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MS-13, Barrio-18, et Covid-19

MS-13, Barrio-18, et Covid-19 : un cocktail dangereux pour les jeunes vulnérables au Salvador

Au Salvador, les jeunes, surtout les plus pauvres, grandissent dans des circonstances difficiles. L’attrait des gangs violents n’est jamais loin car c’est un moyen rapide de gagner de l’argent, pour eux ou pour leur famille. L’éducation est un élément crucial pour offrir à ces jeunes une perspective différente, loin de la criminalité. Malheureusement, le chemin pour se rendre à l’école ou à un stage en entreprise reste souvent dangereux vu la présence de ces gangs. Pour nous, c’est difficile à imaginer, mais pour les jeunes du Salvador, c’est malheureusement la réalité quotidienne.

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Le Salvador est un pays souvent oublié d’Amérique centrale, peut-être à cause de sa petite taille (une superficie d’un tiers de celle de la Belgique, pour 6,4 millions d’habitants). Pourtant, la nature au Salvador est luxuriante et les paysages magnifiques entre océan, montagnes, volcans et villages de campagnes. Quant à la capitale, San Salvador, on y parle business tout en écoutant du reggaeton (musique populaire latino) et en mangeant des pupusas (galettes de maïs frites fourrées de fromage, légumes et de viande) préparées avec agilité par les vendeuses de rue.

Pourtant, malgré ses paysages et son climat agréable, le Salvador reste peu fréquenté par les touristes et plus d’un quart des Salvadoriens vivent en dehors de leur pays, principalement aux États-Unis. Pourquoi, vous demandez-vous ?

C’est en grande partie dû à l’histoire violente du pays dont un épisode récent fut la guerre civile qui ensanglanta le Salvador de 1972 à 1992 et le changea profondément. C’est également dû à la forte présence des maras (gangs criminels) qui, aujourd’hui encore, sèment la terreur parmi les habitants. Les deux gangs les plus puissants, la mara salvatrucha (MS-13) et Barrio

Une élève avec son enseignante lors de la cérémonie de remise des diplômes

18, contrôlent les deux tiers des communes du pays. Les maras déterminent là où les habitants peuvent vivre ou travailler. Avec leurs méthodes faites d’intimidation, d’extorsion et de violence, ils poussent ceux qui en ont la possibilité à fuir le pays, laissant ainsi les plus

Des jeunes pendant un cours pratique

Jennifer à une foire commerciale avec ses produits

« Jennifer a étudié le stylisme dans l’école de formation San José. Mère célibataire issue d’un milieu très pauvre, sa vie n’a pas toujours été facile. Grâce à la formation qu’elle a pu suivre, ainsi qu’aux cours supplémentaires en estime de soi, entreprenariat et autres compétences de vie, elle a évolué en tant que personne au point de monter sa propre entreprise de stylisme. Désormais, c’est en tant qu’entrepreneuse qu’elle s’épanouit et subvient – enfin – aux besoins de sa famille. »

« Pedro se forme en supervision de production des entreprises industrielles à l’école de formation Ricaldone. Il est le second de neuf frères et sœurs et vit en zone rurale. Son père est vendeur de journaux ambulant. Sa mère possède un petit magasin et s’occupe de la maison. Malheureusement, tous deux peinent à couvrir ainsi tous les besoins de la famille. Avant de commencer sa formation, Pedro faisait des petits boulots de couture et de menuiserie le week-end pour soutenir ses parents. Maintenant, l’école lui donne une allocation pour le transport et l’alimentation. Il va ainsi pouvoir terminer sa formation. Il espère trouver un travail bien rémunéré pour sortir sa famille de la pauvreté et montrer l’exemple à ses frères et sœurs. »

pauvres dans la crainte constante d’être visés ou de voir leurs enfants recrutés par ces gangs. Depuis des décennies, les gouvernements successifs ont essayé de faire face au problème sans jamais réussir à l’éradiquer. Le président actuel Nayib Bukele a pris des mesures plus radicales, comme la coupure des antennes téléphoniques autour des prisons, mais il est trop tôt pour savoir si cela portera ses fruits. Pour l’instant encore, selon les rapports de l’ONU, le Salvador reste le pays avec le taux d’homicide le plus élevé au monde.

Ce danger des gangs, déjà si grand, est encore renforcé en ce moment, alors que le pays est en quarantaine stricte suite à la pandémie du Covid-19. Ce sont en effet les personnes les plus pauvres, notamment les familles des élèves de nos écoles, qui sont les plus affectées. En effet, la quarantaine imposée ne leur permet pas de sortir pour gagner l’argent nécessaire à nourrir leurs familles. La tentation de rejoindre les maras et leur argent criminel est donc encore plus grande pour ces enfants qui, pour certains, veulent juste aider leurs parents. Il nous faut donc redoubler d’efforts pour encourager les jeunes à garder espoir et leur proposer des alternatives de subsistance.

Au Salvador, VIA Don Bosco soutient trois écoles de formation technique et professionnelle et quatre bureaux d’emploi, dont un à Soyapango, une municipalité particulièrement dangereuse. Les écoles aident les jeunes les plus vulnérables en leur offrant des formations techniques de haute qualité, un accompagnement à l’emploi personnalisé, ainsi que des aides alimentaires ou de transport si nécessaire. Les écoles investissent particulièrement dans les compétences psychosociales de leur personnel pour qu’il puisse faire un suivi sur mesure des jeunes les plus vulnérables. Elles mettent également en œuvre des stratégies pour combattre les stéréotypes des employeurs sur certains quartiers dits « malfamés » ou sur les filles. Ainsi, elles s’assurent que tous les jeunes trouvent un emploi digne dans la filière de leur choix.

Les élèves des écoles Don Bosco sont particulièrement appréciés par les entreprises car ils ont également reçu une formation en habilidades blandas. Ces « compétences de vie » comme la politesse, le respect, l’honnêteté ou la ponctualité sont autant d’éléments-clés pour être non seulement de bons travailleurs mais aussi de bons citoyens. Grâce aux écoles soutenues par VIA Don Bosco, des milliers de filles et de garçons au Salvador peuvent rêver d’un meilleur avenir pour eux-mêmes et pour leurs familles grâce à un emploi digne, loin de la violence et de la criminalité. //

Laura VINCX

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