William BRINDEL
UN ÉLAN SÉDIMENTAIRE ENSP Versailles année 2015 / 2018 Projet de Fin d’Etudes DEP 3 RISQUES
BANGKOK - Thaïlande
encadrant Buno TANANT
SOMMAIRE Posture du corps devant le risque.
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Quels risques ?
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Rapporter le site.
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A l’échelle d’un Pays.
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Aléas et forces.
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La crise des inondations de 2011.
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Habiter jusqu’alors le liquide.
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Réponses aux risques.
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Vers le projet, un urbanisme territorial 66
Conclusion 94
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AVANT PROPOS
Au sein du groupe risque qui réunit plusieurs Projets de Fin d’Etude. J’ai choisi comme posture au projet, de mettre mon propre corps à l’épreuve. Partir à l’inconnu, et se laisser guider par l’aléa. Le projet peut naître du risque et de la découverte. Ce dernier est un concept qui n’existe qu’en vis à vis de l’humain, il conjure variabilité et vulnérabilité. Un être vivant dans une situation de difficulté exprime parfois l’extrasensorialité. J’ai parfois ressenti cette force naître durant quelques voyages. Lorsque personne autour de vous ne parle vos langues, quand le climat vous impose de ne pas sortir ou que la pollution vous empêche de voir à 10km. Ce sont ces moments que paradoxalement je recherche, pour alimenter mes réflexions et propositions. Cela passe par l’expérience physique et mentale du corps. Etre hardi
Cette plaquette est le récit d’un cheminement. Tous les documents présents sont de ma main sauf mention du cas contraire.
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INTRODUCTION
Je suis saisi par les formes que prennent les villes en fonction de leur environnement. C’est ce qui pour moi constitue une partie de l’identité de celles-ci, aux cotés de la culture, l’histoire et beaucoup d’autres attributs. Pour mon diplôme de paysage au sein du groupe risque. Je souhaite orienter mon travail sur d’une, la lecture d’aléas d’un territoire. Puis sur le risque qui apparait quand une variable qu’elle soit climatique ou autre, menace l’habitat de l’Homme. Le risque et sa résilience sont nous le verrons moteurs à des façons d’habiter le territoire. Ils sont aussi catalyseurs de projets de paysage. Aussi l’imaginaire qui en émerge. Comment l’énergie face au risque peut elle générer une nouvelle façon de produire de la ville. J’ai été intéressé par les schémas de cité jardin d’Ebenezer Howard. Ou encore par le prix d’urbanisme de Michel Desvigne en 2001 sur le Paysage zéro. Qui sont des actions inversées, en concevant le paysage en même temps et ou avant la ville. Ces idéologies ne peuvent elles pas dans le cas de villes à risque, aider à concilier l’habitat d’un territoire et aléas environnementaux ?
Vancouver, Canada
INONDATIO
GÉNÈSE
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Nos villes dans leur environnement. Mais quelles villes et quels paysages ? Je vais
partir de la notion de risque, quels sont les aléas qui touchent le plus d’âmes. Quels sont les villes qui ont le plus mutés, pour habiter un territoire variable. Rapidement après quelques recherches. Le littoral semble pour certaines villes être le théâtre de changements constants. De grandes surfaces affectées et de grandes densités de population, au contact d’un aléa liquide. Aujourd’hui le niveau moyen de la mer monte. Les traits de côte sont repoussés, parfois jusqu’à la ville. Cette hausse affecte bien plus de villes que je ne le pensais. D’autant plus que beaucoup de ces villes sur des deltas sont victimes d’un
autre
phénomène.
La
subsidence.
Un tassement du sol due à une masse des infrastructures urbaines de plus en plus lourdes et un pompage des nappes excessif. L’étude de Robert J. Nicholls (University SouthHampton) démontre que 136 villes côtières du monde qui dépassent le million d’habitants sont menacées par le cumul de la subsidence et des inondations. Soit un chiffre affolant de 400 millions de personnes concernées. Peut on considérer un tel chiffre de réfugiés climatiques ? Une grande part à l’échelle mondiale proviendra de ces villes.
SU
ON
UBSIDENCE
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Carte des 136 villes de plus d’un million d’habitants touchées par les évènements cumulées de la subsidence et des inondations
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9 exemples de villes actuelles concernées par le phénomène de subsidence et de hausse du niveau des océans. Source : Geology.com de gauche à droite : Tianjin : Chine Sydney : Australie Osaka : Japon Vancouver : Canada Bangkok : Thailande Mumbai : Inde Istanbul : Turquie Manila : Philippines Shanghai : Chine
DELTA 11
Comme
l’explique
James
Syvitski
:
Océanographe de l’Université de Colorado Boulder. Les villes aujourd’hui sur nos deltas
sont une évolution bien différente de notre façon d’habiter autrefois ces terres. Les deltas sont
des lieux agréables pour l’Homme, ils sont les berceaux de notre civilisation. Fournissant des
sols organiques très riches pour l’agriculture, ils sont au croisement du transport maritime et fluvial. De plus la planéité s’étend parfois à des kilomètres ce qui facilitera les constructions de nos villes. Cependant l’activité humaine
croit et le pompage de l’eau souterraine à lui aussi augmenté. Les constructions récentes sur ces sols meubles conjurant notamment l’usage du béton alourdissent nos villes et les font s’enfoncer. Aussi ce phénomène de subsidence rend encore plus vulnérable ces villes aux inondations. Enfin l’activité humaine ne s’est pas limitée aux côtes puisque pour des raisons économiques les fleuves ont reçu la construction de barrages bloquants les sédiments. Les deltas ne reçoivent donc plus les sédiments des fleuves encourageant là encore le retrait du trait de côte. Des villes ont déjà dans le passé disparu dans l’eau, mais ceci étant majoritairement dues à des bradyseismes qui liquéfient le sable et font s’effondrer la ville.
Ruines soumarines de Baïe (Italie) 1er siècle avant JC qui subit un bradyséisme qui fit s’effondrer la ville. autres cas : Héracléion non loin d’Alexandrie, Canope également en Egypte (IVème siècle après JC), Pavlopetri (Grèce) 5000ans, Yonaguni-jima (Japon) entre 2000 et 5000 ans, Atlit-Yam (Israël) datant de -6900 à -6300 ans avant J.C, Port-Royal (Jamaïque) 1692.
DE LA CARTE AU SITE
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Notre civilisation doit dans certaines de ses villes notamment sur les deltas remettre en cause son schéma de développement, car il conduit vers un cul de sac. Soyons clair, c’est bien l’homme au départ qui génère sont propre désastre. Mais il faudrait qu’il habite en connaissance de cause et change avec
son
environnement.
Ceci
serait
une
première
action
de
résilience.
Comment en tant que paysagiste je projette un travail de ces enjeux avec une société. Tout d’abord je dois mentionner comme le montre mes références en amont. Des chercheurs, ingénieurs, architectes, climatologues et hydrauliciens pour ne citer qu’eux travaillent déjà sur la résilience de notre société au sein des mégalopoles côtières. Là ou je dois mettre le doigt, est sur la transversalité de ces disciplines. Relier entres elles, que cela donnerait il comme projet. Puis, choisir à quelle échelle de travail doit s’effectuer la réflexion. Local ou non je n’écarte aucune possibilité. Enfin et c’est des le départ de ma réflexion, parce que je suis étudiant. J’ai encore le pouvoir de faire des choix critiquables et de prendre parti d’un projet irréalisable. Mais je garde à l’esprit que ce dernier pousse une idée, et jette un jalon ailleurs que d’autre réflexions. Trouvant peut-être un terrain d’entente avec les idées de départ… Comment choisir le site, parmi ce qui parait être pour l’instant une liste de 136 lieux ? Comme mentionné dans mon avant propos, je souhaite expérimenter une posture du projet. Je suis attiré par l’inconnu et vois ce diplôme comme une occasion offerte d’expérimenter autrement une portion de monde qui m’est complètement étrangère. Mais je souhaite aussi que le site s’impose. A la manière d’une commande. Dans les actualités, et suite aux recherches sur les aléas d’inondation et subsidence. La ville de Bangkok en Thaïlande semble être en plein requestionnement.
MER 13 DE CHINE
CHIANG MAI
YA
CHAO PHRA
BANGKOK
MER D’ADAMAN
GOLFE DE THAÏLANDE
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BANGKO
THA
Que connaissez vous de la Thaïlande ? J’en connais à ce stade que très peu et ne dois tout d’abord pas faire l’erreur : Bangkok n’est pas représentatif du pays. La capitale est le relais de la nation au monde, une plateforme qui émane les dernières avancées du pays, et reçoit les effets de la mondialisation. Elle n’a pas toujours été la centralité politique et commerciale. La ville se trouve dans un pays largement cultivé. Encore aujourd’hui 70% des thaïlandais sont agriculteurs. Je m’apprête à découvrir une ville paradoxale. C’est peut-être pour ça que ce fut un immense plaisir que de m’y perdre. Pour comprendre la richesse et la diversité de cette ville, je vous propose tout d’abord une Petite Histoire de la Thaïlande et de Bangkok.
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OK
AÏLANDE
vue vers l’est du 83ème étage du Baiyoke Hotel, Bangkok
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PETITE HISTOIRE DE LA THAÏLANDE ET DE BANGKOK LE « PAYS DES THAÏ » QUE DEPUIS MOINS D’UN MILLÉNAIRE : Avant l’arrivée des peuples thaï depuis le sud de la Chine, il a existé dans la région plusieurs royaumes indianisés successifs ou concurrents, d’ethnie môn, khmère ou malaise. Je vais commencer au XIème siècle. Par la dominance Khmer qui croit en Asie du sudest continentale. Sur les terres de ce qui deviendra la Thaïlande, les chefs de clan thaï de Sukhothaï s’affranchissent de la suzeraineté des Khmers en 1238 et élisent un roi. Le fils de ce roi, Ramkhamhaeng, c’est-à-dire « Rama le Hardi », est connu par une inscription datée de 1292, que les Thaï considèrent comme l’acte fondateur de leur nation. Après sa mort, le pouvoir de Sukhothai a décliné et est devenu sujet du royaume d’Ayutthaya en 1365, qui a dominé la Thaïlande méridionale et centrale jusqu’en 1700.
AYUTTHAYA อยุธยา ET LE SIAM สยาม (1350 - 1767) : Le premier souverain d’Ayutthaya, le roi Ramathibodi I, fonda le le royaume de Siam en 1350 (ancien nom de la Thaïlande) et apporte deux contributions importantes à l’histoire de la Thaïlande : l’établissement et la promotion du bouddhisme theravāda comme religion officielle, pour différencier son royaume du royaume hindou voisin d’Angkor. La compilation du Dharmashastra, un code légal basé sur des sources hindoues et des coutumes thaïes traditionnelles. Le Dharmashastra est demeuré un instrument de la loi thaï jusqu’à la fin du XIXe siècle. Ayutthaya a des contacts avec l’Occident, à commencer par les Portugais au XVIe siècle. Mais jusque dans les années 1800, ce sont ses relations avec les nations voisines comme
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l’Inde et la Chine qui sont primordiales. Ayutthaya contrôle un territoire considérable, allant des royaumes du nord de la péninsule Malaise aux États du nord de la Thaïlande. Néanmoins, les Birmans lancent plusieurs tentatives d’invasion dans les années 1750 et 1760. C’est finalement, en 1767, que les Birmans vont avoir raison de la ville d’Ayutthaya et la conquièrent. La famille royale fuit la ville où le roi meurt marquant la fin de la lignée
Photographie à Ayutthaya au temple de Wat Phra Si Samphet
18 royale d’Ayutthaya. THONBURI ธนบุรี BANGKOK กรุงเทพมหานคร (1769-1932) : Après plus de 400 ans de puissance, en 1767, le royaume Thonburi, sur la rive droite (ouest) de la Chao Phraya (ici en bas à gauche), face à la forteresse française (type Vauban) de Bangkok, au cours du siège de 1688 . les troupes du royaume d’Ayutthaya ont assiégé la forteresse française de Bangkok durant ce siège de 4 mois les Français ont été expulsés du pays par un accord.
d’Ayutthaya est conquis par les armées birmanes, sa capitale incendiée
et
son
territoire
démembré. Le général Taksin parvient à réunifier le Siam à partir de sa nouvelle capitale de Thonburi et se fait proclamer roi en 1769. Thonburi est situé sur la rive droite de la Chao Phraya, elle fut une importante ville de garnison à l’époque du royaume d’Ayutthaya, après la chute de celui-ci devant les Birmans, elle devint brièvement capitale de la Thaïlande. Le roi Rama Ier transféra la capitale à Bangkok sur l’autre rive du fleuve en 1782. Le roi Taskin est dépossédé de son titre, emprisonné et exécuté en 1782. Le général Chakri lui succède cette année, premier roi de la nouvelle dynastie Chakri. La même année, il fonde une nouvelle capitale, Bangkok, sur la rive gauche de la Chao Phraya, en face de Thonburi. Dans les années 1790, les Birmans sont défaits et chassés du Siam. LES RELATIONS OCCIDENTALES « Il y avait là, déjà sous Louis XIV la volonté française de coloniser, sinon du moins de s’implanter au Siam ». Morgan Sportès « Pour la plus grande gloire de Dieu » Après la victoire des Anglais sur le royaume birman d’Ava en 1826. Les héritiers de Rama I s’inquiètent de la menace du colonialisme européen. La première reconnaissance thaïe d’une puissance coloniale dans la région est formalisée par la signature d’un traité d’amitié et de commerce avec le Royaume-Uni en 1826, le traité Burney. C’est pendant les règnes de Mongkut (Rama IV) et de son fils le roi Chulalongkorn (Rama V) que la Thaïlande se rapproche fermement des puissances occidentales. Les Thaï attribuent aux qualités diplomatiques de ces monarques le fait que le Siam est le seul pays d’Asie du Sud-Est à avoir échappé à la colonisation.
19 Progressivement, au xixe siècle, le Siam recule face à deux puissances européennes : le Royaume-Uni et la France. Ces deux puissances grignotent le pays, à la fois territorialement sur ses marges, et dans sa souveraineté. La France, en 1873 et 1883, intervient deux fois pour mettre fin à la piraterie des Pavillons noirs. Le Siam ne pourra empêcher non plus l’annexion en 1888 de 72 cantons par la France. En 1893 le Siam se met en tort et la France ajoute à ses exigences une zone démilitarisée large de 25 km le long de la rive occidentale du Mékong, plus les provinces de Battambang et de Siem Reap. La ville de Chanthaburi (sud est de la baie de bangkok) est occupée par une garnison française. Le 13 février 1904, la France annexe Luang Prabang et Champassak. Du côté anglais, des provinces sont réunies en Birmanie. Le chemin de fer vers Singapour est concédé en exclusivité à une société britannique. Le traité anglo-siamois de 1909 établit la frontière moderne entre le Siam et la Malaisie britannique. Le Siam doit céder à l’Angleterre les états malais de Kedah, Kelantan, Perlis et Terengganu. Une série de traités avec la France a fixé la frontière orientale présente du pays avec le Laos et le Cambodge, le Siam plus tôt avait fait des réclamations et dans une certaine mesure contrôlé ces deux territoires. Au total, le Siam a perdu 456 000 km² durant le règne de Chulalongkorn. Bien que le Siam ne soit pas concerné par la Première Guerre mondiale, le roi Rama VI décide de l’y engager dans l’espoir d’obtenir la fin des traités inégaux. Le pays déclare la guerre à l’Allemagne et à l’Autriche-Hongrie le 22 juillet 1917. Son armée saisit plusieurs navires allemands et un petit corps expéditionnaire est envoyé en Europe. Cette action permet au Siam de figurer parmi les vainqueurs de la guerre au Traité de Versailles et parmi les fondateurs de la Société des Nations.
Territoires perdus par le Siam, 1867-1909 source : Wikimedia Commons
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MONARCHIE ABSOLUE À UNE MONARCHIE CONSTITUTIONNELLE, PENDANT UNE GUERRE MONDIALE Le coup d’État du 24 juin 1932 au Siam est une transition sans effusion de sang d’une monarchie absolue à une monarchie constitutionnelle. Parmi les conspirateurs se trouve le lieutenant-colonel Plaek Pibulsonggram, plus connu sous le nom de Phibun. En 1935, le roi Prajadhipok abdique. Son neveu Ananda Mahidol, un enfant qui suit son éducation en Suisse, est désigné pour lui succéder. En 1940, profitant de l’affaiblissement de la France après la défaite de juin devant les Allemands, la Thaïlande attaque l’Indochine française. La guerre franco-thaïlandaise dure quelques mois, et se conclut par l’annexion de quelques provinces par la Thaïlande, notamment grâce à l’arbitrage de l’Empire du Japon, soucieux de ménager la Thaïlande, en qui l’Empire japonais voit un futur allié pour ses projets de conquête. Le 8 décembre 1941, quelques heures après l’attaque de Pearl Harbor, la 25e armée japonaise envahit le sud de la Malaisie, alors sous protectorat britannique. Le gouvernement thaïlandais ayant tardé à donner l’autorisation de traverser son territoire, le Japon passe en force. Un conflit nait entre Thaïlandais et Japonais, mais un cessezle-feu est décrété le même jour. Constatant l’avancé foudroyante des Japonais dans la Bataille de Malaisie, le gouvernement thaïlandais oublie ses réticences et s’allie avec l’Empire Nippon. En accord avec l’alliance militaire entre la Thaïlande et le Japon signée le 21 décembre 1941, le 25 janvier 1942, la Thaïlande déclare la guerre aux Alliés. Entre temps un coup d’état par le militaire Phibun réussit. Ce dernier change le nom du pays, le Siam devient Prathet Thai, « pays des Thaï » ou Thaïlande. Ce nom sousentendait une unité de tous les peuples de langue thaï, ce qui incluait les Lao du laos et les Shan de Birmanie, mais excluait les Chinois. Une opposition à la dictature politique de Phibun grandit en Thaïlande. Seni Pramoj, ambassadeur de la Thaïlande aux États-Unis, refuse de remettre la déclaration de guerre, et fonde à Washington les Forces Thaïlandaises Libres. La Reine Ramphaiphanni, veuve de l’ancien Roi, anime un gouvernement en exil au Royaume-Uni. Le régent Pridi Banomyong anime secrètement des mouvements anti-japonais. Avec les revers successifs puis la défaite du Japon, Phibun est mis en minorité à l’Assemblée et contraint de démissionner. Le jeune Roi Ananda Mahidol revient en Thaïlande à la fin 1945, après des années d’absence. Mais, le 9 juin 1946, il est retrouvé mort, tué d’une balle. Son frère Bhumibol Adulyadej (Rama IX) lui succède.
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Rama IX, Bhumibol Adulyadej ภูมิพลอดุลยเดช et Son fils Maha Vajiralongkorn Rama X Source : www.nation multimedia.com
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Rama IX, Bhumibol Adulyadej ภูมิพลอดุลยเดช : Né le 5 décembre 1927 à Cambridge (Massachusetts) et mort le 13 octobre 2016 à Bangkok, Il est couronné en 1946 sous le nom dynastique de Rama IX. Il sera roi de Thaïlande jusqu’en 2016. Souverain constitutionnel, il est le chef de l’État et protecteur des religions de Thaïlande. À sa mort, il est le plus ancien chef d’État à avoir exercé, étant resté sur le trône pendant 70 ans, Son fils Maha Vajiralongkorn, désigné en 1972 héritier du trône, lui succède. La grande popularité de Rama IX passait par une omniprésence du roi sur le terrain, faisant réaliser des travaux d’irrigation et de protection pour les populations thaïlandaises de la campagne. Le roi ne partait jamais sans ses cartes et son réflex Canon. Bhumibol Adulyadej passait beaucoup de temps dans une pièce remplie de radios, il était le premier informé d’un évènement en Thaïlande à l’échelle nationale comme locale. (Reportage « Soul of a Nation » BBC) L’histoire de la Thaïlande après guerre a été une suite de transitions difficiles et parfois sanglantes entre le pouvoir militaire et civil. La révolution Thaïlandaise sévit en 1973. En octobre 1973 des manifestations massives ont eu lieu à Bangkok, exigeant la fin du régime militaire. Le général Thanom Kittikachorn a répondu avec force, et jusqu’à 70 manifestants ont été tués dans les rues, du jamais vu en Thaïlande. Cette intervention violente du régime militaire a incité le roi Rama IX à faire sa première intervention dans la politique thaïlandaise en retirant son appui au régime militaire, et le 14 octobre 1973, le général Thanom Kittikachorn a démissionné et a quitté le pays. Les événements d’octobre 1973 se sont révélés une révolution dans la politique thaï. Pour la première fois, la bourgeoisie urbaine, menée par les étudiants, avait défait les forces combinées de la vieille classe régnante et de l’armée et gagné la bénédiction apparente du Roi pour une transition vers la pleine démocratie, symbolisée par une nouvelle constitution qui prévoit une législature entièrement élue. En mai 2014, le pays connaît son 19ème coup d’état depuis l’instauration de la monarchie constitutionnelle en 1932. Enfin, en octobre 2016, Rama X devient le nouveau roi de Thaïlande. Aujourd’hui, depuis la mort, le 13 octobre 2016 de Bhumibol Adulyadej, roi de Thaïlande, un régent occupe le pouvoir, car le prince héritier a demandé un délai. Les pressions des ultraroyalistes se multiplient, ainsi le ministre de la Justice a appelé à « sanctionner socialement » ceux qui critiquent la monarchie ; les partisans de la monarchie vont jusqu’à menacer de mort Aum Neko, militante républicaine, étudiante transsexuelle de 22 ans réfugiée à Paris. Actuellement, la société thaïlandaise est clivée entre les partisans de Yingluck Shinawatra, principalement des riziculteurs et les pauvres, et les élites de Bangkok, dont les généraux sont au pouvoir.
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RAPPORTER LE SITE
En temps incertains pour le gouvernement Thaïlandais, comment ce dernier prend les mesures pour remédier aux risques liés à la capitale ? Nous verrons qu’il importe plus au roi d’incarner l’avancement du pays dans ces réflexions. C’est alors que je pars en Thaïlande pour essayer de comprendre les aléas qui menacent la ville. Je me pose avant de partir la question Le risque ne peut il pas être un vecteur à une stabilité politique. Je vois déjà une qualité en la durée de règne du monarque Thaï, pour le suivi de réflexions d’aménagement à long termes dans l’avancée du Pays.
แม่น้ำ�เจ้า 24
CHAO PHRAYA
าพระยา Je pars sur site le 29 Avril 2018, j’ai pris un hôtel à Pin Klao, à l’ouest de Bangkok. Durant le vol de 13 heures, je continue de penser à comment je vais arpenter cette capitale asiatique. Mon premier contact avec l’Asie. Par quel bout commencer ?
Le parti prit de l’exploration est à partir de la cartographie, articles et images, d’aller
rencontrer les lieux marqués au préalable sur une carte. Des espaces qui m’ont intéressé par leur positionnement par rapport au fleuve, ou encore sur la côte, mais aussi des lieux
historiques qui témoignent d’un rapport traditionnel à l’eau. Vous l’aurez compris mon fil conducteur est l’eau. Elle traverse la ville, et se manifeste sous plusieurs formes et
usages. J’ai suivi le trajet d’une goute de pluie qui tombe dans la ville jusqu’au golfe de
Thaïlande. Un chemin tentaculaire, imaginé à distance du site et s’est avéré un moteur à la découverte sur place. J’ai laissé une part de mon voyage à la curiosité et la découverte.
Me laissant porté par une ruelle qui émane l’odeur de crevettes sautées. Ou je suis une dame qui rentre de son travail. Je monte dans un taxi et demande au chauffeur de m’emmener la ou il fait sa pause déjeuner. Ou encore je me laisse simplement bercer par le calepinage des trottoirs.
Je vous invite à visionner mon récit de voyage, sur Youtube. Un film de 51 minutes, vous emmène avec moi lors de mon arpentage. Ces images ont pour but autant pour mes proches que mes professeurs de donner à voir le site. Puis installer une image commune pour s’approprier le travail qui suit. Rapporter le site : https://youtu.be/kb7g8rhz7GM Durée 51:15 minutes Ainsi sur le papier, ici par l’image fixe, je vais vous donner des extraits de mon arpentage de 10 jours à Bangkok.
l’embouchure de la Chao Phraya, vue de la rive droide
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26
27 Atterri
à
l’aéroport
Suvarnabhumi,
je
de
Bangkok-
survole
pourtant
encore la ville en taxi sur de gigantesques ouvrages. Je n’ai aucun contact avec le sol. Pont, plateforme, parking, viaduc, rampe… Quand j’ai pu descendre de ces ouvrages j’ai remarqué que les piliers des infrastructures s’enfonçaient dans le sol. Déjà une trace de subsidence. En effet Bangkok s’enfonce de 2cm par an. Nous sommes à 2m plus bas que son niveau d’origine. Un projet de paysage peut il alléger la ville ? Le climat tropical a une influence sur la fonction de l’espace public. Ce dernier est vécu toute l’année, et soutient une continuité de vie du tissu urbain à l’échelle de la ville et de son agglomération. L’alimentation se trouve à chaque coin de rue sous forme de petits stands. Il était question quand j’étais sur place que le gouvernement interdise ces commerces de rue. Mais les habitants se nourrissent entre autres de ces stands. Se dresse ainsi une opposition forte des habitants.
Les
commerçants
cuisinent
sur place. Ils se procurent leurs matières premières soit dans les halles de la ville. Ou bien dans leur propre ferme à l’extérieur de l’agglomération. Ainsi je vois des charriots de Durian (fruit), de crevettes ou d’insectes le matin venir se positionner dans les coins de rues pour vendre à l’heure de table. Les commerces continuent tout l’après midi. Ces petits chariots sont une mise en bouche du paysage à l’extérieur de la ville.
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agrandissement d’un klong dans le quartier de Yaowarat
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L’eau transpire au travers la capitale. Entre les êtres en sueur des foules confinées, de la goutte de pluie, au klong (canal), au Chao Phraya puis jusqu’au golfe. Elle est le support du système de transport des bateaux taxis. Mais aussi la décharge qui fait disparaitre les poubelles ménagères. Elle est sous sa forme de fleuve, prestigieuse et centrale. Elle incarne la trachée de la ville. Je
fus
en
traditionnelle.
admiration Les
Wat
sur
l’architecture
(temples)
sont
imprégnés d’histoires et de métaphores. Mais aussi de codes. J’ai eu la chance de visiter certains de ces temples accompagné de trois amis Thaïlandais, étudiants à Bangkok. J’ai notamment été saisi par le dessin de l’architecture pour mettre le corps dans une position précise. Les marches du temple de Wat Arun sont trop raides pour les monter debout, vous devez ramper jusqu’à l’image de Bouddha. Pareil pour la descente, les marches sont si raides que vous ne pouvaient pas tourner le dos à la divinité.
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32
33
Vers quoi tend la capitale thaïlandaise. Parmi des quartiers et une densité bien inférieure à celle de Paris intramuros 5000 en moyenne face à 20 000. Des grattes ciels et de gigantesques ouvrages témoignent d’une mondialisation effrénée. L’architecture perd son apparence traditionnelle, l’usage du bois n’est plus que pour les temples. Le clivage entre les quartiers pauvres et les centres commerciaux disparait peu à peu. La ville s’enrichit et se modernise vite. Je retiendrai un problème récurent. La perte de lecture de la saisonnalité. D’autant plus dans un pays qui ne compte que trois saisons. Malgré que l’eau soit le protagoniste principal dans la ville. Les ouvrages hydrauliques figent celle-ci et ne la tolèrent pas autrement. Alors que dans la campagne l’eau change de place, de statut. Nous restons ici dans des bâtiments climatisés, une ville dans la ville. Celle-ci est séparée de son climat. Ce qui entrainera nous le verrons un décalage dans les réactions au risque…
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Station de BTS Train
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Je me suis éloigné plus au sud de Bangkok pour
verticales dépassent. Je veux parler des poteaux
atteindre la côte et le temple de Wat Kun Samut
électriques, anciens lampadaires des axes de
Chin. Là j’ai pu voir un champ de bataille gagné par
la côte. Servant aujourd’hui de direction pour
l’eau.
les bateaux. Les nombreux essais de digue, ont multiplié les efforts face à l’eau, tige de Bambou,
« Le temple est le dernier symbole de l’avancée du
traverse, poteau de béton, gravas. Témoignent
trait de côte, il se trouve à 200 mètres dans la mer.
massivement d’une volonté pourtant éphémère de
Celle-ci avance sans relâche sur les mangroves.
conserver un statut. »
Ce dernier temple est un pilier, qui se surélève
(Extrait de la vidéo de l’arpentage)
pour faire face à la montée de l’eau. Je vois le rezde-chaussée du temple surélevé, un nouveau
Le paysage binaire, soit l’homme soit l’eau se
plancher à demi étage. C’est une architecture
ressent de plus en plus au sud de la vallée de la
dure dans un paysage mou. Qui tente tant bien
Chao Phraya. J’ai pu voir entre la capitale et la
que mal de s’adapter, avec un coût et une énergie
campagne quelques situations de vie « amphibie
folle, qui force le respect. Est-ce parce que
». Où l’architecture traditionnelle témoigne d’un
c’est un monument religieux qu’il est maintenu
dialogue vertueux avec l’eau et ses fluctuations.
comme tel ? Rien d’autre sur la côte de déploie la
Aujourd’hui ce dialogue n’est il plus nécessaire ?
même énergie. De l’eau devant, à l’est à l’ouest,
Est ce incompatible avec la ville moderne ?
derrière. Je vois enfin le paysage submergé. Linéaire, lisse. D’une quasi-totalité liquide. Qui n’est pas celui de la mer que je connais. Car des
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39
À L’ECHELLE D’UN PAYS 40
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La ville, le sol sont tellement plats que cela en devenait gênant.
Je
cherchais
de
l’altitude. Je n’ai pas cette habitude de tout percevoir à même le sol. Reprenons un peu de hauteur pour commencer l’analyse. La Thaïlande est donc dans l’hémisphère climat
sud.
tropical
Son
comporte
trois saisons : une saison très chaude de mars à la mimai, une saison des pluies déterminée par la mousson de mi-mai à octobre et une saison sèche et relativement fraîche de novembre à février. Sur la côte des mangroves et des palmeraies cernent des élevages de poissons, qui partagent les parcelles d’eau avec de rares rizières à cause du sel.
Plus haut
dans la vallée, les rizières prennent une majeure partie, surviennent
toutefois
des
palmeraies, cocoteraient et des bananeraies. Sur les coteaux se trouvent majoritairement des fruitiers avec des mangues, bananes et du durian.
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0 , 0
25km
01
412KM
43
Bangkok est en aval d’une vallée de 412km aux
multi cours d’eau. Représentant un quart du pays. Le bassin versant d’environ 300 000km2 permet d’imaginer pendant la mousson la masse
%
E
NT E P E D
d’eau qui passe par Bangkok avant de se jeter
dans le golfe de Thaïlande. Le fleuve principal
est la Chao Phraya, qui traverse la ville. Nous retrouvons aux abords de l’agglomération deux
autres fleuves que sont le Tai Chin à l’ouest et le
Bang Pakong à l’est. Le débit moyen de la Chao Phraya à Bangkok est de 800m3/s. Peu me direz vous. En effet c’est un peu plus que la Loire à Saint Nazaire (700m3 /s). Mais toute l’eau de la vallée se partage entre plusieurs autres fleuves
et un réseau de canaux. Puis le débit de chacun Le haut delta comprend une partie vallonnée qui correspond à d’anciens sédiments (delta ancien) avec la plaine d’inondation, ils forment un ensemble de dépressions et de bourrelets de berge. Le bas-delta correspond aux alluvions récents et est extrêmement plat entre 0 et 2 m d’altitude. L’ensemble est entouré de terrasses et des cônes de déjection des affluents latéraux.
augmente considérablement durant la mousson. Lorsque l’on regarde la topographie. Bangkok s’est installée dans un fond de vallée avoisinant les 2 mètres d’altitude. La capitale s’est toutefois positionnées sur une légère butte de 4mètres d’altitude en moyenne. De part et d’autre de la vallée le relief s’élève pour atteindre à l’ouest des sommets de 1400 mètres. A l’est le plateau de Kon Kaen se dessine au dessus de coteaux de 200 mètres. Au nord de la vallée, nous retrouvons
Notons la profondeur du golfe n’est qu’à 15mètres en dessous du niveau de la ville. La différence aussi faible s’explique car la mer a et continue de varier d’altitude.
perchés au pieds des plus hautes montagnes de Thaïlande la ville de Chiang Mai qui compte un peu moins d’un million d’âmes. 700 kilomètres
BASSIN séparent les deux villes. Le sommet le plus haut du Pays est le Doi Inthanon avec ses 2565mètres d’altitude.
Du fait de tant de distances et tant d’écart de richesses entre la seconde plus grande ville de Thaïlande et la capitale. Le pays fait l’objet
d’une centralisation. Lorsque Bangkok est sous embargo lors d’une inondation. C’est le pays qui
se retrouve paralysé dans certains domaines.
(l’agroalimentaire, l’informatique, l’automobile principalement).
44 • Il y a 3 million d’années jusqu’à -20000ans, de grosses fluctuations du niveau des océans ont laissé des traces jusqu’à la période pré glaciaire, le niveau maximum
durant
cette
période
était
d’environ +250mètres.
• Puis vînt la Glaciation. Le niveau des mers diminua. Son pic était à -20000ans et le niveau d’eau était de -130mètres.
• A l’ère de l’holocène le golfe prend une forme comme celle que nous constatons aujourd’hui. Laissant l’ancien delta à 115km au nord. Aujourd’hui le niveau d’eau est en hausse tout comme la période préglaciaire.
FORCES La côte est l’opposition de deux forces. La
terre et la mer. À l’endroit d’un delta, un fleuve rejoint ces forces. Ce dernier dépose
des sédiments à l’embouchure entretenant la
croissance de la terre sur la mer. D’autre part la mer varie. Nous avons vu à notre époque
qu’elle croit. Si l’une de ces forces s’essouffle l’autre prend du terrain.
45 Plusieurs aléas surviennent à l’échelle de cette vallée. Nous avons vu la hausse du niveau moyen d’eau du golfe. Qui vient repousser le trait de côte. Les cours d’eau venant des terres sont
parfois
pendant
la
monumentaux mousson,
En
effet ces derniers collectent cette
masse
d’eau
par
le
bassin versant de la vallée. Puis au milieu se déroule la subsidence, qui augmente les chances de voir l’eau envahir la ville. C’est le cumul de ces trois aléas qui forme des catastrophes comme
les
inondations
à
Bangkok de 2011.
ALÉAS
500 MOR 46
Florence Compa
in, « La Thaïland e à la merci d’un «...Au milieu de coup d’État aqua s inondations tique » monstrueuses l’armée pourra qu i ra va ge nt le pays depu it de nouveau dé is juillet, terminer la traj ectoire politique les errements du gouvernem du ro ya ume. Devant ent de Yingluck l’opposition ré Shinawatra fa clame la déclar ce à la catastro ation de l’état phe, autorité aux gr d’urgence, ce adés.» qui donnerait toute Photos : C
HRISTOP
HE ARCH
AMBAULT
4MILLIARDS DE
RTS
E$
47
Le Soir (Be
lgique), 29
octobre 20 11, p. 17. des habita n ts d u quartier démantelé historique des digues de Bangko d e s a cs de sable k ont Palais, rés qui protég idence des e a ie a n n t c ie le n Grand s rois du S «ma maiso iam depuis n est inond le XVIIIe s ée, mais ta iècle. ce gouvern maison ne ement n’es l’est pas, p t o p u a rq s u c oi ? Si apable de place à d’a gérer la cri utres », s’é se, qu’il la nerve Nan is se la Thiraphat, une comm erçante.» «Mercredi,
48
Ayutthaya
o Ph
Cha raya
49
Source : NASA Earth Observatory
50
Vue aérienne de la Nasa en 2011 (2554
année
Thaïlandaise)
lors
des inondations dans la vallée du Chao Phraya. L’eau a atteint un niveau maximum de 2m53. La durée exceptionnellement longue est là aussi à retenir, puisqu’elle a commencé fin juillet 2011 jusqu’en mi-janvier 2012. 7 mois de paralysie, 2 million de sinistrés. On constate également sur cette vue le Mékong au Cambodge qui inonda Phnom Penh. Notons que l’écart entre ces inondations n’est pas long. Il se resserre : 1996 1996 2002 2007
: : : :
2,27 2,14 2,10 2,22
mètres mètres mètres mètres
d’eau d’eau d’eau d’eau
2008 2009 2010 2011
: : : :
2,17 1,85 2,10 2,53
mètres mètres mètres mètres
Pourquoi cet épisode a t-il durée aussi longtemps ? Pourquoi autant de morts et dégâts alors que les inondations sont fréquentes dans la vallée ?
7 MOIS
Il faut se reporter sur le schéma des aléas p49. Ces derniers sont au nombre de trois. La pluie des moussons qui vient des terres, a rejoint en juillet 2011 un golfe à fort coefficient de marée. Puis la ville n’a jamais été aussi basse, son niveau continue de descendre. Ce qui fait que 30cm d’eau en plus que celle de 2007 a un impact considérable sur une surface aussi plane. 2011
a
également
un
élément
déclencheur. Contrôlé par l’homme…
d’eau d’eau d’eau d’eau
La Thaïlande possède une vingtaine de grands barrages. On constate en reportant les 8 plus en aval de la vallée, une perpendiculaire qui bloque l’écoulement des sédiments. En effet si le trait de côte recule c’est aussi car il n’y a plus autant de matériaux déposés par les cours d’eau à cause des barrages. Ces derniers sont à 2 tiers de leur capacité initiale du fait d’une accumulation sédimentaire dans les réservoirs. Les barrages ne pouvant contenir autant que prévu initialement, l’eau se déverse et alimente le drame de 2011. Maintenant Si nous reportons l’emprise des inondations de 2011 sur la carte topographique de la vallée, nous constatons que l’eau recouvre parfaitement une couche géologique. Les dépôts côtiers. C’est en effet normal puisque les dépôts proviennent de l’eau du golfe qui nous l’avons vu durant la période préglaciaire sa hauteur fluctuaient sur les terres de la vallée. L’eau suit de nouveau une topographie qu’elle a forgée autrefois.En blanc texturé, représente jusqu’où la salinité pénètre les terres durant les inondations. Autre enjeux vis-à-vis de la consommation d’eau douce par l’Homme et ses cultures. Il faut bien comprendre que ce fond de vallée est et sera inondé. Quoi qu’il se décide par l’homme. L’eau passera par ce point bas. Les barrages sont une manière de décanter l’eau plus doucement dans la vallée et de la distribuer lors de la saison sèche. Mais des lors que trop d’eau arrive par la mousson. Ces derniers sont inefficaces voir dangereux. Retenons l’exemple au Laos le 24 juillet 2018, exemple de barrage ayant cédé. Afin d’éviter une accumulation sédimentaire dans les turbines et les réservoirs. Il faut exploiter la rivière au niveau des barrages au plus proche que possible des conditions naturelles durant la période des crues et d’éviter ainsi la plus grande part de la sédimentation des turbines. La vallée recevra aussi plus d’eau palliant au zones sèches provoquées entre autre par les barrages.
51
Un khlong au pied du Wat Saket 1890
52
HABITER LE LIQUIDEJ’USQU’ICI
On observe un canal large qui vient jusqu’au pied des maisons sur pilotis. Il n’y a pas de routes. Le klong est la route.
Mai 2018 Cette fois vue du temple lui même sur le nord du quartier de Banglamphu
Je suis allé à ce temple. Wat Saket se trouve dans une partie historique de la ville mais pas des moins changée. Les routes ont pris le dessus. Les maisons sont maintenant des résidences en dur aux abords direct du canal. Ce dernier ne peut peut plus déborder en dessous des maisons comme autrefois. Son expansion lui fut ôtée. temple de Wat Arun
On ne retrouve que la forme de fourche. Et non plus l’épaisseur et la vie d’autrefois sur le canal.
Alors plus d’eau dans la vallée en laissant les barrages ouverts lors de la mousson. Ce n’est pas ce que tous les Thaïlandais veulent. Pourtant les barrages n’ont pas toujours été là. Bangkok s’est installé sur un delta, une étendue plate gorgée d’eau qui comportait des marais, mangroves et lagons. Pour assainir et installer le village d’origine au 14ème siècle les habitants ont creusé des Klongs (canaux) afin de guider l’eau et révéler des parcelles cultivables et habitables. Ces ouvrages fait de terre et de bois guidaient l’eau. Sans la contraindre. Les canaux étaient plus comme de gigantesques fossés. La terre creusée était étendue autour. Et servaient de socle pour les maisons sur pilotis, donnant
Block diagramme représentant les trois couches principales de l’action de l’homme sur la surface de la vallée. Les canaux, les routes et l’urbanisation.
53
je souhaitais mettre les canaux en dessous des routes, dans cette représentation. Mais cette couche est tellement plus imposante que l’on ne remarquait plus les canaux en dessous.
directement sur les klongs. C’est par la suite grâce à ces canaux que la ville s’est
tissu urbain construite.
réseau de klongs
Le tissu de klongs s’étend dans tout le fond de la vallée sur la géologique de dépôts côtiers
réseau routier couche justement.
En 1970 les routes sont venues combler certains canaux pour laisser place à la voiture. Des zones industrielles se sont construites dans des zones humides. C’est une construction dure dans un paysage liquide. Les canaux aujourd’hui toujours présents en nombres laissent imaginer l’ampleur de la quantité de ceux-ci avant les années 70.
DÉBORDE 54
Les arbres disparaissent peu à peu dans la vallée. Les mangroves indigènes, comme
les plantations des cultivateurs Thaïlandais. Les racines des arbres agissaient dans la vallée comme des filets à sédiments. Couplées de leurs feuilles qui se décomposaient,
les sols s’enrichissaient. Quand à l’eau elle traversait donc des surfaces la retenant
davantage. Une partie même ne sortait jamais de la parcelle, l’eau était absorbée. A la différence des rizières ou des bassins d’élevage majoritaires aujourd’hui, qui sont des surfaces totalement imperméables.
Il faut se rappeler La cité d’Angkor. Qui a « su » domestiquer l’eau à l’échelle d’une ville.
La civilisation khmère avait appris l’art d’apprivoiser les déluges saisonniers de l’Asie du Sud-Est, en stockant l’eau dans d’immenses bassins appelés baray, pour éviter les inondations et la restituer en période de sécheresse. Mais elle perdit le contrôle de l’eau, la plus vitale des ressources, entraînant ainsi son déclin. Les Baray décantait l’eau. Pourtant les arbres autour de la cité jouaient le même rôle, et ralentissaient l’eau. Au fur et à mesure du développement de la cité, les arbres du territoire furent coupés pour les constructions. Par ce qu’elle ne replantait pas, peu à peu la cité devait traiter de plus grands volumes d’eau. Son système hydraulique n’était plus proportionné à la tache. Les Thaïlandais ont à Ayutthaya usés de techniques similaires. Les bassins remplissaient les mêmes fonctions. Angkor a bien sûr influencé à cette époque. Cependant la cité Thaïlandaise n’est pas arrivée à l’essoufflement comme au Cambodge. Mais a brulé en guerre. La Thaïlande n’a donc pas son propre contre exemple. Baray : un vaste quadrilatère de digues pouvant atteindre des dimensions considérables. Le baray occidental mesure ainsi 8 km de long et 2,2 km de large soit 1760ha pour une profondeur d’environ 4m il contient 70millions de m3 d’eau Le baray oriental : 7150m / 1740m soit 1244ha avec une profondeur d’environ 4m : un
RETENIR volume de 50 million de m3 d’eau.
Pour comparaison le grand canal de Versailles représenta une superficie de 22ha, il fait 1,8km par 67m de large pour une profondeur de 2m soit 44 000m3 d’eau
Nous constatons deux types de canaux ceux dans le sens d’écoulement de l’eau dans la vallée (nord sud, vertical) et perpendiculaire à l’écoulement (est ouest, horizontal).
Notons que les trames ont varié selon l’époque. Il existe de nombreuses typologies de canaux. Nous retiendrons que les canaux majeurs sont ceux dans le sens d’écoulement
des eaux, et que les canaux secondaires sont perpendiculaires, à quelques exceptions près. Il est impressionnant de pouvoir traverser en bateau la vallée d’est en ouest et de relier les trois fleuves.
ER
R
55
Tha Chin
Chao Phraya Bang Pakong
56
40km
En orange , Paris intramuraus.
Bangkok au plus dense est à 6000hab/km2 face à 20 000 hab/km2 pour Paris Intramuraus. Les canaux sont menacés par l’urbanisation. A quelle vitesse Bangkok croit elle ? Voici sur 30 ans l’expansion urbaine de la capitale. Celle-ci a triplé de surface. On constate un urbanisme en doigt de gant, qui s’étend le long de lignes. Ces axes sont des routes, des canaux et le train aérien (BTS). Les autres villes à proximités à l’est ou à l’ouest sont peu à peu ingérés par ses doigts tentaculaires. La ville s’étire au point d’obstruer la vallée. Car elle comble des canaux, elle réduit l’écoulement de l’eau venant du nord et empêche
AMPHIBIE les inondations de se drainer rapidement comme en 2011.
L’architecture traditionnelle en bois et les maisons sur pilotis ne permettent pas de loger plusieurs familles. Bangkok prend encore plus de hauteur avec des immeubles de pleins pied. Pourtant il arrive en cherchant un peu de tomber sur les bords de la Chao Phraya sur des quartiers encore sur pilotis.
Une mégalopole qui fonctionne en équilibre entre voitures, et bateaux ? Et bien oui et
non. Car le réseau de canaux est le plus complet qu’il me fut donné de voir il est en effet employé pour des déplacements quotidiens et le transport de marchandise. La nourriture
arrive de l’extérieur de la ville par ces canaux et rejoint
1985
57
les halles. Mais la direction de la ville est moderne. La définition de moderne est un refus du passé. Les taxis, les scooters et les tuc tuc forment un système de transport des plus performants et rapide. Mais on peut se poser la question de leur nécessité quand le trafic fluvial ne 10km
subit ni bouchons et est nettement moins couteux que le BTS train (train aérien). Un
élément
de
réponse
2000
serait que les ilots urbains sont devenus de plus en plus grands en comblant les canaux. Et que ces derniers n’emmènent désormais plus au plus près de la destination. Le scooter apparaît comme le moyen de transport par excellence.
Il
permet
de
circuler aisément dans la ville
10km
moderne comme les quartiers plus sinueux. Jusque sur les pontons des maisons sur pilotis. Le scooter est un
E
2015
véhicule qui témoigne bien de la multiplicité des formes urbaines et et polyvalence nécessaire à la mobilité. Faut il réfuter l’architecture traditionnelle, n’a-t-elle pas sa place au sein de la ville moderne ? 10km
58 L’architecture
sur
pilotis
peut permettre à la ville de continuer de s’étendre sans réduire les surfaces ou l’eau fluctue.
59
RÉPONSES AUX RISQUES
60 Le gouvernement est sous pression de sa population. Si ce dernier n’est pas en mesure de gérer une crise ou encore mieux d’éviter celle de 2011. Le peuple réclame un nouveau gouvernement. Dans l’ancien Siam, le fondement du pouvoir royal reposait sur la maîtrise des eaux (travaux d’irrigation, construction de digues, canaux, etc.). La vision du palais royal de Bangkok envahi par les eaux a fortement marqué les esprits. Avec ses vulnérabilités, comment l’agglomération réagit elle aux aléas ? 2011 a vraiment été un tournant pour manifester la résilience. King Rama IX et le département de gestion de l’eau ont réfléchis un projet de digue gigantesque qui ferait le tour de la capitale en suivant par moment la limite administrative de Bangkok, puis les berges de la Chao Phraya. Cette réaction binaire tolère le sacrifice d’une partie de la ville hors des digues. Puis elle vise à empêcher l’eau du fleuve de s’éparpiller dans Bangkok. Cette solution a déjà prouvé ses limites à Tokyo ou l’eau des fleuves canalisée par les digues se retrouve au dessus du niveau des habitations à cause de la subsidence. Le projet de digue témoigne à mon sens de la perte de liens entre Bangkok et son environnement. Je prends note du coût que représenterait un tel ouvrage, qui donne à voir une volonté inébranlable de résister au risque. Au sud de Rotterdam les digues longent les fleuves (le Rhin, la Meuse et l’Escaut) jusqu’à l’embouchure car l’eau de la mer entre par le lit des fleuves. Avec notamment le barrage de l’Escaut oriental à l’embouchure. Ici à Bangkok, la digue ne continue pas jusqu’à la mer Je n’ai trouvé aucunes réflexions sur le maintient du trait de côte ou de volonté de pérenniser les projets axés sur les inondations des terres face à l’eau du golfe.
61
62 Je découvre aussi la volonté de considérer la ville entre les digues comme des polders. Rappelonsle : qui sont des terres sous le niveau de l’eau pompées constamment. Est-ce durable de projeter une ville ainsi ? D’accepter la subsidence ? Ce sont des ingénieurs des Pays Bas ainsi que Henk Ovink (Envoyé spécial des affaires internationales sur l’eau) qui ont travaillés pour revoir le système de drainage de la ville. S’en résulte l’implantation d’immense tunnels à des points clefs pour faire circuler l’eau plus rapidement au travers la ville vers ces stations de pompage. Derniers projets réalisés, sont les Kaem Ling ou Monkey Cheeks qui sont des réservoirs de surface pouvant décanter l’eau et ralentir sa progression, pour la faire s’écouler plus tard et plus lentement. Aujourd’hui la capacité de ces réservoirs est de 1,53million de m3 à l’intérieur de la digue. Ces trois projets dont les deux derniers qui sont réalisés, témoignent d’un manque de clarté d’une direction claire. La ville stocke mais fais circuler plus rapidement. Tout en voulant empêcher l’eau d’entrer. Puis les réponses s’arrêtent à l’emprise de la ville. Hormis les barrages en amont maintenant d’avantages surveillés. Ces actions témoignant là encore d’une volonté de la ville de résister plutôt que de faire avec l’aléa. Une dernière réflexion dans les rapports du département de drainage et des égouts fait allusion à un canal en réponse aux inondations. Je n’ai pas trouvé de spatialisation de ce dernier ni d’autres mentions de cette idée. Nous reviendrons dessus.
63
64
SCHÉMA DES DYNAMIQUES
Direction de l’urbanisation Typologies d’urbanisation Ecoulement de l’eau
King’s dyke tunnel project
Kaem Ling
10km
FLUX ET CONTRE FLUX
DENSIFIER
DÉCENTRALISER
VILLE RÉS
65 Représentées par des rectangle oranges, sont les directions de l’urbanisation de la ville. On remarque à l’est une volonté de remplir le dos de la future digue. Au nord un choix de suivre la Chao Phraya. Et à l’ouest la continuité de la ligne de métro qui encourage la croissance urbaine toutefois hors du projet de digue. Nous l’avons vu, la ville s’étend principalement d’est en ouest, l’eau ne circule pas aussi bien au travers l’agglomération d’aujourd’hui. Malgré cela ces trois directions témoignent encore d’un éparpillement urbain. Je retiens la diminution de l’écoulement naturel de l’eau aux abords de la ville comme un enjeu majeur à sa survie en cas d’inondations. Les directions actuelles de développement de la ville devront changer en fonction des réponses spatiales au risque. Que ce soit la digue, les Kaem Ling, ils influenceront la forme de la ville. Puisque la façon de voir la ville actuellement engendre des problèmes (température, imperméabilité, pollution etc…). Y aurait-il une direction de l’urbanisation potentielle qui se baserai sur une analyse du territoire ? Une direction qui fait sens pour habiter la plaine inondable. Encore plus loin, l’urbanisation ne pourrait elle pas muter pour incarner la résilience. Que sa forme même soit une adaptation à la plaine. Gardons ces idées à l’esprit. Il y deux comportements pour une agglomération. Soit celle-ci se densifie. Ou bien elle se décentralise. Les projets proposés soutiennent une densification urbaine future. En effet la digue et les ouvrages protègent une surface donnée sur laquelle la ville se développera et ce malgré le phénomène de subsidence. Je soutiens
SILIENTE qu’il est préférable pour la ville de s’étendre plutôt que de se renfermer et s’alourdir. Attention toutefois à encourager l’écoulement de l’eau
de la vallée. C’est le rapport de la ville au sol et son schéma qui sont
à requestionner. Et non pas garder la même façon de construire, à l’intérieur d’une digue.
66
67
Je termine mon analyse par ce tableau de Antoine Barly intitulé Rumeur Silencieuse. Mine de plomb, encre, fusain et pastel (70 x55) 1999 Trouvé chez un antiquaire. Il est pour moi une représentation des enjeux du site. Cette forme carrée au centre d’une vallée, rayée par des lames, commence peu à peu à exprimer les textures et se fondre dans le paysage. Mais reste sa forme qui l’empêche de totalement faire partie du site. Encore trop haut par rapport au socle.
VERS LE PROJET
68 Capital risque : « Si l’eau emporte ma maison, les compagnies d’assurances me la remplaceront. » Je cite un habitant de l’agglomération New Yorkaise. 4 milliards de dollars de dégâts. C’est ce que Bangkok a dû essuyer en 2011. C’est un trou direct dans sa croissance économique, -1,7% pour être exact. Investir autant dans des réparations ne sachant pas si cela sera à refaire dans 2ans. Le risque est en mesure de détruire une ville. L’épuiser dans sa reconstruction. Cette course capitaliste qu’est de produire plus que ce qui est perdu, n’a pas de sens à l’échelle de l’individu ou du paysage. L’ouvrier qui perd son travail, son quartier. Il est difficile de retrouver cela. Ou encore pire, l’irremplaçable vie humaine. Je vais soutenir une réflexion sur l’investissement de la ville dans une manière de réduire les dégâts à chaque épisode. De maintenir une vie avec le risque, et celle aussi à l’échelle de l’être vivant. La résilience : Une manière de réduire les dégâts à chaque épisode ? Est-ce une ville résiliente ? La résilience est la capacité à rebondir suite à un choc. Nous ne pouvons pas tout à fait parler de résilience ici à Bangkok. Du moins les projets de digue, drains etc… sont pour éviter le choc. Ne pas avoir à ressentir une variation. Puis derrière aucun rebond sur l’aléa. Pas de bénéfices à avoir dans le cas présent une inondation. La sédentarité : Tirer profit des aléas ? Je voudrais vous parler d’un poisson que j’ai vu en Thaïlande sur les berges vaseuses des cours d’eau juste à l’entrée des mangroves. The Mudskipper ou Gobie en Français, a exprimé une mutation déjà réalisée dans l’histoire des êtres vivants. A savoir pouvoir ramper sur terre avec ses nageoires pectorales rigides, il a changé de statut. Il tire parti de deux situations. Amphibie, il vit bien les fluctuations. Il s’est déplacé de la mer vers les plages pour échapper à ses prédateurs, se nourrir et pondre ses œufs dans le sol. Sa prospection terrestre augmente des lors que l’eau varie. Ce poisson a changé de milieu. Il a fui et bénéficie des fluctuations de l’eau pour vivre sur de nouvelles surfaces. Là et pour moi un exemple de résilience. L’amphibien tire profit du sol gorgé d’eau pour humidifier sa peau et ses œufs. Il vit parfaitement la crue. Mais retenons aussi qu’il s’est déplacé. Il a muté et changé d’environnement pour une autre situation que d’où il était. Qui sait, peut être est il parti pour aller plus loin encore et conquérir la terre ferme comme nos ancêtres lointains ? Le trajet l’à fait évolué ou il en
69 est aujourd’hui et à muté durant cette étape du voyage. Cela m’inspire pour Bangkok. Faut il aller chercher les terres plus hautes des collines des provinces voisines et déplacer la ville ? Peut être oui. Mais est ce que le trajet pour y aller ne révèlerait pas dans la construction de la ville une adaptation à la plaine. Et à la fin une vie pérenne les pieds dans l’eau ? Mon parti pris est de chercher à continuer de vivre dans la vallée. C’est le trajet du déplacement qui matérialisera cette réflexion. Même si au départ, le but est d’aller plus loin. User d’une direction, d’un eldorado comme motivation. Cela rejoint la compétence de la gouvernance. Le long terme et la monarchie : Le règne d’un Roi est une échelle de temps qu’un politique français rêverai d’avoir. Prenons celui de Rama IX : 70ans de règne. Du moins cela laisse le temps d’aboutir des projets. A l’échelle d’un projet de paysage, cette durée de gouvernance est une aubaine. Je dirai un atout à l’établissement d’une démarche à long terme et un suivi de son application. Au point ou la monarchie peut soutenir la démarche de développement et la transmettre à la génération politique suivante. Elle peut incarner le changement et insuffler une nouvelle perspective qui soyons honnête permet à la monarchie aussi bien de prospérer en temps difficiles de coups d’états. Elle a besoin aussi de s’attacher à des moteurs intellectuels pour faire avancer le peuple et rester à sa position.
70 Le trajet comme amorce de réflexions : Je pense en effet au mouvement. Au déplacement de la ville, et sa quête de terre en altitude, de la couche géologique supérieure. Les Pays Bas ont assumé le fait de vivre en dessous du niveau de l’eau, et d’utiliser des ressources naturelles comme le vent pour pomper l’eau des polders. Ils remettent toutefois aujourd’hui en cause un modèle de plusieurs siècles. La Thaïlande possède à la différence des Pays Bas des terres en hauteur plus près de la côte. Son déplacement, qui n’est pas une téléportation urbaine, ne prend pas la forme d’une ville nouvelle, d’un new Bangkok. Sinon Évangile selon Snoopy de R.L. Short, 1990
la capitale se dépose ailleurs et ce serait ici un autre sujet de travail. L’idée est que du cheminement de la ville se développent de nouvelles façons de vivre la plaine. Le temps gagné sur l’échéance de la ville d’aujourd’hui, lui permettra de conjurer d’autre réflexions. Et peut être de trouver une nouvelle façon pérenne d’habiter un territoire liquide. Un risque, en résilience Pourquoi chercher à rester dans la plaine ? Une ville qui peu à peu chimérise l’eau. Toutefois elle est toujours l’identité de la ville d’aujourd’hui. C’est une prise de position qu’essayer de renouer un échange entre la ville de demain et l’eau. Renouer, également avec l’eau sous sa forme de danger, et donc transformer un risque en résilience. Comme il le fut traditionnellement : de pouvoir ressentir la saisonnalité, avoir un bénéfice économique comme paysager à l’inondation. Ces notions sont des valeurs perdues aujourd’hui, que la forme urbaine devra retrouver. En ayant ces attentes à retrouver. Il s’agit de les atteindre avec ce qui caractérise déjà la capitale. La pluralité d’expériences du corps en déplacement dans la ville, Une forme urbaine variée et riche. Ce que les habitants vivent tous les jours, sont des expériences uniques qu’il me fut donné d’expérimenter à Bangkok. Qui me paraissent essentiel de maintenir. Quels savoirs et techniques appliquer pour vivre dans la plaine et guider le trajet de la ville ?
71
Vers les colines pour Un retour vers la cité
se reconstruire un
d’Ayutthaya ? Avec une
emplacement et une
plannification urbaine
identité géographique ?
adaptée à la plaine ?
72 Là est le moment pour moi de vous parler de l’idée de canal mentionné dans les rapports du département de drainage et des égouts de Bangkok. Le système de canaux en place n’ayant permis de lutter contre le drame de 2011, cette idée n’a pas reçu beaucoup d’attention. Les regards sont tournés vers de nouvelles solutions plutôt que de rester sur des outils du passé. Pourtant, les klongs font parti du savoir faire et de l’histoire des Thaïlandais. Il ne s’agit pas d’être traditionnel, les traditions sont faites pour évoluer. Mais de reporter un savoir faire et une identité paysagère à une échelle de travail pertinente par rapport à l’analyse, tout en bénéficiant des moyens de construction d’aujourd’hui. Si je mets à côté le coût que représenterai les travaux de la digue, ou des 4 milliards de dollars de dégâts en 2011. Un projet canal peut commencer à s’imaginer à une échelle qui serait intéressante vis à vis des enjeux de la ville dans la vallée. Tout d’abords en quoi un canal aiderait il ? Dans le cas d’un canal à l’extérieur de l’agglomération qui favoriserait l’écoulement autour de la ville. L’eau provenant des terres circulant dans celui-ci compenserait la masse d’eau qui ne peut plus aussi bien circuler dans l’agglomération. Et éviterait l’accumulation en amont de la vallée. Les canaux d’aujourd’hui sont rigides et forment l’eau sans la laisser s’étendre. D’où une grande partie des problèmes aujourd’hui. C’était toutefois un attribut des klongs avant les années 70. Les parcelles inondées étaient drainées grâce aux klongs. Puis lors de la mousson l’eau remontait de la même manière. Cette mouvance s’apparente à celui d’une rivière et sa crue. Le lit étant le canal. Maintenant si l’ouvrage s’apparentait réellement à une rivière. Que dans la vallée, le canal soit l’armature d’une réflexion d’inondation et d’irrigation qui permet à l’eau de s’étendre sur des espaces définis. Que l’on décide de surfaces hors d’eau et que d’autres surfaces équivalente soient inondées. A cette échelle, un tel ouvrage ne pourrait il pas donner l’élan à une planification de la ville. Un canal comme l’ossature pour recevoir l’urbain dans un territoire liquide. Une urbanisation en doigt de gant suit déjà certains canaux. L’ouvrage projet peut être une ligne équivalente. Fédératrice d’une trame de parcellaire pour peu à peu recevoir la ville. Bangkok remontera peu à peu le cours de l’eau, pour se diriger vers les coteaux de la vallée.
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74 Pourquoi à l’est de la ville ? Il y a la même distance pour Bangkok d’aller à l’est ou d’aller à l’ouest chercher la pente, environ 70km. Rappelons qu’elle a par endroit fait 25 km d’urbanisation en 30ans. Le canal doit être suffisamment près de la ville pour anticiper son urbanisation qui tend aujourd’hui plutôt vers l’est que l’ouest. Puis j’ai été surpris de découvrir qu’aux mois de novembre à février qui sont les mois les plus sec de l’année, les provinces de l’est avec notamment Chachoengsao (sud-est) et Nakhon-Nayok (nord-est) ont des problèmes d’irrigation et de partage de l’eau. Le canal peut prétendre partager l’eau plus en amont de la vallée, pour la distribuer dans ces provinces. Qu’elle forme cela pourrait il donner ? Le canal est une négociation entre territoire et infrastructure. Il incarne dans son dessin un vecteur de dynamisme pour l’agriculture puis soutient la ville par son ossature. Prenant sa source au nord d’Ayutthaya dans la Chao Phraya. Le canal poursuit sa route vers l’est et reprenant une trame déjà complète de klongs. Il change de statut les canaux d’origines. De grandes courbes soutiennent dans un premier temps une facilité de transport de marchandises pour bâtir la ville. Celles-ci navigueront également par le réseau de canaux existant reliant ce canal à l’agglomération de Bangkok (est ouest) assurant une jonction physique et nécessaire au développement de la ville vers ce canal. Puis ces grandes courbes encouragent à l’avenir une diversité de navigation au service de la mobilité dans la capitale.
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L’impulsion d’un ouvrage territorial pour porter la ville. L’ élan d’une infrastructure pour coordonner ville et territoire.
Comment la ville pourrait elle se construire dans une partie basse de la vallée ? Comprenez que nous sommes dans le cas d’une ville sur un sol relativement mou. Mais elle est aussi à l’endroit ou le sol s’alimente en permanence. Ce grâce aux sédiments, cette charge solide emportée par l’eau des fleuves, rivières et canaux. Nous avons parlé des barrages qui forment une perpendiculaire en amont et bloquent l’écoulement naturel de cette charge solide. Suite à 2011, il fut démontré que de laisser les barrages ouverts en période de mousson (mai à octobre) évite l’accumulation de sédiments dans les réservoirs. Une aubaine pour la vallée qui retrouve son dépôt naturel. Le canal projet recevra aussi une part de ces sédiments. Maintenant si nous pouvions réemployer ces matériaux (sable, limons, argiles) pour constituer le socle de la ville. Nous aurions une ressource durable transportée directement au sein du site. A nous de concevoir une manière de les récupérer sur place.
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Répartition de la décharge solide sur une année
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UN ÉLAN SÉDIMENTAIRE
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La récupération sédimentaire encourage l’implantation de l’agriculture à proximité du canal. La ville devra sa construction dans la vallée à l’agriculture, qui permettra de récupérer les sédiments nécessaires à la formation du socle. Dans la vallée, l’agriculture dépend encore des fluctuations de l’eau pour la richesse de son sol pour les plantations (palmiers, cocotiers)… ou encore le nombre de cycle de culture de riz dans une année. Ce sont des surfaces potentielles pour des expansions de crues. Physiquement les sédiments se déposent lorsque la pente et le débit sont faibles, une crue sur de grandes surfaces planes est une situation optimale pour la décharge sédimentaire. Nous pouvons encore plus encourager la décharge solide si l’eau traverse une partie plantée par des arbres. Ce projet est aussi le moment de réintégrer la mangrove. Enfin les déblais issus du canal seront aussi réemployés sur place pour élever ce socle. Imaginer des surfaces d’expansion de crues cultivées parmi la ville. La planification autour du canal témoignera de la diversité des paysages potentiels de la plaine. Car c’est de la fluctuation de l’eau qu’émerge la diversité.
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SCHÉMA D’INTENTION Un canal qui articule liquide et solide
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Palmeraie
La construction du canal reprend la trame existante. Le parcellaire change peu pourtant les terres peuvent recevoir plus d’eau pour les cultures. Canaux Rizières
De mai à octobre les barrages sont ouverts. Lors d’une forte pluie de mousson, l’eau peut déborder des canaux sur les parcelles.
socle à bâtir
Passé novembre, la récolte des
sédiments
déposés
dans les cultures permettra de recharger une parcelle. Elle sera le socle d’un futur quartier.
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Des questions émergent à l’aube de ce plan. Le hors champ de celui-ci est la capitale existante. Pourtant nous avons vu que des questions se posent quand à la progression de la capitale et notamment sa déconstruction. Un phasage a t’il lieu, si oui dans quel ordre ? Comment déconstruire la ville ? Si le canal ne permet pas directement d’alléger la ville de Bangkok, il initie le mouvement. Je pense au quartier de Yaowarat que j’ai visité qui est en démolition. Beaucoup de d’habitats vieillissants sont détruits pour une reconstruction. Est ce à ce moment précis que la ville ne se reconstruit pas ? Qu’elle se démolie au grès de l’usure ? Que pouvons nous faire des matériaux issus de ces démolitions, peuvent ils alimenter le socle ? Attention à ne pas garder qu’un centre élitiste et ses bâtiments flambant neufs. Où et pas ailleurs ? Cette question porte bien évidement sur l’emplacement du canal mais aussi en quoi le quartier futur est il en lien avec l’emplacement qu’il investit. Cette question influencera grandement le schéma urbain. Une proximité directe avec le canal principal et son excellente mobilité encourage l’implantation de commerces, entreprises et équipements de loisirs. Tournés vers l’agriculture, des quartiers d’habitations au calme avec l’ouverture sur le lointain verrons leurs premières commodités non loin le long des canaux secondaires. Il est important de garder la polyvalence des quartiers tout en gardant à l’esprit le sens de l’implantation géographique sur la structure de cette ville territoire. Les attractions Touristiques sont aujourd’hui réparties dans la ville de Bangkok. Ce schéma est intéressant de garder puisqu’il dynamise des axes secondaires de la ville. Ordre de déplacement. Dans le cas d’un déplacement, doit-on tout recréer en même temps comme la ville nouvelle de Tamesna au Maroc. Ou faut-il phaser. Attention à ne pas reproduire les erreurs de villes nouvelles justement où tout déplacer par lots de même nature gangrène la vie de l’ensemble. Cette hiérarchie du déplacement est assez risquée pour la vie de la ville. Et renforce les quartiers exclusifs, tournés vers eux mêmes car conçus comme tel. Est-ce une approche plus constellaire qui vise à investir plusieurs points à faire rayonner ? Ou bien suivre l’urbanisation sur le modèle de l’axe comme nous le rencontrons déjà en Thaïlande ? Les deux sont complémentaires. Équivalence aux risques. Pour chaque entité urbaine, est elle égale à une autre ? Doit on implanter celles ci en fonction de leur importance. Les entités moins graves si paralysées se trouveront plus bas topographiquement au contact de l’eau ? Au delà de l’ordre du déplacement, la planification de la ville montrera t ‘il une hiérarchie urbaine face au risque, à la manière d’un château fort ? Que reste-t-il ? Faut-il le penser par une grille jeffersonienne ou bien s’appuyer sur la trame existante des klongs qui délimitent déjà des parcelles de la ville à déplacer. Je pencherai pour la seconde réponse. En effet les canaux séparent déjà des ilots, cette limite a déjà donné une structure et parfois une certaine autonomie au quartier. Qu’il peut être intéressant de retrouver. Si les canaux ont déjà eu un impact sur la ville d’aujourd’hui, reprendre ce dialogue existant par endroit peut être une base de fonctionnement pour la ville projet. Une fois déplacées, les parcelles « vides » ne peuvent elle pas jouer un rôle dans l’allègement global de la ville existante de Bangkok ? Réduire la subsidence par un effet gruyère ? Un paysagiste vous répondrait que des parcs peuvent être une nouvelle réflexion sur ces terrains. Peut être que ces surfaces peuvent commencer à recevoir des crues. Peu à peu la ville s’adapterait elle aussi à l’emplacement ou elle se trouve ? Le sol. La sédimentation est une érosion et un dépôt. Elle enrichit déjà l’agriculture. Il convient d’analyser ces matériaux pour les réemployer sous forme des strates réfléchies pour la ville, qui est une autre manière de cultiver un sol. Peut être pourrons nous trouver une réduction du phénomène de subsidence grâce au travail des couches sédimentaires en empilant des granulométries différentes pour le socle, couplé d’un allégement global des constructions.
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Les quartiers sur pilotis
sont une forme urbaine qui ne réduit pas les surfaces inondables . Cette entité se trouve aux abords des parcelles de cultures et avoisine autant les surfaces d’expansion de crues primaires et secondaires. Toutefois sur ces dernières le dessous des bâtiments peut être investit autrement puisque l’eau y vient moins souvent. Les pilotis forment le ourlet de la ville.
Le bâti
Les quartiers de la ville sont axés ouest est sur les routes, voie de chemin de fer et canaux existants. Formant des bras. Puis, sud nord au contact du canal projet.
Les axes non submersibles
portent la ville et sont encore une infrastructure utilisée pour les déplacements dans le projet . Ils constituent une forme de digue qui est percée par de nombreux canaux.
Les surfaces d’expansion de crues secondaires
sont comme leur nom l’indique des parcelles qui hébergeront moins fréquemment les crues. A distance de l’élan du canal. Ces surfaces se matérialisent par une séparation par des routes submersibles ou encore la pente générée par des sédiments laissés sur place. On y trouvera d’autres types d’occupation des sols et des maisons encore sur pilotis. Notons que nous trouvons aussi cette typologie dans la ville, sous forme de parcs inondables témoins de la saisonnalité aux habitants.
Les surfaces d’expansion de crues
sont des parcelles agricoles qui dans un idéal recevront chaque année des inondations durant la période de la mousson. Et récolteront la décharge sédimentaire. Profitant de ces fluctuations de l’eau, nous retrouverons des mangroves sur ces surfaces.
Le Klong
Qui s’efface dans cette structure. Il soutient au regard des routes une mobilité sur toute l’année. Sa forme lui permet de desservir toutes les branches de la ville. Un canal reprenant de la relation de Bangkok et la Chao Phraya. En y soutenant d’autres relations que peut avoir la ville avec un fleuve.
Les routes submersibles
sont employées une partie de l’année comme lien des bras de la ville ils ne font pas que s’additionner à la mobilité des canaux secondaires, puisque ces routes jouent le rôle de digues submersibles . Préservant des parcelles jusqu’à un seuil convenu.
Les canaux secondaires
sont la première armature de ce territoire. Une trame qui a le plus influencé le projet. Ces klongs sont essentiels à la répartition et au débordement de l’eau dans les parcelles. Puis, sont désormais les axes de mobilité les plus fréquentés de la ville. Véritable nerfs de l’urbain et de l’agriculture. C’est aussi par eux que les habitants verront en premier les fluctuations de l’eau.
81 La ville peut tout à fait s’étendre le long de son fleuve. Elle devra conjurer des espaces d’expansion de crue à la manière de ce projet. Toutefois, elle n’aura pas de point en hauteur à atteindre. Le dessin du projet s’arrête au moment ou la ville devra choisir entre continuer son ascension vers les collines de la province de Nakhon Nayok ou bien rester dans la vallée vers Ayutthaya et la Chao Phraya.
PLAN MASSE
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Une lecture de l’horizon. Perdue jusqu’alors dans la ville. Les pilotis sont ici plus haut. Entre 4m50 et 5m afin de pouvoir continuer d’apercevoir l’horizon à l’est sur le quai d’en face.
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Bangkok n’était pas une ville pour le piéton. Sauf peut être dans les marchées, ou les ruelles sinueuses. La place du marcheur est égale aux cotés des autres modes de transports. Car elle permet de faire l’expérience des variations du paysage. Et d’interagir avec celui-ci. L’expérience de la pente, l’odeur de la pluie sur un sol chaud et sec. Jusqu’à acheter sa nourriture au stand du coin de la rue qui résume par la cuisine le paysage de la vallée.
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Ces grandes étendues valorisent la rencontre avec la ville. Qui apparait comme un évènement parmi cette linéarité. C’est donner à voir le paysage du delta dans la vallée. Ce spectacle est une richesse de tout les jours. Qu’il est donné de ressentir lors de ses déplacements. Car après tout le déplacement est un moment de méditation.
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Quelques images de l’existant qui m’ont influencé dans le dessin du projet. La réalité contient les ingrédients du projet.
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CONCLUSION
Du solide dans un paysage liquide. L’Homme générateur de sa propre menace. L’activité humaine croit dans la vallée de Bangkok et le pompage de l’eau souterraine a augmenté ces dernières années. Les constructions récentes de la capitale sur les sols meubles du delta alourdissent la ville et la font s’enfoncer. La subsidence rend la métropole encore plus vulnérable aux inondations. Les sédiments qui alimentaient le trait de côte se retrouvent bloqués dans des barrages en amont. La modernisation de Bangkok nie ce qui faisait autrefois le rythme de vie dans ce territoire mou. La perte de l’expérience du paysage (lecture de la saisonnalité, des fluctuations de l’eau etc…) aux yeux des habitants et du gouvernance se traduit par des décisions contradictoires de lutter contre les aléas de l’eau plutôt que de les embrasser. L’uniformisation mondiale des mégapoles, favorise la rupture entre celles-ci et leur territoire. Ce que l’échelle mondiale ne pourra tolérer sont les migrations climatiques de masse provoquées par ces ruptures. Localement, Bangkok doit asseoir sa gouvernance instable et orienter la monarchie autour d’une réflexion d’aménagement sur le risque et sa résilience. Les habitants réclament des solutions. La monarchie ébranlée doit incarner une philosophie de mutation. Grâce à la durée de règne des dirigeants, le roi est en mesure de porter un aménagement sur le long terme. Aujourd’hui, les réponses aux risques sont azimuts et n’incarnent pas une résilience. La réflexion commune sur Bangkok avec des ingénieurs hollandais a tendu à considérer la capitale comme un polder. Cependant au même moment aux Pays Bas, la pérennité du modèle est en questionnement. Le projet King’s Dyke, les 4 milliards de dollars de dégâts engendrés par la crue de 2011 et mon diagnostic, m’ont guidé vers un projet d’urbanisme territorial. J’étudie la crise de 2011 comme un catalyseur du projet. Il est dans la nature humaine de réagir après une catastrophe. Je m’associe aux réflexions engagées pour y contribuer.
95 La forme que donne l’eau. Ma question au départ de l’exercice était : « à quoi ressemblerait une ville si elle devait s’adapter à son territoire et se construire aujourd’hui ? » La prise en compte des risques est une manière d’y parvenir. L’eau n’a pas de forme. Elle embrasse toutes les autres formes. Cependant, contrainte elle peut détruire. Le projet dessine une planification de la ville dans un territoire liquide, en encourageant des dynamiques naturelles telles les crues et la décharge sédimentaire comme vecteurs de la forme de l’urbain. J’ai pu voir en essayent de lier les aléas de l’eau à la pérennité de la ville, que les entités paysagères présentes sur le delta notamment les rizières, palmeraies ou encore les mangroves sont nécessaires à l’ensemble du schéma. Si le risque devient vivable, ou même bénéfique pour la ville c’est grâce à l’agriculture. C’est bien l’eau au départ qui encourage cette transversalité. L’impulsion de départ pour ce travail est un « canal projet », il s’inspire des pratiques ancestrales Thaïlandaises revues afin de répondre aux attentes nouvelles d’une ville qui a changé d’échelle. Cet ouvrage est désormais comparable en taille et fonctionnement à celui d’un fleuve. D’une manière plus large les 136 villes du monde recensées comme submersibles auront à trouver une solution propre à leurs risques. Dans l’eau, tous les Hommes sont égaux, la hiérarchie est abolie. Je retrouve au moment de mon diplôme les idées d’un ouvrage du concours d’admission à l’ENSP, celui d’Elysée Reclus dans Histoire d’un Ruisseau, la boucle est bouclée… Au delà de la faisabilité de ce projet. Il convient dans ce travail de proposer une réflexion pour donner à voir l’inverse de ce qui se décide actuellement pour Bangkok. Car simplement, le risque nait d’une rupture entre l’homme et son territoire. Il convient par le paysage de rétablir ce lien.
Je vous donne rendez vous le 5 septembre à 14h en atelier DEP 3 pour pouvoir échanger ensemble des réponses qu’il convient d’apporter à cette problématique.
Passionné par les formes de nos villes générées par leur environnement, je construis une réflexion en Thaïlande à Bangkok, sur comment interpréter autrement les réponses aux risques d’inondation. La ville de Bangkok ne permet plus à ses habitants de lire son environnement et la saisonnalité de l’aléa inondation. Elle laisse naître des réponses ayant déjà montré leurs limites ailleurs. Je m’appuie sur l’impulsion d’une idée de canal autour de la ville de Bangkok comme d’un outil de projet multi-scalaire, en allant d’un élan sédimentaire jusqu’à une mouvance urbaine. Je cherche à revenir à la base, au socle face à ces changements, non plus pour subir mais pour vivre les aléas environnementaux.