T3 Travailler son corps, complément du capital scolaire sur le marché du travail_C LOUVEAU_O HIDRI.p

Page 1

TRAVAILLER SON CORPS : COMPLÉMENT DU CAPITAL SCOLAIRE SUR LE MARCHÉ DU TRAVAIL ? STRATÉGIES D'ANTICIPATION D'ÉTUDIANTES Oumaya Hidri et Catherine Louveau Martin Média | Travailler 2005/2 - n° 14 pages 129 à 151

ISSN 1620-5340 Article disponible en ligne à l'adresse:

-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-travailler-2005-2-page-129.htm

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

Pour citer cet article :

-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Hidri Oumaya et Louveau Catherine,« Travailler son corps : complément du capital scolaire sur le marché du travail ? Stratégies d'anticipation d'étudiantes », Travailler, 2005/2 n° 14, p. 129-151. DOI : 10.3917/trav.014.0129

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Distribution électronique Cairn.info pour Martin Média. © Martin Média. Tous droits réservés pour tous pays.

La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------


Enquête

Travailler son corps : complément du capital scolaire sur le marché du travail ? Stratégies d’anticipation d’étudiantes.

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

Résumé : De nombreuses enquêtes présentent les étudiants comme étant confrontés à la difficile recherche d’un débouché. Au contraire, les étudiantes pratiquant des activités physiques dites « de mise en forme » au service des sports de l’université de Valenciennes ont déjà défini leur projet professionnel. Ce faisant, elles développent des stratégies de formation innovantes en tentant, plus ou moins consciemment, de pallier l’inadéquation structurelle entre le système universitaire et les exigences du marché du travail. Une enquête, menée par questionnaire auprès de deux cent vingt-trois d’entre elles, montre que certaines recherchent, dans ces pratiques physiques visant l’accroissement d’un capital corporel, de meilleures chances d’insertion professionnelle. Dans une certaine mesure, celui-ci apparaît comme un complément du capital scolaire sur le marché du travail. Les résultats montrent toutefois que ces stratégies d’anticipation sont largement tributaires de l’origine sociale des étudiantes et de la nature du projet professionnel formulé. Summary, p. 150. Resumen, p. 151.

A

lors que certains prédisaient un peu vite leur disparition (Travaillot, 1998), la gymnastique aérobic et ses dérivés attirent toujours bon nombre d’adeptes. Les chiffres issus du rapport annuel du service des sports de l’université de Valenciennes montrent que 20 % de la population étudiante inscrite à ce service s’investissent dans une activité physique dite « de mise en forme »

129

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

Oumaya HIDRI, Catherine LOUVEAU


Oumaya Hidri, Catherine Louveau

(AMF). Ces pratiques, dont le taux de féminisation frôle les 100 %, drainent les deux tiers des étudiantes inscrites au service des sports. Comment peut-on expliquer cet engouement des étudiantes pour ce type d’activités ?

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

Certains auteurs ont démontré que l’apparence pouvait recevoir une valeur dans le système éducatif français (Amadieu, 2002 ; Maisonneuve et Bruchon-Schweitzer, 1999 ; etc.). On sait aujourd’hui que l’attrait physique des enfants, et plus particulièrement celui des filles, a une incidence sur l’évaluation de leurs performances scolaires et sur les conduites effectives des enseignants à leurs égards. D’autres ont révélé dans quelles circonstances la possession du corps-idéal pouvait procurer aux femmes des avantages sur le marché matrimonial (Amadieu, 2002 ; Bourdieu, 1979b ; De Singly, 1994 ; etc.). Enfin, en sociologie du sport, les travaux de Christian Pociello (1981) ont déjà souligné des conversions possibles d’une excellence corporelle en excellence sociale. La lecture de ces travaux nous incite donc à penser qu’une apparence corporelle « normée » constitue une condition sine qua non au franchissement réussi de certaines étapes de la vie sociale. Nous allons tenter de montrer dans quelles mesures les étudiantes estiment que l’apparence peut jouer un rôle dans leur future vie professionnelle. En premier lieu, nous supposons que ces jeunes femmes travaillent leur corps pour tenter d’accroître leur capital corporel. Dans la perspective théorique de notre étude, celui-ci doit être entendu comme un type particulier de ressources corporelles que l’étudiante peut mobiliser à son profit dans un champ déterminé. En effet, les propriétés

130

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

Dans un monde où les normes corporelles sont massivement médiatisées, la mise en (re)présentation de soi représente aujourd’hui un véritable enjeu. Cependant, la diffusion de canons esthétiques produit un impact sensiblement différent pour les deux sexes. De nombreux auteurs, et notamment Véronique Nahoum-Grappe (1987), ont montré qu’une femme ne le devient qu’à partir du moment où elle affiche esthétiquement cette féminité. Le contenu de la presse dite « féminine » le rappelle de façon récurrente et conforte ce que Georges Vigarello notait en 1993, à savoir que le corps peut se transformer indéfiniment. Travailler son corps pour le rendre conforme aux canons esthétiques en vigueur dans la société pourrait donc être considéré comme un facteur explicatif de cet engouement des étudiantes pour les AMF. Mais pourquoi « sacrifier » à des normes corporelles aussi drastiques ?


Travailler, 2005, 14 : 129-151

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

De nombreuses études ont montré que les pratiques sportives, et plus particulièrement les AMF, pouvaient s’inscrire dans le cadre de « stratégies de façonnage de l’apparence » (Irlinger, Louveau et Métoudi, 1990 : 269). Nous supposerons, en second lieu, que les pratiques sportives de ces étudiantes font partie des stratégies d’anticipation, censées faciliter leur primo-insertion professionnelle. Dans la perspective structuraliste critique, les agents sociaux n’agissent pas rationnellement en fonction de buts calculés et planifiés, a priori, mais selon une rationalité limitée et façonnée par leur environnement, leurs conditions d’existence et leurs positions sociales. Nous considérons, en effet, que les stratégies développées par ces étudiantes demeurent subordonnées à la logique de l’habitus, qui conditionne les choix en première instance. Ainsi, l’habitus engendre des stratégies « qui peuvent être conformes aux intérêts objectifs de leurs auteurs sans avoir été expressément conçues à cette fin » (Bourdieu, 1980c : 119). En ce sens, travailler son corps ne résulte pas d’un calcul conscient ou cynique, les argumentations développées par les étudiantes sont donc loin d’épuiser les raisons profondes de leurs actes, soumises à des forces sociales qui leur échappent. Après avoir présenté quelques éléments de méthodologie, nous étudierons, dans un premier temps, le projet professionnel des étudiantes interrogées et les conditions qu’elles estiment nécessaires à sa réalisation. Nous verrons ensuite que le développement de stratégies d’anticipation d’insertion professionnelle est soumis aux déterminismes sociaux. Enfin, dans un dernier temps, nous nous attacherons plus particulièrement au travail effectif du corps de ces jeunes femmes.

Éléments de méthodologie Caractéristiques de la population étudiée La population est constituée de deux cent vingt-trois étudiantes inscrites à l’université de Valenciennes et aux cours de Gym Dynamique et Master proposés par le service des sports de cette université. Ces cours,

131

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

corporelles ne peuvent fonctionner comme capital que par rapport à l’existence d’un espace qui reconnaît leur valeur effective. Les étudiantes concernées par notre enquête estimeraient que cette forme de capital peut recevoir une valeur sur le marché du travail. En ce sens, la pratique d’AMF représenterait un moyen choisi, parmi d’autres, d’accroître leur capital corporel.


Oumaya Hidri, Catherine Louveau

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

L’étude effectuée repose donc sur les réponses d’étudiantes inscrites à la Faculté des lettres, langues, arts et sciences humaines (42 % de l’échantillon), mais également à l’Institut des sciences et techniques (17 %), à l’Institut universitaire technologique (13 %) et à la Faculté de droit, d’économie et de gestion (12 %). Elles sont prioritairement inscrites en premier cycle (60 %) ou en second cycle (38 %). Elles sont donc minoritaires à réaliser un troisième cycle et, dans ce cas, il s’agit exclusivement d’un Diplôme d’études supérieures et spécialisées (DESS). Le questionnaire En concordance avec le caractère exploratoire de la recherche, le questionnaire s’est imposé comme la méthode de recueil de données la plus adéquate. Toutefois, pour approcher les significations que les étudiantes attribuent à leurs pratiques sportives et à l’apparence corporelle, nous avons proposé douze questions ouvertes (sur trente-trois au total). Les thèmes investigués sont issus du cadre théorique : les études et le projet professionnel, les activités physiques ou sportives, les caractéristiques sociales de l’étudiante et ses opinions sur l’apparence corporelle. Cette dernière partie proposait un support visuel de quatre photographies de femmes en pied : une executive woman, image de la femme active, qui répond aux critères de beauté en vigueur dans la classe dominante (grande, mince et musclée) ; une mannequin dont les caractéristiques de

132

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

d’une durée comprise entre 1 heure et 1 heure 30, présentent un programme d’exercices semblables : échauffement cardiovasculaire et musculaire, apprentissage d’un enchaînement chorégraphié, renforcement musculaire et stretching, le tout réalisé avec un support musical. Cette enquête a été réalisée auprès d’un échantillon « spontané », comprenant l’ensemble des personnes présentes aux cours et volontaires lors du recueil des données. Si celui-ci n’est pas représentatif, au sens statistique du terme, il est presque exhaustif puisque la population totale inscrite à ces cours compte trois cents étudiantes. L’échantillon définitif présente l’inconvénient d’être hétérogène : 66 % des étudiantes questionnées sont inscrits à ces activités depuis plus d’un an – 26 % sont inscrits depuis le début de l’année universitaire et ont assisté à plus d’un cours par semaine – ; enfin, 8 % sont peu assidus, et ce, depuis moins d’un an. Toutefois, utiliser d’autres méthodes d’échantillon était impossible du fait de l’absence d’une base de sondage renseignée et d’une population de référence de taille insuffisante.


Travailler, 2005, 14 : 129-151

« grandeur/minceur » sont exacerbées (1,80 m/50 kg) ; une sportive, femme en survêtement et en baskets, qui apparaît dans les rubriques des magazines féminins, consacrés au bien-être et à l’hygiène de vie ; enfin, une femme présentant un surpoids avancé. L’autoadministration constitue le mode de passation choisi pour l’enquête. Un texte introductif présentait donc l’origine et l’intention du recueil, assurait du sérieux de l’enquête et garantissait l’anonymat aux enquêtés. Une présentation orale « standardisée » était systématiquement réalisée par les enseignants des activités concernées par l’enquête. Enfin, en début de cours, plus d’une vingtaine de minutes étaient consacrées à la passation, avant la récupération immédiate des recueils de données par l’enseignant. Ces quelques précautions méthodologiques ont permis d’influencer favorablement le taux de réponse (99 %) et d’optimiser la manière dont les questionnaires ont été remplis.

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

Les variables de statut ont fait l’objet d’un traitement statistique (logiciel STATLab) et les variables plus qualitatives ont été traitées selon une analyse thématique en spécifiant les nombres, les fréquences et la particularité des réponses formulées. Au moment du codage, nous avons dû accepter de réduire les réponses aux questions ouvertes à un nombre donné de catégories, celles-ci ayant émergé au fur et à mesure de l’analyse. Toutefois, nous avons tenté d’assurer, dans cet article, un perpétuel va-et-vient entre la catégorisation standardisée choisie et les expressions personnelles des étudiantes interrogées. Ce parti pris répond à un souci d’objectivation et à notre désir de livrer un retour exact et vivant de l’enquête menée. Enfin, nous avons exclusivement effectué des analyses uniet bi-variées. Bien qu’intéressante, l’introduction d’une troisième variable diminue la fiabilité statistique ; la taille de l’échantillon définitif ne nous l’autorisait pas. 1. Le projet professionnel des étudiantes « “Les problèmes de la jeunesse” sont des problèmes d’emploi » (Maruani et Reynaud, 1993 : 15). En effet, l’acte d’étudier ne se comprend que si l’on considère sa finalité : « Étudier pour quoi faire ? » (Molinari, 1992 : 7). Les travaux sociologiques sur les aspirations des étudiants inscrits à l’université montrent que nombre d’entre eux ignorent la profession qu’ils souhaitent exercer. Ainsi 52 % de la population

133

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

L’analyse des données


Oumaya Hidri, Catherine Louveau

étudiante interrogée par Olivier Galland et Marco Oberti 1 (1996) disent tout ignorer de leur avenir professionnel. En revanche, près de neuf étudiantes sur dix interrogées dans notre enquête ont déjà choisi la profession qu’elles envisagent d’exercer à leur sortie de l’université. 1.1. Un avenir professionnel déjà décidé

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

Un tiers des étudiantes ayant défini leur projet professionnel prévoient d’exercer des professions que nous avons regroupées dans la catégorie « commercial ». Il s’agit de vendre un produit, une enseigne (magasins, entreprises, etc.), mais également un service (banques, offices de tourisme, etc.). Ce sont donc des professions pour lesquelles l’individu est en contact avec un public toujours différent, qui impliquent des relations sociales et une présentation de soi. Ces étudiantes proviennent de la Faculté des lettres, mais également de l’Institut universitaire de technologie (IUT). Ces dernières présentent d’ailleurs les ambitions universitaires et professionnelles les plus modestes. L’institut en luimême propose des formations relativement courtes 2 à visée professionnelle immédiate : gestion des entreprises et administrations, techniques commerciales, etc. Les étudiantes provenant de cet institut visent une certification minimale, un titre universitaire moins ambitieux que d’autres, certes, mais qui leur permettra d’entrer rapidement dans le marché du travail. Les métiers du commerce (hôtesse d’accueil et de vente notamment) sont majoritaires dans leur choix professionnel. Peu d’étudiantes, parmi celles interrogées, envisagent des professions impliquant des compétences techniques et des savoirs pratiques

1. L’enquête réalisée sous la direction d’Olivier Galland (1996) concernait les étudiants des universités de Besançon, de Rennes et de Nanterre. 2. L’IUT propose majoritairement des DUT, Diplôme universitaire de technologie, (formations à visée professionnelle en deux années) et quelques DETS, Diplôme d’études techniques supérieures (deux années après le DUT).

134

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

Le projet professionnel représente une anticipation à moyen terme d’une insertion professionnelle (Biémar et al., 2003). De façon générale, les métiers de l’enseignement sont très majoritairement envisagés par les jeunes femmes l’ayant formulé : plus de 40 % de ces dernières souhaitent devenir enseignante. Les étudiantes en lettres, langues, arts et sciences humaines, constituent le vivier principal de ces métiers. Parmi celles qui souhaitent cet avenir, 86 % envisagent de poursuivre leurs études jusqu’aux diplômes du second cycle.


Travailler, 2005, 14 : 129-151

(conducteur de travaux, contremaître électromécanicien, etc.). Celles qui désirent exercer ce type de profession proviennent principalement des écoles d’ingénieurs et souhaitent terminer leurs études après l’obtention d’un diplôme préférentiellement de deuxième cycle. L’anticipation de sa primo-insertion professionnelle amène l’étudiante à définir son projet d’études, et plus particulièrement le diplôme qu’elle compte acquérir. À la suite des travaux d’Olivier Galland et de Marco Oberti (1996), on peut penser que celle-ci contribue également à définir leurs attentes à l’égard de leur formation universitaire.

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

En se référant à la répartition des étudiants au sein de l’université de Valenciennes et du SUAPS 3, on peut constater que certaines filières sont sur ou sous-représentées dans la population fréquentant les pratiques de forme. Si la population étudiante sportive est incontestablement scientifique (Institut scientifique et technologique, Écoles d’ingénieurs, etc.), les pratiquantes des AMF proviennent principalement des filières littéraires et économiques. Certes, la Faculté des lettres est géographiquement proche du SUAPS de l’université, mais, surtout, ses effectifs sont très majoritairement féminins, caractéristiques faisant de ces étudiantes le vivier hypothétique du public des AMF 4. Cependant, on peut penser que d’autres paramètres peuvent expliquer cette sur-représentation. Olivier Galland et Marco Oberti (1996) ont noté, dans leur enquête, que les étudiantes issues de ces filières présentaient une attitude critique beaucoup plus forte envers leur formation universitaire que leurs homologues d’autres filières. Donnée corroborée ici puisque plus de neuf étudiantes sur dix provenant de la Faculté des lettres et des langues affirment ne pas être satisfaites de la préparation à la vie professionnelle dispensée par l’université. Elles aimeraient pour la plupart réaliser des stages en milieux professionnels. Les futures enseignantes sont sur-représentées dans cette catégorie ; 72 % d’entre elles appréhendent leur entrée dans la vie active et aimeraient avoir plus souvent la possibilité de mettre en pratique leurs connaissances, notamment à travers la mise en place de stages en milieu scolaire.

3. Service universitaire des activités physiques et sportives. 4. De nombreux auteurs ont déjà montré que ces pratiques dites « de mise en forme » étaient fortement assignées au féminin (Louveau 1981 ; Bessy 1990 ; Travaillot 1998, etc.).

135

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

1.2. Les critiques formulées à l’encontre de l’université


Oumaya Hidri, Catherine Louveau

Tableau 1 Modifications souhaitées par les étudiantes selon le projet professionnel formulé (En %) Réaliser plus Anticiper Aucune de stages l’entrée modification préprofes- dans la vie sionnels active

Se préparer aux concours

Autres

Total

Pas de projet

85*

11

0

4

0

100

Technique

73

20

0

0

7

100

Administratif

17

38

4

33

8

100

Enseignement

11

72

5

4

8

100

Commercial

0

22

66

0

12

100

Autre

50

50

0

0

0

100

Total

23

42

22

5

8

100

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

* Lecture : 85 % des étudiantes n’ayant pas formulé de projet professionnel sont totalement satisfaits de la préparation à la vie professionnelle assurée par l’université et ne souhaitent aucune modification à leur formation initiale.

De même, les futures « commerciales » sont très critiques à l’encontre de la préparation à la vie professionnelle assurée par l’université. Mais leurs revendications portent sur tout autre chose : 66 % d’entre elles considèrent que ce qui fait le plus défaut à leur formation universitaire est la préparation aux différentes étapes du recrutement, à l’entrée dans la vie active. Ces étudiantes souhaitent apprendre « à rédiger un curriculum vitæ et une lettre de motivation performants ». Elles semblent également éprouver une réelle appréhension à l’idée de rencontrer les « recruteurs » et d’être mises en concurrence avec d’autres postulants. En ce sens, elles désirent être préparées « aux difficultés rencontrées sur le marché de l’emploi », apprendre « la façon de conduire un entretien », « de se tenir », « de se présenter » en entretien d’embauche. Leurs demandes s’articulent quasiment toutes autour de notions relatives à la présentation de soi (savoir se présenter, se tenir, « s’avantager », etc.). Seul un quart de notre échantillon s’estime totalement satisfait de sa formation universitaire. Il s’agit principalement des étudiantes qui n’ont pas défini leur projet professionnel et celles qui se destinent à une profession de type « technique ».

136

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

% en lignes


Travailler, 2005, 14 : 129-151

1.3. Les qualités estimées indispensables aux professions envisagées D’une manière générale, les critiques formulées par les étudiantes à l’encontre de l’université apparaissent en relation étroite avec le projet professionnel qu’elles ont défini, et plus particulièrement avec la qualité qu’elles estiment indispensable à la concrétisation de ce projet. Tableau 2 Qualité estimée indispensable selon la profession envisagée Sens du contact

Présentation de soi

Savoirs pratiques

Connaissances théoriques

Total

13*

0

60

27

100

Administratif

8

29

21

42

100

Enseignement

69

9

6

16

100

Commercial

6

90

3

1

100

Autre

13

62

25

0

100

Total

33

42

12

13

100

Technique

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

% en ligne * Lecture : 13 % des étudiantes ayant formulé un projet professionnel considèrent le sens du contact comme la qualité indispensable à l’exercice de leur future profession.

Les professions féminisées sont « des professions qui érigent la “féminité” en qualité professionnelle » (Bihr et Pfefferkorn, 1996 : 80). C’est surtout dans le secteur tertiaire, et notamment dans ce que Pierre Bourdieu (1979b) nomme les professions de présentation et de représentation, que les femmes sont sur-représentées. Ainsi, 90 % des étudiantes ayant défini un projet professionnel de type commercial et 29 % de celles qui envisagent une carrière administrative considèrent qu’une « présentation de soi valorisante » est un atout indispensable à l’exercice de leur future profession. Et 69 % des jeunes femmes qui se destinent aux métiers de l’enseignement estiment, quant à elles, que les qualités relatives au « sens du contact » sont plus importantes pour réussir dans leur vie professionnelle. L’université propose en majorité des connaissances théoriques au travers de cours magistraux, accompagnés de quelques travaux pratiques et stages. Les étudiantes interrogées considèrent que les enseignements en lien avec le monde du travail sont insuffisants d’un point de vue quantitatif ;

137

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

(En %)


Oumaya Hidri, Catherine Louveau

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

En résumé, les étudiantes pratiquant des AMF au service des sports de l’université de Valenciennes ont, en majorité, défini leur projet professionnel. Ce faisant, elles ont établi leur projet universitaire et, éventuellement, relevé des défaillances dans leur formation. Pour celles qui envisagent une profession de type commercial, administratif ou un métier de l’enseignement, la certification universitaire qu’elles tentent d’acquérir ne suffit pas à regarder sereinement leur entrée future dans la vie active. Pour accéder à l’emploi, le diplôme est une « condition toujours nécessaire », mais « de moins en moins condition suffisante » (Vinokur, 1995). D’autant moins suffisante pour les femmes, puisqu’il apparaît que « les jeunes filles sont régulièrement plus touchées par le chômage que les jeunes gens et l’effet “protecteur” du diplôme joue plus faiblement pour elles » (Maruani et Reynaud, 2001). Autrement dit, le capital scolaire ne conditionne plus à lui seul l’embauche et la carrière, d’autres formes de capitaux entrent en jeu. Toutefois, la présentation de soi, qualité qui nous intéresse plus particulièrement dans cette étude, ne semble pas captiver toutes les étudiantes interrogées. Ces différences résultent en partie de la formulation et de la nature du projet professionnel. Elles sont, en conséquence, tributaires de l’origine sociale particulière des étudiantes pratiquant les AMF à l’université de Valenciennes. 2. Les usages sociaux de l’apparence Au même titre que le capital économique, la possession d’un capital corporel fonde un principe de hiérarchisation. L’apparence corporelle contribue à une définition et à une délimitation des groupes sociaux, exprimant ainsi les différences de classe. 2.1. Les disparités sociales de l’apparence Selon Jean-François Amadieu (2002 : 21), il existe « une uniformité frappante des jugements de beauté que nous émettons ». Comme l’a souligné Michèle Pagès-Delon (1989 : 75), il existe des « normes de construction et d’usage des apparences ». Dans un texte fondateur, Luc Boltanski (1971) a notamment montré comment l’intérêt et l’attention que les individus portent à leur corps s’accentuent à mesure qu’on s’élève dans la hiérarchie sociale. Le modèle corporel tenu pour légitime est celui qui est

138

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

en effet, aucun cours relatif à la « présentation de soi » et au « sens du contact » n’est donné à l’UVHC. Il n’est donc pas surprenant de constater une insatisfaction relative des étudiantes pratiquant les AMF dans la mesure où elles souhaitent s’orienter vers des professions pour lesquelles, selon elles, ces deux qualités priment.


Travailler, 2005, 14 : 129-151

véhiculé par les canons esthétiques en vigueur dans la classe dominante. Ce culte de l’apparence s’impose comme dominant, en raison de la position sociale privilégiée de ses émetteurs (Bourdieu, 1979b). Ainsi, ces derniers tentent d’imposer les caractéristiques de fermeté, de tonicité, de grandeur et de minceur aux catégories les plus basses de la hiérarchie sociale.

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

Concernant les femmes issues des classes populaires, cet auteur donne le nom de « pudeur » à ce qui les limite quant à leurs investissements en argent et en temps pour l’ornement et l’entretien de leur corps. D’une manière générale, et ainsi que cela a été observé pour le sport, les membres de ces classes entretiennent avec leur corps un rapport « productif, instrumental, mécaniste et silencieux » (Pociello, 1982 : 8). 2.2. Les pratiques de mise en forme à l’université de Valenciennes, un recrutement social spécifique Plusieurs travaux (Bessy 1990, Travaillot 1998, etc.) tendent à montrer que les AMF sont en affinité avec les habitus des membres des classes moyennes et des franges supérieures des classes populaires. Les étudiantes inscrites à ces activités à l’université de Valenciennes n’échappent pas à cette relation d’homologie structurale 5. Près de la moitié d’entre elles sont issues de la classe moyenne, un quart de la classe supérieure et l’autre quart des franges supérieures des classes populaires. 5. Compte tenu de la taille de notre échantillon, la comparaison des origines sociales des étudiantes a été réalisée sur la base d’un regroupement en trois catégories : « supérieure », « moyenne » et « populaire ». La catégorie populaire est constituée des ouvriers et salariés agricoles de la population d’enquête. Les catégories moyennes résultent d’un regroupement des artisans, commerçants et chefs d’entreprise, des professions intermédiaires ainsi que des employés. Enfin, au sein des catégories supérieures, on retrouve les professions libérales, les cadres de la fonction publique, les professions intellectuelles et artistiques et les cadres d’entreprise. Les retraités et les demandeurs d’emploi ont été codés selon la profession qu’ils exerçaient avant leur fin d’activité.

139

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

La petite bourgeoisie, du fait de sa position dans l’espace social, se trouve particulièrement exposée à tous les effets de l’anxiété à l’égard du regard social. Les femmes issues de cette petite bourgeoisie « atteignent la forme extrême de l’aliénation symbolique » (Bourdieu, 1998d : 95). Selon l’auteur, elles sont les victimes privilégiées de cette domination symbolique, mais aussi les instruments désignés pour en relayer les effets en direction des catégories dominées. Au niveau de la classe moyenne, le paraître prend donc toute son importance. Les journaux féminins, particulièrement ceux qui sont lus par les membres de la classe moyenne, suscitent ou réveillent chez leurs lectrices ce que Luc Boltanski (1971) nomme la honte de soi et, plus précisément, la honte de son corps.


Oumaya Hidri, Catherine Louveau

Tableau 3 Origine sociale* des étudiantes interrogées

(En %)

Étudiantes concernées Non-réponse

6

Agriculteurs exploitants

1

Artisans, commerçants et chefs d’entreprise

8

Cadres et professions intellectuelles supérieures

12

Professions intermédiaires

21

Employés

26

Ouvriers

26

Total

100

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

On a déjà montré que le sentiment de bien-être corporel était très situé socialement (Louveau, 1981a). En effet, si le bien-être renvoie au sentiment d’être bien dans sa peau, le mal-être s’exprime souvent dans le souhait de changer de peau. Mais, le mal-être tient en même temps au fait que la personne se sente mal à la position qu’elle occupe dans l’espace social. Amenées à qualifier leur origine sociale, la majorité des étudiantes ont le sentiment d’appartenir à un milieu social particulier qu’elles indiquent comme « moyen » et « inférieur » 6. La mise en relation des deux classifications de l’origine sociale, objective et subjective, a permis d’apprécier la manière dont les étudiantes interrogées assument leurs origines sociales afin d’évaluer leur éventuelle volonté d’ascension sociale. La majorité des étudiantes issues des classes supérieures n’ont pas le sentiment d’appartenir à un milieu social particulier (17 sur 27). Par ailleurs, une certaine forme de sous-classement est à souligner chez les huit étudiantes ayant qualifié leur milieu social d’origine de « supérieur ». Elles dénient quelque peu cette appartenance, « milieu bourgeois, mais on essaye de ne pas trop le montrer » ou encore « supérieur, mais c’est grâce à un héritage ». Ces observations diffèrent sensiblement des propos tenus par les 6. Celles qui estiment ne pas appartenir à un milieu social particulier sont minoritaires, elles représentent 36 % de l’échantillon interrogé.

140

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

* La catégorie socioprofessionnelle du référent (le plus souvent celle du père) a tenu lieu d’indicateur principal d’origine sociale de l’étudiante. Les parents « retraités » ou « demandeurs d’emploi », par ailleurs peu nombreux, ont été codés selon la dernière profession exercée.


Travailler, 2005, 14 : 129-151

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

Cette attitude désapprobatrice et ce certain détachement à l’égard du milieu social d’origine laissent présager une « volonté » d’en changer. Selon Olivier Galland et Marco Oberti (1996), les étudiantes issues de ces milieux sont effectivement celles qui se projettent dans un genre de vie distinct de celui de leur parent. L’université est alors vécue comme une étape nécessaire, comme un moyen privilégié « d’ajuster ou de préciser attentes et projets tant sur le plan professionnel que sur le plan personnel ». Ainsi, la quasi-totalité de ces étudiantes planifient, grâce aux études suivies, de réaliser une trajectoire professionnelle ascendante. En résumé, le travail des apparences est donc soumis à des disparités sociales, d’autant plus que le corps « dans les dimensions de sa conformation visible (volume, taille, poids, etc.) est un produit social » (Bourdieu, 1977a). En d’autres termes, le corps témoigne de notre position sociale. Les étudiantes issues des classes moyennes et populaires souhaitent instaurer, et l’accès à l’université constitue un moyen d’y parvenir, une certaine distance vis-à-vis de leur milieu social d’origine. Travailler son corps pour le rendre « employable » sur le marché du travail en est un autre. 3. La construction d’un capital spécifique Les étudiantes peuvent avoir une conception finalisée des études. Peut-on supposer qu’elles aient une conception identique de leur pratique de mise en forme ? Ce choix d’activités physiques aurait alors partie liée avec leurs souhaits de professions de (re)présentation et le travail du corps qui les caractérise. La défaillance des différentes institutions mentionnée par certaines étudiantes pourrait ainsi être « comblée », « compensée », par l’acquisition de cette qualité essentielle qu’est la mise en présentation de soi.

141

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

étudiantes ayant le sentiment d’appartenir à des milieux sociaux dits « inférieur » et « moyen ». Soixante-dix-neuf pour cent des premières sont de fait issues des classes populaires et de la frange inférieure de la classe moyenne et 68 % des secondes ont des parents appartenant aux professions intermédiaires. Le fait que la définition subjective de l’origine sociale réalisée par l’étudiante corresponde fréquemment à la définition objective de celle-ci montre avec quelle acuité les étudiantes ressentent leur appartenance à un milieu social donné. Leurs propos témoignent d’une certaine difficulté à assumer cette origine sociale moyenne ou populaire : « C’est plutôt un milieu défavorisé, qui ne sait pas se tenir. » (Étudiante en économie, parents ouvriers.) « Milieu pauvre qui n’a aucune classe. » (Étudiante en droit, parents employés.) Ou encore « Milieu ouvrier, rustre, ridicule (parfois), mais ce n’est pas juste de se moquer d’eux, ce n’est pas leur faute. » (Étudiante en techniques commerciales, père ouvrier et mère au foyer.)


Oumaya Hidri, Catherine Louveau

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

D’un point de vue strictement médical, les étudiantes interrogées présentent une relation {Taille-Poids} satisfaisante. Quarante-trois pour cent d’entre elles sont considérés comme étant « normales 7 » et 52 % comme étant « minces ». Seules quelques-unes sont classées comme « maigres », « souffrant d’un surpoids » ou « obèses ». Selon Jean-François Amadieu (2002 : 27), en France, « la perception que les femmes ont de leur corps est très négative ». Ainsi, 70 % des femmes se trouveraient trop grosses contre seulement 30 % des hommes. Nos résultats corroborent cette tendance puisque, malgré leur « normalité médicale », les trois-quarts des étudiantes interrogées souhaitent perdre du poids. Concernant la taille, donnée pourtant immuable, la moitié de notre échantillon émet le souhait d’être plus grande. La majorité des étudiantes pratiquant les AMF souhaitent donc maigrir et grandir, espérant sans doute ainsi se rapprocher du standard esthétique en vigueur dans la classe dominante et omniprésent dans les médias 8. Ces vœux sont d’autant plus assimilables à des options de principe que les modifications objectivement souhaitées sont de faible ampleur. Seuls trois kilogrammes séparent la moyenne de la formule « Taille réelle – Poids réel » (celle-ci est de 112,5) de la moyenne de la formule « Taille réelle – Poids idéal » (celle-ci est de 115,5). Le souhait de perdre du poids semble se confondre avec celui d’une amélioration visible de la silhouette. Nous avons vu précédemment que l’intérêt et l’attention qu’un individu porte à son corps sont tributaires des disparités sociales, la valorisation de la minceur également. Loin de récuser le poids des déterminismes 7. Deux formules sont reconnues par la profession médicale comme étant révélatrices : la formule de Lorentz et l’Indice de masse corporelle (IMC). La première tient compte de la taille et du sexe du patient. Elle indique cependant le « poids idéal » du patient, notion que nous voulions précisément écarter à ce stade de l’étude. L’IMC présente l’inconvénient de ne pas tenir compte de l’âge et du sexe du patient. Elle permet toutefois de confirmer si le poids du patient est synonyme de danger ou non. L’IMC s’obtient en divisant le poids par la taille au carré. Les médecins considèrent qu’un individu présentant un IMC compris entre 20 et 25 a une relation {Taille-Poids} « normale ». De plus, de nombreuses enquêtes anglo-saxonnes ont montré que l’IMC est un critère de beauté majeur pour les femmes. Ainsi, une étude relatée par Jean-François Amadieu (2002) affirme que l’IMC compterait pour 74 % du jugement sur la beauté d’une silhouette féminine. 8. Une enquête française menée en 1994 a révélé les goûts féminins en matière de silhouette féminine. Les résultats ont montré que la silhouette préférée par les femmes présentait un IMC de 19,3 (Mouches, A. (1994). La représentation subjective de la silhouette féminine. Cahiers internationaux de psychologie sociale, 4/24, p. 76-87). Or, la moyenne des IMC des étudiantes interrogées est justement de 19,3. Il semblerait que les étudiantes de notre échantillon soient plus sévères en matière de minceur que les femmes concernées par l’enquête précédente.

142

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

3.1. Grandir et mincir, un impératif ?


Travailler, 2005, 14 : 129-151

sociaux qui ont maintes fois déjà montré leur influence, notre analyse révèle également d’autres disparités liées à l’appartenance sociale, telle la manière dont l’étudiante définit son projet professionnel. 3.2. Les disparités professionnelles de l’apparence corporelle

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

En proposant aux étudiantes interrogées quatre photos de femmes et en leur demandant « quelle est celle qui a le plus de chance de réussir un entretien d’embauche pour un emploi de type commercial ? », nous voulions observer si les étudiantes établissaient une correspondance entre l’apparence corporelle des femmes et le type de profession exercée. Comme le souligne Jean-François Amadieu (2002 : 118), « les particularités physiques […] d’un candidat ont un poids déterminant lors du recrutement, mais ce poids varie selon les métiers et les secteurs d’activité ». Ainsi l’expérience menée 9 auprès de cent vingt cabinets de recrutement français, montre qu’un « physique disgracieux entraîne un rejet presque systématique pour 66 % des recruteurs » pour des emplois de commerciaux. Les étudiantes se destinant à des professions commerciales pensent de même. Quatre-vint quatorze pour cent des étudiantes interrogées considèrent le modèle de l’executive woman 10 comme représentatif de la future « commerciale ». Aux yeux des étudiantes, l’expression du visage et la tenue vestimentaire ne seraient pas primordiales pour les recruteurs du secteur commercial. L’apparence corporelle et le charisme du modèle semblent constituer des critères de sélection plus pertinents. Le modèle de l’executive woman répond aux critères de beauté en vigueur dans la classe dominante, mais également dans le secteur commercial. En effet, près de la moitié des étudiantes interrogées désigne cette femme comme étant le plus susceptible de réussir dans le secteur commercial 9. Enquête de Capital citée par Azzopardi, G. (1995), Les Nouveaux tests de recrutement, Paris, Marabout. 10. La photo concernée présentait une femme grande (plus d’1,75 m), mince et d’allure dynamique, donnée comme symbolisant la femme active. La photo avait été choisie dans un magazine spécialement conçu pour les étudiants, Jeunes à Lille, et plus particulièrement dans une publicité pour le recrutement d’hôtesses d’accueil et de vente.

143

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

Les données recueillies tendent à montrer qu’il faut absolument être mince pour exercer une profession de type « commercial », c’est du moins ce que pensent plus de 9 sur 10 des étudiantes désirant exercer ce type d’emploi. A contrario, les rares étudiantes qui souhaitent rester comme elles sont figurent parmi celles qui envisagent une profession de type « technique » et celles qui n’ont pas encore défini leur projet professionnel. Mais d’autres critères que le poids et la taille interviennent.


Oumaya Hidri, Catherine Louveau

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

3.3. Quel modèle de féminité pour quelle profession ? La majorité des étudiantes interrogées aimeraient ressembler à l’executive woman 11. L’apparence corporelle longiligne de celle-ci, le rapport {Taille-Poids} indiquant la minceur et les avantages qu’apporte la possession de l’idéal corporel semblent constituer une première justification. C’est en effet dans ces termes que s’expriment les étudiantes : « Son corps me permettrait d’être la meilleure, la plus forte » ou encore « Elle a tout pour elle, elle a un corps de rêve. » D’autres étudiantes justifient leur choix en se référant à la nature de leur projet professionnel. Celles qui ambitionnent un métier de l’enseignement avouent leurs craintes de ne pas être à la hauteur, de ne pas savoir se faire respecter. Elles aimeraient ressembler au modèle de l’executive woman parce qu’elle « a l’air solide » ; étant ainsi, elles sauraient « s’imposer face aux élèves, aux parents d’élèves et aux collègues ». Elles choisissent ce modèle pour « son autorité », qualité qu’elles jugent « nécessaire pour gérer une classe d’une trentaine d’élèves ». Les étudiantes qui se destinent à une profession de type commercial font référence au « stéréotype corporel » qui est de mise dans ce secteur, à 11. Si la majorité des étudiantes interrogées s’accordent pour définir l’executive woman comme l’idéal de féminité, il est intéressant de noter que la même image est interprétée en termes d’effet autorité par les futures enseignantes et en termes plus limités au corps par les futures commerciales.

144

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

parce qu’elle « répond aux stéréotypes de la profession », « aux critères de l’emploi : poids, taille, tenue vestimentaire et sourire ». Ainsi, il existe, selon les étudiantes concernées, un « profil recherché par les recruteurs de ce secteur ». Ce profil se caractérise par la possession d’un corps « adapté, il faut être grande et mince, mais aussi musclée », bref, avoir un corps qui « répond aux normes ». Si les expressions du visage et la tenue vestimentaire sont des atouts qui importent dans le secteur commercial, ils ne suffisent pas, selon les étudiantes, à assurer la réussite professionnelle. Elles considèrent la silhouette comme un avantage beaucoup plus sûr. Ainsi, anticipant sur l’existence objective d’une correspondance entre les formes de l’apparence corporelle et la profession exercée, les étudiantes chercheraient à se conformer au stéréotype de la profession (qui n’est alors qu’envisagée) afin d’augmenter leurs chances futures de succès. La pratique des AMF, qui contribuent à une véritable mise en forme(s) du corps (bodybuilding), pourrait représenter un des meilleurs moyens pour atteindre cet objectif. Ces étudiantes chercheraient d’autant plus volontiers cette conformation/conformité que leur origine sociale les y invite.


Travailler, 2005, 14 : 129-151

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

3.4. Les AMF, un moyen de faire fructifier son capital corporel ? C’est par souci de leur silhouette que nombre de femmes s’adonnent à des activités physiques ou sportives. La gymnastique, la danse et la natation, à titre d’exemples, leur permettent d’affiner et allonger leur corps afin de se conformer aux canons esthétiques actuels. Dans le cadre de notre étude, il est intéressant de noter que plus de 60 % des étudiantes interrogées ne pratiquent que des activités de mise en forme de type aérobic et musculation légère comme activités physiques et sportives. Celles-ci impliquent un mélange constant de travail cardio-vasculaire et musculaire. Pourtant, lorsque les étudiantes précisent les effets réels, selon elles, de ces pratiques sur leur apparence corporelle, ces deux dimensions n’apparaissent guère. En revanche, les nombreuses corrélations qu’elles établissent spontanément entre ce travail spécifique du corps et leur projet professionnel corroborent nos hypothèses de départ. Tableau 4 Influence des AMF sur l’apparence corporelle selon le projet professionnel défini par l’étudiante Pas Sculpter Augmenter Perdre N-R d’influence les la confiance du muscles en soi poids Pas de projet 0 89* 0 11 0 Technique 0 80 7 13 0 Administratif 0 20 4 13 63 Enseignement 1 23 14 52 10 Commercial 0 4 74 10 12 Autre 0 25 13 37 25 Total 1 29 29 27 14 % en ligne

(En %) Total 100 100 100 100 100 100 100

* Lecture : 89 % des étudiantes n’ayant pas formulé de projet professionnel considèrent que les AMF n’ont aucune influence sur leur apparence corporelle.

145

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

« la distinction » et « la classe » qui font que l’on réussit ou non dans ce type de métier. Ces atouts semblent constituer des impératifs pour qui veut exercer ce type de profession, car c’est en utilisant des termes relatifs à l’obligation, à la contrainte, que les étudiantes s’expriment : « C’est comme ça que je dois être pour réussir dans le métier que je veux faire. » Enfin, et il faut le souligner, près d’un tiers de la population interrogée n’aimerait ressembler à aucun des modèles présentés. Ce sont quasi exclusivement les étudiantes qui envisagent d’exercer une profession de type technique et celles qui n’ont pas encore défini leur projet professionnel.


Oumaya Hidri, Catherine Louveau

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

La pratique de ce type d’activités permet également, selon 29 % des étudiantes enquêtées, de se muscler. Cela « dessine mes muscles et en même temps me rend plus forte, plus battante » ou encore « me rend plus combative, remonte mes seins et muscle mes fesses ». Il s’agit bien souvent de dessiner, de sculpter les muscles de son corps. Ainsi, ce type d’activités « modèle mon corps comme il faut et me donne de belles formes arrondies » et « permet de développer l’ensemble des muscles du corps ». Une certaine préférence est à souligner pour les exercices travaillant les fessiers et abdominaux, c’est-à-dire pour un travail sélectif du corps dont on sait qu’il caractérise les exercices de culture physique des femmes (Davisse et Louveau, 1998). Ces étudiantes, attentives à la mise en forme(s) du corps au sens littéral, sont principalement celles qui envisagent d’exercer une profession de type commercial. Alors que le sens commun considère les activités physiques de mise en forme comme un moyen de perdre du poids, seuls 14 % des étudiantes interrogées font référence à cet aspect. La pratique de ces activités permet alors de « perdre du poids et raffermir la peau flétrie ». Reprenant à leur compte les termes de minceur, voire de maigreur, véhiculés par les médias, les étudiantes souhaitent « effacer leurs rondeurs de graisse et affiner leurs silhouettes ». 12. 29 % de notre échantillon total, notamment les étudiantes qui n’ont pas défini leur projet professionnel et celles qui se destinent à une profession de type « technique », estiment que ce type d’activités n’a aucune influence sur leur apparence corporelle.

146

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

La pratique de ces activités semble, pour la majorité des étudiantes interrogées 12, permettre « d’avoir un corps de rêve ». Vingt-sept pour cent de notre échantillon final, et plus particulièrement celles qui envisagent d’exercer un métier de l’enseignement, estiment que la pratique de ces activités, en tonifiant le corps, permet d’augmenter la confiance en soi. Bien qu’il soit question d’une influence des AMF sur l’apparence corporelle, les futures enseignantes mentionnent d’autres répercussions. Ainsi, ces pratiques rendent « plus agressive, plus déterminée » ; les étudiantes estiment « gagner de la confiance en soi », « devenir plus volontaire », avoir « moins peur du regard des autres ». Celles qui s’expriment ainsi sont celles-là mêmes qui souhaitaient ressembler au modèle de l’executive woman parce qu’elle paraît « tonique, forte, dynamique » et qu’elle « révèle une personnalité autoritaire, charismatique ». À les lire, ces étudiantes craignent de ne pas être à la hauteur, de ne pas savoir se faire respecter dans l’exercice de leur future profession, de manquer d’autorité, « cette qualité personnelle que requièrent du professeur à la fois les élèves, les parents et l’administration » (Baudelot et Establet, 1992 : 73).


Travailler, 2005, 14 : 129-151

Conclusion

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

Contrairement aux résultats d’autres enquêtes, les étudiantes n’ayant pas encore envisagé leur future profession sont minoritaires (12 % de notre échantillon total). Elles sont exclusivement issues de milieux sociaux supérieurs, proviennent des filières scientifiques de l’université et sont toutes inscrites en deuxième cycle. Entièrement satisfaites de leur formation universitaire, elles étudient pour devenir propriétaire d’un capital scolaire significatif, leur capital socioculturel leur permet sans doute de différer le choix précis d’un métier. Les étudiantes qui souhaitent s’insérer dans une profession de type « technique » constituent également des contre-exemples peu nombreux mais saisissants par rapport à nos hypothèses de départ. D’origine sociale populaire, elles proviennent également des filières scientifiques de l’université. La pratique d’AMF leur permet uniquement de « se dépenser », ou encore de « rester en bonne santé ». Si ces formulations sont caractéristiques du rapport que les membres des classes populaires entretiennent avec leur corps, on peut aussi souligner que les professions de type technique que ces étudiantes envisagent d’exercer n’impliquent pas de mise en (re)présentation de soi. Les futures enseignantes ont fréquemment fait référence aux défaillances de leur formation universitaire, notamment à l’insuffisance de stages en milieu scolaire. Elles sont conscientes qu’enseigner les placera en situation permanente de (re)présentation. Elles travaillent leur corps pour être en mesure d’offrir aux futurs regards des élèves, parents d’élèves

147

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

La formulation d’un projet professionnel amène bon nombre d’étudiantes à s’interroger sur la manière de procéder pour le concrétiser : « Quel niveau d’études minimal dois-je envisager ? », « Quelle est la qualité indispensable à l’exercice de ma future profession ? », « Quels sont les manques éventuels dans ma formation universitaire ? », etc. Tentant de répondre à ces questions, certaines développent des stratégies innovantes, essayant, plus ou moins consciemment, de pallier l’inadéquation structurelle entre le système universitaire et les exigences du marché du travail. Au regard des résultats obtenus, on doit cependant nuancer notre hypothèse de départ : toutes les étudiantes n’envisagent pas leur pratique sportive comme un complément de formation. Ces stratégies d’anticipation liées au travail du corps sont largement tributaires de l’origine sociale des étudiantes et de la nature du projet professionnel formulé.


Oumaya Hidri, Catherine Louveau

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

Enfin, les étudiantes qui se destinent à une carrière commerciale considèrent l’apparence corporelle comme un atout très sûr pour accroître leurs chances de succès dans la réalisation de leur projet professionnel. Les professions qu’elles projettent d’exercer exigent des diplômes, des compétences certifiées certes, mais ce sont aussi des secteurs d’activité où « le corps fait sa loi ». De ce fait, les exercices corporels et sportifs « entrent dans les stratégies de façonnage de l’apparence » (Irlinger, Louveau et Métoudi, 1990 : 269). Elles sont d’ailleurs des pratiquantes très assidues des cours de mise en forme puisque 91 % d’entre elles assistent à plus de quatre séances par semaine. Ici, les étudiantes travaillent littéralement leur corps, comme si elles devaient le sculpter avec le même acharnement qu’elles déploient pour forger leur carrière (Louveau, 1992b). Ces étudiantes, issues des franges inférieures des classes moyennes, sont particulièrement sensibles aux canons esthétiques en vigueur dans la classe dominante, et véhiculés par les médias. Toutefois, l’analyse des résultats obtenus a montré que ces étudiantes travaillent également leur corps afin de posséder un capital corporel important, dans l’espoir de le faire valider lors de l’accès au marché du travail. Dans une certaine mesure, elles envisagent ce capital corporel, qu’elles optimisent par la pratique d’activités de mise en forme, comme un complément du capital scolaire sur le marché du travail. Ces résultats nous incitent à poursuivre les investigations dans deux directions. Pour éviter d’encourir le reproche de contribuer à perpétuer les stéréotypes selon lesquels seules les femmes se soucient de leur apparence, que ce soit dans des visées de loisir ou de « pré-professionnalisation », et, « puisque dans nos sociétés les deux catégories de sexe couvrent la totalité du champ social » (Mathieu, 1991 : 37), il nous semble heuristique, dans un premier temps, d’étudier « l’autre continent » (Alonzo et Silvera, 2000 : 23), celui des hommes. Il serait en effet intéressant d’apprécier si les stratégies d’anticipation liées au travail du corps mises au jour chez les étudiantes sont également développées par leurs homologues masculins. Dans un second temps, il paraît pertinent de nous attacher plus spécifiquement à la primo-insertion des étudiant(e)s dans des professions commerciales. Une enquête menée par entretien auprès d’étudiant(e)s en fin de formation initiale à l’université et se destinant à une carrière commerciale permettrait de voir dans quelle mesure le travail des apparences s’inscrit dans leurs stratégies d’accès au marché du travail. Cette approche pourrait confirmer,

148

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

et collègues, un corps, une allure et une forme de corps, « qui non seulement doit attester des capacités mentales, intellectuelles et des compétences, mais doit en augurer » (Louveau, 1996c).


Travailler, 2005, 14 : 129-151

entre autres, l’importance du lien entre le projet professionnel, les critiques formulées à l’encontre de la formation dispensée par l’université et le travail des apparences. Oumaya Hidri, Catherine Louveau Doctorante et Professeure en STAPS (UPRES EA 1609), Unité de Recherches sur les cultures sportives, Université Paris-Sud XI, UFR STAPS, bât. 335, 91405 Orsay Cedex maya.hid@wanadoo.fr catherine.louveau@staps.u-psud.fr

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

ALONZO P. et SILVERA R., 2000, « Le genre masculin n’est pas neutre », Travail, genre et sociétés, n° 3, pp. 23-24. AMADIEU J.-F., 2002, Le Poids des apparences : Beauté, amour et gloire, Paris, Odile Jacob. BAUDELOT C. et ESTABLET R., 1992, Allez les filles !, Paris, Seuil. BESSY O., 1990, « De nouveaux espaces pour le corps. Approche sociologique des salles de “mise en forme” et de leur public. Le marché parisien », Thèse pour le doctorat de sciences humaines, Université de Paris-V, Paris. BIEMAR S. PHILIPPE M.-C. et ROMAINVILLE M., 2003, « L’injonction au projet : paradoxale et infondée ? Approche longitudinale du choix d’études supérieures », L’Orientation scolaire et professionnelle, n° 32, pp. 31-51. BIHR A. et PFEFFERKORN R., 1996, Hommes/Femmes : L’Introuvable Égalité, Paris, Ouvrières. BOLTANSKI L., 1971, « Les usages sociaux du corps », Annales : Économies, sociétés, civilisations, n° 1, pp. 217-233. BOURDIEU P., 1977a, « Remarques provisoires sur la perception sociale du corps », Actes de la recherche en Sciences sociales, n° 14, pp. 51-54. BOURDIEU P., 1979b, La Distinction : Éléments pour une critique sociale du jugement, Paris, Minuit. BOURDIEU P., 1980c, Le Sens pratique, Paris, Éditions de Minuit. BOURDIEU P., 1998d, La Domination masculine, Paris, Minuit. DAVISSE A. et LOUVEAU C., 1998, Sports, école, société, la différence des sexes, Paris, L’Harmattan. DE SINGLY F., 1994, Fortune et infortune de la femme mariée : Sociologie des effets de la vie conjugale (2 e édition), Paris, Presses universitaires de France. GALLAND O. et OBERTI M., 1996, Les Étudiants, Paris, La Découverte. IRLINGER P. LOUVEAU C. et MÉTOUDI M., 1990, « L’activité physique, une manière de soigner l’apparence ? », INSEE – Données sociales, pp. 269-272. LOUVEAU C., 1981a, « La forme, pas les formes !, Simulacres et équivoques dans les pratiques physiques féminines », in Pociello C., Sports et Société : Approche socioculturelle des pratiques, Paris, Vigot, pp. 303-318.

149

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

Bibliographie


Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

LOUVEAU C., 1992b, « Style de vie : Culte de la forme et de la silhouette », Sociologie santé, n° 7, pp. 24-37. LOUVEAU C., 1996c, « Masculin/féminin : L’ère des paradoxes », Cahiers internationaux de Sociologie, n° 100, pp. 13-31. MAISONNEUVE J. et BRUCHON-SCHWEITZER M., 1999, Le Corps et la beauté, Paris, Presses universitaires de France. MARUANI M. et REYNAUD E., 1993, Sociologie de l’emploi, Paris, La Découverte. MATHIEU N.-C., 1991, L’Anatomie politique, catégorisations et idéologies du sexe, Paris, Côté-femmes. MOLINARI J.-P., 1992, Les Étudiants, Paris, Ouvrières. NAHOUM -G RAPPE V., 1987, « Homme, femme, femme, femme, dans le petit Robert », Autrement Revue, n° 91. PAGES-DELON M., 1989, Le Corps et ses apparences : L’envers du look, Paris, L’Harmattan. POCIELLO C., 1982, « Le corps contre le sport ? », Esprit, n° 62, pp. 7-10. TRAVAILLOT Y., 1998, Sociologie des pratiques d’entretien du corps, Paris, Presses universitaires de France. VIGARELLO G., 1993, Le Sain et le malsain. Santé et bien-être depuis le Moyen Âge, Paris, Seuil VINOKUR A., 1995, « Réflexions sur l’économie du diplôme », Formation-Emploi, n° 52, pp.151-183.

Mots clés : Étudiants, projet professionnel, stratégies, capital, travail du corps. Working her Own Body : a Complement of Educational Capital on Labour Market? About Anticipative Strategies of Female Students. Summary : Number of surveys show students as they were confronted with the difficult search for career openings. On the contrary, female students who practice physical activities, to be in « good form », at the sporting department of the university of Valenciennes, have already defined their professional project. Indeed, they develop innovating strategies of training by trying, more or less consciously, to compensate structural inadequacy between the University system and requirements of the labour market. A survey, based on a questionnaire and proposed to 223 students, reveals some of them look for better chances of professional integration, by physical practices, aimed to increase a bodily capital. In a certain way, this latter seems to complete educational capital on the labour market. However, results show these anticipative strategies are widely dependent on social origin of the students and the nature of professional project, which was expressed.

150

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

Oumaya Hidri, Catherine Louveau


Travailler, 2005, 14 : 129-151

Keywords : Students, professional project, strategies, capital, work of body.

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

Resumen : Numerosas investigaciones presentan a las estudiantes confrontadas a la dificil búsqueda de una salida. Por el contrario, las estudiantes que practican actividades físicas en el servicio de deportes de la universidad de Valenciennes, consideradas como entrenamiento para ponerse a punto, ya han definido su proyecto profesional. De este modo, desarrollan innovadoras estrategias de formación tratando, más o menos concientemente, de mitigar la falta de adecuación estructural entre el sistema universitario y las exigencias del mercado de trabajo. Una encuesta hecha a través de un cuestionario entre 223 estudiantes, muestra que alguna de entre ellas buscan, dentro de sus practicas físicas que tienen el propósito de un crecimiento de un capital corporal, mejores oportunidades de inserción profesional. En cierta medida, esta búsqueda aparece como un complemento del capital escolar frente al mercado del trabajo. Los resultados de todos modos muestran que estas estrategias de anticipación en gran medida provienen del origen social de las estudiantes y de la naturaleza misma del proyecto profesional formulado. Palabras clave : Las estudiantes, proyecto profesional, estrate, gias, capital, erabajo del cuerpo.

151

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 109.190.111.104 - 18/03/2015 11h04. © Martin Média

Trabajar el cuerpo : complemento del capital escolar frente al mercado de trabajo ? Estrategias anticipativas de estudiantes.


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.