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MARS #27

SAMI BOUAJILA

Photographié par François Berthier

Captain Kid / Broken Back / K’s Choice Leïla Boumedjane / Sami Bouajila / Maxime Gasteuil / Adélaïde Leroux / Stereophonics Laura Satana


CONTRIBUTEURS

FONDATEUR, DIRECTEUR DE LA REDACTION, REDACTEUR EN CHEF CINEMA & DIRECTEUR DE LA CREATION FR A NCOIS BERTHIER REDACTEUR EN CHEF, REDACTEUR EN CHEF MUSIQUE DINE DELCROIX RÉDACTRICE EN CHEF BEAUTE AUR IA NE BESSON JOURNALISTES Auriane Besson, Jessy Cot t ineau , Dine Delcroi x, François Berthier, Riyad Cairat, PHOTOGRAPHES François Berthier, Florian Fromentin, Martin Lagardère Nicolas Larrière. PRODUCTION PHOTO Dine Delcroix + François Berthier PHOTO DE COU V’ François Berthier CONTACT R EDACTION/PUB theblindmagazine@gmail.com

The BlindMagazine est édité par la société Ten Feet Under / Tous les textes et photos sont soumis par leurs auteurs qui acceptent leur publication et n’engagent que leur responsabilité.


EDITO #27 Chers lecteurs, chères lectrices, Qu’il soit moderne, contemporain, esthétique, classifié, dérangeant ou dérangé, l’Art est la réponse à bien des interrogations. C’est toutefois la sensibilité de chacun qui détermine ce qu’il convient d’appeler « art ». Pourtant, la subjectivité qui entoure la démonstration artistique n’a de cesse d’animer les débats les plus enflammés. Et si nous prenions le temps de vivre ? Et si nous étions l’Art ? Rassurez-vous, vous êtes toujours en train de lire TheBlindMagzine et ces quelques lignes semi-philisophiques ne sont en rien l’annonce d’une nouvelle ligne éditoriale bassinante mais plutôt d’une envie de rendre hommage à ce qui nous attise et qui nous permet de vous retrouver à chaque numéro. Comme tous les mois, nous continuons à mettre en lumière un assortiment culturel qui nous est propre et qui, nous l’espérons, saura susciter votre intérêt au-délà de ces pages. En attendant notre prochain rendez-vous, nous vous souhaitons une belle lecture.

L’équipe TheBlindMagzine


L’INSTANT Live L’instant LIVE

CAPTAIN KID @Les Trois Baudets 24 Février 2016

Par : Dine Delcroix / Photos : Wallendorff Captain Kid était le 24 Février dernier sur la scène parisienne des Trois Baudets pour présenter les chansons de « X or Y », son deuxième album paru le 12 Février 2016 chez Savoury Snacky Records. Accompagné des ses musiciens complices, l’interprète de « We & I » a proposé en live toute la densité musicale de sa culture anglo-saxonne dans une ambiance décontractée et touchante à l’image de ses compositions. Actuellement en tournée, l’artiste repassera par la capitale le 17 Mai 2016 pour un concert au Divan du



DECOUVERTE

ADÉLAÏDE LEROUX Révélée par Bruno Dumont dans Flandres qui reçut le Grand Prix du Festival de Cannes en 2006, Adélaïde Leroux continue de séduire les réalisateurs par son jeu travaillé. Elle est l’héroïne du nouveau film de Frédéric Pelle, un drame romantique intitulé Le chant du merle, en salles depuis le 16 Mars 2016.

PAR Dine Delcroix / Photos : FRANÇois BERTHIEr

Coiffure & maquillage : Francesco Spadaro


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Ta Madeleine de Proust ?

Ton secret de beauté ?

L’odeur des garages. J’aime cette odeur

Matin et soir, j’utilise un lait dermo-nettoyant

depuis que je suis gamine pour le côté

anti-rougeurs de la marque Avène parce que

ouvrier et manuel. Je pense que c’est lié

j’ai une peau très fragile qui rougit.

aussi à mon enfance parce qu’on avait toujours des voitures pourries dans ma famille et on allait souvent dans les garages (rires). Le caoutchouc, les pneus…

Ton antistress ?

C’est une odeur que j’aime particulière-

Je crois que c’est mon chat (rires). J’ai toujours

ment mais que les gens n’aiment pas, en

eu des chiens depuis toute petite mais j’ai

général.

un chat depuis trois ans et c’est très apaisant, surtout après une journée un peu rude. C’est doux, tendre et élégant.

Le film qui raconte ta vie ? Les Feux De La Rampe de Charlie Chaplin. J’aime beaucoup ce film et le par-

La tendance mode que tu détestes ?

cours de la danseuse me touche tout par-

Je n’aime pas les jeans portés en bas des

ticulièrement. Ces deux destins croisés

fesses. Je trouve que cela ne va pas bien

ne sont pas autobiographiques mais ils

aux gens et donne l’impression d’avoir

racontent quelque chose qui ramène à la

des personnes informes qui marchent.

difficulté de faire ce métier et de continuer. La jeune fille, à un moment, abandonne et c’est sa rencontre avec ce vieux clown qui va la tirer vers le haut. Cela arrive d’ailleurs dans tous les métiers.

Le détail chic pour toi ? Le rouge à lèvres rouge, c’est très classe. J’aime aussi les mains. On voit beaucoup si une personne est élégante dans ses

Ton livre de chevet ?

mains et dans sa manière de les bouger.

En ce moment, c’est D’Après Une Histoire Vraie de Delphine De Vigan. J’avais énormément aimé son précédent livre ainsi que son premier. J’aime beaucoup les polars et j’aime aussi les livres de J.K. Rowling, notamment ceux qu’elle écrit sous le pseudonyme de Robert Galbraith. 8

Ta série du moment ? Je n’ai pas regardé de séries depuis très longtemps mais j’ai envie de revoir Mad Men que je trouve très bien faite.


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Ta chanson pour te sentir bien ?

avec des amis très festifs.

Sarà Perché Ti Amo de Ricchi & Poveri. Cette chanson me met vraiment de bonne humeur et me fait penser à l’été.

Un autre métier qui t’aurait plu ? Il y en a plusieurs. Il y a des métiers manuels comme, par exemple, créer des

Ton proverbe fétiche ? La chance s’attrape par les cheveux, mais elle est chauve. ». C’est une citation de Stendhal.

bijoux. Je le fais un petit peu mais c’est vraiment un passe-temps. Dans le métier d’actrice, il manque justement un côté manuel même si on joue énormément avec le corps. Dans un autre registre, il y a l’assistanat social. Venir en aide aux gens qui en ont besoin et qui, parfois, ne savent

L’insulte que tu préfères ?

absolument pas comment s’en sortir, je trouve que c’est un métier très intéressant.

« Bordel à cul » (rires).

Qui inviterais-tu à ton dîner idéal ? Le compliment qui t’énerve le plus ? Un ami qui j’ai perdu il y a quelques « Vous êtes magnifique, ma chérie ! ». Je

mois. Je donnerais beaucoup de choses

trouve qu’on dit trop souvent aux actrices

pour pouvoir refaire un dîner avec lui. Je

qu’elles sont belles mais elles ont envie d’en-

sais que ce n’est pas possible mais ce se-

tendre autre chose, parfois. En plus, je trouve

rait vraiment l’idéal.

le « ma chérie » tellement faux et hypocrite quand on ne connaît pas la personne... Le défaut que doit avoir une personne pour te séduire ? Le pays où tu pourrais immigrer ? La maladresse. L’Espagne. J’ai découvert ce pays quand j’avais 15 ans par Barcelone et j’ai été absolument fascinée par Gaudí. Il fait des choses folles, d’une beauté et d’une utilité… Je pourrais voir des centaines de fois le Palais Güell, la Sagrada Família, la Casa Batlló. Barcelone est une ville 10

que j’ai beaucoup aimé découvrir à 15 ans

Le cadeau que tu rêves d’offrir ? Je rêve d’offrir une maison à colombages à ma mère. Je sais qu’elle adore ce côté Scarlett O’Hara.


Le disque que tu as honte d’avoir acheté ? Un disque de Mariah Carey. Je l’ai bazardé parce que j’avais honte de l’avoir. Elle a une voix magnifique mais je lui

trouve un côté « pouf’ » un peu agaçant et ce n’est pas non plus extraordinaire en termes de paroles.


K’S CHOICE Alors qu’ils continuent la promotion de leur sixième album The Phantom Cowboy avec un quatrième single titré Woman, les K’s Choice rentrent d’une tournée américaine et seront à l’affiche de quelques festivals, l’été prochain. Rencontre avec Sarah et Gert Bettens, le frère et la soeur leaders du groupe. PAR Dine Delcroix / Photos : ANTON COEN


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K’S CHOICE

The Phantom Cowboy, votre sixième album en tant que K’s Choice est récemment sorti aux États-Unis. Que pensez-vous du marché du disque, là-bas ? Gert : C’est compliqué partout, maintenant. Là-bas, nous passons sur des radios universitaires mais ce n’est pas comme il y a 20 ans avec Not An Addict. Sarah : Oui et c’est compliqué en Eu-

En 2013, vous avez sorti l’album Waving at

rope aussi. Nous faisons un genre de

The Sun sous le nom de Bettens. Pourquoi

musique qui n’est pas pour des gens très

avoir changé de nom pour finalement reve-

jeunes même si certains jeunes aiment

nir à K’s Choice ?

le rock mais, en général, c’est une mu-

Sarah : Waving at The Sun était un projet séparé de K’s Choice, ce n’était pas avec tout le groupe. C’était pour la bande originale d’un film qu’on avait enregistrée seulement avec notre pianiste. C’était à moitié instrumental et,

sique pour une autre génération. Nous aimons le rock et nous faisons ce que nous aimons, cela nous semble naturel. Nous devons toutefois trouver des gens qui sont encore intéressés par cette musique, ce qui n’est pas facile.

pour nous, il ne s’agissait pas d’un album studio de K’s Choice. C’est pour cela que nous l’avons sorti sous un nom différent. À la fin, c’était un peu troublant pour beaucoup de gens mais c’était la seule raison pour laquelle nous avons mis ce projet à part.

Le lead single de cet album est Private Revolution. De quelle révolution s’agit-il dans ce morceau ? Sarah : Cette chanson est le parfait exemple de notre collaboration sur cet

Envisagez-vous de refaire mutuellement des

album qui est le premier que nous avons

projets en solo ?

écrit ensemble. La musique est de Gert tandis que la mélodie et les mots

Sarah : Non. Gert : Pour l’instant, nos projets solos sont au réfrigérateur. Peut-être un jour mais pas maintenant (rires). 14

sont de moi. Private Revolution est peutêtre un peu le thème de cet album dans le sens où il y a beaucoup de choses qui changent quand tu vieillis, c’est une question d’équilibre tout le temps. Ce n’est pas nécessairement une révolu-


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tion, c’est un peu comme si tu voulais des

ou Sarah habite. Nous avons écrit

choses que tout le monde ne veut peut-

dans son studio pendant une semaine

être pas ou ne comprend tout simple-

et, quelques mois après, elle est venue en

ment pas alors tu essayes constamment

Belgique pour continuer dans mon stu-

de trouver l’équilibre dans les nouvelles

dio à Anvers.

choses de la vie et de te frayer un chemin vers le bonheur. De l’extérieur, cela ressemble à une rébellion ou à une révolution alors qu’en réalité, tu essayes simplement de trouver ta propre voie

Sarah : Cela a fonctionné parce que Gert était chez moi pendant une semaine sans famille et cela aide vraiment beaucoup à la productivité.

et d’être suffisamment courageux pour suivre ce en quoi tu crois. La chanson explique justement qu’il ne s’agit pas d’une révolution personnelle ou d’une folie rebelle mais d’une quête vers un chemin.

Avez-vous écouté des artistes en particulier pendant l’écriture de cet album ? Gert : J’ai écouté des groupes que j’écoutais déjà comme Foo Fighters et Queens

Vous avez écrit pour la première fois à deux.

of the Stone Age.

Qu’est-ce qui a motivé cette nouvelle méthode

Sarah : Il y a eu Black Rebel Motorcycle

de travail entre frère et sœur ?

Club.

Sarah : Nous avons pensé que le fait d’être ensemble dans la même pièce ce nous aiderait à aller dans la même direction. Normalement, on écrit chacun des chansons et on mélange tout. Gert : Cela a donné quelque chose de différent.

L’album en question est résolument rock et ne contient aucune ballade. Pourquoi ce virage musical ? Gert

:

Nous

avons

fait

deux

al-

bums qui étaient plutôt intimes et acoustiques alors nous voulions proposer quelque chose de nouveau même si ce Comment se déroulaient les sessions d’écriture à deux ? Gert : J’ai pris un vol pour le Tennessee

n’est pas vraiment nouveau puisque nous l’avons déjà fait avec nos albums Cocoon Crash et Paradis In Me mais cela faisait longtemps alors nous avons eu envie de le refaire avant qu’il ne soit trop tard 17


parce que nous sommes en train de vieil-

une maison à 1 km de ce studio où les

lir (rires).

groupes peuvent passer la nuit et manger

Sarah : C’était vraiment l’idée ! Après

ensemble…

plus de 20 ans, il était nécessaire pour

Gert : Oui, c’est une atmosphère fami-

nous de trouver la nouveauté qui nous

liale.

donnerait un peu le sentiment d’aventures et c’est pour cette raison que nous avons un nouveau batteur et un nouveau bassiste. Cela ne veut pas dire que les anciens n’étaient pas bons mais c’est

Comment avez-vous eu l’idée de faire appel

quelque chose qui était nécessaire pour

à Alain Johannes des Queens of the Stone

nous donner une nouvelle énergie et cela

Age pour le production de ce disque ?

a vraiment marché. Nous nous sommes aussi tournés vous un producteur très

Gert : Il était très haut dans la liste de

différent de ceux avec lesquels nous

nos producteurs préférés. Nous ai-

avons travaillé auparavant. Nous avons

mons beaucoup son groupe Queens of

écrit l’album ensemble et nous avons dé-

the Stone Age et aussi son projet, Sound

cidé de ne faire ni guitare acoustique, ni

City, qu’il a fait avec Dave Grohl. Notre

ballades. Il y a toujours eu un peu de tout

manager américain le connaissait alors

dans les albums de K’s Choice mais nous

c’était facile de le contacter. C’était fan-

avons pris la décision d’écrire ensemble

tastique pour nous de lire l’e-mail disant

en nous focalisant sur le rock pour ce-

qu’il acceptait de travailler avec nous.

lui-ci.

Comment s’est passée la collaboration avec Pourquoi avez-vous été jusqu’à Asheville, en Caroline du Nord pour enregistrer cet album ?

Sarah : C’était incroyable ! C’était si natu-

Sarah : On a enregistré dans un studio

rel et si facile… On a fait l’album en 8 ou

qui se trouve à seulement une heure de

9 jours et, en même temps, il n’y a jamais

chez moi. On l’a trouvé il y a quelques

eu d’urgence ou de stress. C’était relax !

années et on y a enregistré notre album

Dès le début, tout sonnait déjà comme

Echo Mountain. On s’y sent très bien. De

un album et c’était très inspirant. Nous

plus, Alain Johannes, qui a produit l’al-

espérons déjà refaire un disque avec lui.

bum, n’avait pas de studio où il voulait particulièrement travailler. Il y a 18

lui ?



Vous êtes belges et avez des notions de fran-

Quelle est la chanson que vous détestez devoir

çais. Pourquoi n’avez-vous encore jamais

jouer en live ?

écrit dans cette langue ? Gert : Il suffit de nous entendre répondre à cette interview en français pour avoir la réponse (rires). C’est pourtant une des plus belles langues.

Sarah : Si nous détestons une chanson, nous ne la jouons tout simplement pas. Gert : Il y des chansons qui n’ont plus de secret pour nous mais il n’y en a pas une que nous détestons jouer.

Sarah : J’aimerais bien chanter en français mais je ne pense pas être assez à l’aise pour écrire en français.

Quel est votre album préféré de K’s Choice ? Êtes-vous fiers de la scène émergente belge ? Gert : Oui, bien sûr ! Tous les deux ou trois ans, il y a un nouveau groupe qui

Sarah : The Phantom Cowboy. Gert : C’est ce dernier, oui.

émerge de Belgique. En ce moment, c’est Oscar and the Wolf. Il y a quelques années, c’était Stromae qui chante maintenant partout dans le monde. C’est fantastique ! Il y a 15 ans, vous sortiez votre album Almost Happy. Êtes-vous tout simplement « Happy », aujourd’hui ? Quel est votre meilleur souvenir de scène ?

Sarah : Très « Happy » (rires).

Sarah : J’ai beaucoup de souvenirs in-

Gert : Oui, je suis content.

croyables dont un de cette première partie de Bryan Adams il y a 22 ans, je crois. Je n’ai jamais oublié le son du public quand nous avons commencé à jouer. Pour nous, c’était le début de notre carrière et c’était spectaculaire. Gert : Oui, c’était tout nouveau. 20



EN COUVERTURE


broken back

Originaire de Saint-Malo, Broken Back alias Jérôme Fagnet est un auteur-compositeur-interprète qui aime autant créer que reprendre des titres à sa manière folk-électro. Porté par l’entêtant single Happiest Man On Earth, son premier EP paru durant l’été 2015 pose les premières pierres d’un univers artistique distingué. Accompagné de son percussionniste, le jeune homme est en tournée depuis plus d’un an en attendant la sortie de son premier album prévue pour la rentrée 2016 et qui sera dignement célébrée sur la scène parisienne du Trianon, le 30 Septembre 2016. Par Dine Delcroix / Photos :NICOLAS LARRIERE


BROKEN BACK

dent qui m’est arrivé il y a 3 ans. C’est un hommage à ma vertèbre (rires).

Pourquoi as-tu souhaité finir tes études avant de te consacrer à ton projet musical ? Qu’est-ce qui t’as amené professionnellement vers la musique ? Le fait de me lancer dans la musique de manière professionnelle n’était absolument pas réfléchi, c’était plus une opportunité. Il y a 3 ans, je me suis déplacé une vertèbre et c’était pendant ma période de convalescence que j’ai commencé à écrire des chanson et à les enregistrer. C’était un exutoire au moment où j’étais en train de guérir. De fil en aiguille, en les postant sur Internet, les chansons ont commencé a être écoutées

C’était important pour moi. J’étais à l’École Des Hautes Études Commerciales du Nord à Lille où j’ai fait un master Entrepreneuriat et j’avais envie de terminer. Ce n’est pas incompatible de composer et produire tout en faisant des études. Du coup, j’ai préféré terminer pour ensuite me lancer vraiment à fond dans mon projet musical. J’étais presque à la fin de mes études donc cela aurait été stupide d’arrêter. Dans la musique, il y a une casquettte d’entrepreneuriat et c’est aussi ce qui me plaît.

par des gens et c’est vraiment à ce moment-là que je me suis posé la question de continuer à écrire et à composer.

Parallèlement, tu as créé ta propre agence digitale. Comment as-tu eu cette idée ?

D’où vient ton nom d’artiste ? J’ai choisi ce nom pour me rappeler de la manière dont j’ai commencé le projet, c’est à dire bloqué chez moi avec le dos cassé. Cela me rappelle aussi que c’est la musique qui m’a permis de guérir. D’ailleurs, le titre de l’EP « Dear Misfortune, Mother Of Joy » est une citation d’Albert Cohen qui veut dire que « Le malheur est le père du bonheur de demain », le bonheur de demain étant ce que je vis aujourd’hui et le malheur étant cet acci24

J’ai créé cette entreprise lorsque j’étais en école de commerce pour justement pouvoir financer mes études. À l’époque, je faisais des sites Internet pour de marques, des particuliers et des professionnels. C’est d’ailleurs de cette manière que j’ai commencé vraiment le graphisme. J’adorais et j’ai eu envie de continuer. C’est pour cela que je m’occupe de le partie graphique de mon projet musical et que j’ai fait moi-même la pochette de mon EP. Tu n’apparais pas sur la pochette de ton EP.




Est-ce un parti pris ?

niques de tes chansons ?

Oui, c’est un parti pris. Cette forme,

Au moment de la production, il faut juste

cette chimère a un sens. Elle représente

être curieux. C’est venu en triturant des

ma musique visuellement. J’ai eu l’idée

textures, en essayant de trouver des sons

de cette chimère qui permet de se rendre

et des matières qui me plaisaient. Dans

compte des paradoxes qu’on peut trou-

les influences electro, il faut aussi ou-

ver dans ma musique. On y trouve des

vrir ses oreilles. J’aime, par exemple,

textes tristes sur des mélodies plutôt

l’œuvre de Chet Faker qui a un travail de

joyeuses, des chœurs planants sur des

texture extrêmement précis et poussé qui

rythmiques à percussions… Il y a plu-

vient justement mettre en valeur sa voix

sieurs contrastes qui sont tissés dans

sans manger le côté folk. Le plus impor-

ma musique et cette chimère permet de

tant, c’est de s’amuser. Au moment de

les traduire.

la création, il faut plutôt se laisser aller. J’essaye de ne pas me brider pour ne pas risquer de perdre une certaine sincérité.

La chimère est plus souvent associée à un son electro alors que ta musique se veut plutôt folk… Oui, c’est un code graphique qui est pas

L’EP que tu as sorti l’été dernier est fait maison. Pourquoi ce choix du travail en solo ?

mal utilisé dans l’electro et je le trouvais

C’était une volonté personnelle mais aus-

justement intéressant dans le sens où

si parce que c’était quelque chose de très

mes compositions font référence à de la

excitant. Il y a un apport créatif impor-

folk mais la production fait référence à

tant dans chaque étape, que ce soit dans

de l’electro.

la composition, le texte, l’enregistrement ou la production. Tu peux produire une même chanson d’une centaine de ma-

Comment qualifierais-tu ta musique ?

nières différentes. Ce qui me plaît, c’est d’avoir à la fin une chanson qui reflète au

C’est une folk-electro même si on dit plu-

maximum mon intention initiale. C’est

tôt « electro-folk ». Tout commence avec

pour cela que je n’ai pas forcément envie

une guitare et un crayon à papier et c’est

de passer par un producteur extérieur

au moment de la production que vient la

qui viendrait ajouter une autre patte.

partie elecro avec les textures. Tu utilises beaucoup la guitare dans ta muComment sont nés les habillages électro-

sique. Est-ce ton instrument de prédilection ? 27


Non, ce n’est pas du tout mon instru-

Pourquoi as-tu choisi d’être accompagné

ment de prédilection. J’ai commencé la

d’un percussionniste sur scène ?

musique par le tuba qui est un cuivre qu’on retrouvera peut-être dans de futurs titres. J’ai commencé par une formation de classique et jazz au conservatoire de Saint-Malo. Ensuite, je me suis mis à la guitare peu avant mes problèmes de dos et c’est au moment où j’ai eu le dos cassé que j’ai vraiment commencé à la sortir du placard, à composer et à enregistrer

Parce que je voulais vraiment faire un concert et non pas un DJ set. Je ne voulais pas non plus faire de la guitare/voix et la solution était d’avoir un musicien avec moi. Sam est perecutionniste batterie mais aussi electro. Il m’a aidé à monter tout le live et c’est avec lui que je tourne depuis plus d’un an, maintenant.

avec. Elle a des cordes en nylon et c’est un son que j’aime beaucoup. « Young Souls » est le seul morceau pour lequel

Tu as récemment repris le tube Baby One

j’ai utilisé une guitare folk.

More Time de Britney Spears. Comment t’est venue l’idée de reprendre une chanson de cette artiste assez éloignée de ton univers

Ton EP a été bien reçu par le public et par la presse. Comment vis-tu l’engouement qu’il y a autour de ton projet ? C’est que du bonus ! Ce qui me fait vibrer à la base, c’est vraiment la création, la composition, le fait de faire des concerts et de tourner. Cela fait un an maintenant qu’on tourne avec mon percussionniste. Là, en ce moment, il y un engouement qui est en train de se dessiner et je le ressens. Il y a chaque fois un peu plus de monde aux concerts et cela fait plaisir. Ce qui fait encore plus plaisir, c’est de

musical ? L’album étant prévu pour l’été prochain, j’avais quand-même envie de proposer de nouvelles choses aux personnes qui me suivent. J’ai donc eu l’idée de « Baby One More Time » précisément parce que c’est une chanson dont la composition est magnifique et aussi parce que l’univers de Britney Spears est complètement aux antipodes de ce que je peux faire dans mon projet. C’est justement ce qui a rendu l’excercie extrêmement intéressant.

passer de la vie des statistiques digitales à la vie réelle, c’est à dire quand tu passes de centaines de milliers de vues sur You-

Tu avais déjà repris la chanson Skinny

Tube à la rencontre où tu joues dans une

Love de Bon Hiver. Aimes-tu particulière-

salle pleine devant des gens qui sont ve-

ment faire des reprises ?

nus. Là, tout devant tangible. C’est un exercice qui me plaît mais je préfère la création pure. 28



DECOUVERTE

LEÏLA BOUMEDJANE Par Dine Delcroix / Photos : FRANCOIS BERTHIER

pu t i r ra vie u x n a Ja e au » e n 5 ! a s dj le 1 ses ue ae q s m s s g ou pui gro pre lon lo B e l n a o la e. D r s nfi pr Apo ï e s a ’ E t , L rtis sée p r… ra le 6 à l e âg d’a tri heu ue 01 e 2 o c n e j n i i e o v u a l je la n é de b lice 6 m s a p é u is u pl fér mam mo com r d é e e 9 o l t pr ure ce du omp is a è t i u e e p p c l fu de el ne s la e. L e à e s s u an nt ai e ué na iq e m arn w d ym ara t c ia is st G il ph uri e in r D tit ie h o S re j ell uma Pe éd O e du com êt 16, ’ d 20 tés âtr ette cô thé e c d . au ns re o t i t éâ Th



Quelle a été ta première impulsion de comédienne ?

Tu as donc abandonné le droit... J’ai eu un master mais je ne l’ai pas va-

Quand j’étais petite, les poésies qu’on

lidé. Je me devais d’avoir au moins ma

faisait à l’école, je les jouais comme des

licence pour mes parents mais je ne me

pièces de théâtre au lieu de les réciter

vois pas faire du droit et je n’en ai pas du

comme tout le monde. Du coup, j’avais

tout envie. C’est rébarbatif !

tout le temps les meilleures notes et mes professeurs convoquaient mes parents pour leur dire que je devais exploiter ce côté scénique.

Comment t’es-tu retrouvée au casting de la pièce 9 Mois de bonheur… Enfin presque ! ? J’ai rencontré Oumar Diaw sur un court

Comment t’y es-tu prise pour exploiter justement ton côté scénique ?

métrage. On avait sympathisé et on avait pris des cours particuliers avec un coach qu’il connaît puis on a gardé contact. Un

Je rêvais de faire du théâtre mais je suis

jour, il a publié une annonce sur Face-

super timide même si la scène est un

book disant qu’il recherchait une comé-

cadre où j’arrive à me lâcher. Mes pa-

dienne professionnelle et typée, ayant

rents étant assez stricts, ils préféraient

entre 25 et 30 ans. Je lui ai écrit pour sa-

que je reste concentrée sur mes études.

voir si je pouvais me proposer et il m’a

C’est ainsi que j’ai fait une fac’ de droit

dit oui. J’ai ensuite reçu la toute pre-

en me disant que je me pencherais sur le

mière scène de la pièce pour la travailler.

théâtre après mes études. Je suis allée à

À l’époque, je ne voulais l’embêter en lui

des portes ouvertes d’écoles pour avoir

posant trop de questions. Du coup, j’ai

un premier contact avec ce milieu-là. À

appelé mon professeur et on a travaillé le

l’époque, l’école Acting International

texte ensemble.

avait mis en avant son professeur phare, un russe extraordinaire qui m’adorait. Je ne pouvais toutefois pas intégrer cette école à cause des mes cours et aussi financièrement. Le professeur m’a dit

Quels souvenirs gardes-tu de ton audition pour le rôle de Leïla dans la pièce ?

qu’il donnait des cours en parallèle à

Je suis arrivée au casting avec un vrai test

quelques comédiens de façon informelle.

de grossesse puisqu’il en est question

De ce fait, j’ai opté pour ses cours parti-

dans cette fameuse scène et j’étais la

culiers tout en continuant à faire du droit

seule à avoir eu cette idée. Oumar Diaw

à côté jusqu’au casting pour la pièce 9

avait dû voir une quinzaine de comé-

Mois de bonheur… Enfin presque !

diennes, je crois. Je ne m’étais pas permise de changer le texte mais j’avais mo-

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difié quelques toutes petites choses et

Ton personnage s’est-il toujours appelé Leiï-

j’ai surpris Oumar@ en le faisant rire.

la ?

Puis, il m’a rappelée pour un deuxième essai avec la scène de l’exorcisme. Il res-

Non, c’est par rapport à moi.

tait alors quatre filles. À la fin de ce deuxième casting, je suis rentrée chez moi en pleurs car Oumar m’avait dit qu’il était

As-tu d’autres points communs avec la Leïla

difficile de dire « non » quand on connaît

de la pièce ?

les gens mais finalement, il m’a appelée et m’a dit que c’était moi.

Elle est un peu folle et il faut dire que parfois, mais vraiment parfois, quand je suis très très énervée, je suis un peu folle

Comment s’est déroulée la collaboration avec Oumar Diaw qui a co-écrit la pièce en plus de te donner la réplique sur scène ainsi qu’avec Noom Diawara, le metteur en scène du spectacle ? Oumar Diaw est une vraie bonne personne. Il met tout de suite à l’aise et, même quand il donne une instruction, il le fait en douceur. Noom Diawara, lui,

aussi mais c’est vraiment très rare (rires). Il en faut beaucoup pour m’énerver. Je me canalise d’autant que je déteste faire des scènes publiquement. Je suis très pudique et c’est d’ailleurs ce qu’on me dit souvent à propos de mon personnage. Un peu comme elle, j’aime bien avoir ce que je veux et je vais user de beaucoup de stratagèmes pour cela mais cela reste mignon.

fait des blagues tout le temps mais il reste très professionnel. Quelle est ta plus grande inquiétude dans l’interprétation du rôle de Leïla ? De quelle manière as-tu travaillé sur ton personnage dans la pièce ? Je prenais ce que me disaient Oumar Diaw et Noom Diawara. Au début, j’appliquais vraiment ce qu’ils me demandaient et, au fur et à mesure des répétitions, je me permettais de faire les choses selon mon ressenti à moi. J’ai une sœur qui a deux petites filles et j’ai vu comment elle était pendant sa grossesse alors je me suis pas mal inspirée d’elle aussi. 34

Dans la manière de l’interpréter, j’ai très peur d’être dans la caricature. Après, on est sur scène donc, forcément, c’est interactif et je m’en suis rendue compte. Quand, parfois, je joue des scènes où je suis plutôt dans la retenue et dans l’émotion comme si je jouais devant une caméra, cela ne prend pas et on rencontre moins de réactions. Au départ, je n’étais pas trop fan de cela. La pire des choses qu’on pourrait me dire, c’est que je surjoue. Je sais que je suis sur scène et



Make-up : Sonia Sologaistoa


qu’il faut quand-même grossir les traits

but, c’était super dur. Cela va faire 2 ans.

mais j’essaie de jouer avec le plus de sincérité. Quel est ton meilleur souvenir de scène depuis que la pièce se joue ? Le fait d’incarner une femme enceinte sur les planches te donne-t-il envie d’avoir des en-

Un soir, j’ai prévenu Oumar Diaw que

fants ?

j’allais faire une improvisation et, une

Je veux des enfants mais pas tout de

ses yeux son sourire. Là, on a eu un pe-

suite. J’ai l’impression d’être encore un

tit fou rire et j’ai adoré. Depuis, on se fait

peu une enfant. Je sais toutefois m’occu-

pas mal de petites improvisations.

fois sur scène, je l’ai faite et j’ai vu dans

per des enfants et je soulageais d’ailleurs beaucoup ma sœur avec les siens mais je ne me sens pas encore prête à en voir. Il y a eu un truc bizarre au début avec cette pièce car j’avais tout le temps l’impres-

Comment ta famille a-t-elle accueilli ta nouvelle vie de comédienne ?

sion d’être enceinte. Du coup, quand

J’ai quatre sœurs et, depuis toujours,

je croisais des femmes enceintes, je les

elles savent que j’adore tout ce que est ar-

regardais avec compassion alors qu’elles

tistique puisque je dessine, je chante…

ne me calculaient pas. Maintenant, je re-

Maintenant que c’est concret, elles sont

père les femmes enceintes de loin, même

derrière moi et elles partagent tout ce que

sur des affiches (rires).

je fais sur les réseaux sociaux. Au début, une de mes sœurs m’appelaient toutes les trois heures (rires). Là, elle m’appelle

À l’image de ton personnage dans la pièce,

après chaque représentation.

t’es-tu déjà retrouvée dans une relation sentimentale sujette à des incompatibilités ou à des différences de caractères ? Oui, dans ma relation de couple actuelle.

Tes parents ont-ils eu l’occasion de voir la pièce ?

Au début, c’était dur car on est diffé-

Non et je ne veux pas. Je veux pouvoir

rent sur pas mal de trucs. Maintenant,

les impressionner et j’aimerais que ce

on se rejoint de plus en plus mais c’est

soit dans une grande salle. J’appréhende

vrai qu’on se prenait la tête très souvent.

ce jour-là parce que je ne sais pas com-

C’était lié à ma manière d’être et à sa ma-

ment je vais jouer en sachant qu’ils sont

nière d’être. Aujourd’hui, je sais com-

dans la salle, notamment en raison de la

ment il est et il sait comment je suis. On

scène dans laquelle je suis chez le gyné-

fait des efforts tous les deux mais, au dé-

37


cologue…

pièce et, pour l’instant, c’est le truc le plus merveilleux qui m’arrive alors je veux en profiter à fond mais, bien sûr,

Aurais-tu la même appréhension s’il devait

j’aimerais en faire.

s’agir d’une scène pour le cinéma ? Non, je fais quand-même la différence. Après, je suis quelqu’un de pudique donc je pense que je ne ferais pas de scènes osées mais si c’est juste un bisous, je le fais.

Y a-t-il un réalisateur avec lequel tu rêverais de travailler ? Il y en a un dont je suis fan, c’est Xavier Dolan. C’est un génie qui fait un film par an. C’est dingue ! Au cinéma, j’aime tout

Quand tu vois que l’actrice marocaine Loubna Abidar a été victime d’une violente agression au Maroc à cause de son rôle dans le film Much Loved, jugé incompatible avec

ce qui est actuel et ancré dans la vie de tous les jours. J’aime bien voir un film et me dire que cela pourrait être complètement vrai.

les mœurs de son pays, serais-tu capable de refuser un rôle parce que celui-ci pourrait déranger certaines mentalités ?

Quelles sont tes actrices de prédilection ?

Si artistiquement, j’adore le rôle, je m’en

En actrices actuelles, il y a Suzanne

fiche des gens, tant que cela respecte qui

Clément qui est d’ailleurs dans Mom-

je suis, mes valeurs et ce que je défends. Si

my et dans Laurence Anyways. Elle me

je suis en accord avec le personnage, je le

détraque vraiment tant elle est juste.

fais. C’est dur, ce qui est arrivé à Loubna

J’adore également Leïla Bekhti qui est

Abidar et c’est n’importe quoi ! C’est un

exceptionnelle dans Nous Trois Ou Rien.

peu comme pour nous lorsque l’affiche de

Il y aussi Audrey Tautou.

la pièce est sortie avant même qu’on ne la joue : il y avait deux ou trois abrutis qui faisaient des commentaires sur les « beurettes qui sont avec des noirs ». C’est idiot

Que peut-on te souhaiter pour l’avenir ?

parce qu’il y a vraiment des maghrébines

De continuer à faire du théâtre. S’il y a

qui sortent avec des noirs.

des projets cinématographiques, c’est cool aussi mais, pour l’instant, je suis super bien sur scène. Je n’ai pas joué la

38

Aimerais-tu faire du cinéma ?

pièce le soir des Césars et, le lendemain,

Très honnêtement, là, je suis dans la

m’avait vraiment manqué.

j’étais pressée de revenir parce que cela



THE BLINDTRUTH

STEREOPHONICS

Fort d’une discographie aux nombreux tubes, Stereophonics fait partie des références du rock britannique. Le groupe gallois poursuit actuellement sa tournée pour promouvoir son neuvième album studio, Keep The Village, paru le 11 Septembre 2015 et dont la piste White Lies a été récemment choisie comme quatrième single de l’opus avec un clip filmé en live. Auteur, compositeur et chanteur du groupe, Kelly Jones s’est prêté à notre Blind Truth avec amusement. par Dine Delcroix / Photos : Tom Oxley

Lorsque tu te regardes dans la glace le ma-

Une rockstar, c’est un peu cliché tandis

tin, que te dis-tu ?

qu’une star de film, c’est plus iconique

Mes cheveux sont un désastre ! La plupart des gens retiennent surtout le néga-

et classique. Nous avons puisé l’essentiel de là où nous venons, près de Londres.

tif lorsqu’ils se regardent dans le miroir. Moi, j’essaye de regarder ce qu’il y a de positif. Mon objectif principal, au matin, c’est de faire les choses en douceur parce que tout se bouscule dans ma tête.

Si tu avais une baguette magique, que changerais-tu ? Tu deviens celui que tu es en fonction des choses que tu traverses. Dans la vie, tu commets un bon nombre d’erreurs

À qui voulais-tu ressembler quand tu étais

que tu aimerais changer mais elles te

enfant ?

conduisent à d’autres endroits alors je

Quand j’étais gamin, j’aimais le kung-fu et le rock & roll alors j’aimais des gens comme Bruce Lee ou Angus Young du groupe AC/DC mais je n’ai jamais vraiment cherché à ressembler à quelqu’un en particulier. Toutefois, je pense que, lorsque nous avons commencé le groupe, nous voulions davantage ressembler à des stars de cinéma qu’à des stars du rock. 40

ne changerais rien du tout, même dans le parcours du groupe. Je vais garder cette baguette magique pour une occasion spéciale.



Si tu devais emporter une seule chose sur une

Que peut-on entendre comme message d’ac-

île déserte, laquelle serait-ce ?

cueil sur ta boite vocale téléphonique ?

Un four pour me permettre de cuisiner.

Je n’ai pas de message d’accueil personnalisé. Désolé de décevoir.

Quel super-héros aurais-tu aimé être ? Quand j’étais enfant, j’ai toujours aimé Batman même si j’ai réalisé qu’il était

Quand et comment as-tu cessé de croire au père Noël ?

un peu plus sombre que je ne le pen-

C’est une question intéressante parce

sais. Il a une bonne voiture, possède le

que j’ai une fille de 11 ans et une autre

meilleur costume et, même s’il porte un

de 9 ans. L’aînée est sur le point d’entrer

slip par dessus, c’est de la même couleur.

au collège et j’ai justement l’impression

En plus, quand il n’est pas en Batman,

qu’elle n’y croit plus. Moi, je ne me sou-

il passe son temps entouré de femmes à

viens pas du jour où j’ai arrêté de croire

boire toute la journée (rires).

au père Noël. C’était un homme si important ! Je crois que c’était en trouvant certains des jouets que je voulais dans un sac en plastique derrière la garde-robe de ma maman. C’était un indice. Je de-

Quel pouvoir magique aimerais-tu avoir ?

vais avoir 8 ans et j’étais déjà bien trop grand pour me faufiler dans la chambre

La téléportation pour pouvoir me dé-

de ma mère.

placer vers un endroit différent chaque nuit. Cela peut aider, surtout pendant une tournée. Que peux-tu me dire de négatif sur toi ? Je m’inquiète beaucoup trop mais j’esQuel prénom aurais tu-aimé porter ?

saie d’y remédier. Je le fais beaucoup moins qu’il y a 10 ans.

Hair Guy. J’ai des cheveux qui montent comme un troll. J’aurais porté ce nom si j’avais été un super-héros.



Et de positif ? J’essaie toujours d’être un homme meilleur

quand je voyageais et que j’allais dans les hôtels mais, depuis 5 ou 8 ans, je ne ressens plus cette solitude. Maintenant, j’apprécie mon propre espace et j’aime le calme.

Qui veux-tu épater le plus ? Je ne cherche pas à les épater mais j’aimerais être respecté par ma femme, mes enfants et ma famille. J’aime me mettre au défi mais je n’ai pas vraiment envie d’impressionner quelqu’un en particulier.

Que ferais-tu s’il ne te restait que 24 heures à vivre ? J’essaierais d’être avec les personnes qui comptent le plus pour moi pour le dire « au revoir ».

De quelle question aimerais-tu avoir la réponse ? « Y a-t-il une vie après la mort ? ».

Quel a été ton dernier instant de solitude ? J’avais l’habitude de me sentir seul 44

As-tu menti pendant cet entretien ? Non, tout est vrai.




MAXIME GASTEUIL Au

premier abord, Maxime Gasteuil semble être un énième provincial monté à Paris pour tenter sa chance dans l’humour mais ce jeune homme a bien plus à proposer que de simples anecdotes de parcours. Son histoire, il la raconte avec un rythme déchaîné, emmené par des personnages farfelus, des accents tordants et des interactions jubilatoires. Baptisé « Plaisir De Vivre », son premier spectacle se joue tous les Vendredis et Samedis au Sentier des Halles.

Interview : Dine Delcroix / Photos : Martin Lagardère


Tu as été repéré par le Jamel Comedy Club en 2013. Comment s’est déroulé ton passage au sein de cette émission ?

Tu te destinais à une carrière dans la viticulture œnologie avant de te consacrer à l’humour. Comment es-tu passé de l’un à l’autre ? Je crois que j’étais déjà préparé à faire de l’humour depuis longtemps. Mon père est très marrant et quand il raconte sa journée, il refait les personnages qu’il a pu croiser. C’est entré en moi pour ensuite se dissocier. J’étais prêt à le faire et j’avais une envie de folie mais mes parents avaient très peur et, en province, il faut avoir une sécurité d’emploi. La viticulture œnologie est le propre de la région Saint-Émilion et comme, après mes études, j’étais voué à rien car j’avais de très mauvaises notes, je suis rentré dans une école pour faire un BEP parce que la plupart de mes potes y allaient aussi. Peu après, j’ai rencontré une parisienne et ma relation avec elle a fait que je suis monté à Paris et j’ai tenté ma chance.

Il y a une scène ouverte au sein du Jamel Comedy Club qui s’appelle la DebJam et qui a lieu le Mardi soir. Ils te prennent en casting à partir d’une vidéo et, une fois que tu es sélectionné, tu passes 5 à 10 minutes sur leur plateau. Au fur et à mesure des passages, Jamel et son frère viennent repérer des jeunes talents pour les Marrakech du Rires et pour Canal+.

Ton humour est plutôt différent de ce qu’on peut trouver au Jamel Comedy Club… C’est ce que m’a dit Jamel Debbouze et il m’a conseillé de défendre et d’assumer ce que j’avais à proposer. J’étais stressé le premier soir puis j’ai été accepté par la troupe et tout s’est super bien passé. Le Jamel Comedy Club, c’est une bonne école pour l’improvisation avec un public juste, bienveillant et très varié.

Quels sont les humoristes que tu admirais lorsque tu étais plus jeune ? J’ai grandi avec Gad El Maleh, Jamel Debbouze... J’aime aussi Les Chevaliers du Fiel parce que c’est de l’humour de région qui fait que je me reconnais dans leurs personnages et dans tout ce qu’ils évoquent.

Tu as commencé à écrire tes sketchs avec ton co-auteur, Jonathan Demayo. Pensestu que tu aurais fini par passer à l’action si tu n’avais pas fait sa rencontre ? Quand tu viens de province, tu es complètement déconnecté et Jonathan Demayo a été un palier qui m’a épaulé sur des scènes ouvertes où je n’aurais pas eu le cran d’aller tout seul. De même, dans


VINCENT MACAIGNE



l’écriture, on s’est apporté mutuellement. Lui, il écrivait plutôt des pièces de théâtre tandis que moi, j’avais beaucoup d’histoires à raconter. Cette rencontre a été décisive parce que je n’arrêtais pas de repousser la date de ma première scène ouverte et que je me donnais des excuses. Jonathan m’a dit qu’il fallait le faire.

Non, ce n’est jamais de sa faute. Des fois, il ne faut pas s’entêter à garder une vanne qui n’a pas fonctionné.

Quelles sont les premières personnes sur lesquelles tu testes tes sketchs avant de les jouer ?

La salle où je joue programme un spectacle avant le mien et un autre après. Moi, mon spectacle est développé sur 1h30 et là, je joue environ 1h10 sans arriver à tout faire car je n’ai que cette tranchelà donc j’essaye d’envoyer un maximum et je n’ai pas envie de perdre le spectateur. Cela vient aussi de moi car je suis quelqu’un d’énergique. Je m’amuse et, comme le rire m’alimente, cela monte

Ma petite amie, mes amis, mon co-auteur ainsi que mon producteur. Mon producteur m’aide beaucoup car son frère est un humoriste très connu au Québec alors il a cette fibre et cette passion. Il aime son métier et il produit pas mal de spectacles d’humour.

Lorsque tu constates qu’une vanne ne fonctionne pas, que fais-tu ? Je fais une règle de trois, c’est à dire que j’utilise la vanne trois fois et si au bout de la troisième fois, elle ne fonctionne pas, j’arrête.

La réussite d’une vanne peut-elle dépendre du public présent ?

Ton premier spectacle, Plaisir de Vivre est toujours à l’affiche au Sentier des Halles. Comment as-tu choisi le rythme très soutenu du show ?

dans les excès (rires). Dans ton spectacle, tu évoques ton arrivée à la capitale et tes difficultés d’adaptation à la vie parisienne. Ce récit te semble-t-il indispensable à tout premier spectacle ? Je sais que c’est courant mais je le fais à ma manière. Je ne copie rien bien que le squelette soit déjà vu. J’aborde ma propre vie singulièrement avec ma vision à moi. J’ai commencé par des sketchs qui n’avaient pas de rapport avec mon arrivée à Paris et, au fur et à mesure que le décalge entre la vie en province et la vie à Paris se faisait sentir, j’ai voulu en parler. Les gens me suivent là-dedans car les parisiens me demandent d’en rajouter sur eux tandis que les provinciaux se


reconnaissent dans leur arrivée à Paris. Je ne parle pas que de cela dans le spectacle mais c’est important de se présenter, au début.

Malgré ses mauvais cotés, aimes-tu quand même la ville de Paris ? Oui, j’adore ! Je pense que ce spectacle est un peu une façon de désacraliser la chose. C’est vrai que les premières années, j’étais très dur avec Paris et avec la vie que j’y menais. J’ai mis longtemps à vivre de mon métier mais, maintenant, je ne peux plus m’en séparer même si j’aime aussi retourner en province.

faire des passages télévisés pour mes sketchs.

Tu imites aussi des voix et des accents dans ton spectacle. Te qualifierais-tu d’humoriste-imitateur ? C’est mon père qui m’a transmis ce truclà. J’arrive à m’approprier des gestes mais je ne me qualifierais pas d’imitateur. Pour les accents, ma mère est espagnole et j’ai aussi grandi avec des grands-parents qui parlaient un français-espagnol donc cet accent est redondant dans ma mémoire. Aussi, comme je suis de Saint-Émilion, l’accent du Sud y est un peu similaire à celui ce qu’on entend à Marseille ou à Biarritz, par exemple.

Quelle est la partie la moins autobiographique de ton spectacle ? La partie la moins autobiographie, c’est quand je parcours un petit peu la télévision. Je sais qu’on écrit beaucoup de projets pour la télévision et que c’est un business très dur à aborder mais on y voit aussi beaucoup de merdes. Il y également la partie musicale au début du show.

Quel est ton rapport à la télévision ? La télévision, c’est un des paliers les plus important pour se faire remarquer et qui permet de remplir des salles. Je sais toutefois que je ne serai jamais chroniqueur car ce n’est pas mon métier. Je préfère

En parlant d’imitations, que t’a fait Lana Del Rey pour mériter une telle caricature dans ton spectacle ? Rien et en plus, je l’adore (rires). Pour moi, elle a du talent et une image. J’ai beaucoup écouté son album mais quand je l’ai vue en interview au Grand Journal, je me suis demandé comment une fille aussi généreuse dans ses chansons peut être aussi hautaine. Elle s’en fout, on dirait qu’elle veut mourir, que tout est arrivé et qu’elle n’a plus envie de parler aux gens. Elle est aigrie et c’est cette manière de défendre son projet que j’ai voulu détourner dans mon spectacle.



Tu communiques fréquemment avec le public durant le show. Ces interactions sont-elles importantes pour toi ? Oui, c’est important. J’aimerais même jouer sur scène avec eux. J’ai appris à interagir avec le public dans un café-théâtre parisien où j’ai commencé et qui s’appelle le Café Oscar. J’ai joué un an làbas et c’est là où j’ai appris l’interaction parce que les gens viennent parfois sans savoir ce qu’ils vont voir. Ils sont plutôt là pour boire un verre ou manger donc ils ont le dos tournés pendant que tu joues et c’est là qu’il faut tramer. Quand j’ai commencé mes premières scènes, j’avais peur de parler au public mais j’ai appris à travailler avec lui. Aujourd’hui, je m’accorde des libertés, je me permets d’aller voir les gens et de m’asseoir à côté d’eux mais je ne rentre pas dans leur bulle.

Quelle est l’interaction la plus marquante que tu aies eue pendant que tu jouais ? C’était avec une femme qui est venue voir le spectacle et qui est tombée de son siège à force de rire. J’ai joué là-dessus pendant 20 minutes. J’ai un public qui aime participer et qui me suit dans mon délire, c’est assez cool.

Quel est le profil des personnes qui viennent te voir jouer ? J’ai de tout et j’en suis très content. J’ai des gens qui ont entre 18 et 30 ans,

d’autres entre 40 et 60 ans et j’ai aussi beaucoup de familles. Moi, je reste à la sortie et je salue les gens. Certains aiment rester pour me donner leurs observations et c’est toujours hyper gentil.

Qu’as-tu entendu de plus négatif à la fin d’une de tes représentations ? Une fois, un spectateur m’a dit que je disais trop de fois « enculé ». Cela m’a tellement touché que je lui ai répondu « Oui, je sais, j’en suis un ! » même si je n’aurais pas dû répondre. Il est vrai qu’au début, quand je jouais, ce mot était une béquille, une ponctuation, mais j’ai travaillé la-dessus et aujourd’hui, je le dis beaucoup moins.

Qu’est-ce qu’une bonne vanne ? Une bonne vanne, c’est du vécu. Tu ne peux pas faire rire les gens avec un truc que tu n’as pas intégré. Il y a des gens qui sont forts et qui se font écrire des vannes ou des histoires qu’ils arrivent à défendre parce qu’ils sont hyper bons interprètes. Moi, j’ai du mal. Il y a des trucs que mon co-auteur me propose mais que je ne pourrais pas défendre



SAMI BOUAJILA Tout

au long de sa carrière, Sami Bouajila a su s’imposer comme un des acteurs les plus remarquables du cinéma français en embrassant ses rôles avec détermination tout en côtoyant des réalisateurs de renom. Il est à l’affiche depuis le 30 mars 2016 de Good Luck Algeria, une comédie familiale signée Farid Bentoumi avec Franck Gastambide et Chiara Mastroianni et on le retrouvera dans le palpitant polar de Julien Leclercq, Braqueurs, en salles le 4 mai 2016.

Interview : Dine Delcroix / Photos : François Berthier




s’est tracé ainsi. Avant de pouvoir faire des comédies et même avant de pouvoir légitimer ma place dans les comédies aux yeux des critiques et du public, il a fallu un peu de temps.

Aviez-vous imaginé que vous incarneriez un jour des personnages prénommés Jean ou Philippe ? Comment est née chez vous la vocation d’acteur ? Sincèrement, ce n’était pas une vocation. Après, l’idée du théâtre est venue sans plus de velléité. Assez tôt, je me suis inscrit en section Art Dramatique quelque part dans un atelier à Grenoble. Je n’avais pas de motivations particulières si ce n’est celle de sortir de mon trou. Très vite, j’ai pu voir que cette place qu’offrait la scène me donnait du sens et que c’était un lieu où je pouvais prendre la parole. Après, j’ai fait les concours des écoles nationales, je suis rentré dans l’une d’elles et, de fil en aiguille, après une bonne formation théâtrale, je suis arrivé au cinéma avec un concours de circonstances.

L’imaginer, pas forcément. Après, c’était nécessaire pour nous, acteurs d’origine maghrébine, de pouvoir d’une façon ou d’une autre, sortir d’un stéréotype qui était comme des peaux de bananes sur notre parcours.

Ce parcours s’est-il fait dans la souffrance ? Pas forcément dans la souffrance. C’était un piège qu’il fallait éviter et puis, c’était un moment de prise de conscience pour chacun d’entre nous quand on voyait nos collègues qui n’étaient pas d’origine maghrébine avancer avec évidence. Nous aussi, nous pouvions jouer des choses différentes mais il fallait pouvoir récupérer les rôles et il fallait qu’un auteur se le dise instinctivement en écrivant. Après, les comiques sont arrivés : Jamel Debbouze, Gad El Maleh…

Au cinéma comme à la télévision et au théâtre, vous avez souvent eu des rôles dramatiques. Est-ce délibéré de votre part ?

Pensez-vous que ces humoristes ont contribué

Cela s’est inscrit de cette manière. Quand je démarrais, c’est le cinéma d’auteur qui m’ouvrait ses portes et, bien souvent, pour des rôles ou des thèmes assez dramatiques. Et, en me confirmant dans un rôle dramatique puis dans un autre, il y a quelque chose qui fait qu’un chemin

à faire évoluer la condition des acteurs d’origine maghrébine ? Non parce qu’ils avaient un espace d’une liberté totale pour pouvoir s’exprimer sans censure. Stéréotype ou pas, cela marchait. Pour les acteurs, c’était diffé-


rent. Un acteur s’inscrit dans le désir des autres, d’un spectateur, d’un auteur…

Après la remise de ce prix, Jacques Chirac, alors Président de la République à l’époque, avait adressé ses félicitations à l’équipe du film. Comment avez-vous vécu ce message

Regrettez-vous le temps qu’il vous a fallu attendre pour vous inscrire dans le désir des autres sans étiquettes ? Non, cela ne sert à rien. Il fallait s’adapter.

En 2006, vous avez reçu le Prix d’interprétation masculine au Festival de Cannes pour le film Indigènes. Cette récompense a-t-elle apporté un changement radical à votre carrière ? En ce me qui me concerne, cela ne peut pas être radical. Il y a une continuité. Après, il y a eu effectivement un changement dans la mesure où il y a une considération de mon travail d’acteur qui s’est faite mais c’est une suite cohérente.

Avez-vous arrêté de faire castings depuis que vous avez reçu ce prix, par exemple ? Je ne fais pas de castings depuis longtemps. Cela s’est peut-être confirmé

présidentiel ? C’était troublant. On a fait la chose qui était dans l’inconscient collectif de tous : mûre, prête, à l’instant t… Et bingo ! Déjà, la projet qu’avait amené Rachid Bouchareb était juste génial. Le tournage était euphorique. Il y a eu ensuite la sélection cannoise, le prix, le succès publique quand le film est sorti, les Oscars, le Président qui sort un décret et qui nous félicite… On s’est dit qu’on avait fait quelque chose. Cependant, aucun de nous n’avait le melon et c’était assez agréable.

Quel regard portez-vous sur les festivals ? J’adore les festivals ! C’est tellement surréaliste, un festival. C’est une bulle avec quelque chose de surfait. J’adore y aller avec un film fort, un rôle fort où les choses sont faites et avec une assise sur mon travail. Indépendamment de cela, j’aime bien l’euphorie qu’il y a dans les festivals, l’énergie qui s’en dégage, les rencontres. C’est un terrain de jeu.

avec Indigènes mais, déjà, Drôle De Félix avait été écrit pour moi. Il y a eu aussi le film d’Abdellatif Kechiche ou encore celui d’Arnaud Desplechin… Il ne faut toutefois pas faire de raccourcis : ce sont des auteurs que je rencontrais de manière évidente et qui venaient à moi. Il y a une cohérence des les rôles qui me sont proposés, encore une fois. Mon métier, j’en ai fait un mode de vie.

Comprenez-vous

toujours

le

choix

de

la Palme d’Or au Festival de Cannes ? Des fois, il y a des choses qui m’échappent. Moi, j’ai été jury dans des festivals et, parfois, pour des raisons de conflits et pas forcément d’intérêt, des formes de compromis se font de par l’aspect démocratique du jury ou du vote et le film qui



doit s’imposer d’évidence disparaît au profit d’un consensus. Cela explique parfois certaines surprises. Il y a toutefois des palmes auxquelles on ne peut adhérer pour des raisons artistiques. À l’inverse, il y a des palmes que je trouve fabuleuses et méritées. Je pense d’emblée à des films comme « Paris Texas », « Pulp Fiction », « La Leçon De Piano » ou encore « Barton Fink », par exemple. Une œuvre n’est pas obligée de correspondre aux critères de notre société qui se veut efficace, dynamique, pertinente… C’est bien de se laisser déstabiliser, entraîner, déranger par un rythme, un point de vue, une écriture ou un sujet qui nous gène.

qu’en embrassant le rôle et en m’impliquant dans les situations. J’aime bien arriver nourri de ce que je dois raconter et, avec le metteur en scène et les autres acteurs, fouiller, chercher, donner.

Avez-vous des exigences particulières sur un tournage ? Hormis tout ce que je viens de vous dire, aucune autre (rires). Sur un plateau, j’attends qu’il y ait non seulement un partage mais aussi un voyage qui se fait.

Y a-t-il un genre de rôles que vous ne jouerez Vous n’hésitez pas à vous transformer physiquement pour les personnages que vous incarnez. Est-ce important, pour vous, d’embrasser physiquement un rôle ? Bien sûr que c’est important et, au-delà de ce fait, cela fait partie du métier d’acteur. On attend d’un metteur en scène qu’il ait déjà un scénario qui sous-entend qu’il y a un point de vue, que ce point de vue se confirme quand il fait le choix de ses prises, de ses cadres et de sa direction d’acteurs. On ne va pas s’étonner que ce metteur en scène ait posé sa caméra au bon endroit et qu’il ait dirigé ses acteurs. De mon côté, perdre du poids si le personnage a fait une grève de la faim en prison ou aller chercher comment parle un personnage, cela fait partie du boulot. Je suis payé pour cela. C’est un respect du travail. Certains ne le font pas, tant mieux ou tant pis. D’autres arrivent même à cartonner sans grand effort et tant mieux pour eux. Pour ma part, je n’envisage pas les choses autrement

jamais ? Le porno (rires). Il doit y en avoir mais je n’ai jamais abordé le métier sous cet angle. Le naturalisme poussé à l’excès me gène. Ce cinéma d’auteur qui se veut naturaliste et dans lequel on respire le quotidien et la réalité ne m’inspire pas vraiment et je ne m’y retrouve pas forcément non plus.

Depuis le 30 Mars 2016, vous êtes à l’affiche du long métrage Good Luck Algeria dans lequel vous incarnez le sportif Noureddine Maurice Bentoumi, frère du réalisateur du film, Farid Bentoumi. Comment abordez-vous un rôle lorsque le personnage n’est pas fictif ? Je l’aborde comme un personnage de fiction et c’est le meilleur moyen de servir l’œuvre. On me posait cette question sur Omar M’a Tuer car il y a avait déjà




un mythe dans l’histoire d’Omar Raddad donc, volontairement, j’ai pris de la distance avec Omar lui-même parce que je voulais le réinventer via mon metteur en scène, Roschdy Zem. Pour Good Luck Algeria, il n’y a pas le poids du fait divers qu’avait eu Omar. Le personnage de Noureddine que j’incarne est quelqu’un de très accessible, de simple. Avec lui et son frère, Farid Bentoumi, nous avons la même éducation, nous sommes de la même génération, nous venons du même coin, c’est à dire que j’ai grandi dans les montagnes de la région Rhône-Alpes et eux, à Albertville, juste à côté. Il y avait une évidence et cela s’est fait simplement.

Une ressemblance physique entre Noureddine Maurice Bentoumi et vous a été soulignée. La voyez-vous ? Oui, il y a une vraie ressemblance physique entre nous. Elle était flagrante.

Cette ressemblance physique a-t-elle favorisé votre acceptation du rôle ? Non. Le rôle, il fallait y entrer physiquement. C’est un homme qui a un certain âge, qui a fait du sport dans sa jeunesse mais cela fait une bonne dizaine d’années qu’il n’en fait plus et qui, pour x raison, décide de se qualifier aux Jeux Olympiques pour une nation pour laquelle les minimas sont, certes, un peu plus bas, mais il y avait quand-même une performance à sortir. La clé était dans l’investissement physique, dans sa préparation, sa détermination, son acharnement, la foi qu’il a en lui, en le vie et le sens qu’il a donné à ce challenge.

Comment s’est passé le tournage du film à la neige ? Le tournage était génial, d’abord parce qu’on a à faire à un chef d’orchestre généreux, optimiste, talentueux, curieux, qui aime son histoire au-delà de ce qu’on peut imaginer, qui fait un retour à la performance de son frère, qui donne du sens à tout cela, même d’un point de vue familial, qui le fait avec une belle intelligence, qui a un esprit de troupe. Le film était un vrai film de troupe. On courait après la neige car, cet hiver-là, il faisait beau. D’une contrainte, on a fait un atout. On est parti d’abord dans le Vercors mais il n’y avait pas de neige. On a ensuite foncé en Italie et on y a filmé ce qu’on pouvait mais il n’y avait plus de neige. Puis, on a fini en Autriche où, enfin, on a trouvé la neige. C’était magique !

Aviez-vous déjà skié avant ce film ? Je faisais un peu de ski de fond mais pas au point d’avoir l’attitude d’un champion. Peu avant le tournage, j’ai travaillé avec une coach pour trouver l’attitude et essayer d’être crédible.

Quelques mots sur Bouchakor Chakor Djaltia qui campe votre père dans le film ? C’est une leçon de vie, ce monsieur. C’est la star du film de Farid Bentoumi. Il n’est pas du tout acteur. Il a 82 ans, une énergie de folie, un vécu, une intelligence, une douceur, beaucoup d’humour… Un gars formidable ! Farid Bentoumi l’a rencontré après avoir casté un peu partout en France puis, son directeur de casting a repéré ce monsieur dans une association.


Il a été extraordinaire !

merais adapter. Il y a des romans forts dont le sujet parle. Je ne sais pas...

En tant qu’acteur professionnel, comment travaille-t-on face à un acteur non-pro-

En 2013, vous faisiez votre retour au théâtre

fessionnel ?

dans la pièce Ring d’Eléonore Confino aux

Il faut rester vigilant parce que, tout comme les enfants ou les animaux, ce sont des gens qui sont criants de vérité, qui peuvent parfois être à côté sans être faux pour autant mais, quand ils sont dans la situation, c’est difficile de faire mieux parce qu’ils sont juste vrais et la caméra adore. Si un bon metteur en scène sait cadrer son non-acteur dans une situation, le gars explose et c’est ce qui s’est passé avec Bouchakor. On avait de la complicité. Tout le monde l’adorait ! Il était à mourir de rires et il était toujours avec nous.

Avez-vous envie de faire de la réalisation comme beaucoup de vos camarades dans ce milieu ? J’en ai très envie et j’y pense. Après, il faut trouver le sujet. Pour être honnête, j’ai déjà fait deux tentatives. Pour la première, le projet était trop ambitieux et, pour la seconde, je n’ai pas réussi à financer le projet et je suis reparti sur d’autres tournages.

Si deviez réaliser, aimeriez-vous adapter des histoires ou porter à l’écran vos propres idées ? Moi, je me dis que c’est bien qu’un premier film vienne de soi. Après, je lis pas mal et il y a beaucoup de trucs que j’ai-

côtés d’Audrey Dana. Vous reverra-t-on sur les planches, à nouveau ? Il faut trouver les bons textes, les bons projets, les bons partenaires, les bons théâtre et puis après, cela prend une saison. Je vais tourner encore un peu mais j’ai un monologue magnifique d’Émilie Frèche pour lequel j’ai demandé à Simon Abkarian de me mettre en scène.

De quoi avez-vous envie pour votre carrière, aujourd’hui ? De faire de belles rencontres, d’avoir de beaux projets et d’incarner de beaux personnages.



LAURA SATANA Par Dine Delcroix / Photos : MARTIN LAGARDERE

Grâce

à son style propre, Laura Satana s’est affirmée comme artiste tatoueuse, collaborant avec des marques prestigieuses telles que Make Up Forever ou encore Nike. Elle était l’une des personnalités phares lors du dernier Mondial du Tatouage qui s’est tenu du 4 au 5 mars 2016 à la Grande Halle de la Villette sous la houlette de son organisateur, Tin­Tin. La marginale optimiste nous raconte ses premières fois...



Premier souvenir ?

Premier amour ?

Je pense que c’est l’arrivée de mon petit

Le première fois que je suis tombée amou-

frère quand j’avais 4 ans. Je me souviens

reuse, je devais avoir 18 ans. Je suis restée

de mes parents arrivant avec le couffin à la

amoureuse quelques années et cela m’a

maison et j’étais très contente.

fait quelque chose. Je suis une passionnée alors quand j’aime, j’aime !

Première voiture ? Je n’ai pas le permis mais j’ai eu un vieux scooter Vespa vers l’âge de 20 ans. Je l’avais

Premier rapport sexuel ? Joker !

retapé avec un pote et c’était sympa. Premier chagrin d’amour ? Premier métier que tu voulais faire ? Tatoueuse. J’ai toujours aimé tout ce qui

J’avoue avoir tendance à oublier les trucs négatifs.

est un peu décalé et comme j’avais la fibre du dessin, le tatouage s’est présenté tout naturellement à moi. Il y avait le côté marginal mais aussi le côté dessin et il n’y avait

Premier animal de compagnie ?

pas besoin de beaucoup d’argent pour se

J’ai eu pas mal d’animaux de compagnie

lancer à l’époque. Pour moi tout était com-

quand j’étais petite, notamment une tortue

biné pour que j’aille directement vers cette

et des hamsters mais je ne me rappelle pas

voie-là. Je ne savais pas comment y accéder

du premier. À l’heure actuelle, je vis avec

alors j’ai pris le temps de me renseigner et,

un petit carlin femelle qui s’appelle Iman

vers 17 ans, je savais exactement comment

en hommage à la femme de David Bowie.

j’allais me débrouiller.

J’adore ce prénom !

Premier baiser ?

Premier disque acheté ?

Je devais avoir 7 ou 8 ans, c’était à la petite

C’était Prince et il me semble que c’était le

école mais je ne me rappelle plus du pré-

single Kiss. Quand j’étais gamine, c’était ou

nom du garçon (rires).

Prince ou Michael Jackson et moi, j’étais Prince.

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Premier concert ? C’était pour le festival Monsters of Rock. J’étais allée voir Suicidial Tendencies et Metallica en plein air à l’Hippodrome de Vincennes. Je devais avoir 15 ans et c’était

guais alors que ce n’était pas vrai. C’était juste parce qu’il trouvait que j’étais un peu dans la lune. Heureusement pour moi, mes parents avaient confiance en moi. C’était notre professeur principal, en plus.

génial. Entre les deux groupes, il y avait The Cult qui étaient nuls à chier mais sinon, c’était formidable. J’étais rentrée couverte de boue (rires).

Premier prof adoré ? Un professeur d’anglais au collège qui était le sosie d’Eddie Murphy. Il avait autant d’humour qu’il savait être autoritaire.

Premier film culte ? « Blade Runner ». C’est resté mon film préféré et je me suis d’ailleurs fait tatouer une phrase tirée du film.

Il avait su nous passioner et il allait un petit peu plus loin que le programme scolaire. Par exemple, il nous avait enseigné l’Histoire du peuple noir et il nous avait appris des chansons de Martin Luther King. J’avais trouvé cela audacieux et super intéressant. Il était impliqué dans ce qu’il

Premier livre culte ?

faisait. J’aimais beaucoup ce professeur et je crois que je l’ai eu deux ou trois ans de

L’Assommoir par Émile Zola. J’aime la ma-

suite.

nière dont Émile Zola y décrit le Paris de l’époque. C’était beau de pouvoir imaginer le vieux Paris.

Premier choc dans la vie ? Quand j’ai réalisé qu’on me collait une éti-

Premier prof détesté ?

quette « Femme » sur le dos. Il y a des choses qu’on me refusait en tant que femme. Moi,

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J’ai eu un professeur de français un peu

on m’a éduquée comme une personne et

bizarre quand j’étais au lycée. Ce n’est pas

non pas comme une femme. J’ai fait en

que je le détestais mais, comme il était bi-

sorte de ne pas trop en pâtir mais je l’ai

zarre, je ne le sentais pas trop. Il était un

senti et cela a été comme une grosse désil-

peu pédophile sur les bords, il embrassait

lusion dans ma vie. Cela s’est notamment

les élèves sur la bouche, il voulait qu’on le

ressenti dans mon métier dans la mesure

tutoie et moi, je ne rentrais pas dans son

où on s’imagine que, parce que je suis une

délire. Du coup, il m’avait faite convoquer

femme, je fais moins mal ou je fais des mo-

par le conseiller principal d’éducation et il

tifs un peu mielleux avec de la rondeur etc.

avait raconté à mes parents que je me dro-

Pour moi, le tatouage n’a pas de genre.



Premier voyage ?

Premier vote ?

J’ai eu la chance de faire quelques voyages

Je ne vote pas, je suis anarchiste, j’exprime

en famille mais mon premier voyage seule,

juste mon mécontentement. Si le vote pou-

c’était quand je suis partie au Mexique en

vait vraiment changer quelque chose, il se-

2008. C’était un rêve depuis longtemps

rait interdit par la loi. Si le vote était réel,

parce que j’ai toujours été fascinée par la

j’y prendrais part mais ce n’est que de la

culture mexicaine en termes d’arts et de

poudre aux yeux et je ne vois pas pourquoi

nourritures. À la base, je devais rejoindre

je prendrais part à ce mensonge énorme.

un pote à Tijuana qui était censé m’attendre

Je suis pour la révolution (rires).

sur place sauf qu’il n’y était pas donc j’ai dû passer une semaine toute seule là-bas (rires). Ensuite, j’ai retrouvé des tatoueurs sur place qui ont été super cool et qui

Premier sentiment de fierté ?

m’ont fait découvrir la ville. C’était dingue

Quand j’ai commencé à me sentir recon-

parce que la ville est très dangereuse et les

nue dans mon métier. Je parle bien de re-

faits divers quotidiens y sont incroyables !

connaissance et non de notoriété. À ce moment-là, je me suis dit que j’étais allée plus loin que je ce que je voulais et j’ai

Premier péché ?

été très fière de moi. Cela a pris un peu

Les essais de drogues quand j’étais ado-

ouvert ma boutique en 2003, j’ai eu comme

lescente mais pas des drogues trop dures.

un déchaînement de la presse autour de

Rentrer chez mes parents et leur faire

moi et des tatoueurs que j’admirais depuis

croire que j’avais pris la fumée du barbe-

des années m’ont dit que je faisais du bon

cue dans les yeux... (rires).

boulot. À la base, je voulais juste gagner

moins d’une dizaine d’année. Quand j’ai

ma vie en faisant du bon boulot et je ne comptais pas vraiment sur cette reconnaisPremier job ? À l’époque où j’étais apprentie dans le tatouage, j’ai été intérimaire et j’ai fait un peu de tout : de la manutention, de la vente de robes de mariée, de l’accueil dans une agence matrimoniale, de la vente de téléphone par téléphone...

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sance, peut-être par manque de confiance en moi. Je n’ai jamais couru après la gloire mais cette reconnaissance m’a fait du bien.



LA FILLE QUI REND BLIND

Par : Dine Delcroix / Photos : François Berthier Repérée dans les série La Vie Est À Nous en 2009 sur TF1, Juliette Dol est une actrice française qui n’a pas fini de surprendre au théâtre comme à la télévision. Elle est actuellement au casting de Section Zéro, la nouvelle série évènement de Canal+ avec Ola Rapace, Pascal Greggory et Tchéky Karyo.


JULIETTE DOL

maquillage

: Francesco Spadaro


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