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LES NOUVEAUX – KAYIJE KAGAME ET THÉO LAGLISSE
LES NOUVEAUX
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Elle fait ses débuts au cinéma dans Saint Omer d’Alice Diop. Mais Kayije Kagame n’a rien d’une débutante ; la trentenaire genevoise a déjà un prestigieux parcours sur les planches derrière elle.
Dans Saint Omer (lire p. 18), elle incarne Rama, romancière enceinte saisie d’une obsession pour un infanticide. « Pour la première fois, je rencontrais un personnage qui me parlait intimement et me dépassait en même temps », nous confie-t-elle d’un sourire impérial, lovée dans le coquet studio parisien où elle loge. Depuis ses études théâtrales à la prestigieuse ENSATT de Lyon, Kayije Kagame cultive sa pluridisciplinarité. Liberté qu’elle attribue au metteur en scène américain Robert Wilson, avec qui elle a étudié à New York avant qu’il ne la dirige en 2014 dans une adaptation des Nègres de Jean Genet à l’Odéon. « Il m’a appris à ouvrir le champ des possibles, sans m’assigner à la fonction d’actrice », affirme l’artiste, qui est aussi dramaturge. Elle présentera en mars prochain au Théâtre de Gennevilliers le diptyque Intérieur vie/ Intérieur nuit, composé d’une pièce de théâtre, qu’elle a conçue et dans laquelle elle joue, et d’un court métrage, qu’elle a coréalisé. Elle qui a collaboré avec de grands artistes contemporains (Jérôme Bel, Jon Fosse…) évoque son admiration pour Tilda Swinton et sa capacité à établir « un dialogue à égalité » avec les cinéastes. Une approche qui éblouit dans Saint Omer : « On a tissé ce rôle ensemble, avec Alice, qui a créé un dispositif où chacun était traversé par la fiction sans discontinuer. » Une chose est sûre : Kayije Kagame, elle, est traversée par une intense inspiration.
Saint Omer d’Alice Diop, Les Films du Losange (2 h 02), sortie le 23 novembre DAVID EZAN
Photographie : Julien Liénard pour TROISCOULEURS
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Au festival international du film indépendant de Bordeaux (FIFIB), il présentait son court métrage Virée sèche, qui porte toutes ses angoisses sur l’urgence climatique à travers un trip virtuose dans un after de rave où l’eau vient à manquer.
Né en 1995 en Haute-Savoie, Théo Laglisse a capté à 8 ans qu’il se passait quelque chose autour du dérèglement climatique. En 2003-2004, il a été percuté par la canicule record, la sortie du film catastrophe Le Jour d’après de Roland Emmerich, et des docu-fictions alarmants sur le réchauffement de nos écosystèmes. Cette inquiétude, il la transcende à travers Virée sèche. Un cri d’alerte à travers la fuite frénétique en after techno de Jordane et de sa petite sœur qui, perdues entre des raveurs intoxiqués, cherchent à s’hydrater tandis qu’une coupure d’eau touche Mar-
CAHIERS DU CINÉMA
© Kate Freed
seille – ville où habite Théo, passé par l’ENSAV, à Toulouse, et la School of Visual Arts de New York. « Je m’intéresse à la question du déni, on a une responsabilité, et en même temps on danse, on se dit qu’on verra », explique le cinéaste. Avec son air de doux raveur, il nous transporte au cœur de la transe des corps et de leur descente, faisant convulser l’image dans un déchaînement de couleurs sursaturées, de flashs aveuglants et de gabber furieux. « J’ai voulu montrer Marseille brute, vivante, colorée. C’est une ville où il y a tout un réseau souterrain de raves, on s’approprie l’espace. » Auteur de plusieurs courts (le tendre et très psyché Wash Me Tender, ou le documenteur-road movie acid Leave No Trace…), il prépare un nouveau film, Laser Love Tornado, un « teen movie gothique pour adultes égarés », qu’il aimerait peut-être filmer dans les montagnes de Haute-Savoie, qu’il voit fondre et s’ébouler.
QUENTIN GROSSET
TONI SERVILLO SILVIO ORLANDO
ARIAFERMA
UN FILM DE LEONARDO DI COSTANZO
AVEC TONI SERVILLO, SILVIO ORLANDO, FABRIZIO FERRACANE, SALVATORE STRIANO, ROBERTO DE FRANCESCO, PIETRO GIULIANO RÉALISATION LEONARDO DI CONSTANZO SCENARIO LEONARDO DI COSTANZO, BRUNO OLIVIERO, VALIA SANTELLA IMAGE LUCA BIGAZZI DÉCOR LUCA SERVINO MONTAGE CARLOTTA CRISTIANI SON XAVIER LAVOREL MUSIQUE PASQUALE SCIALÒ PRODUCTEUR CARLO CRESTO-DINA CO-PRODUCTEURS MICHELA PINI, AMEL SOUDANI PRODUCTION TEMPESTA, RAI CINEMA CO-PRODUCTION AMKA FILMS PRODUCTIONS, RSI RADIOTELEVISIONE SVIZZERA
VENTES INTERNATIONALES VISION DISTRIBUTION DISTRIBUTION SURVIVANCE
AU CINÉMA LE 16 NOV.
Tout doux liste
VIVE LE VENT D’HIVER [FILM] Cinq contes enchanteurs en provenance d’Allemagne, de Lettonie, de France ou de Russie. Dans la douceur blanche de l’hiver, avec les enfants dès 3 ans, partez à la rencontre de lièvres curieux de l’Arctique, de bonshommes de neige loufoques ou d’un ours polaire grincheux. • MARGOT PANNEQUIN
Vive le vent d’hiver, collectif (Les Films du Préau, 35 min), sortie le 23 novembre, dès 3 ans
ENZO LE CROCO [FILM] Dans ce film en prises de vue réelles, un crocodile chanteur vient semer la zizanie dans le quotidien de Josh et de ses parents, fraîchement installés à New York… L’occasion d’une fable drôle et foutraque sur l’art et la manière de se créer une famille à soi. • Ma. P.
Enzo le croco de Will Speck et Josh Gordon (Sony Pictures, 1 h 47), sortie le 30 novembre, dès 6 ans
LE CHAT POTTÉ 2. LA DERNIÈRE QUÊTE [FILM] Assoiffé d’aventures, le chat le plus badass du cinéma a épuisé huit de ses neuf vies. De quoi lui mettre un peu de plomb dans la cervelle ? Pas sûr. Le matou cassecou se lance dans une nouvelle quête, aidé par sa partenaire Kitty. • Ma. P.
Le Chat Potté 2. La dernière quête de Joel Crawford et Januel P. Mercado (Universal Pictures), sortie le 7 décembre, dès 6 ans
Et toujours chez mk2
SÉANCES BOUT’CHOU ET JUNIOR [CINÉMA] Des séances d’une durée adaptée, avec un volume sonore faible et sans pub, pour les enfants de 2 à 4 ans (Bout’Chou) et à partir de 5 ans (Junior).
samedis et dimanches matin dans les salles mk2, toute la programmation sur mk2.com
L’interview
L’humoriste Marine Baousson propose un podcast instructif et très drôle pour les enfants dès 7 ans, Petit vulgaire, dans lequel elle explore moult sujets avec une bonne dose de pédagogie et d’humour. Margot, Anaïs et Anselmo (9 ans) l’ont écouté attentivement. Alexandre (14 ans) est allé voir son spectacle Vulgaire, réservé aux ados et aux adultes. Ils ont retrouvé Marine Baousson juste après l’école pour un « goûter interview ».
Anselmo : J’adore tes podcasts. Comment as-tu eu l’idée ? C’était pendant le confinement. Je me suis demandé ce que je pourrais faire pour continuer à parler aux gens autrement que sur scène, puisque les théâtres étaient fermés. Et puis j’avais cette idée de vulgariser, c’est-à-dire d’expliquer simplement des trucs. Au début, le podcast était pour les adultes, mais très vite j’ai eu envie de réaliser une version pour les enfants, avec encore plus de blagues de prouts !
Anaïs : Comment choisis-tu les sujets ? Pour être sûre de partir de zéro et de tout bien expliquer, je privilégie des sujets sur lesquels je ne connais rien ou très peu de choses.
Ans. : Pourquoi as-tu fait un épisode sur comment on fait les bébés ? C’est dégoûtant et aussi très rigolo. Les adultes sont parfois un peu embêtés quand un enfant leur pose cette question, alors qu’ils savent très bien comment on
par Alexandre & Anselmo Baousson de Marine
Margot & Anaïs
fait. J’avais envie d’expliquer concrètement et de répondre à cette fameuse question qui embarrasse tant les grands.
Ans. : Oui, comme l’épisode sur la mort. J’aime bien, mais c’est lugubre. C’est un sujet difficile, très mystérieux, mais qui fait partie de la vie. Beaucoup d’enfants se trouvent désemparés quand un proche meurt. Je trouve ça bien d’en parler sans tabou, même si je conseille d’écouter l’épisode avec un adulte.
Ana. : Qu’est-ce que tu as fait comme études pour tout savoir ? Justement, je ne sais pas tout, et je fais beaucoup de recherches pour écrire un épisode. Quand j’étais petite, j’étais très forte à l’école, il me suffisait de bien écouter en classe pour avoir de bonnes notes. Ça a marché comme ça jusqu’à la fac. Et puis, je me suis rendu compte que les autres élèves avaient travaillé, alors que moi je m’étais reposée sur mes acquis. Je n’avais pas été très curieuse. C’est pour combler ce manque que j’ai créé ce podcast.
Alexandre : Sur scène, ce sont les spectateurs qui choisissent les thèmes – par exemple, tu donnes le choix entre Raspoutine, Sissi l’impératrice et la Commune –, et tu fais ton sketch en fonction des applaudissements. Comment fais-tu pour te souvenir de tout ? C’est un sacré boulot ! J’ai un répétiteur qui me fait travailler les textes et m’aide à mémoriser les dates. J’apprends à peu près une page en une heure, et le spectacle fait une centaine de pages. Je dois sans cesse répéter pour faire travailler ma mémoire et ne rien oublier.
Margot : Tu es bretonne et tu as fait un épisode sur les crêpes. Tu as déjà goûté les crêpes tomate, avocat, crème fraîche ? Non. C’est bon ? Qui fait ça ? L’avocat est chaud ?
M. : Ma grand-mère. Non, elle le met au dernier moment. Je retourne en Bretagne demain, je vais demander s’ils veulent bien tester cette recette dans ma crêperie !
Petit vulgaire, dès 7 ans • Vulgaire, tous les mercredis à 19 h jusqu’au 21 décembre à la Comédie de Paris (1 h 20), dès 10 ans
PROPOS RECUEILLIS PAR MARGOT, ANAÏS, ANSELMO ET ALEXANDRE (AVEC CÉCILE ROSEVAIGUE)
Photographie : Ines Ferhat pour TROISCOULEURS
La critique de Célestin, 8 ans
LE ROYAUME DES ÉTOILES
SORTIE LE 7 DÉCEMBRE « C’est l’histoire d’une petite sœur et de son grand frère qui suivent un scarabée vers les étoiles pour stopper le méchant homme de la Lune. Les héros rencontrent les esprits de la nature – et je trouve ça vraiment réel. Parce que, bon, qui dirige toute la nature ? C’est une bonne question, non ? Eh bien dans ce film ils y répondent : ce sont des personnes avec des pouvoirs. Je pense d’ailleurs que beaucoup de choses dans ce film pourraient être possibles. Par exemple, quand le scarabée arrive sur la Lune, il est aussi grand que la petite fille. Eh bien, s’il était né sur la Lune, et grâce à la gravité qui est moins forte que sur Terre, le scarabée deviendrait aussi grand qu’un humain ! Et puis j’aime bien la petite sœur, qui est très sympa, alors que le grand frère est un ado– et les ados c’est énervant parce qu’ils croient plus aux mondes fantastiques. Moi je suis encore un enfant, mais quand je serai un ado, je pense que je serai comme lui. C’est peut-être à cause de la puberté… Mais c’est plutôt triste. »
Le Royaume des étoiles d’Ali Samadi Ahadi, KMBO (1 h 24), sortie le 7 décembre
PROPOS RECUEILLIS PAR JULIEN DUPUY