LES JEUNES DOIVENT-ILS FAIRE DU SPORT ? Mathieu André-Simonet Association jeunesse et droit | Journal du droit des jeunes 2007/7 - N° 267 pages 32 à 34
ISSN 2114-2068
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Pour citer cet article :
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------André-Simonet Mathieu,« Les jeunes doivent-ils faire du sport ? », Journal du droit des jeunes, 2007/7 N° 267, p. 32-34. DOI : 10.3917/jdj.267.0032
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En principe, tous les jeunes doivent faire du sport dans le cadre de leurs études
Les jeunes doivent-ils faire du sport ?
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En préface de l'ouvrage de maître André-Simonet, Luc Misson, également avocat, écrivait il y a sept ans déjà : «Sisyphe, roi de Corinthe et fils du dieu grec Éole, fut condamné dans les enfers à rouler éternellement jusqu'au sommet d'une montagne un rocher qui en retombait aussitôt». Vouloir imposer le respect du droit au monde du sport relève de ce type de malédiction. La tâche est plus qu'ardue. Les résultats ne s'engrangent jamais que pour le temps d'une saison. Pourquoi ? Parce que le sport focalise des influences perverses. Il faut le faire vivre, et en préserver la pureté originelle, face aux calculs financiers chaque jour plus sordides. Le besoin de pouvoir, exercé jusqu'au pire autoritarisme, s'y rencontre couramment. Le monde du sport n'a guère de culture de la démocratie et du légalisme. Des fédérations ayant vécu depuis toujours sans rendre de compte sont réfractaires à l'influence du droit sur leurs pratiques. Des violents pullulent dans les gradins, mais aussi sur les pelouses. Les médias et le sponsoring font du fait sportif un acte de communication. Certains parents transfèrent sur leur enfant sportif des rêves déments de réussite. Les politiques ont compris que le sport peut magnifier et idéaliser leur image». Et pourtant, sur les années écoulées, la règle de droit, celle de tous, a petit à petit refait surface dans ce monde qui n'est pas si clos. Les pouvoirs publics ont également dû s'engager pour le respect de la norme, puisque leurs aides conditionnent la pérennité de nombre d'activités sportives. Dans les quelques lignes qui suivent, les règles élémentaires, tenant du droit de l'éducation, de la famille, de la responsabilité sont rappelées pour que les acteurs de ce «grand cirque» se rappellent quelques valeurs élémentaires, notamment parce que le sport ne peut se passer de former des jeunes, dont certains sont encore dans l'enfance.
En principe, tous les jeunes doivent faire du sport dans le cadre de leurs études (I) En dehors de ce cadre obligatoire, quelle est la marge de liberté dont disposent les jeunes pour faire (ou ne pas faire) du sport ? (II)
I . Le sport est obligatoire à l'école Le sport est en principe obligatoire jusqu'à seize ans (A). Après seize ans, le sport est souvent obligatoire pour les jeunes qui poursuivent leur scolarité (B).
A. Le sport pour les jeunes de moins de seize ans En principe, le sport est obligatoire pour les jeunes de moins de seize ans (1), sauf exceptions motivées pour des raisons légitimes (2). 32
1. Le sport est obligatoire pour les jeunes de moins de seize ans En France, l'école est obligatoire jusqu'à seize ans. L'article L131-1 du code de l'éducation prévoit en ef fet que : «l'instruction est obligatoire pour les enfants des deux sexes, français et étrangers, entre 6 et 16 ans». Dans le cadre de cette instruction obligatoire, une pratique du sport est imposée (l'article L 312-2 du code de l'éducation prévoit que : «(…) le ministre chargé de l'éducation définit les programmes scolaires de l'éducation physique et sportive (…)»).
L'article L 131-2 du code de l'éducation précise que : «L'instruction obligatoire peut être donnée soit dans les établissements ou écoles publics ou privés, soit dans les familles par les parents, ou l'un d'entre eux, ou toute personne de leur choix». En principe, cet enseignement du sport est donc dispensé dans des établissements d'enseignement (1) ; néanmoins, par exception, cet enseignement peut être donné en famille. Dans cette dernière hypothèse, il est prévu un système de contrôle pour s'assurer que les enfants reçoivent une
*
Avocat au barreau de Paris (avocatmas@orange.fr), auteur de «Le droit du sport et les jeunes» (Éd. Jeunesse et droit, 2000).
(1)
L'article L 121-1 du code de l'éducation prévoit notamment «Les enseignements artistiques ainsi que l'éducation physique et sportive concourent directement à la formation de tous les élèves. Dans l'enseignement supérieur, des activités physiques et sportives sont proposées aux étudiants».
JDJ-RAJS n°267 - septembre 2007
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par Mathieu André-Simonet *
En principe, ce sont les parents qui décident de l'opportunité, pour leur enfant, de faire ou de ne pas faire du sport
2. Par exception, le sport n'est pas obligatoire en cas de raison légitime Pour être dispensé de sport, il faut présenter un certificat médical. Cette dispense peut être totale (pour tous les sports) ou partielle (pour certains sports). Il n'est pas possible d'être dispensé de sport pour un motif religieux. Ainsi, le Conseil d'État, dans une décision du 15 janvier 1997, a validé l'exclusion d'une élève qui refusait d'assister à des cours d'éducation physique parce qu'elle portait le voile (4).
Ce principe doit néanmoins être nuancé : en dehors des plages obligatoires de sport, les jeunes disposent d'une relative autonomie pour décider de faire ou de ne pas faire de sport.
II. Le sport en dehors du cadre obligatoire Comme on l'a vu, le sportif mineur (en dehors du cadre obligatoire de l'école) n'a pas un droit à faire du sport. Néanmoins, plusieurs mécanismes incitent les jeunes à faire plus de sport que ce qui est obligatoire (A). Pour les jeunes sportifs de haut niveau, la problématique est inverse : comment protéger le mineur contre «trop» de sport (par exemple comment concilier sa pratique du sport avec une scolarité satisfaisante ?) (B).
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B. Le sport après seize ans
A . Incitation au développement du sport amateur
Après seize ans, la scolarité n'est pas obligatoire. Par voie de conséquence, la pratique du sport n'est pas obligatoire. Néanmoins, cette obligation demeure pour les jeunes de plus de seize ans qui poursuivent leurs études (1). Pour les autres, non seulement il n'existe pas d'obligation de faire du sport, mais en outre il n'existe pas un droit à faire du sport (2).
Le sport est considéré par la société comme un élément de développement positif. C'est pourquoi des mécanismes sont mis en place pour inciter les jeunes à faire davantage de sport que ce qui est prévu de manière obligatoire (1). En cas de désaccord entre les parents et le jeune sur l'opportunité de faire ou de ne pas faire plus de sport, quelle est la marge d'autonomie dont dispose le mineur ? (2)
1. Les jeunes de plus de seize ans qui poursuivent leurs études Après seize ans, il n'existe pas d'obligation d'aller à l'école. Il n'existe donc pas d'obligation de faire du sport. Néanmoins, pour les jeunes qui poursuivent leurs études, il est en principe prévu dans les programmes des cours d'éducation sportive. Ces cours sont en général obligatoires. Dès lors que le jeune souhaite poursuivre ses études, il a donc l'obligation de faire du sport, sauf dispense médicale.
1. Aide au développement du sport Le code de l'éducation pose pour principe qu'il convient de développer les activités sportives volontaires. Ainsi, l'article L 552-1 de ce code indique : «Composantes de l'éducation physique et sportive, les activités physiques et sportives volontaires
La mise en place de ces associations sportives est obligatoire dans les établissements du second degré. Pour les établissements du premier degré, cette obligation n'existe pas; néanmoins, il est prévu que : «L'État et les collectivités favorisent la création d'une association sportive» (5). Par ailleurs, l'article L 551-1 du code de l'éducation dispose que : «des activités périscolaires prolongeant le service public de l'éducation peuvent être organisées avec le concours notamment des administrations, des collectivités territoriales, des associations et des fondations, sans toutefois se substituer aux activités d'enseignement et de formation fixées par l'État. Elles visent notamment à favoriser, pendant le temps libre des élèves, leur égal accès aux pratiques culturelles et sportives et aux nouvelles technologies de l'information et de la communication. Les établissements scolaires veillent dans l'organisation des activités périscolaires à caractère facultatif, à ce que les ressources des familles ne constituent pas un facteur discriminant entre les élèves». Même si le développement du sport est un objectif de la société, il appartient aux détenteurs de l'autorité parentale - en général, aux parents de l'enfant - de décider de l'opportunité pour leur enfant de faire - ou de ne pas faire - davantage de sport que ce qui est prévu de manière obligatoire. En cas de conflit entre les deux parents sur cette question (ou en cas de conflit entre les parents et le mineur),
(2)
Voir l'article L 131-10 du code de l'éducation et l'article 3 du décret 99-224 du 23 mars 1999 relatif au contenu des connaissances des enfants instruits dans la famille ou dans des établissements d'enseignements privés hors contrats.
(3)
Ainsi, l'article L 312-4 du code de l'éducation prévoit que : «L'organisation et les programmes de l'éducation physique et sportive dans les établissements d'enseignement et de formation professionnelle et dans les établissements spécialisés tiennent compte des spécificités liées aux différentes formes de handicap.
2. Le sport en dehors des études Entre seize et dix-huit ans, le jeune n'a pas d'obligation de faire du sport. Il n'a pas non plus un droit à faire du sport : en principe, ce sont les parents (qui sont titulaires de l'autorité parentale) qui décident de l'opportunité, pour leur enfant, de faire ou de ne pas faire du sport.
des élèves sont organisées dans les établissements par les associations sportives scolaires».
Les éducateurs et les enseignants facilitent par une pédagogie adaptée l'accès des jeunes handicapés à la pratique régulière d'activités physiques et sportives. Une formation spécifique aux différentes formes de handicap est donnée aux enseignants et aux éducateurs sportifs, pendant leurs formations initiale et continue». (4)
CE 15. 1. 97 n° 172937 Min. éduc. nat. c. Ait Maskour et autres, JDJ n° 165, mai 1997, p. 41.
(5)
Art. L. 552-2 du code de l'éducation. L'art. L 552-1 prévoit : «Composantes de l'éducation physique et sportive, les activités physiques et sportives volontaires des élèves sont organisées dans les établissements par les associations sportives scolaires».
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instruction suffisante, notamment en matière sportive (2). Cette obligation de faire du sport est également un droit, qui s'applique sans discrimination, y compris pour les jeunes handicapés (3).
DOSSIER
Les mineurs peuvent accomplir seuls - sans l'autorisation de leurs parents - les actes autorisés par «l'usage»
quelles solutions seront en principe retenues ?
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2. Le rôle des parents et du mineur En principe, ce sont les parents, détenteurs de l'autorité parentale, qui décident de l'éducation de leur enfant, notamment en matière sportive (voir l'article 372 du code civil). Pour les actes usuels de l'autorité parentale (par exemple inscription d'un mineur dans un club amateur de football), chaque parent est réputé avoir agi avec l'accord de l'autre. Ainsi, en pratique, il ne pourra pas être reproché au club amateur de football de ne pas avoir vérifié l'accord de l'autre parent, sauf s'il est prouvé que ce club connaissait le désaccord de l'autre parent sur cette inscription. En cas de désaccord entre les deux parents, il est possible de saisir un juge pour qu'il arbitre ce désaccord dans l'intérêt de l'enfant (6). En principe, si un enfant était habitué à pratiquer du sport amateur, et si les ressources financières des parents le permettent, un juge privilégiera le choix du parent qui souhaite le maintien de cette pratique sportive. Ce rôle prédominant des parents doit néanmoins être nuancé. Tout d'abord, il est possible pour un enfant de plus de seize ans d'être émancipé. L'émancipation d'un mineur est de droit s'il se marie (7) . Dans les autres cas, «(…) après audition du mineur, cette émancipation sera prononcée, s'il y en a de justes motifs, par le juge des tutelles, à la demande des père et mère ou de l'un d'eux (…)» (8). Par ailleurs, et de manière plus substantielle, un mineur peut, dans un certain nombre d'hypothèses, faire du sport en dehors de l'école sans demander une autorisation préalable de ses parents. En effet, selon l'article 389-3 alinéa 1 du code civil, les mineurs peuvent accomplir seuls - sans l'autorisation de leurs parents - les actes autorisés par «l'usage». Par exemple, il n'est pas contesté que «l'usage» permet à un jeune de quinze ans d'acheter un ticket pour aller à la piscine sans autorisation de ses parents. De même, on estime qu'un mineur de 34
quinze ans peut acheter seul une raquette de tennis. Au contraire, l'achat d'un véhicule automobile par un mineur de dix-sept ans agissant seul sera considéré comme nul. La difficulté, c'est qu'il existe peu de jurisprudence sur cette notion «d'usage». En pratique, il est donc parfois difficile de déterminer précisément ce que «l'usage» permet, et ce que «l'usage» ne permet pas. Souvent, il s'agira d'une affaire de bon sens : la réponse dépendra de l'âge du mineur, de l'état des mœurs au moment où la question se pose, de l'importance de l'acte envisagé. Notons que certains sports dits dangereux nécessitent obligatoirement l'autorisation préalable des parents, par exemple le saut en parachute. Pour les sportifs de haut niveau, la protection du mineur se pose de manière plus aigue : la pratique intensive d'un sport ne risque-t-elle pas d'être préjudiciable au mineur, par exemple, par rapport au reste de sa scolarité.
B. La protection du sportif mineur de haut niveau Comment concilier la pratique du sport de haut niveau et l'obligation pour un mineur de suivre une scolarité (1) ? Par ailleurs, comment protéger l'enfant sportif qui «travaille», par exemple comme mannequin pour une marque de vêtements (2) ?
1. Scolarité et sport de haut niveau La société estime qu'il est de l'intérêt de certains mineurs de bénéficier d'un enseignement sportif de haut niveau. Pour ces mineurs, des aménagements de scolarité sont prévus. Ces aménagements visent à concilier, dans la mesure du possible, une scolarité satisfaisante et une pratique sportive de haut niveau. Le choix de ce type de scolarité est bien sûr risqué (6)
(7) (8) (9)
pour le mineur. C'est pourquoi, ce choix implique non seulement l'adhésion du mineur mais également celle de ses parents. Certes, même dans le cas où cette double adhésion existe se pose la question de la protection du mineur face à un système (celui d'une scolarisation dans une filière de sport de haut niveau). Il s'agit là d'un choix de société qui relève davantage du législateur que du juge. Pour ces jeunes, des aménagements sont prévus pour leur faciliter l'obtention du baccalauréat. Ainsi, depuis 2000, les sportifs de haut niveau - qui n'obtiendraient pas le bac - peuvent demander à conserver le bénéfice des notes obtenues égales ou supérieures à dix. Ainsi, l'année suivante, ils n'auront pas à repasser les matières pour lesquelles ils avaient obtenu la moyenne.
2. Le sportif mineur qui travaille En principe, le contrat de travail d'un mineur de plus de seize ans nécessite l'autorisation de l'intéressé et de ses parents. Néanmoins, en pratique, on admet que le mineur de plus de seize ans peut passer un contrat de travail avec l'accord tacite de ses parents sauf opposition de leur part. En principe, avant l'âge de seize ans, un mineur ne peut pas travailler. Il existe néanmoins des exceptions, notamment pour les enfants mannequins, sous réserve d'avoir obtenu une autorisation préalable du préfet compétent (9). En conclusion, en principe, le mineur ne peut pas décider seul de faire ou de ne pas faire du sport comme il l'entend. Néanmoins, en pratique, le mineur dispose d'une relative autonomie en matière sportive. Notons que le cas le plus problématique concerne les jeunes sportifs de haut niveau. Pour eux se pose par exemple la question du rôle de la société vis-à-vis de ceux qui ne deviendront pas champions...
Art. 372-2-13 du code civil : «Les dispositions contenues dans la convention homologuée ainsi que les décisions relatives à l'exercice de l'autorité parentale peuvent être modifiées ou complétées à tout moment par le juge, à la demande des ou d'un parent ou du ministère public, qui peut lui-même être saisi par un tiers, parent ou non». Art. 476 du code civil qui deviendra l'art. 413-1 au 01/01/2009. Art. 477 du code civil. Art. L 211-1 et suivants du code du travail. Voy. Jean-Luc Rongé, «La France ne respecte pas les règles relatives au travail des enfants», JDJ n° 254, avril 2006, pp. 7-15.
JDJ-RAJS n°267 - septembre 2007 JDJ n°200 - décembre 2000
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