Les Nouveaux Eldorados Urbains "A la conquête des espaces alternatifs"

Page 1

VALENTIN POIRSON

LES NOUVEAUX ELDORADOS URBAINS À la conquête des espaces alternatifs

Master «Architecture entre usages et paysages urbains»





LES NOUVEAUX ELDORADOS URBAINS À la conquête des espaces alternatifs Directeur de mémoire : Dimitri MESSU 2015 E.N.S.A.G.



SOMMAIRE

INTRODUCTION I STRATÉGIE EN FRICHE 1.1 Où se regrouper ? 1.2 Faire corps. 1.3 Changer l’urbain. 1.4 Une attitude pérenne ou éphémère ?

9

2 RÉVOLUTION TACTIQUE

SOMMAIRE

2.1 La situation nomade. 2.2 Comment se regrouper sans lieu fixe ? 2.3 L’intervention. 2.4 Une communication stratégique. 3 REGROUPEMENTS STRATÉGICO-TACTIQUE 3.1 Acupuncture urbaine. 3.2 Une volonté commune. 3.3 Quel avenir pour ces quartiers ? CONCLUSION BIBLIOGRAPHIE


10


INTRODUCTION

Ce mémoire se concentre, à travers les espaces délaissés et leurs interventions, à rechercher quelle place et quel impact peuvent insuffler l’alternatif dans le renouvellement urbain. Plus précisément, la recherche mène sur la place de l’usager dans un tel processus. L’usager est-il seulement le spectateur d’une conception urbaine qui se ferait sans lui, à son insu ? Ou peut-il, doit-il intervenir pour reconquérir son environnement ? Dans ces travaux Michel de Certeau1 s’intéresse aux détournements des usagers face aux objets du quotidien, à l’environnement qui les entourent et qui est souvent conçu sans eux. Ainsi, Michel de Certeau nous invite à déplacer le regard, à le renverser ou à le détourner. Par un travail interstitiel, par des chemins de traverse il nous invite à repenser notre environnement, à renouer avec ces hypothèses en devenir, les délaissés, disqualifiés par l’économie de notre société. Pour analyser les trajectoires des usagers dans l’environnement urbain, il a recours à une distinction entre stratégies et tactiques. « J’appelle ‘‘stratégie’’ le calcul des rapports de forces qui devinent possibles à partir du moment où un sujet de vouloir et 1

Michel de Certau, L’invention du quotidien, Arts de faire.

11 INTRODUCTION

Les années 70 à 80 ont été porteuses de nombreuses utopies. Des communautés alternatives voient le jour, des collectifs se montent, c’est le début de l’investissement des friches industrielles. Jusqu’aux années 90 les friches culturelles seront le point névralgique du renouveau de l’art et de sa diffusion. Ces « nouveaux territoires de l’art » vont transformer la ville qui les entourent. Grâce à ces squats artistiques c’est d’abord quelques immeubles, puis un quartier et enfin tout un morceau de ville qui est revalorisé. Aujourd’hui elles ont totalement changé le regard de tous les «délaissés» urbains. Aussi bien que les collectivités, mais aussi les investisseurs se sont emparés de la ressource. Devenues une part des «plus valus» de la ville contemporaine, les friches culturelles n’ont plus rien de leur coté alternatif et utopique. Cependant certains collectifs ont subsisté et d’autres se sont montés. Cette nouvelle vague de la culture alternative se veut nomade, intervenant ainsi dans les interstices éparses de la ville contemporaine. Ces collectifs prônent une nouvelle manière de faire, basée sur le temps, les occupations étant éphémères elles collent de plus près au caractère vivant du milieu urbain. Il ne s’agit plus tant de changer la ville que d’interagir avec ses occupants et ainsi faire changer les mentalités sur le potentiel des espaces en friche. Ainsi, ce sont les habitants qui ont pu prendre le relais, à travers des quartiers de contre-culture emblématiques, ils se positionnent sur l’espace public et politique et proposent une nouvelle façon d’habiter et de façonner la ville.


de pouvoir est isolable d’un ‘‘environnement’’. Elle postule un lieu susceptible d’être circonscrit comme un propre et donc de servir de base à une gestion des ses relations avec une extériorité distincte. La rationalité politique, économique ou scientifique s’est construite sur ce modèle stratégique. J’appelle au contraire ‘‘tactique’’ un calcul qui ne peut pas compter sur un propre, ni donc sur une frontière qui distingue l’autre comme une totalité visible. La tactique n’a pour lieu que celui de l’autre. Elle si insinue, fragmentairement, sans le saisir en son entier, sans pouvoir le tenir à distance. Elle ne dispose pas de base où capitaliser ses avantages, préparer ses expansions et assurer une indépendance par rapport aux circonstances. Le ‘‘propre’’ est une victoire du lieu sur le temps. Au contraire, du fait de son non lieu, la tactique dépend du temps, vigilante à y ‘‘saisir au vol’’ des possibilité de profit. Ce qu’elle gagne, elle ne le garde pas. »2

12

Dans le renouvellement urbain, la stratégie est l’arme des institutions qui s’intéressent aux lieux sur lesquels elles ont emprise, alors que la tactique est l’arme de l’usager anonyme qui, faute de posséder le lieu, s’en empare en temps donné. À travers ce mémoire nous tenterons d’analyser entre stratégie et tactique quelle place peut occuper l’usager alternatif dans le renouvellement urbain. Dans un premier temps nous aborderons les squats des friches dans les années 70 à 80 et leur répercutions en termes stratégiques sur le territoire urbain. Ce sera l’occasion pour définir le sens donné au terme de «délaissé», d’interstices et de friche. Nous analyserons quelle place l’usager occupe dans cette stratégie de conquête et qui sont les usagers qui la compose. Dans un second temps nous nous intéresserons aux tactiques utilisées par les collectifs pluridisciplinaires pour requalifier les délaissés physiques et cognitifs. Nous nous attarderons sur la notion d’éphémère et de son importance dans le renouvellement urbain. La troisième partie est plus prospective, nous partirons en randonnée dans les quartiers de contre-culture pour nous frotter aux détournement tactiques et stratégiques quotidiens des usagers anonymes. La question de l’après nous permettra de conclure et de répondre aux hypothèses soulevées au court de ce mémoire. À travers ce mémoire je me suis construis une vision des espaces alternatifs, via une lecture de différents ouvrages, une écoute de quelques conférences audio, la lecture de document vidéo, ainsi qu’à travers une interview d’un membre de collectif.

2

Michel de Certau, L’invention du quotidien, Arts de faire, p 46


13

INTRODUCTION



1. STRATÉGIE EN FRICHE

« Les friches culturelles sont un acte de reconquête du territoire » - Françoise Lucchini -


1.1 OÙ SE REGROUPER ?

16

La ville est un milieu vivant définit par ces différentes synergies : rapidité, multiplicité des usages, technicité, fonctionnalité. Elle est à la fois un territoire de développement, mais aussi de déclin. Ces espaces sont multiples et pourtant uni fonctionnels. Nous appartenons tous à un flux commun et pourtant nous sommes partitionné. Dans cet écosystème en constante évolution, des espaces perdent de leur fonction. Ils sont alors déclassés, délaissés constituant la marge, le résidu laissé là par une machinerie toujours plus rapide. Ces espaces prendrons plusieurs formes, à chacun appartenant sa nomination. Ce phénomène contemporain a inspiré nombre de penseurs. Rem Koolhass parlera de junkspaces, Gilles Clément de tiers paysages, Renzo Piano de trous noirs, il s’agira de multiplicités interstitielles pour Pascal Nicolas-Le-Strat, de non lieux pour Marc Auge ; mais plus communément on parlera d’espaces résiduels ou de friches. Dans tous les cas se sont des lieux en attente, des lieux de transition et de devenir. « Les origines du mot friche sont à rechercher dans le domaine de l’agriculture. Étymologiquement, il provient en effet d’une évolution du terme médiéval néerlandais versch, qui signifiait terre fraîche. »1 Ces lieux d’obsolescence, en déséquilibre constituent des territoires de conquête. De part leur non fonctionnalité, ils se caractérisent comme des espaces de libertés ; libérés de toutes normes, de toutes pressions socio-économiques. Les friches industrielles font parti intégrante de ces territoires de conquêtes. Symbole de la désindustrialisation, de mutations économiques et de déshérence, elles incarnent souvent un quartier défavorisé , une population désemparée. Elles sont le symbole d’un rejet de la ville, d’une mutation de sa structure. Les friches industrielles s’incarne dans la quasi-totalité des agglomérations des pays européens sous plusieurs formes. Ainsi ces espaces oubliés prennent plusieurs formes, ce sont des usines manufacturées en milieu urbain, des hangars agricoles dans les périphéries ou encore des docks dans les espaces portuaires. L’occupation de ces espaces oubliés par des collectifs d’artistes vient revitaliser ces territoires et leur redonner la parole. Un mouvement qui trouve son origine dans les années 70, et verra son apogée en France 10 ans plus tard. Donnant naissance à des lieux de culture alternatifs, ces lieux décalés n’ont cessé de germer et de prendre place dans le territoire urbain. Parmi ces lieux nous énoncerons : la conquête de la Friche de “La Belle de Mai” à Marseille en 1990, ancienne manufacture de tabac (12 ha), le “Melkweg” à Amsterdam en 1970, ancien entrepôt à sucre puis laiterie (3200 m2),‘‘The Chocolate Factory’’ à Londres en 1985, ancienne usine de confiserie (10.000m²), la ‘‘Kulturbrauerei’’ à Berlin en 1990, ancienne Brasserie de bières (20 000 m2), le regretté Brise-Glace de Grenoble, ancien immeuble de bureau (12 500 m2), la NDSMWERF au nord d’Amsterdam, ancien chantier de construction de bateaux ( 80 000 m2)... La nomination de ces fabriques n’est pas sans rappeler les anciennes 1

Emmanuel Rey , Régénération des Friches Urbaines, Recycler l’urbain.


activités industrielles du site. C’est notamment le cas de la NDSM-WERF. «J’ai grandi dans Tuindorp Oostzaan parmi des centaines d’autres familles NDSM. La moitié de ma famille travaillait au chantier naval. Mon père sentait le fer et mon frère avait une odeur de bois. Nous avons vécu au rythme de la cour. Chaque jour, les sirènes sonnaient pour annoncer le temps de travail et les temps de pause»2.

C’est là où l’occupation des friches prend son sens. Plus qu’un acte révolutionnaire c’est une forme de reconquête du territoire et de son histoire. L’occupation et l’utilisation des friches industrielles transforme leur représentation dans l’imaginaire collectif. Se mutant ainsi d’espace délaissé, oublié en un espace d’histoires et de vie. Cet acte d’occupation place la friche dans le débat urbain. La question du patrimoine en faisant partie prenante. «L’investissement d’une friche relève d’un processus de « patrimonialisation » : dans ce lieu abandonné, la société met des valeurs et les artistes trouvent une source d’inspiration dans le genius loci. Alors que ces lieux ne se voient pas encore reconnus une quelconque valeur esthétique, paysagère ou patrimoniale »3. Cette prise de conscience collective favorise un retour vers « un cycle de fonctionnement circulaire-valorisant qui résulte en une production de rebut-ressource, à contrarie avec le linéaire-dissipant, responsable de la production de rebutrejeté »4.

La Friche NDSM en 1990, crédit photo http://www.ndsm.nl. Ruud Van Der Sluis, ancien employé de la cour, http://www.ndsm.nl Roberto D’Arienzo, Recycler l’urbain, L’urbain comme système, p 53 4 Françoise Lucchini, géographe, Université de Rouen, 2 juillet 2012, Lagazette.fr 2 3

17 STRATÉGIE EN FRICHE

La NDSM-WERF se trouve sur des docks nord d’Amsterdam, mythique et sulfureuse capitale des Pays-Bas. La capitale néerlandaise s’est avant tout fait une réputation à travers l’Europe et le monde grâce à son port. Un port de marchandise, de commerce et surtout un lieu de construction. Le chantier naval NDSM en était l’un des plus représentatif. Fruit de la fusion, en 1946, entre NSM constructeur de fret de croisière et le Dock Company Nederlandsche NDM, le chantier va se spécialiser dans les superpétroliers. La cour était un haut lieu de vie. On pouvait entendre le sciage, le forage et le martelage partout. Sous les grincements des 13 grues du Dock les ouvriers montaient des paquebots gigantesques sur les deux pistes du chantier. Parfois six par an. Or en 1984 le chantier fait faillite. Ce haut symbole du savoir faire hollandais est relayé au statut de laissé pour compte de la désindustrialisation.


1.2 FAIRE CORPS Les friches culturelles, fabriques, ou comme d’autres les nommerons : ‘‘les nouveaux territoires de l’art’’5, sont donc des lieux d’occupation. Une occupation avant tout politique, une stratégie de (ré)appropriation du territoire. Mais qui sont ces conquistadors à l’asseau des friches ? Quels sont leurs intentions ? Sont-ils les seuls acteurs de ce renouvellement urbain ? « L’espace du rejet peut devenir un espace à géométrie souple et à économie variable (...) ; plus disponible puisque moins intégré dans la stratégie du système qui l’a déclassé (..) . La marge spatiale est une aire dont la vacance laisse une liberté d’initiative pour le changement ; c’est une réserve d’hypothèses d’usages » 6

18

Dans cette citation utilisée par Roberto D’Arienzo la notion importante est ‘‘la liberté d’initiative’’ créer en même temps que la condition de friche. Ces ‘‘réserves d’usages’’ permettent aux friches et aux conquistadors qui les habitent de créer une alternative aux systèmes dirigeants. À la base de ces aventures, des groupes d’individus, en mal d’espaces d’expression artistique, de studios ou d’ateliers à loyers modérés ainsi que de lieu d’échanges entre créateurs. Les collectifs d’artistes vont être le fer de lance de ce mouvement de reconquête. En générale ce sont des jeunes artistes tout juste sortie de l’école, qui n’ont pas les moyens de trouver matériel et lieux de création. Le squat est donc une solution légitime, offrant en plus la possibilité de se positionner en tant qu’acteurs de la société. « J’ai besoin d’un atelier, il est là, je le prends. Alstom7, ils se sont aperçus qu’ils avaient cet endroit quand on l’a squatté. C’est quelque chose de naturel de logique. Quand tu sors des Beaux-Arts, t’es plein d’envie, t’en a marres de l’école et t’as pas les moyens. Avec la déchetterie, on est plein de poubelles, le bâtiment c’est pareil, on récupère. »8 En récupérant une friche urbaine, les artistes se donnent les moyens pour vivre et travailler, ils proposent une nouvelle fonction au bâtiment délaissé. Alimentant par la même occasion le débat sur le recyclage des friches. Cette situation illustre bien le manque cruel d’infrastructures culturelles, et les limites que peuvent présenter celle-ci. En occupant les friches l’artiste se libère de toutes contraintes, ce que les institutions classiques ne permettent pas toujours. Pour ces collectifs artistiques la friche culturelle est plus qu’un simple refuge, c’est un eldorado.

Cette notion d’eldorados est importante. Ces lieux libérés de toutes

Terminologie proposée par Fabrice Lextrait, Une nouvelle époque de l’action culturelle, rapport à Michel Duffour, secrétariat d’Etat au Patrimoine et à la Décentralisation Culturelle, Mai 2001. 6 Roberto D’Arienzo, Recylcer L’Ubrain, p 57, d’après Gouhier 1999, p 80-89. 7 La société Alstom est le propriétaire de ces anciens locaux bureautiques laissé en friche. 8 Sam Rousseau, artiste-plasticien, résident au Brise-Glace, Mémoire TPFE Aurélie Barbey, 2003 5


pressions vont être le territoire de nouvelle pratiques artistiques mais aussi sociale. Véritable laboratoire culturel ces friches ont été l’occasion de vivre une certaine utopie. Les codes de la société classique y sont en grande partie exilés. Hiérarchie inexistante, auto-fonctionement, récupération, éclatements des frontières entre espaces privés et publics en sont représentatifs. Cette émancipation des codes sociaux est représentative de l’univers alternatif de ces friches culturelles. « Dans des cas comme ceux-là, les friches deviennent des lieux de vie, qui servent à tous, au-delà des seules activités culturelles. Ils correspondent à un projet global inspiré par la volonté de mieux vivre ensemble. Ces friches donnent aussi à l’artiste une place nouvelle dans la société : il devient quelqu’un que chacun peut côtoyer au quotidien, qu’il soit ou pas familier des activités culturelles. »9

Sargfabrik, collectif d’habitant la VIL, crédit photo, www.sargfabrik.at Françoise Lucchini, géographe, Université de Rouen, 2 juillet 2012, Lagazette.fr Propos receuillis sur www.sargfabrik.at 11 « Mouvement ascendant, il s’agit d’initiatives de la société civile, de collectifs, de groupes d’artistes. Mouvement descendant, initiatives portés par des institutions, des décideurs politiques avec une maîtrise d’ouvrage traditionnelle. » Françoise Lucchini 9

10

19 STRATÉGIE EN FRICHE

Il est important de citer les collectifs artistiques comme majorité dans ce mouvement, mais aussi de souligner qu’ils ne sont pas les seuls. Dans cette effervescence certaines associations plus discrètes se montent, ce sont les collectifs d’habitants. Leur objectif premier étant celui d’habiter, ils partagent pourtant le désir de la culture alternative. Ces usagers silencieux détournent les règles sociaux-économiques établies et prouvent que l’on peut habiter autrement. Se passant des organismes de spéculations immobilières tels que les promoteurs, des collectifs d’habitants se regroupent pour habiter les interstices urbains. Les friches industrielles en devant de scène accueillent leur part de ces conquistadors familiaux. La SlargFabrik est s’en doute la plus célèbre.




À Vienne, en Autriche un ensemble de personnes, souvent socialement engagées et insatisfaites de l’offre en logement classique, se regroupent pour fonder la VIL: Verein fûr Integrative Lebensgestaltung. Cela pourrais se traduire par un ‘‘ Mode de vie intégratif ’’, où mode de vie se définit par une vision politico-philosophique. Cette génération fondatrice ,constituée de 30 à 40 personnes en 1986, cherche un lieu où ils pourront : « vivre dans la ville, mais bénéficier des caractéristique sociales d’un village. »10 Le collectif d’habitants va alors découvrir une ancienne fabrique de cercueils, intitulé ‘‘Sargfabrik” en allemand. C’est les architectes de BKK-2, membres de la VIL qui vont concevoir ce lieu de vie, de partage et de mémoire industrielle. Il est intéressant de voir l’architecte partie prenante d’une reconquête du territoire dans un processus ascendant 11 en dehors de la maîtrise d’ouvrage traditionnelle.

22

Ces collectifs d’artistes/habitants se retrouvent à l’oeuvre d’une stratégie d’occupation des friches à la conquête du mieux vivre la ville. Des modes d’occupation, production et de vie intra-friches voués à outrepasser leurs propres frontières pour se diffuser librement dans l’urbain environnant.

1.3 CHANGER L’URBAIN « Vous voyez une mer agitée un paquebot et une barque. Qui doit aller au secours de qui ? ” Après avoir posé cette énigme, il a poussé un cri terrible et a hurlé : “ Si les friches ne servent pas à détruire les prisons qui sont dehors, alors elles ne servent à rien ! »12 Une friche c’est tout d’abord un besoin d’occupation, par manque de structure de lieux où habiter, se réunir et peut être subsister. Mais, nous l’avons vu, c’est aussi des intentions plus profondes, des stratégies politiques. C’est un lieu de culture publique, un lieu d’expérimentation, mais surtout de changement. Changement dans les modes de vies, mais aussi dans la façon de concevoir, de façonner le territoire urbain. Ces fiches sont des lieux ouverts sur leurs alentours, des lieux de réunion, de festivité. «La friche artistique et ses résidents jouent le rôle de médiateur culturel. Le rapport au territoire est alors un élément clé de l’action artistique et de ses pratiques. La volonté de construire une proximité entre l’art et les populations est évidente. Pour parler de « cette socialisation, par contamination, par extension », le sociologue Philippe Henry emploie le terme de « tiers-espace ».

Edward Bond, Les territoires de la fiction, Les Nouveaux Territoires de l’art, p 48 Ghyslaine Thorion, « Espaces en friche, des lieux dédiés à l’expérimentation et à la création culturelle », Communication et organisation, 26 | 2005, 114-126. 12

13


Un tiers-espace, en référence au tiers- secteur économique ou social, qui répond à une forme de citoyenneté, proche, pour lui, de l’éducation populaire.»13 Par le biais de ces festivités, de cette ‘‘éducation populaire’’ la friche culturelle à le désire d’infuser son milieu proche , de se diffuser sur son territoire, pour le transformer. Chaque fabrique possède ses spécificités territoriales, mais aussi sociales. Ici nous nous attaquons à une friche de grande envergure, la NDSM d’Amsterdam friche artistique et culturelle. NDSM-WERF - Amsterdam Noord - Pays Bas. // Maître d’ouvrage : NDSM-WERF Propriétaire du bâtiment : la municipalité d’Amsterdam Architecte de la reconversion : Dynamo Architecten (Utrecht), Architectuurwerkplaats De Ruimte (La Haye), Sponge (Amsterdam), Stichting Stro & Co, Kees Aafkens ainsi que les usagers de NDSM. Dates de fondation : 2000 Surface totale de l’opération : 30.000 m2 (intérieur), 50.000 m2 (extérieur) Coût de la rénovation du bâtiment : 9,2 mln euro

23 STRATÉGIE EN FRICHE

La Friche NDSM vue aérienne, crédit photo www.ndsmenergie.nl.

Située sur les docks nord d’Amsterdam, ancien emplacement du chantier naval, se dresse la NDSM-WERF. C’est en 1996 que les premiers pionniers vont créer leur locaux dans la friche. Parmi eux se trouve Eva De Klerk, artiste politiquement engagée. Les locaux appartenant à la municipalité, un concours est organisé en 1999 afin de trouver d’un directeur culturel. Eva De Klerk accompagnée de 80 artistes et d’associés au bureau municipal Broodplaatser répond et remporte le concours. Grâce notamment au cabinet d’architectes No Cure NO Pay, mais aussi au soutient financier et moral des directeurs de friches culturelles de toute l’Europe. On note ici la complexité de ce processus descendant porté par une volonté ascendante. Le projet a pour vocation de devenir un lieu de création et de rassemblement répondant aux enjeux spatiaux et sociaux du site. L’espace accueillera des lieux de créations pour artistes et entreprise locale, un théâtre, des lieux de restauration, des espaces événementiels, mais aussi un skatepark couvert.


NDSM une friche portuaire ....



... devenu espace de vie.



Croquis et maquette d’étude du ‘‘village’’, hangar ouest NDSM, crédits Dynamo Architecten.


Cette attitude a des répercutions directes sur le territoire environnant de la friche culturelle. Une cité Universitaire c’est ainsi construite à l’ouest de la friche. Constituée de 1000 conteneurs employés sur cinq étages, la cité est née en quelques semaines. Ces logements fonctionnels, pratiques, écologiques et esthétiques, ont permis d’apporter une solution rapide aux problèmes de logement. Mesurant environ 25 m² chacun, ils disposent d’une cuisine, d’une salle de bain et d’un balcon. Les conteneurs recyclés sont loués à un prix abordable de 250 à 350 euros/ mois. Participant ainsi à la mixité sociale du quartier qui abrite aussi des hôtels remarquables dont le Faralda construit dans une ancienne grue naval. L’hôtel très exclusif est composé de seulement trois suites de 35 m² culminants au sommet de la grue. Ces constructions bien que luxueuses, ont sauvé la grue 13, symbole de la friche, de la démolition. Ce développement, et l’attrait touristique suscité par la présence de 250 artistes résidents à l’année la NDSM-WERF à su se créer une place en vue dans l’offre culturelle d’Amsterdam. Mais aussi au niveau européen. Grâce à ces visibilités et à l’attention des collectivités dans le projet, la friche bénéficie de nombreuses servitudes. Par la voie fluviale, une navette gratuite désert la friche depuis la gare centrale. Mais aussi par le réseau routier avec des lignes de bus de jour comme de nuit. De plus des permis spéciaux ont été remis aux locaux possédant un bateau afin qu’ils puissent offrir un service de taxi aux touristes. La friche NDSM par son développement et son emplacement stratégique a réussi à conquérir le territoire alentour, en manière d’architecture mais aussi sur le plan social. La création de la navette fluviale ayant nettement désenclavé les quartiers nord. Cette fabrique, où fleurissent bureaux et hôtels a su offrir une alternative à la précarité locale, aussi bien au niveau financier

29 STRATÉGIE EN FRICHE

En 2002, le cabinet d’architectes Dynamo Architecten prend en charge le projet. Ce hangar de 20.000 m² joue le rôle de coque, disposant d’une structure métallique composée d’une dizaine de portiques. La hauteur sous toiture est d’une dizaine de mètres et offre la possibilité de construire un village à deux niveaux. Le village est composé comme un quartier où l’on trouve des rues et des places ouvertes. Ainsi l’espace ne fonctionne pas comme un refuge partitioné où chaque artisan travaille dans une case qui lui est propre mais comme un lieu d’interactions. Un espace totalement public où le visiteur peut voir, observer et approcher les acteurs de la fiche. Pour la partie plus technique le village est constitué selon un plan directeur établit conjointement par les architectes et les artistes résidents. Il est composé de trois parties régies par différents artistes faisant partie de la direction de la friche. Chaque unité se compose d’un rez-de-chaussée et d’un étage. Les deux peuvent être liés ou gérés par deux artistes, avec des entreprises différentes. Chaque unité fait partie d’un bloc pré-structuré en acier. Une structure poteau-poutre couverte d’une toiture étanche. Les artistes, ou l’entreprise locataire n’a plus qu’à monter façades et planchers afin de constituer son unité de travail. Cela donne une hétéroclité architecturale impressionnante. Ce mélange de styles et de matériaux est à l’image de la friche qui se veut ouverte et cosmopolite. En plus de son effet esthétique ce processus permet à la fondation de faire des économies sur la construction. Les artistes et entreprises résidentes étant encouragées à construire à partir de matériaux de récupération.


que culturel. Un univers où entrepreneurs, artistes, marginaux et touristes se croisent et se retrouvent. Cette culture du lien social crée la mixité dans une ville toujours plus fonctionnaliste où chaque chose a sa place.

30

Séance de détente au PLLEK, bar-restaurant et lieu événementiel, crédit photo www.pllek.nl.

Cet exemple, bien qu’issu d’un processus descendant, illustre bien l’apport des lieux alternatifs, tels que les fabriques, dans le renouvellement urbain. Créant des espaces de rencontre, de festivité, mais surtout de revalorisation du territoire.

1.4 UNE ATTITUDE PÉRENNE OU ÉPHÉMÈRE ?

«Ce chantier de culture sera expérimental et ne veut explicitement pas devenir une institution. L’espace sera modelé sur la base d’un travail en commun avec les usagers.»14 Ces propos recueillis concerne la friche NDSM d’Amsterdam. Ils illustrent le paradoxe rencontré par la majorité des friches culturelles face à la volonté de se pérenniser une fois la phase chantier terminée. La friche est-elle toujours résistante ? Cette volonté de concevoir un espace alternatif tient sur le faite que ce même espace se refuse aux normes institutionnelles. Cependant pour

14

Article numérique, NDSM Amsterdam, www.artfactories.net


continuer le combat les friches ont besoin de subventions. Et le problème réside dans ce paradoxe. Comment continuer à contester une institution qui permet à la friche de subsister ? «Ce qui pose un problème, si on se réfère aux projets initiaux, qui comportent une forme de contestation sociale et qui sont marqués par la volonté de faire participer la population locale. D’où l’intérêt des activités hors-les-murs que développent souvent les friches»15 En plus du problèmes pécuniers indispensables pour le fonctionnement, la friche se heurte à des problèmes de mixité sociale. De part leur développement, et leur couverture médiatique les fabriques attirent les aficionados culturels du monde entiers. Les populations locales sont peu à peu rejetées par cette masse envahissante, et les friches culturelles sont contraintes d’offrir des activités hors-murs pour les réintégrer dans le processus culturel.

«Le devoir de l’artiste est d’être l’ennemi du gouvernement. Je dois m’en aller.»16

15 16

Françoise Lucchini, géographe, Université de Rouen, 2 juillet 2012, Lagazette.fr Edward Bond, Les territoires de la fiction, Les Nouveaux Territoires de l’art, p 51

31 STRATÉGIE EN FRICHE

Face à ce double paradoxe les collectifs artistiques semblent avoir que deux issues. Refuser les financements ‘‘publics’’ et donc mener peu à peu la fabrique à sa destruction, ou, faire appel aux subventions et prendre la voie de l’institutionnalisation. Cela ne représentant pas une défaite, mais une conquête, la situation stratégique de l’occupation locale, se mutant solution tactique. Au fil du temps la friche c’est institutionnalisée, et tant mieux ! Cette nouvelle offre culturelle est désormais partie prenante de notre société. La friche a irréversiblement changé la constitution ‘‘classique’’ de la ville, devenant une plus value urbaine. Prenez vos baluchons, nous partons conquérir le temps.



2. RÉVOLUTION TACTIQUE

« Dans une ville en perpétuel mouvement, être nomade, c’est faire partie de la ville. Aucun bâtiment n’est pérenne. » Patrick Bouchain


2.1 LA SITUATION NOMADE. Nous l’avons introduit plus tôt, la ville est un milieu vivant en perpétuelle mutation. Ce milieu est un espace réversible, mouvant, tout y est éphémère. De cette constatation découle les délaissés, les interstices, symboles d’une entité passée et future en attente de mutation. La situation nomade est donc une attitude logique dans ce fonctionnement éphémère de la ville. Pour intervenir sur l’urbain les collectifs se doivent d’être partie prenante de cette notion de réversibilité. « Dans une ville en perpétuel mouvement, être nomade, c’est faire partie de la ville. Aucun bâtiment n’est pérenne. »1

34

Cependant quels espaces urbains sont en mesure d’accueillir le transitoire ? Le collectif artistique doit-il intervenir dans ces lieux de transite ? Son occupation symbolise-t-elle, à elle seule, une revalorisation ? Tout d’abord, il s’agit de qualifier ces lieux de transite. Les années 70 à 90 ont été le fer de lance d’investissement de lieux en désuétude, symbole fort de la désindustrialisation. L’idée principale du mouvement d’occupation étant de sensibiliser et d’interroger les pouvoirs publics sur le devenir de ces ressources territoriales. Pourtant la nappe urbaine recèle de bien d’autres interstices de proportion bien plus modestes. Ces interstices, souvent non bâtis, sont qualifiés par des termes plus communs, ce sont des espaces de proximité. Faisant partie de l’imaginaire collectif, ce sont des terrains vagues, des dents creuses, des places, des talus de terre, des impasses, des jachères, des terrasses, des rues... Ces espaces de proximité ne sont pas aussi qualifiés que les friches industrielles et leur statut est dur à déterminé. Espaces publics, propriété municipale, lieux privés , jachères spéculatives, leurs appartenances restent vagues. Cependant, l’aspect négliger de ces espaces contribue à la dévalorisation de l’espace public. Le travail du collectif est celui de la petite appropriation, d’une volonté d’accompagnement de l’usager dans l’exploitation de son environnement immédiat et quotidien. Cela passe tout d’abord par l’installation des collectifs sur les délaissés. En s’installant ils interrogent, analysent et interpellent. Il ne s’agit plus d’agir sur un lieu unique mais sur le temps. Ce facteur temps est indispensable car il ne caractérise plus l’urbain comme simple territoire mais comme interaction entre l’espace et ces habitants. Ces démarches participatives incluent directement l’usager au coeur de la ressource. « L’occupation d’un palais par une foule en liesse est une image commune du débordement révolutionnaire. Elle se 1 2

Patrick Bouchain, Histoire de construire, p 78 Patrick Bouchain, Histoire de construire, p 20


décline à travers les époques, variant selon les contingences historiques. Sa persistance en fait une représentation rituelle et nécessaire, constituante du fait révolutionnaire. Elle incarne l’espoir de justice par la redistribution équitable de l’espace. L’occupation est le versant architectural d’une vision sociale. »2 Dans ces nouvelles formes d’occupations nomades, les collectifs interrogent la notion de global et de local. La culture globale engendrée par la mondialisation a homogénéisé les villes. Cette homogénéisation culturelle a progressivement vidé l’échelle locale de ses diverses valeurs et repères culturels, remplacés progressivement par d’autres qui s’imposent à l’échelle globale. Cette dé-territorialisation est très bien décrite par Marc Augé; «La couleur globale efface la couleur locale. Le local transformé en image et en décor, c’est le local aux couleurs du global, l’expression du système.»3

« Nous proposons des « tactiques urbaines » pour accompagner les micro-processus locaux dans les milieux urbains où les décisions sont prises au nom d’intérêts économiques privés et de mécanismes politiques centralisés inadaptés aux mobilités territoriales actuelles : globales, informelles, multiculturelles… »4 Leur actions se caractérisent fondamentalement par une participation à la vie locale. Les collectifs nomades se constituent en une force de proposition citoyenne et culturelle.

2.2 COMMENT SE REGROUPER SANS LIEU FIXE ?

Cet attachement à des valeurs locales et participatives conduit les collectifs vers une situation nomade. L’aspect multiculturel et pluridisciplinaire qui constitue ce nouveau mode de fonctionnement à des incidences sur le statut de ces collectifs jusqu’alors «sédentaires». Or, de quelles substances se nourrissent ses nouveaux forains ? De quels champs de compétences sontils fondés ? Qui sont ces acteurs, sont-ils des artistes ou plus encore ? Quelle cohésion relie ses collectifs pluridisciplinaires ? 3 4

Marc Augé, Où est passé l’avenir ?, éd. du Panama, 2008, p.57 Atlier d’Architecture Autogéré, Urban Tactiques, page d’acceuil, www.urbantactics.org

35 RÉVOLUTION TACTIQUE

La place du collectif est donc celle d’un catalyseur de ces pratiques locales. Il doit, par son intervention, accompagner les micro-processus locaux à travers des réseaux trans-locaux, des espaces autogérés, des plates-formes de production culturelle ...


Confrontés à des lieux hétéroclites, à des enjeux sociaux éparses, leurs champs de compétences doivent s’élargir. Ces collectifs se confrontent à des enjeux sociaux, politiques mais aussi territoriaux. La place de l’artiste mais aussi du sociologue, du technicien et de l’architecte dans ce processus complexe est primordiale. Pour répondre à ses problématiques les collectifs s’étoffent et deviennent transdisciplinaire. Les collectifs transdisciplinaire ou pluridisciplinaires se définissent comme des collectifs croisant des corps de métier et des compétences pour traiter d’une problématique commune, ici, le territoire et la ville. Cette volonté de mise à niveau des compétences et des savoirs se retranscrit sous la forme d’association ou de collectifs dont l’organisation est horizontale et non hiérarchisée. « On a réussi à trouver un fonctionnement qui n’était écris nul part, il n’y avait pas de statut, mais chacun s’investissait de sorte que tous le monde trouvait une place et un moyen de participer.»5

36

On peut scinder ces collectifs pluridisciplinaires en deux groupes. Le premier est constitué de collectifs d’artistes ou intégrant un artiste dans le processus effectué sur la ville et le territoire. Le deuxième regroupe des collectifs de professionnels de la ville et du territoire travaillant à partir du process artistique. La position de l’artiste étant utilisé comme une manière innovente de penser la ville et l’urbain. Ces deux façons de procéder apportent différentes sortes d’interventions sur les interstices. Le premier groupe opérant peu de transformations physiques, s’attache plus à des rapprochements sociaux pouvant sensibiliser notre approche et notre pratique de ville. Le deuxième, constitué de praticiens, est plus axé sur une reconquête physique et constructive du territoire pouvant créer des rapprochements sociaux. La finalité de ces deux process mènent donc à un but commun, créer des liens pour repenser la ville. Parmi ces collectifs nous citerons exclusivement des collectifs francophones représentatifs d’une certaine culture du territoire et de la ville. En voici quelqu’uns accompagnés de brefs descriptifs nous permettant de nous faire une idée plus précise de leur composition et fonction.

5

Propos receuilli lors d’une interview de Geoffrey Michel, collectif La fuite, Grenoble juin 2015


Ici-Même Grenoble : Train-Fantôme, 23 avenue de Vizille 38000 Grenoble, www.icimeme.org « Fondé en 1993, Ici-Même [Grenoble] est un collectif à géométrie variable, regroupant trois à trente personnes selon les projets. Sa démarche est profondément ancrée dans l’espace urbain, envisagé comme lieu et objet d’expérimentation. Entremêlant sons, images, objets, paroles et gestes, la pratique artistique d’Ici-Même est protéiforme et transversale. Elle croise les approches et brouille les frontières entre les disciplines : jeu d’acteur, création sonore, installation, performance, graphisme, architecture, photographie, écriture, vidéo, sociologie de terrain... »6 L’activité d’Ici-Même est expérimentale, elle questionne la ville et l’espace public, car la relation au territoire est essentielle au travail mené par le collectif. Ici-Même poursuit l’objectif de recréer des espaces de rencontre et de mixité.

A travers l’expérimentation, le collectif ETC composé d’architectes, questionne l’espace et le projet urbain, dont ils sont partisans d’une nouvelle approche pensée pour et avec les habitants. Ils veulent ainsi faire entrer dans le débat les usagers et habitants. Leurs actions touchent l’artistique à travers la réalisation de structures, de mobiliers urbains, d’interventions : affiches, sculptures, installations. Le collectif organise également des conférences ou rencontres. Leur objectif est de contribuer à l’émergence de nouveaux comportements dans l’espace urbain et de nouvelles façons d’appréhender ce dernier. En 2011-2012 ils entament un « détour de France », recherche organisée autour du développement durable, du paysage, et de la participation habitante. Collectif la fuite : ENSAG, 60 Avenue de constantine, 38000 Grenoble, twitter.com/colafuite Né d’une envie de réinvestir les espaces délaissés de l’école d’architecture de Grenoble le collectif la fuite s’illustre par des actions inter-étudiante et sur l’espace publique. Ce jeune collectif d’étudiants aujourd’hui composé de 5 à 6 membres cherche, à travers des interventions événementielles, a faire évolué la façon dont l’on conçois l’architecture. Aussi bien du point de vue de leur propre pratique, mais aussi par une sensibilisation des usagés sur le métier d’architecte. Leur pratique se base sur le réemplois et le détournement du matériaux créant une base pour le débat publique. Le collectif s’illustre aussi par une présence dans la vie de l’école à travers des rassemblement festifs et participatifs. La fuite poursuit l’objectif de recréer des liens, physiques et cognitifs, à travers des espaces de convivialités et de débat. 6

Description du collectif, www.icimeme.org/ici_meme, juin 2015

RÉVOLUTION TACTIQUE

Collectif Etc : Maison des associations 1a rue des Orphelins 67000 Strasbourg, www.collectifetc.com

37


Dormir à la belle (de Mai), Ici-Même & Ect.


Planification épopée poétique, Ect.


Les radis de l’ENSAG, récolte, La fuite.


Tour de table , cuisine urbaine, AAA.


Atelier d’Architecture Autogéré : www.urbantactics.org « Nous explorons la réappropriation des espaces urbains délaissés et la création de nouvelles formes d’urbanité par des aménagements réversibles, des pratiques du quotidien, par l’implication des habitants et des usagers en tant que porteurs de différents savoirs faire. Notre démarche consiste à critiquer pour libérer le désir d’agir mais aussi à rassembler des compétences partagées et des dynamiques collaboratives pour aller plus loin. En valorisant la position d’habitant et d’usager comme condition politique nous développons ensemble des outils d’appropriation symbolique des espaces de proximité et nous renforçons le pouvoir de décision et d’action des acteurs de terrain dans la ville. Ces outils incluent des réseaux trans-locaux, processus catalyseurs, architectures nomades, espaces autogérés, platesformes de production culturelle… »6

42

Ce collectif multidisciplinaire possède une architecture collaborative entre praticiens et usagers afin d’accompagner les dynamiques locales. Leur but est de valoriser et de transmettre les outils nécessaires aux usagers pour investir l’espace public. Bien qu’éparses et abordant différentes approches, ils poursuivent le même but de régénération du milieu urbain. En développant des démarches « participatives », ils ouvrent, d’une part, des lieux au public (de façon légale ou illégale) et, d’autre part, interviennent dans l’espace public en associant ce public à une réflexion sur l’art et la ville ou en l’invitant à participer au travail de création.

2.3 L’INTERVENTION. « Cette acceptation du concept de provisoire signifie que les produits deviennent ouverts pour intégrer le transitoire et s’inscrire efficacement au sein des cycles urbains contemporains et futurs. »7 Les tactiques utilisées par les collectifs se retranscrivent par des interventions éparses et des procédés multiples. Pour se faire ils ont tous recourt à la construction dans l’espace public. Cependant comment concilier besoin de construire et envie nomade ? Les espaces conquis sont soumis à des normes, administratives, urbanistiques ; comment les prendre en compte, les détourner ? Que reste-t-il de ces interventions après leur passage ? La gestion de ces nouveaux espaces publics est elle confiée aux usagers, aux instances politiques ? Bien sur les réponses varient selon les espaces rencontrés, les caractéristiques 6 7

Atlier d’Architecture Autogéré, Urban Tactiques, page d’acceuil, www.urbantactics.org Roberto D’Arienzo, éco-sophies, Recylcer L’Ubrain, p 57, p 62-63


des collectifs et l’implication des locaux, mais elles n’en restent pas moins transversales. Par ailleurs, l’investissement micro-politique des interstices à une échelle de proximité à travers des espaces autogérés et l’investissement collectif ne suffisent pas à garantir la réappropriation de la ville. Les enjeux et les ressources, pensés en termes d’usages, de détournement, d’appropriation ne sont pas garantis par ce seul mode opératoire. Il s’agit surtout de réinventer les lieux, de reconquérir un espace lisse face à une ville fonctionnalisée afin d’inventer de nouvelle circulation, des ‘‘chemins de traverses’’.

Le collectif Etc à Busséol ... C’est à Busséol, un petit village d’Auvergne à une trentaine de kilomètre de Clermont-ferrand que le collectif Etc a posé ces valises du 19 au 27 novembre 2011. Ce village péri-urbain est devenu au fil des années une cité dortoir où les espaces publiques sont peut à peut délaissé, les habitants trouvant refuge dans leurs habitations. Invité par l’association Pixel en tant qu’intervenant, Etc a pour but d’identifier et de réactiver les anciens lieux de mémoire et de sociabilité. Ces quatre lieux étant l’église du village, le four à pain, le lavoir, et la cabine téléphonique du village.

Plan schématique des lieux d’intervention, Au four banal, www.collectifetc.com

La réactivation de ces quatre lieux s’est déroulée en 5 étapes : - une tournée chez l’habitant pour recueillir des témoignages sur les différents lieux, - un chantier de construction sous forme de lieu de vie, - une mise en scène des nouveaux usages attribués aux lieux à travers le tournage d’une bande annonce, - un vernissage et une projection publique des bandes annonces, - le maintien de certains dispositifs construit dans la semaine, le décor des films devenant des espaces utilisables quotidiennement par les habitants.

43 RÉVOLUTION TACTIQUE

Certaines démarches de projet se définissent par les utilitas, la démarche formelle étant absente les concepteurs se servent seulement du mobilier et des bâtis existants leur trouvant une autre fonction. Florian Rivière, architecte, est l’un deux et se définit comme un ‘‘Hacktiviste urbain’’. Il réinvente l’espace urbain grâce à des mini modifications attirant ainsi l’attention sur le mobilier, un portique d’entrée de parking se transforme en cage de football grâce à un simple filet. Florian Rivière travaille ainsi la notion du réinvestissements de l’espace public à travers le jeu. Une notion reprise par le collectif Etc lors de sont ‘‘détour’’ de France.


Bien que cette organisation semble complexe, les intervention urbaines sont quant à elles minimales et très simples. Ainsi les détournements prennent forme avec l’ajout de quelques petits modules de bois, des étagères disposées dans la cabine téléphonique la transformant en pôle de lecture, un simple tremplin et deux plots numérotés transforment un lavoir en piscine olympique, et l’église se dote d’un magnifique panneau étincelant abordant le mot cinéma, un simple projecteur et un drap blanc feront le reste. L’ancien four à pain quant à lui a servi de pôle de résidence au collectif, l’intervention a constitué à l’apport d’une terrasse extérieur et la fabrication de mobilier. Situé en plein village celui-ci est devenu un lieu de vie à part entière, c’est ici que le collectif organisait les principaux événements de ralliement et de partage.

44

Ces interventions minimes ont surtout été le prétexte pour ouvrir le débat sur ces espaces délaissés et retracer leur place dans l’histoire du village. Leur donner une nouvelle fonction, c’est sensibiliser les habitants sur ce qu’on pu représenter et représentent ces lieux. Ainsi toutes les interventions ont été appuyé par un travail d’enquête auprès des habitants, de ces enquêtes découlent des témoignages qui ont fait l’objet de parutions sous forme d’affiches. Au même titre que les interventions ‘‘bâtis’’ ces affiches, cette communication écrite et parlée interpelle, questionne.

Recueil de témoignages, affiche, Au four banal, www.collectifetc.com

Le travail mené par le collectif n’est pas tant un travail sur l’espace à proprement dit, mais plus un travail sur ce que le lieu peut raconter, et ce qu’il pourrait à nouveau offrir en terme de sociabilité. À travers la communication ; projection de film, affiches, panneaux, le site Internet ; c’est l’histoire des lieux qui est racontée, les habitants sont invités à remettre des mots sur ces espaces oubliés, par ces mots ils transmettent l’espace aux autres usagers, aux nouvelles générations. C’est peut être là le travail le plus important du collectif. La tactique alors utilisée sur l’espace de lavoir, de la cabine, du four à pain, ou encore de l’église se transforme en stratégie de communication, laissant un trace indélébile des interventions au milieu des sphères virtuelles.


Lieux d’interventions passé, présent, futur , Au four banal, www.collectifetc.com




L’expérience ECObwox avec l’Atelier d’Architecture Autogérée ... L’ensemble de projets appelés ECObox a été créé en 2001 dans les espaces délaissés du quartier La Chapelle à Paris à l’initiative du collectif AAA. Ce collectif pluridisciplinaire, rappelons le, effectue des recherches et des expérimentations à travers le développement d’infrastructures communautaires dans des espaces en marge. ECObox a parcourut le quartier de la Chapelle, mais c’est dans la cour de la Halle Pajol que le projet original a vu le jour. Ce lieu à été conçu comme un espace d’événements communautaires invitant les habitants dans des dynamiques de ‘‘micro-politiques’’ à travers leurs usages des lieux délaissés.

48

La construction est ici, aussi, très simple et rudimentaire, il s’agit de potager urbain construit à partir de palettes d’expédition de récupération, qui superposés par deux à même le sol forment une grille de parcelles jardinables séparées par des allées. Les parcelles jardinables, espaces vides entre les allées, sont remplies de terre et plantées de fleurs, aromates et de plantes comestibles. Ces jardins sont entretenus par les habitants du quartier qui prennent peu à peu possession de l’installation et du lieu qui étendent progressivement.

Module ECObox à base de palettes, ECObox Halle Pajol, www.urbantactics.org

Après avoir insuffler ce projet, les membres d’AAA, dont les fondateurs sont Diona Petrescu et Constantin Oetcou, se retirent progressivement du projet. Les jardins perdent le statut d’interventions orchestrées par le collectif, pour pérenniser le lieu les habitants décident donc de monter l’association ECObox indépendante et autogérée par ses membres. La force de AAA réside dans cette capacité à se retirer des projets offrant cette part de vide que l’usager peut alors s’approprier. L’association ECObox est d’ailleurs, on peut le dire, une belle réussite. La simplicité de la construction de base a partir d’éléments modulaires et mobiles à permis aux jardins de se déplacer et ainsi d’aménager de nouveaux sites


lors de leurs nombreux délogements. Après deux expériences infructueuses les nouveaux jardins ont pris leurs quartiers sur les toits d’un parking du quartier. Depuis ce nouvel eldorado est devenu un lieu de vie ou l’on recycle des tuyaux métalliques en tour à fraisiers, on récupère des théières pour arroser, mais on y aménage des espaces conviviaux. Ainsi le jardin est le lieu d’accueil de concert, de projections, d’ateliers, des bals, un poulailler, ou encore une ruche. C’est aussi un lieu de distribution pour ‘‘les Paniers Pajol’’ à destination des habitués et des curieux participant ainsi à la vie du quartier, mais aussi à la diffusion de l’intervention. Les ateliers participatifs ouverts aux écoles, sont aussi un moyen de diffuser ces méthodes de construction et d’appropriation à un large public, participant ainsi aux mouvements urbains.

49 RÉVOLUTION TACTIQUE

Plan de localisation, ECObox tout projets, www.urbantactics.org

Le collectif AAA se positionne donc en initiateur et formateur, permettant aux usagers de s’approprier des lieux oubliés et de former à leur tour d’autres habitants à ces pratiques de reconquête.

Panorama, ECObox Halle Pajol, www.urbantactics.org


Jardin sur le toit, ECObox.



2.4 UNE COMMUNICATION STRATÉGIQUE.

52

Il est intéressant de voir que ces collectifs nomades, pensant et construisant des installations éphémères, conservent tout de même une trace de leurs interventions, les pérennisant d’une certaine manière à travers la communication. Nous l’avons vu plus tôt dans nos cours descriptifs des collectifs pluridisciplinaires certains possèdent des adresses fixes. Pourtant, prenons l’exemple d’Ici-même, il n’est pas rare que l’adresse soit seulement une boite aux lettres garantissant le statut associatif du collectif bien que celui-ci passe plus de temps en résidence sur d’autres sites, ici la friche de la Belle de Mai ou Ici-même c’est installé depuis 6 mois. Il en va de même lorsque Ect fit son ‘‘détour de France’’. Pourtant les collectifs possèdent une autre adresse fixe, un autre lieu de résidence qui les suit tout au long de leurs déplacements, il s’agit de leur adresse mail, site internet, facebook, twtitter, ... Cette présence stratégique sur les réseaux de communication, et sur l’espace virtuel plus généralement ancre les collectifs et leurs démarches sur un territoire, un temps long. Il est intéressant de constater l’évolution de cette communication et son architecture, du détail apporté aux schémas et axonométries afin quelles soient intelligibles et d’une simplicité de compréhension. Les plans, les photos, et les documents graphiques qui accompagnent ces projets souvent simples dans leur construction permettent au plus grand nombre de s’en emparer facilement, et peut être de les reconstruire à coté de chez eux. De cette manière les collectifs ont un impact beaucoup plus diffus, et tous les ‘‘followers’’, ‘‘amis’’, ou arpenteurs du net peuvent s’identifier et d’une certaine manière participer à la démarche. Cette stratégie de la communication prend aussi essence en amont des interventions, à travers des publications sur les réseaux sociaux, des événements, mais aussi des moyens plus ‘‘classiques’’ comme des affiches dispersées dans l’espace public. Ainsi l’intervention prend plus de valeur et touche plus

Récolte, La fuite, twitter.com/colafuite

Dormir à la belle, Ici-même, www.icimeme.org


de personnes, ouvrant des espaces de relations physiques et virtuels. Aujourd’hui cette communication est presque plus importante que l’intervention elle même car elle peut toucher plus de monde, influencer plus d’usagers et peut être les pousser à reconquérir l’espace urbain. La communication est donc le nouvel espace stratégique à conquérir. Mais les interventions des collectifs pluridisciplinaires n’en reste pas moins tactiques et éphémères. Ces interventions, ces architectures éphémère, ces mises en relation entres les mondes, entre les usagers, les habitants, et les concepteurs peuvent-elles prendre racine dans le processus de fabrication de la ville ? Ces acupunctures sont elles vouées à se diffuser, à faire écho ? Et si elles étaient à la base de grandes migrations sociales toujours plus conquérantes, qu’arriverait -t-il aux espaces délaissés, à ses espaces de liberté ?

53 RÉVOLUTION TACTIQUE


54


55

3. REGROUPEMENT STRATÉGICO-TACTIQUES « Nouez des relations humaines. Ce matériau de construction sociale est tout aussi important que les briques et le mortier. » Collectif Dus


3.1 ACUPUNCTURE URBAINE. « Nouez des relations humaines. Ce matériau de construction sociale est tout aussi important que les briques et le mortier. »1

56

Nous avons aborder précédemment dans ce mémoire l’expérience ECO-Box, initiative du collectif AAA, qui est autogéré par les usagers et les habitants du quartier la Chapel. Cet exemple démontre que le citoyen peut être porteur de projet et de reinvestissement urbain. Cependant doit-il toujours être accompagné ? Des projets de reconquête de rues, de place, ou même de quartier ne peuvent pas être, simplement, des conquêtes anonymes ? Et si finalement, le détournement, le travail d’occupation interstitielle était l’oeuvre d’usagers pionniers. Une simple chaise devant une porte, la création d’un banc, la réparation d’un trou, le street art sont autant de micro interventions que l’on peut croiser dans notre quotidien urbain. Jusque où peut-on pousser ces interventions, ces reconquêtes et quelle forme peuvent-elle prendre, autant d’un point de vue urbanistique que sociologique ? « Il est difficile d’influer sur les vastes opérations d’urbanismes. Mais ont peut agir concrètement au quotidien devant chez nous, à notre porte : c’est à notre échelle et dans le domine du possible. Nous les habitants, nous pourrions améliorée les rues dans lesquelles nous habitons, et , pour une part essentielle, nous somme les seuls à pouvoir le faire. Cela exige que nous trouvions collectivement le moyen de cesser de stériliser nos rues et de bloquer les initiatives. »2 Dans cette citation Nicolas Soulier nous incite à devenir des acteurs de la ville, des citoyens concepteurs. Un travail est aussi mené par les friches culturelles et les collectifs pluridisciplinaires, comme nous avons pu le démontrer dans les deux autres parties. C’est un travail d’acupuncture urbaine, où grâce à de petites interventions, mais aussi une présence politique et médiatique les interventions passées et futures s’ancrent dans l’imaginaire collectif, teintant nos façons d’agir. Parfois il s’agit de peu de choses pour que tout un quartier se transforme sous l’impulsion d’usages et d’usagers novateurs. C’est le cas de nombreux morceaux de ville oubliés par les spéculations, des quartiers souvent populaires où les délaissés fleurissent libérant le champs des possibles. Ces quartiers ouverts et disponibles, sont aussi attractifs au niveau financier avec des vastes logements à faible loyers. On les trouve dans tous les environnements urbain, à travers tous les pays et continents. Parmi ces quartiers on trouve Brooklyn à New-York aux U.S.A., Kreuzberg à Berlin en Allemagne, mais aussi à moindre mesure, à la Croix-Rousse de Lyon, ou encore le quartier Berriat de Grenoble.

1 2

Propos du collectif Dus, Exposition temporaire du pavillon d’Arsenal, Re-Architecture. Nicolas Soulier, Reconquérir les rues, introduction, p 7


Mais pourquoi ces quartiers sont-ils des symboles de ce mode de vie alternatif, comment prend-il corps dans l’urbain ? Les micro-interventions citées plus haut sont, indéniablement, des déclencheurs de reconquête. En interrogeant, en réparant, en facilitant les usages, ou tout simplement en embellissant elles offre un nouveau souffle aux espaces publics délaissés. Le banc fabriqué entre deux plots, la chaise devant la porte deviennent des lieux d’échange et de rencontre. Les usagers les plus avertis se positionnant comme instituteur de la réappropiration, l’effet est comparable à une boule de neige.

Maison vide, maison plein de gens, illustrations jeudi noir, www.jeudi-noir.org

57 REGROUPEMENTS STRATÉGICO-TACTIQUES

L’usager concepteur ne se cantonne pas seulement à l’espace public, il investit aussi l’intérieur des bâtiments, façonnant la ville de l’intérieur. Des espaces d’appropriation moins abordables pour les collectifs artistiques et pluridisciplanaires. Cette conquête des bâtis passe par des actions tactiques, investissement des halls d’immeuble avec du mobilier, événements festifs, ouverture des toits ... Mais se sont aussi des actions plus stratégiques, prenant la forme de squat dans des appartements ou immeubles vides, offrant une alternative à la précarité du logement, c’est aussi une manière d’investir les entrailles de la ville. Jeudi noir, un collectif fondé en 2006, travaille sur cette notion de précarité du logement, il offre notamment un espace virtuel complet permettant de recenser, et de partager les adresses des les immeubles vides de la région parisienne. Cette initiative a été rapidement assimilée par les habitants qui alimentent la répercution des délaissés et n’hésitent pas à apporter leur aide. La conquête des intérieurs s’opère aussi de manière légale, lorsque les loyers sont bas par exemple, permettant par l’usage, de revitaliser des logements souvent vétustes. Ces investissements ayant des répercutions directes et indirectes sur le renouvellement urbain. Le meilleur exemple étant celui des façades. Les façades constituent le paysage majoritaire en milieu urbain, or lorsqu’un immeuble est vide, délaissé ou simplement vétuste il y a peu d’interaction entre l’intérieur et l’extérieur, la façade constituant plus une frontière qu’un espace vivant. Cependant, l’occupation de ces immeubles inclût une façade animée, nourrit des usages intérieurs et des possibles occupations des extérieurs, balcons, devantures constituant un paysage urbain vivant et interactif.


« Des exemples en Italie montrent qu’on peut confier à des habitants le soin de réhabiliter des bâtiments abandonnés. L’expérience a commencé dans un ancien couvent de la Plazza Sonnino légué par l’église à la commune de Rome, en 1989. Les militants de l’Unione Inquilini ont réquisitionné cet immeuble de trois étages en très mauvais état. Cette expérience a abouti à la réhabilitation complète de cet immeuble abandonné, permettant la ‘‘création’’ de douze logements et d’un local commun dans le centre historique de Rome. L’ensemble des travaux de rénovation ont été effectués par la coopérative d’habitant mise en place, en fonction des revenus et de compétences de chacun, avec l’aide d’un groupe d’architectes. Depuis, une loi (voté à l’unanimité en 1998 par la région de Rome) prévoit que les immeubles publics dégradés et/ou inoccupés peuvent faire l’objet d’un ‘‘autorecupero a fini residenziali’’. »3

58

L’exemple italien démontre la possibilité de transformation urbaine favorisée par le droit au logement.

3.2 UNE VOLONTÉ COMMUNE.

« J’en suis donc arrivé à la constatation qu’il faudrait apprendre de temps en temps à accepter, ou même à créer, le vide. Vider ce n’est pas démolir. Vider, c’est souvent le début d’autre chose. »4 Les espaces vides représentent les potentiels d’interventions des usagers, cette part de vide est caractérisée par les délaissés. À partir de ce vide les habitants, peuvent composer, créer et concevoir des espaces qui ne sont pas régit par les instances dissidentes. C’est à partir de ce vide que l’on peut composer des villes différentes, moins normalisées et plus hétéroclites. Cette part de vide favorise la création de réseaux courts et l’émergence de culture locale. Certains architectes comme Hundertwasser ont longuement travaillé sur ce concept de vide et droit d’appropriation représentants les caractéristiques d’une ville durable. C’est notamment le travail qu’il poursuivait avec des interventions publiques comme le droit à la fenêtre, ou encore ‘‘l’arbre locataire’’ incitant les habitants à planter des arbres dans leurs appartements en créant un sasse au niveau des fenêtres. Collectif Jeudi Noir, Le petit livre noir du logement, Annexes, p 156-157. Jean Nouvel, L’éloge du vide, Les nouveaux territoires de l’art, p 74. 5 Hundertwasser, le droit de fenêtre, Hundertwasser Architecture p 58 3 4


Le droit de fenètre, Seckau, 1958. Un habitant doit avoir le droit de se pencher par sa fenêtre et de tout modifier sur le mur extérieur, à sa convenance et aussi loin que son porte son bras afin qu’on puisse voir de loin, depuis la rue : ici habite un homme qui se distingue de ses voisins qui vivent comme parqués autour de lui ! »5 La travail d’Hundertwasser est caractérisé par la reconquête de vide juridique permettant aux habitants de s’approprier les lieux où ils résident, mais aussi d’agir sur l’espace public grâce à une intervention qu’ils peuvent réaliser directement de leurs habitations.

59

Cette notion du vide, juridique et spatial, caractérise les quartiers que nous avons pu citer plus haut. Ces quartiers populaires, délaissés par une grande majorité de la société sont parsemés d’espaces vacants, moins contraints par les normes d’urbanisme habituelles. Les usagers pionniers peuvent donc s’approprier les lieux avec plus de liberté. Les interventions sont souvent beaucoup moins importantes que celles menées dans les friches culturelles ou par les collectifs pluridisciplinaires mais elles ouvrent le champs des possibles et façonnent la ville de manière plus pérenne. Comme dans le travail tactique mené par les collectifs ces interventions sont visibles dans l’espace urbain, notamment dans le quartier de Brooklyn, représentatif de cette tendance. On trouve dans ce quartier des interventions allant du simple art de rue, fresque murale, représentations théâtrales ... Le quartier possède aussi un lot d’interventions et de reconversions impressionnantes, symbole d’une volonté commune de reconquête. Ainsi on tombe facilement sur des espaces alternatifs proposant des menus préparés aux légumes du jardin. C’est le cas de Roberta’s Pizza. Caché derrière un mur en ‘‘agglo’’ d’un ancien entrepôt, se trouve une pizzeria construite à partir de matériaux de récupération. Au centre ce trouve un patio, lequel abrite un jardin potager ou l’on fait pousser des légumes à partir de l’eau formée par la condensation des climatisations réversibles des bâtiments adjacents.

REGROUPEMENTS STRATÉGICO-TACTIQUES

Exemple du droit de fenètre, Hundertwasser 1972, Hundertwasser Architecture.




Fresques et tourisme alternatif Ă Brooklyn ...



64

Les espaces d’appropriation peuvent prendre place à l’intérieur des bâtiments, c’est notamment le cas dans ces quartiers où les loyers sont extrêmement bas. La conquête se fait plus discrète en intérieur, mais vise souvent à créer des espaces plus poreux, moins fermés sur eux même que l’aurait put être les immeubles ou logements auparavant. Cette envie, se besoin, passe par des ouvertures souvent dépecées de rideaux, des fenêtres investies, mais aussi par le partage. Notamment avec une ouverture des lieux au tourisme. Les logements se transforment donc en appartement de réception, chambres d’hôte, ou famille d’accueil les termes sont nombreux mais caractérisent tous la même chose. Pour ce mémoire, je me suis infiltré dans cette conquête discrète à travers une randonnée virtuelle, une randonnée ‘‘AirBnB’’ à Brooklyn. Au court de mon arpentage j’ai pu observer des anciennes boutiques de téléphone reconverties en habitation, une église abritant un loft d’artiste en son centre, des maisons ‘‘traditionnelles’’ aux murs peinturlurés, des toitures terrasses conquises sur le toit d’anciennes usines ... Cette randonnée virtuelle ma permis d’accéder aux entrailles du quartier, aux espaces plus précieux de l’intimité de chacun, mais aussi d’apprécier les petits détournements, de la peinture au hamac suspendu. Les intérieures, leur fonction d’origine, leur détournement sont à l’image du quartier, un espace de vie et d’appropriation quotidien.

Entrée d’appartement, ancien local commercial, Williamsburg, Brooklyn, Randonnée AirBnB.

Il est intéressant de constater que l’attrait touristique est dû à la reconnaissance de l’alternativité du quartier, symbole de créativité et d’innovation, elle attire des visiteurs avides de nouvelles connaissances. Les répercutions des micro-interventions tel que le street-art prennent tout leur ampleur lorsque des tours opérateurs proposent des visites des murs de la ville. À Brooklyn par exemple, les toiles urbaines et habitants alternatifs attirent des milliers de touristes du monde entier, entament des randonnées urbaines à la recherche du dernier ‘‘graff’’. On peut donc observer, que lorsque les usagers, les habitants se regroupent et multiplient les interventions dans l’espace urbain et privé, l’espace devient moteur d’un renouvellement rapide et efficace. Les retombées sont


aussi bien économiques ; apportant au nouveau souffle à des quartiers souvent confronté au chômage ; mais c’est aussi une plus value de la culture et de la richesse urbaine avec des lieux plus ouverts aux partages.

3.3 QUEL AVENIR POUR CES QUARTIERS ?

De plus, l’occupation de ces quartiers en marge par des usagers pionniers, souvent créatifs, à des retombées sociales, offrant une mixité entre les populations des quartiers souvent pauvres culturellement et les nouveaux arrivants plus riches, d’un point de vue culturel. Cet exemple parle de lui même quand l’art investi les rues, avec des interventions sous forme d’atelier. Pourtant cet équilibre est fragile. La montée du tourisme, la requalification de nombreux lieux qui étaient désuets, attirent à nouveau l’attention sur le quartier, la société s’y intéresse de nouveau. C’est là que réside un certain paradoxe, le lieu alternatif prend ses racines dans la marge, mais les modifications positives qu’il apporte transforment le lieu et le réintégrant dans le système urbain. Cela entraîne une hausse des loyers, l’offre étant inférieure à la demande, et la population originelle est contrainte de quitter les lieux. Certaines villes tentent pourtant de préserver le fragile équilibre social, c’est le cas de Berlin qui a récemment établi un plafonnement des loyers dans certains quartiers de la ville. Mais la gentrification est en marche et transformera à nouveau le quartier en espace spéculatif.

65 REGROUPEMENTS STRATÉGICO-TACTIQUES

Pour aborder le futur des ces quartiers il faut d’abord faire une synthèse des différentes appropriations dont il a fait preuve et de leurs impacts. Pourtant il ne semble pas utile d’analyser chaque quartier, chaque lieu pour en trouver ‘‘les plus values’’ principales. La force de ces interventions réside dans la réappropriation de lieu et souvent leur réhabilitation, que se soit pour y habiter, monter un commerce, ou tout simplement créer un espace de vie, ces interventions réparent des espaces malades. Investir une ancienne église pour construire son logement c’est participer à la patrimoinilisation de celle-ci, c’est la faire subsister dans un milieu urbain spéculatif qui l’aurait sûrement détruit. Cette notion est d’autant plus vraie en ce qui concerne les immeubles d’habitations qui sont rarement perçus comme des éléments importants du patrimoine urbain. Je pense notamment, on en à peu parler, des logements sociaux des années 70, en France, qui bien que présentant de grand potentiel sont détruits par des instances publiques en mal de solutions. L’occupation alternative serait, là, l’occasion de trouver une autre solution qu’une explosion au C-4.


66


CONCLUSION À l’heure du développement durable, où les politiques urbaines se sont éprises de nouvelles normes portant le nom de HQE ou BBC, il est intéressant de porter nos regards d’architectes, de concepteurs, de constructeurs ou tout simplement d’usager sur les initiatives d’habitants qui se sentent impliqués dans l’élaboration de la ville de demain. Les démarches alternatives qu’ils mettent en place ne constituent pas nécessairement des solutions économiques ou écologiques, mais tendent à poser la question du bien commun. Cette notion nous renvoie à une autre vision du développement durable, non pas basé sur des normes globales applicables partout et nul part, mais plutôt sur une durabilité des relations, une durabilité des ressources par leur réemplois, une durabilité des espaces libres par la présence d’espaces vides.

Le travail des interstices n’est pas prés de finir, la ville écosystème en mouvement permanent n’aura de cesse de créer des espaces délaissés, sans fonction et c’est le travail de tout concepteurs de la ville comme simple usagers des rues, d’intervenir de conquérir ces espaces de leur donner vie. « Quelqu’un marche : il fait une rue, elle est encore virtuelle mais il suffit d’emballer son agissement par des façades et elle existe visiblement. Ce piéton s’arrête devant un autre piéton qui vient à sa rencontre : il fait une place publique. Il suffit de les protéger pas d’autres éléments bâtis et elle existe aussi. (...) C’est donc l’habitant qui fait la ville : ni les ingénieurs, ni les architectes. »1 D’autres espaces constituent les eldorados de demain, les grandes friches représentant, aujourd’hui, des espaces de spéculation intégrés au mécanisme de la ville, nos regards se tournent ailleurs. Des regards d’abord tournés vers l’espace public, les ‘‘rez-de-chaussée de la ville’’, il doit aujourd’hui continuer sa route dans les entrailles les plus profondes. La conquête n’est pas finie, qu’il s’agisse de stratégie ou de tactique nous devons reconquérir les logements vacants, les tours désaffectées, mais aussi nos couloirs, nos halls, la régénération est là dernière notre porte. Il ne tient qu’à nous de saisir ces espaces du quotidien, 1

Lucien Kroll, Bio psycho socioschizo, Schizophrénies Urbaines.

67 CONCLUSION

Nous avons pu analyser des interventions de grandes envergures telles que les friches culturelles, d’autre plus infimes avec les chantiers participatifs des collectifs pluridisciplinaires, et enfin des mico-interventions réalisées par des usagers anonymes. Pourtant malgré les différences d’échelles chacune façonne la ville, mais celles qui ont et qui auront sans doute le plus d’impact sont les micro-interventions conquises par les usagers eux même sur un territoire public qui est indéniablement le leur.


ces appartements vides de voisins, ces immeubles publics abandonnés. C’est en travaillant de l’intérieur que nous donnerons de l’épaisseur à la ville, d’un simple rez-de-chaussée nous pouvons espérer des duplex, des étages, des toits qui décuplerons le paysage urbain et ces relations physiques et cognitives. La ville n’est pas constituée que de hauteurs, elle possède aussi des souterrains des espaces souvent très techniques où nous avons peu notre place et qui pourtant représente tant de potentiel. Réinvestissons les quais de métro abandonnés, les espaces de stockage, les parkings souterrains, les anciennes mines. Ces espaces en suspension où le temps ne semble pas avoir d’importance peuvent être de vrais «viviés» de culture. L’histoire ne dément pas, ces lieux souterrains on toujours été féconds de culture forte, des clubs de jazz américain, au garage londonien la culture underground teinte nos sociétés. Se sont aussi des espaces patrimoniaux qui portent des histoires fortes sur notre société et son rapport à la terre.

68

Bien plus qu’une énumération des possibles délaissés actuels et futurs, la problématique de ce mémoire réside dans le fait que nos rues et nos espaces publics et privés ne sont plus symbole de vie et d’interaction. Le fait est que la conception ‘‘classique’’ de la ville passe par des demandes publiques, des instances administratives lesquelles sont régies par des normes, des règles, des places d’urbanisme ... Toutes ces normes, souvent globalisées, stérilisent nos rues, les villes se retrouvent lisses, abordant un visage identique du nord au sud. Bien sur il y a la de l’exagération, quelques détails de façades subsistent encore, mais derrière toutes ces règles faites pour mieux vivre ensemble il y a une paupérisation des relations, des interactions. La ville devient alors un espace prévisible, où l’inattendu, le local est relayé en seconde main dans les espaces marginaux. Ce mémoire essaye de relayer une prise de conscience de cet état de la ville contemporaine. Il s’agit d’inverser la tendance, de redonner sa place à l’habitant, l’usager pour qu’il puisse façonner une ville à son image, entre local et global. « L’architecte - le maçon - l’occupant sont une trinité comme Dieu le Père - le Fils - le Saint Esprit. Considérez la ressemblance, la quasi identité des trinités. Si l’unité architecte - maçon - occupant disparaît, il n’y a pas d’architecture. » Les différentes interventions alternatives que nous avons pu énumérer doivent nous ouvrir les yeux sur d’autres façons de concevoir notre environnement urbain. Nous nous devons en tant que professionnel, architecte, urbaniste, paysagiste, élu, laisser plus de place a la concertation, à l’histoire locale, mais surtout aux habitants, aux usagers constructeurs. Nous devons nous interroger nous même sur nos besoins, redescendre dans les rues et investir des espaces. Et si notre métier doit évoluer pour contourner les normes et les règles alors saisissons cette l’occasion de bâtir une ville plus hétérogène en adéquation avec ces habitants. La synthèse pourrait être le mot échange. L’échange 2 Hundertwasser, manifeste de la moisissure contre le rationalisme dans l’architecture 1958, Hundertwassser Architecture, p 34


et la concertation entre professionnel, élu, habitants, propriétaire, squatter ... Mais surtout l’échange de compétences, de savoirs, d’expérience, de culture, de vécu... Un échange qui peut et qui sera bénéfique dans le renouvellement urbain, aussi bien au niveau de sa conception basique, ou par l’architecture vernaculaire symbole des réseaux alternatifs.

69 CONCLUSION


BIBLIOGRAPHIE

Ouvrages - BOUCHAIN Patrick, Histoire de Construire, Ed Actes Sud, Arles, 2012 - CLEMENT Gilles, Jardins, paysage et génie naturel, Ed Fayard, Domont, 2012

70

- DE CERTEAU Michel, L’invention du quotidien, 1. Arts de faire, Ed Folio, Trebaseleghe, 2012 - D’ARIENZO.R / YOUNÈS.C, Recycler l’urbain, Ed MetisPresses, Italie, 2014 - LA PASSE DU VENT, îlots artistiques urbains, Grenoble, 2002 - KAHN.F / LEXTRAIT.F, Nouveaux territoires de l’art, Ed sujet-objet, Paris , 2005 - MASBOUNGI Ariella, Penser la ville par l’art contemporain, Ed de la Vilette, Paris, 2004 - PANERAI.P / DEPAUL.JC / DEMORGON.M, Analyse urbaine, Ed Parenthèses, Marseille, 2012 - SOULIER Nicolas, Reconquérir les rues, Ed Ulmer, Paris, 2012 - TASCHEN Angelika, Hundertwasser Architecture, Ed Taschen, Paris, 2011

Travaux d’étudiants - BAZIN Marie Laure, Escapades urbaines, Mémoire de fin d’études, ENSAG, 2003 - OMARI Jilbril, Des nouvelles urbanités, Mémoire de fin d’études, ENSAB, 2012 - LEMARIÉ Matthieu, A l’abordage des délaissés !, Mémoire Master 1, ENSAG, 2014 -THIÉNOT Amélie, Les friches artistiques, Mémoire de fin d’études, 2003


Articles - SERRA Lise, « Villes, territoires, réversibilité : pas à pas », 2010, article publié dans SCHERRER Franck, VANIER Martin (2013), Villes, territoires réversibilité, Paris, Hermann, p. 11-23

Articles numériques - Les friches culturelles sont un acte de reconquête du territoire - Françoise Lucchini, par Hélène Girard, 2012, http://www.lagazettedescommunes.com/

rubriques/france/

- NICOLAS-LE STRAT Pascal, l’expérience d’ ECObox, Notes et Études n°4 Juillet 2004 ISCRA, www.iscra.org

71

- THORION Ghyslaine, Espaces en friche, des lieux dédiés à l’expérimentation et à la création culturelle, Communication et organisation, 19 juin 2012, http://communicayionorganisation.revues.org/3280

BIBLIOGRAPHIE

Conférences audio - Les disputes d’AgroParisTech : quels services rendus à la ville ? http://www.agroparistech.fr/podcast/Les-disputes-d-AgroParisTech-quels-services-rendus-a-la-ville.html

Documents vidéo - Atelier d’Architecture Autogérée, Au rez-de-chaussée de la ville, DVD, 34’, Ed AAA, 2005

Interview - MICHEL Geoffrey, LA FUITE, interview réalisée à Grenoble le 20 juin 2015.



LA VILLE RESSOURCE, mémoires 2014.2015 - «Les Nouveaux Eldorados Urbains», Valentin Poirson - «La crise, une opportunité de réinventer le métier d’architecte ?», Justine Guyard - «Transmettre l’architecture en milieu scolaire, une démarche transversale», Mélody Burté -»Territoires d’adultes, territoires d’enfants», Alice Meybeck - «Villes et industries du cinéma, des évolutions complémentaires», Caroline Renaud - «Le déjà-là, une trace du passé et un support physique pour les projets d’avenir», Marystelle Coq - «Décors d’agriculture, Des corps d’agriculture», Danil Vadsaria - «Mutation des quartiers-gares, d’un lieu de passage à un lieu de vie», Walid Belamri - «Le périurbain, un territoire d’action: l’architecte face au patrimoine périurbain», Antoine Baudy - «L’interstice en milieu urbain dense, un potentiel de régénération sociale et culturelle», Jordan Barnaud - «L’Urbanité du temps libre», Kévin Mallejac - «L’effet Bilbao, une réalité sur un piédestal», Camille Aze - «Vie étudiante et implantation universitaire», Colin Mickey - «Les stratégies ferroviaires dans la requalification urbaine», Mathieu Cardinal - «Cœur de village, cœur de vie», Elaine Sanchez - «La reconversion et la redynamisation des friches industrielles intra-muros à des fins culturelles», Lola Duval - «Des architectes aux parcours riches et variés», Siham El Kanaoui - «Postures d’architectes et démarche participative», Pauline Dutraive - «Field-recording et migrations architecturales», Jérémie Faivre - «La mixité programmatique entre usages et paysages urbains», Quynh Nguyen - «Le jardin domestique: De l’espace individuel fantasmé aux «Do-Tank» contemporains», Quentin Guillaud - «Commerces urbains, évolution des places marchandes dans la ville», Hugo Chevalier


« LES NOUVEAUX ELDORADOS URBAINS » En passant par les friches culturelles, les collectifs nomades, jusqu’au quartiers de contre-culture, ce mémoire se confronte aux processus alternatifs qui fabriquent la ville contemporaine. Nous aborderons les stratégies et les tactiques utilisées par les usagers pour concevoir des espaces alternatifs, en dehors des champs institutionnels établis. Des espaces de libertés souvent conquis sur les délaissés urbains où la notion même d’occupation se transforme en acte politique et architectural. Une histoire d’usagers guerriers à la conquête d’espace-temps pouvant façonner la ville de demain.

Juin 2015 . Ecole Nationnale Supérieure d’Architecture de Grenoble


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.