sibyl rouge avec un chandail vert, janvier 1996, Paris. Page ci-contre : Close-up of Karolína Kurková, the most beautiful girl in town, décembre 2001, Paris. — 33 —



Ci-contre : Gina and Elizabeth kissing, mars 1995, Los Angeles. Page ci-contre : Gwen Stefani from No Doubt, April 1996, New York.

Limité à un total de 1 000 exemplaires signés par Bettina Rheims Depuis ses premières photographies fin 1970, Bettina Rheims a constamment défié le genre photographique. De sa série sur les stripteaseuses de Pigalle (1980) au cycle sur la vie de Jésus dans I.N.R.I. (1998), ou d’une publicité pour Chanel à son travail sur le genre dans Gender Studies (2011), son œuvre bouscule l’iconographie et les thèmes traditionnels, cherchant à s’infiltrer dans l’infime intersection entre deux grandes préoccupations esthétiques : la beauté et l’imperfection. Cette édition forme son ultime rétrospective, retraçant grâce à plus de 500 photographies la carrière d’une photographe tour à tour provocante, hypnotisante et avant-gardiste. Composé d’images sélectionnées et organisées par Bettina Rheims, cet ouvrage mêle séries iconiques comme Chambre Close et d’autres inédites piochées dans ses archives. En complément, un volume rassemble coupures de presse, documents dévoilant l’envers du décor et souvenirs personnels pour retracer sa brillante carrière.

XL XL

Édition d’art nos 1 à 100

Lara, janvier 2008, Paris (page 29) Tirage C-print sur papier satiné Kodak RC

Édition d’art nos 101 à 200

Marthe en guêpière, février 1987, Paris (couverture du magazine). Tirage jet d’encre sur papier Harman Gloss, signé et daté au verso par Bettina Rheims, 30 x 40 cm (papier) € 1 250 chacun

Édition collector nos 201 à 1 000

Bettina Rheims sous la direction de Patrick Remy Volume relié (454 pages) et livret (146 pages) sous coffret de luxe, 30,5 x 39 cm

Édition limitée à 800 exemplaires signés par Bettina Rheims. € 500 — 35 —


Schwerin, le palais grand-ducal, faรงade est.


un pays perdu

Les premières images en couleurs de l’Allemagne révèlent la beauté et l’optimisme de la période d’avant-guerre



Scènes paisibles

Près de 800 photochromes de l’Allemagne, prises entre 1889 et 1911, immortalisent paysages idylliques, cités médiévales et rues pleines de charme.

Belle Époque, empire wilhelminien, premier miracle économique allemand… Tels sont les mots qui évoquent l’Allemagne à l’orée du xxe siècle. Pour bon nombre de ses contemporains, c’est une époque d’épanouissement économique et culturel, de prospérité et d’optimisme. Il s’agit surtout d’une époque de paix inhabituellement longue à la fin d’un xixe siècle turbulent, marqué par des bouleversements historiques sur les plans politique, économique, industriel, social et en matière de tranports. Le dernier grand conflit a été la guerre franco-prussienne de 1870–1871 qui rapporte à l’Allemagne les énormes réparations que doit verser la Ci-dessus : Le château de Sigmaringen, résidence de la branche souabe de la dynastie des Hohenzollern. Page ci-contre : Hohe Sonne, Eisenach, avec vue sur le château de la Wartbourg.

France vaincue (un moteur important de l’essor wilhelminien), mais débouche aussi sur la création de l’Empire allemand (1871– 1918). Le roi de Prusse Guillaume Ier, de la

« Les images dégagent une impression d’harmonie, une atmosphère romantique. » maison Hohenzollern, est proclamé empereur. Le Reich allemand, monarchie constitutionnelle fédérale sous hégémonie prussienne, regroupe les quatre royaumes de la Prusse (avec ses nombreuses provinces), la Bavière, le Wurtemberg et la Saxe, six grands-duchés, cinq duchés, sept principautés, les trois villes hanséatiques Lübeck, — 39 —

Hambourg et Brême – et la « terre d’Empire », l’Alsace-Lorraine, annexée par les Allemands contre la volonté de sa population et traitée comme une province prussienne. De juin 1888 à la fin de la Première Guerre mondiale, qui le voit abdiquer le 28 novembre 1918, l’empereur Guillaume II règne sur l’Allemagne. Toute une époque qui va porter son nom ! Synonyme d’apparences fastueuses, le « wilhelminisme » incarne aussi une société marquée par des tensions internes. Vers 1890, on assiste à un essor économique dynamique qui durera pratiquement sans interruption jusqu’à la Première Guerre mondiale. D’importants pics de croissance sont surtout générés par les « nouvelles » industries (construction automobile, électro-technologie, industrie optique et chimique). Désormais, les gens sont plus nombreux à travailler dans


Le pont de la Bastei vu de Ferdinandstein. Dressé à 195 mètres au-dessus de l’Elbe, le « bastion rocheux » de la Bastei qui offre une vue grandiose sur la vallée et le massif de l’Elbsandsteingebirge, est l’un des sites les plus populaires de la Suisse saxonne.



l’industrie que dans l’agriculture ; l’Allemagne se transforme définitivement en un pays industriel, avec tous les avantages et les inconvénients que cela implique. La

« Les photochromes, qui ressuscitent pour nous ce “monde intact” dans sa splendeur d’antan, semblent souvent étonnamment “calmes”. » moyenne et la haute bourgeoisie, les premières à profiter des progrès techniques et économiques, ont de plus en plus d’argent et de temps libre. Tout à fait dans l’esprit de la Belle Époque, elles peuvent profiter de la vie sur les boulevards des grandes villes, dans les cafés, les salons, les théâtres, les stations balnéaires et les villégiatures, tandis que la majorité des ouvriers, après de longues heures passées dans les usines ou aux champs, rentrent dans les arrière-cours sombres des villes, qui s’agrandissent à vue d’œil, ou dans de petites maisons à la campagne. Le développement des moyens de transport entraîne de nouvelles opportunités de mobilité pour un nombre toujours plus grand de voyageurs. Il n’est plus possible

de s’imaginer la vie sans chemins de fer, tramways électriques et vapeurs. On croise même déjà, ici et là, une automobile dans les rues. Et la conquête de l’espace aérien n’est pas en reste : le 2 juillet 1900, le premier dirigeable vole au-dessus du lac de Constance et, en 1891, Otto Lilienthal est le premier homme à s’élever dans les airs avec un planeur, quand bien même il ne parcourt que 25 mètres. La révolution des transports et l’allongement du temps consacré aux loisirs favorisent incontestablement le tourisme. Des îles de la mer du Nord aux Alpes, l’Allemagne est devenue un pays que l’on aime visiter, et le tourisme un secteur commercial important. On ne voyage plus sur commande ou par nécessité, mais par plaisir, pour pas-

Ci-dessus : Château de Neuschwanstein, chambre à coucher décorée de scènes de la légende de Tristan. Ci-contre : Germanisches Nationalmuseum, cuisine ancienne. Page ci-contre : Voici un château romantique à l’état pur : le château de Rheinstein près de Trechtingshausen. Cet ancien poste de péage du début du xive siècle, tombé en ruine au xviie siècle, fut acheté, avec le rocher, par le prince Frédéric de Prusse en 1823. — 42 —

ser le temps agréablement, pour « échapper au quotidien ». Si le début du xixe siècle a surtout vu passer des voyageurs isolés, le voyage tend maintenant à devenir un « phénomène de masse ». Et sans être à la portée du « citoyen moyen », il n’est plus le privilège de quelques rares individus. Les organisateurs de voyages ont le vent en poupe, proposent toutes sortes de tours, éditent des prospectus. Apparu pour la première fois en 1832, le Baedeker est devenu un guide dont la plupart des voyageurs ne sauraient se passer. Des touristes envoient des douzaines de cartes postales ou achètent, en guise de souvenir, la toute dernière invention qui fait sensation : le photochrome ! Le fait que les photochromes aient été destinés aux touristes explique les sujets choisis pour présenter cette Allemagne du tournant du siècle dans notre livre : ce que nous avons sous les yeux n’est pas une description exhaustive du pays, avec ses zones de lumière et d’ombre, mais une suite d’images consacrées aux attractions touristiques connues et aux sites intéressants. Si l’on songe aux développements dynamiques décrits plus haut, les photochromes semblent souvent étonnamment « calmes ». Avec leurs couleurs séduisantes, si particulières, ils dégagent une impression d’harmonie, une atmosphère romantique – ils entraînaient les voyageurs de l’époque dans un « ailleurs » nostalgique, et continuent de le faire. Et ce, d’autant plus qu’ils redonnent vie à un monde que les circonstances et les destructions terribles causées par les guerres du xxe siècle ont enseveli à maints égards. Rendons grâce aux « photos-souvenirs » qui ressuscitent pour nous ce « monde intact » dans sa splendeur d’antan et remercions les brillants artisans qui nous l’offrent en couleurs.



Westerland, ch창teaux de sable et dunes.


Les bains de mer sont aussi le lieu idéal pour faire la connaissance d’un « homme du monde » et il n’est pas rare que les mères s’y mettent en quête d’un bon parti pour leurs filles. Sur la plage, on retrouve la fine fleur de la société tout aussi élégamment vêtue. Il faut dire que les plaisirs de la baignade tels que nous les concevons aujourd’hui n’existent pas encore ; d’ailleurs, on ne nage pas, on « séjourne dans l’eau ». Au tournant du xxe siècle, le séjour balnéaire, initialement réservé aux curistes, est devenu une distraction mondaine.


La création de l’Empire allemand en 1871 est une « promotion » pour Berlin, car la capitale de la Prusse devient celle de l’Allemagne tout entière. S’il est vrai que tout le monde ne s’accorde alors pas à penser que Berlin est à la hauteur du défi, il reste que l’« Athènes de la Sprée » connaît une véritable métamorphose au cours des trois décennies suivantes : la résidence royale de province devient une métropole cosmopolite. Remarquant la rapidité extra­ordinaire de ces transformations, Mark Twain, enthousiaste, parlera même en 1892 du « Chicago de l’Europe ».


Berlin, la cathédrale et le pont Frédéric.


Hildesheim, la Knochenhaueramtshaus (ancienne maison corporative des bouchers). Page ci-contre : Wernigerode, l’hôtel de ville.


Des Alpes bavaroises à la côte Baltique

Sillonnant l’Allemagne de long en large, cette remarquable anthologie présente les premières « images photographiques » en couleurs d’une nation jeune, prospère et confiante en l’avenir. Réalisé par les auteurs du best-seller American Odyssey, ce livre comprend quelque 800 photochromes offrant un panorama fascinant et poignant des sites les plus beaux et les plus mythiques du pays, avant que ne surviennent les ravages du temps et les traumatismes de l’Histoire.

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XL L’Allemagne vers 1900. Portrait en couleurs Marc Walter, Sabine Arqué, Karin Lelonek Relié, avec 3 pages dépliantes, 29 x 39,5 cm, 612 pages € 150



Dans Le Géant sans cœur, un prince et une princesse se mettent en chemin

pour trouver le cœur d’un géant diabolique. « Sur cette île se dresse une église. Dans cette église, il y a un puits. Dans ce puits, il y a une cane. Dans cette cane, il y a un œuf. Dans cet œuf, il y a mon cœur.  »

Subtile beauté de conte de fées

Un nouveau souffle pour À l’est du soleil et à l’ouest de la lune, l’œuvre illustrée la plus ambitieuse de Kay Nielsen


Les origines des fameux contes populaires de Norvège Par Noel Daniel

En 1840, les folkloristes norvégiens Peter Christen Asbjørnsen et Jørgen Engebretsen Moe peaufinaient leur premier recueil de contes populaires, qu’ils avaient dénichés dans les montagnes arides et reculées, les hauts plateaux et les fjords de Norvège. Amis depuis l’adolescence, ils nourrissaient une passion commune pour le folklore de leur pays natal et avaient passé des

années à voyager, chacun de leur côté et à pied, sillonnant villages ruraux, communautés de pêcheurs et de mineurs pour transcrire les contes locaux peuplés de trolls et de sorcières. Fascinés par le mélange unique entre mythologie païenne nordique, sagas ancestrales des Vikings, coutumes locales et reliquats des missionnaires chrétiens arrivés sur le continent

quelque mille ans plus tôt, Asbjørnsen et Moe allaient de composer à partir de rien un trésor inédit de contes populaires norvégiens autochtones. Pourtant, quand les deux amis présentèrent le fruit de leur labeur aux maisons d’édition, ils ne suscitèrent pas l’enthousiasme de leurs interlocuteurs. Les contes étaient jugés frivoles et infantiles, sans intérêt pour les lecteurs. Le recueil fut finalement publié en 1841 et, bien que mince et anonyme, il séduisit immédiatement les lettrés de Norvège et du reste de l’Europe. En Allemagne, les frères Grimm, dont le travail sur les contes populaires germaniques, publié en 1812, avait inspiré Asbjørnsen et Moe, quali-

« Les contes présentaient une histoire populaire, un consensus entre voix passées et présentes, reflet d’une culture norvégienne rurale unique. » fièrent leurs petites histoires norvégiennes de « meilleurs contes populaires au monde ». La publication ultérieure d’autres contes, notamment d’un gros recueil de soixante histoires en 1851–1852 (dont sont extraits la plupart des contes présentés dans cet ouvrage) a largement façonné l’identité nationale et la langue de la Norvège, ce qui se ressent encore fortement aujourd’hui. Malgré sa riche tradition de transmission orale, la Norvège avait jusqu’alors un corpus littéraire autochtone très réduit en raiCi-contre : Les contes populaires d’Asbjørnsen et Moe se déroulent dans des paysages hostiles peuplés de trolls, de sorcières et de géants. Cette photo a été prise aux alentours de 1880 par Axel Lindahl dans la vallée de Nærøy, dans l’ouest de la Norvège. Page ci-contre : Dans Les Trois Princesses du Pays Blanc, un jeune roi fait un long et périlleux voyage pour retourner chez lui, auprès de sa princesse. « Après avoir marché un long moment, il atteignit un mont où il rencontra le maître des animaux de la forêt. L’homme offrit alors au roi une paire de skis. » — 52 —



Dans Les Trois Princesses du Pays Blanc, un pêcheur

scelle un marché qui confronte son fils à une succession d’événements périlleux. « Tu arriveras devant trois princesses enfouies dans le sol si bien que seules leurs têtes dépasseront. »


« Nielsen nous ravit avec son exubérance haute en couleur, ses dessins et son inventivité orientale, inspirés des peintures de l’Italie primitive qu’il adorait, des délicates miniatures persanes et des paysages indiens et chinois. » — The Daily Telegraph, Londres


son de la forte domination danoise depuis vait se développer sans perdre contact avec 400 ans : bien que le degré d’alphabétisases racines. tion fût élevé dans le pays, le danois était la Les communautés rurales de Norvège que seule langue autorisée à l’écrit. Avec leur Asbjørnsen et Moe visitèrent avaient anthologie, Asbjørnsen et Moe exploiconnu bien des souffrances pendant les tèrent le riche héritage narratif norvégien premières décennies du xixe siècle : paujusqu’alors oral et local, offrant aux Norvé- vreté, taux de mortalité infantile de 40 %, espérance de vie atteignant à peine la cingiens une forme hybride de leur langue quantaine d’années, et luttes acharnées écrite qui simplifiait le foisonnement de contre le Danemark et la Suède. Dans les dialectes parlés et ressuscita le norvégien. zones les plus reculées de la campagne Elle établit un modèle à partir duquel le norvégienne, la culture paysanne était la langage écrit put évoluer, et donna naissance à deux styles écrits encore pratiqués plus mise à mal. Or ce fut justement cette culture, qui jouissait de la tradition orale la aujourd’hui. plus profondément ancrée et la plus riche, La conviction largement répandue selon renforcée par son isolement et les longues laquelle les contes exprimaient la voix d’une culture norvégienne propre participa soirées de l’hiver scandinave, qui forgea un art consommé de la narration. Tout à l’essor et à l’importance accordée aux contes. Elle apporta une réponse à la ques- comme les frères Grimm, Asbjørnsen et tion qui attisait le débat public, dans la fou- Moe participèrent à l’effort, né de l’ère romantique, pour immortaliser les hislée de la première Constitution norvégienne, rédigée en 1814, lorsque la Norvège toires vernaculaires. Toutefois, tandis que les frères Grimm s’étaient largement repoconquit son indépendance partielle vis-àvis du Danemark : qui sommes-nous quand sés sur une poignée de conteurs locaux ainsi que sur des sources littéraires, Asbnous ne sommes pas régis par d’autres ? jørnsen et Les contes Moe incarprésentaient « C’est dans les communautés nèrent une histoire paysannes les plus reculées que l’on l’idéal du populaire, rencontrait la plus riche tradition orale, folkloriste un consensus du xixe siècle entre voix renforcée par l’isolement et les siècle, ce passées et longues soirées de l’hiver scandinave. » chasseur présentes, d’histoires reflet d’une culture norvégienne rurale unique, loin du itinérant parcourant les territoires les plus isolés. Asbjørnsen et Moe aidèrent à façonpouvoir central exercé depuis Copenner l’identité culturelle de ce peuple dont hague. C’était un héritage à partir duquel ils voulaient préserver les histoires tradiune société en voie de modernisation pou-

tionnelles, et leurs recueils de contes accompagnèrent le pays sur la longue route jusqu’à l’indépendance nationale, à laquelle il parvint finalement en 1905. Neuf ans plus tard, en 1914, la grande maison d’édition londonienne Hodder & Stoughton décida de publier une nouvelle édition illustrée des contes d’Asbjørnsen et Moe destinée aux lecteurs anglophones. Plusieurs éditions illustrées des contes avaient été publiées depuis 1879, mais les éditeurs virent le potentiel qu’ils pourraient tirer des avancées en matière d’impression en couleurs. Le recueil d’Asbjørnsen et Moe avait été traduit en anglais en 1859 par Sir George Webbe Dasent, et les éditeurs décidèrent de rassembler treize contes de ses traductions, ainsi qu’un conte d’Asbjornsen et Moe traduit par H. L. Braekstad et un conte danois traduit de fraîche date, Le Prince vouivre (qui ne figure pas dans les recueils d’Asbjørnsen et Moe), avec des illustrations commandées spécialement à l’étoile montante, Kay Nielsen. Ils intituCi-dessus : Un exemplaire signé de la première édition, vendu aux enchères en 2008, a été cédé au prix le plus élevé jamais atteint par un album pour enfants. Ci-contre : Les traditions narratives norvégiennes les plus riches se trouvaient dans les communautés rurales du pays. Cette photo d’une femme portant un panier et d’une mariée en robe folklorique et coiffe traditionnelle a été prise vers 1880 dans une ferme du centre de la Norvège par le célèbre photographe suédois Axel Lindahl. Page ci-contre : Dans Les Trois Princesses dans la Montagne Bleue, un soldat trouve un vieux sifflet rouillé dans un placard. « “Tiens, ce serait amusant d’essayer le son il produit.” Ce qu’il fit. Or, à peine l’eut-il coincé entre ses lèvres et soufflé dedans que des bruissements et des battements retentirent de part en part. L’instant d’après, une nuée d’oiseaux se posa sur les terres, tant et tant que le sol en était noir. »

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lèrent le recueil À l’est du soleil et à l’ouest puissantes maisons d’éditions et de galede la lune, d’après l’un des contes princiries d’art lucratives. paux, expression de coordonnées dérouUn siècle plus tôt, il aurait semblé profontantes orientant notre compas en direction dément ironique qu’un artiste danois d’un univers fantastique. Cette grande illustre les contes norvégiens d’Asbjørnsen maison jeta donc son dévolu sur les contes et Moe, étant donné l’histoire houleuse qui norvégiens divisait les d’Asbjørnsen « À l’est du soleil et à l’ouest de la deux nations, et Moe plus mais dans ce lune fut le recueil qui permit à de dix ans contexte Nielsen de percer et de s’octroyer d’internatioavant de demander à nalisation une place parmi les grands de Nielsen d’iltalents, l’âge d’or de l’illustration littéraire. » des lustrer les des affaires contes des et des maicélébrissimes frères Grimm et de Hans sons d’édition, il ne vint à l’idée de perChristian Andersen. sonne de protester contre ce choix. Il C’est ainsi, dans une Europe balayée par n’était pas nécessaire d’être allemand pour une vague de nationalisme romantique, illustrer les contes des frères Grimm, qu’un internationalisme poreux s’insinua tout comme l’héritage danois de Nielsen dans son sillage, surfant sur l’intérêt du n’était pas un obstacle à ce qu’il illustre des public pour la culture vernaculaire et le contes norvégiens. Au cours de sa carrière, folklore. Alors que le folklore reflétait le langage familier et les coutumes d’identités nationales spécifiques, les artistes qui illustraient les anthologies venaient d’une classe métropolitaine internationale engagée dans les fluctuations de mouvements artistiques qui franchissaient les frontières nationales, comme le mouvel´ment Arts & Crafts, l’Art nouveau, l’Art déco et le modernisme. Les artistes européens voyageaient pour étudier et travailler dans les grandes capitales, et Nielsen en faisait partie. Ils participèrent à la transformation de Londres, Paris, Berlin, Vienne, Munich et New York en villes dotées de cultures distinctes. Le Danois Nielsen se forma à Paris, s’impliqua dans le milieu théâtral de Copenhague et devint une vedette à Londres, avant de travailler comme directeur artistique à Hollywood. Ces artistes multilingues se nourrissaient d’influences internationales, étudiaient dans des écoles d’art d’envergure mondiale, recouraient à des techniques d’impression en couleurs ultra perfectionnées et œuvraient dans des villes riches de collections d’art et de musées, de scènes théâtrales nationales réputées, de Page ci-contre : Dans Le Ruban bleu, une mendiante et son fils découvrent un ruban bleu magique. Muni de ce talisman, le garçon est doté de pouvoirs surhumains et déjoue les pièges que ses agresseurs ne cessent de lui tendre. Ce faisant, il se fiance à la fille du roi d’Arabie. Ci-contre : Dans Le Fils de la veuve, un garçon pauvre est envoyé de par le monde par sa mère veuve. Il est engagé par un troll cruel mais réussit à s’échapper et arrive, déguisé, dans un royaume inconnu. La princesse le voit dépouillé de son déguisement et tombe amoureuse de lui. « Et là elle réussit à lui subtiliser le postiche. Le garçon était alors allongé dans toute sa beauté, aussi ravissant et blanc et rouge que sous le soleil matinal. » — 59 —

Nielsen illustra ainsi des contes norvégiens, allemands, danois, français et arabes. De fait, À l’est du soleil et à l’ouest de la lune fut le recueil qui permit à Nielsen de percer et de s’octroyer une place parmi les grands de l’âge d’or de l’illustration littéraire, lorsqu’il fut salué, dès sa sortie, comme un chef-d’œuvre du genre. Ainsi, même si la nature des contes semble spécifiquement norvégienne, ce livre témoigne surtout de l’importance des contes originaux et de l’artiste dont les illustrations ont fait de ce recueil un trésor du début du xxe siècle. En ce sens, À l’est du soleil et à l’ouest de la lune est, par essence, l’étoile polaire de l’illustration pour enfants au xxe siècle. La popularité de ces contes ne s’est jamais désavouée au fil du temps, et se révèle, aujourd’hui encore, sans frontières.


Des illustrations magiques et magistrales Un classique universel de l’illustration et de la littérature pour enfants

Pour rendre l’imaginaire des quinze contes norvégiens réunis dans À l’est du soleil et à l’ouest de la lune, Kay Nielsen a créé de véritable bijoux d’illustrations à la beauté enchanteresse. En 2008, l’édition originale du recueil a été vendue aux enchères au prix le plus élevé jamais atteint par un album pour enfants. Dans cette édition, TASCHEN redonne un nouveau souffle au livre de Nielsen, grâce à une nouvelle maquette comportant des illustrations sur double page et de nombreux détails. Le livre, inséré dans un coffret réalisé avec soin, est imprimé en cinq couleurs et comprend trois essais retraçant la carrière de Nielsen ainsi que l’histoire des contes populaires norvégiens.

Kay Nielsen. À l’est du soleil et à l’ouest de la lune Édition dirigée par Noel Daniel Relié sous coffret, avec ruban marque-page, 23 x 28,7 cm, 168 pages € 29,99

Retrouvez les autres recueils de contes de fées TASCHEN dirigés par Noel Daniel

€ 29,99 chacun — 60 —



Postures de paix Méditation d’un photographe sur l’essence du yoga


Urdhva dhanurasana (posture de la roue). Rive du Gange, Haridwar, 20 mars 2010.


« Le yoga est à un tournant de sa longue histoire. J’ai voulu rendre hommage à la tradition classique du yoga et immortaliser cette période charnière avant qu’elle ne s’efface. »


L’œil de la conscience Le photographe Michael O’Neill évoque son voyage à travers l’univers du yoga

« Si vous ne voyez pas Dieu en tout, vous ne voyez pas Dieu du tout. » — Yogi Bhajan

Plusieurs années avant de me mettre sérieusement à la pratique du yoga, je réalisai une série de photographies de Sa Sainteté le Dalaï-Lama. J’avais fait préparer à New York des panneaux recouverts de feuilles d’or que nous avions reconstitués sur place par une chaude journée d’été. Nous avions obtenu de merveilleux clichés du Dalaï-Lama en train de méditer, et à la fin de la séance, je dégoulinais de transpiration. Le protocole veut qu’on s’asseye un peu plus bas que Sa Sainteté, et j’étais donc agenouillé à sa gauche. Avec un sourire, il se baissa et passa délicatement l’index le long de ma joue pour essuyer les gouttes de sueur. C’était un geste simple et attentionné. Souriant de plus belle, il me dit : « Vous avez travaillé dur. » La poursuite perpétuelle et acharnée de l’excellence et de la perfection m’amenait à me dévouer corps et âme à mon travail. En tant que photographe puis portraitiste professionnel, j’accumulais les voyages, les journées de 14 heures, la tension des séances toutes en intensité et en concentration. Au bout de 35 ans de ce régime, il me fallut passer sous le bistouri pour remédier à une calcification dans la nuque. Au sortir de l’opération, mon bras droit – celui qui prenait les photos – était paralysé. Les neurologues m’annoncèrent que je ne pourrais plus Ci-contre : Le yoga est la science des angles et des triangles. Pour parvenir à l’incarnation de la géométrie de l’amour, il faut du désir, de la volonté et de la discipline. Yoga nidrasana (posture du repos du yogi) avec variante des mains. Kumbh Mela, Allahabad, 22 janvier 2007. Page ci-contre : Dans la posture de la montagne (tadasana), B. K. S. Iyengar fixe sur nous son regard de braise, apte à percer à jour tous les faux-semblants. Comme tous ceux venus lui rendre hommage avant moi, je fus interrogé par le maître avant de pouvoir travailler avec lui ; non pas pour qu’il me juge, mais pour qu’il sonde mon âme. Je fus le seul photographe autorisé à réaliser son portrait dans son temple privé du Ramamani Institute, bâti autour d’une colonne centrale. Celle-ci est l’épine dorsale de l’édifice, représentation de la colonne d’énergie (kundalini) qui culmine sur le toit dans une couronne formée de sept cobras. Iyengar a eu une énorme influence sur la diffusion de ce savoir ancestral qu’est le yoga et sur la promotion de la paix, de la santé et de la non-violence. C’était le génie du yoga, un parfait candidat pour un prix Nobel. B. K. S. Iyengar dans son temple de Hanuman, Pune, Inde, 8 mars 2006.

jamais m’en servir. Pour affronter cette épreuve, la première étape consista à étudier la méditation, à apprendre à rester tranquillement assis, à calmer la peur. Je consultai ensuite un brillant hydrothérapeute qui m’aida à bouger à nouveau mon bras, centimètre par centimètre, grâce à la résistance de l’eau. Parallè— 65 —

lement, je pratiquai la méditation avec Jon Kabat-Zinn, biologiste moléculaire et maître de la pleine conscience. Au bout d’un an, les nerfs que les spécialistes avaient décrétés morts s’étaient presque entièrement régénérés et j’avais retrouvé l’usage de mon bras. Le yoga et la méditation étaient devenus indispensables pour moi.


Ce voyage n’avait pas de destination spécifique. Je suivais simplement ma propre voie par le biais du yoga. Cette voie était un fleuve. Le but était le voyage en lui-même. Je n’étais pas retourné en Inde depuis des années, mais le Gange, « Ganga Mata », était une mère pour moi, mon flux d’énergie à travers ma relation avec le yoga. C’était un peu comme un radeau. La deuxième étape du voyage débuta quatre ans après mon opération. C’était durant le torride été new-yorkais ; après tant de nuits chaudes et moites, la soirée était enfin fraîche et le ciel d’un splendide bleu indigo. En sortant de mon cours de yoga, je remarquai une femme vêtue d’un impeccable chemisier blanc qui descendait la Cinquième Avenue en me souriant. C’était mon amie Susan White, directrice de la photographie à Vanity Fair. « Alors toi aussi, tu fais du yoga ? », me demanda-t-elle en voyant mon tapis sous mon bras. Après avoir évoqué nos

méthodes respectives, je lui avouai que je tenter d’établir un lien émotionnel et spirirêvais de réaliser un portfolio sur les maîtres tuel avec tous mes sujets afin de transcender du yoga. « Tout à fait », répondit-elle avant l’image et d’y apporter un supplément d’âme. d’ajouter : « Et ensuite un livre. » C’est ainsi Le yoga est à un tournant de sa longue hisque l’idée de cet ouvrage vit le jour. Susan me toire. À mesure que de nouveaux adeptes le suggéra de la soumettre à Graydon Carter, le découvrent et se l’approprient, il est inévirédacteur en table que le yoga tel « Autant le yoga que la photographie qu’il était traditionchef de Vanity Fair. nellement enseigné supposent une ouverture d’esprit J’avais deux connaisse des évopermettant de voir la réalité telle jours pour la lutions et des chanqu’elle est. » mettre sur gements. Si cerpapier avant de m’envoler vers Chengdu, en tains des grands maîtres orientaux dont Chine, pour photographier les pandas. l’héritage s’étend sur des siècles sont encore Quatre mois plus tard, je reçus le feu vert. en pleine activité, ce ne sera pas éternelleCe projet changea ma vie. Je m’étais ment le cas. La première vague de maîtres demandé quelle serait la prochaine étape et occidentaux appose sa marque indélébile sur j’avais désormais la réponse. La série sur le cette discipline. C’est pourquoi j’ai voulu yoga me permit de me recentrer. C’était mon rendre hommage à la tradition classique du idée, ma passion, et non un travail comme un yoga et immortaliser cette période charnière autre. Je décidai d’emblée de m’efforcer de avant qu’elle ne s’efface. En un sens, je suis faire plutôt que de prendre des photos, de devenu anthropologue. Outre ma famille, mes grandes passions dans la vie sont le yoga et la photographie. Ces deux pratiques exigent une concentration identique, une ouverture d’esprit permettant de voir la réalité telle qu’elle est, et de la patience. Toutes deux s’apparentent à la méditation, car elles vous absorbent entièrement. Elles vous plongent dans l’instant, dans le flux, et plus rien d’autre n’existe. C’est particulièrement vrai dans la chambre noire, dont l’atmosphère utérine et le clapotis permanent ont un flux, une alchimie. Née d’un univers liquide, votre création prend vie sur le papier. On plonge les mains dans le liquide révélateur comm son corps dans les eaux régénératrices du Gange, source de vie. Le yoga reflète cette impression de création et exige de retourner le miroir vers l’intérieur de soi pour se confronter aux fondements de son existence. Tout comme le yoga va perdre une dimension essentielle en cette époque avide de solutions rapides, la photographie, devenue numérique, perd un élément fondamental en faisant de la chambre noire un objet du passé. Ce projet a occupé dix ans de ma vie. Les photographies choisies sont issues de différentes périodes, de différentes approches. J’ai utilisé un petit appareil, puis un plus gros, puis un encore plus gros. J’ai travaillé dans des conditions difficiles avec une équipe de guides, de traducteurs, d’assistants et de chauffeurs, mais aussi tout seul avec mon appareil. Méditer avec certains gourous, être formé et béni par eux et me baiCi-contre : Le but du yoga est d’atteindre ce que Guru Prem Singh Khalsa appelle l’« aligne­ ment divin » par une série de postures qui favorisent la paix de l’esprit et du cœur et nous rapprochent de l’infini. Durvasasana (version accroupie de la posture du sage irascible Dur­ vasa), Nageshwar Giri. Haridwar, 20 mars 2010. — 66 —


Dharma Mittra m’a fait penser à un enfant avide d’exhiber ses prouesses,

non pour se mettre en valeur, mais pour la simple joie de montrer la perfection de son asana. Nous nous sommes retrouvés par un matin clair et glacé sur le pavé du Meatpacking District, qui avait à l’époque conservé son aspect d’origine. Avec un radiateur portatif à nos côtés, Dharma et moi nous sommes parfaitement synchronisés. À la fraction de seconde où ses mains ont touché ses cuisses et où il s’est immobilisé, j’ai appuyé sur le déclencheur.


« L’esprit n’a pas de forme particulière ni d’autre but que d’être un reflet. De même qu’un cristal reflète toutes les couleurs qu’il côtoie, l’esprit, lorsqu’il est tourné vers l’extérieur à travers les yeux et les autres sens, reflète le monde. » — Eddie Stern


gner dans le Gange avec 70 millions de personnes durant la fête de la Kumbh Mela furent parmi mes plus belles expériences. J’étais toujours malade en revenant d’Inde. Bien que mon épouse brésilienne me répétât « não mais », j’y retournai huit fois. Sans parler des voyages à travers les États-Unis pour photographier les maîtres américains et les célébrités ayant réussi à intégrer le yoga dans leur vie. Au départ, nous demandions aux sujets du portfolio de Vanity Fair où ils aimeCi-dessous : Les outils du yoga nous aident à atteindre une clarté cristalline. Dhanurasana (posture de l’arc), Christy Turlington Burns. Amagansett, 22 août 2006 Page ci-contre : Depuis les tout premiers enseignements, le yoga n’a pas été qualifié d’art, de discipline ou de religion, mais d’une science. En effet, la pratique du yoga nous offre une perception directe de nous-mêmes. Natarajasana (posture du roi de la danse), Shiva Rea. Lac d’El Mirage, Californie, 25 octobre 2006.

raient être photographiés, le lieu le plus Cruiser. Elle souhaita être photographiée au sacré et le plus spirituel à leurs yeux. Shiva Temple d’Or d’Amritsar, le lieu le plus sacré Rea laissa un message : ne serait-il pas merde la religion sikh. Quelque chose dans ce veilleux de faire poser deux bikers à ses portrait, son subtil sourire mystique, laisse côtés ? Mon entendre que sa méditaproducteur tion dans ce lieu était dif« Je voulais faire plutôt que de était encore à férente de ce qu’elle prendre des photos, de tenter la recherche aurait été au studio Gold’établir un lien émotionnel et de conducden Bridge de Santa spirituel avec tous mes sujets. » Monica. teurs de Harley quand Tous les treks effectués, j’eus enfin Shiva au bout du fil. « Tigers, toutes les photos réalisées, tous les maux de Michael, not bikers », corrigea-t-elle en riant ventre endurés et tout le temps passé loin de l’absurdité du malentendu. Et du jour au des miens furent amplement récompensés lendemain, il fallut trouver deux tigres pour quand elle me déclara que j’étais le canal par poser avec elle au bord du lac d’El Mirage. lequel « les traditions yogiques s’écoulent J’eus l’immense privilège de pouvoir photodes anciens ». graphier la grande Gurmukh, qui comprit Allez savoir si c’est vrai, mais j’aime à le l’importance de ce document. Nous avons penser… effectué ensemble un pèlerinage (yatra) au mont Kailash en traversant le Tibet en Land

« Ce livre est un formidable condensé de photos sur le yoga moderne immortalisées par Michael O’Neill… une chronique unique et précieuse d’une tradition ancestrale inscrite dans l’aventure humaine. » — Guru Dharam Khalsa

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« Un gourou est quelqu’un qui libère des ténèbres la lumière de nos esprits. » — Michael O’Neill


Les mystiques et les yogis sont les seuls à avoir les questions suivantes : Que cherchons-nous réellement ? Où réside le véritable accomplissement ? Qui suis-je ? Baba Dhuna Giri devant son dhuni. Haridwar, 13 novembre 2007.


Ci-dessous : Le mot asana signifie littéralement « siège ». Aux origines du yoga, ce siège servait à trouver un équilibre physique et interne. Lotus en lévitation, Bénarès, 21 février 2009.

« Le yoga et la photographie exigent une concentration identique. Toutes deux supposent une ouverture d’esprit permettant de voir la réalité telle qu’elle est. Toutes deux requièrent de la patience et récompensent le travail. Toutes deux s’apparentent à la méditation, car elles vous absorbent entièrement. Elles vous plongent dans l’instant, dans le flux, et plus rien d’autre n’existe. » — Michael O’Neill

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Marcher le long du Gange en ne faisant qu’un avec les sons, le mouvement, les flots du fleuve sacré. Le Triveni Sangam est la confluence du Gange et du Yamuna avec le fleuve sacré souterrain Sarasvati, le lieu le plus sacré du Gange. Kumbh Mela, Allahabad, 21 janvier 2007.



L’esprit et la lumière Un hommage à l’histoire et au phénomène planétaire du yoga

Ci-dessus : Dans les bras du yogi. Michael O’Neill, tout heureux devant les premiers exemplaires de son livre, YOGA. Om ! Page ci-contre : « En photographiant des adeptes du yoga, je me suis rendu compte que c’est non seulement la perfection de l’intention et de l’énergie qui m’intéresse, mais aussi la perfection formelle. » Rajender Dhobal. Lac Manasa­rovar, Tibet (le lac le plus sacré de quatre religions), juin 2006.

Cet ouvrage extraordinaire raconte l’histoire du yoga comme jamais elle n’a été racontée. À travers près de 200 clichés, il retrace le voyage en images de Michael O’Neill, photographe et yogi, qui a passé dix ans à sillonner l’Inde et l’Amérique en quête de l’essence du yoga, pratique corporelle, spirituelle et méditative. Des yogis parmi les plus influents actuellement, comme B. K. S. Iyengar, Shri K. Pattabhi Jois et Colleen Saidman, aux adeptes de la discipline peu connue du mallakhamb, pratiquée sur les terrains de lutte de Kochi, les images d’O’Neill immortalisent autant l’ancienneté et la richesse de la tradition du yoga que la modernité de la communauté mondiale de ses adeptes. Les photos sont rehaussées par des anecdotes de voyages d’O’Neill et par les essais des maîtres de la méditation, H. H. Swami Chidanand Saraswatiji et Eddie Stern, le gourou de l’ashtanga yoga.

« Ce livre révèle aux lecteurs une nouvelle expérience du yoga. En contemplant ces images d’union – union de la lumière et de l’ombre, de l’artiste et de son sujet, de la forme et du mouvement, de la vie et de la mort, de l’individu et de l’infini –, ils pourront ressentir en eux-mêmes cette union, la véritable essence du yoga. » — S. S. Swami Chidanand Saraswatiji

XL

Michael O’Neill. À propos du Yoga. L’Architecture de la paix Eddie Stern, S. S. Swami Chidanand Saraswatiji Relié, 26,7 x 37,4 cm, 290 pages € 49,99 — 75 —


Dans les frigos de James Henry‌


et de JosĂŠ Avillez


Première femme chef à avoir décroché trois étoiles Michelin en dehors de la France, Annie Féolde mange la plupart du temps dans son restaurant de Florence , son frigo contient toutefois des ingrédients de base comme du jambon, de la mozzarella, de la mayonnaise, de la pâte tom yum, des anchois, du caviar et de la crème d’anchois. « Vous pouvez faire de très bonnes choses avec ça, comme des sauces de salade. »

Annie Féolde

Haricots toscans Pour 6 personnes 300 g de haricots blancs Huile d’olive Sel Poivre noir du moulin (facultatif)

Recouvrir les haricots de 5 cm d’eau froide et laisser tremper 12 heures. Égoutter et essorer les haricots. Placer dans une grande casserole. Ajouter 90 cl d’eau et porter à ébullition. Réduire le feu jusqu’au frémissement et cuire environ 2 heures, jusqu’à obtenir une texture moelleuse. Pour éviter d’abîmer les haricots, l’eau doit à peine frémir. Égoutter les haricots. Arroser d’un filet d’huile d’olive. Saler et poivrer si vous le souhaitez.

James Henry James Henry, le plus punk de la nouvelle génération de chefs parisiens, apprend à cuisiner au fil des postes à temps partiel dans son Australie natale. Il partage avec ses colocataires, presque tous chefs, un petit frigo incorporé aux meubles de la cuisine, qui s’avère d’une grande utilité : un espace con­ vivial accueil­lant une nourriture réconfortante, rempli presque à moitié de bières, de bouteilles de vodka, de sirop pour la toux, d’anchois siciliens et du fromage de chèvre de supermarché.

Penne, feuilles

de chou-rave et Stracciatella

Pour 4 personnes 6 cl d’huile d’olive à répartir 2 échalotes émincées 2 gousses d’ail émincées 3 petits piments rouges séchés 6 filets d’anchois d’excellente qualité 400 g de penne, de préférence de la marque Martelli 100 g de feuilles de chou-rave émincées Le jus de ½ citron 100 g de fromage Stracciatella grossièrement écrasé

Dans une grande poêle, chauffer 3 cl d’huile d’olive à feu moyen. Incorporer les échalotes, l’ail et les piments. Faire sauter le tout. Ajouter les filets d’anchois quand l’ail commence à dorer et poursuivre la cuisson jusqu’à ce qu’ils aient fondu. Pendant ce temps, cuire les penne al dente. Égoutter et conserver 15 cl de l’eau de cuisson. Incorporer les feuilles de chou-rave à la poêle contenant le mélange anchois-échalotes. Faire revenir à feu moyen jusqu’à ce que les feuilles flétrissent. Ajouter une partie de l’eau de cuisson conservée pour détendre les légumes. Cuire jusqu’à ce que le liquide réduise légèrement. Incorporer les penne et remuer vigoureusement. Terminer en ajoutant l’huile d’olive restante, le jus de citron et le fromage Stracciatella. Retirer et jeter les piments.


José Avillez Chef portugais le plus audacieux et le plus à l’aise avec les médias, José Avillez se voit comme un pionnier de la cuisine traditionnelle lusitanienne avec des touches contemporaines. Son frigo Bosch immaculé regorge de produits de saison, comme le sébaste, le fromage de brebis, les cerises de son voisin et les saucisses de tripes d’agneau.

Crevettes

ail, citron et coriandre (À BULHÃO PATO) Pour 4 personnes 800 g de crevettes décortiquées et déveinées 6 g de sel 3 cl d’huile d’olive 50 g d’ail pelé et émincé 4 feuilles de menthe finement ciselées 8 cl de vin blanc 1 bouquet de pluches de coriandre aux pieds tendres émincées Jus de citron

Tajine de poulet

aux figues et aux amandes Pour 6 à 8 personnes

Saler légèrement les crevettes. Dans une poêle antiadhésive, chauffer l’huile d’olive à feu doux. Ajouter l’ail et faire revenir 30 secondes en veillant à ce qu’il ne se colore pas. Ajouter les crevettes et faire sauter délicatement. Pour une cuisson uniforme, remuer régulièrement. Verser le vin blanc, la menthe et la coriandre, puis retirer du feu. Arroser de jus de citron frais selon votre goût. Rectifier l’assaisonnement en ajoutant un peu de sel si nécessaire.

Fatéma Hal

12 cl d’huile d’olive, à répartir 1,5 kg de poulet découpé en morceaux et de préférence élevé en plein air 3 petits oignons émincés 2 gousses d’ail écrasées 5 ml de racine de gingembre émincée 5 pistils de safran 2 ml de sel 1 bouquet de coriandre ciselée 75 cl d’eau à répartir 500 g de figues sèches 100 g de sucre 5 ml de cannelle en poudre 100 g de beurre 100 g d’amandes mondées 10 g de graines de sésame 1 bouton de rose séché (pour le dressage)

Dans une poêle en fonte ou dans une cocotte, chauffer 6 cl d’huile d’olive à feu moyen. Ajouter les morceaux de poulet, les oignons, l’ail, le gingembre, le safran, le sel et la coriandre. Ajouter 50 cl d’eau et cuire 30 minutes, en remuant de temps en temps. Préparer les figues et les amandes pendant que le poulet cuit. Dans une petite casserole, incorporer 25 cl d’eau, le sucre, la coriandre et le beurre. Porter à ébullition, puis réduire à feu doux pendant 20 minutes, jusqu’à ce que la consistance soit sirupeuse. Découper les figues. Dans une petite poêle, faire sauter les amandes dans 1,5 cl d’huile d’olive. Retirer les amandes et laisser refroidir. Retirer le poulet de la poêle et conserver le bouillon. Dans une grande poêle, chauffer l’huile d’olive restante et dorer les morceaux de poulets, en plusieurs fois si nécessaire. Disposer sur un grand plat et verser le bouillon par-dessus. Surmonter le poulet avec les tranches de figues, les amandes grillées et les graines de sésame. Pour décorer, placer la rose au centre du plat.

Star de la gastronomie au Maroc et en France, Fatéma Hal réserve ses dimanches et lundis aux repas de famille. Son frigo regorge de produits de base (miels bio, cornichons, poivrons du commerce…) et d’ingrédients plus exotiques (feuilles d’absinthe, figues d’Afrique du Nord, safran de Taliouine…).



chefs à domicile Le jardin secret des chefs européens les plus créatifs

« Nous avons découvert aussi bien la garçonnière du chef de bistro célibataire à moitié décorée que les demeures aux allures de palace des chefs célèbres. Le résultat ? Un ouvrage éloquent dans lequel les génies de la gastronomie nous dévoilent leurs ingrédients de base, leurs produits locaux préférés et leurs recettes infaillibles. Des maîtres classiques aux autodidactes iconoclastes, nous vous invitons à faire connaissance avec les gourous de la haute cuisine et à laisser le génie culinaire s’immiscer dans la réalité domestique. » — Carrie Solomon et Adrian Moore

Les grands chefs nous sont familiers. Nous sommes plus que jamais fascinés par la haute cuisine et par ses héros. Les journaux se délectent de leurs facéties, que ce soit dans leur cuisine ou en dehors. Leurs recettes se transforment en émissions de télévision et la file d’attente à l’entrée des restaurants gastronomiques ne cesse de s’allonger. Au cœur de cette frénésie, le monde de la gastronomie créative semble bien loin de ces soirées où l’on arrive affamé et épuisé après une journée de travail ou de ces bandes d’enfants énervés après une partie de foot, en quête immédiate d’un goûter. Comment trouver un créneau pour ces saveurs enivrantes dans un agenda déjà comble ? Comme nul autre ouvrage culinaire, Inside Chef’s Fridges, Europe met la cuisine à la portée de tous en ouvrant les frigos des chefs les plus innovants et les plus captivants au monde. Découvrez le berceau de la créativité culinaire grâce à la complicité des chefs qui ont accepté de dévoiler le contenu de leur frigo, leurs produits préférés, leurs petites habitudes et – surtout – leurs précieuses recettes. Inside Chefs’ Fridges. Europe Le réfrigérateur des plus grands chefs Carrie Solomon, Adrian Moore Relié, 21 x 30 cm, 328 pages € 39,99 — 81 —


« Ol’ Blue Eye » est de retour

L’essai magistral de Gay Talese consacré à Frank Sinatra, reproduit pour la première fois en impression typographique, accompagné de photos signées Phil Stern

Frank Sinatra devant son Learjet en compagnie de son compère Dean Martin, également membre du Rat Pack, 1965. Photo: John Bryson.


« C’est un champion qui a réussi son come-back, un homme qui a tout eu, a tout perdu et a tout récupéré, sans jamais laisser quiconque se mettre en travers de son chemin, ce dont peu d’hommes sont capables… » — Gay Talese




La première édition de cet ouvrage est limitée à 5 000 exemplaires numérotés et signés de la main de Gay Talese. Le texte est imprimé par procédé typographique sur papier naturel non couché. Chaque chapitre s’ouvre sur des notes personnelles de l’auteur datant de novenbre 1965 à mars 1966 et reproduites en fac-similé, dont ce tirage couleur accompagnant les scènes 3 à 6 de Frank Sinatra Has a Cold. — 86 —


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Tout ou rien

Gay Talese raconte comment il a transformé l’annulation d’une interview en un tour de force éditorial qui signera l’avènement du Nouveau Journalisme.

Je me rappelle avoir été envoyé à Los Angeles au cours de l’hiver 1965 par Esquire pour un entretien avec Sinatra convenu par son attaché de presse avec le rédacteur en chef. Après être descendu au Beverly Wilshire et passé ma première soirée à digérer une pile d’écrits consacrés au chanteur, je me revois recevoir un coup de fil du bureau de Sinatra m’annonçant que l’interview, prévue pour le lendemain après-midi, n’aurait pas lieu. Sinatra était très contrarié par les récents gros titres de la presse spéculant sur ses relations avec la mafia, m’a expliqué mon interlocuteur, ajoutant qu’il souffrait d’un rhume. Peutêtre que si Sinatra se sentait mieux, a-t-il continué, et que si je soumettais le texte de mon interview à ses assistants avant sa publication, une autre rencontre pourrait être organisée. J’ai poliment expliqué que j’étais obligé d’honorer le droit de mon rédacteur en chef à être le premier juge de ma contribution à la revue, tout en suggérant que je pouvais téléphoner d’ici quelques jours au cas où sa santé, et son humeur, se seraient améliorées au point qu’il m’accorde une rencontre.

Après en avoir informé Harold Hayes, le responsable de la rédaction d’Esquire, j’ai consacré le reste de la semaine à mettre sur pied des interviews avec quelques acteurs et actrices, musiciens, producteurs de cinéma et de disques, patrons de restaurant et connaissances féminines qui avaient croisé le chemin de Sinatra ces dernières années. De presque tous j’ai obtenu quelque chose : un petit bout d’information inédite par-ci, un peu de couleur par-là, de modestes pièces de la mosaïque qui, je l’escomptais, refléterait un homme ayant attiré sur lui les projecteurs depuis des décennies et projeté son ombre formidable sur la très capricieuse industrie du spectacle et sur la mentalité collective de l’Amérique. Je n’ai que rarement ou jamais sorti un stylo et un calepin de ma poche, et je n’aurais pas eu une seule fois l’idée de me servir d’un magnétophone quand bien même j’en aurais eu un : j’aurais risquer d’inhiber mes interlocuteurs et de troubler l’atmosphère de confiance détendue que je croyais établir en me montrant en apparence moins insistant dans mon écoute et en promettant que je n’attribuerais aucune remarque ni aucun — 92 —

signe distinctif à mes sources à moins de m’être assuré d’abord d’avoir eu leur accord et leurs éventuelles clarifications. Après avoir vainement tenté d’arranger une interview au cours de ma deuxième semaine à L.A. – on m’a répondu qu’il était toujours enrhumé –, j’ai continué à rencontrer des personnes proches de Sinatra : sa maison de disques, sa société de production cinématographique, son business immobilier, sa fabrique de pièces détachées de missiles… J’ai aussi parlé avec des intimes, par exemple son fils quelque peu écrasé par la personnalité paternelle, son tailleur favori de Beverly Hills, l’un de ses gardes du corps et une petite dame aux cheveux grisonnants qui suivait Sinatra aux quatre coins du pays dans ses tournées avec la charge exclusive de ses soixante perruques. J’ai donc passé trois autres semaines à Los Angeles, accumulant près de cinq mille dollars de dépenses, avant de retourner à New York et de consacrer encore un mois et demi à construire et rédiger un papier de cinquante-cinq feuillets essentiellement basé sur mes deux cents pages de notes

« Après être descendu au Beverly Wilshire, je me revois recevoir un coup de fil du bureau de Sinatra m’annonçant que l’interview, prévue pour le lendemain, n’aurait pas lieu. » issues de mes interviews avec plus d’une centaine de personnes, et de mon observation directe de Sinatra dans des contextes aussi divers qu’un bar de Beverly Hills où il avait frisé une rixe, un casino de Las Vegas où il avait perdu une petite fortune à la En haut : Sur la moto de James Dean, Phil Stern, dont les clichés de Sinatra accompagnent les textes de Talese dans cette nouvelle édition de TASCHEN. Sunset Boulevard près de Laurel Canyon, Los Angeles, mars 1955.


« L’annulation du têteà-tête avec Frank Sinatra est peut-être justement ce qui constitue l’un des atouts de l’article. » table de black-jack et le studio de la NBC à Burbank où, après avoir surmonté son rhume, il avait réenregistré le programme prévu en chantant merveilleusement. L’annulation de mon tête-à-tête avec Frank

Sinatra est peut-être justement ce qui constitue l’un des atouts de l’article : qu’aurait-il pu me dire, en effet, que m’aurait-il dit, lui, l’une des personnalités publiques les plus réservées qui soient, de susceptible de mieux le révéler que le regard attentif d’un écrivain l’observant dans le feu de l’action comme dans des situations stressantes, écoutant et s’attardant sur les lignes de touche de sa vie ? Cette méthode consistant à tourner autour d’un personnage, à rester sans cesse à l’écoute et à décrire des scènes qui donnent un aperçu éloquent de son tempérament et de son comportement, celle qui a été étiquetée comme « nouveau journalisme »

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voici une génération, a néanmoins été renforcée dans ses meilleures versions par la reprise des principes du « journalisme traditionnel » : travail de terrain inlassable et fidélité à la précision factuelle. Aussi prenante et coûteuse ait-elle été, c’est cette démarche qui sous-tend mon portrait de Sinatra comme les dizaines d’autres écrits journalistiques que j’ai publiés au cours des années 1960. En haut : à l’instar de Talese, le photographe Phil Stern était conscient du caractère fuyant de Sinatra. Ci-dessous : Chez lui dans son « bunker », Gay Talese dédicace Frank Sinatra Has a Cold, New York, 2015. Photo: Jeremiah Wilson.


42nd Street, New York City, ca. 1960 Photo: Burt Glinn.


Publié pour la première fois en 1966, le portrait cristallin de Frank Sinatra brossé par Gay Talese allie vérité des faits et récit saisissant pour livrer un modèle triomphant du « Nouveau Journalisme » aussi éloquent sur la célébrité en général que sur Sinatra lui-même.

Gay Talese. Phil Stern. Frank Sinatra Has a Cold Photographie principale  signée Phil Stern Reliure en tissu sérigraphié sous coffret, texte imprimé par procédé typographique sur deux types de papier, avec fac-similés de manuscrits et page dépliante, 24 x 34 cm, 244 pages Édition anglaise uniquement

Cette Édition collector de Frank Sinatra Has a Cold a été réalisée par impression typographique et comprend une introduction de Gay Talese ainsi que des reproductions de pages manuscrites, de correspondances et d’autres documents en fac-similé tirés des archives de l’auteur. Des clichés de Phil Stern à l’objectif légendaire, seul photographe à avoir eu le droit d’approcher Sinatra au plus près au fil de quatre décennies (des années 1940 à 1970), viennent animer le texte à côté de photographies d’anthologie signées des plus grands photojournalistes des années 1960, comme John Bryson, John Dominis et Terry O’Neill.

Édition collector de 5 000 exemplaires numérotés, signés par Gay Talese

Ce livre de TASCHEN s’inscrit dans une série d’ouvrages réunissant des écrits non-fictionnels remarquables du Nouveau Journalisme, accompagnés de photographies de l’âge d’or du photojournalisme. Parmi les autres titres à venir, citons The Fight de Norman Mailer, The Electric Kool-Aid Acid Test et The Right Stuff de Tom Wolfe, et The Fire Next Time de James Baldwin.

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– Édition limitée signée par Gay Talese – Relié sous coffret en carton gaufré, reliure en tissu sérigraphié – Le texte est imprimé par procédé typographique sur papier naturel non couché – Reproductions en fac-similé du storyboard original de Gay Talese et de pages du manuscrit € 200


Conçu à la perfection

Jon Hamm devant le domicile moderne de Draper à Los Angeles, typique des années 1950, qui figure parmi les décors méticuleusement élaborés par l’équipe de Dan Bishop.


“We’re flawed because we want so much more. We’re ruined because we get these things and wish for what we had.” — Don Draper, « Été 1965 », saison 4, épisode 8


« Le plus beau compliment que j’ai reçu est “Mad Men c’est comme si Woody Allen et David Lynch avaient un bébé.” Je prends. » — Matthew Weiner


Matthew Weiner dirige John Hamm

le dernier jour de tournage de l’ultime épisode de la série, « Person to Person », le 3 juillet 2014.


Magie sur Madison Avenue “When a man walks into a room, he brings his whole life with him. He has a million reasons for being anywhere. Just ask him. If you listen, he’ll tell you how he got there. How he forgot where he was going and then he woke up. If you listen. He’ll tell you about the time he thought he was an angel or dreamt of being perfect. And then he’ll smile with wisdom, content that he realized the world isn’t perfect. We’re flawed because we want so much more. We’re ruined because we get these things and wish for what we had.” — Don Draper, « Été 1965 », saison 4, épisode 8

Le tournage de Mad Men Grâce au pilote de Mad Men, j’ai obtenu le boulot sur Les Sopranos. Je l’ai écrit alors que je travaillais sur Becker, une sitcom. Je n’étais pas satisfait de ce que je produisais, sinon je n’aurais jamais écrit Mad Men. C’était à l'opposé de ce que je faisais au quotidien et je l’écrivais la nuit, sans être payé. Il n’y avait ni studio, ni chèque, personne à qui présenter le projet. Il n’y avait rien. C’était littéralement : « Voilà un scénario. Est-ce qu’il est vendable tel quel ? » Je savais que j’étais incapable de le pitcher. J’avais essayé deux ou trois fois et tout le monde répondait : « Quoi ? Tu travailles pour la télé,

mais il t’arrive de la regarder ? Bonne chance pour monter ce truc… », parce que c’était une fiction d’époque sur un milieu très précis, qui n’avait rien de commercial à leurs yeux. Sans tête d’affiche, il n’était pas vendeur. C’est compliqué d’expliquer cet aspect des choses. Les fictions d’époque coûtent cher. Tout le monde fume des cigarettes, le personnage principal trompe sa femme… Il y a tant de trucs dans la série déplaisaient aux gens. Sans compter que la télévision et le cinéma américains semblent dépendre surtout des ventes à l’étranger, ce que je ne comprends pas étant donné le très large public national que nous avons ici et tout

Ces notes figuraient à l’origine dans Esopus 20: Special Collections. Conception : Tod Lippy, © The Esopus Foundation Ltd.

Les rebondissements, les tournants et les talents qui ont fait Mad Men Extrait de l’interview exclusive de Matthew Weiner par J. C. Gabel


l’argent que nous dépensons. L’idée générale était que la série était tellement américaine que personne au monde ne s’y intéresserait jamais, mais je me suis dit : « C’est l’Amérique que tout le monde aime. » J’ai une conscience assez sûre de ce que je vaux en tant qu’auteur, de ce que j’ai à dire, de ce qui fait une histoire, et de ce que comprend un auditoire intelligent. Je suis revenu à mes notes et je n’ai trouvé que des bribes d’idées dans le travail qui avait produit le pilote, mais je suis aussi retombé sur un autre script que j’avais écrit et abandonné dans les années 1990. Long de 80 pages, il s’intitulait The Horse Shoe et se concentrait sur ce type, Peter Whitman, et la façon dont sa génération, élevée pendant la Grande Dépression, en était venue à diriger le pays. C’était le parcours d’un individu en transformation, un Américain archétypal à la Jay Gatsby, capable d’adapter sa personnalité, que m’avaient inspiré les biographies de gens comme Sam Walton, Bill Clinton, Rockefeller, Lee Iacocca…, des gars partis de rien qui avaient gravi les échelons jusqu’à gagner la tête du pays. J’imaginais raconter En haut : Donald Draper (Jon Hamm) devant la caméra de Chris Manley pendant le tournage de l’épisode final de la saison 6, « À vos bons soins », en 2013. Ci-dessous : Notes du créateur et showrunner de la série, Matthew Weiner.

cette histoire par des sortes de flashbacks, même si c’est resté à l’état d’ébauche. J’avais juste retracé l’histoire de sa vie et son apogée au tournant du nouveau millénaire, au moment où ces gens dirigeaient le pays. J’avais abandonné ce script en 1996 ou 1997. Sur la dernière page j’avais écrit : « Ossining, 1960 ». Au moins quatre ans avaient passé entre le moment où j’ai abandonné cette histoire et celui où j’ai écrit le pilote de Mad Men, et trois autres années se sont écoulées

avant qu’AMC s’intéresse au projet, pourtant ce personnage m’occupait toujours l’esprit, et un jour je me suis dit : « Oh mon Dieu ! Voilà qui est Don Draper. Il est ce gars. » Je leur ai présenté cette histoire. La dernière scène avant l’annotation « Ossining, 1960 » le montrait en train d’assister à ses propres funérailles, ce que nous avons fait vers la fin de la première saison. Un grand nombre de ces flashbacks sont des réécritures de choses qui étaient déjà dans


ce script – le vagabond, le demi-frère, l’échange d’identité en Corée, le silo incendié, etc. –, tous ces éléments étaient dans le scénario que j’avais écrit pendant mes années de chômage, à ma sortie de l’école de cinéma. Quand je leur ai proposé cette histoire pour la première saison, ils ont eu très envie de faire la série.

L’évolution de Don Draper J’adorais la pub, et je m’intéressais aux années 1950 à cause de la maturité et de l’idéalisme idéologique qui baignait alors la culture américaine. La culture populaire de

masse était très intellectuelle. Catch 22 figurait sur la liste des meilleures ventes. On s’attendait à ce que les gens soient éduqués. La pub représentait aussi une part énorme de la culture et les hommes qui travaillaient dans ce milieu étaient adulés comme des stars du rock. Ils incarnaient ce fantasme américain du boulot créatif qui rapporte de l’argent. L’idée que la publicité était un reflet de notre culture sans jouer nécessairement un rôle moteur dans cette culture était également intéressante et puis, je m’identifiais aux personnages de cette époque. Toute cette génération issue de la guerre,

née pendant la Grande Dépression, dans la misère rurale, c’est elle qui a formé ceux qui en sont venu à diriger les États-Unis. C’est une génération qui a dû totalement se réinventer. C’était possible de partir à New York, là où vous pouvez devenir ce que vous voulez, même si vous êtes étranger. Rares sont les endroits dans le monde où on peut être le fils d’un pasteur de province et devenir un magnat sans avoir trouvé du pétrole. Le succès se gagne aussi par les mots. Cette privation et cette identité double et sombre de ceux qui ont connu la guerre imprègne le personnage, comme dans les films noirs. « OK, me voilà, en train de résoudre des crimes. Ou : je suis juste là pour faire mon boulot, mais j’ai ce sombre passé. » Je me suis mis à lire des biographies et à élaborer cet univers intérieur en cours de Page ci-contre et ci-dessus : Croquis et échantillons de tissus de Janey Bryant pour la désormais célèbre robe rouge que porte Joan Holloway (Christina Hendricks) dans « Babylone », saison 1, épisode 6, et photo promotionnelle. Ci-dessous : Le producteur exécutif Scott Hornbacher a réalisé neuf épisodes de la série, parmi lesquels « Décalage perpétuel », l’épisode inaugural de la saison 7 ; Hornbacher tourne avec le chef opérateur Christopher Manley l’arrivée de Don à Los Angeles, où il doit retrouver sa femme Megan (Jessica Paré).


maturation, à une époque où un homme pouvait disparaître en un clin d’œil et refaire sa vie n’importe où, tant l’identité était une donnée fluide. Et quoi qu’il arrive, ce gamin pauvre élevé dans un bordel de la Pennsylvanie rurale, orphelin, pris dans une révolution, dans les tentacules du communisme, du socialisme, du nazisme, de tout ce qui se passait aux États-Unis, porterait toujours cette certitude et cette expérience avec lui. Les combats intérieurs leur étaient

quotidiens, comme à la plupart des hommes, moi y compris. J’avais alors 35 ans. Pourquoi ressentais-je ces deux pulsions contradictoires : devenir un pirate aventurier qui sillonnerait les mers du monde et être un bon père et mari ? Ces deux élans s’opposaient. C’est là que réside le carburant du personnage principal – ce passé sombre et cette double identité. Je n’ai saisi cette dualité que plus tard. Le pilote était consacré à l’identité de cette génération en particulier. J’ai entendu des gens dire : « Mon père n’a jamais prononcé un mot et maintenant je comprends pourquoi. Cela ne signifie pas qu’il ne ressentait rien. Cela veut dire qu’il ne savait pas comment parler aux gens », « Mon père ne sait pas exprimer son amour, » ou ce genre de choses. J’ai toujours eu le sentiment que Sally Draper avait un rôle de médiatrice avec le public dans son ensemble, pas seulement les gens qui ont été enfants à cette époque – c’est un postulat de base. L’enfant ignore ce qui se passe. Tout est ironie.

Les années 1960 et l’âge d’or de la télévision La télévision est une forme d’art collaborative, mais ce qui est intéressant, c’est que même en changeant de réalisateurs et d’au-

teurs à chaque épisode, rien ne changeait. Votre boulot, en tant qu’auteur pour la télé, c’est d’imiter. Les contributions des auteurs interviennent au stade de l’intrigue. Le scénario, lui, quel que soit le nom qui y figure, passe systématiquement par mon ordinateur pour garantir la cohérence de la série. Je réécris constamment – même s’il m’arrive d’être convaincu par un premier jet défendu par des gens plus avisés que moi, notamment l’équipe d’auteurs et ma femme. Parfois je pense améliorer quelque chose et en réalité je le gâche. Les auteurs me convainquent de renoncer à de mauvaises idées en permanence, et nous continuons à avancer, quitte à ce que je réécrive chaque scène. À chacune des personnes qui travaillent sur la série je veux dire : « Je ne fais pas votre travail, mais je serai le meilleur public que vous ayez jamais eu. Je vois tout. Si vous entrez avec ces costumes et que vous mettez ce chapeau, je vais le remarquer. » J’essaie de ne pas rejeter des idées sous prétexte qu’elles ne sont pas de moi. Quand quelqu’un s’investit personnellement dans quelque chose, je dis « Fantastique ! » parce que moi, cela m’avait échappé. J’ai toujours envie qu’ils en rajoutent sans modifier l’essence de ce qu’est la série. Ils sont tous là parce qu’ils apprécient les défis créatifs inhérents à la série, et pas seulement pour


me faire plaisir. Ils se font tout autant plaisir. Cela signifie que les gens se sentent plus responsables de ce qu’ils font sur cette série que dans n’importe quel autre boulot. Chaque scène est une occasion de raconter l’histoire avec la couleur et le son. Je ne perds jamais de vue le fait que c’est bien de cela qu’il s’agit, et j’adore quand ces éléments viennent enrichir l’histoire. Ce n’est pas seulement une question d’objectif à atteindre en termes de production, mais surtout : « que pouvons-nous faire pour étoffer ? »

Une des forces de la télévision est que, contrairement au cinéma, il n’est pas nécessaire de clore l’histoire à chaque fois. Il suffit de trouver un épilogue par saison. L’épisode s’achève, mais la série revient la semaine suivante. Ce qui est arrivé auparavant a des répercussions sur la suite. Don a toute une série d’aventures. Nous ne faisons pas comme si toutes ces femmes avaient existé, pourtant on se surprend à dire : « Le voilà avec Megan. Il essaie vraiment d’avoir son mariage. » Peggy abandonne son bébé.

« Les hommes de pub étaient adulés comme des stars du rock. Ils incarnaient ce fantasme américain du boulot créatif qui rapporte aussi de l’argent. » — Matthew Weiner

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Peggy a couché avec Pete. Nous ne faisons pas comme si ce n’était jamais arrivé. Je savais que Peggy était un personnage ambitieux. Elle pouvait devenir rédactrice. Elle était assez peu éduquée, un peu péquenaude. Elle venait de Brooklyn, ce qui marque l’époque puisque Brooklyn fait partie de la ville, mais j’ai la même attitude qu’elle à l’égard de New York parce que je n’en suis pas originaire. Elle allait acquérir succès et pouvoir, presque par accident. Son ambition n’est pas un hasard, mais sa réussite l’est davantage. À l’origine, Joan est la meilleure amie de Peggy. Quand j’ai rencontré Christina Hendricks, j’ai su que Joan serait une sorte de courtisane. Une des histoires qui m’est aussitôt venue à l’esprit est qu’elle aurait une aventure avec Roger. Au bureau, elle était une femme puissante qui était allée aussi loin que possible et qui incarnait cette dynamique opposant La Femme mystifiée et Une Vierge sur canapé que je recherchais. Elle n’éprouvait aucun conflit moral à l’égard du sexe, et un des aspects marquants de la série est d’ailleurs de révéler que le sexe n’était pas tabou. Contrairement à ce qu’ils prétendent, les gens n’ont pas inventé le sexe dans les années 1960. Nous avons décidé que Joan serait vêtue comme une nonne et que tout l’érotisme de

Matthew Weiner’s Mad Men Relié, 2 vol. sous étui, 36 x 22 cm, 1 040 pages € 150 Édition anglaise uniquement Publication janvier 2016


Une histoire personnelle Cette histoire de succès, je n’aurais jamais cru que cela pourrait m’intéresser. Le succès créatif, le succès financier – ce sont des choses sur lesquelles je pouvais pontifier avant, mais plus depuis que j’en fais l’expérience, que je sais ce que c’est d’avoir peur de le perdre et que je connais la complexité Page ci-contre : « Recommence. À l’ancienne, s’il te plaît. » Don Draper au travail dans un bar pour la scène d’ouverture de l’épisode pilote, « Smoke Gets In Your Eyes ». Ci-dessus : Planches de tendance de la costumière Janey Bryant pour le personnage de Joan Holloway. Ci-dessous : Jon Hamm en Don Draper, photo promotionnelle pour la saison 4, 2010.

et les conflits intérieurs qu’il engendre – c’est la série qui m’a apporté cette expérience. Je m’intéresse davantage au fait que Don commence la série comme un homme terrifié que son identité soit révélée, mais qui par

fierté laisse presque Pete la dévoiler, et qui est prêt à s’enfuir avec Rachel, pour devenir un homme qui inscrit son faux nom sur la porte d’un immeuble. Que s’est-il passé ? Il a vieilli. La société a changé. Ils ont pris du champ par rapport aux listes noires, à la Seconde Guerre mondiale, à la Corée et à la Grande Dépression. La fierté sincère de s’en être tiré, l’acceptation des réalités sociales, c’est à cela qu’on reconnaît une personne qui change réellement. Il porte en lui un long chapelet de comportements répréhensibles nés d’une

angoisse existentielle très complexe. C’est très enthousiasmant. Mon fantasme était que la série dure six ou sept ans, pour pouvoir regarder le dernier épisode, puis revenir au pilote et avoir la nostalgie de ces vies écoulées, même si elles sont une pure invention. Peut-être repenserez-vous à l’endroit où vous vous trouviez quand vous l’avez vu pour la première fois.

Series Artwork & Supplementary Materials ™, ® & © 2015 Lions Gate Entertainment Inc. All Rights Reserved. Select photography provided by AMC Network.

la série résiderait dans l’effeuillage de ce joli paquet. Elle semble tout à fait bienséante, mais si vous regardez bien ses tenues – la façon dont elles moulent et galbent tout ce qu’elles prétendent dissimuler, sa silhouette est incroyablement excitante… tout en restant très convenable.


L’incontournable collection Mad Men Édition limitée à 512 exemplaires numérotés, signés par Matthew Weiner

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XL

ÉDITION D’ART nos 1 À 512 Édition limitée à 512 exemplaires numérotés, signés par Matthew Weiner : – 2 volumes reliés en tissu, sous coffret – l’intégralité des scripts de Mad Men en 7 volumes, demi-reliure, sous coffret – un tirage de l’illustration de la saison 6 signé par Brian Sanders € 750 – Les exemplaires numérotés 1 à 12 incluent un exemplaire du script original du pilote 2005, signé par tous les membres de la distribution € 4 500

Cadre non inclus — 107 —


Le soleil se lève derrière le Man, l’Homme géant conçu en 2014 par Andrew Johnstone, et une ronde de tentes de « souk ».


« Si vous ne pouvez participer physiquement à Burning Man, ce festival célèbre en pleine nature, la meilleure solution est de le vivre indirectement, à travers cet ouvrage… » — Interviewmagazine.com

L’ART TOUT FEU TOUT FLAMME Pyrotechnie et liberté d’expression au cœur du désert aride de Black Rock


Les pieds campés dans l’argile brûlée par le soleil, l’objectif pointé sur d’immenses sculptures collectives, le photographe NK Guy présente Burning Man, l’événement qui attire chaque année 65 000 visiteurs dans le désert du Nevada.

Conçus lors du Burning Man de 2006, ces cupcakes et muffins roulants

étaient mus par des moteurs électriques utilisant des batteries solaires et pouvaient atteindre près de 29 km/h. Chaque « véhicule » est unique et a été personnellement créé par son propriétaire avec le concours de partenaires conducteurs de muffins.



Sombres et menaçants, mais heureuse­ ment la plupart du temps inoffensifs, ces nuages de pluie au-dessus

de l’épave de La Llorona (« La Pleureuse »), un galion espagnol autrefois imprenable, néanmoins désormais abandonné. PIER 2 et LA LLORONA par Kevan Christiaens, Matt Schultz, et le Pier Group fut construit pour le Burning Man de 2011, le galion ayant été ajouté en 2012.


BIENVENUE À black rock city Le photographe NK Guy présente Burning Man, l’événement qui attire chaque année 65 000 visiteurs dans le désert du Nevada

Comment décririez-vous Burning Man à quelqu’un qui n’y a jamais été ? C’est une ville éphémère de 65 000 habitants qui surgit, une semaine par an, d’un vaste désert battu par les vents dans le nord du Nevada. Mais c’est surtout une expérience créative unique et multiple vécue différemment selon les participants. Pour certains, c’est une fête merveilleuse, pour d’autres une expérience sociétale, un voyage spirituel, un lieu d’expression.

jourd’hui. L’esprit communautaire est également essentiel. L’immensité du désert inspire la création d’installations gigantesques, impossibles à montrer dans une galerie, ce qui change tout : l’œuvre ne peut être installée par un artiste seul. Ainsi, des équipes réunissant amis, inconnus et parfois ennemis se forment pour construire ces œuvres d’art éphémères d’une telle en-

« L’art participe à définir l’événement, depuis le tout premier personnage de Burning Man érigé en 1986 jusqu’aux œuvres monumentales qui caractérisent le rassemblement actuel. » « L’art participe à définir l’événement, depuis le tout premier personnage de Burning Man érigé en 1986 jusqu’aux œuvres monumentales qui caractérisent le rassemblement aujourd’hui. » Tout comme l’événement est une toile vierge sur laquelle les gens peuvent s’exprimer, le désert (appelé playa) est une toile vierge où se dressent des œuvres massives. De fait, Burning Man est la plus grande exposition au monde d’art interactif, éphémère et spécifique à un site, dont j’ai la chance de rendre compte depuis 16 ans. Quelles sont les composantes essentielles de l’événement ? L’art y joue un rôle central. La plupart des festivals dans le monde sont consacrés à la musique, au spectacle ou à la religion. Très peu à l’art. De même, le culte de la célébrité qui prévaut dans certains festivals est quasiment absent sur la playa. L’art participe à définir l’événement, depuis le premier personnage de Burning Man érigé en 1986 jusqu’aux œuvres monumentales qui caractérisent le rassemblement auCi-contre : Groupe de festivaliers avec des amis en train de ramer dans un petit canot terrestre, aux abords du projet PIER 2. — 113 —

vergure. L’interactivité est aussi un ingrédient clé. L’art exposé à Burning Man est conçu pour être exploré, pour interagir avec vous, à la différence de celui exposé dans le petit espace des galeries. Enfin, l’événement est dépourvu de tout mercantilisme. Dans notre société dominée par les transactions financières, les endroits où on y échappe, comme Burning Man, sont


Ci-dessus : 2013. RAISING THE MAN. La photo la plus chère du livre, puisque j’ai dû changer deux fois mon vol pour les États-Unis pour parvenir à temps sur le chantier du site. L’Homme est généralement hissé sans sa tête au-dessus de sa base, la tête est ajoutée plus tard. Pourtant, en 2013, l’immense soucoupe compliquant l’accès, il fut érigé d’un seul tenant. Ci-contre : 2013. MAN BURN. La flambée de l’Homme en pleine action, transformant son support en étincelante soucoupe emplie de lumière. Un des derniers clichés que j’ai pu prendre de mon emplacement de départ dans le Grand Cercle, avant que la tête ne m’oblige à reculer. J’ai découvert qu’il est souvent possible de savoir à l’avance à quelle température un incendie est susceptible d’atteindre par la quantité de matériaux inflammables qui se déploient verticalement, dans la mesure où ceux-ci renvoient davantage la chaleur vers la foule. Une structure en forme de tour légère et étroite ne va pas autant s’élever en température qu’un mur de grande taille. — 114 —


rares. Hormis la glace et le café, rien ne peut être acheté ou vendu sur place. L’événement promeut une « économie du don », dans laquelle les participants sont encouragés à donner sans rien attendre en retour. C’est une expérience culturelle fascinante et rafraîchissante. Comment avez-vous vécu votre premier séjour à Burning Man ? Il ressemble à celui de bien des gens. Au printemps 1998, j’étais en road trip et je cherchais une étape cool où m’arrêter, et éventuellement faire la fête. J’avais vu des photos du premier Burning Man, mais je ne m’attendais pas à une cité d’art et d’expérimentation si immense et trépidante. Voyageant seul sans personne avec qui partager mon expérience, je me suis mis à immortaliser les œuvres en photo. De là a ger-

mé cette saga qui m’a conduit à y retourner tous les ans, appareils en bandoulière. Avez-vous été davantage marqué par une œuvre en particulier ? Difficile à dire, non pas parce que je ne voudrais pas blesser les artistes que je ne citerai pas, mais parce qu’il est impossible de nommer une seule pièce qui transcenderait les autres. Malgré tout, je pense que les temples de Burning Man composent l’ensemble d’œuvres le plus puissant. Chaque année, un temple est bâti puis réduit en cendres. Chose imprévue, ces temples sont devenus le noyau émotionnel de l’événement, une sorte de lieu sacré païen où les gens se rassemblent pour méditer ou pleurer sur toutes sortes de disparitions. À la fin de la semaine, au moment de brûler le temple, il est tapissé de messages, de lettres, d’objets — 115 —

personnels grâce auxquels chaque participant ajoute une part de lui-même à la structure. Une telle expérience individuelle et partagée du deuil est assez inattendue dans un festival d’été.

« L’événement promeut une “économie du don”, une expérience culturelle fascinante et rafraîchissante. » David Best a conçu beaucoup de ces temples mais cette tâche a aussi incombé à d’autres artistes, designers et architectes. Chaque temple diffère des autres, parfois de façon spectaculaire, mais curieusement,, il s’agit aussi à chaque fois du même, car ils ont tous la même vocation et la même charge émotionnelle.


Tel un vaisseau spatial sorti tout droit d’un scénario de science-fiction des années 1920, le RAYGUN GOTHIC ROCKETSHIP par Five Ton Crane Arts Group, environ 12 mètres de long. Premier atterrissage dans le désert de Black Rock, dans le Nevada, en 2009.


Comment votre livre parvient-il à saisir la nature de cet événement ? Mes photos de Burning Man n’étaient au départ qu’une activité personnelle, même si elles sont devenues plus que cela avec le temps. L’art de la playa se distingue par sa spectaculaire fugacité, sa magie éphémère. La plupart des sculptures en bois disparaissent, et même les pièces en métal ne seront sans doute plus jamais exposées dans un tel cadre. C’est une évidence, mais en photographiant tous les aspects de l’événe-

ment, je lui permets de perdurer, même dans la mémoire de ceux qui n’y ont jamais été. C’est un endroit plutôt hostile – de violentes tempêtes de sable surgissent de nulle part – où il est compliqué de travailler, mais il est aussi très texturé et visuellement complexe. Il m’a fallu des années pour trouver le moyen d’isoler et de composer les divers éléments pour raconter une histoire, évoquer une sensation ou rendre compte d’une installation. Tout est relié à l’histoire de quelqu’un, et c’est une des choses que je

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voulais transmettre dans ce livre. Je voulais que la narration et les photos soient inextricablement liées, et étant l’auteur des deux, j’ai pu le faire. Finalement, l’un des plus grands défis a été l’organisation du livre. J’ai quelque 65 000 photos, et le meilleur moyen de tout condenser en 280 pages ne s’est pas imposé d’emblée. La solution est venue d’un designer de TASCHEN, à partir de l’idée des cycles éternels. Vous remarquerez que le livre se structure autour d’une journée : de la lumière douce de l’aube on passe à la chaleur écrasante et la poussière du jour, pour finir avec la fraîcheur du crépuscule et l’ambiance carnavalesque de la nuit. D’un point de vue conceptuel, Art of Burning Man synthétise les moments forts de la playa. Seize années d’art à Burning Man réduites à une journée parfaite, idéale, en plein désert. En haut : MANTIS par Kirk Jellum et Kristen Ulmer. La mante est construite sur le chassis d’un camion benne. Elle peut se cabrer à l’arrêt et transporter trente personnes en position abaissée. Ci-dessous : EL PULPO MECANICO par Duane Flatmo et Jerry Kunkel. El Pulpo est l’une des œuvres d’art les plus connues de la playa, faite d’un assemblage de déchets de métal que Duane a collectés durant des années. La base du véhicule est ornée de débris d’aluminium, dont des morceaux récupérés de son premier « Char-crustacé ». La pieuvre est largement rouillée. 2014.


Ci-dessous : THE TEMPLE OF JOY par David Best et le Temple Crew. Ce Temple de la Joie présentait une ouverture au niveau supérieur, qui parcourait toute la longueur de l’édifice. Un puissant laser, le Laser Beacon de l’ingénieur Russell Wilcox, fut installé dans la base de l’Homme en forme de phare avec un diviseur à quatre voix. Le faisceau de midi était aligné avec soin afin qu’il traverse l’ouverture. 2002.

Page ci-contre : EMBRACE, haut de plus de 21 mètres, a coûté 250 000 dollars. De façon inhabituelle, cette œuvre monumentale a été brûlée au petit matin, peu après le lever du soleil, à la fois pour des raisons artistiques et de sécurité. D’abord, elle était le symbole d’une nouvelle aube et d’un nouveau commencement. Ensuite, cette décision a apaisé les inquiétudes, heureusement infondées, en matière de sécurité : on craignait que la fine « peau » de bois de la sculpture n’éclate dans l’air au cours de l’incendie et ne provoque des blessures dans l’obscurité. EMBRACE, 2014, par K. Christiaens, K. Owens, B. Tubman, J. Olivier, M. Schultz et le Pier Group.

« …Hommage au Burning Man, mais aussi leçon d‘initiation, ce livre explore les origines de ces œuvres d’art à la manière des temples qui surgissent à la surface de la playa, chaque année. » — The Huffington Post, New York

Art of Burning Man NK Guy Relié, avec pages dépliantes, 280 pages € 39,99

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Rankin, Big Magazine (photo non publiÊe), 1998. Š Rankin/Trunk Archive


Corps céleste

Limitée à seulement 1 000 exemplaire signés, la nouvelle monographie sur Gisele Bündchen célèbre sa beauté interstellaire et sa carrière dans la mode. Orchestré et conçu par Giovanni Bianco, cet hommage artistique présente les clichés de photographes illustres tels que Steven Meisel, Mario Testino et Peter Lindbergh.



Page ci-contre : Paulo Vainer, Vogue Brésil, 2015. Ci-dessous : Inez & Vinoodh, V, 2004.

« Une série d’images renversantes de Gisele Bündchen la dernière grande top model, cette fille venue d’Horizontina, au Brésil, qui enflamma les podiums et les unes des magazines peu avant le tournant du siècle et devint l’une des plus belles incarnations de la beauté et de la puissance féminines. » — Esquire

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© Mario Testino/Art Partner licensing

Page ci-contre : Mario Testino, Vanity Fair, 2009. Ci-dessous : Mario Testino, Mario de Janeiro Testino, 2001.

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Š Mario Testino/Art Partner licensing


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© Mert Alas & Marcus Piggott/Art Partner licensing

Ci-dessous : Mert Alas & Marcus Piggott, Pirelli Calendar, 2006.

« Ses fans ne l’on jamais vue comme ça… exposant ses formes dans toutes sortes de poses et de décors. » — New York Daily News


Limité à un total de 1 000 exemplaires signés par Gisele Bündchen Riche de plus de 300 clichés, cette vaste Édition collector a été organisée et conçue par Giovanni Bianco. Depuis le légendaire portrait nu de Gisele par Irving Penn, figurant en couverture de l’ouvrage, jusqu’aux célèbres clichés signés par les plus grands, comme Steven Meisel, Mario Testino, Peter Lindbergh, David LaChapelle, Juergen Teller, Inez & Vinoodh, Mert Alas & Marcus Piggott et Corinne Day, le livre brosse un portrait artistique sans équivalent de la plus célèbre Brésilienne de renommée mondiale à côté de Pelé et de Senna – et du mannequin le mieux payé au monde. Ce fascinant album de photos contient une introduction de Steven Meisel, ainsi que de nombreux hommages des amis intimes de Gisele, de sa famille et des acteurs de la mode qui l’ont côtoyée. Tous apporte un éclairage sur les secrets de l’ascension d’un des plus grands top models de tous les temps, surnommé « The Body » (par Alexander McQueen) et immortalisé sur plus de 1 000 couvertures et dans près de 450 défilés de mode dans le monde.

Édition d’art nos 1 à 100

XL Édition collector

Édition limitée à 100 exemplaires numérotés, comprenant chacun un tirage en impression giclée Epson de Gisele Bündchen, W, 2005 (page ci-contre) sur papier photographique Canson Baryta 310 g/m 2 , signé par Juergen Teller, 31 x 41,5 cm (papier) € 1 500

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nos 101 à 1 000

Édition limitée à 900 exemplaires, chacun signé par Gisele Bündchen. Relié sous coffret acrylique (reliure suisse), 28,1 x 39 cm, 536 pages € 500

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Page ci-contre : Juergen Teller, W, 2005. (Édition d’art ) Ci-dessous : Gisele Bündchen signant les 1 000 feuillets insérés dans chaque exemplaire, New York, 2015 (© Brett Doonan).


« Durant les vingt dernières années, j’ai eu le privilège de travailler avec certains des photographes et artistes les plus talentueux au monde. L’inté­ gralité de mes droits d’auteur sera reversée à une œuvre de charité qui me tient à cœur. » — Gisele Bündchen


Édition courante disponible à partir de janvier 2016 Relié (reliure suisse), 24,5 x 34 cm, 536 pages, € 59,99


« Une bible en matière de glamour sexy. » — Vogue Paris


En cette journée du « Big Monday », le 28 janvier 2013, le surfeur de grandes vagues Garrett McNamara battit son propre record du monde au Guinness Book en domptant une vague d’environ 30 mètres. Nazaré, Portugal. Photo: Tó Mané.


le sport des rois Plus de 200 ans de culture du surf


Renny Yater. Santa Barbara, California, 1960.

Les planches dessinées par Yater étaient plébiscitées par les meilleurs surfeurs de la région ; Yater passait pour être le meilleur fabricant de planches. Photo: John Severson.


Une histoire des origines

Sur les traces et dans les coulisses du film le plus emblématique de la culture du surf – une préface inédite du livre Surfing, par Steve Barilotti

Inde, début décembre 1963 Dans le tapage et la touffeur qui assaillent l’aéroport de Bombay à la mi-journée, le surfeur de San Diego Mike Hynson s’approche du comptoir des douanes avec l’indifférence étudiée d’un vieux trafiquant de pierres précieuses. Tout juste débarqué d’Afrique du Sud, ses cheveux blonds, sa jeunesse et sa beauté toute californienne lui valent d’être fouillé. Sa planche de surf de trois mètres, shapée par Hynson lui-même et décorée aux couleurs de la bannière étoilée, a été remise sans ménagement entre les mains des douaniers, tout comme l’équipement cinématographique de ses compagnons de route Bruce Brown et Robert August. Derrière ses Ray Ban opaques et son visage impassible, Hynson avance lentement, transpirant d’inquiétude (non pas à cause du petit sachet en plastique rempli d’herbe mexicaine ou du rouleau de comprimés de Benzedrine artistement dissimulés dans son pantalon). Le surfeur de 21 ans – qui s’est lancé dans ce voyage autour du monde en partie pour échapper à l’armée – a déjà franchi quatre frontières africaines sans encombre. Mais l’Inde, c’est différent. À Durban, un surfeur africain l’a averti que les autorités locales mettaient la pression sur les journalistes étrangers, en particulier les photographes soupçonnés de venir prendre des images des sites religieux et de la misère noire qui donneraient une mauvaise image du régime de Nehru. Tous les appareils étaient confisqués avant de sortir du pays n’étaient restitués qu’après d’intenses négociations et le versement de pots-de-vin. Souvent, les pellicules étaient détruites. Sous sa chemise hawaïenne, Hynson porte six petites boîtes scotchées à ses abdos de surfeur. Chacune contient 15 mètres de pellicule où sont immortalisées les images prises moins d’une semaine plus tôt sur une plage sud-africaine de l’océan Indien, à Cape St. Francis. Les images couleur 16 mm, réalisées sur une durée de 90 minutes, brève mais optimale en termes de météo, de marée, de houle et de lumière, semblent donner raison

à l’adage humoristique selon lequel Dieu serait né surfeur. Sur cette pellicule de celluloïd, les trois amis ont immortalisé un bijou de vague qui déferle gracieusement à hauteur d’homme sous le légendaire ciel

Ci-contre : Carte postale, Mid-Pacific Carnival, 1914 — 135 —

bleu de l’Afrique. C’est la mythique « vague parfaite » qui, incarnée par la chair en mouvement, inspirera au fil des cinquante années suivantes des milliers de « trips » à travers le monde, en quête de ce graal surfistique.


Hynson, Brown et August ont alors déjà frénétiquement sillonné l’Afrique dans le cadre de ce tour-du-monde-sans-chichis organisé pour tourner le sixième film de Brown consacré au surf, lequel part du postulat qu’avec assez de temps et d’argent, il est possible de suivre les saisons en prenant vague sur vague, comme dans un « éternel été ». Avec un budget riquiqui en poche, Brown et ses deux acolytes surfeurs tournent le film de leur rêve. Alors qu’ils ont moins d’une semaine pour remonter la côte de l’océan Indien jusqu’à Durban, d’où ils doivent s’envoler pour l’Australie, Brown a décidé de suivre le conseil du surfeur du Cap John Whitmore, qui lui a parlé d’une possible vague de classe mondiale à Cape St. Francis, un petit village de pêcheurs à mi-chemin entre Le Cap et Durban. Après trois jours de pistes chaotiques et poussiéreuses, ils sont parvenus à leur destination tard le soir et ont passé la nuit dans des huttes pour touristes posées sous le vent du cap. Hynson, debout dès l’aube, repère ce qui ressemble fort à une jolie vague un demi mile plus haut sur la plage de sable blanc. Il tire Brown et August de leur lit à grands cris et ils remontent la plage ensemble, jusqu’à se trouver face à une vague qui a tout du buisson ardent – un fantasme éthéré devenu réel, semblable en forme et en tempérament à celle qui déferle à Malibu, parfaite, un jour par an, mais plus rapide, plus creuse et miraculeusement déserte. En bref, le trio a une vision. Hynson et August se gavent de vagues impeccablement galbées pendant un peu plus d’une heure, tandis que Brown filme comme un dément, enchaînant les rouleaux de pellicule. Puis, aussi vite que la houle s’est formée, la marée dévie légèrement et efface le break. À midi, ils sont remontés en voiture et trois jours plus tard ils s’envolent pour

Perth via l’Arabie saoudite, l’Inde, Ceylan et met joliment en valeur la vague parfaite Singapour. Le trio est conscient d’avoir en qu’ils ont découverte. boîte le moment clé du film et de sa narraBrown se met au travail dès son retour en tion. Enrichi de quelque chose de bien plus Californie et produit un film 16 mm qui franvaste encore. Brown, qui refuse de confier chit habilement le fossé entre film de surf les précieuses bobines aux services internapur et dur et documentaire de voyage. La tionaux des postes, dort avec. première de The Endless Summer a lieu au À l’aéroport de Bombay, Hynson s’approche Civic de Santa Monica Civic au cours de l’été des austères douaniers et pose son bagage à 1964 et le film remporte un succès instanmain sur le tané auprès comptoir. Du « Un fantasme éthéré devenu réel, des surfeurs coin de l’œil, il californiens, semblable en forme et en tempéra- qui remvoit Brown et August au comp- ment à la vague parfait qui déferle plissent la salle toir voisin, qui se à Malibu un jour par an, mais plus sept soirs font cuisiner à rapide, plus creuse et miraculeuse- d’affilée. propos des par ment déserte. Le trio a une vision. » Galvanisé caméras confisce succès, quées. Le sac où Brown Hynson a rangé maillots de bain, wax et embarque ses deux vedettes du surf dans un crème à raser est méticuleusement vidé, puis camping-car et sillonne le pays et ses trois on fait signe à Hynson d’avancer jusqu’à la côtes pour présenter le film. À chaque étape, zone d’embarquement. Sans perdre son sang August et Brown rameutent le public avec froid, Hynson pousse un soupir et se dirige des démonstrations de skateboard devant le d’un pas nonchalant vers la salle d’attente. En haut : Brochure touristique, 1922. La forme Au passage, il remarque que sa planche de caractéristique du volcan Diamond Head s’est surf est passée quasiment inaperçue et a été rapidement imposée comme le symbole visuel prise en charge par les bagagistes. du « Paradis ». L’équipe achève son voyage au pas de course. Ci-dessous : Publicité, Dewey Weber Surfboards, 1967 (détail). Au moment où le En l’espace de deux mois, elle fait étape à surf connut son essor, les professionnels de Perth, Melbourne, sur l’île nord de la la discipline se tournèrent vers les agences de publicité les plus en vue pour leur subtile Nouvelle-Zélande et à Tahiti. Nulle part le approche pop-art du marketing – dans le cas trio ne trouve une vague qui approche de présent, ils proposèrent des planches près ou de loin celle de Cape St. Francis, customisées vendues dans le même esprit que mais la variété de spots uniques qu’il explore les automobiles vendues en sortie d’usine.

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Wende Wagner et Tom Carlin, Hawaii, 1957.

Le réalisateur Billy Wilder a repéré Wender Wagner tandis qu’elle nageait près du Coronado (Californie) pour le tournage de Certains l’aiment chaud en 1958. Frappé par sa beauté exotique, il proposa à l’athlète de faire un bout d’essai, mais ses parents l’obligèrent à terminer le lycée d’abord. Elle deviendra ensuite un top model international, une actrice de cinéma et une doublure de plongeuses. Photo: Bev Morgan, avec l’aimable autorisation du Surfing Heritage.


Outer Reef, North Shore, Hawa誰, 2008. Photo: Ed Freeman.


cinéma. À l’été 1966, le film – désormais projeté en 35 mm dans un vaste réseau de distribution – a séduit le grand public de même que la critique, qui qualifie Brown de « Fellini de l’écume ». Il aurait rapporté dans les 30 millions de dollars. Mode mise à part, le lien social entre The Endless Summer, la surf culture et la culture mondiale de l’après-guerre est ancien et solide. Il suffit de regarder l’affiche du film, œuvre d’op art du graphiste et surfeur John Van Hamersveld. Quant au thème musical éponyme, il s’est incrusté profondément dans la conscience collective comme l’appel hypnotique de l’aventure pieds nus. Au fil des années, la matrice culturelle pop et surf qui enveloppe le film a étendu son influence dans des recoins surprenants. Van Hamersveld, un temps directeur artistique pour Surfer Magazine, concevra des pochettes de disque pour les Beatles et les Rolling Stones. Son jeune collègue Rick En haut : Affiche, 1966. « Une bouée de bon sens et d’évasion dans ce monde de fous. » The Endless Summer de Bruce Brown, sorti en juin 1966, sera son grand œuvre du 7e art – et du surf. Ci-dessous : David Nuuhiwa et John Gale, Laguna Canyon, Californie, 1971. Nuuhiwa et ses partenaires de surf Mike Hynson, Herbie Fletcher, Les Potts et Barry Kanaiaupuni, ont tourné dans Rainbow Bridge, financé par La Confrérie de l’Amour éternel, et Jimi Hendrix y fit une apparition en guest star peu avant sa mort (Jeff Divine).

Griffin, dessinateur attitré du magazine depuis l’âge de 16 ans, acquerra une renommée mondiale quelques années plus tard parmi les Cinq Grands de l’affiche psychédélique à San Francisco, et en tant que premier artiste à rejoindre les légendaires Zap Comix de Robert Crumb. Mike Salisbury, autre illustrateur du Surfer depuis l’adolescence, est aujourd’hui brand designer pour Levi’s, Disney ou Steven Spielberg. Un autre épilogue aussi important concerne Hynson, consacré rock star de la scène du surf et du shape pour sa performance dans The Endless Summer. Membre fondateur de la Fraternité de l’Amour Éternel ( la « Mafia hippie »), il s’adonna au trafic d’huile de haschisch indienne dans des planches de surf évidées, révolutionna la shortboard moderne et partagea l’affiche du classique underground Rainbow Bridge avec Jimi Hendrix. Il s’attira les foudres de Richard Nixon pour y avoir exhibé un grand saladier de haschisch sous une affiche du président pré-Watergate où figurait la question : « Est-ce que vous achèteriez une voiture d’occasion à cet homme ? » Poursuivi par la DEA et ses propres démons, Hynson disparut des radars pendant une vingtaine d’années. Mais 50 ans après cette matinée à Cape St. Francis, c’est un Hynson sobre mais toujours aussi classe que suffisant qui se présenta à Washington pour être intronisé parmi les grands anciens et les trésors vivants du surf.

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Pour les surfeurs, The Endless Summer représente bien plus que tout cela. Il incarne le premier et le plus beau visage du surf, ainsi qu’un de ses récits fondateurs. Il raconte la quête à l’origine d’un archétype, puis une culture riche et légitime et, dans son sillage, une industrie mondiale pesant plusieurs milliards de dollars.


San Onofre, Californie, 1963. Photo: LeRoy Grannis.


« Les racines du lien social entre la culture du surf et la culture mondiale de l’après-guerre sont profondes et solides. »


Ci-contre : Affiche, championnat américain de surf, 1971–1972. Conception : Earl Newman. Ci-dessous : Pages intérieures du magazine Surfer, 1970. En l’espace de cinq ans, le visage et l’esprit du surf auprès du grand public s’étaient métamorphosés. Page ci-contre : Waimea Bay, Hawaï, 1966 Photo: LeRoy Grannis.

« Sur notre planète surpeuplée, le surfeur peut encore espérer trouver la journée parfaite et la vague parfaite, se retrouver seul face aux éléments et à lui-même. » — John Severson

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Cadre non inclus

La vague parfaite Cette édition platine offre l’histoire visuelle la plus complète à ce jour du surf sous tous ces aspects. Avec plus de 900 images et des essais des plus grands journalistes de surf actuels, elle parcourt la photographie, la mode, le cinéma, l’art et la musique pour retracer l’évolution de la culture surf, depuis sa découverte par les Européens, en 1778, jusqu’au phénomène mondial et multiforme que l’on connaît aujourd’hui. Fruit de trois ans et demi de recherches méticuleuses, cet ouvrage est un hommage unique au sport des rois et un incontournable pour tous les acteurs de poids de la scène surf et tous ceux qui aspirent à ce mode de vie.

Édition collector nos 1 à 125

Édition limitée à 125 exemplaires sous coffret de luxe, signés par Jim Heimann. Avec un tirage de Wild Angels, 2006 (ci-dessus) de John Severson, 40 x 60 cm € 750

Surfing. 1778–2015 Jim Heimann (éd.) Relié (reliure en tissu), avec double page dépliante et marque-page, 29 x 39,5 cm, 592 pages € 150

XL

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« On n’a jamais fait un livre comme ça et on n’en fera plus jamais. » — Steve Barilotti

Mickey Muñoz et Tina Trunick, Dana Point, Californie, 1964. Photo: Don Trunick.


Choc des cultures ? Des façons de dormir au rôle des seniors dans la société, Yang Liu explore dans Orient/Occident, mode d’emploi les stéréotypes de la vie quotidienne dans deux parties du monde aux antipodes.

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Quelles sont les règles de bienséance à table en Occident et en Orient ? Le langage de l’amour est-il immuable sous toutes les latitudes ? Le patron est-il plus puissant à Paris ou à Shanghai ? Après Homme/Femme, mode d’emploi, l’artiste Yang Liu s’inspire de ses propres expériences pour illustrer à sa façon les clichés sur l’Orient et l’Occident.

également disponible

Yang Liu. Orient/Occident. Mode d’emploi Relié (reliure en tissu) 13 x 13 cm, 100 pages € 12 — 147 —


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Photo : Mark Seelen

Des légendes du rock aux pionniers du fétichisme, la nouvelle galerie TASCHEN célèbre les artistes qui ont défini et défié toute une génération.

TASCHEN Gallery, 8070 Beverly Blvd, Los Angeles Du 7 novembre au 7 janvier : On Yoga, the Architecture of Peace par Michael O’Neill


« TASCHEN fait un travail remarquable avec ses expositions consacrées à la musique : celle inaugurant la galerie, It’s just a Shot Away: The Rolling Stones in Photographs, était visuellement une évidence, vu les recherches, l’expertise et l’engagement de TASCHEN à raconter une sacrément belle histoire sur ces sujets. » —Time Out Los Angeles



« Les ouvrages de TASCHEN sont conçus comme des objets de collection. Un livre TASCHEN prend de la valeur quasiment dès sa sortie en librairie. » —Abebooks, le site de livres d’occasion préféré des internautes


Photo : Brigitte Lacombe.


TROIS ANS, QUATRE STONES, SOIXANTE VOYAGES AUTOUR DU GLOBE : 1 600 EXEMPLAIRES SIGNÉS format

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« Ce livre, ce n’est pas que du rock’n’roll, c’est 50 années de souvenirs dévalées comme sur des montagnes russes ! » — Keith Richards

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« Il n’y a qu’un mot pour décrire Annie Leibovitz : Waouh. »


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L’hommage photographique de Sebastião Salgado à la Terre dans son état naturel


Présenté dans une œuvre d’art multiple d’Allen Jones, légende du pop art…

« Je suis attiré par les surfaces lisses qui convoquent les sensations tactiles. Pour moi, un Ingres est plus réel qu’un Degas. » — Allen Jones


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Édition collector de 1 000 exemplaires signés par Naomi Campbell Cette Édition collector limitée et signée, en deux volumes, rend hommage à la remarquable carrière de Campbell à travers les plus grandes légendes de la mode et de la photographie, grâce à des images stupéfiantes et à une autobiographie exclusive. Le premier volume rassemble le meilleur des photos de Campbell, parmi lesquelles celles de Mert Alas & Marcus Piggott, Richard Avedon, Anton Corbijn, Patrick Demarchelier, Helmut Newton, Herb Ritts, Mario Testino, Ellen von Unwerth et Bruce Weber. Le second volume contient le récit autobiographique détaillé de Naomi, illustré de couvertures de magazines, de publicités, de clichés personnels inédits, de captures d’écran, entre autres. Naomi revient sur son enfance, les débuts de sa carrière de top model, son travail avec les plus grands stylistes de mode, comme Azzedine Alaïa, John Galliano, Marc Jacobs, Karl Lagerfeld, Gianni Versace, ainsi que sur son ascension fulgurante au rang de star mondiale. En complément, des biographies des photographes et une annexe illustrée. Publication janvier 2016.

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Harper’s Bazaar, USA, September 2009 Tirage pigmentaire sur papier archive Platine Fibre Rag, signé par Jean-Paul Goude, 31,5 x 44 cm (papier)

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édition d’art Nos 101 à 200 Vogue Italy, September 1996 Tirage gélatino-argentique, signé par Paolo Roversi, 31,5 x 44 cm (papier)

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Prix de souscription : € 2 500 chacun Nouveau prix 2016 : € 3 000 chacun

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Relié, 4 pages dépliantes, signé par Naomi Campbell, 500 pages, 35 x 49 cm, accompagné d’un volume de 368 pages, inséré dans une œuvre d’art multiple d’Allen Jones Prix de souscription : € 1 250 Nouveau prix 2016 : € 1 500


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