N°1
TERRE de THÉ LE MAGAZINE DES SAVEURS
De la découverte à la culture à travers le monde. Savourez chaque page et prenez part au voyage.
ÉDITO LE THÉ, UN ART DE VIVRE « On boit le thé pour oublier le bruit du monde » disait Lu Yu, Maître de thé sous la dynastie Tang (618-907). C’est à croire que la première fonction du thé n’est pas d’être bu mais d’être une véritable source d’évasion, d’imagination. Le thé est considéré comme une potion magique enivrante, envoûtante. Par-delà les pays, il a su acquérir une personnalité propre qui lui a valu une diversité de parfums, de saveurs et de coutumes grandissantes. Reconnu pour ses vertus médicinales, il est dans certains pays devenu un emblème, un mode de vie, et s’est installé au coeur de traditions. Terre de thé vous propose de remonter dans le temps, de parcourir l’histoire de la deuxième boisson la plus consommée du monde, afin d’en découvrir tous les secrets, et de voyager au coeur des cultures et des saveurs.
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TROISIÈ
1
DÉBUT DE NOTRE VOYAGE L’HISTOIRE DU THÉ DEUXIÈ
Les légendes Apparition du thé Diffusion Conquête du monde
LA CULTURE DU THÉ Cueillette du thé
FAITS HISTORIQUES FEMMES DE THÉ
ME
P AR
2
EUROPE
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VOYAGE EN EUROPE
20 20 22 24 25
ANGLETERRE
26 26 28 29
PORTUGAL
30 30 32 34
FRANCE
36 36 38 40
RUSSIE
Les origines Five o’clock tea Thé noir au lait Tea House Theater
Les origines Thé Guaranna Lisbon Tea
La production Thé Dammann Frère La grande mosquée
Les origines Cérémonie russe Thé des tsars
P M E AR
3
TIE
10 12
PART
TIE
6 6 7 8 8
RE
IE
PREMIÈ
SOMMAIRE ASIE
42
VOYAGE EN ASIE
44 44 46 48 49 50
CHINE
52 52 54 56 57
JAPON
58 58 60 61
INDE
62 62 64
SRI LANKA
Les origines Gong Fong Chua Thé au jasmin Thé Gaiwan Ivy tea house
Les origines Chanoyu Thé Matcha Thé Gyokuro
Les origines Thé Tchai Thé Darjeeling
Les origines Thé Ceylan
SIXIÈM
6
AMÉRIQUE
88
VOYAGE EN AMÉRIQUE
90 90 92 93
ÉTATS-UNIS
94 94 96
ARGENTINE
4
MOYENTORIENT VOYAGE EN ORIENT
68 68 70 71 72 73
MAROC
74 74 76 77
EGYPTE
78 78 80 81
TUNISIE
Les origines Les 3 thés Thé à la menthe Thé Gunpowder Le souk
Les origines Thé Karkadeh Les cafés
E IÈM
Les origines Bubble tea Thé glacé
Les origines Thé Mathé
5
AFRIQUE
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VOYAGE EN AFRIQUE
84 84 86 87
AFRIQUE DU SUD Les origines Le roiboss Café Melissa’s
Les origines Thé Akdar Café des délices
SEPTIÈ
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E PART
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CINQU
QUATR
E IÈM
ARTIE EP
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NOUVELLES TENDANCES
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FLORAL TEA STORIES
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LE THÉ EN GOBELET
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LE PACKAGING
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L’HISTOIRE DU THÉ LES LÉGENDES Selon la légende, alors que l’empereur Shennong1 faisait bouillir de l’eau à l’abri d’un arbre pour se désaltérer, une légère brise agita les branches et détacha quelques feuilles. Elles se mêlèrent à l’eau
« On boit le thé pour oublier le bruit du monde » . Lu Yu, Maître de thé sous la dynastie Tang (640)
et lui donnèrent une couleur et un parfum délicat. L’empereur y goûta, s’en délecta et en reprit. L’arbre était un théier sauvage : le thé était né. En Inde, une autre légende, cette fois, raconte que le prince Dharma, fut touché par la grâce et décida de quitter son pays pour aller prêcher en Chine les préceptes de Bouddha. Pour se rendre
1. Dans la religion traditionnelle, où son culte a pris un essor sous les Song, il était le patron des agriculteurs. On lui attribue un fouet magique qui révèle les qualités des plantes.
plus digne d’une telle mission, il fit vœu de ne pas dormir pendant les neuf années de son périple. Vers la fin de la troisième année pourtant, il fut pris de somnolence et allait succomber au sommeil lorsque, cueillant par hasard quelques feuilles d’un théier sauvage, il les mordit machinalement. Les vertus tonifiantes du thé firent aussitôt leur effet : Dharma se ragaillardit et puisa dans ces feuilles la force de rester éveillé pour les six dernières années de son apostolat. Au Japon, l’histoire serait un peu différente : au bout des trois années, Bodhi-Dharma, épuisé, finit par s’endormir pendant ses dévotions. À son réveil, furieux de sa faiblesse et
accablé par sa faute, il se coupa les paupières et les jeta à terre. Quelques années plus tard, repassant au même endroit, il constata qu’elles avaient donné naissance à un arbuste qu’il n’avait jamais vu auparavant. Il en goûta les feuilles et s’aperçut qu’elles avaient la propriété de tenir les yeux ouverts. Il en parla autour de lui et on prit l’habitude de cultiver le thé aux endroits où il était passé. Quelle que soit la légende, il semble que les arbustes soient originaires de Chine, probablement de la région située aux confins de la Birmanie, du Nord-Viêt-Nam et du Yunnan, et que l’habitude de consommer cette boisson se soit d’abord développée parmi les Chinois.
APPARITION DU THÉ Sous la dynastie chinoise des Tang (618-907), le thé évolue vers un usage plus populaire, dépassant le cadre de la pharmacopée, pour devenir un élément raffiné du quotidien. Les maisons de thé font leur apparition et pour la première fois, le thé est source d’inspiration artistique. Le thé existe alors sous la forme de briques compressées, que l’on fait rôtir avant de les réduire en poudre et de les mêler à l’eau bouillante. Certains ingrédients y sont ajoutés : sel, épices, beurre… Sous la dynastie des Song (960-1279) naît une deuxième école, qui annonce par la poésie de ses cérémonies et l’importance accordée au respect des règles de préparation, celle du Cha No Yu japonais. Les thés consommés sont de plus en plus raffinés et la céramique prend une place déterminante dans l’univers qui entoure le thé. Les premiers thés en vrac font leur apparition : ils plus sont faciles à produire en grandes quantités et peuvent ainsi satisfaire une demande populaire croissante. Sous les Ming (1368-1644), un décret impérial stoppe la fabrication de thé compressé et le thé commence à être consommé sous sa forme actuelle : en infusion dans un récipient. Cette nouvelle façon de boire le thé a une influence sur les objets et accessoires utilisés pour sa
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préparation : c’est le début des services en terre et en porcelaine. La bouilloire remplace les bouteilles à thé de l’époque Tang et la théière devient l’ustensile idéal pour le faire infuser. Le thé se démocratise et va trouver un nouvel essor économique avec l’exportation. Au Japon, le thé fait son apparition dès le VIIe siècle. À plusieurs reprises, des moines bouddhistes ramènent de Chine des graines de théier et tentent d’en établir la culture dans le pays. Il faut attendre le XVe siècle pour que le thé se diffuse dans l’archipel.
DIFFUSION
Des plantations sont créées en Inde en 1834 et le thé est introduit à Ceylan en 1857. Les plantations cingalaises n’ont au départ qu’une valeur expérimentale, mais, en 1869, après la destruction totale des plantations de café, ravagées par un parasite, le thé devient la principale richesse de l’île. Le thé est également implanté dans d’autres pays d’Asie qui deviennent d’importants producteurs, dans des pays d’Afrique Noire anglophone ; et, plus récemment, sur l’île de la Réunion et en Argentine. Aujourd’hui, le thé est la première boisson mondiale après l’eau, il s’en consomme environ 15 000 tasses à la seconde.
Dès le X e siècle, le thé constitue pour la Chine un produit d’exportation de première importance : d’abord vers les pays asiatiques puis, à partir du XVII e siècle, vers l’Europe. En 1606, les premières caisses de thé arrivent à Amsterdam, en Hollande : c’est la première cargaison de thé connue et enregistrée dans un port occidental. Si sa propagation rencontre au début une forte opposition - on disait que son usage faisait perdre aux hommes leur stature et leur amabilité, aux femmes leur beauté le thé devient cependant très vite l’objet d’un commerce important. Réservé d’abord aux princes, il est ensuite très apprécié de tous les beaux-esprits qui fréquentent les coffee-houses bientôt baptisés « maisons de thé » .
Le thé est la première boisson mondiale après l’eau, il s’en consomme15 000 tasses à la seconde.
CONQUÊTE DU MONDE Au XIX e siècle, la Chine ne suffit plus à satisfaire une consommation occidentale toujours croissante et les Anglais commencent vers 1830 à développer la culture du thé dans d’autres pays.
Maison de thé française « Mariages Frères » , Résultat de la conquête du thé
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LA CULTURE DU THÉ Des ouvrages ont donné la preuve de la consommation du thé, qui remonte au VIIIe siècle avant J.-C., notamment dans la province du Yunnan2 en Chine.
Les Européens ont découvert « l’arbre à thé » au milieu du XVIIe siècle et il est vite devenu un marché florissant avec les chinois. Les Européens ont cherché à percer le secret de ce breuvage, dont les chinois détenaient le monopole absolu.
Il faut attendre le XIXe siècle pour que le botaniste Robert Fortune et le major anglais Robert Bruce pour trouver un théier sauvage dans la jungle d’Assam. La plantation de thé se présente comme une immense forêt composée de petits arbres dépassant rarement 1, 50 mètre de haut. A l’état sauvage, les théiers peuvent atteindre 10 mètres de haut. Lorsqu’ils sont cultivés, ils sont maintenus à 1, 20 mètre environ par des coupes régulières, pour former ce qu’on appelle une « table de cueillette », qui facilite la récolte manuelle et favorise la croissance des bourgeons. Taillés, façonnés par la main de l’homme pendant une cinquantaine d’années au minimum, les théiers deviennent de véritables arbres-nains et
2. Province du sud-ouest de la Chine. Frontalier du Viêt Nam, du Laos et de la Birmanie, il regroupe des populations de diverses appartenances ethniques.
forment des plantations singulières, à la fois immensités vertes et forêts miniatures. Le théier appartient à la famille des camélias. Le camellia sinensis ou thea sinensis comporte deux sous-espèces (camellia sinensis sinensis ou camellia sinensis japonica) principales : celle de Chine, dite sinensis, et dont la feuille est petite et vert sombre ; et celle d’Assam, dite assamica, à la pousse large, claire et charnue. Outre ces variétés, sont apparus avec les méthodes d’hybridation, greffes, bouturages, etc. , de nombreux croisements, appelés jats ou clonal. Le théier est un arbuste de la famille des Camelia. En Chine, il est plus connu sous le nom de « Camelia Sinensis » (ramifications à la base), tandis qu’en Assam, il se nomme « Camelia Assamica » (un tronc commun et des feuilles plus longues et plus vertes). À l’état sauvage, le Camelia peut atteindre jusqu’à 20 mètres de haut. Le théier le plus vieux du monde est âgé de 3600 ans (Yunnan, Chine). Il peut être domestiqué et taillé, ce qui est le plus souvent le cas. On le trouve principalement dans des régions où le climat est tropical ou à tendance tropicale, et qui alterne pluie et soleil. C’est un arbuste qui aime l’ombre, la brume et l’eau et que l’on peut rencontrer en altitude.
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CUEILLETTE DU THÉ UN SAVOIR-FAIRE MILLÉNAIRE On a d’abord ramassé le thé, avant d’en planter quelques pieds par commodité autour de villages ou de monastères. La culture intensive par bouturage en jardin avec table de cueillette est directement liée à la demande occidentale. Ce sont d’ailleurs les seuls types de plantations qui ont été pratiqués par les Anglais en Inde, les Hollandais à Java, les Russes, les Iraniens, les Turcs, les Keyniens…enfin partout dans le monde où la culture du thé a été implantée au XIXe et XXe siècle. La cueillette est généralement effectuée par des femmes sauf en Afrique où ce sont des hommes et, entre autres, au Japon et en Géorgie où les récoltes sont généralement mécanisées. Selon la légende, cette cueillette autrefois effectuée par des jeunes filles gantées et munies de ciseaux d’or, était réservée à l’Empereur de Chine. La cueillette fine quant à elle consiste à ne prélever que le bourgeon et les deux premières feuilles. Ces jeunes pousses concentrent près de 80% des antioxydants du thé ! Pratiquer une cueillette impériale ou fine est donc l’assurance d’une qualité aromatique exceptionnelle et de bénéficier des bienfaits de cette boisson millénaire.
Une cueillette essentiellement féminine
« Ce qui est le plus important pour l’homme de thé : préparer sereinement le thé, laisser faire le destin et ne pas tenter d’y échapper » Le Maître de thé (1991) de Yasushi Inoue
LES ÉTAPES DE FABRICATION Après récolte du thé, commence l’étape du flétrissage. Cette opération consiste à sécher les feuilles de thé jusqu’à ce qu’elles perdent 40 à 50 % de leur teneur en eau. Le thé est posé sur de longues claies ventilées ; ses feuilles sont assouplies manuellement ; cette opération dure de 16 à 24 h. Elle peut être réduite à 6 h avec du matériel moderne et automatique (longs tunnels dans lesquels les feuilles sont malaxées et déshydratées de façon accélérée). L’étape suivante est le roulage. Il s’agit de 35 minutes pendant lesquelles les feuilles sont roulées sur elles-mêmes, sans être brisées, dans des machines adaptées. Les cellules se brisent, libérant les huiles essentielles qui rendront possible la phase suivante de fermentation ; de plus, cette pression légère libère les sucs qui confèrent au thé sa saveur caractéristique. Ensuite, le thé fermente pendant 2 à 3 heures, par 27° dans une atmosphère humidifiée où l’air ambiant ne circule pas. Le thé s’oxyde et
prend sa couleur brune par absorption d’oxygène. Vient par la suite l’étape de la torréfaction. D’une durée de 20 minutes la fermentation est arrêtée par une torréfaction à 90/95° C dans des chambres à air chaud. Devenues noires, les feuilles n’ont conservé que 5 % d’eau au maximum. Enfin, on peut passer au tamisage. Lors de la torréfaction, les feuilles peuvent s’effriter et les brisures forment la « poussière » du thé. Le tamisage consiste à séparer la « poussière » du thé. Cette opération est réservée aux thés de grande qualité. Une première opération de criblage peut avoir lieu entre roulage et fermentation. Immédiatement après le tamisage, le thé est emballé (en caisses, sacs ou cartons) et prêt à être commercialisé.
Pour un thé de qualité
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LES FAITS HISTORIQUES
1711 La guerre de l’Opium
La Bristish Fast Inda Company Créée en 1600 par la reine Élisabeth Ire, la British East India Company (Compagnie britannique des Indes orientales) permit au Royaume-Uni de concurrencer les autres pays européens sur l’importation des produits chinois. En 1711, la Compagnie établit un comptoir à Canton, en Chine, afin d’importer du thé vers l’Europe. Puis, en proie aux difficultés financières, elle mit en place un système économique ingénieux mais aux conséquences humaines désastreuses : vendre l’opium indien produit dans ses colonies à destination des Chinois puis, à l’aide des capitaux récoltés, acheter du thé chinois.
1773 La Boston Tea Party
1848 Robert Fortune, l’espion du thé
Compagnie des Indes orientales Une loi votée en 1773 exemptait la Compagnie des Indes Orientales de taxe sur les ventes de thé aux colonies américaines. Ainsi, la Compagnie remporta le monopole sur la vente de thé en Amérique du Nord face aux autres compagnies étrangères lourdement taxées. Cet événement inquiéta encore plus les colons. Ils prirent alors la décision de jeter la totalité de la cargaison de thé de bâteaux à l’eau pour lancer un fort message de révolte à Londres.
Une mission secrète En 1848, la compagnie des Indes orientales confie la mission à Robert Fortune (1812-1880), botaniste anglais, d’aller prélever des plants et des graines de théier et de percer les secrets de fabrication du thé dans diverses régions chinoises.
1886 La Grande course du thé
Un arrivage en course C’est une compétition non officielle entre les plus rapides voiliers (les clippers) des compagnies d’armement britanniques commerçant avec la Chine pour débarquer la première récolte de thé de la saison à Londres en 1861. Une féroce compétition eut lieu toute l’année pour savoir quel vaisseau reviendrait en premier à Londres avec le nouvel arrivage de thé.
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FEMMES DE THÉ
LA DUCHESSE DE BEDFORD 1783 - 1857
«L’Afternoon Tea » s’est popularisé au milieu du XIXe siècle avec Anna-Maria Russell, duchesse de Bedford, qui avait l’habitude d’organiser une collation autour du thé, à laquelle elle conviait ses amis. La mode de recevoir des amis ou de la famille pour le thé est rapidement devenue une habitude de bon goût et de convivialité dans toute la société.
LA REINE VICTORIA 1837 - 1867
À Buckingham, la Reine Victoria renforce le rituel du thé, organisant des tea receptions qui réunissaient toute la haute société. De là, des « Afternoon Tea » parties deviennent coutumières dans le reste de l’aristocratie et de la bourgeoisie. C’est Victoria aussi qui est à l’instigation des « Tea moralities », à savoir que des organismes de charité offrent le thé aux plus pauvres.
LES CUEILLEUSES DE THÉ
Les cueilleuses sont les premières Grandes Femmes du thé. Courageuses, travailleuses, patientes, sans elles, le thé ne verrait pas l’eau dans notre tasse. Ce sont principalement des femmes d’âge mûr qui cueillent le thé, mais il y a aussi des hommes. C’est un métier physiquement difficile, et mal payé. Elles sont payées en fonction du poids de leur récolte.
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VOYAGE EUROPE À LA DÉCOUVERTE DU VIEUX CONTINENT
Un succès pour l’aristocratie Une des premières traces écrites du thé en Europe date de 1560 avec le témoignage du Père Jésuite Jasper de Cruz qui en avait ramené de Chine. Puis en 1606, un navire de l ereenigde Oost Indiche Compagni mbarqua à Java quelques caisses de thé, troquées contre de la sauge. Le thé vert supportant mal les longs voyages en cale humide et peut-être aussi par goût ou similitude au café, le thé importé en Europe fut essentiellement du thé noir. Le thé fut longtemps un produit de grand luxe, c’est d’ailleurs ce qui en fit son succès auprès de l’aristocratie et son échec auprès du peuple. Le jésuite Alexandre de Rhodes qui avait passé 25 ans en Extrême-Orient (de 1619 à 1645) était devenu un accro
au thé dont il ventait les bienfaits en ses termes : « Pour moy, quand j’avais la migraine, en prenant du thé, je me sentais si bien soulagé, qu’il me semblait qu’ôme tirait avec la main tous mon mal de teste » . Le thé s’est plus au moins bien répandu dans les pays européens, en concurrence avec le café et le chocolat, et s’il eut ses heures de gloire, il termina souvent bon second comme en France ou en Hollande, où n’eut que peu d’impact comme en Italie ou en Espagne. En Russie où pourtant la Chine est bien plus proche et accessible par voie terrestre ce n’est qu’en 1638, qu’arrivèrent à la cour du Tsar Michel Fedorovitch, 64 kg de thé rapportés par l’ambassadeur Vassili Starkov.
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ANGLETERRE LES ORIGINES C’est au XVIIe siècle que fut introduite, en Europe, la boisson favorite des chinois, boisson délectable et réputée pour le vertus hygiénique de « l’herbe » infusée. Les feuilles de thé franchirent donc les frontières de l’Angleterre et de la France à la même époque. En 1606, les premières caisses de thé arrivent en Hollande (à Amsterdam) : c’est la première cargaison de thé connue et enregistrée dans un port occidental. Les Pays-Bas ont alors la mainmise sur le négoce des produits rares en provenance de l’Orient, mais cette suprématie est vite remise en cause par les Anglais, qui fondent quelques années plus tard l’East India Company, concurrent direct de la compagnie hollandaise. Dans l’Angleterre de cette époque, la mode est aux cafés : les coffee-houses se développent de plus en plus et connaissent un succès grandissant. Cependant, Catherine de Bragance, infante portugaise et jeune femme du roi d’Angleterre apporte, dans la capitale, son habitude de boire du thé
à toute heure de la journée. Dès lors, le thé connaît un véritable engouement dans tout le pays. Apprécié à la Cour, il ne tarde pas à conquérir toutes les couches de la population. Bien que cette boisson fut considérée comme une denrée rare et onéreuse, les anglais en firent rapidement ne forte consommation.
Les coffee-houses se développent et connaissent un large succès.
Le thé au lait, Spécialité de la Reine
Le tea-time, Une véritable cérémonie
The Tea House, Pour un moment de détente à l’anglaise
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FIVE O’ CLOCK TEA Le thé de l’après-midi, le « Five o’clock tea » est une tradition encore très ancrée dans la vie quotidienne britannique. C’est un véritable rituel ! Avant l’introduction du thé en Angleterre, les anglais se retrouvaient pour deux repas principaux : le petit-déjeuner et le dîner. Le petit-déjeuner était une sorte de « brunch » composé, en autre, de pain et de viande. Le dîner était long et également copieux. UNE DUCHESSE AFFAMÉE Mais ce rythme ne suffisait pas à beaucoup d’anglais et notamment à la duchesse de Bedford (1788-1861) qui avait très souvent faim dans l’aprèsmidi ! Adoptant le service à thé euro-
Un véritable rituel quotidien pour les anglais
péen, elle invita des amis à la rejoindre chez elle, dans sa maison de campagne, pour un repas supplémentaire vers 17 heures. La tradition du « five o’clock tea » était née ! Cet instant de réconfort, de discussion et de gourmandise devînt rapidement populaire et très apprécié par tout le monde. La duchesse continua donc cette tradition à son retour dans la capitale, envoyant des invitations à plusieurs amis. Elle lança ainsi une mode dont le succès fut considérable. UNE VÉRITABLE CÉRÉMONIE Cette tradition anglaise d’inviter de la famille ou des amis à boire le thé dans l’après-midi se répandit très rapidement dans toutes les couches sociales. De nombreux services et accessoires nécessaires au bon déroulement de la « cérémonie » furent ainsi créés puis vendus dans les magasins de Londres. Citons par exemple : la boule à thé, le passe-thé, le sucrier, le pot à lait, la
boîte à thé, etc. En règle générale, la première théière était préparée dans la cuisine puis apportée à la maîtresse de maison qui conversait dans le salon avec ses invités. Le thé contenu dans le premier récipient était ensuite versé dans une seconde théière en argent, posée au-dessus d’une petite flamme, per mettant de garder le thé bien chaud. Les anglais ont une passion pour les laitages. En effet, l’anglais a cette fierté légitime d’aimer le lait, produit de qualité issu des meilleurs pâturages du Norfolk, du Suffolk, du Devon ou de Jersey. Ce n’est donc pas un hasard si ce pays a choisi des thés à petites feuilles, soit des thés plus corsés, qui s’équilibrent parfaitement bien avec le goût du lait.
cream » 3 et la confiture de fraises, les petits sandwichs de pain de mie au concombre coupés très fins, les cakes et toutes sortes de pâtisseries ! Ces gourmandises servent à mettre en valeur le thé, tant dans sa mise en scène que dans sa dégustation, créant ainsi l’atmosphère cosy des « salons à l’anglaise » ! En Angleterre, pâtisseries lait, sucre et citron ne sont donc jamais oubliés ! !
LE THÉ DU MATIN Le thé se boit dès le matin, accompagnant ainsi avec délicatesse le petit déjeuner copieux qu’aiment savourer depuis toujours les anglais : oeufs, jambon, céréales, jus d’orange, poisson fumé, toasts à la marmelade d’oranges en morceaux et tasse de thé. L’instant du petit-déjeuner constitue pour les anglais un véritable moment de raffinement et de gourmandise ! La tasse de l’après-midi ou « Tea time » , célébré autour d’une table réservée à cet effet, s’accompagne également de différents mets, tous aussi succulents les uns que les autres : citons notamment les muffins, les scones, le « clotted
Dans chaque foyer la porcelaine à toujours eu une place de choix, elle est même un élément de décor et fait partie intégrante de la vie anglaise.
3. Crème fraîche épaisse obtenue en faisant chauffer de la crème de lait de vache et en la laissant reposer plusieurs heures.
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THÉ NOIR AU LAIT
UNE « CUP OF TEA » À L’ANGLAISE Quand on parle de thé et de lait, on pense d’abord au Royaume-Uni, où le très british « five o’clock tea » est une institution !
Du thé ? Oui, mais avec un nuage de lait
Les Anglais, avec leurs verts pâturages, vouent en effet une véritable passion au lait. Celui-ci adoucit le thé noir, corsé, que les Britanniques boivent en majorité. Le cérémonial du thé à l’anglaise impose généralement de verser en tout premier lieu le lait froid dans la tasse (on dit que cela protège la porcelaine de la chaleur du thé), puis d’ajouter le thé brûlant préalablement infusé et enfin le sucre. Pour respecter la tradition, il est de bon ton de proposer des mini-sandwichs, scones (petits pains ronds), muffins, cakes, clotted cream (sorte de crème fraîche très épaisse) et autres marmelades.
139 VAUXHALL WALK, LONDRES
TEA HOUSE THEATER Le Tea House Theatre se fond parfaitement dans le style géorgien des murs de briques à Londres. Vous pourrez y découvrir un large choix de thés, de marmelades et de confitures faites maison avec des ingrédients locaux, et des saveurs anglaises traditionnelles. Notez que ce salon se trouve dans un ancien pub, construit en 1886 à l’endroit où se trouvaient les jardins d’agrément de Vauxhall qui ont inspiré « La Foire aux vanités » dans le roman éponyme de Thackeray.
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PORTUGAL LES ORIGINES Le thé est importé par les portugais en Europe au XVI e siècle et débarque à São Miguel dans les années 1820. Le climat s’y prête, en effet le théier qui est un Camélia affectionne les climats humides et chauds avec un sol acide et argileux. São Miguel offre les conditions idéales. UN PAYS PIONNIER Au début du 17 e siècle, les commerçants Hollandais et Portugais furent les premiers à introduire le thé Chinois en Europe. Les Portugais l’expédièrent du port de Macao sur la côte Chinoise ; les Hollandais le ramenèrent en Europe via l’Indonésie. Le thé est arrivé au Portugal par voie maritime car les Portugais furent les premiers à se lancer dans l’exploration maritime. L’engouement des Européens, et plus particulièrement des Portugais, va encourager, dès la fin du XVIe siècle, la fondation de compagnies commerciales. The East India Company. Mais le thé ne trouva sa légitimité que sous l’influence de la reine d’Angleterre, Catherine de Bragance, princesse du
Portugal, dont le thé avait bercé son quotidien. Elle développa peu à peu une soif d’amour inébranlable pour ce breuvage. En 1662, lors de son mariage avec le roi Charles II d’Angleterre, Catherine fut contrainte de déménager en Grande-Bretagne. À son arrivée, la reine ne désirait qu’une chose : boire une bonne tasse de thé.
Cha Gorreana, La première plantation du Portugal
Le Lisbon Tea
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THÉ GORREANA thé vert des açores
UN ENGOUEMENT EUROPÉEN
« Léger, doux et agréable »
Depuis 1893, Gorreana Tea est un thé portugais produit sur l’île de São Miguel, aux Açores. Le thé vert Gorreana est le plus vieux thé d’Europe. La marque produit environ 40 tonnes par an dans cinq variétés, quatre noires (Orange Pekoe, Pekoe, Broken Leaf et Moinha) et une verte. C’est un Thé vert provenant de la seule plantation de thé européenne. En effet au 19e
siècle, ce sont les Portugais qui ont développé la culture de ce thé sur leurs îles, au coeur de l’océan Atlantique.
LISBON TEA LA QUALITÉ ASSURÉE
Les meilleurs thés des meilleures plantations
Lisbon Tea Co est une marque portugaise de thé. Elle vous propose de voyager et de découvrir les meilleurs thés issus des meilleures plantations du monde. Avec une vaste collection de thé soigneusement sélectionnés, Lisbon Tea Co. offre aux amateurs de thé une expérience unique.
thé vert des açores
thé noir parfumé au vin de porto, groseille et fleurs de grenade
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FRANCE LA PRODUCTION La consommation de thé en France a triplé au cours des 25 dernières années. Désormais, 2 Français sur 3 en consomment. Une manne pour nos entrepreneurs qui se disputent ce marché très lucratif. Avec 1. 000 milliards de tasses consommées c h a q ue a n n é e à t r a v e r s l e monde, le thé est la 2e boisson la plus consommée après l’eau. En France, si seuls quelques amateurs en dégustaient dans les années 80, les choses ont bien changé puisque 2 Français sur 3 en consomment aujourd’hui à raison de 230 g par an, loin derrière les Britanniques (2, 3 kg par an et par habitant). Un chiffre qui révèle néanmoins un changement dans les habitudes de consommation qui profite aux géants comme Lipton ou Twinings, mais aussi aux industriels français qui ont su séduire une nouvelle clientèle hexagonale en s’imposant aussi sur les marchés étrangers. Avec 15. 000 tonnes de thés importés par an, la France occupe le 30e
rang parmi les pays consommateurs. Pour autant, la moitié du thé consommé en France est produite par des entreprises tricolores. Ainsi, les réseaux spécialisés, comme le Palais des Thés, Mariage Frères, Betjeman & Barton ou Compagnie Coloniale, captent à eux seuls 20% des ventes en France et affichent une croissance de 10% par an.
Le thé est la 2e boisson la plus consommée après l’eau.
La Grande Mosquée, un salon de thé féerique
Dammann Frères, Le thé 100% français
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THÉ DAMMANN FRÈRES thé noir earl grey
saveurs multiples pétales de fleur écorce d’orange
« Le Paradis du thé » Damman Frères est une société française fondée en 1925 à Tamatave. D’abord spécialisée dans la fabrication et l’importation de thé, la marque s’ouvre désormais au
grand public et se présente comme la plus importante et la plus ancienne société française de thé. Longtemps connue des seuls spécialistes et confinée à la distribution auprès des détaillants et des grands noms de l’épicerie de luxe en France, tels que Fauchon et Hédiard, la société a lancé depuis 2005 sa propre gamme de thés de prestige et se lance dans l’exportation de ses produits.
TEERDRE S RR
SHTÉHSÉS DTE
34-34 34-35 TE
RUE GEOFFROY SAINT HILAIRE, 75005 PARIS
LA GRANDE MOSQUÉE En face du jardin des plantes, la Grande Mosquée de Paris et son minaret de 33 mètres nous offrent un havre de paix marocain en plein paris. Une douce odeur de tajine, couscous et grillades au déjeuner et de thé à la menthe, de corne de gazelle, de baklawa et de loukoums à la rose au goûter. Les odeurs de chichas à la pomme (seul parfum proposé) finissent d’embaumer les patios.
UN PEU D’HISTOIRE Construite entre 1922 et 1926, juste après la 1re Guerre Mondiale, la grande Mosquée de Paris est célèbre pour son architecture pittoresque de style hispano-mauresque.
L’idée d’un Institut Musulman de la Mosquée de Paris, est apparue dès 1849. Le 19 octobre 1922, le Maréchal Lyautey procédait à l’inauguration solennelle des travaux de ce qui allait devenir l’Institut Musulman de la Mosquée de Paris. C’est à des musulmans que fut confié le soin de donner le premier coup de pioche et de poser la pierre symbolique du Mihrab4 de la salle de prière. Ce geste symbolique allait s’effectuer dans un enthousiasme et une ferveur indicibles, en présence des plus éminentes personnalités françaises et musulmanes venues du Maghreb, d’Afrique, d’Orient, de Turquie, d’Egypte, de Perse, d’Afghanistan et même d’Azerbaïdjan… Ce fut un enthousiasme, car ce lieu symbolique allait concrétiser le lien et l’amitié traditionnels entre la France et l’Islam ; ferveur, surtout du fait qu’il marquait la reconnaissance de la France pour les milliers de musulmans venus de toute part et tombés sur les champs de bataille de la Grande guerre.
4. Niche qui indique la qibla, c’est-à-dire la direction de la kaaba à La Mecque vers où se tournent les musulmans pendant la prière. Il est souvent au milieu du mur de la qibla.
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RUSSIE LES ORIGINES L’ARRIVÉE DU THÉ EN RUSSIE On retrouve des traces du thé en Russie dès 1567 quand Petrov et Yalychev, deux Cosaques, en parlent comme d’un breuvage chinois merveilleux. Cependant, il faut attendre le XVII e siècle pour que le thé soit véritablement introduit en Russie : en 1618, des émissaires chinois en offrent au tsar Alexis et à sa cour. En 1638, c’est au tour de l’ambassadeur Vassili Starkov de rapporter au tsar Michel Federovitch près de 64 kilos de thé, offerts par un prince mongol. Ce nouveau breuvage plaît tant qu’en 1689 Pierre le Grand signe un accord avec l’Empereur chinois : désormais, ils échangeront grâce à la Route de la Soie fourrures russes contre briques de thé chinois. Les caravanes, traversant la Mongolie et la Sibérie pour rallier Moscou, comportent jusqu’à 300 chameaux, chargé chacun de près de 200 kilos de thé ! Le voyage dure une quinzaine de mois et fait du thé une denrée rare et précieuse que l’on ne trouve que à certaines foires, comme celles de Nijni-Novgorod
(actuelle Gorki) et dans les grandes villes, tel Moscou. Les Moscovites sont d’ailleurs si férus de thé que le reste du pays les surnomme « les buveurs d’eau chaude » ! C’est la mise en service du Transsibérien en 1903 qui raccourcira ce voyage à une semaine, signant l’arrêt des caravanes. Ce même Transsibérien dans lequel un samovar est, encore aujourd’hui, à disposition.
On les surnomme : « Les buveurs d’eau chaude »
Le thé des Tsars, Ou thé impérial
Samovar russe, Au coeur des cérémonies du thé
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CÉRÉMONIE RUSSE BOIRE LE THÉ EN RUSSIE Les Russes adoucissent leur thé avec du sucre, du miel ou une cuillerée de confiture de fruits. La confiture de framboise en particulier protégerait des refroidissements ! Contre l’indigestion, c’est un soupçon de vin rouge dans votre tasse qui vous remettra sur pied. Les Russes n’ajoutent pas de lait au thé, mais parfois avec un peu de crème. La tradition est de placer un morceau de sucre entre ses dents et d’aspirer le thé au travers. En automne, on agrémente son thé de petits dés de pomme à repêcher à la cuillère avant de boire ! Les nobles buvaient leur thé avec du citron et les cuisinières avec des pommes. Les Russes plongent également volontiers dans leur verre une rondelle ou un zeste de citron, d’où le thé
Un pourboire se dit « na tchai » qui signifie « pour le thé »
aux agrumes rendu populaire en Angleterre par la reine Victoria, qui aurait pris cette habitude lors d’une visite à sa fille à la cour de Russie. En France, c’est en 1950 que Jean Jumeau-Lafond, de la marque Dammann Frères, souhaitant concurrencer le Earl Grey britannique, crée un mélange de thé noir et d’agrumes qu’il baptise « Goût Russe Douchka » en l’honneur de sa femme, russe. Le thé est consommé tout au long de la journée, ainsi qu’avec le repas principal, pris en fin d’après-midi. Lorsqu’il est bu en-dehors des repas, il est accompagné de douceurs, de fruits secs et de fruits. Pâtisseries et thé sont indissociables en Russie, au point que le samovar porte souvent un collier de souchki, des petits biscuits en forme d’anneaux ! Pirogi aux pommes ou vareniki au fromage blanc accompagnent également la dégustation. Si l’on a convié des amis, on leur proposera en plus des zakouski, des sandwichs au fromage, au saucisson et au poisson.
LA CÉRÉMONIE Le samovar5, à la fois bouilloire et thermos, coiffé d’une théière de porcelaine, tscheïnik, et que viennent compléter des tasses en porcelaine ou des verres dans leur support en argent, podstakannik. Le thé est consommé dans la pièce à vivre de la maison, salon ou cuisine, dans laquelle trône le samovar. Dans les familles aristocratiques, thé et tabac sont associés aux plaisirs feutrés du salon ou du boudoir, comme reflété dans cet extrait de Anna Karénine de Tolstoï dans lequel Anna et la princesse Tverskoï discutent : « Les deux femmes eurent le cosy chat qu’avait promis la princesse Tverskoï, tandis qu’elles prenaient le thé qu’on leur servit sur un guéridon, dans le petit salon frais. Sans regarder son amie, elle versa avec soin le thé parfumé dans les tasses transparentes. Après avoir tendu une tasse à Anna, elle prit une cigarette à papier de maïs, l’introduisit dans un fume-cigarette d’argent et l’alluma. »
être est-ce cette habitude de boire du thé très concentré qui a donné naissance au proverbe : « Le thé n’est pas la vodka, impossible d’en boire beaucoup. » Dans son Grand Dictionnaire de cuisine, Alexandre Dumas raconte que les premières tasses à thé furent élaborées à Cronstadt (à l’ouest de Saint-Pétersbourg) et que le fond des tasses représentait une vue de la ville. Plutôt que de faire un thé fort qui aurait caché la vue, un marchand eut l’ixdée de remplacer la tasse par un verre, sans image. Légende peut-être, mais il est vrai que le thé se buvait aussi dans des verres, enchâssés dans un support à anses.
ANECDOTE Le thé imprègne tant la culture, y compris populaire, que le pourboire est désigné par l’expression « na tchai, » qui signifie littéralement « pour le thé ». N’ayant pas accès à l’alcool ou aux drogues, les prisonniers russes ont pris pour habitude de boire un thé noir très concentré, le tchifir, si concentré qu’il en a un léger effet psychotrope ! Peut-
Thé russe aux agrumes
5. Ustensile domestique qui est utilisé pour faire bouillir l’eau du thé en Russie, en Iran, en Turquie, en Azerbaidjan ainsi qu’en Inde et dans quelques autres pays eurasiatiques. .
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THÉ DES TSARS THÉ NOIR
7 AGRUMES
Un thé subtil et rond en bouche, à l’odeur forte et fraîche. Le traditionnel goût russe se compose de 7 agrumes associés à un thé noir de chine alliant force et rondeur. D’une incomparable richesse, ce thé superbe à la saveur presque sucrée a été par fumé avec le plus grand soin avec du citron, orange, mandarine, lime, orange sanguine, bergamote, pamplemousse. Le thé est consommé tout au long de la journée, ainsi qu’avec le repas principal, pris en fin d’après-midi.
Lorsqu’il est bu en-dehors des repas, il est accompagné de douceurs, de fruits secs et de fruits. Pâtisseries et thé sont indissociables en Russie, au point que le samovar porte souvent un collier de souchki, des petits biscuits en forme d’anneaux ! Pirogi aux pommes ou vareniki au fromage blanc accompagnent également la dégustation. Si l’on a convié des amis, on leur proposera en plus des zakouski, des sandwichs au fromage, au saucisson et au poisson. Pour servir le thé, on utilise le fameux samovar, à la fois bouilloire et thermos, coiffé d’une théière de porcelaine, tscheïnik, et que viennent compléter des tasses en porcelaine ou des verres dans leur support en argent, podstakannik.
Le thé impérial
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VOYAGE ASIE À LA DÉCOUVERTE DE L’ORIENT
Les légendes asiatiques On peut retracer l’origine du thé en Asie grâce à de nombreuses légendes ayant traversées les pays. La première raconte que le thé serait apparu en l’an 2737 avant notre ère, quand des feuilles se seraient détachées d’un arbre pour tomber dans l’eau chaude de l’Empereur Chen Nung. Une seconde version romanesque apparut au Ve siècle. C’est la venue d’un moine indien Bodhidharma, l’introducteur du bouddhisme Chan, qui arrive en Chine en 520. Ce dernier se serait endormi après 9 ans de méditation ininterrompue ; alors qu’il avait fait le vœu de ne plus jamais dormir et de s’abstenir de tout désir, le sommeil le surprit. À son réveil, l’immensité de sa faiblesse le plongea dans le désespoir et pour se punir
il se coupa les paupières, celles-ci t o m b è re n t a u s o l . P e u a p r è s , s e s paupières auraient donné naissance à une plante appelée « Cha » dont les feuilles ressemblent à des paupières sorties de la terre et donna aux croyants le moyen de rester éveillés. Les historiens pensent que la culture du thé a débuté en Chine, dans les régions du Sichuan et d unnan. Au cours de son histoire, le thé sera consommé de façons différentes selon trois périodes : L’âge de thé bouilli, L’âge de thé battu, L’âge de thé infusé. Des récipients à thé datant de l ynastie Han (de -206 à 220) ont été retrouvés, mais c›est sous la dynastie de ang (618 - 907) que le thé a été clairement identifié comme la boisson populaire. Le développement de la porcelaine de Chine et de celui de la céramique auront clairement été favorisés par l’art de vivre autour du thé.
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CHINE LES ORIGINES Selon la légende, c’est en 2737 avant notre ère que l’Empereur Shen Nong découvre le thé. Empereur mythique ayant enseigné l’agriculture et la médecine aux Chinois, il est connu pour essayer sur lui-même l’effet des plantes afin d’en découvrir les vertus. Un beau jour, il s’installe à l’ombre d’un bosquet pour se reposer. L’empereur ne buvant que de l’eau bouillie par souci d’hygiène, son serviteur s’affaire pour allumer un feu sur lequel faire chauffer de l’eau. Portées par le vent, quelques feuilles tombent dans la mar mite. Lorsque l’empereur sirote cette infusion, il se sent submergé de bien-être…C’est ainsi que le « Divin Moissonneur » transmet le thé en tant que plante médicinale aux Chinois. Au fur et à mesure des siècles, le thé se répand dans tout l’Empire. Il traverse et évolue à travers les différentes dynasties : la dynastie Tang, Lu Hu, Song ainsi que la dynastie Ming. Suite à la Révolution Culturelle lancée par Mao en 1966, les maisons de thé, symboles de l’Empire, sont fermées. Le thé demeure cependant une boisson populaire bue par tous et, de nos jours, les maisons de thé fleurissent à nouveau
dans les grandes villes chinoises. La production du thé fait en Chine l’objet d’une véritable recherche, scientifique comme gustative, comme peut l’être celle du vin en France. Produit à haute valeur ajoutée, le thé porte également toute une vision culturelle, notamment au travers des arts qui l’entourent, comme celui de la porcelaine.
Gong Fu Cha, La cérémonie du thé
Thé Gaiwan
Thé Jasmin
Salon de thé, Hangzhou
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GONG FU CHA Gong Fu Cha est connue comme la plus célèbre cérémonie du thé en Chine. Elle est étroitement liée avec le thé oolong semi-fermenté, nommé « Dragon noir » en Chine. LÉGENDE Une légende raconte l’histoire de sa création : le propriétaire d’une plantation de thé parcouraient son champ et a été terrifié devant le spectacle d’un serpent noir de la taille d’un dragon. Il céda la place à la bête et ne revint á ses plantes que plusieurs jours plus tard. Pendant ce temps, le soleil avait oxydé les feuilles des théiers et apporté un tout nouveau goût très aromatique. Le cultivateur remercia le « Dragon Noir » qui lui avait fait si peur. En Chine, la cérémonie du thé est un des symboles de statut, telles que la richesse et la connaissance
C’est ce qu’on appelle la perfusion de « longue amitié »
culturelle. La théière est rempli d’un tiers avec les feuilles de Oolong que l’on recouvre d’eau chaude. Cette infusion est appelée « Infusion de bonne odeur » et est utilisée uniquement pour l’ouverture des feuilles et atténuer l’amertume des infusions suivantes. Elle est immédiatement jetée et non consommée. Le maitre de cérémonie verse une seconde fois de l’eau chaude dans la théière. Le thé n’infuse alors que de 10 à 30 secondes pour une « infusion de bon goût » , sinon il serait trop amer. Le Maître du thé sert les invités un à un afin que chacun reçoive la même qualité d’infusion. Ainsi, les mêmes feuilles de thé sont jusqu’à 15 fois réinfusées. C’est ce qu’on appelle la perfusion de « longue amitié », où chaque infusion a un goût différente. La cérémonie de thé a une grande importance sociale en Chine, elle joue un rôle important, dans les engagements et des mariages.
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THÉ JASMIN UNE TRADITION ANCESTRALE Créé sous la dynastie des Song (960-1279), le thé au jasmin est le plus ancien et le plus répandu de tous les thés parfumés. Il est considéré comme l’un des grands thés mythiques. En Chine, les feuilles de thé vert sont traditionnellement mélangées aux
« La sagesse de tout l’univers se trouve dans une tasse de thé » fleurs de jasmin fraîchement cueillies, afin d’offrir des notes délicieuses et un parfum envoûtant. Le jasmin, fleur la plus populaire en Chine, symbolisant l’amour et le romantisme, est couramment utilisée afin de parfumer naturellement de nombreux thés verts.
fleur de jasmin
thé vert
THÉ GAIWAN Une dégustation peu commune
Le gaiwan, littéralement « bol à couvercle » apparaît pendant la Dynastie Ming (1368 – 1644), qui voit le thé et ses rituels être codifiés.
Il est également couramment appelé zhong, déformation du verbe chong qui signifie « verser de l’eau » . Symboliquement, son couvercle représente le ciel, son bol l’eau et sa soucoupe la terre. Le gaiwan, dont la porcelaine fine retient moins la chaleur, remplace la théière
lors du Gong Fu Cha pour la dégustation des thés jaunes, verts et blancs, plus fragiles. Il est cependant plus couramment utilisé à la fois comme théière et tasse lors d’une consommation individuelle. Il est le récipient le plus utilisé en Chine, aussi bien dans le foyer que dans les maisons de thé.
thé vert, blanc, jaune
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IVY TEA HOUSE La cité d’Hangzhou possède un riche patrimoine architectural où la tradition des salons de thé est bien présente et tournée vers l’art. Musiciens, peintres, calligraphes et philosophes aiment se retrouver dans les salons de thé de la ville qui se transforment pour l’occasion en salle de spectacle. Beaucoup de maisons de thé de Hangzhou se trouvent à proximité d’un cours d’eau ou d'un temple où le bruit de l’écoulement de l’eau, le tintement des cloches ou le parfum de l’encens encourage à la méditation.
UN PEU D’HISTOIRE La basse vallée du Yangze, dans la province du Zhejiang, est l’un des berceaux culturels et architecturaux de la Chine.
La région est célèbre pour son thé vert « Long Jing ou puits du dragon » . Hangzhou, la capitale, a été la ville la plus peuplée du monde du 12 e au 14 e siècle. La plupart des établissements possèdent une petite échoppe attenante où l’on trouve des produits artisanaux et décoratifs : calligraphies, peintures chinoises, sculptures, éventails qui sont produits sur place. Les coutumes et les traditions étant particulièrement bien ancrées, les rafraîchissements type « soda » et les « snacks » sont rarement servis dans les maisons de thé. Beaucoup de maisons de thé de Hangzhou proposent également des espaces calmes dans un cadre propice à la lecture et au repos.
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JAPON LES ORIGINES Le thé, en tant que boisson, fut introduit au Japon au IX e siècle par un moine bouddhiste venu de Chine, où selon la légende le thé était déjà connu depuis plusieurs milliers d’années. Le thé devint rapidement populaire au Japon et commença à être cultivé localement. De passage au Japon, impossible de ne pas goûter au délicieux Sencha, un thé vert de montagne que les Japonais cultivent depuis des siècles et affectionnent particulièrement, au Gyokuro ou au thé Matcha UNE DIMENSION CULTURELLE Au Japon, le thé a une véritable dimension culturelle, à tel point qu’il existe des cérémonies extrêmement codifiées pour boire la tasse. Le rituel du « Cha No Yu » invite l’homme à se purifier en s’unissant à la nature puis, viendra le « Goza iri » , le moment tant attendu de la cérémonie où une série de thés sera à déguster dans les règles de l’art. Il faut attendre le IX e siècle pour que les premiers théiers soient cultivés, et 1202 pour qu’ils soient plantés dans la
province d’Uji6, actuellement réputée pour produire les meilleurs thés verts du Japon. Plus tard, le célèbre prêtre zen Sen-no Rikyu (1522-1591) codifie les rapports entre le thé, le bouddhisme et les différentes écoles de thé, donnant ainsi naissance à la forme la plus accomplie du Cha No Yu.
6. Capitale japonaise du thé vert, Couverte de forêts sur lesquelles s’accroche la brume, les collines accidentées offrent des décors d’estampes centenaires
Les Chachitsu, Lieu de cérémonie
Thé Gyokuro Le thé le plus cher du monde
Thé Matcha
Chanoyu, La cérémonie japonaise
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CHANOYU Le service japonais du thé est un art traditionnel inspiré en partie par le bouddhisme zen, dans lequel le thé vert en poudre, ou matcha, est préparé de manière codifiée et servi à un petit groupe d’invités dans un cadre calme. Du fait qu’un praticien d’hanoyu doit être familier avec la production et les différents types de thés, avec le kimono, la calligraphie, les arrangements floraux, les céramiques, l’encens, et un large ensemble d’autres disciplines et arts traditionnels en plus des pratiques du thé enseignées dans son école, l’étude de la cérémonie du thé prend de nombreuses années de fait toute une vie. Même pour participer en tant qu’invité dans une cérémonie du thé formelle, une connaissance des arts est requise, incluant les gestes recommandés, les phrases à dire par les invités, la bonne manière pour boire le thé et la
C’est ce qu’on appelle la perfusion de « longue amitié » tenue générale à adopter dans la salle où est servi le thé. Le thé, en tant que boisson, fut introduit au Japon au X e siècle par un moine bouddhiste venu de Chine, où selon la légende le thé était déjà connu depuis plusieurs milliers d’années. Le thé devint rapidement populaire au Japon et commença à être cultivé localement. LE PLAISIR DE BOIRE DU THÉ La coutume de boire du thé, d’abord pour la médecine, et ensuite purement par plaisir, fut aussi largement répandue à travers la Chine, son pays d’origine. Au début du Xe siècle, l’auteur chinois Lu Fu a écrit Le Classique du thé, un traité sur le thé s’attachant tout particulièrement à sa culture et à sa préparation. La vie de Lu Yu fut fortement influencée par le bouddhisme, et particulièrement par l’école qui sera connue plus tard sous le nom de Zen, et ses idées vont avoir une forte influence sur le développement de
la cérémonie du thé au Japon. Alors que précédemment, le thé, compressé, était bouilli dans du lait et assorti d’épices et de sel (façon de procéder qui s’est conservée au Tibet et en Mongolie), une nouvelle forme de thé, le matcha, apparaît au cours du IIe siècle. Il s’agit d’un thé vert dont les feuilles sont réduites en poudre : on l’émulsionne en petite quantité dans une quantité plus importante d’eau (thé léger fait à partir de feuilles venant de plants jeunes) ou on le malaxe en quantité plus importante dans une quantité moindre d’eau (thé fort ou épais fait à partir de feuilles venant de plants plus anciens). C’est la même plante dont dérivera ultérieurement le thé vert infusé, puis le thé noir (oxydé ou fermenté). LE MATCHA Il fut utilisé tout d’abord dans les rituels religieux des monastères bouddhistes, avec notamment pour but de les maintenir éveillés pendant les séances de méditation. Au cours du IIIe siècle, les guerrier amoura commencèrent à préparer et à boire le Matcha. Il s’agissait pour eux de pratiquer un art qui, par sa nouveauté, ne les disqualifierait pas auprès de la noblesse de cour, rompue à tous les autres arts ; en outre, ses origines chinoises lui conféraient d’emblée
un prestige inégalable. Les fondations d’ hanoyu étaient alors posées. LE WABI À la pratique relativement exubérante des guerriers, la bourgeoisie opposa l’esthétique du wabi. Ce raffinement sobre et calme est caractérisé par l’humilité, la contrainte, la simplicité, le naturalisme, la profondeur, et surtout l’imper fection et l’asymétrie. Il met notamment en valeur la simplicité à travers des objets non ornés (voire grossiers au regard des critères esthétiques prévalant jusqu’alors), des espaces architecturaux et la célébration de la beauté que le temps et l’attention donnent aux matériaux. En effet, la bourgeoisie était alors sous le coup de lois somptuaires qui l’empêchaient d’acquérir et encore moins d’exhiber les précieux ustensiles chinois utilisés par les guerriers c’est alors que s’est développée une mise en avant des objets de la vie quotidienne, et notamment de poteries d’origine coréenne, dans le cadre d’hanoyu.
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THÉ MATCHA poudre de matcha
UN THÉ EN TOUTE CÉRÉMONIE Le matcha est un thé vert en poudre japonais, issu des feuilles de Tancha broyées dans une meule. C’est un thé nourrissant et stimulant pour le corps et l’esprit, utilisé dans la méditation zen. Le matcha se déguste depuis des siècles, comme dans le cha no yu, le plus souvent fouetté dans un grand bol. Il est utilisé dans la cérémonie du thé, pour ses vertus à la fois apaisantes et vivifiantes, en harmonie avec le bouddhisme zen. Le matcha est souvent bu lors de la méditation, pour garder tous ses sens en éveil, tout en relâchant son corps. Le matcha se décline aujourd’hui dans toutes les recettes aussi bien sucrées que salées. On ne compte plus les matcha-latte, les muffins au matcha, les barres énergétiques, les glaces, les smoothies, les burgers … ou encore les fondants au matcha.
« Une réunion de thé est une communion de sentiments quand de bons amis se retrouvent au meilleur moment dans les meilleures conditions »
THÉ GYOKURO UN THÉ D’OMBRE BÉNÉFIQUE POUR LA SANTÉ Ce nom provient de la forme des feuilles de thé qui anciennement était transformées de sorte qu’elles ressemblaient à des gouttes de rosée. Le Gyokuro Hikari, ou « Perle de rosée », est l’un des meilleurs thés verts Gyokuro, en provenance de la région d’Uji. On découvre avec ce thé un goût vif et frais, une délicatesse et une rondeur remarquables, fruits d’un raffinement et d’un luxe de soins dont seuls sont capables les Japonais. Pour ce thé d’exception, les bourgeons les plus tendres ont été sélectionnés à la main, ce qui est très rare au Japon, puis roulés très finement un par un. Autre particularité : trois semaines avant la cueillette, les planteurs recouvrent les théiers pour filtrer la lumière, ce qui permet aux feuilles de produire plus de chlorophyle. Cette technique procure au thé une saveur unique et une très agréable texture douce et moelleuse.
« Ronde goutte de rosée »
thé vert d’uji
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INDE LES ORIGINES Contrairement à la Chine, l’Inde n’a découvert le thé que relativement récemment, au début du XIXe siècle. L’aventure du thé en Inde commence en 1834, lorsque la fameuse East India Company, entreprise fondée par la Reine d’Angleterre Elizabeth Ière en 1600, perd le monopole sur les importations de thé chinois. Les Britanniques cherchent donc à développer leur propre production de thé dans leurs colonies indiennes. Ils repèrent une variété indigène de théier, qui pousse dans la région d’Assam7. Les premiers essais pour produire du thé en grande quantité sont cependant un échec : les Anglais se rendent compte qu’ils vont avoir besoin des connaissances techniques et de l’expérience des Chinois concernant la culture du thé. C’est donc après une mission d’espionnage poussée que l’Écossais Robert Fortune revient de Chine avec 20 000 pieds de théiers et près de 100 ouvriers chinois qualifiés. Il choisit la région autour de la ville de Darjeeling, sur les contreforts de l’Himalaya, pour y planter les premiers jardins de thé. Cependant, ce n’est pas
parce que le thé pousse désormais en Inde que les Indiens l’adoptent immédiatement ! Pendant longtemps, le thé reste un produit d’exportation, destiné à l’Europe et à l’Amérique. Ce n’est que dans les années 1920, sous les efforts publicitaires combinés des compagnies de thé et du Ministère du Commerce et de l’Industrie, que la consommation du thé se démocratise, en particulier dans la population ouvrière.
Thé Darjeeling
Thé Chai
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THÉ CHAÏ thé noir
cardamome clou de girofle UN THÉ RICHE DE SECRET Le Chai (prononcé « tchaï « ) est un délicieux mélange de thé noir et d’épices (cardamome et clou de girofle). Il est consommé quotidiennement par la majorité des Indiens qui le font infuser dans du lait entier bouillant avec du sucre. Les Chaiwallahs ou marchands de thé ambulants sont omniprésents dans les rues et dans les trains de toute l’Inde. Traditionnellement, le chaï est fait avec du thé noir produit en Inde avec la méthode CTC et contient au moins de la cannelle, du clou de girofle, de la cardamome et de sucre. Viennent souvent s’ajouter à ces épices du poivre, du gingembre, de l’anis… Cela dépend des régions et de la recette secrète du chaiwallah ou de l’hôte de maison.
Chaï signifie thé en hindi
THÉ DARJEELING UN RAFFINEMENT INÉDIT Le thé de Darjeeling, qui signifie en Tibétain « Terre des Foudres » , est le thé indien le plus raffiné, considéré comme le plus noble et le plus précieux, le « roi des thés noirs » . Il y a 87 jardins de Darjeeling qui se situent entre 1000 et 2134 mètres d’altitude, sur les versants sud de l’immense Himalaya, entre Bhoutan, Népal et Sikkim. Les Darjeeling sont des thés d’altitude, cultivés dans les plantations situées entre 400 et 2500 mètres d’altitude sur les contreforts de l’Himalaya, aux environs de Darjeeling, une ville relativement importante, réputée pour la fraîcheur et la pureté de son climat. Le premier jardin fut créé en 1856 par les Anglais : Tukvar devenu depuis Puttabong et North Tukvar. La qualité des thés obtenus et le succès qu’ils remportèrent incita à créer rapidement d’autres jardins.
Le « champagne » du thé
thé noir
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SRI LANKA LES ORIGINES En 1972, l’île de Ceylan prend le nom de Sri Lanka, mais cette appellation, datant de l’Empire britannique, est restée en usage dans l’univers du thé et il est fréquent de parler d’un Ceylan pour désigner un thé de ce pays. INTRODUCTION Introduit par les Anglais en 1857, le théier ne s’y développe vraiment qu’après 1870 : c’est effectivement à la destruction totale des plantations de caféiers, qui recouvraient toute l’île, par un parasite en 1869, que l’on doit l’essor de la culture du thé au Sri Lanka. Les thés du Sri Lanka proviennent de six régions de production, situées au sud de l’île, et poussent à des altitudes allant du niveau de la mer jusqu’à 2500 mètres. LA CULTURE Les périodes de cueillette varient d’une région à l’autre, selon le passage de la mousson dans l’année. On reconnaît un thé du Sri Lanka à sa superbe couleur cuivrée et à son parfum vif et piquant. Quant à son goût, il est sensiblement
différent d’une région à l’autre, les thés d’altitude étant bien souvent les meilleurs. Comme en Inde, la culture du thé est organisée en jardins, dont le nom est précisé chaque fois que le thé provient exclusivement de l’un d’entre eux, sans avoir été mélangé avec d’autres thés. Les thés du Sri Lanka, parfois appelés thés de Ceylan, sont connus et reconnus dans le monde entier.
Thé de Ceylan
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THÉ DE CEYLAN thé blanc, champignons, bois humide thé noir corsé et riche en arômes thé noir brisé, astringent et fruité
Le thé de Ceylan, cultivé au Sri Lanka, devient de plus en plus célèbre dans le monde entier. Son goût fort et caractéristique le différencie des autres types de thé. Le goût dépend de l´altitude où le théier est cultivé. Pekoe ou Dilmah, le thé de Ceylan possède toutes les vertus d´un bon thé. Des études ont montré que son pouvoir oxydant est supérieur à celui des autres thés. Le thé de Ceylan désignait, au début, le thé noir provenant du Ceylan qui est une ancienne
appellation du Sri Lanka que nous connaissons actuellement. De nos jours, le thé de Ceylan désigne toutes sortes de thé cultivé dans ce pays : thé blanc, thé vert ou thé noir. Principale culture du Sri Lanka au 19è siècle, le théier connut un grand succès et sa renommée a dépassé les frontières de ce pays au fil des années. Le thé de Ceylan possède toutes les vertus d´un bon thé. A la différence des thés ordinaires, le thé de Ceylan est caractérisé par un arôme unique et un goût excellent. Ce qui lui permet d´être qualifié de meilleur thé au monde. Se distinguant également par son pouvoir oxydant très élevé, le thé de Ceylan possède des vertus médicinales importantes.
Un thé souverain
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VOYAGE MOYENT-ORIENT À LA DÉCOUVERTE DU MONDE ARABE
Sur la Route de la Soie Le thé conquiert le Moyen-Orient au rythme des caravanes, et ce dès le début de notre ère. La Route de la Soie relie la Chine à l’Empire romain à travers un réseau complexe de routes terrestres ouvertes dès -2000 avant Jésus Christ traversée par des nomades à cheval, les seuls à oser voyager entre les différentes populations sédentaires. Le thé fait alors partie des nombreuses denrées précieuses échangées le long de cette route commerciale, avec la soie, la porcelaine, les épices ou encore les métaux et pierres précieuses. Ainsi, on retrouve la trace de ces étranges feuilles séchées au IXe siècle dans les écrits d’un commerçant arabe nommé Süleyman, qui décrit le thé comme « une herbe qui a plus de 8. Marque l’apogée de l’expansion musulmane en Inde.
feuilles que le trèfle, un peu plus de parfum aussi, mais est fort amère. On fait bouillir de l’eau que l’on verse dessus. » Adopté d’abord par les caravaniers, dont les caravanes de yacks, chameaux et chevaux s’acheminent lentement, le breuvage issu de ces feuilles rentre petit à petit dans les usages des populations locales, de la Perse d’alors jusqu’en Égypte, butant seulement sur le désert du Sahara à l’est. Lorsque l’effondrement de l’Empire moghol8 au XIVe siècle précipite la fin de la Route de la Soie, supplantée également par les routes maritimes plus rapides, le thé est suffisamment entré dans les usages des populations locales pour qu’elles continuent à se fournir en thé auprès de l’Inde, de la Chine ou encore du SriLanka. Aujourd’hui, chaque région a développé ses propres rituels et recettes autour du thé.
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MAROC LES ORIGINES C’est au XVIIe siècle, pendant le règne du Sultan Moulay Ismaïl, que le thé fait son entrée au Maroc. Les ambassadeurs anglais en offrent en cadeau à la Cour. C’est alors une boisson rare, réservée au Sultan et aux notables. Cependant, en 1854, les Britanniques voient leurs exportations de thé dans les pays slaves interrompues par la Guerre de Crimée. À la recherche de nouveaux débouchés pour leurs plantations de thé en Inde, ils se tournent alors vers le Maroc, très accessible depuis Gibraltar. Dès lors, le thé s’insère dans la vie quotidienne de toutes les couches de la population, d’autant que les Marocains consommaient déjà des infusions d’herbes aromatiques. UNE ENTRÉE REMARQUÉE L’arrivée du thé fut tout de suite bien accueillie car elle comblait un vide réel : il remplaça les tisanes de plantes, le vin interdit par la religion, et le café, trop cher et peu répandu. Le mariage entre le thé, la menthe verte, le sucre et la théière allait faire le bonheur des gens et la fortune des marchands : en
l’espace d’un demi-siècle, la nouvelle boisson avait gagné tout le Maroc et le Sahara. Longtemps entièrement importé d’Asie, il est depuis quelques années cultivé localement. Au Maroc, la plaine du Loukkos produit aujourd’hui 10% de la consommation nationale. De son côté, la production de menthe verte (Mentha viridis, M. crispa, M. Crispata, M. villosa, na’na’), dont il existe au Maghreb de véritables crus (menthe de Tiznit, menthe de Meknès, etc.) a connu la même évolution.
Les trois thés touareg La cérémonie du thé
Thé à la menthe
Gunpowder
Dégustation de thé au souk
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LES 3 THÉS La consommation du thé arrive au Sahara depuis le Maroc à la fin du XIXe siècle. Les Touaregs, populations nomades qui parcourent le désert, s’emparent alors de la tradition marocaine et en font leur rituel propre, symbole de convivialité et d’accueil. Le chef de famille est celui qui se charge de préparer le thé. Le thé consommé est un thé vert Gunpowder, importé de Chine. Le rituel se déroule devant les invités. Grâce aux populations nomades berbères, le thé vert fit très rapidement partie des trois boissons essentielles à la vie dans le désert. Aujourd’hui, le tiers des dépenses alimentaires d’une famille du Maghreb passe dans le thé vert et le sucre. C’est dire l’importance de cette tradition dans cette région du monde ! Le thé consommé est le plus souvent du thé vert Gunpowder, importé de Chine.
UN SAVOIR-FAIRE PARTICULIER Les Touaregs ont fait de la dégustation de ce thé un véritable art, un rituel appelé « la cérémonie des trois thés » . Le thé est versé dans des verres et non dans des tasses, bu très chaud, par petites gorgées. Ils y ajoutent parfois de la menthe, du gingembre ou encore des plantes locales. Le cérémonial du thé est une preuve d’hospitalité aux visiteurs de passage, un prétexte pour discuter, échanger et rire. Comme le déclare un proverbe arabe : « L’eau c’est la vie, le lait la survie, le thé la boisson nationale »
« Le premier thé est âpre comme la vie, le second est fort comme l’amour et le troisième est suave comme la mort. »
THÉ À LA MENTHE thé vert
menthe
UNE RÈGLE DE SAVOIR-VIVRE Au Maroc, le parfum saisissant de la menthe est presque omniprésent. Rien de tel qu’un thé à la menthe pour être transporté, l’espace d’un instant, au pays du soleil couchant. Le thé à la menthe est une boisson chaude réalisée à partir de feuilles de thé et de feuilles originaires du Maroc. La consommation du thé à la menthe s’est étendue à l’Afrique subsaharienne, à la France et à l’Afrique de l’Ouest du fait de la colonisation et des flux de population. Le thé à la menthe est traditionnellement consommé tout au long de la journée. On prête au breuvage un grand nombre de vertus, notamment toniques et digestives. Il est plus particulièrement la boisson de l’hospitalité. À la différence de la cuisine, faite par les femmes, le thé est traditionnellement une affaire d’homme : préparé par le chef de famille, il est servi à l’invité et ne se refuse pas. Depuis, offrir du thé à la menthe fait partie des règles de savoirvivre, non seulement au Maroc, mais aussi dans d’autres pays du Maghreb.
Un véritable rituel
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THÉ GUNPOWDER THÉ VERT
LE THÉ VERT TRADITIONNEL Le Gunpowder, littéralement « Poudre à canon », est un thé vert de Chine qui est roulé en petites perles. Vif et astringent, frais et désaltérant, il est le thé le plus utilisé pour préparer le célèbre thé à la menthe. C’est au Maroc et dans de nombreux pays arabes, qu’offrir du thé à la menthe fait partie des règles de savoir-vivre et correspond à l’expression la plus raffinée de l’hospitalité. Pour une expérience authentique, le Gunpowder se déguste avec des feuilles de menthe fraîche et du sucre, ajoutées au moment de l’infusion. Les services successifs donnent des verres de plus en plus sucrés et astringents. Au moment de servir, il est de coutume de lever bien haut la théière au dessus du verre, ce qui permet à l’eau chaude de s’oxygéner et de donner un thé mousseux et plus fort en arômes.
« 1 cuillerée à soupe de thé pour 50 cl d’eau, un petit bouquet de menthe fraîche et quelques morceaux de sucre. Dépaysant. »
SOUK DE MARRAKECH
LE SOUK Véritable art de vivre, le thé au Maroc est un prélude à toute conversation ! Que vous discutiez le prix d’un article au souk ou que vous rendiez visite à un ami, on vous en proposera donc partout, à toute heure de la journée. Dans les ruelles, les venelles, les escaliers et les culs de sac, vous trouverez toujours des marchands pour vous offrir un thé, symbole de charme et d’hospitalité. Le souk est un lieu extrêmement important dans la vie marocaine, on peut en voir dans toutes les villes du royaume. Le souk permet biensûr d’acheter des produits tels que des tapis, des bijoux, de la vaisselle, mais c’est également un lieu important des relations sociales.
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ÉGYPTE LES ORIGINES Le thé est la boisson nationale en Égypte, et occupe une position que même le café ne peut pas rivaliser. En Égypte, le thé est appelé « shai » . Les thé vendus en Égypte sont presque exclusivement importés du Kenya et du Sri Lanka. Le gouvernement Égyptien estime que le thé est une culture stratégique et possède de grandes plantations au Kenya. Le thé vert est arrivée récemment en l’Égypte (seulement à la fin des années 1990) et n’est pas aussi populaire que le thé noir. DEUX TYPES DE THÉ Les thés égyptiens se déclinent en deux variétés : le koshary et le saiidi. Le thé koshary est populaire dans la BasseÉgypte (au nord) ; il est préparé selon la méthode traditionnelle de trempage dans de l’eau bouillante et laissé infusé durant quelques minutes. Il est presque toujours édulcorés avec du sucre de canne et est souvent aromatisé avec des feuilles de menthe. Ajouté du lait est également admis. Le thé koshary est habituellement clair : moins d’une demi cuillerée à café par tasse est déjà
considéré comme très raffiné. Le thé saiidi est commun en Haute-Égypte (au sud). Il est préparé en faisant bouillir du thé noir avec de l’eau pendant cinq minutes à feu vif. Le thé saiidi thé est extrêmement lourd, avec deux cuillerées à thé par tasse en moyenne. Il est édulcoré avec de grandes quantités de sucre de canne (nécessaires car la méthode de préparation rends le thé très amer). Le thé saiidi est noir, même sous forme liquide. En plus du véritable thé, les tisanes sont souvent servies dans
Le Karkadeh Le thé des Pharaons
Les cafés d’Égypte Lieux de retrouvailles
les maisons de thé égyptiennes, avec des ingrédients allant de la menthe à la cannelle et du gingembreau salep. On attribue à chacune d’en elle des vertus médicinales en médecine traditionnelle égyptienne. Le karkadé, une tisane fait àpartir des fleurs d’hibiscus, est un boisson particulièrement populaire et traditionnellement considérée comme bénéfique pour le cœur.
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THÉ KARKADEH thé d’hibiscus
LE THÉ DES PHARAONS Déjà les Pharaons buvaient des infusions, en particulier le karkadeh, une infusion d’hibiscus que les Égyptiens boivent toujours aujourd’hui, froide le plus souvent. Un bon mariage, par exemple, se célèbre aujourd’hui encore au karkadeh ! Le Karkadé ou Bissap est une infusion à base de fleurs d’hibiscus très rafraîchissante et désaltérante qui aurait en outre des vertus médicinales : réduction du risque de maladies vasculaires, tonifiant, hépatoprotecteur et gastro-intestinal. . . Cette boisson est très populaire en Afrique de l’ouest et en Egypte. Cette culture de l’infusion s’est très bien appropriée le thé lorsqu’il est parvenu jusqu’en Égypte au XVIe siècle par la Route de la Soie, ayant auparavant traversé le Pakistan, la péninsule arabe et la Turquie.
« Qui boit l’eau du Nil reviendra en Égypte »
CAFÉ EL FISHAWI - EL-FISHAWI ALLEY - CAIRE
LES CAFÉS Les cafés, avec leurs terrasses sur la rue, sont là où se retrouvent les Égyptiens de tout âge, pour discuter autour d’un thé et d’une shisha. Dans les établissements plus traditionnels, fréquentés majoritairement par les hommes, on joue également aux dominos et au backgammon.
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TUNISIE LES ORIGINES Les Tunisiens découvrent le thé plus tardivement que les Marocains. En effet, pendant la période ottomane, les Turcs introduisent à Tunis le café, qui entre dans les usages quotidiens, tandis que le thé demeure un objet de curiosité. En 1766, lorsqu’un consul britannique offre du thé et du sucre au souverain, le thé devient à la mode parmi les classes supérieures, et ce pendant tout le XIXe siècle. Tout change pendant la guerre italo-turque de 1911-1912. En effet, le thé dit rouge avait été adopté en Libye par la population remplaçant en partie le café. C’est de là que le thé arrive en Tunisie. LA PETITE HISTOIRE Le thé est plus qu’une boisson : il est un outil de marketing pour des commerçants cherchant à mettre à l’aise leurs clients, un signe d’hospitalité servant à casser la barrière. En atteste cette histoire de grand-mère : « Autrefois, dans la Medina de Tunis9, les gens passaient devant la boutique de Si H’bib mais personne ne daignait entrer. Les 9. Centre d’une ville traditionnelle, dans les pays d’Afrique du Nord, en Afrique occidentale et orientale
clients se faisaient rares et pourtant, les chaussures qu’il vendait étaient ce qu’il y avait de plus confortable. Un jour, un vieil ami lui rendit visite. Ils s’assirent devant le pas de la porte, sur leurs petites chaises et Si H’bib offrit le thé à son ami. L’odeur du thé se dégageant de la théière attira les clients. Les jours suivants, le commerçant n’hésita pas à en préparer davantage pour en offrir à qui, de ses clients, en voulait. » . Depuis, une fine odeur de thé embaume les ruelles des médinas.
Le thé akhdar
Café des délices
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THÉ AKHDAR
LE THÉ TUNISIEN
« Un hôte attentionné proposera deux théières, une de chaque thé »
Le thé vert, tei akhdar, est infusé avec quelques feuilles de menthe, fraîches ou séchées selon la saison. Traditionnellement, il est versé sur des pignons de pin, voire des amandes ou des cacahuètes grillées. S’il est sucré, les pignons flotteront à la surface, s’il ne l’est pas, ils resteront au fond du verre. Les pignons peuvent être remplacés par des amandes ou des cacahuètes grillées. Ce fût un thé vert à la menthe, aux pignons et gouttes d’eau de fleur d’oranger facultatifs : un tey akhdar. Nous pouvons le parfumer aussi à la cannelle, la sauge, la verveine ou à l’absinthe (chiba). Il peut également se préparer avec du thé noir, dit « thé rouge » .
THÉ VERT
PIGNONS DE PIN
IMPASSE DE LA CORNICHE - SITE ARCHÉOLOGIQUE DE CARTHAGE TUNISIE
LE CAFÉ DES DÉLICES Depuis la chanson de Patrick Bruel et Félix Gray, le café Sidi Chabaane, rebaptisé café des Délices, est devenu un lieu incontournable de Sidi Bou Saïd. Le café, construit en terrasses dans les années 60, à flanc de colline, offre un point de vue unique sur la baie de Tunis et, au loin, le Bou Kornine. On y surplombe aussi le port du village et la plage.
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VOYAGE AFRIQUE LE BERCEAU DE L’HUMANITÉ
L’influence des puissances coloniales Le thé est arrivé en Afrique à la fin du XXe siècle et a connu ses premiers développements au cours du XX e siècle sous l’influence des puissances coloniales. Il est alors devenu un enjeu de développement agricole majeur pour le Kenya, le Malawi, l’Afrique du Sud, le Cameroun… La majorité de la production africaine est destinée à être du thé noir broyé mis en sachet mais des jardins de grande qualité ont aussi vu le jour ces dernières décennies, en particulier sur les hauts plateaux d’Afrique Orientale. La sécheresse, les conflits et les aléas politiques ont fragilisé le secteur du thé dans certains pays mais les principaux producteurs ont conscience du potentiel. À mesure que la production de thé
se développe et s’exporte, elle s’ancre dans les cultures locales. Elle devient symbole d’hospitalité et ses vertus symboliques se fondent dans les traditions spirituelles de chaque pays. C’est à la fin du XIXe siècle que les premiers champs de thé ont fait leur apparition en Afrique du Sud, par le biais des colons anglais qui souhaitaient avoir une production locale pour leur consommation personnelle. Plus tard, les allemands commencèrent une culture du thé sur les pentes du Mont Cameroun et en Tanzanie. Puis la production s’est étoffée et développée dans d’autres pays africains. Le continent africain est aujourd’hui un acteur important dans le marché mondial du thé.
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AFRIQUE DU SUD LES ORIGINES Le thé est arrivé en Afrique à la fin du XX e siècle et a connu ses premiers développements au cours du XXe siècle sous l’influence des puissances coloniales puis, il est devenu un enjeu de développement agricole majeur pour le Kenya, le Malawi, l’Afrique du Sud, le Cameroun… C’est à la fin du XIXe siècle que les premiers champs de thé ont fait leur apparition en Afrique du Sud, par le biais des colons anglais qui souhaitaient avoir une production locale pour leur consommation personnelle. Plus tard, les allemands commencèrent une culture du thé sur les pentes du Mont Cameroun et en Tanzanie. Puis la production s’est étoffée et développée dans d’autres pays africains comme le Kenya, le Malawi, le Mozambique, le Zimbabwe et le Rwanda. Le continent africain est aujourd’hui un acteur important dans le marché mondial du thé.
JARDIN DE THÉ L’un des premiers à avoir fait pousser du thé, tout d’abord dans le très connu jardin de Kwazulu, dès 1877. C’est d’ailleurs toujours dans ce jardin que sont produits les meilleurs thés du pays. Le pays consomme la plupart de sa production (environ 12 000 tonnes), seul le jardin de Kwazulu exporte ses productions.
Le thé rooibos
Melissa’s Food Home Gift
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LE ROOIBOS rooibos
UN THÉ PAS COMME LES AUTRES. . . Considéré comme la boisson nationale de l’Afrique du Sud, le Rooibos bush est une plante qui appartient à la famille des légumineuses. Connue également sous le nom d’Aspalathus linearis, elle est cultivée au nord de la région du Cedarberg, à 200 km au nord de la ville du Cap. Riche en antioxydants luttant contre le vieillissement cellulaire, de
nombreuses vertus bienfaisantes sont attribuées au rooïbos : sur la digestion, le sommeil, les allergies. De tels effets ne sont à ce jour pas démontrés. Des études scientifiques sont en cours et visent à montrer le rôle que pourraient jouer certains antioxydants spécifiques au Rooibos. Le Rooibos donne un
« Concentré de goûts et d’Afrique » breuvage sain et savoureux, idéal pour le soir. Quasiment dépourvu de tanins, il est très peu astringent et sa saveur légèrement sucrée en fait une excellente base pour les mélanges parfumés.
LELIE ROAD - CONSTANTIA MAIN ROAD - 7600 - SOUTH AFRICA
MELISSA’S FOOD-HOME-GIFT Mark & M elissa van Hoogstraten ont ouvert leur premier magasin Melissa en août 1996 à Kloof Street, au Cap. Vous pouvez vous y rendre pour vivre une expérience africaine de qualité, avec des produits divers et variés.
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VOYAGE AMÉRIQUE À LA CONQUÊTE DU NOUVEAU-MONDE
Le thé des colons anglais Le thé est arrivé en Amérique au milieu des années 1600, avec les Hollandais qui commençaient à établir une colonie en Nouvelle-Amsterdam. La colonie passa aux mains des Anglais qui la renommèrent « New York ». Le thé étant très apprécié des femmes de la colonie et des colons fortunés, le commerce du thé, lourdement imposé, s’épanouit entre la colonie et l’Angleterre, ce qui convainquit le parlement anglais de passer le Tea Act («loi sur le thé ») dans le but de soutenir la position financière précaire de la compagnie. Le Tea Act permettait aux Anglais d’envoyer du thé par bateau directement aux colons, sans payer de taxe de douane, et d’en tirer profit en excluant les marchands de la colonie. Les ten-
sions politiques atteignirent leur apogée lors du « Boston Tea party », une manifestement contre les lourdes taxes, où les colons déguisés en Indiens d’Amérique jettèrent à l’eau le thé des bateaux de commerce de la Compagnie des Indes orientales. Bien que la révolution américaine ait coûté à la compagnie, cette dernière réussit à survivre grâce à son immense envergure. Dans les années 1850, les clippers américains commencèrent à importer du thé en Amérique directement de la Chine. Les premiers sachets de thé étaient faits à la main, cousus dans la soie ou la mousseline. Les sachets de thé commencèrent à être brevetés dès 1903. Toutefois, il est fréquent que l’on attribue à Thomas Sullivan, un marchand de thé de New York, la conception du premier sachet de thé commercial.
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ÉTATS-UNIS LES ORIGINES CLIPPERS ET COMMERCE DE THÉ Dans les années 1850, les clippers américains commencèrent à importer du thé en Amérique directement de la Chine. Après l’effondrement de la compagnie et l’annulation des lois sur la navigation qui imposaient que le thé soit envoyé par bateau de l’Angleterre aux ports des colonies directement, les clipper devinrent rapidement le moyen de transport du thé favori. Ces vaisseaux élégants, remplacèrent aisément les bateaux de commerce. Construits pour la vitesse, les clippers britanniques et américains faisaient la course entre la Chine et l’Angleterre, emportant le meilleur thé aux enchères. INVENTION DU THÉ AMÉRICAIN Au 19e siècle, le thé joua un rôle important dans la vie sociale en Angleterre et en Amérique, comme par exemple le thé de cinq heures. De nouvelles traditions du thé commencèrent à se développer en Amérique à mesure que la popularité du breuvage
augmentait. Le thé glacé tire son origine de l’Exposition universelle de Saint-Louis au Missouri, en 1904. Un marchand de thé, propriétaire d’une plantation de thé à l’étranger, voulait faire goûter aux visiteurs des échantillons gratuits de thé chaud. Toutefois, à cause de la température inhabituellement élevée, son initiative trouvait peu de preneurs. Pour mousser les ventes, il demanda de la glace au vendeur de crème glacée du coin. La tradition du thé glacé américain est né au moment où il ajouta de la glace à l’infusion de thé chaude.
Le Bubble tea
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BUBBLE TEA
LA BOISSON DU MOMENT
« Le thé aux perles »
Le thé aux perles ou thé aux bulles par calque de l’anglais bubble tea, est une boisson originaire de Taïwan. C’est un mélange de thé froid ou chaud et de lait, parfumé de diverses saveurs et additionné de boules noires de tapioca, qui donnent son nom au thé aux perles. Ces dernières s’aspirent généralement au moyen d’une paille de gros diamètre. Inventé dans les années 1980, le thé aux perles a fait son entrée en 1990 dans la liste des boissons proposées par les chaînes de salons de thé jeunes et de boissons à emporter, secteur florissant à Taïwan. C’est une boisson si populaire dans son île d’origine qu’on en parle souvent comme de la « boisson nationale » .
ICED TEA LE THÉ FROID
Le thé glacé, appelé thé froid en Suisse, est un type de boisson rafraîchissante, non alcoolisée, non gazeuse, sans lait, constituée de thé froid. La Suisse a été un des premiers pays européens à en servir toute l’année. Le thé glacé est traditionnellement servi dans un verre avec des glaçons ou de la glace pilée, et éventuellement en ajoutant du sucre (principalement dans le Sud des ÉtatsUnis) ou du lait (en Thaïlande) ; le goût peut aussi être rehaussé en le mélangeant à des sirops par fumés, par exemple à la menthe ou aux fruits (citron, citron vert, framboise, cerise, pêche, litchi, mangue).
«Peu importe l’endroit où vous vous trouvez ou ce qu’il y a dans votre assiette, il n’y a rien de tel qu’une carafe de thé glacé rafraîchissante. »
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ARGENTINE LES ORIGINES Le peuple Guarani est le premier utilisateur du maté. Leur territoire couvre le Paraguay, le nord de l’Argentine et le sud du Brésil. Ce peuple utilisait cette boisson qui « chassait la fatigue » et « favorisait la bonne humeur » . Ils l’utilisaient aussi comme base dans leurs médicaments. LES JÉSUITES À l’arrivée des Jésuites dans la région la culture du maté a été organisée. Ainsi, des missions ont été crée le long du fleuve Rio Parana Alto et la culture du maté à largement contribué à créer la richesse des jésuites qui employaient le peuple Guarani dans leur mission. Les gouvernements locaux agacés de voir ainsi les jésuites s’enrichir avec le maté les ont chassés et ont pris à leur compte la gestion de la culture du maté. Le peuple Guarani vit alors une période très délicate. De leur coté, les européens n’en entendirent parler qu’au XVI e siècle par les récits de voyages des explorateurs espagnols.
Ceux-ci ont rapportés que les indiens préparaient une infusion de feuilles favorisant la bonne humeur et chassant la fatigue. Les espagnols ont ensuite adoptés cette boisson. LA BOISSON NATIONALE ET CONVIVIALE Le maté reste le compagnon des moments de repos, de convivialité et d’inspiration de nombreux sud-américains car il est définitivement enraciné dans leur histoire, dans leur culture et dans leurs habitudes.
Partage, convivialité, cercle d’amitié
Le maté L’infusion d’Amérique du Sud
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LE MATÉ Le « thé des Jésuites »
UN RITUEL D’INFUSION CONVIVIAL Cette boisson, consommée chaude ou froide au Brésil et au Paraguay (froide, on l’appelle tererè et elle se boit dans une sorte de corne, la guampa), de goût fort et amer, est préparée avec des feuilles de yerba maté. Elle se boit dans une calebasse grâce à un tube métallique qui sert aussi de filtre, la bombilla. Pour le savourer, les gauchos se mettent en cercle et se passent la boisson de main en main selon un rituel très précis qui invite, par exemple, les participants à faire circuler la calebasse dans le sens anti-horaire afin de faire passer le temps moins vite. Cette boisson traditionnelle aiderait à supporter le froid de l’hiver et symbolise par ses rites de consommation la fraternité et l’hospitalité des gaúchos.
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LES NOUVELLES TENDANCES
Tea Time. En cette période de rentrée, la mode est, sans conteste, au thé. Pour un peu, cette boisson chaude serait en passe de devenir le nouveau café. Le café des femmes plus exactement, puisque c’est essentiellement la gent féminine qui boit les Depuis une quinzaine d’années, 1 000 milliards de tasses consom- on remarque un retour en force du mées chaque année dans le thé dans les habitudes de consommonde. mation. Le choix, en matière de thé, s’est grandement amélioré et les boutiques dédiées à cet univers augmentent. De nombreux magasins et salons de thé ont ouvert leurs portes au cours des dernières années. Le simple thé en poche noir ou vert n’a plus la cote. Aujourd’hui, le thé se décline en de multiples saveurs. L’engouement se fait surtout sentir chez les jeunes. De plus en plus, les jeunes essaient de quitter le monde du café, des boissons énergisantes. Ils veulent aller vers quelque chose qui va les aider à rester éveillés, à rester concentrés sans les effets néfastes du café et du sucre . En effet, le thé est un grand champion en antioxydants. Il a de belles vertus aussi. Contrairement au café qui va stimuler physiquement et nerveusement, le thé éveille au niveau mental. Le thé peut calmer aussi tout en nous éveillant.
1 000 milliards de tasses sont consommées chaque année
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FLORAL TEA STORY DE LA POÉSIE SUR INSTAGRAM
Avec sa série Floral Tea Story, la photographe Marina Malinovaya s’amuse à mettre en scène l’heure du thé en créant des compositions délicates avec des vagues de fleurs et de feuilles séchées. Un projet poétique à suivre sur son compte Instagram.
@marinamalinovaya
LE THÉ EN GOBELET OU THÉ À EMPORTER
Dans la rue, dans les transports, au bureau… Ils sont partout ! Les thermos et autres gobelets à emporter ont envahi nos vies, mais savez-vous où et comment ils sont nés ?
La nouvelle tendance La tendance des boissons chaudes à emporter nous vient des États-Unis. Elle y naît dès 1912, avec l’invention du gobelet jetable. Son usage ne se généralise que dans les années 1960 cependant, en partant de New York, parallèlement au développement de la restauration rapide. Le phénomène touche les boissons chaudes lorsque la vente à emporter, en particulier du petit-déjeuner, entre dans les habitudes de consommation des Américains dans les années 2000. Désormais, que l’on passe l’acheter dans son coffee shop favori où qu’on la verse dans son thermos avant de partir, la boisson chaude est bue en chemin, entre le domicile et le lieu de travail ou l’université.C’est même devenu une scène classique des films et des séries télé.
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PACKAGING LE THÉ VU DE L’EXTÉRIEUR Parmi les amateurs de thé, il y a ceux qui préfèrent les feuilles en vrac et les buveurs de sachets, considérés comme plus pratiques. Cela fait beaucoup de monde, puisqu’on considère que 6 milliards de tasses sont consommées chaque jour ! Pour séduire tous ces goûteurs d’eau chaude, il faut donc frapper fort. Non pas en les ébouillantant mais en les convainquant. Si la saveur a de l’importance, c’est bien par le design extérieur que les tea-addicts découvrent pour la première fois l’une ou l’autre marque de leur boisson favorite. Et, de ce point de vue, les fabricants ont bien compris comment marquer les esprits.
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LE DESIGN DU PACKAGING Les boîtes sont souvent colorées, ou illustrées de thèmes qui évoquent la nature (arbres, montagnes et rivières, nous voilà). Cependant, si les contenus carrés sont plus faciles à entreposer en magasin et si ce sont ceux qui se trouvent le plus souvent en grandes surfaces, l’aspect pratique n’est pas le seul à avoir les faveurs des designers du thé. On retrouve ainsi des contenants ronds, qui mixent parfois le bois et le métal … ou même le bambou. Aujourd’hui, le thé se boit en toutes circonstances. C’est pour cela que profiter d’un design original est tout aussi important pour ceux qui le commercialisent que pour ceux qui veulent l’utiliser comme cadeau promotionnel. Cette tendance infuse lentement sur les catalogues des fabricants d’objets publicitaires et elle n’est sans doute pas prête de boire la tasse.
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4. Kusmi Tea / 5. Clipper / 6. Whittard / 7. Baan Cha / 8. William Whistle / 9. Lost Tea / 10. Wedgwood / 11. Opal Tea / 12. Regal Peacock
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Romane Ruskoné
Miriana Drescher-Beslard
Sophie Gaye
Rédactrices en chef et mise en page du magazine
La mission a été encadrée par Romane Ruskoné et Miriana Drescher-Beslard. Le magazine a été tiré à 2000 exemplaires et diffusé dans les tabacs, papeteries, kiosques, au prix de 9 euros. ISSN : 1955-009X Sortie officielle le 12 Janvier 2017
Directrice de publication
Mathieu Brélère Arnaud Bouvier
Élodie Raitière
Coordinateur général
Photographe attitré
Conseiller journalistique et correcteur
TERRE de THÉ 9,00 €