Grandir en Morvan

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Grandir en Morvan Christiane Gruaz Dumont Fin de l'été, sur la colline

J'ai pensé à celles et ceux nés ici, qui partent, parfois reviennent. À celles et ceux nés ailleurs, qui restent et n'osent retourner, à cette terre et ce ciel qui s'unissent pour former un espace de liberté.

Chère hirondelle, Cela fait longtemps que je ne t'ai vue par ici. Je regarde le ciel. Est-ce que le temps du grand voyage est arrivé? J'aurais pu t'écrire de là-bas, tout au bout de l'horizon, là où le ciel et l'eau se rejoignent. Comme c'est beau! Rentrer chez soi en larmes, cela ne se fait pas, je sais, surtout lorsqu'on habite un si bel endroit, et que tout va pour le mieux, hein, dit? Mais toi, de là-haut, tu ne t'étonnes pas, tu connais les turbulences, tu sais bien que le paysage peut être somptueux, mais que parfois, et malgré cela, la route est difficile. L'océan m'a montré deux ou trois choses de moi, que j'avais oubliées. Un peu comme ces coquillages que l'eau vivante laisse en héritage, au temps de la marée basse. Je ne sais pas comment se déroulera l'automne, puis l'hiver. Je me suis remise au travail, je peins. J'accepte d'être ainsi, tendue vers un désir lointain, un être éperdument voyageur.


Grandir en Morvan Il pleut. Un vent frais. Sinon, le silence. J'hésite à mettre de la musique pour... pourquoi? Non, je ne vais pas le faire. La pluie qui tombe, c'est une jolie chanson. Un vent plus fort est entré, soulève les papiers que je m'apprêtais à trier. Qu'ils s'envolent! La pluie entre chez moi. Je crois que je vais fermer la fenêtre. Voilà, c'est fait. J'ai les pieds mouillés. Donc, je t'écris une lettre, que je vais glisser dans une enveloppe jaune, couleur tournesol, avec une fermeture délicate, deux petites lunes dans une grande lune, ou un soleil. Je porterai l'enveloppe à la poste demain matin. Tu la recevras peut-être mardi, ou mercredi. C'est joli, le nom des jours en français. Je viens de m'en apercevoir en les écrivant. J'ai acheté une carte chez les moines tibétains.. Je l'ai choisie pour donner suite à ce beau dessin Tu sais, la carte avec les cerfs-volants que tu m'avais envoyée.


Grandir en Morvan Sur la colline, printemps Chère Hirondelle! Tu m'écris pour prendre un peu de mes nouvelles, Ne t'inquiète pas, je vais bien. Je voyage, je me promène dans des zones anciennes et nouvelles, je suis dans les constellations infinies du temps et de l'espace intérieur. Lorsque j'en sors, c'est pour m'imprégner des paysages extérieurs, je prends de l'oxygène. Ce célèbre poème que tu m'as envoyé, montre que tu as bien senti où je me trouve. C'est certainement là aussi que tu es. Oui, « par les soirs bleus d'été, allons dans les sentiers, picotés par les blés, fouler l'herbe menue... »


Grandir en Morvan


Grandir en Morvan

Marcher ne plus penser penser mieux jouer creuser lire dormir manger boire rĂŞver regarder respirer sentir protĂŠger entourer parler rire ne rien faire ne rien attendre ne rien espĂŠrer ne rien demander apprĂŠcier emmagasiner embrasser ensoleiller enchanter


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