Réflexion sur un Service Public Pénitentiaire Moderne et Rénové.

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UFAP-UNSa Justice Réflexion sur un Service Public Pénitentiaire Moderne et Rénové. Réflexion réactualisée 2015

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PreFACE

Le milieu carcéral a toujours intéressé de très nombreuses personnalités, mais à aucun moment n’a eu lieu un grand débat national sur le dossier pénitentiaire. Cela est bien entendu regrettable car à partir du moment où l’on refuse de traiter un tel sujet devant l’opinion publique, on laisse la possibilité à certains de dire et d’écrire n’importe quoi sans apporter les preuves de ce qu’ils avancent. L’Administration Pénitentiaire n’a jamais su obtenir des gouvernements successifs les moyens de mener une politique carcérale cohérente. Il ne faut jamais perdre de vue que les établissements pénitentiaires ont des régimes différents selon la catégorie des détenus, prévenus ou condamnés. L’Administration, pour éviter le pire, a accédé aux exigences des détenus meneurs et multirécidivistes et a donc délibérément privilégié à outrance le régime des établissements pour peines. Par ailleurs, l’amélioration des conditions de détention des détenus primaires en maison d’arrêt a été volontairement négligée. Les relations quotidiennes des personnels de surveillance avec la population pénale ne peuvent que souffrir de cette incohérence car, dès le début de l’incarcération; aucun travail de fond ne peut être effectué correctement et durablement pour sauvegarder les liens familiaux et les chances de réinsertion des personnes incarcérées pour la première fois de leur vie, surtout en ce qui concerne les auteurs de petits ou moyens délits. Toutes les difficultés, les malentendus, les heurts, les rackets de toute nature, commencent lorsque l’ «arrivant» se trouve obligé de partager une cellule avec deux, trois, quatre codétenus, ou plus. Rien n’est fait pour éviter de mélanger ces personnes aux « statuts différents », primaires, récidivistes ou condamnés à de courtes peines, en procédures criminelles ou correctionnelles. De plus, quelle que soit la procédure pénale d’un individu ou ses antécédents, il côtoiera des détenus très dangereux. Dangereux surtout pour l’équilibre et l’avenir de celle ou de celui qui est en situation de faiblesse ou qui traverse une période très difficile de sa vie. Les troubles graves dans les prisons françaises sont toujours organisés par ces individus dangereux qui n’ont pas leur place dans des établissements aux régimes traditionnels. Dans la mesure où une tension extrême est entretenue par un noyau d’individus appelant les autres à se mutiner pour changer le système ou plutôt pour supprimer les établissements pénitentiaires, en leur demandant même de tuer des «surveillants» pour en finir avec la prison, aucune issue favorable ne peut être trouvée pour améliorer les conditions de détention des· plus démunis ou de ceux qui souhaiteraient s’en sortir. C’est pourquoi, les personnels pénitentiaires dans une grande majorité sont favorables à ce que des structures et établissements spécialisés soient créés pour regrouper ces individus dangereux et nuisibles pour la quasi-totalité de la population pénale. Bien évidemment, il est hors de question pour l’UFAP-UNSa Justice d’exiger la réouverture des Quartiers de Haute Sécurité ou des Quartiers de Sécurité Renforcée, par contre il faut revendiquer pour la Pénitentiaire des moyens pour mettre en place ces structures ou établissements spécialisés où les détenus

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bénéficieraient des mêmes avantages que dans les autres prisons (activités, sport, loisirs ...), à la différence près que la sécurité et la discipline et la prise en charge y seraient omniprésentes. Quand les moyens seront donnés pour améliorer considérablement les structures pénitentiaires et au-delà favoriser au maximum la réinsertion, dès le tout début de l’incarcération, par des mesures novatrices et courageuses pour un certain nombre de cas à déterminer, les relations, à l’intérieur de toutes les prisons françaises, entre les personnels et les détenus, s’amélioreront. A l’évidence, la tension diminuerait considérablement et les conditions de travail des personnels seraient moins difficiles à supporter qu’actuellement. Le laxisme pénitentiaire ambiant depuis plusieurs décennies a permis malheureusement à une minorité de faire régner la terreur dans les prisons et de s’imposer au détriment de personnes qui seront récupérables si on leur donne réellement les possibilités de s’en sortir. Les conditions dans lesquelles les personnels de surveillance évoluent aujourd’hui ne leur permettent pas de mener à bien leur mission essentielle d’utilité publique car le système actuel est pervers, avec des carcans parfois insurmontables et incompréhensibles pour des femmes et des hommes de bonne volonté que sont les fonctionnaires pénitentiaires, sensibles aux problèmes de société mais qui ne sont pas écoutés de la haute hiérarchie pénitentiaire et encore moins de la classe politique quelle qu’elle soit. Tout ce qui est fait pour moderniser l’Institution Pénitentiaire n’est que de la poudre aux yeux car les véritables moyens dont elle a besoin, en matériel et en personnel, ne lui sont pas accordés par les Pouvoirs Publics. La prison ce n’est pas une usine, c’est un lieu où des femmes et des hommes sont momentanément gardés par d’autres femmes et hommes, mais cet élément humain est volontairement oublié par ceux qui ont en charge notre pays et les technocrates qui les entourent. Pour tous ces philosophes, la prison est un monde où deux «communautés» doivent cohabiter, coûte que coûte, avec les moyens du bord, le reste leur semble superflu, sauf lorsque les prisons bougent d’un côté ou de l’autre. Mais un jour, il risque d’être trop tard si l’Administration Pénitentiaire ne sait se faire entendre et obtenir les moyens nécessaires pour un Service Public Pénitentiaire sûr, moderne, efficace. Une Institution indispensable pour une meilleure sécurité de tous nos concitoyens !

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Structures ou Etablissements Spécialisés L’actualité récente dans l’Administration Pénitentiaire a démontré qu’il existe un réel problème de sécurité dans les prisons : Insécurité pour les personnels qui sont à la merci des pulsions meurtrières de détenus psychopathes ou du feu des armes des «caïds» de la pègre prêts à tout pour retrouver la liberté et de se livrer à de nouvelles exactions ; insécurité pour l’institution elle- même quand elle n’a plus suffisamment de pouvoirs coercitifs pour éviter la fuite de ceux contre lesquels elle est censée protéger, au moins · temporairement, la société. Depuis plusieurs années, les personnels sont également confrontés à la radicalisation et le prosélytisme religieux.

Cette insécurité découle de trois causes cumulatives : L’insuffisance des moyens humains, matériels et structurels pour assurer la protection des personnels et éviter les évasions. Beaucoup d’établissements du type maison d’arrêt sont vétustes et offrent peu de garanties sécuritaires : absence ou insuffisance de miradors, très petit nombre d’agents et absence de gradés surtout en service de nuit, systèmes de sécurité inexistants, inefficaces ou défectueux, éloignement de forces de l’ordre en nombre suffisant.

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Le manque de moyens financiers n’a jamais permis de doter tous les établissements d’équipements de sécurité d’envergure ; même les plus récents, du programme 13000 entre autres, ne sont pas performants à ce niveau.

Le coût budgétaire est considérable et une volonté politique très forte de garantir la sécurité des établissements, des personnels et des citoyens, doit se dégager pour permettre la réalisation, échelonnée dans le temps, des travaux indispensables.

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La présence en détention normale de détenus particulièrement dangereux, à l’origine des multiples incidents et surtout des flambées de violence qui se produisent épisodiquement. Bien sûr, la notion de dangerosité n’est pas uniforme. Ce terme recouvre divers profils de détenus que l’on peut tenter de classer ainsi, en schématisant le trait : Le psychopathe, violent par nature.

Le détenu présentant, même par intermittence, des troubles mentaux ou du comportement, plus ou moins graves et qui est susceptible de s’en prendre aux agents, à ses codétenus ou à lui-même.

Le truand qui encourt ou est déjà condamné à une ou plusieurs lourdes peines et qui ne pense qu’à sortir, coûte que coûte, pour reprendre ses activités ; il bénéficie d’assistance extérieure et de moyens logistiques importants et sophistiqués (hélicoptères, explosifs, armes, etc., ...).

L’activiste dont le but final est la destruction de l’institution, qui appartient parfois à organisation terroriste, et qui joue: le rôle d’agitateur auprès de la population pénale en fomentant des mouvements collectifs et même des mutineries, tout en restant à l’écart des évènements et en gardant une attitude mesurée en détention.

La libre création d’associations qui ont pour but avoué de déstabiliser l’institution Judiciaire et Pénitentiaire, la libre circulation de leurs publications, fortifient l’ascendant de ces individus et propagent leurs «idéaux» à l’ensemble de la population pénale.

Les «médiatisés», dont une certaine presse a fait des «ennemis publics n° 1, mais dont la personnalité est faible, qui multiplient les incidents spectaculaires pour rester à la hauteur de leur réputation, mais qui supportent mal les règles du « jeu » de la prison et y réagissent par crises.

Les « hommes de main », appointés par les caïds pour faire leur sale boulot et régler leurs comptes, y compris contre le personnel.

Les délinquants de petite envergure qui subissent très difficilement leur incarcération et leurs rapports avec la Justice : ils se considèrent comme innocents, souffrent des lenteurs de l’instruction, se plaignent de leur avocat, ne comprennent pas le système; contre tout cela, qui se double parfois de problèmes familiaux (abandon), ils développent une violence réactionnelle. Cette population pénale est aussi enclin à se faire «endoctriner» par un prosélytisme extrêmement puissant et difficile à déceler.

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A ces différents types de dangerosité doivent répondre des solutions spécifiques adaptées. Ceci est d’autant plus capital que la grande majorité des détenus acceptent, tant bien que mal, l’emprisonnement et se comportent correctement ; mais leur incarcération leur devient très vite invivable car ils se trouvent confrontés à tout le «bouillon de culture» décrit ci-dessus. C’est à leur protection à eux-aussi que nous avons le devoir de penser. D’autant plus que les détenus ont aujourd’hui des possibilités accrues de se déplacer et de s’exprimer, ce qui renforce la facilité d’expression des «fortes têtes», auxquels une certaine hiérarchie pénitentiaire, plus soucieuse de faire carrière que de maintenir la discipline en détention, n’offre plus guère de résistance, au détriment d’une grande majorité. Par le passé, la réponse était essentiellement répressive : Quartiers de Haute Sécurité, de Sécurité Renforcée, de Plus Grande Sécurité, où on mettait «hors-jeu» les détenus qui posaient problème de par leur personnalité, leurs antécédents ou leur comportement. Malheureusement, cette solution n’a pas eu à long terme l’efficacité escomptée ; couper des individus de tous liens avec leurs co- détenus et les laisser sans occupation n’a fait que renforcer leur hargne contre la prison et ceux qui la faisaient fonctionner ; un système froid et sans vrais rapports humains ne pouvait à l’évidence prétendre améliorer le comportement d’hommes en rupture avec la société. En effet, comment pouvait-on espérer qu’un individu qui rejetait déjà violemment les règles de la société, les règles et contraintes de la discipline carcérale et de l’enferment, aurait pu admettre sans révolte la punition et la privation supplémentaire de libertés consécutive à son placement en Quartier de Haute Sécurité ? Le système ne pouvait qu’inéluctablement fabriquer les «bêtes féroces» qui alimentaient son existence.

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Cependant, leur suppression pure et simple, sans solution de remplacement, n’a pas contribué à pacifier le climat dans les établissements ; bien au contraire, les «fauves» ont été placés .parmi la population pénale au risque d’y faire des émules.

Aujourd’hui, les maisons d’arrêt sont le réceptacle d’un mélange détonnant de toutes les catégories de détenus où les plus· forts

“ Contaminent “ et briment parfois les plus faibles.

On y trouve des prévenus pour des délits ou crimes de nature et gravité diverses, des condamnés à de courtes peines, des condamnés à de longues peines qui sont en appel ou en pourvoi et enfin des condamnés définitifs à de longues peines que l’on «balade» dans les maisons d’arrêt les plus sécuritaires de toute la France en raison même de leur dangerosité ; en résumé, si le «voleur de poules» côtoie le truand chevronné, lequel a le plus de chances de déteindre sur l’autre?...

D’autant plus qu’il est très fréquent que, pour se donner une importance et se faire admettre auprès de détenus plus expérimentés, les petits délinquants s’attribuent des forfaits plus graves que ceux réellement commis ; cette forfanterie et les mauvaises fréquentations nouées en prison ne peuvent que constituer un entraînement et une incitation pour de futurs passages à l’acte. Rien n’y est fait pour garantir des chances sérieuses de réinsertion à ceux qui sont encore «récupérables» (jeunes, primaires, petits délinquants, condamnés à de très courtes peines.) En revanche, ceux qui sont bien engagés et ont choisi sciemment la voie de la délinquance ne risquent guère d’être détournés de leur vocation. De plus, la surpopulation carcérale chronique ne permet pas de séparer des détenus qui ne devraient pas avoir de contacts entre eux. C’est une gêne supplémentaire pour une gestion saine de la population pénale. Dans la période actuelle, les technocrates de la Chancellerie, les dirigeants de l’Administration Pénitentiaire ont axé leurs réflexions sur l’amélioration et l’aménagement de l’exécution des peines, les plus longues retenant le plus leur attention. En revanche, les conditions d’incarcération des prévenus et des courtes peines demeurent catastrophiques. Personne ne s’en soucie, ne s’y intéresse ... Des vies sont ainsi brisées car un passage en prison, même bref, ne peut guère favoriser l’épanouissement de l’individu ...

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ll serait plus profitable pour la société de multiplier les travaux d’intérêt général, les jours amende, les fractionnements de peine, la semi-liberté, le placement sous surveillance électronique et/ou développer la contrainte pénale ; cela permettrait le maintien des liens familiaux et la conservation du travail extérieur, les parties civiles auraient de meilleures garanties d’être indemnisées et ceci préserverait l’individu des effets criminogènes de la prison. La réinsertion ne serait plus un objectif lointain mais un fait réel, du moins tout serait mis en œuvre pour cela. La sanction pénale, au lieu de compromettre toute possibilité de s’en sortir, en donnerait au contraire une chance supplémentaire. Elle trouverait là son meilleur rôle social. A ce propos, il est nécessaire de mettre en lumière les carences constatées dans le rôle des juges d’application des peines. La plupart d’entre eux se bornent à venir assister aux commissions d’application des peines. Ils ne connaissent les détenus qu’au travers de leurs dossiers pénaux. Ils devraient s’investir beaucoup plus dans la connaissance de la vie carcérale des condamnés dont ils ont la charge et plus largement s’intéresser au fonctionnement de l’établissement pénitentiaire. Il serait souhaitable qu’ils reçoivent obligatoirement en audience les détenus qui le demandent, qu’ils s’entretiennent avec les membres du personnel, notamment de surveillance, qui auraient beaucoup à leur apprendre sur le comportement des personnes incarcérées. L’UFAP-UNSa Justice dans sa réflexion des métiers, revendique une plus forte présence de personnel de surveillance dans les Commissions Pluridisciplinaires Uniques et les Commissions d’Application des Peines. Cela permettrait d’avoir une réelle objectivité, étant donné que le surveillant est l’interlocuteur direct de la population pénale. Ses observations devraient être déterminantes quant aux avis donnés sur les réductions de peines, etc.

Mieux au fait des réalités du terrain, ils prendraient sans doute des décisions plus efficaces, à la fois dans l’intérêt de la société et dans celui de la personne concernée. Il est évident que tout ne peut se résoudre ainsi et il serait utopique de croire que l’incarcération peut toujours être évitée. Cependant, quand elle est nécessaire, il faudrait qu’elle s’effectue dans les meilleures conditions possibles, en tenant compte des aspects humains inhérents à chacun

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IL FAUDRAIT SEPARER DE MANIERE TRES ETANCHE :

les primaires et les récidivistes,

les affaires correctionnelles et criminelles,

les jeunes et les vieux «chevaux de retour»,

les auteurs de délits de natures différentes (vols, mœurs, crimes de sang, terrorismes etc.).

Par-dessus tout, les détenus représentant une dangerosité quelconque, que l’on pourrait qualifier de «détenus sensibles», devraient être totalement mis à l’écart du reste de la population pénale. Des établissements ou structures spécialisées, répondraient à notre sens · à cette exigence ; nous expliquerons plus loin les aménagements adaptés que nous souhaiterions y voir mettre en place. L’intérêt principal de ces structures serait d’éviter de manière absolue le contact entre ces «détenus sensibles» et le reste de la population pénale. Toute autre solution serait insatisfaisante car elle n’empêcherait pas, à plus ou moins long terme, la gangrène de la communauté carcérale par les «noyaux durs». Pour les prévenus, des commissions devraient être mises en place au niveau de chaque établissement pour étudier les cas des détenus posant problème et proposer leur affectation dans un établissement ou structure spécialisée dans la mesure où leur personnalité et leur comportement seraient considérés comme nécessitant une exclusion de la détention normale. Les personnels de surveillance, gradés ou non, qui sont au contact premier et permanent des détenus, auraient un rôle prépondérant à jouer tant au niveau de leurs observations que de leurs avis.

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Les décisions d’affectation pourraient relever de la compétence du Directeur Interrégional. Une procédure identique serait envisageable pour le retour en détention classique. Dans chaque direction interrégionale, une ou plusieurs structures spécialisées de capacité réduite (une centaine de places maximum) seraient créées, pour couvrir les différentes zones géographiques afin de permettre d’assurer la continuité des liens familiaux. Dans ces petites unités, les détenus auraient la possibilité de pratiquer des sports, des activités diverses, de travailler ou de suivre des cours, comme dans n’importe quel établissement, sous le contrôle permanent des Personnels de surveillance. Leurs cellules, obligatoirement individuelles, seraient équipées selon les normes carcérales en vigueur actuellement. Bien entendu, ils seraient soumis au régime disciplinaire de droit commun; la règlementation concernant les parloirs, les correspondances, leur serait applicable.

En résumé, ils ne seraient privés d’aucun des droits auxquels peuvent prétendre les personnes incarcérées. Par contre, la sécurité serait renforcée grâce à un encadrement beaucoup plus important en personnel, pour accompagner les mouvements, faire les fouilles de cellules, surveiller les promenades, les activités, les ateliers, etc. ... Aucun surveillant ne serait jamais isolé, ni hors de vue de ses collègues. L’enceinte devrait être également plus fiable avec notamment des miradors en nombre suffisant pour assurer la surveillance intérieure (vue sur toutes les façades), périmétrique et périphérique, les agents disposeraient de jumelles, moyens de liaison (radio, téléphone), armement ; il faudrait en outre des véhicules d’intervention effectuant des rondes fréquentes, y compris aux abords extérieurs en cas de besoin afin d’éviter les attaques par commandos extérieurs ; des systèmes d’alarme et de détection performants et régulièrement» entretenus devraient également être installés notamment dans les zones de passage des détenus, ainsi que des caméras de surveillance. Toutes les zones extérieures aux bâtiments où les détenus auraient accès à l’air libre devraient être couvertes de filins croisés en acier. Une présence permanente des forces de l’ordre devrait être assurée aux abords de l’établissement pour intervenir rapidement en cas d’incident grave.

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Dans le même but, il serait également utile qu’une partie des fonctionnaires soit logée à proximité du site, sans que cela constitue une obligation pour eux. Les escortes devaient impérativement être renforcées en nombre d’agents, accompagnées par les forces de l’ordre, lorsqu’il s’agit de détenus déclarés sensibles ou dangereux. La notion de Maison d’arrêt ou établissement pour peine devrait être entièrement revu. Pour l’UFAP-UNSa Justice, les détenus doivent être évalués et affecté en fonction de son « profil ». Le clivage maison d’arrêt et centre pour peine ne correspond plus à notre système carcéral et n’offre plus de souplesse. C’est d’ailleurs un handicap, car il peut y avoir des détenus condamnés à de lourdes peines et ne pas présenter de dangerosité par exemple. Car, si la durée de la peine n’est pas obligatoirement un critère déterminant de la dangerosité, force est de constater aussi qu’avec une lourde condamnation, l’arrivée en maison centrale ou la fréquentation d’une population pénale très dure, peuvent influencer négativement le comportement en détention d’individus qui ne s’étaient pas spécialement fait remarquer auparavant.

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Il ne faut pas, non plus, négliger les problèmes de gestion posés par les détenus atteints d’affections physiques ou de troubles mentaux. En aucun cas ces derniers ne devraient demeurer en détention normale, ni même en S. M. P. R., dès lors qu’ils présentent des risques importants d’agressivité ou de violence, la détermination de ceux-ci restant de la responsabilité des psychiatres. Afin de réduire au maximum les consultations médicales, qui donnent parfois lieu à des incidents graves, il est indispensable que chaque établissement, y compris les spécialisés, dispose d’une Unité Sanitaire pour soigner et héberger les détenus dans les cas bénins ; de même, il faudrait pouvoir isoler ceux qui seraient atteints, au moins provisoirement, d’une maladie contagieuse, afin de ne pas la propager auprès de leurs codétenus ou du Personnel, cela de jour comme de nuit pour les structures importantes et pour les autres, s’orienter de nouveau vers les médecins de garde chargé d’intervenir de jour comme de nuit. De plus, l’effet de périodes de sûreté importantes et la multiplication des peines incompressibles de trente ans posent des problèmes nouveaux en termes de gestion d’individus qu’il ne s’agit plus, dans un premier temps, de réinsérer, mais bien de maintenir en prison, sans aucune perspective de sortie, pendant très longtemps, quitte à tenter ensuite de les réinsérer le moment venu, si tant est que cette perspective puisse être seulement envisagée. Ce type de détenu, qui ne dispose d’aucun espoir à échéance humaine et n’a donc rien à perdre, présente une dangerosité intrinsèque car sa situation risque fort de le porter à développer une agressivité démesurée contre tout ce qui l’entoure et par conséquent à se livrer à des actes inconsidérés agressions sanglantes, prises d’otages, tentatives d’évasion désespérées. C’est pourquoi, des établissements spécialisés pour ce type de détenus sont également indispensables, avec sans doute des adaptations supplémentaires pour faire face à une dangerosité encore plus grande. A ce propos, il est nécessaire de revenir sur la procédure d’affectation des condamnés, qui actuellement ne donne pas lieu à une étude suffisamment approfondie de la personnalité des détenus, pour que l’établissement leur convenant le mieux soit déterminé. Les Centres Nationaux d’Evaluations de FRESNES, REAU et SEQUEDIN, ne sont pas efficients. Pour des cas déterminés qui pourraient être limités aux peines perpétuelles et supérieures à 20 ans frappées d’incompressibilité, il faudrait créer des centres régionaux d’orientation (C.R.O.) qui permettraient de traiter un plus grand nombre de condamnés. Cela réduirait ainsi leur délai d’attente dans une structure inadaptée. Ces C. R. O. devraient être dotés d’un réel pouvoir dans la détermination de l’affectation ou la réaffectation des détenus, même si la décision formelle continuait à incomber à l’Administration Centrale pour les plus longues peines.

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Ils devraient disposer d’un nombre important de psychologues, psychiatres, personnes-socio-éducatifs, médicaux et ·paramédicaux et évidemment de surveillance afin que l’observation faite soit la plus exhaustive possible et touche un maximum d’aspects de la personnalité, chacune des catégories citées émettrait un avis qui serait pris en considération. Ces structures seraient entre autres appelées à cibler les condamnés dangereux et à déterminer le type d’établissement spécialisé leur convenant le mieux. Cette étude a pour but principal de définir les causes de la violence dans les établissements et de proposer des solutions pour y remédier. Il est certain que les agressions, les évasions, les prises d’otages, ne sont malheureusement pas des faits nouveaux ; cependant les professionnels ont pu constater ces dernières années une évolution dans leurs formes, qui peut s’analyser comme une aggravation des tensions, voire même l’instauration d’un climat latent de violence. Parallèlement aux évolutions constatées dans la société, la vie carcérale a connu des changements significatifs, en même temps que la mentalité des détenus s’est modifiée. La plupart d’entre eux a acquis une certaine assurance. Ils n’hésitent plus à exprimer des revendications parfois très excessives, ni à manifester de manière agressive leur mécontentement, allant jusqu’à détruire tout ce qui leur tombe sous la main, y compris ce qui est fait pour améliorer leurs conditions de détention. Devant ce recul constant des limites de la contestation et des règles de la discipline carcérale, les personnels pénitentiaires perdent leurs repères traditionnels et sont de plus en plus inquiets de leur devenir personnel et professionnel. Ils ont l’impression que l’on a changé la nature de leurs missions, les conditions d’exercice de leur travail quotidien, sans le leur avoir expressément dit, expliqué, enseigné. Ils se sentent constamment en porte-à-faux par rapport à une partie de leur hiérarchie et à certaines catégories de personnels ou d’intervenants extérieurs, dont l’action leur paraît aller à l’encontre des règles élémentaires de sécurité et de discipline qu’on leur a enseignées à l’E.N.A.P. (exemple : un détenu commet une infraction caractérisée, le surveillant rédige un rapport d’incident, le gradé met en prévention au quartier disciplinaire mais le détenu est récalcitrant, la direction intervient et «Gracie» le fautif pour maintenir le calme en détention).A ce sujet, la LOI Pénitentiaire permet à un médecin de sursoir à la prévention du quartier disciplinaire. Le personnel est de fait impuissant a intervenir. Ils n’ont aucune formation spécifique qui les prépare à réagir dans le bon sens en cas d’agression ou de prises d’otages. Ce qu’on leur enseigne est très décalé par rapport à la réalité et ne leur sert donc pas au quotidien. Les personnels de surveillance notamment sont en plein désarroi car ils se sentent totalement dépossédés des parcelles d’autorité qui leur étaient concédées sur la population pénale, en même temps qu’ils ont l’impression de servir de punching-ball, si ce n’est de cible, sur lesquels les détenus déchargent leur agressivité. Les Pouvoirs Publics peuvent craindre qu’ils ne· supportent plus très longtemps cette condition et que l’institution toute entière implose. En effet, celle-ci vit une crise profonde car il apparait de plus en plus à l’opinion publique qu’elle faillit à remplir sa mission chaque fois qu’un surveillant est frappé grièvement dans sa chair et même assassiné, à chaque mutinerie, à chaque évasion. Les citoyens risquent d’avoir de moins en moins confiance en la prison pour garantir leur propre sécurité et celle de leurs biens. C’est pourquoi l’UFAP-UNSa Justice www.ufap.fr

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préconise que le dossier pénitentiaire soit mis à plat et que l’on étudie tout, du début à la fin de l’incarcération, afin de chercher des mesures novatrices pour réformer la prison. Il faut définir les besoins à tous les niveaux, chiffrer les moyens nécessaires pour les satisfaire et mettre en place effectivement ce qui sera décidé. Les structures et établissements spécialisés dont nous proposons la création trouvent, à notre sens, parfaitement leur place dans cette réflexion. Nous avons volontairement axé cette étude sur ceux qui seraient destinés à des détenus dangereux mais nous ne sommes pas opposés, bien au contraire, à la mise en place d’établissements à régime plus souple pour ceux qui, à contrario, ne présentent aucun problème de ce type et ont besoin d’un projet d’exécution de peine spécifique.

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POST-FACE

Cette brochure, réalisée pour répondre au véritable problème de fond d’une institution, l’Administration Pénitentiaire, a été éditée après des jours, des mois de réflexion par de véritables professionnels, de débats au sein de groupes de travail mis en place par l’UFAP-UNSa Justice, rassemblant des fonctionnaires expérimentés vivant tous les jours au cœur de la détention. Elle n’a pas la prétention de détenir la science infuse. Elle a par contre le mérite d’exposer clairement les difficultés, le malaise du monde clos des prisons où personne parmi l’opinion publique, les Politiques, les médias ne sait réellement ce qui se passe, pour ne pas le vivre quotidiennement. Elle a aussi le mérite de faire un constat, un état des lieux du fonctionnement actuel, dans l’esprit des missions essentielles de l’Administration Pénitentiaire «garde et réinsertion». La GARDE DES DETENUS : elle doit se faire dans le plus grand respect des hommes et des femmes qui nous sont confiés, au nom du peuple français, pour des durées plus ou moins longues. Ecartés de notre société contre leur gré, nous devons, c’est notre mission, les détenir dignement. Nous sommes responsables aussi de leur sécurité, d’un certain ordre, d’un minimum de discipline, comme un instituteur dans sa· classe ou un directeur de collège dans son établissement. D’où la nécessité de ne pas mélanger, pour simplifier, le voleur de poule avec le terroriste prêt à tout. Mais nous remplissons en plus une mission régalienne de l’Etat qui nous charge d’assurer la sécurité publique de nos concitoyens. Dans notre pays des Droits de l’Homme et du Citoyen, depuis des décennies et le temps du bagne fort heureusement révolu, l’humanisation des prisons est intervenue. Elle était nécessaire. Au même titre que la société évolue rapidement, «intra- muros» le microcosme qu’est Ia prison doit changer. Cette obligation d’adaptation permanente en matière de loi a-t-elle été accompagnée d’une réflexion sur les conséquences qui en découleraient inéluctablement ? La REINSERTION DES DETENUS : cela devrait être l’objectif en finalité, à partir www.ufap.fr

du moment où l’incarcération d’un individu ne peut plus être évitée. La société toute entière doit s’interroger et donner une chance de s’en sortir à celui ou celle qui a fauté, d’autant plus lorsqu’il lui «paie sa dette». Hélas, pour la réinsertion ou même l’insertion dans la société, il faut aussi des moyens, encore de l’argent, des fonctionnaires, notamment d’insertion et de probation, des structures, etc. Les moyens, les chances offertes, de réinsertion ou même d’insertion, sontils donnés égalitairement selon qu’un citoyen lambda, réceptif et volontaire, se trouve prévenu ou condamné dans une maison d’arrêt ou condamné dans une maison centrale ou un centre de détention ? Pour la possibilité réelle d’accomplissement de ces deux missions, nous affirmons catégoriquement, et l’actualité et les évènements le démontrent depuis des décennies : Non, les véritables professionnels pénitentiaires, en plus de subir des violences de toutes sortes, d’effectuer leur travail dans des conditions indignes, n’ont plus la possibilité d’assurer la mission qui leur est confiée ! C’est extrêmement grave pour la sécurité publique et c’est aussi la seule et unique raison de la publication de ce document. Nous souhaitons vivement qu’il interpelle, mais pour des raisons évidentes, nous ne maîtriserons sûrement pas les critiques violentes et les récupérations de toutes sortes. Dommage, mais tant pis si c’est le cas. De façon honnête et courageuse, nous aurons eu le mérite de faire des propositions réalistes face à une situation réelle insoutenable et ce dans un souci scrupuleux d’autonomie et d’indépendance totale. C’est notre seul objectif, que partage d’ailleurs une part non négligeable et sans cesse croissante de personnels pénitentiaires. Ce n’est en aucun cas une idéologie partisane; mais une réflexion de fond pour transformer !’Administration Pénitentiaire en un service public pénitentiaire et le rendre plus sûr, plus moderne, plus efficace.

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