TheBlindMagazine#3

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INTERVIEWS EXCLUSIVES ÉLODIE FRÉGÉ, THOMAS AZIER, ORCHESTRAL MANOEUVRES IN THE DARK, PASSI, OK BONNIE, NINA MEURISSE, HAIM, CHRISTOPHE MAÉ, THE STRYPES, EMILY WELLS, PAULINE...

Portfolio Cannes 2013

LEA SEYDOUX

JUIN 2013 #3 ISSUE

triomphe à Cannes

Léa porte une robe Dolce & Gabbana

ANALYSE SOFIA COPPOLA + Audrey FLEUROT + LES PREMIERES FOIS DE MICKY GREEN+ ETHAN HAWKE/JULIE DELPY, DUO ROMANTIQUE+LE BLIND TEST DE KARIM AIT M’HAND


CONTRIBUTEURS

MAXIME STANGE

PAULINE DARLEY

Photographe auto-didacte, Maxime est passionné par le portrait et la photo de mode. Recruté en agence de photos à ses débuts, il a été touche-à-tout durant 3 ans, et est depuis peu, indépendant à Paris.

Photographe à temps plein sur Paris depuis 2010, Pauline a suivi des études en communication et effectué plusieurs stages vers le monde de l’image. Elle aime créer avec l’humain et composer en mode et portraits.

FRANCOIS CASTRILLO

AURIANE BESSON

Rédacteur mode et styliste photo, passionné par la mode et l’écriture, il fonde L’Insolent, magazine international de mode mixte en 2011. Il continue à travailler en freelance, afin de rencontrer des personnes aussi passionnées que lui qui lui permettent de confronter son style à différents univers.

Travaillant dans la com’ et les RP, Auriane suit de près le monde des médias. Forte de son expérience notamment au pôle femme de Mondadori (Grazia, Biba…) elle nous livre chaque mois les dernières news mode, beauté et culture les plus pertinentes !

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EDITO #3 Ce mois-ci TheBlindMagazine revient sur Cannes et ses meilleurs moments avec des photos exclusives et un portrait d’une des grandes gagnantes du Festival : Léa Seydoux. Solaire, fraîche et so chic, on a décidé de lui consacrer notre couverture, tellement Léa nous a touché et correspond à l’esprit Blind ! Nous sommes aussi allés à la rencontre d’Elodie Frégé. On a également disséqué le nouveau film de Sofia Coppola, la surdouée du cinéma indé américain ; et bien sûr retrouvez tous nos rendez-vous habituels : nos interviews (Passi, Christophe Maé, The Strypes., OK Bonnie...), nos reportages, portraits, éditos mode, nos news culture et beauté sur toutes les dernières sorties à ne surtout pas louper, histoire de vous évader quelques instants avant les vacances! Merci d’être aussi nombreux déjà à nous suivre ! Bonne lecture à tous L’équipe TheBlindMagazine facebook.com/Theblindmagazine twitter.com/Blind_Magazine FONDATEUR, DIRECTEUR DE LA REDACTION, REDACTEUR EN CHEF CINEMA & DIRECTEUR DE LA CREATION FR A NCOIS BERTHIER REDACTEUR EN CHEF, REDACTEUR EN CHEF MUSIQUE DINE DELCROIX RÉDACTRICE EN CHEF BEAUTE & NEWS AUR IA NE BESSON JOUR NALISTES Auriane Besson Dine Delcroix, Riyad Cairat, Léona Perrot, Thomas Mafrouche, Justin Kwedi, Marie Jimenez, Martin Lagardère, Audrey Jehanno. Maite Celayeta PHOTOGR APHES Pauline Darley, François Berthier, Pauline Darley, Martin Lagardère, Vincent Lignier, Maxime Stange, Wallendorff, Rita Zimmermann. CONTACT R EDACTION/PUB theblindmagazine@gmail.com

The BlindMagazine est édité par la société Ten Feet Under / Tous les textes et photos sont soumis par leurs auteurs qui acceptent leur publication, et n’engagent que leur responsabilité.


SOMMAIRE

JUIN 2013 52

72

6 Blind Beauty 14 Blind News

52 Thomas Azier 60 The Strypes

22 News Mode

64 L’instant Live

28 New Faces

66 EN COUVERTURE Léa Seydoux

32 Edito beauté 40 DECOUVERTE OK Bonnie 44 Haim

4

72 Portfolio Cannes 92 Pauline 96 Emily Wells


166

100

100 Christophe Maé 110 Orchestral Manoeuvre In The Dark 118 Sofia Coppola 124 Passi

158 Blind Test Karim Ait M’Hand 162 Interview 1re fois Micky Green 166 MODE

130 Nina Meurisse

200 La fille qui rend Blind Audrey Fleurot

136 Ethan Hawke/Julie Delpy

202 Blind Trip

144 Elodie Frégé

210 Chronique CD

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BLIND BEAUTY Le Gloss Flash Lacquer Giorgio ARMANI A l’initiative des plus grandes griffes, les gloss refont leur apparition ces derniers mois. Si nous devions en sélectionner un, ce serait le Gloss Flash Lacquer de Giorgio Armani pour son raffinement et sa qualité. L’application, la texture, la tenue, et même le design, tout est réuni pour faire de ce gloss le produit luxe de cet été ! Flash Lacquer est issu de la combinaison d’un gel « velours » et d’huiles adoucissantes qui assure une douceur extrême à l’application et un confort longue durée. Le résultat est précis, le volume des lèvres est sublimé. Une collection de 32 teintes brillantes est imaginée qui va des pigments laqués, très sophistiqués à des teintes plus fraîches autour de roses délicats saturés de fines nacre. Le gloss-phare de cette collection est le Flash Lacquer n°523, le nouveau fuchsia Armani. L’alliance du plus haut degré de brillance, d’une tenue longue durée et de la couleur à l’état pur. Gloss Flash Lacquer Cristal Shine - GIORGIO ARMANI 30€ Disponible à partir de juin 2013 dans les stands Giorgio Armani des grands magasins et sur www.sephora.fr www.giorgioarmanibeauty.com

Le Multiple Puerto Vallarta NARS Rapide et facile à appliquer, ce stick multifonctions à la teinte mandarine est à utiliser sur les parties du visage les plus exposées au soleil. Sa formule unique crème-poudre offre un effet bonnemine, illumine le contour du visage et crée des accents chatoyants sur les paupières, et les pommettes jusqu’aux tempes. A appliquer de préférence au doigt pour un résultat parfait. Enrichi en vitamine E et en l’huile d’açaï pour des avantages antioxydants, il peut s’utiliser seul, sur le fond de teint ou sur la poudre. Pour toutes les carnations ! Le Multiple Puerto Vallarta - NARS 41,00 € La nouvelle collection Eté 2013 Nars est disponible en exclusivité chez Sephora et sur www.sephora.fr

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BLIND BEAUTY Le Super Stick Solaire SYSLEY Pour l’été, Sisley enrichit sa gamme solaire d’un nouveau soin : un stick solaire destiné aux zones sensibles du visage comme les pommettes, le contour des yeux, le nez et le front. Doté d’un indice SPF 30 et résistant à l’eau et la sueur, ce stick se décline en 2 versions : incolore ou teinté, pour celles qui souhaitent un effet blush bonne mine. Un format poche à emporter partout avec nous et à consommer sans modération pour une protection optimale et une action hydratante grâce à l’huile de Camélia, au beurre de mangue et de karité qui composent ce produit. Facile et rapide à appliquer, ce stick apporte un fini mat très appréciable. C’est le soin haute protection de l’été ! Super Stick Solaire zones sensibles, SPF 30 - SISLEY Prix public indicatif : 80€ Disponible depuis avril 2013 www.sisley-paris.com

BB Crème All-in-one Perfecteur de teint YVES SAINT LAURENT YSL complète sa gamme de produits pros Top Secrets (des produits hybrides entre maquillage et soin) avec des nouveautés pour la peau ultra élaborées. Nous avons testé la BB crème All-in-one perfecteur de teint, la première BB crème d’YSL. Une texture fraîche et légère, elle corrige, uniformise et hydrate instantanément la peau pour un effet très nude. On aime l’unicité qu’elle offre au teint, le mélange entre nacres et pigments qui corrige imperfections et irrégularités, sans sensation de matière pour se confondre parfaitement avec la peau. Une crème qui agit comme un voile protecteur transparent des agressions quotidiennes et des UVA/UVB. A mettre avec ou sans fond de teint, si l’on veut ou non un effet « no make-up ». All-in-one BB crème Perfecteur de teint – YVES SAINT LAURENT 40ml, 45€ 3 nuances (claire, medium ou foncée) Disponible sur www.ysl-parfums.fr et dans les parfumeries agréées

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BLIND BEAUTY La collection Summer Make-Up Splendours CLARINS

Nouvelle saison, nouveaux produits. Clarins lance une gamme make-up en édition limitée, Splendours. Une collection ultra solaire, des parfums délicieux, des couleurs chaudes, des particules irisées et des textures innovantes pour une peau et un teint illuminé. D’abord la Palette Yeux Ombres et Liner propose des fards à paupières aux couleurs brillantes et chatoyantes. Une harmonie de trois ors (or cuivré, or enlumineur clair et or rose satiné) pour illuminer le regard. Un ombre liner et un eyeliner prune pour le réchauffer et le souligner intensément. Hautement concentrés en pigments minéraux, ces fards assurent un résultat maquillage longue durée. Pour un teint parfaitement hâlé, la Poudre Soleil Visage apporte une harmonie de teintes universelles qui réchauffe instantanément la peau d’un hâle naturel et rehausse le bronzage : un brun chaud effet « terre de soleil » et un cuivré. Et au cœur de la poudre, une pièce couleur or pour un effet lumière.


BLIND BEAUTY Le Lisse Minute Baume Cristal est notre coup de cœur de la collection. Il s’agit d’un mix entre le baume hydratant et le rouge à lèvre. Un film transparent ultra hydratant à base d’huile gélifiée et de vitamine E offre une douceur et une brillance sur les lèvres très appréciable. Cette texture en transparence enveloppe la couleur au cœur du bâton (rose, corail, prune aux reflets or ou rose bleuté).

Enfin, l’Huile Corps Irisée complète judicieusement cette collection. On sublime notre peau d’un éclat ambré avec cette huile gorgée de nacres dorées à base d’huile de noisette et d’huiles essentielles de mandarine et de pamplemousse, sans effet gras. A appliquer sur les bras, les jambes ou le décolleté après un bain de soleil.

Splendours Summer Make-Up Collection - CLARINS Splendours Poudre Soleil Visage - 45,00 € Splendours Huile Corps Irisée - 100 ml, 39,00 € Splendours Palette Yeux Ombres et Liner - 43,10 € Lisse Minute Baume Cristal - 21,80 € En édition limitée, disponible jusqu’au 26 août dans tous les points de vente Clarins et en parfumerie.

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BLIND BEAUTY Jambes Divines CAUDALIE Pour toutes celles qui appréhendent les premières jupes en ce début d’été, Caudalie vient de sortir une crème teintée qui hydrate et habille nos jambes d’un hâle naturel, doré et satiné. Cette crème à l’application ultra rapide nous donne une seconde peau indétectable au toucher car non grasse. On l’applique avant de s’habiller, on laisse sécher quelques secondes et on l’élimine à l’eau sous la douche, dès que l’on n’en veut plus. Contrairement aux autobronzants où l’on n’a pas le droit à l’erreur, c’est le bronzage sans engagement et une réussite à tous les coups ! Une alternative naturelle (sans parabènes) et un parfum à base de vanille, musc et rose simplement divin ! Jambes Divines, Fluide Teinté Corps - CAUDALIE 100ml, 24,50€, Disponible en pharmacies, parapharmacies et sur www.caudalie.com

Gel Lift Vertige KERTASTASE Rehaussement, souplesse, douceur et brillance, enfin un volumateur qui comble nos attentes ! La formule de ce gel fluide qui décolle les racines sans effet « carton » est notre produit coup de cœur parmi les onze nouveautés de la gamme « Coiffage Couture » de Kérastase. Une texture légère, fondante, non desséchante pour un volume assuré. Petit conseil pro de Luigi Murenu, coiffeur star des backstages, qui a inspiré cette collection : « Avant le séchage, une fois les cheveux essorés, répartir par toutes petites touches et soulever les racines à l’aide d’une brosse ou d’un peigne lors du séchage. » A vous de jouer ! Gel Lift Vertige – KERTASTASE 75ml, 27 € Disponible dans les salons agréés Kérastase et sur www.kerastase.fr


BLIND BEAUTY La collection Voyage de l’Art du Soin DIPTYQUE Diptyque agrandit sa collection voyage avec un coffret de l’Art du Soin. Quatre produits conçus comme un itinéraire sensoriel, du bassin méditerranéen aux portes de l’Orient, parfait pour vos escapades estivales. Une pommade exfoliante, un gel lavant revigorant, un lait frais et un baume généreux au format 50ml (30ml pour le baume), pour de vraies vacances bienfaitrices où l’on n’oublie pas de se bichonner. La collection Voyage de l’Art du Soin - DIPTYQUE 39€ Dans les points de ventes Diptyque, au Printemps Haussmann, aux Galeries Lafayette à Paris et sur www.diptyqueparis.com

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La rubrique de Marie La Cour des Senteurs remet l’art du parfum français à l’honneur La Cour des Senteurs, à Versailles, redonne toutes ses lettres de noblesse à l’Excellence de la parfumerie française. Ce lieu inédit, inauguré il y a peu, réunit luxe, savoir-faire, fragrances rares et matières premières. Le Député Maire de Versailles, à l’initiative de ce projet original, offre une promenade poly-sensorielle, esthétique et culturelle, qui relie le Château au Quartier Saint Louis, en accès libre et gratuit. En mémoire de tous les artisans de la Cour, qui rivalisaient d’ingéniosité pour créer fragrances, gants et éventails parfumés, quatre Maisons de luxe françaises se sont réunies, au cœur d’une petite cour pavée. A l’entrée, une Maison des Parfums, à l’apparence d’un cabinet de curiosités moderne, retrace les grandes dates de l’Histoire. Des films explicatifs, des diffuseurs olfactifs, des coffrets à objets, ainsi que des jeux de lumière et une fontaine à eau parfumée à la fleur d’oranger, éveillent les sens et la curiosité. La Maison Guerlain a revêtu ses habits de lumière : boiseries sculptées, lustre fastueux, pièces d’exception, Collections Exclusives et découverte olfactive sur céramiques ; le parfumeur Thierry Wasser a même imaginé une fragrance inédite. Spécialement créée pour la Cour des Senteurs, la Maison Parfumeur depuis 1828, rend hommage à Marie-Antoinette, en sublimant sa fleur préférée, le jasmin. Lenôtre a lui aussi relevé le défi haut la main, en travaillant avec brio cette matière première, en exclusivité dans un macaron pailleté. L’odorat et le goût en émoi, la visite se poursuit avec la Maison Fabre, qui lance pour l’occasion, sa première collection de gants parfumés.

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BLIND BEAUTY Un petit pot de talc, à la senteur bouquet fleuri, sera également disponible à la vente à partir de septembre, pour la maroquinerie. Après avoir touché et humé ces fabuleux cuirs, la Maison Dyptique nous transporte dans un chaleureux appartement parisien. L’occasion d’y découvrir leur délicieuse gamme de bougies. Puis, l’ode à la Nature se poursuit à l’extérieur, dans le Jardin des Senteurs où quatre cabinets de curiosité exposent les dix matières premières fétiches du parfumeur : Fève Tonka, Vétiver, Iris, Vanille, Rose, Benjoin, Bergamote, etc. Au loin, d’agréables parfums envoûtants se dégagent du jardin public de 3600 mètres carrés. Un écrin de verdure hors du commun, conçu par un architecte-paysagiste, qui promet de plaisantes balades, lorsque tous les arbres seront en fleurs. Aussi, sachant qu’en 2012, pas moins de 1200 créations olfactives ont été lancées sur le marché, la visite de la Cour des Senteurs nous rappelle aujourd’hui la richesse de notre patrimoine français. Alors que toutes les stars ont créé leur parfum et que le marketing olfactif bat son plein, ce lieu insolite et hors du temps évoque le savoir-faire et la préciosité de la nature, tous deux à protéger. Marie Jimenez

La Cour des Senteurs 8, rue de la Chancellerie, 78000 Versailles Du mardi au dimanche de 10h00 à 19h00

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BLIND NEWS L’autre Amérique vue par Paolo Pellegrin pour la liberté de la presse Après une année 2012 historiquement violente pour les acteurs de l’information aux quatre coins du monde, Reporters sans frontières consacre son nouvel album de photos à l’italien Paolo Pellegrin. Membre de l’agence Magnum depuis 2005 et photographe pour le magazine Newsweek, Paolo Pellegrin est une grande figure du photojournalisme, et lauréat de nombreux prix dont le fameux World Press Photo. C’est son projet Postcards from America, qui est aujourd’hui présenté à travers cet album photo sublime et humaniste. Une série de 100 tirages en noir et blanc, rendant compte d’un certain «rêve américain», qui impressionne par sa force documentaire. De la frontière d’El Paso à Rochester dans la banlieue de New York, en passant par Miami, il livre une vision inquiétante et ultra réaliste de la société américaine, en allant à la rencontre des laissés pour compte. Résidant lui-même à New York, il se dit choqué par la séparation culturelle et les tensions entre les communautés. Mais également par la prolifération d’armes à feu toujours cruellement d’actualité aux Etats-Unis, et de la surveillance à outrance, dont il a pu témoigner en patrouillant auprès de policiers.

©Paolo Pellegrin/Magnum Photos/Poscards from America

Une œuvre artistique et journalistique.

Un sans-abri à Fresno, Etats-Unis, 2011. « 100 photos de Paolo Pellegrin pour la liberté de la presse » Reporters sans frontières 156 pages, 9,90 € http://fr.rsf.org/

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©Paolo Pellegrin/Magnum Photos/Poscards from America

BLIND NEWS

Les recettes des ventes de l’album sont reversées à l’association Reporters sans frontières. 15


BLIND NEWS Cara Delevingne, nouvelle muse de SAINT LAURENT

Adulée de toutes parts, Cara Delevingne est désormais la nouvelle égérie d’Hedi Slimane. On sait le créateur souvent séduit par les personnalités un peu borderline et Cara Delevingne incarne à merveille cette élégance rock’n’roll et désinvolte propre à la marque. Dans cette campagne pour la collection automne-hiver 2013-2014, la nouvelle égérie pose avec Cole Smith, le chanteur du groupe Diiv. Ce n’est pas la première fois que la britannique collabore avec Saint Laurent. En avril dernier, le top posait déjà pour le mascara Baby Doll de la maison de luxe. Très demandée sur les podiums, la jeune femme de 20 ans a déjà défilé pour les plus grands : Marc Jacobs, Oscar de la Renta, Dolce & Gabbana, Stella McCartney ou encore Karl Lagerfeld. Et de son côté, Hedi Slimane continue à s’approprier les signatures Saint Laurent pour mieux les détourner, et s’inscrit clairement dans l’héritage voir la filiation naturelle du couturier. Bien loin de l’univers de Tom Ford qui en 1999 rappelons-le, reprenais les clés de la maison d’YSL et avait lancé la vague du porno chic quelques années avant. Un imaginaire que l’illustre créateur, encore Directeur du pôle haute couture, condamnait sans détour en 2002 : « Le «porno chic», c’est de l’ignominie, c’est ce qu’il y a de pire. » Et c’est dans l’esprit d’Yves Saint Laurent que Hedi Slimane sublime ses créations et son univers par une esthétique androgyne, sauvage et épurée. Il le prouve une fois de plus avec des égéries parfois trashs (comme récemment Marilyn Manson ou Courtney Love) mais toujours classes. 16


BLIND NEWS L’Exposition « Les Papesses » à Avignon, de l’art au féminin Du 9 juin au 11 novembre, Avignon propose une exposition majeure, afin de mettre en lumière cinq artistes au rôle prépondérant dans l’art contemporain, Camille Claudel, Louise Bourgeois, Jana Sterbak, Belinde de Bruyckere et Kiki Smith. Plus de 300 œuvres sont exposées sur deux lieux emblématiques : le Palais des Papes et la Collection Lambert. Une exposition qui permet de retracer le parcours et le style de chaque artiste : leurs méthodes, leurs parcours, leurs difficultés face au monde de l'art dominé par les hommes, à l’instar de Camille Claudel. Ces œuvres se font écho d’un lieu à l’autre et tissent ensemble des liens esthétiques et thématiques comme la filiation, le corps en métamorphose, l’alchimie médiévale reliant les êtres et les planètes… Un hommage à ces cinq virtuoses de la sculpture devenues des références. « Les Papesses » Du 9 juin au 11 novembre 2013 Collection Lambert - Musée d'Art contemporain www.lespapesses.com

Kiki Smith Earth, 2012 Jacquard tapisserie, courtesy de l’artiste et Pace Gallery, New York © Magnolia Editions

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BLIND NEWS

Louise Bourgeois Spider, 1995 Acier, Musée d’art moderne de la Ville de Paris, photographie François Halard © Louise Bourgeois Trust / Licensed by ADAGP

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BLIND NEWS

Camille Claudel La Valse, 1889-1905 Bronze, Collection Lucile Audouy, Paris Š Thomas Hennocque

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BLIND NEWS « Little Black Dress » ou le sommet de l’élégance au Mona Bismarck American Center Présentée du 3 juillet au 22 septembre 2013 au Mona Bismarck American Center, l’exposition Little Black Dress retrace l’importance historique et toujours actuelle d’un phénomène vestimentaire singulier en donnant à voir une cinquantaine de créations réalisées par les plus grands designers modernes et contemporains de ces 100 dernières années : Lanvin, Kamali, Comme des Garçons, Chanel, Marc Jacobs, Givenchy, Calvin Klein… Véritable phénomène du XXe et XXIe siècle, la petite robe noire permet d’explorer, grâce à cette exposition, l’évolution d’un style éminemment démocratique qui, depuis plus d’un siècle incarne les révolutions sociales du monde moderne. Chaque robe est, imprégnée des valeurs de son époque : de la servilité à l’indépendance, de la contrainte à la tentation, du glamour à la grâce. Et aujourd’hui encore, la petite robe noire reste toujours sujet d’une éternelle réinterprétation. Pour tous les fanatiques de mode…et d’Histoire.

« Little Black Dress » Mona Bismarck American Center for Art & Culture 34 avenue de New York, 75116 Paris Du mercredi au dimanche de 11h à 18h www.monabismarck.org

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Chanel, robe Laine de soie, automne 2006 ©Savannah College of Art and Design


BLIND NEWS

Oscar de la Renta, robe de style Tulle et taffetas, automne 2012 ŠSavannah College of Art and Design

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Mode in Brasil Par Audrey Jehanno

Quand on pense au Brésil, l’image des plages et du Carnaval nous vient directement en tête, il y a ensuite le foot, les caïpirinhas, la samba, les petits bracelets de couleur… Mais aujourd’hui toutes les fashionitas pensent surtout à la Mode. La Fashion Week de Sao Paulo est de plus en plus convoitée, les créateurs brésiliens s’imposent dans le monde entier et les corners aux tonalités brésiliennes apparaissent saison après saison dans les boutiques les plus prestigieuses. Le Bon Marché a d’ailleurs créé un espace dédié à la mode brésilienne jusqu’au 22 juin : Brésil Rive gauche. Les créateurs brésiliens surprennent par leur créativité, leur originalité, il y en a pour tous les goûts.

Ronaldo Fraga Ronaldo Fraga est un créateur de mode et un artiste plasticien. Il est diplômé de l’école de design Parson à New-York et de Saint Martins à Londres. Grâce à la formation en chapellerie qu’il a suivie dans cette dernière, il commence par créer sa marque de chapeaux, qu’il vend à Camden et à Portebello. En 1996, il lance sa première collection de prêt-à-porter qu’il nomme « I love chicken hearts » et est invité à la Fashion Week de Sao Paulo. Il y défile depuis pour chacune de ses collections, et a monté deux boutiques, l’une à Belo Horizonte et l’autre à Sao Paulo. Ronaldo Fraga est l’une des figures emblématiques de la mode brésilienne, notamment en raison de son engagement social et des projets qu’il développe dans le but de créer de nouveaux emplois dans l’industrie de la mode au Brésil. La mode de Ronaldo Fraga est avant tout ludique, avec un choix de couleurs souvent vives et des coupes très géométriques. L’humour est très présent dans ses défilés notamment dans le choix de chapeaux toujours très originaux.

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modéliste et fait ses armes dans de nombreuses maisons, comme Jean-Charles de Castelbajac et Jean-Paul Gaultier pour la mode Femme, Louis Vuitton et John 22



Galliano pour la mode Homme, avant de fonder sa propre marque en 2003. Ses premiers amours pour l’architecture se ressentent non seulement dans les lieux qu’il choisit pour dévoiler ses collections, mais aussi dans ses propres créations. Ses coupes particulières ne ressemblent à aucune autre. Sa robe foulard, devenue un classique, est faite d’un seul tissu, mais est assemblée d’une manière telle que la robe devient un fourreau qui s’ajuste au corps. Dans toutes ses collections, Homme et Femme, Gustavo Lins utilise uniquement des matières nobles. Le choix des tissus est essentiel. Les coupes, simples au premier abord, sont en réalité très structurées et renforcées par des lignes de cuir.

Milena Hamani Cette jeune créatrice née à Sao Paulo est venue à Paris pour y faire ses études de stylisme au Studio Bercot. Elle est ensuite rentrée au Brésil où elle a décidé de créer sa marque de maillots de bain. Au pays du bikini et du tanga, elle a dessiné une collection aux formes élégantes. Ses maillots de bain, sophistiqués, peuvent se porter en tant que tels mais aussi en tenue de soirée. Maillots de bain drapés, avec des nœuds de soie sauvage sur les côtés, il y en a pour tous les goûts mais surtout pour toutes les silhouettes. Milena Hamani a aussi pensé aux femmes qui ont du mal à accepter leurs formes disgracieuses. Maillots drapés devant ou jupettes assorties au bikini, tout le monde peut porter un maillot de bain sexy et se sentir bien dans sa peau. Cette jeune créatrice a aussi une conscience écologique et nous le montre avec sa ligne de maillots de bain crée à base de bouteilles en plastique : maillots une pièce ou bikinis, blancs ou noirs, c’est une ligne très chic. Milena Hamani a voulu démontrer que l’on pouvait aussi faire de beaux vêtements sophistiqués avec du recyclé.

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Milena Hamani


Adriana Degreas Adriana Degrveas, issue d’une famille travaillant dans la mode, développe une passion pour les vêtements de plage. Elle ne s’arrête pas aux maillots de bain, et propose une collection complète de prêt-à-porter version plage, très sophistiquée. Robes, tuniques, pantalons, tops, tout est magnifiquement coupé et peut aussi bien se porter en tenue de ville ou de soirée. Elle utilise beaucoup de soie, de paillettes, de tissu lamé… idéal pour les soirées chics des bords de plage. Actuellement vendue chez Harrods et l’Eclaireur, on retrouve aussi sa collection au Bon Marché dans le corner Brésil Rive Gauche. Pour sa collection été 2013, elle a utilisé tous les codes du Brésil, lycras et soie avec imprimés de Copacabana, feuilles vertes… La nouvelle collection présentée au défilé de Sao Paolo, inspirée Alexandre Herchcovitch

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Adriana Degreas

des années 50, est encore plus chic, très couture. Essentiellement en noir et blanc, les seules couleurs utilisées sont le rose poudré et le rouge. Toujours glamour Adriana Degreas fait preuve d’une grande créativité, et de subtilité dans ses collections.

Alexandre Herchcovitch Alexandre Herchcovitch, né à Sao Paulo, est issu d’une famille juive immigrée de Pologne et de Roumanie. À ses 10 ans, sa mère l’initie au modélisme et à la couture à sa demande. Elle commence à porter dans les soirées les vêtements que son fils lui confectionne, et les amies de sa mère deviennent ainsi ses premières clientes. Adolescent, il devient très vite un habitué de la nuit de Sao Paulo tout en étant étudiant à l’École religieuse orthodoxe sioniste juive, un paradoxe qui se perçoit dans son travail. Alexandre Herchcovitch modernise des vêtements à l’origine très classiques en leur donnant une touche de glamour, inversant ainsi les codes pour créer des collections élégantes et faciles à porter dans tous les contextes. Il se différencie des autres créateurs brésiliens par son style minimaliste et ses choix stratégiques (il vient d’ouvrir son premier magasin au Japon).


NEW FACES Chaque mois, retrouvez les plus belles new faces shootĂŠes par nos photographes.

Kathrin@VIP Allemagne 179cm 85 / 60 / 88


Christina Nete@Mademoiselle BrĂŠsil 176cm 83 / 63 / 87


NEW FACES

Arthur@ Men of Mademoiselle France 184cm 97 / 82 / 100


Talita@Evidence BrĂŠsil 179cm 88 / 62 / 90

Kathrin@Vip Allemagne XXXcm XX / XX / XX


beautĂŠ


Photogrape : Lucie bremeault Make up : Meyloo Stylist : Tara Ziegfeld Hair : Quentin Guyen,@ The Guild, Use REDKEN products





Renata @ Karin Nika @ Evidence


Top en cuir GIORGIO, Jupe DONA KARAN, Harnais collar détachable en cuir noir ZANA BAYNE chez Mise en Cage, Visière cage en cuir noir ZANA BAYNE chez Mise en Cage, Chaussures UNITED NUDE X IRIS VAN HERPEN


Ensemble de costume ZARA, Boléro JOHNNY ROMANCE, Collier HIP POPE, Chaussures UNITED NUDE, Bracelet MAIYET

Photographe : Maxime Stange Modèle : Olga@Crystal Models Stylisme : Tatiana Dumabin Make up & Hair : Alexandre Nicoud


DECOUVERTE


OK BONNIE Par Dine Delcroix / Photos : François Berthier

Le duo français a sorti ce mois-ci son premier album On, mélange de pop électro expérimentale. Leur titre YNSL rock, aérien et mélodique a aiguisé notre curiosité. Avant qu’ils n’investissent la scène nationale cet été, rencontre avec Justine Bonneville, la voix du groupe. Votre premier album s’est fait en très peu de temps. Aviez-vous une quelconque pression ? Non, c’était une volonté de notre part d’autant que nous avons la chance d’avoir le studio à la maison. Sur l’EP sorti l’année dernière, le travail était espacé, nous avions le temps de revenir sur les choses. Pour l’album, on a eu envie de fixer une période et de travailler différemment. Nous avons aimé travailler de cette manière car cette méthode ne laisse pas de place aux mauvaises questions. Est-ce pour cette raison que l’album ne comporte que 9 pistes ? En quelques sortes, oui. L’idée était de resserrer les sons et de ne pas s’étaler sur la durée. 9 titres, c’est ce qui est venu sur le moment. Il y en a eu 8 d’un coup puis Y.N.S.L est arrivé à la fin. Sur certains titres, ta façon de chanter fait penser à celle d’Alison Godlfrapp du duo Golfrapp qu’elle forme avec Will Gregory. Ce duo fait-il partie de tes influences ? Oui, j’aime beaucoup Goldfrapp. Benjamin a utilisé des synthétiseurs vintage qui peuvent faire penser à certaines de leurs productions. La chanson Everything’s Ok est-elle optimiste ou plutôt ironique ? C’est ironique (rires). Cela rejoint justement l’idée du titre que nous avons donné à l’album. J’avais l’image de ce boutton «on» sur lequel nous pouvons choisir d’appuyer pour aller bien même quand cela ne va pas. On arrive à s’en convaincre et c’est le plus important. Il faut toutefois savoir rester conscient des choses. Votre œuvre ne met pas vos visages en avant. Est-ce un choix ? Non, ce n’était pas voulu. Tout s’est fait naturellement, tant pour les clips que pour les pochettes.

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Peux-tu m’expliquer la signification de cet étrange canard doté d’une perruque et d’un remontoir qu’on voit sur la pochette de votre album ? C’est un délire. On cherchait une mascotte pour nous représenter et on a déliré sur le canard. Ma sœur a proposé celui-ci pour la pochette de l’album. Sa perruque nous plaisait et on s’est identifié à lui dans le livret. Sur scène, j’arrive avec petit canard d’ailleurs (rires). Le clip de Y.N.S.L met en scène deux enfants violents. Quel est le message de cette vidéo ? David Guionet, le réalisateur du clip, avait envie d’interpréter le morceau de cette manière en prenant le contre-pied du texte qui est plutôt positif. Il a trouvé dans You Need To See The Light une nécessité de mourir pour voir la lumière. La violence du clip émane de deux enfants à l’aspect angélique. Avez-vous une part sombre en vous ? Oui, je pense. David Guionet trouve qu’il y a justement quelque chose de très sombre dans notre musique et il a voulu montrer ce paradoxe via ces deux enfants. Pendant l’écriture et la composition de votre album, avez-vous travaillé en pensant à son exploitation ? Non, le processus de création était fermé. Sur l’EP, nous avions essayé de travailler avec un format spécifique mais pas sur l’album et c’est marrant parce que le titre qu’on a clipé est vraiment le dernier qui a été fait. Votre musique est électronique. Techniquement, comment l’amenez-vous sur scène ? On travaille sur Ableton Live, un logiciel de séquences musicales. Moi, j’utilise un contrôleur qui me permet de tout mixer en direct. À côté, j’ai des samples sur un synthétiseur, une guitare... Avez-vous besoin de faire des compromis pour la scène ? On arrive à recréer pratiquement tous les sons qu’on utilise en studio. Le seul compromis qu’on fait, c’est d’écarter les morceaux lents pour proposer quelque chose de plus dynamique. Ce n’est pas intéressant de reproduire l’album à l’identique. Que pensez-vous de la nouvelle scène electro française ? Elle se porte plutôt pas mal et cela fait plaisir car les mélanges electro et pop-rock étaient un peu des ovnis, il y a encore quelques années. OK Bonnie, c’est un duo mais tu es la seule des deux membres à répondre aux questions des journalistes. Où est Benjamin ? Je le menottes ! (rires). Benjamin préfère rester dans l’ombre. Il s’est davantage concentré sur la production des chansons mais il n’est jamais bien loin. Peut-être que cela changera... 42


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DECOUVERTE


HAIM

Par Dine Delcroix / Photos : Dr + Wallendorff

Les

trois sœurs venues de San Fernando ont sorti l’année dernière un EP intitulé Forever qui a cartonné en Angleterre. Leur tube Don’t Save Me sorti fin 2012 les conforte dans le succès.

2013 devrait les mettre sur les devants de la scène pop internationale.


Le sondage annuel de la BBC qui a pour habitude de prédire les futurs cartons musicaux a désigné votre trio comme étant LE groupe à suivre en 2013. Quel effet cela vous fait-il ?

comme un groupe féminin mais plutôt comme un groupe tout court et tous les girls band devraient être considérées de la sorte.

Faut-il absolument faire partie de la famille pour pouvoir Danielle : Nous sommes être membre de votre groupe ? vraiment honorées mais nous essayons de ne pas Danielle : Non. trop y penser surtout de- Alana : Pas du tout. puis que nous avons com- Este : Tu peux être le quamencé à travailler sur notre trième membre du groupe, album. si tu veux (rires). Este : C’est un honneur de figurer parmi des noms Si vous aviez eu un frère, l’auaussi incroyables. Je crois riez-vous laisser intégrer la que cette année, c’est la bande ? première fois que les artistes du top 5 sont tous fé- Danielle : Bien sûr ! minins et c’est génial d’en Alana : Oui. Nous avons toujours voulu avoir un faire partie. frère plus âgé pour qu’il Qu’est-ce qui vous différencie ramène ses amis à la maides autres girls band ? son... Este : Et qu’il nous perAlana : Nous sommes din- mette ainsi de rencontrer gues ! (rires). Nous aimons des mecs mignons. simplement nous amu- Alana : Notre père voulait ser. Quand nous sommes vraiment avoir un fils. Il a sur scène, nous aimons essayé trois fois d’en avoir jouer comme des garçons un mais quand je suis vealors nous ne voulons pas nue au monde, il a décrété vraiment être considérées qu’il n’aurait plus d’enfant

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parce qu’il ne supporterait pas une déception de plus. Il était footballeur et tout ce qu’il voulait, c’était un fils pour prendre la relève. On lui dit souvent que c’est sa punition pour avoir brisé le cœur de nombreuses filles quand il était jeune. J’aurais pourtant adoré avoir un frère donc, si tu es intéressé, tu peux être le membre masculin du groupe, cela ferait plaisir à Dash, notre batteur (rires). Vous travaillez sur votre premier album avec le producteur James Ford de Simian Mobile Disco. Comment l’avez-vous rencontré ? Alana : Il a fait la démarche de nous contacter et il se trouve que nous sommes réceptives aux gens qui ont envie de travailler avec nous. Nous avons de fortes opinions, nous savons exactement ce que nous aimons et nous savons aussi précisément ce que nous n’aimons pas. À chaque fois que nous travaillons


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avec un producteur, la seule manière pour que cela fonctionne c’est qu’il y ait un réel échange, une recherche de nouveaux sons et d’idées dans les deux camps pour créer quelque chose ensemble et c’est exactement de cette manière que nous avons travaillé avec James. Il a pris le temps de nous écouter et il s’est intéressé à ce que nous voulions faire.

nous écrivons de façon très rythmique, non seulement au niveau de l’instrumentation mais aussi des mots et des mélodies. Je pense que c’est ce qui caractérise notre écriture et donc notre musique. Nous n’avons pas spécialement envie de la définir car elle n’a pas besoin de définition dans la mesure où nous faisons ce que nous aimons.

que l’un d’eux dise quelque chose, raconte une histoire ou un rêve et nous nous retrouvons à prendre des notes sur nos téléphones. C’est bien de s’ouvrir à ce que les gens vous racontent et d’observer. C’est en tout cas notre manière d’écrire nos chansons. Quels sont les artistes que vous écoutez ?

Quels seront les thèmes ma- Este : Nous aimons Jai Paul, Missy Elliott... Quelle influence a-t-il eu sur jeurs de ce premier album ? Alana : Kendrick Lamar, votre album ? Este : Je pense que ton Aaliyah, TLC... Este : Je pense que son premier album, tu l’écris Danielle : Parmi les anaura est tout simplement toute ta vie donc il contien- ciens, il y a Prince, Chaka bonne et qu’elle contribue dra des éléments de notre Khan, Barbara Hendricks... à faire de lui un bon pro- vie personnelle et de nos Votre EP «Forever» contient ducteur. Dès qu’il rentre expériences. Ce disque un remix du même titre par dans une pièce, tu te sens sera le reflet de ce que la producteur suédois Dan à l’aise, motivé et inspiré. nous sommes aujourd’hui, Lissvik. Prévoyez-vous de Pendant l’enregistrement, le reflet des histoires que proposer d’autres remix de vos chansons ? il sait dire s’il faut conti- nous avons pu lire dans nuer sur la voie empruntée des livres, des magazines Este : Oui. J’aime ce remix ! ou s’il faut, au contraire, ou des journaux. Il parlera également la vie de nos Alana : Oui. Nous avons été changer de direction. présentées à des remixeurs Alana : Son rire est le meil- amis et des rêves que nous par notre manager. leur qu’il m’ait été donnée faisons. Nous aimons nous imprégner de tout, nous ne Danielle : Nous ne savions d’entendre. nions pas l’inspiration. Par- pas que notre musique Qu’est-ce qui caractérise votre fois, une chanson peut être pouvait être remixée. musique ? inspirée par un mot ou une Este : Au départ, je ne phrase que quelqu’un pro- savais pas vraiment ce Este : Nous jouons toutes nonce. Nous parlons beau- que le terme «remix» siles trois de la batterie alors coup avec nos amis. Il suffit gnifiait. J’ai l’impression

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qu’aujourd’hui, ce terme a un sens différent de ce qu’il voulait dire il y a quelques années. C’est cool de voir comment d’autres personnes peuvent ré-imaginer tes propres chansons.

je pourrais vivre à Paris mais avec mon compte en banque actuel, je pense que je survivrais à peine une semaine et demie. Qu’est-ce qui vous agace le plus l’une chez l’autre ?

Quelle image avez-vous de la France à travers les médias ? Alana : Tu cherches à déclencher une troisième Danielle : Je ne prête pas guerre mondiale ? (rires). beaucoup attention à ce Je suis la plus chiante des que racontent les médias. trois. Je n’aime pas les Alana : En grandissant, olives, je n’aime pas les j’ai toujours rêvé de Pa- yaourts... ris. C’est tellement beau Este : Je lui ai dit d’essayer ! Même en photos... C’est les yaourts à Paris, ils sont une ville dans laquelle tu très bons. Danielle a les peux tomber amoureux, yeux roulants (rires). trouver d’incroyables vête- Alana : Oui, c’est vrai que ments... Danielle roule les yeux... Este : Tu peux y manger Este : Quand tu lui parles, des chose délicieuses aus- tu as l’impression qu’elle si. Je trouve que c’est cool s’en fout mais ce n’est pas le d’être dans une ville dans cas, c’est juste un tic et elle laquelle tu peux te bala- ne s’en rend pas compte der. Vivant à Los Angeles, quand elle le fait. Pour ma je passe la moitié de mon part, je sais que je ne réflétemps à conduire. À Paris, chis pas vraiment avant de tu peux marcher des kilo- faire quelque chose et je mètres. La ville est belle. pense que cela peut agacer. Alana : Contrairement à Los Danielle : Rien ne m’agace Angles, Paris a une histoire. vraiment chez mes sœurs. Celle de Los Angles est sur- Nous sommes humaines tout marquée par l’industrie par-dessous tout et, malgré du film avec Hollywood. quelques querelles classiques de sœurs, nous nous Pourriez-vous vivre Paris ? aimons quand vient la fin de la journée et nous saEste : Je serais curieuse vons que nous avons passé d’expérimenter la vie parid’excellents moments ensienne pendant 3 mois mais semble. je sais qu’elle est chère. Alana : Si je gagne au loto, 50

Comment travaillez-vous votre look pour l’image du groupe ? Este : Nous portons ce que nous aimons et ce qui est confortable sur scène. Alana : Les gens nous parlent souvent de notre style mais je ne comprends pas vraiment pourquoi. Este : À Paris, vous avez du style. On a l’air de sansabris à côté. Si je pouvais porter des talons aiguilles pour le reste de ma vie, je le ferais mais j’ai l’air d’un transsexuel quand j’en mets. En Amérique, toutes les femmes aimerait être parisiennes. Danielle : Surtout dans notre famille (rires). Et si l’une de vous se coupait les cheveux ? Danielle : Cela n’arrivera pas. Alana : Elle serait bannie de la famille ! Este : J’ai déjà eu la coupe « mulet » avec la nuque longue. Lorsque je l’ai faite et que j’ai vu le résultat devant le miroir, j’ai pleuré. Alana : Pour un troisième album, nous penserons à nous raser la tête.



DÉCOUVERTE

THOMAS AZIER Par Dine Delcroix / Photos: DR + Vincent Lignier

Hollandais installé à Berlin, repéré par le génial Woodkid, Thomas Azier apporte un nouveau souffle à la scène électro européenne. Déjà deux EP’s à son actif, un titre Angelene presque culte, un single Ghost city qui vient de sortir en attendant l’album en 2014..



Tu as commencé à faire de la musique en produisant pour d'autres personnes. Comment en es-tu venu à produire pour toimême ?

quelque chose avec un artiste alors je pourrais produire pour lui mais je n'ai encore jamais eu ce plaisir. J'ai be-

La production pour autrui n'a jamais

soin de croire en cette personne pour

vraiment été un choix. Je survivais en

pouvoir écrire pour elle. La manière

écrivant pour les autres et cela me per-

dont l'industrie du disque fonctionne

mettait aussi de rencontrer du monde

de nos jours ne me convient pas car

parce que personne ne voulait de mes

c'est un peu une usine dans laquelle

chansons, personne n'y prêtait atten-

tu dois livrer des sons pour les autres.

tion. Les gens trouvaient ma musique

Aujourd'hui, je n'ai pas de temps pour

trop bizarre ou trop sombre. C'était

ce genre de choses d'autant que la plu-

également un moyen pour moi de ne

part des artistes qui sont dans les prin-

pas aller travailler dans un bar à Berlin

cipaux labels en Allemagne ne m'inté-

pour gagner cinq euros de l'heure. J'ai

ressent pas. Ce ne sont que des copies

beaucoup appris de cette expérience.

de copies et ce n'est pas du tout inven-

As-tu commencé à chanter après avoir appris à produire ?

tif. Je préfère fournir des efforts pour ma propre musique.

Non, j'ai toujours chanté et joué du

Tu aimes le hip-hop et le R&B mais ta musique ne ressemble toutefois pas à ces deux

piano. J'ai commencé à en jouer quand

styles. Quelles sont tes influences ?

j'avais 5 ans et je me suis mis à produire très tôt.

En général, mes influences ne sont pas musicales. Je peux être influencé par

Les sons qu'on entend sur tes chansons

l'art, un roman, un dialogue comme

sont-ils tous mixés par tes soins ?

le nôtre, une pensée, le vent, un rêve,

Oui. J'utilise ce que j'ai sous la main. Au début, c'était juste mon ordinateur sur lequel je programme tout. Ensuite, j'ai emprunté des synthétiseurs. J'écris, je produis et je mixe tout tout seul. Pourrais-tu à nouveau produire pour d'autres personnes, aujourd'hui ? Oui mais j'ai décidé de ne plus le faire. 54

Après, si je sens que je peux construire

l'architecture... Je me souviens avoir vu un immeuble à Berlin dont la construction n'est pas encore terminée. L'idée qu'il ne soit pas fini fait partie du passé mais je le regarde au présent et il sera terminé dans le futur. On a là tous les éléments qui créent ma musique. Ton œuvre est pourtant proche des sonorités des années 80...


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Je pense que c'est parce que j'utilise beau-

Je pourrais vivre n'importe où en Eu-

coup de synthétiseurs donc cela ta ramène

rope, dans le fond. La Pologne, par

immédiatement à l'époque où les synthéti-

exemple, a accès à beaucoup de choses

seurs ont commencé à envahir la musique

intéressantes. Peut-être que je pourrais

dans les années 80 mais cela ne signifie pas

aller encore plus à l'est...

forcément que je suis influencé par cette époque et ce n'est même pas du tout le cas. Je n'ai jamais vraiment écouté ce style de

Tu as choisi de présenter tes chansons via une trilogie d'EP. Pourquoi ce concept ?

musique. J'écoute peu de musique, en gé-

Je n'y ai pas pensé tout de suite. Ce pro-

néral.

cessus est arrivé naturellement parce

Pourquoi as-tu choisi de t'installer à Berlin ? Tout le monde sait que la vie n'est pas chère, là-bas. Au début, j'avais besoin d'expérimenter des choses sans trop me soucier de l'argent. C'est une ville très inspirante car elle est inachevée, constamment dans le changement et la transformation. Au départ, j'avais prévu d'y passer six mois mais, comme beaucoup, j'y suis resté davantage et je vis làbas depuis maintenant six ans. C'est l'un des rares endroits en Europe où tu peux

que personne ne voulait de ma musique alors j'ai décidé de la sortir moi-même. J'ai fait beaucoup de chansons et je me suis dit que j'allais commencer par en dévoiler trois et c'est ainsi que le premier EP est sorti. Le second a suivi et, si cela ne tenait qu'à moi, je continuerais sur cette lancée avec d'autres EP en guise de petits chapitres parce que j'aime cette forme compacte mais l'industrie du disque fonctionne davantage avec l'album donc il serait plus astucieux d'un faire un. Ce prochain chapitre sera une

construire quelque chose.

sorte de concrétisation du travail de ces

T'y plais-tu toujours ?

une sélection de tout ce que j'ai fait de-

J'ai dû déménager huit fois à Berlin si ce n'est plus. J'ai créé des chansons dans plusieurs coins de la ville, j'y ai fait beaucoup de vélo donc je peux dire que je connais Berlin par cœur mais je ne m'y sens toujours pas chez moi car je ne suis né en Hollande et j'ai des vues sur la France, maintenant. Quoiqu'il en soit, je suis vraiment fier d'être européen car nous avons beaucoup de bonnes choses, ici. Toutes les bonnes choses ne viennent pas du Royaume-Uni et de l'Amérique.

cinq dernières années, un peu comme puis depuis l'âge de 19 ans. Je suis arrivé dans une grande ville en ayant beaucoup de rêves, de naïveté et d'espérances puis je suis passé par une phase plus sombre avant de devenir auteur, compositeur et producteur. Aujourd'hui, j'ai une vue d'ensemble très précise de ce que j'ai fait durant ces cinq années et l'album sera un résumé de ce parcours. Les EP s'intitulent "Hylas 001" et "Hylas 002". D'où viennent ces titres ? Je suis souvent inspiré par les belles


peintures. Je m'intéresse à l'art classique

l'eau à une cascade, ce personnage s'est

plus qu'à l'art moderne. Je suis tombé

retrouvé enlevé par les nymphes du lieu.

sur une peinture intitulée "Hylas and the

Il a dû bien s'amuser (rires). Je me suis

Nymphs" qui raconte l'histoire mytho-

senti fortement connecté à cette histoire

logique de Hylas. Étant allé chercher de

alors j'ai décidé de m'en servir.


Tes textes sont emprunts de solitude. Es-tu un

devenir auteur-compositeur. Si tu n'as

garçon solitaire ?

rien à dire, tu n'as alors aucune raison de

Je ne pense pas être quelqu'un de solitaire mais il a été question de solitude à un moment, par choix. J'avais besoin d'être seul pour trouver mon son et pour

faire de la musique. J'avais envie de pouvoir raconter une histoire que j'aime et de dire des choses qui comptent pour moi. Beaucoup se contentent des réseaux sociaux pour sortir de la solitude. Est-ce ton cas ?


Est-ce dans un moment de solitude que tu as écrit la chanson How To Disappear ? Je suis content que tu me parles de cette chanson car c'est celle que je préfère. Mon idée était de faire une sorte de R&B futuriste. C'était pendant que je vivais dans le sud de Berlin. À cette époque, il n'y avait pas beaucoup de monde qui vivait dans cette partie de la ville. J'y ai passé un hiver très rude avec beaucoup de neige. Le soleil n'était plus là et il faisait sombre tout le temps. C'était une lourde expérience. Je n'avais plus la notion du temps, je ne savais pas quel jour nous étions... Je passais mon temps à faire de la musique. J'ai écrit beaucoup de chansons durant cet hiver et celle-ci en fait partie. Sur ton deuxième EP, il y a un titre qui s'intitule Angelene. Qui est cette personne ? C'est juste un personnage Tu peux en apprendre beaucoup plus sur ma vie en écoutant une de mes chansons qu'en regardant mes photos sur Instagram. J'aime bien poster des photos ou des paroles qui me plaisent sur les réseaux sociaux mais je préfère de loin avoir une vraie conversation.

de mon imagination. Je ne sais pas... Parfois, elle existe, parfois non. Il m'arrive de lui donner le visage de personnes qui existent. C'est une sorte de femme fatale. J'ai tendance à rencontrer beaucoup d'Angelene dans ma vie (rires).


DECOUVERTE

THE STRYPES Par Dine Delcroix / Photos : François Berthier

Originaires d’Irlande, The Strypes est la nouvelle sensation rythm & blues du moment. Cités déjà comme LA référence par des artistes comme Miles Kane, Paul Weller ou encore Noel Gallagher, Ils perpétuent l’état d’esprit du rock : crade et exaltant. Blue Collar Jane, premier EP officiel, les impose déjà sur la scène indé. Avant la sortie de leur premier album en septembre…



Comment vous-êtes vous rencontrés ? Pete : Josh, Evan notre batteur et moi sommes amis depuis que nous sommes jeunes. Plutôt que de jouer au football comme font la plupart des amis de notre âge, nous écoutions de la musique. Puis, nous nous sommes mis à faire de la musique ensemble. Par le bias d'une connexion de la famille, Josh a été amené à voir Ross, le chanteur. Il l'a intégré au groupe parce que nous avions décidé de prendre les choses plus au sérieux et d'avoir un bon chanteur. Josh : Ensuite, nous avons commencé à jouer à Dublin dans des clubs devant 200 personnes. Puis, nous avons sorti un EP en Irlande sur lequel nous avons tout fait nousmêmes: l'enregistrement, la pochette et même les envois en radios. Il a été bien reçu sur iTunes et c'était une belle surprise. Nous avons attiré l'attention d'Universal Music Ireland et nous avons fini par signer. Nous avons alors commencé à jouer dans des festivals et à faire quelques concerts au Royaume-Uni à raison de cinq à six par semaine. Depuis, nous sommes plongés dans les e-mails et les calendriers. Votre musique n'est pas du tout commerciale. Vous considerez-vous comme un boys band ? Josh : On ne se considère pas comme un boys band. Au Royaume-Uni et en Irlande, ce terme désigne des groupes comme Take That ou One Direction. Nous, on est plutôt un groupe comme Arctic Monkeys ou Black Keys donc ce n'est pas du tout la même chose. Nous faisons du rhythm and blues et je peux comprendre que ce soit inhabituel de voir des gens de notre âge faire ce genre de musique. Compte-tenu de ce qui vous arrive, avez-vous parfois l'impression de passer à côté de votre adolescence ? Pete : Je ne pense pas car nous faisons ce que beaucoup d'adolescents aimeraient faire. Certes, nous devons parfois faire quelques sacrifices mais nous sommes heureux d'avoir cette chance. Au lieu d'aller à l'école, nous passons notre temps à voyager et à découvrir de nouveaux endroits. Avez-vous complètement interrompu votre scolarité ? Pete : Oui... Josh : Nous avons arrêté il y a environ six mois. Cela devenait trop fatigant de jouer le week-end puis de retourner à l'école le lundi. Ne craignez-vous pas de regretter ce choix, un jour ? Josh : C'est une opportunité. Si jamais les choses ne marchent pas, nous retournerons probablement à l'école. Mes parents travaillent à l'école et leur soutien est important. Pete : Ce que nous vivons aujourd'hui est la meilleure école. Nous apprenons beaucoup sur le monde grâce à cette expérience. Attachez-vous de l'importance à votre tenue vestimentaire en tant que groupe ? Pete : Nous aimons nous habiller comme un groupe. Chaque secteur d'activité a sa spécificité vestimentaire et c'est important de remarquer que nous sommes un groupe quand on nous voit. Faut-il absolument être musicien pour être ami avec les Strypes ? Pete : Pas du tout ! Josh : Non car on peut très bien ressentir la musique sans pour autant jouer d'un instrument. Si vous pouviez dîner avec un membre des Beatles, lequel serait-ce ?


Josh : Le grand Paul McCartney. Pete : Ce serait John ou George. Quel est le meilleur conseil que vous ayez reçu et qui vous l'a donné ? Pete : "Soyez ce que vous avez envie d'être, gardez la tête haute et faîtes ce que vous aimez !" par Noel Gallagher du groupe Oasis. Si une voix féminine devait intégrer votre groupe, laquelle serait-ce ? Josh : Arethta Franklin ou Etta James. Pete : Ruby Turner, Amy Winehouse...


L’INSTANT LIVE Photo : Wallendorff

MUSE / STADE FRANCE


DE


EN COUVERTURE

LEA SEYDOUX Par Auriane Besson / Photos : François Berthier

ACTRICE HORS NORME Elle était déjà en pleine ascension, Léa Seydoux vient maintenant d’exploser dans le paysage cinématographique mondial suite à sa palme d’or le mois dernier à Cannes. Dans La Vie d’Adèle d’Abdellatif Kechiche, elle a enfin trouvé un rôle où ses talents d’actrices les plus incandescents sont sublimés. Portrait d’une nouvelle icône.

A

Cannes, Léa Seydoux s’est doublement imposée : Dans « Grand Central », de Rebecca Zlotowski, avec Tahar Rahim et bien sûr dans « La Vie d’Adèle », le récit d’une passion amoureuse.

Mais son parcours ne commence pas là. A 28 ans, elle a alterné avec une aisance certaine, films d’auteur totalement intimistes, La belle personne , Belle épine, et blockbusters américains comme dans Mission Impossible avec Tom Cruise ou aux côtés de Russell Crowe dans Robin des Bois. Véritable actrice de composition, elle est toujours méconnaissable et a déjà tourné plus de vingt films .

S

i elle est aujourd’hui l’une des actrices françaises les plus demandées dans le monde, il faut aller chercher l’explication dans cette façon de s’emparer de la scène, du texte

et de les sculpter à sa mesure. Sa marque : jouer l’ambigüité des femme-enfant fatales. Un mélange de présence ultra sexuée et d’une moue de gamine boudeuse. Et souvent, comme les plus grands qui savent tout donner face caméra, elle se révèle gauche, voir craintive face aux journalistes. Une fragilité et une humili-

té profonde dont elle est parfaitement consciente comme elle



l’explique au Nouvel Obs : « Je n’ai aucune excuse à donner à mon malaise, aucune raison sociale. C’est plus profond. »

I

ssue d’un milieu social plutôt très favorisé (petite-fille de Jérôme Seydoux, président de Pathé) elle a su devenir l’icône d’auteurs français qui trouvent dans son intensi-

té de jeu et sa fraîcheur matière à incarnations et à fantasmes. Tant de sollicitations auraient pu lui faire tourner la tête mais elle semble bien la garder sur les épaules. Beauté renoirienne, débit deneuvien, celle qu’on a comparé à toutes les grandes actrices ne cesse de chercher la difficulté en élisant des réalisateurs exigeants.

P

rincesse de Clèves impénétrable chez Christophe Honoré (La Belle Personne), jeune fille désinhibée chez Sébastien Lifshitz (Plein Sud), adolescente en plein

déni chez Rebecca Zlotowski (Belle Épine), tueuse im-

placable chez Brad Bird (Mission impossible 4 : protocole fantôme), suivante amoureuse chez Benoît Jacquot (Les Adieux à la reine), mère larguée chez Ursula Meier (L’Enfant d’en haut)... « Elle est le masculin et le féminin, l’animalité et la cérébralité, la douceur et la rugosité. Travailleuse acharnée, elle se donne

complètement,

c’est son côté protestant », analyse Ursula Meier dans le Madame Figaro.



NOUVELLE REINE DU CINEMA FRANCAIS

N

ous ne pouvons pas parler de Léa Seydoux sans évoquer La Vie d’Adèle, son plus grand rôle, où elle crève l’écran avec sa partenaire Adèle Exarchopoulos. La Vie d’Adèle,

c’est la relation entre une lycéenne (Adèle) et une étudiante en arts plastiques (Emma), développée sur plusieurs années. C’est le coup de foudre, l’embrasement des sens et des sentiments, c’est aussi une scène qui a beaucoup fait parler et qui est sans doute la plus belle et audacieuse scène d’amour charnel du cinéma français. Un film pas intello mais intelligent. La nuance a son importance. Intelligence dans l’intensité, dans la justesse des émotions, des images, dans cette cristallisation fusionnelle que Kechiche a le génie de si bien retranscrire. L’éveil d’une sexualité, la naissance d’un amour, l’écartèlement d’un couple, l’évolution profonde d’un personnage... des thèmes universels où l’homosexualité n’est finalement qu’anecdotique.

O

euvres d’art, patrimoine littéraire et philosophique font également partie intégrante du film.C’est un long métrage avant tout sur la liberté et sur les valeurs ré-

publicaines, l’identité même du cinéma de Kechiche. L’école, l’instruction, la culture sont fondamentaux pour échapper au déterminisme social. Léa Seydoux a bien compris l’intérêt et le potentiel de cette œuvre artistique majeure, allant même jusqu’à refuser le rôle de Chloé dans le film de Michel Gondry, L’Ecume des jours. Une décision qui se révèle plus que payante aujourd’hui. Le long-métrage ne sortira que le 9 octobre en France. D’ici là on aura vite l’occasion de revoir Léa le 28 août dans

Grand Central de Rebecca Zlotowski. Et en 2014 aucune baisse de régime. En février, elle fait partie du casting de La Belle et la Bête de Christophe Gans avec Vincent Cassel, et enfin The Grand Budapest Hotel de Wes Anderson.



JULIA GARNER

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PORTFOLIO CANNES Par Franรงois Berthier

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ADELE EXARCHOPOULOS

PORTFOLIO

CANNES 2013

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DITA VON TEESE

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ERIC CANTONA


DANNY HUSTON

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DAVID LOWERY

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SAMY NACERY


EVA LONGORIA

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DENIS MENOCHET

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VALERIA BRUNI-TEDESCHI

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NIELS SCHNEIDER 84


LOUIS GARREL

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JUNO TEMPLE



JEAN-PIERRE MARTINS & DENIS MENOCHET


MICHAEL CERA


GABRIEL ARCAND


MONI MOSHONOV


PAULINE Elle s’est fait connaître avec le tube Allo le monde. Après avoir signé chez Warner, elle a sorti il y a quelques semaines son troisième opus Le meilleur de nous-mêmes. Un univers pop addictif et élégant. On a voulu en savoir plus…

Par Dine Delcroix / Photos : François Berthier

Tu reviens aujourd’hui trois ans après «La vie du bon côté». Que s’est-il passé pendant ce temps ? J’ai quitté la maison EMI après la sortie de ce deuxième album. Il n’y a pas eu de promotion pour ce disque et cela n’a pas été facile à vivre pour moi. J’ai passé les deux dernières années à composer mon troisième album et à rencontrer des maisons de disques. J’ai finalement décidé de signer avec Warner où j’ai rencontré des personnes humaines qui croient vraiment en mon projet. Ton nouvel album s’intitule «Le meilleur de nous-mêmes». Ce titre signifie-t-il qu’il s’agit de ton meilleur album ? Je ne sais pas si j’y ai mis musicalement le meilleur de moi mais je sais que j’ai donné ce qui me semble être l’essentiel de ces dernières années passées à me retrouver. Ce n’est toutefois pas un album

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centré sur moi-même, d’où le «nous». Contrairement à tes disques précédents, tu n’as pas écrit tous les textes. Pourquoi ? C’était vraiment un choix. J’ai fait toutes les musiques de l’album et j’ai écrit cinq textes. Pour le reste, j’ai fait appel à des personnes qui travaillent avec moi depuis le début dont François Welgrun qui me connaît depuis que j’ai 17 ans. Je lui ai expliqué que je n’avais pas envie de tout écrire. Les autres textes étaient-ils déjà prêts ou astu donné des directives pour l’écriture ? Non, j’ai donné des idées pour orienter l’écriture. Ce ne sont pas des chansons «tiroir». Les textes déjà faits, j’en ai rarement pris. C’est arrivé sur le premier album avec la chanson «Mon côté fragile» parce que j’aurais vraiment pu l’écrire.



Le premier single extrait de ce nouvel album est «Je parle, je parle». T’a-t-on déjà dit que tu parlais trop ? Oui ! (rires). Je parle énormément mais je n’en dis pas beaucoup sur moi. Cette chanson parle de pudeur. Est-ce au sens physique ou moral ?

« Avec le temps » de Léo Férré. J’aime bien les chansons qui me rendent triste. D’ailleurs, les plus belles chansons sont souvent graves. Le piano, c’est ton alter ego ?

Ce n’est pas physique. C’est sur la difficulté à parler de soi. C’est paradoxal dans mon métier mais, dès qu’on touche à ma vie privée, je me ferme. Je suis assez réservée.

Au-delà d’un alter ego, c’est mon prolongement puisque j’en fais depuis que je suis toute petite mais j’arrive aussi à m’en détacher et c’est important de pouvoir se tourner vers d’autres sons.

De quel genre d’absence parles-tu dans « Les absents » ?

Joues-tu d’un autre instrument ?

Je parle de l’absence des personnes qui ne donnent plus de nouvelles sans que l’on sache pourquoi. Ils partent et on ne les revoit plus. Dans ce cas, les rattrapes-tu ? Non. Si à un moment donné, les gens choisissent de ne plus nous voir ou de ne plus nous parler, il faut penser à ceux qui restent et qui nous entourent. «Combien» évoque la dépression. Comment en es-tu venue à écrire à ce sujet ? J’ai découvert le milieu psychiatrique par le biais d’un ami très proche qui s’est perdu dans une grave dépression et j’ai malheureusement dû côtoyer ce monde... En référence à « La chanson qui console », cite-moi une chanson qui te console ? Toutes les chansons de Coldplay, par exemple. 94

À l’inverse, peux-tu me citer une chanson qui te rend triste ?

En ce moment, j’apprends à jouer de la guitare. Je suis un peu paresseuse mais j’arrive quand-même à enchaîner quelques accords (rires). Appréhendes-tu la scène ? Pas du tout ! Je n’ai aucun trac sur scène. Je m’y sens comme un poisson dans l’eau parce que c’est vraiment mon terrain de jeu. Que peut-on te souhaiter avec ce nouvel album ? Le meilleur ! (rires). Qu’il fasse du bien aux gens. Ce qui me rend heureuse, c’est de voir des gens heureux autour de moi et de contribuer à leur bonheur.

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Emily Wells Par Dine Delcroix / Photos : François Berthier

Originaire de Brooklyn, Emily Wells, a tout de la jeune prodige. Artiste, productrice, chanteuse et compositeur, connue pour son utilisation hors normes de sonorités classiques et modernes, elle nous présente son nouvel album Mama , trois ans après The Symphonies : Dreams Memories & Parties. Folk, hiphop et particules électroniques s’en donnent à cœur joie ! Qui est la fille qui apparaît sur la pochette de ton nouvel album ? C'est moi ! Pourquoi as-tu utilisé cette photo de toi ? C'est lié au titre de l'album. J'ai toujours aimé cette photo mais ma maman ne voulait pas me la donner. Elle m'a dit: "Si tu dois t'en servir un jour, je veux ce que soit pour un truc joli" donc c'était aussi une façon de lui faire honneur. Lorsque tu étais petite, quel genre d'enfant étais-tu ? Tu devrais plutôt demander à ma mère (rires). J'étais bavarde, curieuse et attirée par la musique. J'ai eu une belle enfance. Tu as évoqué le titre de l'al-

bum, Mama. À quoi fait-il référence ? Ce titre fait référence au fait d'être un enfant, d'être une maman, de prendre soin de quelqu'un. C'est un hommage à ce genre de relations. As-tu des enfants ? Pas exactement... J'ai contribué à l'éducation d'un enfant. Sur cet album, tu parles de Johnny Cash et de sa mère dans la chanson Johnny Cash's Mama's House. Pourquoi t'es-tu intéressée à cette relation ? Pendant l'écriture de cette chanson, je prenais des notes au calme et j'ai commencé à penser à la mère de Johnny Cash, à l'idée d'être quelque part dans les bois... J'ai imaginé ce que

cela pourrait faire d'être cette femme. Je ne sais rien au sujet de l'enfance de Johnny Cash mais j'ai eu envie de l'imaginer. Quelle est ta chanson préférée de Johnny Cash ? J'adore Ring Of Fire. Avec quels artistes disparus aurais-tu aimé chanter en duo ? Avec Édith Piaf. J'adore sa voix ! Peut-être qu'elle aurait pu m'apprendre un peu le français (rires). Tu as enregistré ton album dans une cabane au fond d'un ranch. Était-ce indispensable pour toi d'être dans une telle ambiance ? Oui, j'avais envie d'être un peu à l'écart. L'endroit où je me trouvais était incroyablement paisible et


c'est ce dont j'avais besoin, tant sur le plan personnel que créatif. Cette année, le grand public a pu te découvrir grâce à la bande originale du film Stoker avec ton titre "Becomes The Color". Comment t'es-tu retrouvée sur ce disque ? L'ingénieur du son du film aimait mon travail. Je ne le connaissais pas personnellement. Il a fait écouter mes chansons au réalisateur du film qui a bien aimé aussi. Ensuite, ils sont venus tous les deux me voir en concert. Le réalisateur a dit avoir regardé ma performance comme on regarde un enfant solitaire faire un château de sable sur la plage. C'est un homme qui sait exactement ce qu'il veut en tant que réalisateur. Il est très porté sur les détails tout en laissant une certaine liberté aux personnes qui travaillent avec lui.

As-tu composé cette chanson spécialement pour le film ?

honnête. Je suis contente qu'elle plaise aux gens.

Oui.

Qu'as-tu pensé du film ?

Les choses ont-elle changé pour toi depuis la sortie de ce film ?

J'aime beaucoup. Je l'ai vu tellement de fois ! Je pense que c'est un film à part qui nécessite une certaine patience. Plus tu le vois, plus tu remarques ses détails incroyables et sa beauté. Aux États-Unis, beaucoup de gens l'ont trouvé trop lent mais l'héroïne ellemême doit faire preuve de patience et c'est justement de cette attente qu'il est question dans le film.

Peut-être un peu. Il y a certainement des gens qui sont récemment venus me voir sur scène mais qui ne me connaissait pas avant la sortie de cette bande originale. Ma musique est un peu comme une lente combustion dans la mesure où les gens la découvre petit à petit. Cette bande originale, c'était une occasion pour moi de grandir en tant qu'artiste et c'est à ce niveau que je ressens du changement grâce à cette expérience. J'aimerais en faire d'autres. Tu as plusieurs albums à ton actif. Es-tu frustrée de ne pas avoir été présentée au grand public avant la sortie de ce film ? Non mais je l'aurais été si la chanson n'avait pas été

Quelle est ta bande originale préférée ? Celle de Pulp Fiction. Pour finir, si tu devais convaincre quelqu'un d'acheter ton album qui vient enfin de sortir en France, que lui dirais-tu ? Je serais probablement la pire vendeuse mais je dirais un truc du genre "Donne-lui une chance !"




CHRISTOPHE

Par Dine Delcroix / Photos: François Berthier

Succès phénoménal commencé en 2007 avec l’album Mon Paradis, Christophe Maé fait partie aujourd’hui des chanteurs français les plus prisés. Pour son troisième album intitulé Je Veux Du Bonheur, il est parti chercher l’inspira-

tion en Louisiane, une terre musicale de jazz et de marching bands qui transparaît clairement dans ses nouvelles chansons.

MAE



Tu fais partie des artistes qui se sont fait connaître grâce à une comédie musicale mais tu es l’un des rares à avoir réussi à faire oublier cette étiquette. En as-tu conscience ? Oui mais ce n’est pas volontaire. C’est cette comédie musicale qui m’a révélé et je me suis éclaté à la faire. J’ai vécu l’aventure comme si j’étais dans une cour de récréation pendant trois ans. C’est vrai que, très vite, quand le single On s’attache est sorti, les gens me parlaient de la chanson et non de mon rôle dans «Le Roi Soleil» même si certaines personnes m’ont connu avec ce spectacle. Je n’ai pas subi l’étiquette ‘comédie musicale’ et on m’en parle de moins en moins aujourd’hui. Comment l’expliques-tu ? Peut-être parce que je n’avais pas le premier rôle contrairement à Emmanuel Moire. Ta participation à cette comédie musicale a-t-elle freiné le démarrage de ta carrière solo ? Non, au contraire ! Je composais en parallèle. J’avais des titres comme On s’attache et Ça fait mal avant la comédie musicale mais toute la difficulté était dans le fait de rencontrer les bonnes personnes pour les faire connaître. Mon rôle de gay excentrique dans « Le Roi Soleil » m’a apporté un capital sympathie auprès des gens et j’en ai profité pour sortir mon album. La journée, j’étais en studio pour enregistrer mes chansons et, le soir, j’étais en représentation au Palais des Sports.

Ton nouvel album s’intitule Je veux du bonheur. N’es-tu pas heureux ? Je suis le plus heureux de la terre mais je veux que cela dure car je suis gourmand (rires). L’être humain est un éternel insatisfait. On est tous en quête de bonheur ! Comment en es-tu venu à travailler avec Serge Lama sur la chanson qui a donné son titre à l’album ? Je l’ai rencontré pendant Les Enfoirés il y a environ trois ans. J’adore son écriture et je lui avais dit que j’aimerais bien chanter ses mots. Il y a un an, je l’ai appelé en lui demandant de m’écrire une sorte de mantra. En pleine nuit, il m’a envoyé quelques phrases. Ensuite, je suis allé chez lui et on a fait le texte dans la journée. Nous avons eu une belle complicité. À quel niveau cet album est-il influencé par la Nouvelle-Orléans ? À la fin de ma précédente tournée, je n’arrivais pas à composer. Je suis parti en Louisiane, j’y suis resté quinze jours et j’ai décidé d’y retourner avec un ami musicien. Là-bas, j’ai eu une révélation devant un Marching band. C’est un groupe de quatre personnes qui jouent ensemble sans partitions et qui improvisent sur une suite harmonique. L’album est justement inspiré de la Nouvelle-Orléans au niveau des cuivres. J’avais essayé d’en mettre sur les deux premiers albums mais cela ne collait pas. C’est un endroit qui m’a vraiment inspiré. Une grosse partie de l’album a été fait là-bas.


Tu as également tourné le clip du premier single là-bas... Oui, je voulais vraiment avoir un côté fanfare comme je l’avais vécu. Je ne pouvais pas parler de la Nouvelle-Orléans sans ce visuel. Pour capter un univers, il faut avoir les images qui vont avec. Voyages-tu beaucoup ? Dès que j’en ai l’occasion. Est-ce toujours dans le but de trouver l’inspiration ? Pas forcément mais là, en l’occurrence, c’était pour la musique. Pourquoi as-tu choisi la Louisiane ? Sur mon premier album, j’ai beaucoup parlé de mon père spirituel qui est Bob Marley. J’ai mis des couleurs des Caraïbes, des pulses reggae, chaloupées... C’était encore un peu présent sur le second album même si c’était plus africain suite à un séjour effectué en Afrique. Après la Jamaïque et l’Afrique, j’ai voulu me tourner vers les États-Unis pour le troisième album. J’avais toujours entendu parlé de la Nouvelle-Orléans comme étant une oasis d’artistes que tout musicien se doit de voir. Il y a un fort métissage là-bas. J’ai eu un coup de cœur pour cet endroit. J’ai squatté des piano-bars et j’ai y pioché des idées. D’ailleurs, sur scène, ce sera smoking pour tout le monde (rires). En quoi cet album est-il ton disque le plus abouti ? Avec le temps, je deviens de plus en plus perfectionniste. C’est viscéral ! Quand je

fais une chanson et qu’elle ne me procure aucune émotion, je la jette. J’ai eu une belle rencontre sur cet album en la personne de Mike Ibrahim avec qui j’ai co-écrit pratiquement tous les textes. J’ai pour habitude de démarrer mes textes de mon côté, de trouver les refrains et les thèmes car je sais exactement ce que je veux raconter et comment le raconter. Mike Ibrahim m’a amené les mots, la forme, la poésie, la profondeur et la gravité que je n’avais pas. Je crois que l’aboutissement de l’album passe par les textes. Comment avez-vous travaillé tous les deux ? Il est venu passer quelques mois chez moi dans le sud de la France. C’était une belle collaboration car nous avons écrit tout l’album ensemble, côte à côte. Un vrai travail d’échange. En écoutant l’album, on a le sentiment que tu te livres davantage que dans tes disques précédents. Es-tu du même avis ? Je ne sais pas si je me livre davantage. Je fais peut-être passer plus d’émotions de par le choix des mots car j’ai écrit assez spontanément. Dans la chanson Ma douleur, la peine, de quelle douleur est-il question ? Je ne trouvais ni textes ni mélodies pour cet album et je commençais à cumuler les nuits d’insomnies. J’ai donc commencé à souffrir de cette page blanche. Ma douleur et ma peine étaient causées par cette panne d’inspiration. C’est le premier titre que j’ai écrit pour l’album mais il peut s’interpréter de beaucoup



d’autres façons.

rare.

La poupée traite de l’abandon. Comment t’es venu ce texte ?

Le premier single extrait de ton nouvel album s’intitule Tombé sous le charme. Qu’est-ce qui te charme chez une personne ?

Il y avait une fille qui faisait la manche en bas de chez moi. J’avais l’habitude de la croiser tous les matins et de parler avec elle. Un beau jour, elle a disparu et je ne l’ai plus jamais revue. Son absence m’a inspiré La Poupée, une chanson qui parle d’une personne laissée à l’abandon. Je ne sais pas ce que cette fille est devenue... Charly est également un texte très dur... Oui. Charly parle de la fille d’un couple d’amis. Elle avait 4 ans lorsque je l’ai connue et, à l’âge de 14 ans, elle a eu une tumeur au cerveau qui a eu raison d’elle en l’espace de trois mois. J’ai été très touché, étant moi-même père d’un petit garçon de 5 ans. Tu as également éprouvé le besoin d’écrire sur la nature avec À L’abri... Oui. J’ai écrit sur l’ouragan Katrina qui est passé en Louisiane. Je ne pouvais pas retranscrire l’univers qui m’a plu là-bas sans évoquer cet ouragan qui a mis le pays à plat. 90% de la population a tout perdu et est repartie de zéro. L’automne parle d’un homme qui est passé à côté du grand amour. Est-ce autobiographique ? Non, ce n’est pas une chanson autobiographique. J’ai tout imaginé. C’est le titre qui m’est venu le plus facilement et c’est

Son naturel, sa connerie, sa générosité, sa gentillesse... Des qualités qu’on aimerait tous avoir. Au début de ta carrière, tu as fait beaucoup de premières parties. Laquelle t’a le plus marqué ? Celle de Seal au Grand Rex. J’avais parlé avec lui et il était même venu m’écouter pendant la balance. Quels sont les artistes francophones qui ont attiré ton attention dernièrement ? Il y a Maître Gims avec son énergie et sa voix. Je trouve que c’est un bon mélodiste. J’aime beaucoup Youssoupha aussi. Tu n’écris pas que pour toi puisque tu as notamment eu l’occasion de le faire pour Line Renaud et Johnny Hallyday. Comment en estu venu à travailler avec deux icônes de la chanson française ? Pour la chanson Étreinte fatales, c’est Johnny qui m’a contacté. Quant à Line Renaud, je dînais à Nantes dans un restaurant après un interview en radio. Line venait de finir de jouer dans une pièce de théâtre. Elle est entrée dans le restaurant et elle m’a abordé spontanément en m’expliquant qu’elle préparait un album dans lequel elle aimerait bien une chanson de moi. C’est allé assez vite et j’ai ainsi écrit Dans ma tête.




Pour qui aimerais-tu écrire ? J’aimerais écrire encore pour Johnny mais ce sont des choses qui se font naturellement. Quel genre de rapports as-tu avec la presse ? J’ai de bons rapports avec la presse. Je suis serein et je ne donne pas matière à me faire taper dessus. Je fais simplement ma musique mais je ne peux pas faire l’unanimité. Comment réagis-tu face à une mauvaise critique dans un journal ? Je la lis mais, deux heures après, je n’y pense plus. Que ressens-tu lorsque des journaux comme Le Figaro publient le montant de tes gains annuels ? Cela ne me touche pas et j’essaye de ne pas trop y prêter attention. Y a-t-il une question que tu aurais aimé que je te pose ? La question que j’aurais aimé que tu me poses, c’est «Comment tu vas ?» mais tu t’en fous ! Toi, tu arrives et tu balances ton interview ! (rires).


Orchestral manoeu in the Le

groupe culte fo phreys est actuellem vel album English E soi un petit événeme sûres de la synthpop

Par Dine

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rchestral manoeuvreS the dark

ondé par Andy McCluskey et Paul Humment en tournée pour promouvoir son nouElectric paru au printemps dernier. C’est en ent tant le groupe reste l’une des valeurs p. Entretien avec le duo indémodable.

e Delcroix / Photos : François Berthier

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Votre dernier album ramène à l’essence de vos débuts. Aviez-vous la volonté de revenir aux sources de votre travail ? Andy : Oui ! Lorsque nous nous nommes retrouvés il y a 6 ans, c’était initialement pour faire quelques concerts et c’était bien pendant 2 ans mais, au bout d’un moment, nous avions l’impression de rendre hommage à notre propre groupe en jouant tout le temps les mêmes anciennes chansons. Le problème, c’est qu’à un certain âge, c’est aussi dangereux que stupide de faire un nouvel album car, quand les gens vieillissent, ils n’ont plus la même énergie ni les mêmes idées. Nous avons dû nous convaincre nous-mêmes que nos idées étaient assez bonnes pour faire de nouvelles chansons. Pour cet album, il a fallu oublier ce que nous avons appris pendant 30 ans pour renouer avec les adolescents des années 70 que nous étions.

avions militaires, des locomotives et des ordinateurs. Elle a cessé d’exister alors quelle construisait le futur et nous avons utilisé son nom comme une métaphore pour notre groupe. En revanche, si les Pet Shop Boys se mettent à écrire des chansons intitulées Joan Of Arc et Enola Gay, je m’inquiéterais (rires). Y a-t-il un lien entre votre tube Joan of Arc et la chanson Helene Of Troy qu’on retrouve sur ce nouvel opus ? Andy : Le titre Joan of Arc est né d’une fascination pour le personnage historique de Jeanne d’Arc. Les gens font un parallèle entre ces deux chansons alors qu’elles ne sont pas liées. Je voulais être archéologue quand j’étais jeune. Lorsque j’ai commencé à lire au sujet de

Tout à coup, tu fais pa chine et tu ne sais pas

Paul : Avec la technologie moderne, nous pouvons obtenir énormément de sons et en rajouter sans cesse mais nous avions envie de voir si nous étions capables de faire des choses aussi simples et efficaces que celles que nous faisions dans le passé. L’album s’intitule English Electric. Et si je vous disais que le prochain album des Pet Shop Boys s’appellera Electric ? Paul : Cela ne me surprend pas (rires). Andy : Nous sommes au courant. Ils font de la musique électronique donc c’est assez logique. Le titre English Electric nous va bien parce que nous sommes anglais et que nous sommes un groupe electro. Il y avait une entreprise qui s’appelait English Electric. Elle fabriquait des

Jeanne d’Arc, j’ai écrit deux chansons sur elle. Elle est fascinante parce qu’elle était bien réelle. Il y a un tas d’histoires sur Jeanne d’Arc. Chaque historien y va de son regard. À son propos, on trouve des histoires féministes, nationalistes... Inversement, personne ne sait si Hélène de Troie a vraiment existé. La chanson Helene Of Troy est différente de Joan of Arc parce qu’elle ne parle pas directement du personnage. J’utilise Hélène de Troie comme une métaphore pour exprimer la distance et la séparation dans une relation. Qu’est-ce qui a motivé votre retour ? Paul : Le désir. Nous avons cessé d’écrire ensemble pendant des années donc c’était vraiment excitant. Personnelle-


ment, j’ai adoré retravailler avec Andy. La chimie est de retour. C’est un peu comme si nous retombions en enfance et nous nous amusons à le faire. Andy : Nous ne le faisons pas pour l’argent, c’est sacrement sûr ! Nous sommes revenus avec deux albums et nous faisons encore des tournées parce que nous sommes vraiment engagés. Je comprends pourquoi les gens entrent dans l’industrie de la musique et ne veulent jamais y renoncer. C’est une addiction, c’est comme une drogue. Ils veulent continuer à voyager, ils aiment entendre les cris de rappel du public. Nous ne voulons pas être de tristes vieillards qui jouent constamment les mêmes vieilles chansons ni faire un pastiche de nous-mêmes. Tous les groupes disent la

Avez-vous perdu le contrôle de votre carrière, à un moment donné ? Andy : À la fin des années 80, nous écrivions des chansons parce que nous devions faire des albums. Lorsque nous avons commencé, nous faisions des albums parce que nous devions écrire des chansons et c’est justement la mentalité que nous avons aujourd’hui. Si nous avons besoin d’écrire des chansons, nous les écrirons et nous ferons une tournée mais il n’y a rien d’obligatoire quand c’est ce que nous voulons faire. Au début, tu commences avec des principes artistiques et des concepts puis, sans même t’en apercevoir, tu te mets à en faire un métier pour payer tes factures. Tu te retrouves marié avec des enfants et il y a un manager et une maison de disques qui te demandent quand sortira le prochain album et quand aura lieu la prochaine tournée. Tout à coup, tu fais partie d’une grosse machine et tu ne sais pas comment c’est arrivé.

artie d’une grosse macomment c’est arrivé. même chose mais beaucoup d’entre eux racontent des conneries car ils pensent faire quelque chose de frais et d’intéressant alors que ce n’est pas le cas. Ils font juste un nouvel album parce qu’ils ont besoin d’un nouveau nom pour une nouvelle tournée. Je pense que «English Electric» montre que nous avons encore quelques bonnes idées. Je ne citerai aucun nom mais il y a des groupes de notre âge qui refont les mêmes sons et cela sonne vide. Sur scène, nous avons joué huit nouveaux titres et nous avons remarqué qu’il y avait autant d’énergie dans des morceaux vieux de 35 ans comme Electricity que dans les nouvelles chansons. Le plus important, c’est que nous sommes exaltés et, si un jour nous ne le sommes plus, je promets que nous arrêterons.

Pourquoi avez-vous mis le groupe entre parenthèse ? Paul : Je suis parti parce que j’avais juste envie de faire une pause mais notre management ne voulait pas. Nous étions ce groupe que nous n’avons jamais pensé devenir et nous avons souffert d’un certain engouement. Le coût d’un groupe est massif... Nous avons dépensé beaucoup d’argent sur les routes et sur les albums alors nous devions continuer à faire des disques rapidement pour pouvoir payer tout cela. C’était trop ! Andy : Si nous avons continué à faire des albums à l’époque, ce n’est pas parce que nous voulions plus d’argent mais parce


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que nous avions vendu des millions de disques et que nous n’avions pas un sou. Notre management nous faisait faire des tournées en Amérique et cela coûtait cher. Du coup, à la fin des années 80, nous étions fauchés alors que nous avions passé 10 ans à travailler sans arrêt. Il n’y a donc pas eu de dispute entre vous ? Andy : Non, ce n’était pas vraiment une dispute. Paul : Nous sommes très anglais dans ce domaine (rires). Si aviez la possibilité de remonter le temps et de changer une chose dans votre parcours, laquelle serait-ce ?

Andy : Maid Of Orleans et Enola Gay ont souffert de plusieurs dizaines de versions épouvantables. Paul : En effet, il y a eu beaucoup de remixes bruyants et sans mélodie. Vous souvenez-vous de votre premier concert à Paris ? Andy : Oui, c’était aux Bains Douches en 1980. Je me souviens que c’était un lieu surréaliste. Il y avait une baignoire remplie d’eau avec des canards vivants à l’intérieur. La scène était tellement petite ! J’avais l’impression d’être dans un film français. Tout était totalement surréaliste ! Paul :Je suis tombé sur scène (rires). Je me suis cassé la cheville suite à ma chute.

Andy : Le contrat initial ! (rires). Et si vous deviez changer le nom du groupe après 35 ans d’existence ?

Pensez-vous déjà à un prochain album ?

Plusieurs de vos chansons ont été reprises à toutes les sauces. Quelle reprise avez-vous le plus aimé ?

Paul : Nous avons passé beaucoup de temps sur English Electric parce que nous voulions vraiment qu’il soit bon. Très vite après le mixage des titres, nous avons enchaîné avec les répétitions pour les concerts donc nous n’avons pas encore eu le temps de faire une pause mais nous avons commencé à échanger quelques idées pour un éventuel prochain album.

Paul : La version de If You Leave par Nada Surf qui a été faite pour la bande originale de la série The O.C.

Andy : Nous avons effectivement des idées mais rien n’est fait, pour le moment. Ne commençons toujours par les idées.

Andy : La plupart de nos chansons ont un son spécifique et c’est très dur de les reprendre différemment. Ma reprise préférée a été faite par une fille qui s’appelle Hannah Peel. Elle a repris Electricity avec une boite à musique et c’est très charmant.

Prendrez-vous English Electric comme repère artistique ?

Andy : C’est un nom farfelu mais il fonctionne. Je ne pense pas que nous choisirions quelque chose de plus simple.

Inversement, quelle est la pire reprise sur laquelle vous êtes tombés ?

Paul : Nous avons fourni beaucoup d’efforts pour English Electric et nous sommes très fiers de ce disque. Si nous faisons un nouvel album, il devra être aussi bon, voire meilleur.

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SOFIACOPPOLA COPPOLA SOFIA The Bling Ring

Avec The Bling Ring, Sofia se réinvente singulière sensibilité. Decryptage. Par Justin Kwedi / Photos : DR

visuellement mais perd un peu de sa


Sofia Coppola aura exploré de bien des façons au cours de sa filmographie le spleen et la solitude des jeunes filles. L’approche se fit évanescente et rêveuse dans l’inaugural Virgin Suicides (1999), intimiste et romantique dans Lost in translation (2003) et puis fut marquée par un faste de sons et lumières contrebalançant le spleen ambiant dans le superbe Marie-Antoinette (2006). Adolescentes ou jeunes adultes, les personnages féminins y étaient confrontés à leur mal-être et un sentiment d’isolation se

ressentait

constamment l’empathie d’une

Sofia

Coppola y mêlant

beaucoup

de ses propres fêlures.

Ces

trois

premiers

films

consti-

tuaient

dans

leur facture esthétique et l’âge croissant de ses héroïnes

une

sorte de trilogie idéale par rapport à laquelle Somewhere (2010) fit inévitablement figure de redite. Si effectivement Sofia Coppola y creusait sans doute une fois de trop le même sillon, l’ambiance cotonneuse, la fragilité de la jeune Ella Fanning (encore épatante récemment dans Ginger et Rosa (Sally Potter, 2013)) et l’imagerie désacralisée de cet Hollywood le rendaient assez entêtant.


La réalisatrice fait réellement sa mue avec The Bling Ring qui lui ouvre sans doute la voie à d’autres horizons. Le film transpose les méfaits du gang des «Bling Ring», groupe d’adolescents qui entre 2008 et 2009 se firent connaître en cambriolant des résidences de célébrités hollywoodiennes. Après avoir été arrêtés et condamnés, ces forfaits ouvrirent au contraire aux jeunes criminels les portes de la célébrité puisque certains devinrent des vedettes du showbiz ayant entre autres leur propre émission de télé-réalité. Le scénario s’inspire de l’article de la journaliste Nancy Jo Salles consacré au gang paru dans Vanity Fair et la narration comme l’esthétique du film reprennent ainsi ce côté glamour, chic et choc, urgent inspiré des milieux fascinant nos voleurs. Le côté éthéré et en apesanteur ressenti dans tous les films précédents disparait complètement ici. Cette approche se justifiait par la tendance à l’introspection des personnages, mais les «Bling Ring» n’ont guère de temps à y consacrer. Tous va ici très (trop) vite au service du vide : le défilé de citations et d’essayages de marques de luxe quand s’accumule le butin, les sorties en boite pour observer d’un œil envieux les célébrités puis pour exhiber ses atours fraichement dérobés. Les dialogues creux des adultes servant des mantras absurde (excellente Leslie Mann en maman dépassée) annoncent l’avenir de ces jeunes pour l’instant fascinés par l’icône du vide par excellence, Paris Hilton, dont la demeure sera plus d’une fois visitée. L’esthétique est donc à l’avenant, Sofia amplifiant les penchants les plus tapageurs de son Marie-An-


toinette avec une bande son énergique, un montage saccadé et une image passant par divers formats épousant toujours (directement ou non) le besoin des «Bling Ring» d’être regardés. Le format numérique plus immédiatement immersif dans leur intimité alterne ainsi avec les caméras vidéos filmant les intrus, la caméra omnisciente (et moralisatrice ?) de Coppola observant dans une magnifique plongée nos voleurs déambulant dans une maison et bien sûr des inserts des mises à

jour

régulière

des

pages Facebook de chacun après chaque nouveau méfait. Car c’est bien ce désir d’être admirés, regardés et jalousés qui perdra les «Bling Ring», absolument pas discrets quant à leurs activités

nocturnes.

Dépeints ainsi, les personnages

pourraient

sembler

détestables,

d’autant que Sofia Coppola ne se reconnaît pas en eux, au contraire de ses œuvres antérieures (la plongée précitée affirmant cette distance face aux évènements). Néanmoins, même si déformée à l’aune de la génération Facebook / Twitter, cette communauté adolescente ne diffère pas tant de celles passées et le film évite tout constat réactionnaire. Les jeunes acteurs sont épatants de complicité et d’énergie, la superficialité comme la lucidité se révélant avec cette nouvelle renommée. Les apartés les montrant en interviews revenir sur les événements apportent ainsi un recul bien-


venu avec un Mark (Israel Broussard, attachante révélation) conscient de ses erreurs, Nicki (Emma Watson à la carrière post Harry Potter toujours aussi épatante) en parade marketing ou le cerveau de l’affaire Rebecca (Katie Chang) au sang-froid glaçant pour son âge. Les cambriolages auront ainsi nourri les manques de chacun, celui de se faire des amis, de posséder et surtout d’être vu.

Sofia Coppola réalise là un pendant au Spring Breakers de Harmony Korine sorti cette année. Seulement, là où Korine stigmatisait le vide du rêve de ses fêtardes adolescentes, il célébrait aussi la liberté et l’hédonisme de leur choix dans une imagerie fantasmée épousant leur trip «sex, drugs and rock’n’roll» jusqu’au bout pour un résultat grandiose (l’extraordinaire séquence sur le Everytime de Britney Spears ou le finale façon «girls and guns»). Le rêve était creux vu de l’extérieur, mais c’était le leur et elles le vivaient à fond. Un Michel Gondry savait aussi ramener une vraie bienveillance dans son beau teen movie 2.0 The We and The I (2012) où les artifices modernes révélaient des ados comme les autres. Là, Sofia Coppola parvient à s’extirper de l’impasse où l’avait placée Somewhere pour une vraie réussite dont néanmoins se dégage finalement une certaine froideur. Une mue qui demande confirmation dans une œuvre plus chaleureuse, Sofia Coppola n’est jamais meilleure que quand elle aime et s’identifie sincèrement à ses personnages.



PASSI

-

Par Dine Delcroix / Photos : François Berthier

Du Ministère A.M.E.R. à Bisso Na Bisso

en passant paer «Genèse», Passi a su jalonner son chemin de titres forts en fusionnant rap et musique africaine. Rappeur, producteur et citoyen, il revient en force avec Ère Afrique, un projet riche en mélanges musicaux qui réunit des artistes d’origines diverses. Cette année, il est également parrain du festival Paris Hip Hop 2013. Rencontre avec un homme à tout faire.

Tu reviens avec un nouvel album intitulé Ère Afrique. Était-ce important pour toi de rendre hommage au continent africain d'une façon aussi explicite ? Je fais des trucs pour l'Afrique depuis déjà un moment mais, là, c'était vraiment pour marquer une nouvelle période dans laquelle l'Afrique est en train d'aller de l'avant, petit à petit mais sûrement. En Afrique, il y a des capitales où il fait mieux vive maintenant que dans certaines villes d'Europe. De plus en plus de gens vont s'installer là-bas car ils trouvent pas mal de choses à faire et à développer. Économiquement, certains pays d'Afrique sont en pleine expansion avec encore beaucoup de choses culturellement inexploitées. L'album s'ouvre sur le titre Nouvelle Ère. À quelle nouveauté fais-tu référence dans cette chanson ? C'est un titre qui fait référence au changement des périodes et des modes. Avant, on mettait des jeans larges, maintenant on est passé au jean slim. De même, on vivait sans Internet alors qu'on ne peut plus s'en passer, aujourd'hui. La chanson parle donc des nouvelles habitudes de la société. On retrouve beaucoup de duos sur ce disque. Tu n'aimes plus travailler en solo ? J'aime bien travailler tout seul mais je viens d'une famille nombreuse et j'ai toujours eu beaucoup de gens autour de moi. J'ai d'ailleurs commencé avec un groupe. En même temps, j'ai fait six albums en solo donc il y a déjà beaucoup de titres sur lesquels je suis seul. J'adore m'amuser en groupe comme je sais me mettre en danger tout seul au milieu de la scène. Tous ces duos sont des expériences acquises et j'aime ce côté expérimental car les autres artistes m'apportent énormément. Je suis comme un scientifique dans son laboratoire (rires). Parmi tous les duos de ta carrière, as-tu une préférence ? Il y a des duos qui ont cartonné, aussi bien Face à la mer avec Calogero pour le public européen que Laisse parler les gens avec Jacob Desvarieux pour les Antilles ou encore Le monde est à moi avec Akhenaton qui est devenu un classique aujourd'hui mais je ne pourrais pas répondre car les titres sont comme les enfants: on ne peut pas en choi-


sir un. Il y en a qui sont plus réussis que d'autres mais je suis fier de chacun et je les assume tous. Le choix des artistes avec lesquels tu collabores surprend par sa diversité. Tu as pu chanter avec un grand monsieur de la musique comme Johnny Hallyday mais tu fais aussi des chansons avec des artistes plus jeunes et donc moins connus... Oui et je pense que les gens m'aiment bien aussi pour cette raison. C'est bien de se frotter à des grands mais c'est aussi bien d'être capable de s'ouvrir à des jeunes artistes qui ont une autre vision. Dans une grosse équipe, on a toujours besoin de nouveauté pour exciter la rigueur. Dans ton domaine, tu as connu tous les styles: du rap conscient au rap politique en passant par un rap plus hardocre. Dans quel registre s'inscrit ce nouvel album ? L'album se divise en trois parties: une partie consciente, une partie lover et une partie un peu dansante mais c'est globalement un rap ensoleillé pour délirer et s'évader hors des réalités françaises et des informations de tous les jours. Côté rap américain, quel est ton dernier coup de cœur ? Celui que j'ai bien aimé récemment, c'est Meek Mill. Il a la jeunesse, la fraîcheur et du style. Il fait partie d'une grosse famille avec Rick Ross donc il est bien entouré. En mars dernier, tu as sorti Explication de textes, un livre coécrit avec ton frère dans lequel tu approfondis les thématiques de certains textes de tes chansons. Qu'as-tu voulu démontrer avec cet ouvrage ? Le hip-hop est un mouvement qui n'a pas été bien expliqué culturellement. C'est un mouvement qui vient de fêter ses 30 ans et qui a vendu des millions d'albums mais sur lequel on a beaucoup d'a priori. Quand tu fais un livre comme celui-ci, tu enlèves la musique et tu gardes les paroles pour permettre aux gens de percevoir le côté journalisme de rue qu'il y a dans cette culture. Dans le hip-hop, certains misent sur l'attitude et le style mais d'autres racontent tout simplement ce qui se passe en bas de chez eux et c'est cette sorte de journalisme de rue que j'ai voulu démontrer avec ce livre. Qui a eu l'idée de ce livre ? C'était mon idée mais comme mon petit frère est toujours derrière moi et qu'il me pousse sans cesse à me surpasser et à faire de nouvelles choses, on a fini par le faire ensemble. As-tu l'impression que les gens ne comprennent pas toujours le sens de tes textes ? Oui et pas seulement les miens car ils ne comprennent pas certains textes de rap de français tout court. Dans ce livre, j'ai fait les choses à mon niveau avec mes propres textes et mon expérience mais j'aurais aussi très bien pu mettre des textes d'autres 126



artistes à expliquer. Il m'aurait alors fallu des autorisations donc c'était plus simple de prêcher pour ma paroisse (rires). Toutes ces choses que tu fais parallèlement à ta carrière solo t'empêchent-elles d'avancer sur tes projets personnels ? Le fait de gérer des groupes, de produire des artistes et de faire des duos me laisse forcément moins de temps pour travailler sur mes affaires et j'en suis conscient mais, en même temps, je sème une partie de moi dans chacun de mes projets et c'est un choix. Que je sois derrière la caméra, derrière le micro ou derrière la console, j'aime avoir une vision de tous les postes pour me sentir mieux et j'ai appris à le faire avec l'expérience. J'aime être un homme de l'ombre qui dirige un artiste et j'assume aussi d'être dans la lumière. C'est sûrement pour cette raison qu'on a pu te voir à quelques reprises dans des films pour le cinéma. Aimerais-tu en faire davantage ? Oui. Le cinéma, c'est un truc de grand gamin avec de la création et de l'imagination... C'est comme le fait de prendre un stylo et une feuille blanche afin de créer un univers et un concept pour un morceau sauf que le cinéma te donne tout en bloc grâce aux costumes, aux scénarios et aux moyens mis en œuvre. Que penses-tu de la reconversion du rappeur JoeyStarr dans ce domaine ? Il a plein de rôles, c'est bien. C'est réussi et ce n'est franchement pas évident en France de changer de casquette alors s'il arrive à le faire, il faut l'applaudir. Il fait partie des premiers rappeurs donc c'est une voie qu'il trace aussi pour les autres. En 2007, tu as été membre du jury de la septième "Star Academy ". Comment t'es-tu retrouvé dans cette aventure ? Nathalie André, l'ancienne directrice de la "Star Academy", voulait rajeunir l'émission et lui donner un côté plus urbain. Elle avait une liste de rappeurs en tête en j'en faisais partie. Quand elle m'a demandé, j'ai dit "oui" car la télé-réalité fait partie aujourd'hui de la communication moderne. On a toujours imité les programmes des États-Unis et quand on regarde là-bas, Puff Daddy a son émission depuis longtemps tout comme Will.i.am ou encore Run-D.M.C. et plein d'autres rappeurs. À l'époque, beaucoup de gens se plaignaient de ne pas voir assez de rappeurs dans les émissions françaises alors c'était pour moi l'occasion d'être plus présent dans le paysage audiovisuel. C'était aussi une façon de montrer que j'étais capable de remplir cette fonction car on me demandait de juger des artistes qui chantent et c'est justement ce que je fais tous les jours en studio depuis vingt ans donc c'était facile pour moi.

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Nina Meurisse Après un premier rôle en début d’année dans le film Crawl de Hervé Lasgouttes, et du nouveau film d’Agnès Jaoui Au bout du conte, on retrouve Nina dans plusieurs films à la rentrée. Rencontre avec une artiste qui multiplie les projets et s’installe pour de bon dans le paysage cinématographique. Par François Berthier & Auriane Besson / Photos : Pauline Darley Stylisme : Sarah Delannoy Make up & Hair : Alexandre Nicoud



Tu as commencé ta carrière d’actrice très tôt dans le film Saint-Cyr avec Isabelle Huppert, comment as-tu vécue cette expérience ? C’était un univers tout nouveau pour moi. J’ai tout de suite adoré l’ambiance d’équipe et le fait qu’on me donner certaines responsabilités, j’avais l’impression de faire parti « des grands ». Est-ce que cela a été déterminant pour toi dans ton désir de devenir actrice ? Oui ça a été le point de départ, c’est un métier auquel je n’avais jamais pensé avant. Tu réalises un premier court à 14 ans. tu souhaiterais revenir à la réalisation ? Oui j’aimerais beaucoup. J’ai réalisé un documentaire récemment mais la fiction me plairait aussi. L’envers du décor m’attire de plus en plus. Tu as tourné deux courts avec Frédéric Mermoud, puis son 1er Long. Quel regard portes-tu sur son travail ? J’aime beaucoup sa manière de diriger les comédiens et de travailler avec l’équipe. Il arrive à fédérer tout le monde autour de son univers et ça donne une ambiance à la fois studieuse et très joyeuse. C’est un réalisateur que j’admire beaucoup, et je retravaillerais avec lui les yeux fermés. Dans Complices, tu apparais souvent nue. quel est ton rapport à la nudité ? Je n’ai pas de rapport particulier juste celui qu’elle doit être justifiée. Jusqu’ou peux tu aller pour un rôle ? (prendre du poids, apprendre une langue…) 132

A priori je ne me fixe pas de limites. J’aime les défis et le fait d’apprendre de nouvelles choses. Aussi l’idée de faire quelque chose à l’opposé de ce que je suis, nourrit mon désir pour ce métier. Tu as eu également de nombreuses expériences au théâtre et dans des téléfilms, privilégies–tu uniquement le cinéma désormais ? Le court des choses m’a poussé vers le cinéma depuis plusieurs années mais j’aimerais refaire du théâtre. Me confronter à la scène, au travail du corps et au public. Qu’est-ce qui te détermines quant à ta participation à un projet de film ? Le scenario, la rencontre avec le réalisateur mais surtout les écarts de genres. J’aime l’idée de passer d’un film dramatique à une comédie, d’un personnage très autoritaire à un autre totalement désinvolte... Tu as joué un premier rôle dans le film Crawl de Hervé Lasgouttes sorti en janvier, un film profondément social, est-ce cela qui t’as plu ? As-tu une préférence pour les films d’auteurs ? C’est vrai que j’aime l’idée de faire un film engagé ou du moins ancré dans un contexte social. En l’occurrence celui de toujours devoir se battre pour garder la tête hors de l’eau. Mais je n’ai pas préférence particulière pour les films d’auteurs, seulement l’envie de rencontrer de nouveaux univers. « Lulu femme nue », réalisé par Sólveig Anspach dans lequel tu joues, sort bientôt : parle nous de ce film, quel rôle tiens-tu ? Celui de Virginie une serveuse maltraitée par sa patronne ( l’incroyable Corinne Masiero ) qui croise un jour le chemin de Lulu


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(interprété par Karine Viard) et Marthe (Claude Gensac). J’avais depuis très longtemps envie de travailler avec cette réalisatrice et la rencontre avec les autres acteurs a été formidable. Tu me disais que tu avais du mal avec l’idée de sortir «pour rencontrer» du monde dans le milieu du cinéma. Oui en tous cas si je sors, c’est pour voir des gens que j’aime, rencontrer des personnes nouvelles mais sûrement pas dans le but de séduire ou de travailler. Tu attends les projets ou tu vas à leur rencontre ? J’essaie le plus possible d’aller à leur rencontre. Aller aux Festivals, voir des courts-métrages, me tenir au courant des scénarii en cours. Mais c’est un travail d’équipe avec mon agent Christopher Robba et son assistante Camille Gast, sans eux je n’en serais pas là !!

allée et pour lequel tu n’a pas été prise ? Pour le film Augustine de Alice Winocour mais Soko y est renversante dedans ! Tu as fait quoi de ton premier cachet ? J’étais trop jeune, ça été sur un compte épargne. Les acteurs sortent souvent entre eux, penses-tu que seul un acteur puisse comprendre un acteur ? Oula non c’est bien ça le problème, on nous entretient là-dedans ! Pour finir, quels sont tes projets ? Il y a la sortie de plusieurs films prévu d’ici fin 2013 (Lulu, femme nue de Solveig Anspach, Juliette de Pierre Godeau, Africaine de stéphanie Girerd). Mais surtout, une furieuse envie de mettre en route mes propres projets.

Peux-tu nous donner un casting auquel tu es

Le dernier film coup de cœur au cinéma ?

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Te(s) réalisateur(s) fétiche(s) ?

Mud de Jeff Nichols. L’image y est sublime et le casting irréprochable.

Xavier Dolan, Michel Gondry, Alain Guiraudie et tant d’autres.

L’acteur ou l’actrice avec qui tu aimerais partager l’affiche ?

Quel rôle aurais-tu rêvé d’interpréter au cinéma récemment ?

Peter Sellers, ça sera mon plus grand regret !

La petite fille dans Moonrise Kingdom de Wes Andersonm


Perfecto en cuir BA&SH Chemise perso Pants SINEQUANONE Collier CHARLOTTE MARTYR Bague de main PP FROM LONGWY

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Before Sunrise/Before Sunset : le diptyque romantique Le réalisateur Richard Linklater et son duo d’acteur Ethan Hawke/Julie Delpy s’apprêtent à donner un (probable) point final à leur saga romantique avec Before Midnight le 26 juin. C’est l’occasion de revenir en profondeur sur ce qui fit le charme et l’originalité des deux premiers volets, sans doute la vision du couple la plus juste et touchante jamais réalisée. Par Justin Kwedi / Photos : François Berthier, Dr.

Before Sunrise : amours de changer de place et se retrouve à côté d’un jeunesse jeune touriste américain (Ethan Hawke) en Grande révélation du cinéma indépendant américain du début des 90’s Richard Linklater avait avec ses deux premiers films Slacker et Générations Rebelles ancré ses thèmes autour des interrogations d’une jeunesse américaine paumée, en plein doute sur son avenir. Before Sunrise, pure comédie romantique, semble marquer une rupture avec cet immédiat début de carrière mais en offre au contraire un prolongement idéal que ce soit narratif (l’unité de temps et de lieu de Slacker et Dazed and Confused est reprise et encore plus poussée), stylistique (le tournage à la dure des deux premier films a rendu possible l’exploit de mise en scène immersive de Before Sunrise au budget plus élevé) et thématique puisque ces questionnements juvéniles acquièrent une aura universelle dans un type de film tout différent. Une ligne de train européenne entre Budapest et Vienne. Un wagon agité par la dispute d’un couple bruyant. La jolie voisine française (Julie Delpy) dérangée décide de 136

vadrouille. La conversation s’engage, ils sympathisent, une certaine complicité et séduction s’installe mais voici que l’on est déjà arrivé à Vienne où il doit descendre alors qu’elle poursuit sa route jusqu’à Paris. Coup de tête, coup de foudre, il décide de lui demander de passer la journée avec lui jusqu’à son départ le lendemain pour prolonger ce moment et elle accepte. La magie peut commencer... L’argument de la narration en temps réel donne une fougue et une liberté au récit qui se prolonge dans la mise en scène de Linklater, extraordinaire par sa justesse et surtout son invisibilité, entièrement au service des déambulations et des états d’âmes de ses personnages. Ce qui lui importe c’est de capter avec une infinie délicatesse la naissance d’un sentiment amoureux, ce dont il parvient subtilement à plusieurs reprise tel ce court moment dans le train où Jesse (Ethan Hawke) narre un anecdote triste de son enfance et que la caméra s’attarde longuement en plan fixe


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sur le regard de Céline soudainement at- que le cadre se fait plus intime tel ces aveux touchant sur un banc dans une tendrie, troublée et amoureuse. Notre couple arpente donc une Vienne ruelle sombre, où ce silence à l’écoute idéalisée et romantique, échangeant ré- d’un disque où les deux se cherchent et se flexions et anecdotes sur leurs vies, le fuient du regard en même temps. Les renmonde dans lequel ils vivent, les relations contres anodines et magiques créent des hommes/femmes. L’alchimie entre Ethan souvenirs inoubliables pour ce moments Hawke et Julie Delpy est fabuleuse et tous unique (le poète improvisé, la voyante) et deux sont confondants de simplicité et de le verbe se fait plus disert au fil de l’arrivée naturel. Lui nous touche par sa gouaille du jour et de la séparation inéluctable. Les dissimulant mal un côté emprunté où se derniers instants du film sont un vrai dédévoile une vraie fragilité. Quant à Julie chirement tant on a appréciés cette balade Delpy, difficile de ne pas en tomber amou- en amoureux et en ces temps pré portable, MSN, Facebook et autres Linklater ose la

reux durant le visionnage tant elle mêle espièglerie, l’assurance d’une fille de son temps et la pure candeur qui sommeille en toute jeune fille amoureuse. Linklater les accompagne par de longs plans séquences à travers une Vienne rêvée, des plans fixes où rien n’existe plus que le regard de l’un plongé dans celui de l’autre. Si les échanges sont constamment prenants, c’est pourtant lorsqu’ils s’amenuisent (parler constamment permet finalement d’éviter d’aborder l’essentiel)

chute divinement romantique en forme de point d’interrogation pour la suite de leur histoire.

Before Sunset : Fêlures d’adultes A l’occasion du tournage de l’expérimental Waking Life (2001) qui réunissait à nouveau Ethan Hawke et Julie Delpy, Richard Linklater eut l’idée avec les deux acteurs de donner une suite à l’aventure. Si le film avait fait une carrière commerciale relativement confidentielle (mais obtint néan139



narrative (ellipse, changement de décor) ou de montage hormis quelques plan de coupe. Linklater reprend donc le principe de mise en scène effacée et fluide du premier film, tout en long plans séquences (bien plus étirés et virtuoses cette fois) accompagnant la marche du couple. Pour qui enchaînera dans la foulée les deux films, le plaisir est d’autant plus appréciable que le réalisateur fait le lien visuel entre eux de manières affichées lors des courts inserts de scènes de Before Sunrise au début et surtout en réutilisant certains motifs communs. Before Sunrise se concluait ainsi sur divers plans fixes montrant les lieux désormais déserts visités tout au long du film par les héros. Before Sunset use de la même idée de manière inversée dans son généLa grande interrogation qui nourrissait rique d’ouverture avec les mêmes plans la conclusion de Before Sunrise (vont-ils fixes cette fois sur les lieux qui seront trase revoir?) trouve en partie son explica- versés plus tard tout au long du récit. tion dès l’ouverture où on retrouve Jesse Before Sunrise était une merveille de ro(Ethan Hawke). Celui-ci a écrit un livre sur mantisme spontané, innocent et juvénile. la fameuse nuit passée neuf ans plus tôt et Dix ans plus tard, les personnages ont vése trouve en pleine promotion dans une cus, fait d’autres rencontre et souffert, on petite librairie parisienne. Comme dans passe de post adolescent à des trentenaires un enchantement apparaît alors Céline endurcis. Le ton du film s’en ressent et les venu à sa rencontre. Le rendez-vous fixé personnages se livrent moins directement. à l’époque fut manquée pour des raisons La discussion part donc du plus commun à que nous découvrirons mais en attendant, travers la situation personnelle de chacun, ils viennent de se retrouver et avant que teinté d’un détachement et d’une distance Jesse reprenne son avion, la discussion amusée sur l’idéalisation de cette nuit paspeut reprendre là où ils l’avaient laissé sée ensemble des années plus tôt. Pourtant la connexion entre eux est toujours là et dans un Paris ensoleillé. Le sentiment de narration en temps réel au fil de l’après midi et de l’urgence d’une était plus diffus que manifeste dans Before nouvelle séparation, les sentiments intacts Sunrise vu la durée du périple (toute une vont de nouveaux affluer. Les échanges nuit) à retranscrire. Before Sunset s’astreint analysent avec une belle justesse les comlui réellement a cette contrainte puisque portements que leur première rencontre et la durée resserrée du film (1h17 à peine) surtout les retrouvailles manquées ont procorrespond réellement au rythme de la voquées en eux. Jesse s’est réfugié dans les ballade des héros sans la moindre astuce responsabilités d’un adulte à travers un mamoins l’Ours d’Or au festival de Berlin et plus cocasse une nomination au prix du plus beau baiser au MTV Movie Award), il avait durablement marqué tous ceux qui l’avaient vu et acquis au fil des ans un statut culte. L’idée était donc de reprendre le principe du premier film en narrant à nouveau une romance en temps réel et en dépeignant de manière spontanée et naturelle cet éveil du sentiment amoureux. Before Sunset verra une implication plus forte du duo vedette puisque Delpy et Hawke co écrivent cette fois le script avec Linklater (ou du moins sont crédités puisque Delpy admettra avoir déjà en partie écrit le premier volet), les échanges entre eux se nourrissant désormais plus fortement de leur vécu.

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riage malheureux tandis que Céline affiche bande son comporte d’ailleurs plusieurs désormais une distance constante dans ses chansons de son très bel album sorti avant le tournage et offre le plus beau moment relations avec les hommes. Ils ont tous deux bien compris qu’ils du film lorsqu’elle interprète son A Waltz s’étaient ouvert comme jamais depuis et For A Night pour Jesse le temps d’une ont réalisés qu’il ne retrouverait plus ja- scène magique. La fin ouverte ravit par mais cette connexion avec un autre. Une son intimisme caressant et laisse une nouforte teinte de spleen et de regret s’im- velle fois le choix à chacun sur les possibiprègnent donc progressivement au film lités futures. tandis qu’ils réalisent ce qu’ils ont perdus. La retenue affichée jusque-là s’estompe totalement alors le temps d’une bouleversante scène en voiture où chacun craque complètement en exprimant combien son existence est malheureuse. Plus mélancolique, Before Sunset n’en est pas moins enlevé et gracieux grâce à la complicité magique et intacte entre Ethan Hawke et Julie Delpy. Toujours aussi écorché vif, Hawke exprime vraiment dans son allure le sentiment d’inachevé de Before Sunrise avec une angoisse qui se mêle au bonheur de retrouver Céline. Julie Delpy plus piquante et en retrait est absolument étincelante dans sa mise à nu progressive et émeut lorsqu’elle exprime enfin sa détresse. Preuve de son investissement, la

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Before Midnight : l’amour mature Après avoir exprimé l’amour à travers les premiers élans juvéniles idéalisés, la manière dont il survit aux premières désillusions de l’âge adulte ce troisième volet ne jouera plus sur la quête mais l’accomplissement ou la fin de cet amour. Jesse et Céline sont désormais en couple et parent et devront cette fois non plus affronter leurs différences (Before Sunrise) ou leurs expérience (Before Sunset) mais cette fois l’usure et le quotidien pour ranimer la flamme si ardente qu’ils ont su partager dans les deux premiers films. On ne doute pas que ce Before Midnight rejoigne ces glorieux prédécesseurs.


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ELODIE FREGE Par Dine Delcroix / Photos : François Berthier ans après La Fille De L’Après-Midi, Élodie Frégé continue de donner libre cours à ses talents d’auteur-compositeur avec Amuse-bouches, un album sexy, mélancolique et onirique dont elle a bien voulu nous parler. La chanteuse a également mis son espièglerie au profit d’une séance photo sensuelle que vous aurez le plaisir de découvrir dans notre prochain numéro, et dont vous pouvez déjà admirer quelques clichés exclusifs en guise de mise en bouche....

Trois

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Tu fêtes tes dix ans de carrière, cette année. Peux-tu essayer de décrire chacun de tes albums en mot ? Je dirais « Obligation » pour le premier, « Révélation » pour le deuxième, « Égoïsme littéraire » pour le troisième et « Liberté » pour le quatrième.

les choses me viennent spontanément. Si elles sont noires et mélancoliques, je les laisse aller et si mon côté espiègle a besoin de s'exprimer par le biais de l'autodérision, l'humour, la sensuali-

Quel regard portes-tu sur ton premier album ?

té exacerbée et la liberté physique, cela ma va aussi. C'est assez simple. Une phrase, un mot dans un roman et un regard dans un film peuvent inspirer une chanson.

beaucoup de mal à reprendre ces chansons en live aujourd'hui même si je sais que beaucoup de gens les aiment.

Je n'ai pas vraiment eu le choix d'imposer mes goûts, que je ne connaissais d'ailleurs pas à l'époque. J'avoue que j'ai

À quel niveau la notion de liberté caractérise-t-elle ton nouvel album ? Je ressens plus de liberté en tant qu'auteur-compositeur et, du coup, je me sens allégée après avoir goûté un petit peu à tout sur les précédents albums. J'ai d'abord été bricolée en tant que gagnante de la Star Academy. Puis, j'ai été muse de Benjamin Biolay qui a révélé ma voix. Ensuite, j'ai été un peu égoïste et j'ai fait ce que j'avais envie de faire sur le troisième album. Il y a plein de choses que je sais faire grâce à ce disque et je suis aujourd'hui à l'affût de tout ce qu'il y a de plus profond en moi en tant qu'auteur-compositeur, que ce soit dans la noirceur, la mélancolie ou la complexité des arrangements. Maintenant, j'ai juste à me laisser porter. Comment écris-tu, en général ? Quand j'écris, il faut que 146

As-tu tout de même une chanson préférée dans cet album ?


Ma chanson préférée dans cet album reste Je te dis non dont j'ai écrit le texte. C'est Georges Lunghini qui a fait la musique. C'est très proche de moi avec cette guitare derrière et ce côté un peu désabusé, une

mais je ne suis pas du genre à regretter. Je savais qu'il fallait que je passe par là donc j'aurais tendance à dire que je ne changerais rien parce que cela m'a aussi permis de savoir ce que je ne voulais

as pu faire par la suite... Cet album, c'est un peu moi parce que j'ai quandmême écrit les textes et co-composé les musiques mais ce n'est pas clairement moi. Ni la personne qui s'occupait de moi à l'époque chez Universal ni moi-même ne savions ce qu'il fallait que je fasse. Que ce soit le directeur du label ou les attachés de presse, personne ne me connaissait. Qu'est-ce qu'ils allaient faire avec une fille qui a juste gagné un télé-crochet ? Il fallait essayer de composer avec mon émotivité et ma voix qui n'était pas encore ma vraie voix parce que je ne l'assumais pas à l'époque. Te considères-tu mélancolique ?

sorte de jeu et de sensualité mais je ne m'étais pas encore trouvée. Si tu le pouvais, que changerais-tu dans cet album ? Tout ! (rires). J'étais jeune

pas faire. Cet album fait partie de ma vie mais je dois avouer que je déteste la pochette. On retrouve pourtant dans cet album un côté "grave" qui ressemble à ce que tu

Je suis une mélancolique contrariée ou alors une espiègle contrariée. C'est plus simple d'écrire des chansons tristes, d'évacuer les souffrances, les nôtres et celles d'autrui. J'ai une grande mélancolie mais j'ai beaucoup d'humour aussi. Je suis très émotive alors j'aime autant rire que me laisser aller à mes émotions. Laquelle de ces deux facettes préfères-tu que les gens aient en tête lorsqu'ils se souviennent de toi ? Je ne peux pas répondre... 147


ÉLODIE FRÉGÉ: DE LA MISE EN BOUCHE À L’AMUSEMENT Interview: Dine Delcroix / Photos: François Berthier



Je crois que j'aimerais qu'on se souvienne de la femme qui assume toutes ses facettes. Je n'aime pas les étiquettes, je suis un paradoxe ambulant. On n'est jamais tout noir ou tout blanc... Du moment que les gens se souviennent de moi ! (rires). As-tu regardé la dernière saison de la Star Academy ? Non. J'étais à Miami en plein travail sur l'album. Regardes-tu des émissions similaires ? Je regarde très peu la télévision. J'ai regardé « The Voice » parce que le samedi soir est un soir que j'ai en horreur. Je déteste sortir le samedi. C'est le jour où tout les gens qui ont bossé toute la semaine sortent et ils se lâchent, ils sont bourrés... J'aime bien l'idée de pouvoir rester tranquille chez moi un samedi soir avec mon chat sur les genoux alors que tout le monde est dehors en train de faire tourner les serviettes (rires). As-tu des points communs avec ton chat ? Je suis un chat (rires) ! J'ai un côté un peu félin, un peu fainéant aussi. Fainéant ? 150

Oui. En tant qu’artiste, je suis une grosse fainéante. Je travaille dans ma tête et j'y laisse mijoter des idées. On pourrait même penser que je ne fais rien pendant ce temps. La réalisation de ton nouvel album a été confiée à Marc Collin, le fondateur de Nouvelle Vague. Comment en es-tu venue à travailler avec lui ? J'étais très fan de son travail. On aurait déjà dû travailler ensemble il y a longtemps car il avait essayé de me contacter il y a quelques années pour un projet mais j'avais totalement zappé de répondre à son e-mail donc cela ne s'est pas fait mais Marc n'a pas un égo démesuré et, des années après, quand je me suis dit "C'est lui qu'il me faut !", il a répondu présent. L'album est dominé par des sonorités bossa-nova, mambo ou encore cha-cha-cha. Ces sons font-ils partie de ta culture musicale ? Oui. Quand j'étais enfant, j'ai été élevée avec un grand-père italien qui était accordéoniste et qui maîtrisait très bien ce genre de rythmes. Il jouait dans des bals. Je trouve cela assez cocasse d'imaginer que mon grand-père a aussi fait des concerts. Pendant les réunions de

famille, tout le monde jouait de la musique, des rythmes de tango, de boléro, de cha-cha-cha. Ensuite, j'ai appris la guitare entre 8 ans et 16 ans avec un professeur qui était amoureux des sons argentins et qui m'a enseigné pas mal de morceaux aux sonorités hispaniques. Quand je compose, il y a un côté un peu espagnol aussi. Dans La fille de l’après-midi, il y avait beaucoup de chansons qui contenaient des sonorités et des harmonies proches des morceaux espagnols même si les arrangements ont changé par la suite. Quels sont tes albums fétiches du genre ? L'album Chambre avec vue d'Henri Salvador est un de mes albums préférés. Mes mauvaises fréquentations de Philippe Katerine est un disque très bossa nova avec, en même temps, une grande mélancolie et beaucoup de légèreté. De par sa sensualité, ton nouvel album est-il une suite à « La ceinture » ? Dans son côté un peu latin et féminin, oui. Je trouve que c'est ce qui m'allait le mieux depuis le début de ma petite carrière et j'ai donné une suite à La ceinture en allant dans cette


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ambivalence et en jouant avec les mots.

ter dans le film Potiches de François Ozon ?

Par quoi commences-tu une chanson au moment où tu l'écris ?

Oui. Pour incarner Marylin Monroe, j'ai dû travailler comme une actrice en observant son visage et c'était amusant. Je suis bien plus proche de la musique que du métier de comédienne mais la frontière est mince entre les deux fonctions puisque je reste une interprète sur scène.

Souvent, c'est à partir d'un titre qui me vient en tête. J'ai presque l'impression d'être un publicitaire parfois (rires). Pour le single Comment t'apellestu ce matin ?, j'ai eu le titre bien avant d'avoir le texte et la musique. J'imaginais des lumières qui s'allumaient à l'aube dans une ville avec des gens qui se réveillaient et qui ne savaient pas à côté de qui ils s'étaient couchés. Ce n'est donc pas un texte autobiographique... Ce n'est pas une histoire personnelle, non. Je sais que cela déçoit beaucoup les journalistes mais c'est un scénario qui m'amuse. C'est peut-être de l'ordre du fantasme ou de l'inconscient. Là, un peu comme dans une chorégraphie, la danseuse change de partenaire. Il y a de la dérision et, apparemment, le message passe de façon assez élégante grâce au clip et j'en suis ravie. Ce clip t'a-t-il permis de renouer avec le travail d'actrice que tu as pu expérimen-

As-tu justement des projets pour le cinéma ? J'ai joué dans un film choral qui sort à la rentrée et qui s'intitule L'Art De La Fugue. C'est une adaptation de roman par Brice Cauvin avec Agnès Jaoui, Guy Marchand, Nicolas Bedos, Bruno Putzulu et Benjamin Biolay que je retrouve. Quel est ton personnage ? Je joue la fiancée maudite de Nicolas Bedos qui est un goujat. C'est un rôle secondaire. Quelle est la chose la moins évidente pour toi pendant un tournage ? Il faut que j'arrive à m'abandonner car j'ai une certaine pudeur. Je suis à la fois pudique et complètement extravagante donc je jongle entre

les deux. C'est un numéro d'équilibriste comme à la scène. À chaque fois que je rentre sur scène, j'ai l'impression de rentrer dans l'arène et que les lions vont me manger mais j'y vais quand-même et j'arrive à gagner la bataille à la fin de chaque concert (rires). Ton dernier album dégage un érotisme palpable. Écristu avec moins de réserve, aujourd'hui ? J'assume la femme qui rejoint l'artiste. Quand j'avais 20 ans, je n'aurais jamais pu faire un tel album. J'ai quand-même depuis toujours eu une certaine sensualité dans mes chansons. Quand le single La Ceinture est sorti, j'étais enfin en accord avec moi-même et j'ai continué sur ce chemin. J'avais gardé un certain retrait dans l'écriture parce que j'utilisais beaucoup de littérature. Dans La fille de l’après-midi, il y a beaucoup de sens cachés mais c'était moins palpable pour les gens qui écoutaient l'album. Aujourd'hui, j'ai enlevé quelques couches en faisant de la scène, en grandissant, en mûrissant et je ne me pose plus de questions.

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T'arrive-t-il de censurer ta propre écriture ? Non. Les choses viennent assez spontanément et la vulgarité n'en fait pas partie. Je peux pourtant être très vulgaire pour rire dans la vie mais cela ne vient pas naturellement dans l'écriture. Dans le single "Comment t'appelles-tu ce matin ?", tu cites Patrice et Marc. Pourquoi as-tu choisi ces deux prénoms spécifiques ? Ah, on me pose enfin la question ! Merci ! Au début, le texte contenait d'autres prénoms. Pendant qu'on enregistrait les voix de cette chanson à Miami, j'étais avec le réalisateur Marc Collin et l'ingénieur du son Patrice Cramer. Au moment de la prise, j'ai remplacé les prénoms de base par "Patrice" et "Marc". Ils ont tellement ri que j'ai décidé de garder cette prise. La fidélité conjugale est souvent abordée dans tes chansons. Crois-tu qu'elle existe vraiment ? J'espère ! Certains binômes durent à vie et c'est très beau. La fidélité est une science qui fonctionne si on fait des concessions, si on pardonne et si on laisse l'autre libre. J'ai les les larmes aux yeux 154

à chaque fois que je vois des personnes âgées qui ont traversé toute une vie ensemble. Penses-tu que cela peut encore exister à notre époque ? On ne vit pas dans un monde tout rose et je pense que c'est très compliqué de vivre à deux à notre époque car nous sommes dans une société de forte consommation affective et sexuelle. L'amour est un lien fort et fragile à la fois et la chose la plus infime peut briser un amour qu'on pensait éternel. Perdu, la dernière chanson de ton nouvel album est très différente du reste du disque... Oui. Si elle est dans cet album, c'est parce que je l'ai un peu imposée à ma maison de disques. Je ne pouvais pas l'inclure dans ce disque parce qu'elle est effectivement trop différente du reste et c'est d'ailleurs pour cette raison qu'elle figure en bonus mais je voulais quandmême que certaines personnes en profitent. Dans cette chanson, tu énumères tout ce qu'un être humain peut éventuellement perdre dans une vie. N'est-ce pas un bilan un peu pessimiste de l'existence ?. J'avais besoin de la faire.

Je l'ai écrite d'une traite un jour durant lequel j'ai eu besoin d'exprimer cette notion de l'éphémère. Aussi mélancolique soit-elle, cette chanson veut dire qu'il faut profiter de chaque instant de la vie avant de tout perdre. Ce n'est pas triste. Le fais-tu suffisamment ? Je suis un drama-queen avec une tendance à imaginer que, dans la vie, tout est un drame, mais j'essaye de le faire au maximum et de le transmettre aux gens qui écoutent mes chansons. Qu'est-ce tu n'as pas encore perdu ? Je crois que je n'ai pas encore perdu ma folie d'enfant. D'ailleurs, j'aimerais parfois être un peu plus mesurée. L'album comprend également une chanson intitulée Ta maladie dont l'héroïne veut circuler dans les veines de son amant. Aimerais-tu avoir ce pouvoir ? Je pense qu'on l'a tous mais qu'on ne s'en rend pas forcément compte car ce n'est pas un truc qui se décide. C'est l'Autre qui réagit à notre présence et on peut ne jamais le savoir. Quand tu tombes amoureux, tu sens un truc qui traverse tes veines



comme si tu avais pris une drogue ou un médicament très fort. Il y a vraiment un truc chimique important dans l'amour. On retrouve trois reprises sur ce nouvel album. Pourquoi ces chansons-là ? Tu veux ou tu veux pas, c'est le titre que je voulais initialement donner à l'album quand j'ai vu que mes chansons comportaient énormément d'érotisme. Je voulais un titre d'album qui soit une invitation à la sensualité et au jeu. Le directeur de mon label m'a alors carrément suggéré de reprendre la chanson et j'ai trouvé que c'était une super idée. Pour ce qui est de Ma langue au chat, Marc Collin me l'a faite écouter en sachant que je voulais travailler à la façon de l'album Mes Mauvaises Fréquentations de Philippe Katerine. Il trouvait qu'elle collait bien aux autres chansons du disque car l'arrangement était déjà bossa nova. Quant à La fille qui fait tchic ti thic, j'avais envie de reprendre du Gainsbourg parce que c'est la meilleure personne pour jouer sur l'ambivalence des mots qui parlent de sexe sans être trop crus avec un double sens. De plus, pendant sa première période que j'adore, Serge Gainsbourg a écrit beau156

coup de chansons qui alliaient les rythmes latinos à la sensualité des textes. J'ai donc eu envie de reprendre La fille qui fait tchic ti thic qui était pour Michelle Mercier, à la base. Cette fille qui porte une robe Paco Rabanne divinement et qui n'a qu'une envie: qu'on la lui retire, c'était parfait pour moi ! La mode est aux reprises. Pourrais-tu faire un album entier de reprises en hommage à un artiste ? J'espère ne jamais avoir à en faire ou alors tard parce que moi, ce que j'aime, c'est écrire et composer. Faire une reprise dans un album ou participer à un disque de reprises, c'est très bien mais un album entier n'aurait pas de sens avec le travail que j'ai fourni pendant 10 ans. Des reprises, tu en fais notamment lorsque tu remplaces Melanie Pain pendant les concerts de Nouvelle Vague. Comment vis-tu la scène en groupe ? C'est très drôle. J'ai l'impression d'être dans un groupe comme quand j'avais 19 ans. C'est assez jouissif car il n'y a pas de pression personnelle en tant qu'artiste. C'est plaisant, les musiciens sont bons, on va au Brésil, en Grèce...

Et pour les fans qui veulent te voir chanter tes propres chansons, prévois-tu des concerts ? Il y aura probablement des dates parisiennes à la fin de l'année et une tournée par la suite, si tout va bien. À ce jour, quel a été ton meilleur concert ? Mon plus grand bonheur, c'était au Théâtre Marigny. Un moment magique. J'ai ressenti un flux d'énergie incroyable ! Dans quelle salle aimerais-tu chanter ? J'aimerais bien jouer au théâtre des Bouffes-du-nord. Serais-tu intéressée par un album live dans ta discographie ? Oui parce que j'aime bien les prises uniques. Je ne chante jamais de la même façon d'un soir à l'autre donc si un live est enregistré, il ne proposera pas la même voix que celle présente sur l'album. Cela peut être très intéressant pour moi et pour les gens qui aiment ma musique d'entendre des arrangements différents avec des musiciens différents et un public qui contribue à cette empreinte. En studio, fais-tu beaucoup de


prises avant d'avoir la bonne ? Je suis très bien tombée sur la personne de Marc Collin parce qu'il travaille très vite et qu'il déteste s'attarder sur l'enregistrement des voix. Ce qu'il aime, c'est l'émotion qui se dégage d'une première ou d'une deuxième prise. Moi, à partir de la cinquième, je ne vaux plus rien en tant qu'interprète parce que je commence à réfléchir et l'émotion se perd en faveur de la technique. Je déteste refaire les voix ! En 10 ans, ta manière de chanter a considérablement changé. Comment as-tu fait évoluer ta voix au fil des albums ? Ma seule école a été la scène. Quand j'ai rencontré Benjamin Biolay pour le

deuxième album, il m'a dit que je devais chanter de façon spontanée et naturelle comme sur des maquettes. Il y a aussi eu un petit incident durant l'été 2008. Cet étélà, j'avais totalement perdu l'usage de mes cordes vocales pendant pratiquement un mois et je ne pouvais plus parler. C'était comme si mes cordes vocales étaient foulées. Depuis, ma voix se casse. J'ai appris à vivre et à chanter en live avec cette nouvelle voix. J'en ai fait un atout et je crois bien que je préfère cette voix-là à celle que j'avais il y a 10 ans. Tu as accepté de jouer au mannequin pour notre éditorial 'modescénarisé. Quel souvenir gardes-tu de cette expérience ? Je l'ai bien vécue, j'étais très à l'aise. Ce n'était pourtant

pas toujours évident parce que les photos mettaient en scène des paroles extraites des mes chansons. Sachant l'érotisme dégagé des chansons, je savais que j'allais être confrontée à un jeu plus ou moins impudique mais il n'y avait pas du tout de vulgarité. J'ai trouvé l'équipe très bonne, le maquillage et les coiffures sublimes. Là encore, c'était comme un travail d'actrice parce qu'on se laisse porter par une direction artistique et guider par la demande d'un photographe. Pour finir cette interview avec une référence au titre de ton nouvel album, quel est ton amuse-bouche préféré ? Fredonner une chanson de Julie London avec une coupe de champagne à la main.

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BLIND TEST

Karim porte une veste DIESEL BLACK GOLD


KARIM AITM’HAND Par François Berthier / Photos Martin Lagardère / Style : Laëtitia Kandolo

Révélé dans Cheba Louisa, Karim Ait M’Hand fera tourner les têtes dans un futur pas si lointain. Actuellement à l’affiche de Né quelque part de Mohamed Hamidi, dans La crème de la crème de Kim Chapiron et L’armée du salut d’Abdellah Taia en fin d’année, 2013 est définitivement son année.

Ta Madeleine de Proust ? L’Actors Factory, ma maison d’artistes. Le film qui raconte ta vie ? Big Fish. Ton livre de chevet ? « De l’amour et de la solitude » de Jiddu Krishnamurti. Ton secret de beauté ? Je ne mange que des fruits et des légumes de saison, frais ou zéodratés. Ton antistress ? Cuisiner. La tendance mode que tu détestes ? Les pantalons slim. Le détail chic pour toi ? Un beau Keffieh.


Ta chanson pour te sentir bien ? « Aloha Ke Akua » de Nahko Bear. L’insulte que tu préfères ? «Hmârr(a) !» (Âne(sse) en arabe) Le compliment qui t’énerve le plus ? « T’as trop d’chance » Le pays où tu pourrais immigrer ? Groland. Un autre métier qui t’aurait plu ? Chef cuisinier. Qui inviterais-tu à ton dîner idéal ? Meryl Streep, Oxmo Puccino, Angela Davis, Daniel Day Lewis, Tiffany Stern, Robert De Niro, Marina Abramović, Rachid Taha, Abdellah Taïa, et Isabelle Adjani. Le défaut que doit avoir une femme pour te séduire ? L’hyperactivité. Le cadeau que tu rêves d’offrir ? Une dot de 1001 chameaux à la mère de Charlize Theron. Ton proverbe fétiche ? «Si tu penses être trop petit pour faire la différence, tu n’as jamais passé une nuit avec un moustique.» Proverbe africain Le disque que tu as honte d’avoir acheté ? La bande originale de Rocky. Le talent que tu aimerais avoir ? Le chant lyrique. La question qu’on ne doit pas te poser ? Saignant, à point, ou bien cuit ?

Assistante Style : Cindy Mopatibi



INTERVIEW 1RE FOIS

MICKY GREEN Par Dine Delcroix / Photos : François Berthier

A l’occasion de la sortie de son nouvel E.P. In Between (Temporary) qui annonce un troisième album, Daddy I Don’t Want To Get Married, prévu pour la rentrée, la belle australienne a accepté de nous raconter ses premières fois. Première voiture ? Je ne conduis pas mais la première fois que j'ai conduit, c'était dans une Mercredes, un modèle old school. Premier souvenir ? Je devais avoir 3 ans et j'ai été piquée par une abeille. Mes parents ont dû m'emmener au KFC pour que j'arrête de pleurer. J'adorais y aller ! Premier métier que tu voulais faire ? J'ai toujours voulu être chanteuse mais comme mon père travaillait dans l’Air Force, je voulais être pilote et piloter un jet F18 (rires). J'avais même des posters sur les murs de ma chambre. Premier baiser ? J'avais 9 ans et c'était avec un garçon de mon école dont j'étais amoureuse. Premier amour ? À l'âge de 22 ans. J'ai souvent pensé que j'étais tombée amoureuse avant mais c'est là que j'ai vraiment réalisé ce qu'était l'amour.



Premier chagrin d'amour ? C'était justement avec cette personne à l'âge de 25 ans. C'est d'ailleurs à ce moment-là que j'ai commencé à écrire mon deuxième album. C'était un chagrin d'amour inspirant, le genre qui t'aide à grandir. Premier animal de compagnie ? J'ai eu un berger allemand du nom de Chloé. Elle est morte quand j'avais 8 ans. Premier disque acheté ? L'album « Emotions v» de Mariah Carey. Premier film culte ? J'étais obsédée par "Inspecteur Gadget". C'est la première chose visuellement frappante dont je me souviens. Je voulais être Penny (Sophie dans la version française, NDLR). Premier livre culte ? « Le Monde De Narnia » de C. S. Lewis. Je n'arrivais pas à le poser. Premier prof détesté ? Une prof d'Histoire qui m'appelait toujours "Makayla" au lieu de Michaela. Elle me rendait folle ! Je n'aimais pas à l'Histoire quand j'étais à l'école parce que j'ai toujours eu de mauvais professeurs mais j'ai commencé à m'y intéresser par la suite. Premier prof adoré ? Mon professeur de musique. Je voulais absolument jouer de la batterie et il me laissait faire. Il était encourageant. Première cuite ? J'avais 11 ans. C'était au mariage de mon père. J'étais avec ma soeur qui avait 13 ans à l'époque et c'était sa première cuite à elle aussi. Elle s'est vomis dessus et j'avais trouvé cela hilarant.

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MODE


V

Par Pauline Darley Style : Tatiana Dumabin


Robe ZARA / Collier VINTAGE / BO VINTAGE


Robe BALENSI chez L’ECLAIREUR / Collier BLOODMILK


Veste PATRIZIA PEPE Lingerie FIFI CHACHNIL Pantalon – NUE chez CARNET DE MODE Gants – GLOVE STORY Bracelets – SYLVIA TOLEDANO chez l`ECLAIREUR


Combinaison PATRIZIA PEPE Collier MAWI chez l`ECLAIREUR Gants GLOVE STORY Chaussures UNITED NUDE


Top ASOS / Jupe GEOFFREY MINGOT / Tutu VINTAGE / Bijoux PAGAN POETRY


Manteau SABINE K BIDI / Robe DERNIER CRIE VINTAGE / Chaussure UNITED NUDE


Photographe : Pauline Darley Model : Veronika @ Crystal Make up : Virginie Rascle Stylisme : Tatiana Dumabin Hair : Pierre Saint Sever avec Osis + Schwarzkopf Professional


Page de gauche : Manteau SABINE K BIDI / Robe DERNIER CRIE VINTAGE / Chaussure UNITED NUDE Page de Droite : Fourrure TOUNKARA PARIS / Robe GIORGIO&MARIO / Serre-taille squelette signé PAUL SEVILLE chez MISE EN CAGE / Chaussure UNITED NUDE X IRIS VAN HERPEN


The Par F:r F e l y St Veste en soie longue noire ARAISARA, brassière en cuir noir MAC DOUGLAS, collier cadenas MAWI (L’ÉCLAIREUR), escarpins blanc GUY LAROCHE


w o d i w / k c r e a i l he b รงois Berthrillo ran nรงois Cast Fra


Swimsuit Thapelo / BO Isabelle Michel / Shoes Zara


Robe noire fermetures ĂŠclair DIRK BIKKERMBERGS, collier et bracelets argent DEAR CHARLOTTE, escarpins blancs GUY LAROCHE.


Robe courte dentelle noire BALENSI chez L’ÉCLAIREUR, harnais en cuir noir MAC DOUGLAS.

Skirt Moschino / Milla bra by Lascivious at Mise en Cage www.misencage.com / Shoes Zara / Trench Eric Tibusch / BO Anne Thomas


Robe encolure cuir façon cape HÔTEL PARTICULIER, ceinture dorée 1.2.3, boucles d’oreille côte de maille Swarovski gris LAURA B chez L’ÉCLAIREUR, manchette dorée pierres noires SYLVIA TOLEDANO.

Maquillage : EMILIE PELTIER Coiffure : RIMI URA Mannequin : MICHAELA T@ FORD


Robe encolure cuir façon cape HÔTEL PARTICULIER, ceinture dorée 1.2.3, boucles d’oreille côte de maille Swarovski gris LAURA B chez L’ÉCLAIREUR, manchette dorée pierres noires SYLVIA TOLEDANO.


Robe, ZUHAIR MURAD. Boucles d’oreille et bracelet, BURMA.


Robe noire détails cuir DAVID KOMA chez STYLEBOP, boucles d’oreilles épines PATRICK MOULIN.


Jupe et top en cuir matelassĂŠ brillant GUY LAROCHE.


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Veste en soie longue noire ARAISARA, brassière en cuir noir MAC DOUGLAS, culotte taille haute DANIEL HECHTER, collier cadenas MAWI (L’ÉCLAIREUR), escarpins blanc GUY LAROCHE


Sac MARC JACOB

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BORN TO DIE

par RITA ZIMMERMANN Style : SAMARA WILSON


PRADA sunnies ALBERTA FERETTI lama fur dkny leather skirt CHANEL vintage blouse




Casque en dentelle MAISON MICHEL, broche vintage YSL, corsage BORDEL, soutien-gorge SASS&BIDE disponible Ă babylikestopony, veste en cuir HISTORIE DE TANG, Jupe crayon noir WAYNE COOPER



Cuir et soutien gorge en daim avec mini slip AVA disponible chez Babylikestopony, gilet et laine et fourrure en cuir verni MOK thÊorème



Robe YSL, Collier Crucifix DOLCE & GABBANA, manchette et bague noire AMELLEE



Ensemble de tailleur VALENTINO VINTAGE, casque par RITA ZIMMERMANN Modele : ELFIE MAHE / Star System Make up & Hair : ANGIE D.



LA FILLE QUI REND BLIND vu en gendarmette dans pop redemption, cette fois on la decouvre en catcheuse sexy dans les reines du ring,. Audrey Fleurot ne s’arrête plus de tourner. et on ne va pas s’en plaindre...

On l’a

AUDREY FLEUROT Photo : François Berthier



BLIND TRIP

Bahia, le vrai

Par Maite Celayeta CrĂŠatrice de MagicSouthAmerica.com (www.magicsouthamerica.com/fr ) Le magazine des tendances et des voyages de luxe en AmĂŠrique du Sud


vrai visage du BrĂŠsil


C’est un fait qui n’est pas nouveau, qu’on se le dise : le Brésil est toujours à la mode ! Et on se le dit tellement qu’on rêve d’y (re)poser sa tong, de fouler le sable chaud d’une de ses si belles plages et d’aller siroter sa capirinha dans un boteco avec en musique de fond, une bossa nova de Tom Jobim. Et si jusqu’à présent le Brésil ça nous évoquait aussi le Corcovado, la plage de Copacabana, les Havaianas… Il va falloir se mettre au fait des tendances: Rio n’a plus l’exclu de la brésilienne attitude ! Loin d’être has been, elle laisse pourtant de la place à sa grande sœur du Nord. Comme demain sera Bahianais, voici nos tips les plus secrets pour vous initier en douceur ao verdadeiro espírito do Brasil *… *le véritable esprit du Brésil

Salvador de Bahia : l’Explosion de couleurs

Découvrir et apprécier Salvador c’est se laisser submerger par sa culture et son histoire et se laisser happer par ses mille et une couleurs. Si la capitale de l’état de Bahia, située au Nord-Ouest du pays est si connue et prépondérante dans la culture 204

brésilienne c’est parce qu’elle fut la première capitale du Brésil en 1549 et ce, durant plus de deux siècles. Autant d’années où São Salvador Da Bahia Dos Todos Os Santos (de son vrai nom) était le point de convergence entre les cultures européenne, amérindienne et africaine. Ce qui explique sa richesse patrimoniale. Qui n’a pas flâné une fois dans les rues du Pelourinho, son centre historique, n’a pas complètement connu le Brésil. Un peu de culture : candomblé et bracelets multicolores Ce que tout le monde connaît de Salvador ce sont ces petites bracelets de couleurs que l’on se fait nouer au poignet et qu’on n’ose plus défaire craignant l’anathème. Mais que signifient-ils exactement ? L’histoire remonte à l’arrivée d’esclaves arrachés à leurs terres africaines entre 1549 et 1888 et à la diffusion de leurs rites et religion : le Candomblé. Fruit d’un mélange entre la religion catholique, les rites indigènes et les croyances africaines, cette pratique spirituelle consiste en un culte des Orixas [orichas], sortes de divinités. Chacune possédant ses propres symboles


800 maisons coloniales sans compter ses nombreux musées. Une vraie carte postale à chaque coin de rue ! Mention spéciale pour le Musée de la Gastronomie Bahianaise. Stop idéal pour en savoir plus et en savourez davantage ! comme son élément (eau, air, feu…) et sa couleur. De là à rependre des mètres de rubans portant ces couleurs, il n’y a eu qu’un pas que les bahianais ont franchis au plus grand plaisir de ses touristes charmés, heureux d’emporter avec eux, outre un accessoire mode, une partie de ce qui fait l’âme de Bahia. Aujourd’hui, près de 3 millions de brésiliens seraient adeptes du candomblé. Rendez-vous devant les grilles de la Basilica de Nosso Senhor do Bonfim pour faire le plein. Une architecture ultra-photogénique Salvador c’est surtout son quartier historique et culturel proclamé patrimoine de l’humanité par l’Unesco en 1985. Le Pelourinho, situé dans la partie haute de la ville, face à l’océan Atlantique est une poésie visuelle à lui tout seul : de multiples ruelles pavées qui montent et qui descendent bordées de maisons coloniales d’un style baroque portugais qui forment comme une farandole de couleurs qui vous plonge au cœur de l’histoire du Brésil. Son nom signifie « colonne de pierre » et se réfère à celle placée au centre de la ville tristement célèbre à l’époque coloniale pour être le lieu de torture des esclaves venus d’Afrique de l’Ouest avant de devenir après 1888 (date de l’abolition de l’esclavage au Brésil), le centre culturel de Salvador. La ville compte plus de 350 églises et chapelles, et pas moins de

Le rythme : Alegria do Brasil Après avoir pris vos deux cents photos de son architecture incroyable, ne partez pas du Pelourinho sans avoir humé l’atmosphère d’une des activités les plus emblématiques du Brésil qui trouve aussi ses racines à Bahia : la Capoeira. Sorte d’art martial pratiqué au départ par les esclaves retenus en captivité pour conserver leurs aptitudes au combat pour, le jour venu, pouvoir obtenir leur salut, et qui pour ne pas attirer l’attention, se mutait en danse inoffensive. C’est ce qui donne à l’art de la capoeira sa singularité : un subtil alliage de danse, chant et combat le tout s’inscrivant dans une grande fraternité avec un respect des maîtres qui ont l’art d’enseigner cette pratique quasi sacrée. Poussez la porte d’un des nombreux centres de capoeira du quartier, comme celui du Mestre (maître) Bimba, asseyez-vous et laissez-vous submerger par le rythme des percussions et l’enchainement des pas. Et pour tenter d’emporter cette inoubliable expérience avec vous, faites un stop chez Midialouca pour faire le plein de musique et autre livre qui renferment tous les trésors et la beauté de la culture de Bahia. 205




Sous les pavés, les plages... Venir jusqu’à Bahia sans pratiquer le sport favoris des bahianais serait presque un crime. Certes la région ne rend pas les choses faciles avec ses 1000 kms de littoral. Le dilemme majeur, outre celui du choix des maillots à étrenner, reste de choisir LA plage. En famille, optez pour une option proche de Salvador, à seulement 40kms, Praia do Forte est un petit village de pêcheurs bien organisé pour recevoir les touristes sans perdre l’esprit du lieu. On réserve sans hésiter le Tivoli Eco Resort & Spa : ici les singes côtoient les iguanes qui eux-mêmes cohabitent avec les clients de l’hôtel qui a su faire honneur à son enseigne. Ici l’ambiance est définitivement Eco-Resort pour le plus grand bonheur des enfants. Sans parler de l’heure des repas qui fait de cet endroit un lieu de perdition pour tout estomac gourmet et exigent ! C’est aussi à Praia do Forte que se trouve le principal centre du Projet Tamar destiné à la protection des tortues de mer. Les enfants en redemandent bien sûr ! En solo ou en couple, aventurez-vous plus loin et osez pousser la porte du paradis avant votre jugement dernier. Mettez le cap bien au sud, ne craignez pas les kilomètres et laissez-vous convaincre par le charme des plages de cocotiers, quasi désertes à l’eau turquoise et aux piscines naturelles de la Péninsule de Maraù. De Salvador il vous en coutera 6 à 7 heures de voyage pour rejoindre cette eldorado pour surfeurs. Au menu, sea, sun and surf condimentés de crevettes et fruit de la passion ; le tout, forcement bio. Ne cherchez plus, vous y êtes : le Brésil c’est bien ici !

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BONNES ADRESSES

Pour dormir à Salvador La Pousada Casa Vila Bela de Stéphane et Gerusa est une bonne option hébergement, en mode authentique au cœur du Pelourinho. Pour les adeptes du luxe, ne ratez pas le Pestana Convento do Carmo, aménagé comme son nom l’indique dans l’ancien Couvent des Carmélites Pousada Casa Vila Bela, Rua do Carmo, 64, Pelourinho- Salvador Hotel Pestana Convento, Rua do Carmo, 1, Pelourinho- Salvadorv Adresses à Salvador : Basílica de Nosso Senhor do Bonfim, Largo do Bonfim, nº 236- Salvador Museu da Gastronomia Bahia, Pç. José de Alencar, nº 13/19 – Pelourinho- Salvador Associação de Capoeira Mestre Bimba‎, Rua das Laranjeiras, 1 – Pelourinho- Salvador Medialouca- Musica e Livros, Rua das Maranjeiras, 28- Pelourinho – Salvador Dormir à Praia do Forte : Tivoli Eco-Resort, Av. do Farol - Praia do Forte-Mata de São João- Bahia Dormir à la Peninsula de Marau Bambu Dourado, Loteamento Praia Bela de Taipus-Quadra U3- Lote 15/16- Marau- Bahia Pour plus d’information pour votre voyage au Brésil : www.thinktravel.com.ar


CHRONIQUES CD

Par Dine Delcroix

CIARA : Ciara (5 Juillet 2013)

Changement de dernière minute pour le cinquième album de Ciara. Initialement intitulé One Woman Army, c’est finalement sous un titre éponyme que le successeur de Basic Instinct (2010) est livré. Sur ce nouvel opus, la chanteuse retrouve son mentor et ami de longue L.A. Reid mais aussi les producteurs Rodney Jenkins et Jasper Cameron qui ont contribué au succès de l’artiste. L’album comporte également des collaborations écrites de Wynter Gordon, Livvi Franc et Ali Tomposi ainsi que des featuring avec Nicki Minaj et Future. À noter que les singles Sweat, Sorry et Got Me Good n’ont pas été retenus pour la tracklist définitive du disque suite à leur mauvais classement au Billboard Hot 100 contrairement au titre Body Party qui a su redorer le blason de l’album et qui rejoint des morceaux comme Livin’ It Up et Overdose au rang des chansons les plus orgasmiques de la chanteuse. Appelez un docteur !

EMPIRE OF THE SUN : Ice On The Dune (14 Juin 2013)

Il aura fallu patienter 5 ans pour avoir un nouvel album de Empire Of The Sun. Il était en même temps difficile de surpasser l’excellent Walking On A Dream en un claquement de doigts mais le duo electro-disco australien semble avoir peaufiné cette suite avec une minutie artisanale inégalable. Un soin sublimé par des ingénieurs du son de grande renommée tels que Serban Ghenea (Katy Perry, Lack Eyed Peas, Taylor Swift), Jason Cox (Gorillaz) ou encore Mark «Spike» Stent (Lady GaGa, Beyonc, Depeche Mode). «Ice On The Dune» est construit sur une pop graphique dont les arrangements font la part belle à l’imagination des deux acolytes qui ont pensé leur album comme une aventure psychédélique scénarisée. Si la musique électronique se porte bien, c’est grâce à des albums comme celui-ci. Un univers à part entière !

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KELLY ROWLAND : Talk A

Good Game (14 Juin 2013)

Quatrième galette pour l’ancienne Destiny’s Child. À l’exception de «Freak» qui est une reprise de Jamie Foxx, Kelly Rowland a tenu à co-écrire la totalité de ce nouvel album studio pour lequel elle a enregistré pas moins de 70 chansons. Il en résulte un disque personnel qui dévoile la vulnérabilité de son interprète tout en mettant en relief sa puissance vocale. Comme à son habitude, la chanteuse nous gâte de featuring avec Kevin Cossom et Wiz Khalifa sur l’édition standard mais aussi The-Dream et Pharrell Williams sur l’éditon ‘deluxe’ . L’artiste nous offre même la nostalgie d’un titre avec Beyoncé Knowless et Michelle Williams, ses anciennes collègues des Destiny’s Child qu’elle retrouve le temps du très réussi «You Changed». Avec sa base R&B et son fond pop, «Talk A Good Game» est une célébration de la féminité bien jouée !

CHER : 2013)

Woman’s World (18 Juin

Celle que l’on surnomme la déesse de la pop a choisi l’été pour faire son grand retour dans les bacs avec un tout nouveau single. Intitulée Woman’s World, cette chanson taillée sur mesure pour les dancefloors par Paul Oakenfold n’est pas une grande surprise dans le répertoire de la chanteuse mais elle jouit d’une efficacité certaine qui saura combler les fans de la première heure et ceux d’une autre génération. Cet hymne aux accents féministes précède la sortie sorite événement de Closer To The Truth, le vingt-sixième album studio de la chanteuse et le premier depuis 12 ans. À 67 ans, Cher ne semble pas avoir encore dit son dernier mot et promet une grand tournée mondiale pour promouvoir ses nouveaux titres. En attendant, les remixes de Woman’s World par R3HAB, Danny Verde et Tracy Young calmeront les plus impatients. 211


CHRONIQUES CD KT TUNSTALL : Invisible Empire / Crescent Moon (7 Juin 2013) Enregistré en deux temps à Tucson en Arizona là où la photo qui lui sert de pochette a été prise, le nouvel album de KT Tunstall se veut plus country folk que son prédécesseur. Les deux sessions d’enregistrement ont respectivement eu lieu en Avril et Novembre 2012 en présence du chanteur Howe Gelbe et ont conduit le disque à deux sonorités distinctes qui justifient certainement son doubletitre. La première partie de Invisible Empire / Crescent Moon aborde la mort, un sujet particulièrement cher à l’artiste depuis qu’elle a perdu son père en 2012, la seconde reflète les changements que connaît sa vie personnelle depuis sa séparation avec son mari. Inutile donc de préciser que les chansons proposées par ce cinquième opus viennent du cœur de la belle écossaise qui a su évoluer dans la délicatesse. Bon voyage !

QUEENS OF THE STONE AGE : ...Like Clockwork (3 Juin 2013) Auto-produit, le sixième album studio de Josh Homme et de sa dream team est en quelques sortes le prolongement de era vulgaris avec des guitares moins grondantes et se veut donc plus accessible mais il se paye toutefois des invités de marque comme Trent Reznor, Dave Grohl ou encore Alex Turner. Un peu comme une collection, l’album puise sa qualité et sa consistance dans l’assemblage des chansons qu’il propose. Isolées, celles-ci perdent leur harmonie et ne constituent que des segments de rock alternatif. Le disque a déjà atteint la seconde place du classement des albums au Royaume-Uni et s’est classé numéro un aux États-Unis dès sa sortie, ...Like Clockwork (Comme Sur Des Roulettes en français) porte bien son nom puisqu’il est le premier album du groupe à avoir atteint cette position.

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