Mémoire de Master en architecture

ÎLES

DES TERRITOIRES ENTRE DEUX MONDES

XU Xiaoyu

Mémoire de master en architecture ENSA Paris Val-De-Seine & Politecnico Di Milano 2020-2021 DE2 Écologie

Tuteur de mémoire: BOUFFLET Stéphanie

Je tiens à remercier Stéphanie BOUFFLET, mon tuteur, qui a accepté de me suivre malgré le peu de temps qui m'était imparti.

Je tiens à remercier mon ami et mon professeur de français, Dominique MASSON, qui m'a accompagné tout au long de mes recherches, et qui m'a aidé dans la langue française qui n'est pas ma langue maternelle.

Je remercie tous les étudiants et étudiantes, les auteurs, qui ont avant moi, fait des travaux sur des sujets similaires au mien. Ces travaux ont été une base solide dans mes recherches, et j'en serai toujours reconnaissante.

Enfin, je remercie chaleureusement ma famille, qui a été d'une aide précieuse dans cette période compliquée.

ABSTRACT

· TITRE

ÎLES : DES TERRITOIRES ENTRE DEUX MONDES

· ·

· · PROBLÉMATIQUE

En quoi l’île est-elle associée à des dimensions particulières de la vie humaine?

MOTS CLÉS

île - symbolique - représentation - utopie - déconnection - prison - confiné - paradis - nature - sauvage - environnement - poétique - industrie - mésologie - île Seguin - christianisme - territoire - insularité - usine Renault - isolement

· INTRODUCTION

I. MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité

A. Entre terre et ciel: La relation des îles avec l’invisible

B. Le paradis ici et maintenant: L’île comme rêve d’une autre société

C. De l’île-nature à l’île écologique: La recherche de nouveaux modèles

D. L’île, un espace déconnecté: La chance ou le danger de revenir à soi-même

II. REGARDS HORIZONTAUX: De l’usage des îles

A. Du bagne au Goulag : Les micro sociétés pénitentiaires

B. Les îles confinés : La place des îles dans la gestion des épidémies C. Les atouts industriels du territoire des îles

III. REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES:

L’exemple de l'île Seguin

A. Il était une fois …: Du domaine des moines à l’usine Renault

B. Panorama des projets d'architecture: De la cité des plaisirs aux cinq tours de bureaux C. Quel futur pour l'île Seguin?

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PROBLÉMATIQUE:

En quoi l’île est-elle associée à des dimensions particulières de la vie humaine?

MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité I . REGARDS HORIZONTAUX: De l’usage des îles II .

REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

Desable, de grève et de limons brassés par les eaux, les îles émergent dans les courants du fleuve ou de l’océan qui les portent en surface, dessinent et sculptent leurs contours, les déplacent, les font naître et parfois disparaître. La formation de l’île résulte de la force des eaux, de l’érosion qui cisèle les calcaires du fleuve ou les roches de la croûte océanique, des courants qui charrient les sables et les sédiments, de l’apaisement également de ces forces et de ces tensions lorsque, dans des eaux revenues au calme, les matières minérales et les sédiments se déposent, s’amoncellent et donnent à l’île sa concrétion. De ce point de vue, l’île est une construction dont l’architecte est la nature et l’artisan, le fleuve ou l’océan.

Le mot « île » en français est issu d’un mot latin, « insula » qui désigne en même temps une terre entourée par les eaux de tous côtés et un « petit groupe de maisons isolées des autres constructions »1 . C’est dans ce deuxième sens que le mot « îlot » continue aujourd’hui à être employé en architecture pour désigner un lieu marqué par des caractéristiques qui lui sont propres.

Au départ de cette recherche que j’ai choisie de consacrer aux espaces insulaires, il y a l’intérêt que j’ai ressenti pour des parcelles de territoire qui ne reçoivent leur nature, leur définition et la plupart de leurs fonctions que de leur position singulière à la surface de la croûte terrestre, entre l’infiniment grand des espaces marins, lacustres et fluviaux et l’infiniment petit de leur propre territoire. En règle générale, les territoires reçoivent une part de leur identité des autres terres qui les environnent et avec lesquels ils interagissent. Les îles ne sont extraites d’aucun territoire terrestre plus vaste qu’elles-mêmes et elles reçoivent premièrement leur identité de l’eau qui les entoure, de notre regard également sur cette eau dont elles émergent. C’est la dimension géographique de leur insularité. Cet « esseulement » des îles dans le lit du fleuve ou dans les profondeurs du lac ou de l’océan exerce une influence déterminante sur les projets d’occupation et d’aménagement qui peuvent y être conduits.

1 Rey Alain, Dictionnaire historique de la Langue française, Editions Robert

Pour approfondir cette recherche sur les îles et sur leur aménagement, je me suis intéressée à une île fluviale de la Seine dans le cadre de mon PFE, l’île Seguin, qui se trouve à Boulogne Billancourt. Cette île est en effet devenue célèbre pour son activité industrielle à l’époque des usines Renault, pour le nombre de projets dont elle a été l’objet après la fermeture de ces usines ainsi que pour les polémiques qui ont conduit à l’abandon de la plupart d’entre eux. Dans cette étude, on a envisagé les problèmes qui peuvent survenir lorsque les projets proposés dans le cadre d’une reconversion ne coïncident ni avec la vision du passé, ni avec les autres attentes des habitants du territoire. Pour connaître les attentes des habitants de Boulogne Billancourt au sujet de l’île Seguin, j’ai mis en place un sondage «Google Form»1 et le résultat du sondage (75 réponses) m’a permis de découvrir qu’une grande majorité d’entre eux orientait leurs réponses vers la protection de l’environnement, la création d’espaces verts ou bien la création de lieux de loisirs. L’île est plus que jamais associée à la nature, aux loisirs, à la vie en marge des contraintes et des pressions de la vie urbaine. Les projets de type culturel (salle d’exposition d’art, musées, salle de théâtre ou de cinéma) arrivent en deuxième position. L’art et l’île partagent peut-être en commun de conduire l’esprit vers d’autres manières de regarder et de penser le monde, d’autres dimensions de la réalité. L’implantation de lieux de culte arrive en troisième position. Pour certains, l’île peut représenter un lieu sacré, lointain, où on dialogue avec nous-même et avec Dieu. À partir de ce sondage, j’ai cherché à savoir pourquoi les demandes des habitants s’orientaient vers ces directions et à comprendre en quoi l’île était associée à certaines dimensions de la vie humaine. Quel est l’impact de l’insularité sur nos représentations de ce territoire, sur ses fonctions sociales et sur les aménagements qui en découlent? J’ai choisi de répondre à ces questions à partir des deux aspects de la singularité de l’île : sa singularité symbolique et sa singularité fonctionnelle.

MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité I . REGARDS HORIZONTAUX: De l’usage des îles II . REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

Dans un premier temps, nous verrons que les projets développés sur les îles sont influencés par des représentations symboliques qui, à toutes les époques et dans de nombreuses cultures, ont fait de l’île un lieu à part, un lieu de nature, un paradis sur terre, un lieu « sacré », un lieu à protéger, non seulement des assauts de la mer, de l’érosion et de la montée des eaux, mais surtout et premièrement des assauts de la civilisation humaine qui pourraient détruire sa singularité, qui pourraient lui faire perdre son âme. Peut-être en raison de la fragilité de son ancrage terrestre, qui est encore plus évident dans le cas des îles flottantes, l’île semble inviter les hommes à penser leur vie et leur destinée dans des directions qui les éloignent des nécessités pratiques de leur vie matérielle sur terre. Ici commence l’univers des croyances, des légendes, des rêves et des espérances qui représentent l’autre dimension de l’homme, l’autre dimension de l’île. En quoi consistent précisément ces identités symboliques qui font de l’île un territoire singulier?

Dans un deuxième temps, nous rechercherons dans l’histoire du monde entier des traces de ces activités singulières qui ont été pratiquées dans les îles et qui les ont conduites à devenir des lieux de détention, d’hospitalisation ou d’industrialisation.

Dans cette étude, nous examinerons donc les liens étroits qui, en différentes sociétés et à différents moments de l’histoire, unissent les îles aux projets qui y sont ou qui y ont été développés. Ces projets sont indissociables des singularités du territoire insulaire, que ces singularités soient symboliques (partie1) ou fonctionnelles (partie 2).

Les territoires fortement marqués par une identité symbolique posent des problèmes aigus lorsqu’ils doivent être l’objet d’un réaménagement, d’une reconversion, d’un changement de fonction sociale. Dans une troisième partie, nous reviendrons sur l’île Seguin pour répondre aux questions que nous avons posées, grâce aux résultats de cette étude

qui, dans ses deux premières parties, a cherché à définir et à illustrer les notions d’insularité symbolique et d’insularité fonctionnelle. Le but de cette analyse sera donc de comprendre ce que représente une île dans l’imaginaire des habitants et par conséquent de savoir si l’aménagement ou la reconversion des îles peuvent ignorer les symboles qui, dans l’histoire, ont marqué leur identité.

Nous verrons que dans le cas des îles, le territoire lui-même influence une large part du projet et que territoire et projets représentent un tout indissociable. Quels qu’ils soient, ces projets intègrent, exploitent ou subliment l’insularité du territoire. Qu’il s’agisse de temples, d’utopies, de paradis naturels, d’hôpitaux, de prisons ou d’usine, les projets « îliens » reçoivent leur justification et une grande part de leur raison d’être des caractéristiques insulaires des territoires dans lesquels ils s’inscrivent.

Dans la suite du questionnement inspiré par l’île Seguin, j’ai développé ma réflexion sur la singularité des îles et sur leur futur. D’où viennent ces lectures qui inventent et qui réinventent les îles au fil des époques et au gré des cultures? Dans quel substrat les mythologies insulaires du monde occidental trouvent-elles leur origine? Dans quel contexte les îles sont-elles devenues ce qu’elles sont aujourd’hui et ce qu’elles ont été dans l’histoire? Peuvent-elle devenir autre chose que ce qu’elles ont été? Comment penser l’avenir des îles dans un monde où la rapidité des moyens de transport permet leur désenclavement et pourrait les conduire à devenir des territoires comme les autres?

Voici quelques-unes des questions auxquelles nous tenterons de répondre au travers d’une étude qui restera centrée sur les interdépendances entre le territoire de l’île et ses dimensions symboliques et fonctionnelles.

MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité I . REGARDS HORIZONTAUX: De l’usage des îles II .

SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

1.Mythes et utopies : les symboliques de l’insularité

I.MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité

A.Entre terre et ciel: La relation des îles avec l’invisible.

B.Le paradis ici et maintenant: L’île comme rêve d’une autre société.

C.De l’île-nature à l’île écologique: La recherche de nouveaux modèles.

D.L’île, un espace déconnecté: La chance ou le danger de revenir à soi-même.

REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES

MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité I . REGARDS HORIZONTAUX: De l’usage des îles II .

ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

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I. MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité

Il faut le regard de l’homme pour découvrir que l’île est entourée par les eaux et pour la définir comme telle. Ce regard est à l’origine de nombreuses constructions, non pas géologiques mais symboliques et poétiques, qui placent l’île parmi les éléments les plus productifs de notre imaginaire. Cette fécondité symbolique de l’île provient peut-être de sa double dimension. Si, à la surface des eaux, elle se présente au regard sous la forme d’un amas de taille variable de roche, de grève ou de terre, son existence suggère en creux l’existence d’un monde invisible, inconnu et mystérieux, à cheval entre les profondeurs inquiétantes des eaux souterraines et les infinis de l’espace céleste. Clairement identifiable par sa forme et par ses contours, élément incontesté de ce point de vue des paysages du monde matériel et visible, l’île montre aussi ce qui ne se voit pas, se fait l’écho d’une réalité cachée et nous invite à une découverte de ses invisibles. Ces petits fragments de terre, égarés, isolés, dans l’infiniment grand des fleuves et des océans - notons au passage que les mots « isolé » et « isolement » dérivent du mot «île» - entre en résonance avec les insularités intérieures – intellectuelles, affectives, spirituelles…- de celui qui la regarde. Parce qu’elle transporte nos pensées et nos rêves au-delà d’une simple compréhension de sa réalité matérielle, l’île est en elle-même « métaphore ». Rappelons que ce mot est formé de deux éléments, « méta-» et « phore », le premier signifiant « au-delà », « plus loin » (cf. métaphysique, métadonnées), le second ayant le sens du verbe français « transporter ».1 De même que les amphores transportent le vin et que le phosphore transporte la lumière, l’île transporte notre esprit vers des paradis ou des enfers lointains, autant de significations abstraites et de charges émotionnelles qui demandent d’aller au-delà de ses représentations les plus objectives, géographiques ou géologiques par exemple. De ce point de vue, elle semble valider la vision du monde que Joseph de Maistre exprime en ces termes en 1821 : « Tout se rapporte, dans ce monde que nous voyons, à un autre monde que nous ne voyons pas. Nous vivons [...] au milieu de choses invisibles manifestées visiblement». Baudelaire n’exprime pas autre chose dans le premier quatrain de son célèbre poème, « Correspondances »:

1 https://www.lalanguefrancaise.com/linguistique/metaphore-figure-de-style#0

« La Nature est un temple où de vivants piliers Laissent parfois sortir de confuses paroles ; L'homme y passe à travers des forêts de symboles Qui l'observent avec des regards familiers. »

Correspondances, Les Fleurs du mal, 1857

La symbolique de l’île s’inscrit pleinement dans cette sacralisation de la Nature (remarquons l’usage de la majuscule) qui caractérise la relation au monde des penseurs et des artistes dits « symbolistes ». Au sein du monde naturel et parmi tous les territoires du monde, l’île est un territoire singulier, un espace différencié, séparé, coupé par l’eau du reste du monde et de ce point de vue « sacré », si nous pensons au sens que l’étymologie suggère. Le mot français « sacré » a été formé à partir des mots latins « sacer» et « secare », construits eux-mêmes à partir de la racine indo-européenne « -sak » qui signifie « coupé », « séparé »1. L’île apparaît premièrement comme un territoire séparé des affaires du monde.

L’île n’ayant pas d’autre environnement que celui des eaux qui l’entourent, elle apparaît premièrement affranchie de l’influence qu’un territoire reçoit normalement du contexte dans lequel il s’inscrit. Parce que toutes les îles émergent d’un élément qui ne contribue pas à les différencier, elles ne reçoivent leur identité que de la manière dont la pensée des hommes se projette sur elles. Cette pensée peut les relier au cosmos et à l’infini, elle peut également les refermer sur elles-mêmes et en faire des univers concentrationnaires. De même que les eaux des fleuves et des océans nous donnent un reflet de la couleur du ciel et de la circulation des nuages, de même les paysages insulaires reflètent les rêves ou les cauchemars qui habitent la pensée des hommes et de leurs époques. Si l’île est le signifiant d’un symbole, quels sont donc les signifiés auxquels celui-ci renvoie ? Nous apporterons notre réponse dans une série d’exemples qui illustreront concrètement les traductions de cette imagerie symbolique dans l’histoire et dans la diversité des cultures. Les valeurs symboliques de l’île sont-elles propres à telle ou telle culture ou sont-elles au contraire partagées au point de s’imposer comme des valeurs universelles? Pour appréhender ce dernier point, nous naviguerons dans un archipel aux dimensions du monde.

1 Rey Alain, Dictionnaire historique de la langue française, éditions Le Robert

1. Mythes et utopies : les symboliques de l’insularité

MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité I . REGARDS

HORIZONTAUX: De l’usage des îles II .

ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

A. Entre terre et ciel: La relation des îles avec l’invisible.

Lorsque nous avons interrogé les habitants de Boulogne-Billancourt au sujet des projets qu’ils souhaiteraient voir réaliser sur l’île Seguin, nous avons reçu parmi les réponses à notre sondage la suggestion d’y établir des lieux d’expositions artistiques, des lieux dédiés à la musique ou au théâtre, un lieu de culte, sans malheureusement que la nature de ce lieu de culte ne soit précisée. Nous choisissons donc d’interroger tout d’abord l’île du point de vue de ses rapports symboliques avec l’art, la culture et la spiritualité.

Le site des îles, est souvent perçu comme un lieu privilégié de relation entre l’homme et les dieux, entre l’homme et sa vie intérieure, un territoire propice à la construction des temples, des églises et au séjour des moines. A l’écart des territoires habités, l’île se détache du monde des activités humaines selon une symbolique comparable à celle du jardin. Si l’île est détachée du monde par l’eau, le jardin reçoit son espace clos des murs, des clôtures ou des haies qui le dessinent. L’île et le jardin amplifient dans l’enceinte de leurs espaces clos les beautés et le langage du monde naturel. Les particularités de ces deux espaces expliquent qu’ils représentent dans les pensées les plus anciennes des mondes, à mi-chemin entre le visible et l’invisible, des mondes à rejoindre, à rêver, à interpréter, des terres de l’idéal qui se parent même parfois des attributs du paradis.1 Par le biais d’exemples empruntés à des contextes culturels très différents les uns des autres, nous irons à la recherche de ces ailleurs dont l’île semble être l’expression dans toutes les cultures.

1 Iles en projet, Les carnets du paysage n°35, Éditions Actes Sud et L’École Nationale Supérieure du Paysage, Arles et Versailles, France, 2019, 240p.

Penglai - Île aux fées

Dans la Chine ancienne, les îles ont une signification symbolique très forte. Les croyances de la Chine ancienne font en effet des îles des lieux d’immortalité. Après que l’empereur Qin Shi Huang (IIIe siècle avant notre ère) ait demandé à son administration de lui apporter un élixir d’immortalité et lui ait commandé la réalisation d’une armée de soldats en terre pour le protéger dans l’éternité, presque toutes les dynasties chinoises ont été marquées par des empereurs habités par cette quête d'immortalité. Les îles sont étroitement associées à la quête d’immortalité car d’après les empereurs chinois, des fées immortelles vivent sur les îles et le fait de pouvoir se rendre sur ces îles et de rencontrer les fées pouvait leur permettre de devenir immortels.

Si on se rend aujourd’hui à Shandong sur le site de Penglai, on peut voir, au bord de la mer et au sommet d’une falaise, une cité impériale dont la situation géographique interroge. Pourquoi cette cité apparaît-il ici, dans ce lieu particulier que constitue le littoral de la Mer de l’Est? C'est parce que les anciens empereurs se rendaient souvent au bord de la Mer de l'Est (où se trouve la péninsule de Shandong) pour regarder l’île aux fées et la montagne sacrée dans la mer. Cette péninsule de Shandong, qui s'appelait "Dong Lai" à l’époque, était l'endroit le plus visité par les empereurs.

MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité I . REGARDS

HORIZONTAUX: De l’usage des îles II . REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

Selon les sources dont nous disposons, l'empereur Qin Shihuang et l'empereur Han Wudi ont visité cette région à plusieurs reprises pour « wangxian » (regarder les fées). Les archives rapportent que l'empereur Han Wudi s’y est rendu huit fois. Ils y venaient à chaque fois pour "wangxian" parce que ce lieu était célèbre pour l’île aux fées que la mer révélait aux yeux de ceux qui la regardaient. Les empereurs n’étaient pas conscients du fait que l’île aux fées qu’ils voyaient n’existait pas et qu’il s’agissait seulement de mirages. Selon les recherches scientifiques d'aujourd'hui, dans cette péninsule de Shandong, les conditions géographiques et climatiques sont les plus propices au phénomène des mirages. C'est en effet l'endroit où le plus grand nombre de mirages a été enregistré le long de la côte chinoise. Selon la légende, l'empereur Han Wudi s’est rendu plusieurs fois sur la presqu’île de Shandong, et probablement parce qu'il sentait que cette île aux fées était trop lointaine et trop vague, il a fait construire sur la presqu’île de Shandong, depuis laquelle il observait les mirages, une cité identique à ses visions de l’île aux fées.

Après l’empereur Hanwu Di, les empereurs ont gardé cette aspiration aux îles des fées et aux montagnes pour les immortels, lointaines et improbables à atteindre. Ils ont fait construire des îles et des lacs artificiels dans leurs jardins impériaux. Le lac correspondait à la mer de l’est et l’île représentait l’île aux fées. Cette manière de concevoir leurs jardins impériaux est devenue une méthode traditionnelle pour toutes les dynasties.1

1 http://www.penglai.gov.cn/

Carte touristique de Penglai

Le développement des îles en Chine est-il aujourd’hui influencé par leurs charges symboliques? Aujourd’hui, pour les Chinois, les îles ont cessé d’exercer l’attraction magique qui était la leur dans la Chine ancienne. Lorsqu’elles ont été miniaturisées dans les lacs des anciens jardins impériaux, comme dans les jardins du palais d’été à Pékin, elles restent cependant associées, indépendamment de toute référence religieuse, à des lieux de paix et de méditation.

Aujourd’hui, lorsque l’actualité s’intéresse aux îles de la mer de Chine, c’est le plus souvent en rapport avec les conflits territoriaux qui opposent la Chine à ses voisins. Si elles gardent une dimension symbolique, celle-ci serait plutôt de nature militaire… Les îles sont maintenant perçues comme des avant-postes maritimes du territoire chinois et comme des terres susceptibles de justifier l’extension du domaine des eaux territoriales chinoises. En effet, les lois internationales autorisent un état à développer ses activités économiques jusqu’à 200 milles nautiques de ses côtes.

De nombreuses îles dans le sud de la mer de Chine sont disputées entre plusieurs états, dont le Vietnam et le Japon. Certaines se trouvent dans un espace maritime dont le gouvernement chinois actuel revendique la propriété. Cette déclaration de propriété se traduit par la construction d’infrastructures touristiques, de camps militaires et de pistes d’aviation. Cette conquête du domaine maritime se traduit également par la construction d’îles artificielles dans des zones où les fonds marins ne sont pas trop profonds. D’un autre point de vue et pour des raisons qui doivent beaucoup à l’histoire de Taïwan, l’île est associée pour les Chinois à un risque de perte et de sécession. Nous voyons donc qu’aujourd’hui en Chine, les enjeux des îles sont surtout géopolitiques et que leur conquête et leur aménagement ne sont ni dictés ni limités par les considérations d’une pensée symbolique.

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REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

La situation d’un pays voisin de la Chine, le Japon, est un peu particulière puisque ce pays constitue un archipel composé de près de 7000 îles et îlots. En Asie, ce «pays insularisé» est notoirement connu pour la singularité de ses modes de pensée, d’une modernité ou d’un traditionalisme extrêmes, pour son protectionnisme également, des attitudes qui rendent peutêtre ce pays comparable à ce que l’Angleterre représente pour les européens. Si l’urbanisation et l’industrialisation des quatre plus grandes îles (Honshū, Hokkaido, Kyūshu, Shikoku) estompent l’identité insulaire de ces territoires, d’autres îles, très nombreuses et parfois de dimension réduite, témoignent encore aujourd’hui des références mystiques et symboliques de cette culture. C’est en effet sur ces petites îles que les Japonais se rendent en pèlerinage à différents moments de l’année pour visiter les temples shintoïstes et les temples bouddhistes.

Dans la baie d’Hiroshima, l’île d’Itsukushima est l’une des plus connues. Il s’agit d’une île « sacrée » dans tous les sens du mot, le sens actuel - « ce qui appartient au domaine séparé, intangible et inviolable du religieux» - et un sens plus ancien : « qui ne peut pas être touché sans être souillé ».1 Les fidèles du shintoïsme n’avaient en effet pas le droit de poser leurs pieds sur cette île, si bien que le temple de Miyajima, dans lequel on honore les divinités Shinto, a été construit sur des pilotis au-dessus des eaux proches de la côte. Le sacré dans la perspective du shintoïsme résulte du regard spirituel que les fidèles s’exercent à porter sur les éléments du monde matériel et sur les forces de la nature. C’est ainsi que la terre, l’eau, l’air et le feu sont au centre d’une vénération proche de l’animisme.2

1 https://dictionnaire.lerobert.com/definition/sacre

2 "About Miyajima". Visit Hiroshima. Hiroshima International Tourism Association. Visité le 20 juillet 2021.

Temple de Miyajima sur l’île d’Itsukushima

Cet étonnement et ce respect religieux devant les éléments du monde naturel ne sont pas absents du projet conduit par Tadao Ando et par son mécène Soichiro Fukutake sur l’île de Naoshima, une petite île située…. Soichiro Fukutake a en effet demandé au célèbre architecte japonais de concevoir une architecture qui intègre aux paysages naturels de l’île des lieux d’exposition dédiés à l’art contemporain. Ce temple de l’art contemporain n’élance vers le ciel ni colonnes ni cloisons mais enracine plutôt ses structures dans la roche de l’île. Si ce choix architectural permet de réduire au maximum l’impact des constructions sur leur cadre naturel de l’île, il permet peut-être aussi de tracer une sorte de dessin à la surface de l’île qui suggère une relation avec des mondes inconnus… Par ce choix d’une architecture incrustée, l’île devient également une sorte d’écrin qui protège du monde matériel tout ce que les œuvres d’art doivent à l’invisible, à nos vies intérieures et à nos imaginaires souterrains.

Chichu Art Museum sur île de Naoshima

A. Entre terre et ciel : La relation des îles avec l'invisible

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HORIZONTAUX: De l’usage des îles II .

SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

Dans la Grèce antique, le temple est également la projection sur terre d’un espace invisible, l'espace carré que les augures délimitent dans le ciel pour recueillir, interpréter et délivrer les messages (présages) reçus des dieux.

Le mot latin «templum» est emprunté au grec « tem-i-on », lui-même formé à partir du verbe « termien » qui signifie « couper ». 1A la lumière de cette origine, qui n’est pas éloignée de celle du mot « sacré », nous comprenons mieux le lien qui unit l’île et le temple, l’île comme espace coupé, mis à part par les eaux des autres terres habitées et le temple découpé dans le ciel et sur la terre pour être le lieu d’une révélation. Ainsi que le rappelle A. Meistersheim dans un article publié dans les Cahiers slaves « (…) l'île est, par excellence, le lieu de rencontre des dieux et des hommes, le lieu de leurs combats, le lieu où se forgent les mythes, le lieu de naissance des principaux dieux du panthéon grec : Zeus est né en Crète, Héra à Samos, Hermès dans l'île de Pélops, Appolon à Délos, et Aphrodite dans l’île de Cythère». 2

1 https://www.grand-dictionnaire-latin.com/dictionnaire-latin-francais.php?lemma=TEMPLUM100

2 Meistersheim Anne, 2004, La figure de l'île sacrée, Cahiers slaves, n°7

Le temple d’Hera sur l’île de Samos

Cette correspondance entre l’île et l’expérience intérieure est présente dans toutes les cultures, du moins dans celles que nous avons interrogées de ce point de vue.

Dans les écritures du judaïsme et du christianisme, l’île émerge rarement des eaux en tant que lieu sacré, peut-être parce que les eaux sont rares dans les terres de Judée et de Galilée, mais elle surgit plutôt d’un rocher ou d’une montagne qui se dresse au centre d’un désert de sable. Alors que les Hébreux pérégrinent dans le désert du Sinaï, le dieu unique se manifeste à Moïse sur les hauteurs du Mont Horeb, plus connu aujourd’hui sous le nom de Mont Sinaï (cf. récits du Pentateuque). Le désert est une mer de sable; il isole les sommets rocheux des lieux habités de la même manière que l’eau des océans isole les îles de la terre du continent. C’est sur les montagnes qui émergent du désert que les Hébreux reçoivent les premières révélations d’un dieu unique.

Le Mont Horeb dans le désert du Sinaï

MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité I . REGARDS

HORIZONTAUX: De l’usage des îles II .

L’ exemple de l'île Seguin

Quelques siècles plus tard, dans le grand empire romain (empire d’orient et d’occident), les chrétiens des premiers siècles perçoivent les îles comme des lieux privilégiés pour mener leurs combats contre les passions et pour accéder par la prière à l’union à Dieu. Alors que la conversion au christianisme de l’empereur Constantin donne à l’église au IIIe siècle une reconnaissance politique et sociale et l’expose ainsi aux dangers spirituels d’une vie confortable et mondaine, les chrétiens d’orient qui souhaitent vivre radicalement leur foi se réfugient dans les déserts arides d’Egypte, territoires de toutes les extrémités, pour mener, tel saint Antoine le grand, leur vie d’ascèse et de renoncement aux plaisirs du monde. En occident, les îles se substituent à ces déserts ou plutôt deviennent les déserts dans lesquels se réfugient les chercheurs de Dieu. Tandis que les premiers ermites d’orient s’installent sur des colonnes au milieu de terres arides, les premiers solitaires d’occident se réfugient sur des îles et de préférence au sommet d’une île montagneuse.

En Ligurie, l’île de Gallianara est l’une des premières îles occidentales à avoir été colonisée par ces solitaires qui vont chercher Dieu loin de la société. Avant que les moines ne s’organisent en communautés et ne commencent à construire des monastères, ils vivaient seul en effet, comme l’atteste d’ailleurs l’origine du mot français qui les désigne : par l’intermédiaire du latin « monachus » et du grec « monakhos », le mot «moine» a été formé à partir de l’adjectif grec « monos » qui signifie « seul », « unique », « qui s’isole ».1 En prenant en compte l’origine de l’adjectif « isolé » qui apparaît en français au XVIIe siècle pour parler d’un terrain auquel on donne la forme et les caractéristiques d’une île, on voit que l’origine des mots éclaire bien les liens étroits qui unissent l’île et le moine. L’île et le moine renvoient au même détachement du monde, à la même résistance aux assauts déchainés, à la même question du salut ; salut des navigateurs égarés que l’île libère des violences de la tempête, salut de l’âme humaine qu’elle libère de l’assaut des passions. 1

L’ile de Gallinara

En Gaule, l’île de Lerina (aujourd’hui l’île saint Honorat, au large de Cannes) participe à ce mouvement d’implantation monastique lorsqu’ au début du Ve siècle, Honorat, futur évêque d’Arles, choisit ce lieu pour établir son désert. La mer, comme le désert, est un lieu que rien ne circonscrit, un lieu sans limites, une sorte de non-lieu ; elle devient signe du Dieu judéo-chrétien qui lui aussi n’a pas de limites et se tient partout. L’île, parce qu’elle appartient à cette immensité tout en posant les contours d’un territoire serait donc comme une sorte d’incarnation du Dieu invisible, un signe tangible de sa présence, une émergence dans l’espace et dans le temps du Dieu éternel. C’est du moins dans cette direction que s’oriente les interprétations théologiques des premiers habitants des îles de Lérins, en particulier lorsqu’ils décrivent l’île comme un jardin dont tous les serpents ont été chassés et qui brille désormais de toutes les fleurs et de toutes les beautés qui appartiennent au paradis.1

Si l’île s’exprime donc comme étant le temple de la présence divine, ceux qui font le choix de s’y installer demandent à ce lieu d’être transformés et de devenir eux- même temples de la présence de Dieu :

« Celui qui ne s’écarte pas du lieu où Tu habites devient lui-même temple de Dieu.» (Eucher, De Laude Eremi, 41)

1 Désert, Église, île sainte. Lérins et la sanctification des îles monastiques de l'Antiquité à la fin du Moyen Âge, Rosa Maria Dessi et Michel Lauwers.

Île sainte Marguerite – Îles de Lérina

A. Entre terre et ciel : La relation des îles avec l'invisible

MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité I . REGARDS

HORIZONTAUX: De l’usage des îles II .

SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

La dimension symbolique du territoire des îles est également très présente dans l’imaginaire de la Russie du nord et dans les projets qui seront développés sur ces territoires.

Qu’elles soient lacustres, marines ou fluviales, les îles transforment le littoral du nord de la Russie en une sorte de mosaïque qui, dans de nombreuses légendes, renvoie au moment de la création du monde où l’eau et la terre n’étaient pas encore clairement différenciés.1 L’île est en elle-même porteuse d’une instabilité.

Le cas des îles flottantes est particulièrement intéressant de ce point de vue. A l’est de Moscou, le lac de Shaïtan et ses îles sont au centre de légendes qui illustrent bien les craintes et les croyances des habitants de ces lieux instables entre l’eau et la terre. Les eaux souterraines de ce lac circulent dans des sortes de cheminées qui parfois s’obstruent et provoquent, sous la pression des eaux brusquement libérées, des fontaines et jets d’eau pouvant atteindre une dizaine de mètres de hauteur… Ces forces physiques qui s’exercent sous les eaux agissent également sur les berges et provoquent le détachement de parcelles de terres qui flottent à la surface du lac. Ces phénomènes s’accompagnent d’un vrombissement continu qui vaut à cette île d’être connue sous le nom d’île du diable. Les légendes locales racontent encore aujourd’hui que la forêt environnante a été le théâtre d’une guerre terrible entre les tribus adoratrices des divinités du bien et les tribus soumises aux divinités du mal, les secondes poussant les premières à se suicider… Les larmes versées par les femmes et par leurs enfants ont donné naissance à ce lac qui depuis sert d’abri au démon…. Dans cette partie du monde également, l’île est au centre d’un univers fantastique.

1 Kamkin A., Bouvard Julie, 2004, Les monastères insulaires dans l 'espace sacral et la culture spirituelle de la Russie du Nord. In: Cahiers slaves, n°7, L'île et le sacré dans la Russie du Nord. pp. 43-58

Lac Shaïtan, région de Kirov (Russie)

Bien avant que les récits bibliques de la Genèse ne soient diffusés dans cette partie du monde – c’est seulement au Xe siècle que le prince Vladimir demanda le baptême chrétien pour lui et pour son peuple, le peuple des Rous se représentait la création du monde sous la forme d’une grande île émergeant des eaux. Toute la terre représentait donc une île et cette île était représentée surmontée par un rocher, symbole de force et de stabilité; parfois l’île elle-même se réduit à un énorme rocher. Sous ce rocher, les mythes traditionnels de la Russie païenne situent les lieux où demeurent les forces les plus puissantes et les plus obscures de l’univers.

Le nombre important des labyrinthes exprime également la forte relation que les îles russes entretiennent avec l’invisible. Parmi des centaines d’autres, la petite île de Zayatsky (dans l’ archipel des îles Solovski) mérite une mention spéciale. En effet, au premier millénaire avant Jésus-Christ, cette île était l’un des sanctuaires païens les plus importants. Il résulte de cette histoire que les archéologues ont découvert treize labyrinthes sur cette île, neuf cents empilements de pierres et d’autres vestiges qui témoignent de la culture de cette partie du monde, la culture Sami.

Labyrinthe sur l'île Bolchoï Zayatsky (archipel des îles Solovetsky)

A. Entre terre et ciel : La relation des îles avec l'invisible

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FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

L’île légendaire de Bujan

Un grand folkloriste russe du XIXe siècle, Alexandre Afanassiev, a répertorié et étudié les légendes les plus anciennes de la Russie en vue de mieux connaître les croyances des mythologies païennes. Son travail a été poursuivi et de nombreux spécialistes s’accordent aujourd’hui pour penser que l'île imaginaire de Bujan (Buyan, Bouïane) est la plus représentative des motifs traditionnels de la mythologie insulaire russe. Cette île réunit en effet tous les objets qui sont caractéristiques des mythes insulaires russes les plus anciens : un rocher, une colonne, un chêne, un buisson, la toison d’un animal, des forges et des démonsforgerons, des épées, des flèches, etc.

Les héros des contes traditionnels russes parcourent cette île à la recherche des objets magiques qui pourraient les aider à combattre le mal. Un chêne mystique pousse sur l'île, et la mort de Koshchei, un immortel effrayant que les enfants russes connaissent aussi bien que Baba Yaga, est cachée dans les branches de cet arbre... Il y a aussi une pierre sacrée, Alatyr, qui marque le centre du monde. Tous les désirs se réalisent pour celui qui parvient à trouver cette pierre…

Dans un article qu’il consacre à la mythologie des îles, Albert Bajburin, professeur à l’Université européenne de Saint-Pétersbourg, rappelle aussi que dans les légendes anciennes les habitants des îles sont rarement des vivants : «En général, il n'y a pas de vivants parmi eux. Et si un jeune homme ou une jeune fille apparaissent sur l'île, ils sont soit morts, soit prisonniers. ». 1

Ces quelques éléments permettent de comprendre que l’île se situe dans l’imaginaire russe au carrefour des forces vitales et des forces maléfiques et représente le lieu de leur affrontement. Ces éléments culturels étaient encore bien vivants lorsque la Russie a été christianisée au Xe siècle et ils n’ont pas manqué d’interpeller les missionnaires chrétiens qui, comme ils l’avaient fait dans l’empire gallo-romain, se sont empressés d’édifier des sanctuaires, puis des monastères sur ces îles. Dans la mesure où les îles étaient le berceau des croyances chamaniques de la Russie païenne, elles furent christianisées en priorité, voire en urgence. Leurs sanctuaires et leurs monastères représentaient selon Alexandre Kamkin, professeur à l’université de Vologda, une sorte d’avant-poste des premières missions chrétiennes sur le front de la lutte contre les croyances dites païennes. La symbolique des îles évolue: les îles cessent à cette époque d’être des lieux d’instabilité cosmique et deviennent des forteresses de certitudes théologiques.

1 Bajburin A., Henderson-Stewart Xenia. Quelques aspects de la mythologie de l'île. In: Cahiers slaves, n°7, 2004. L'île et le sacré dans la Russie du Nord. pp. 1-9

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REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

Les premiers monastères ont ainsi été construits entre le XIe et le XVe siècle sur les plus grandes îles du nord de la Russie, c’est-à-dire aux frontières d’un espace territorial qu’ils cherchaient à délimiter et à protéger d’autres influences culturelles, en particulier les influences étrangères du monde barbare. Sur le plan spirituel, la rudesse des conditions climatiques appelait au dépassement de soi, l’isolement des lieux permettaient d’échapper aux distractions qui menacent les contemplatifs tandis que la grandeur des paysages rendait hommage à la beauté de la création.

Sur le lac Ladoga, le monastère de Valaam a été construit dans cet esprit au XIe siècle sur l’île du même nom par deux missionnaires grecs, saint Serge et saint Germain. Après avoir été fermé et abandonné à l’époque soviétique, ce monastère est redevenu en Russie le centre spirituel qu’il était et est habité aujourd’hui par environ deux cents moines.

Monastère de Valaam (Carélie, Russie)

Les représentations de l’île dans l’imaginaire chrétien sont assez semblables en Russie et en Europe occidentale. Indépendamment de la tradition du christianisme, tradition latine dans le cas de l’Europe occidentale ou tradition gréco-byzantine dans le cas de la Russie, l’île apparaît premièrement comme un lieu privilégié pour être en phase avec son intériorité, aussi bien pour prendre conscience de soi-même que pour prendre conscience de la présence de Dieu. Elle apparaît ainsi comme un petit ciel sur la terre, sur lequel peuvent se réfugier les hommes aux prises avec eux-mêmes, avec le sens de leur vie ou avec les tourments de la vie en société. Cette île dont peut venir la paix et le salut est très bien évoquée dans le film que le réalisateur russe Pavel Lounguine a consacré en 2006 à la folie d’un moine tourmenté pendant toute sa vie par la culpabilité d’un crime dont les premières minutes du film permettent de comprendre l’horreur et la lâcheté. Le film date de 2006 et s’intitule « Oustrov » (« l’île » en français). C’est en effet sur une île non éloignée de son monastère – lui-même située sur une île- que ce moine va chercher l’apaisement et l’équilibre dans toutes les situations extrêmes de sa vie en communauté.

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Affiche du film « L’île »

Le territoire de l’île est également associé à la mort et à la vie après celle-ci, une autre dimension des mondes invisibles. Qu’il s’agisse de l’île San Michele au nord de Venise, de celle d’Hart Island près de New-York ou de l’île des morts en Bretagne, les exemples d’îles dédiées à l’implantation de cimetières sont assez nombreux. Même si des raisons sanitaires peuvent guider aujourd’hui ce choix - on enterre encore aujourd’hui les victimes de la Covid sur l’île d’Hart Island, les mythologies en relation avec la mort donnent une place particulière à l’île.

Île-cimetière San-Michele de Venise

L’île du purgatoire et du paradis Dans la Divine comédie, c’est sur une île que Dante situe le paradis et le purgatoire.1 Cette île comporte trois niveaux : une plage où les âmes sont accueillies; des terrasses sur les pentes de l’île où Dante place le purgatoire ; un sommet enfin où se trouve le paradis. Dans le XXXIVe Chant de l’Enfer, Virgile explique à Dante comment cette île s’est formée : Lorsque Lucifer a créé le trou de l’enfer, toute la terre contenue dans ce trou a été projeté de l’autre côté du monde et l’île-montagne du paradis et du purgatoire a surgi dans l’hémisphère sud.

1 Pour les catholiques, le purgatoire est un lieu intermédiaire entre l’enfer et le paradis où les âmes attendent d’être sauvées.

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Joachim Patinir, Charon traversant le Styx

Dans la mythologie grecque, le lieu des séjours des âmes après la mort est aussi un lieu entouré par l’eau. Deux fleuves délimitent en effet le royaume des morts, le Styx et l’Achéron. Un passeur, Charon, transporte les morts et les conduits sur l’autre rive, celle où se tient l’Hadès, le lieu de séjour des morts.

«Un batelier effrayant surveille ces eaux et ces fleuves, couvert d’une saleté terrible à voir : c’est Charon...»

Virgile, Énéide, livre VI, vers 298 - 299

Plan de l'Enfer

Dans toutes les cultures que nous avons interrogées, mais il faudrait aussi pouvoir parler de l’Egypte et des civilisations amérindiennes, les îles entrent en résonance, avec les espaces de la vie intérieure et de la recherche spirituelle. Cette correspondance entre l’île et le monde sacré, même si elle trouve ses origines dans le passé, trouve un écho dans le présent et dans les projets adaptés au présent. Pour ne citer qu’un exemple, le Plan Local d’Urbanisme de la ville de Cannes sanctuarise depuis 2019 les îles de Lérins dont nous avons parlé plus haut. Cette réglementation interdit le changement d’affectation des locaux et le développement d’activités commerciales sur ces lieux qui sont marquées depuis plusieurs siècles par le passé de leur histoire monastique.1

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REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

B. Le paradis ici et maintenant : L’île comme rêve d’une autre société.

Gravure d'Ambrosius Holbein Première édition de l'Utopie de Thomas More (1516)

Tous les mouvements de l’esprit ne conduisent pas jusqu’au ciel et on peut aussi attendre le bonheur d’autres manières de vivre, d’autres manières de penser la société dans l’ici et maintenant de notre existence sur terre. Les nombreuses utopies qui traversent l’histoire des hommes et des sociétés s’apparentent à la recherche d’un paradis sur terre et l’île conserve un rôle central dans cette quête. Avant d’être une organisation sociale idéale, l’utopie est en effet une île, l’île d’Utopia. « Utopia », c’est le nom choisi par Thomas More au XVe siècle pour dénommer cette île à laquelle il consacre une fiction pour dénoncer les aberrations de la politique conduite par le gouvernement anglais, pour critiquer les injustices sociales qui en résultent et pour proposer une autre manière de penser la société. L’île permet à Thomas More de situer son récit dans une dimension qui ne doit rien aux modèles de sociétés existants, ce dont on peut déduire que rien de ce qui existe déjà ne peut être repris pour atteindre un idéal social, qu’il faut s’éloigner de ce qui existe déjà pour pouvoir inventer autre chose, qu’il faut inventer un lieu qui n’existe nulle part (« nulle part », c’est l’origine du mot « Utopia »).

Selon la fiction, l’île d’Utopia a été découverte aux confins du nouveau monde par un explorateur portugais, Raphaël Hytholédée, que Thomas More prétend avoir rencontré. Les règles qui régissent la vie de ses cent mille habitants sont de tous points de vue opposées au modèle de la société européenne et de la société anglaise en particulier: la propriété privée n’existe pas et un tirage au sort attribue tous les dix ans une nouvelle maison aux habitants ; l’argent est inutile car chacun peut se servir sur les marchés pour satisfaire ses besoins. On ne pratique pas la guerre sauf pour acquérir le droit de cultiver une terre abandonnée dont on a besoin pour répondre à ses besoins alimentaires. Les affaires les plus importantes de la ville sont décidées par des assemblées populaires qui élisent également la plupart des fonctionnaires, ce qui bien sûr distingue le fonctionnement politique de cette île de la monarchie anglaise.

Dans le contexte des guerres de religions qui ont violemment opposé les catholiques et les protestants au XVe siècle, l’île d’Utopia est également remarquable par la liberté religieuse qu’elle garantit à ses occupants. L’athéisme est cependant interdit et peut conduire à la perte de la citoyenneté.

Si au premier abord la société imaginée par Thomas More semble être un modèle de tolérance, d’égalité et de générosité sociale, on est malgré tout frappés par le poids des règles et par l’organisation militaire qu’elle impose à ses membres. Sur le plan de l’urbanisme, on est interpellés par le fait que les 54 villes que comportent ce pays imaginaire sont toutes dessinées selon le même plan et par le même architecte. L’architecture est pensée pour le groupe et les habitants ne sont même pas consultés pour le choix de la maison dans laquelle ils habiteront.

B. Le paradis ici et maintenant : L’île comme rêve d’une autre société.

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La vie quotidienne des habitants est de même solidement encadré : 6 heures de travail par jour, un service civique agricole obligatoire, des repas pris ensemble à heure fixe et au son du clairon, etc.

Quant à la liberté d’expression, elle existe mais ne doit pas sortir du cadre des séances de discussions organisées au sénat. Pour garantir qu’elle ne puisse pas servir de prétexte à l’organisation de complots ou d’intrigues, on condamne à la peine de mort les citoyens qui prendraient la liberté d’aborder les problèmes politiques en dehors de l’enceinte du sénat…

Le projet de Thomas More conduit à penser qu’on ne peut pas construire le bonheur d’une société en prenant en compte les aspirations individuelles des citoyens qui la composent. Le bonheur et le bien-être doivent être planifiés au niveau du collectif et c’est ensuite à l’individu d’adapter à son cas particulier ce qui a été pensé pour l’ensemble. Dans la mesure où ce système traite les citoyens comme les membres indifférenciés d’un seul et même ensemble, rigide et sans nuances, on peut le qualifier de « monolithique ». Le choix de ce mot fait revenir à notre esprit l’image du rocher, du monolithe, du gros rocher qui se dresse tel une île au milieu de l’océan. Telle une île monumentale is olée au milieu de l’Océan, l’île de Thomas More n’est en interaction qu’avec elle-même. Sachant que les penseurs du communisme, Karl Marx en particulier, ont trouvé dans l’œuvre de Thomas More une part de leur inspiration politique, on ne peut pas éviter de faire une comparaison entre l’île d’Utopia et les systèmes politiques qui ont dû se fermer aux influences extérieures pour assurer leur existence et leur durée dans le temps : la Chine avant son ouverture des années 90, les pays de l’est isolés du reste de l’Europe par le mur de Berlin, l’Albanie et bien sûr l’île de Cuba…

Arlequin porte Iphicrate sur son dos

L’île reste le cadre de l’utopie et de la critique de la société dans la pièce de théâtre que l’écrivain français Marivaux consacre deux siècles plus tard à la mise en scène des relations entre les maîtres et leurs domestiques (L’île des esclaves, 1725).

Lorsqu’ils arrivent sur cette île après le naufrage de leur bateau, Iphicrate (le maître) et Arlequin (son serviteur) entrent dans une microsociété dans laquelle l’ordre social est inversé : les maîtres y deviennent des esclaves tandis que ces derniers reçoivent le statut social de leurs anciens maîtres. Bien conscient des dangers que cette situation représente pour lui, Iphicrate cherche les moyens de s’évader puis tente de tuer son serviteur lorsque celui-ci refuse le projet d’une évasion. C’est alors que survient le maître des lieux, Trivelin, accompagné par deux autres survivants du naufrage (Euphrosine, une jeune maîtresse athénienne et son esclave Cléanthis). La règle de vie qui permettra aux naufragés de séjourner sur l’île n’admet aucune discussion: les maîtres doivent échanger avec leurs esclaves leur nom, leurs vêtements et leurs fonctions, de telle sorte que les premiers expérimentent les conditions de vie qu’ils imposaient jusqu’ici aux seconds.

B. Le paradis ici et maintenant : L’île comme rêve d’une autre société.

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HORIZONTAUX: De l’usage des îles II .

SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

L’enjeu de ce bouleversement social n’est pas de venger les esclaves en inversant les rapports de domination mais plutôt d’inviter les uns et les autres à découvrir que la hiérarchie sociale procède de conventions qui ne respectent aucun principe d’humanité et qui sont entièrement arbitraires. Il s’agira de rééduquer les maîtres sur le plan moral en les sensibilisant à toutes les humiliations qu’ils imposent à leurs esclaves et de conduire les esclaves à faire le choix du pardon et de la pitié pour se libérer à leur tour de la haine qu’ils ressentent pour leurs maîtres.

L’île des esclaves apparaît donc dans cette comédie sociale comme le banc d’essai d’une société dans laquelle la grandeur et le pouvoir d’un homme ne sont plus hérités du rang social que la naissance accorde par hasard mais résulte de son humanité, de son empathie, de sa capacité à comprendre la souffrance de l’autre et à ne pas s’opposer à son bonheur. En lisant cette pièce, on sourit beaucoup mais on comprend surtout que l’ordre établi est en train de faire naufrage et qu’il existe des alternatives même si celles-ci, au début du XVIIe siècle, ne dépasse pas le cadre des fictions, qui plus est de fictions mises en scène sur des îles qui soulignent leur éloignement du monde réel.1 En choisissant le territoire d’une île pour mettre en scène cette comédie politique, Marivaux prend la précaution d’éloigner sa critique de la société du contexte politique de son pays, l’Angleterre, comme si ce qui se passait sur une île ne pouvait pas arriver dans la réalité. Les îles étant lointaines et séparées du monde, ce qui s’y passe ne peut être perçu autrement que comme une extravagance sans conséquence pour l’ordre établi de la société. L’île apporte la distance nécessaire à la fiction et cette distance est encore plus utile lorsque la fiction met en scène une critique du gouvernement…

1 https://commentairecompose.fr/l-ile-des-esclaves-marivaux/ https://www.etudes-litteraires.com/marivaux-ile-des-esclaves.php

Dans un roman publié en 1995, Alexandre Jardin met en scène une utopie d’un autre genre dans le cadre d’une île, ou plutôt d’un archipel d’îles, inconnues sur les cartes mais localisées malgré tout dans le Pacifique sud. L’île des gauchers – c’est également le titre du roman – est une sorte de paradis amoureux dans lequel des hommes et des femmes se proposent de vivre ensemble selon d’autres normes que celles habituellement acceptées par les droitiers. Les droitiers représentent dans ce roman les personnes qui vivent « comme tout le monde », c’est-à-dire qui organisent leur vie autour des objectifs de l’intégration et de la réussite sociale. Les « gauchers » se singularisent, non pas par le fait d’écrire de la main gauche, mais par le fait de ne pas pouvoir vivre autour des objectifs communément acceptés et de poursuivre un idéal qui consiste en l’apprentissage d’un art d’aimer parfait.1

Comme le dit Alexandre Jardin dans une interview reproduite sur le site des éditions Gallimard, « mettre l'amour à la première place est tout à fait révolutionnaire dans notre société de droitiers, qui le relègue au dernier rang des valeurs. »2

Quelle que soit l’utopie, qu’elle soit politique ou sentimentale, elle semble fondée sur l’espoir de pouvoir conduire les hommes au bonheur en agissant sur les règles de la société dans laquelle ils vivent ensemble. Dans un contexte insulaire, l’utopie sera d’autant plus facile à atteindre que l’île constitue un territoire vierge, c’est-à-dire non déterminé par des influences, des règles et des valeurs préexistantes.

1 Jardin Alexandre, 1995, L’île des gauchers, Gallimard

2 http://www.gallimard.fr›catalog›entretiens

B. Le paradis ici et maintenant : L’île comme rêve d’une autre société.

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C. De l’île-nature à l’île écologique: La recherche de nouveaux modèles.

Parmi les projets proposés par les habitants de Boulogne pour le réaménagement de l’île Seguin (cf. sondage Google Form), plusieurs propositions concernent l’aménagement d’espaces verts, voire une revégétalisation naturelle de l’île, afin d’offrir à la population urbaine des alentours un lieu de reconnexion à la nature. Ces propositions proviennent sans doute des personnes qui souhaitent que l’avenir des villes soit pensé dans la logique des tendances à la décroissance, décroissance industrielle, décroissance urbaine et donc réduction des impacts de la construction sur le cadre de vie. En espérant que son insularité lui permettra de rester à l’écart des projets de construction, ces propositions attendent donc de l’île qu’elle puisse apporter sa part à la « renaturalisation » des villes ou du moins à une autre approche de la construction. Ces attentes sont très proches de celles qui ont été mises en œuvre ces dernières années pour recréer des espaces naturels sur l'île Mosselman, à Saint Lô dans le département de la Manche, ou sur l’île aux planches dans la ville du Mans.

Pour illustrer ce rapport symbolique de l’île à la nature, on peut également citer les réponses qui proposent la construction d’éco-quartiers en mettant l’accent sur l’emploi de matériaux « naturels ». La demande porte ici premièrement sur la nature des matériaux de construction. L’enlèvement des matériaux de l’usine Renault a peut-être laissé de mauvais souvenirs…

L’attention portée aux matériaux est au centre des projets de l’architecte François Champsaur. Après avoir fermé son agence à Paris, François Champsaur s’est installé sur l’île de Majorque où il restaure aujourd’hui une maison avec des matériaux qu’il qualifie lui-même de « compostables » et qui cherchent donc ne pas avoir d’empreinte sur l’environnement et en particulier sur les rejets de carbone. C’est dans le même esprit qu’il a construit récemment l’hôtel Malpany1, sur l’île de Saint Barthélémy. Les chambres de cet hôtel sont des petits pavillons construits en bois, entourées par la végétation naturelle de l’île ou par un jardin cultivé en permaculture pour répondre aux besoins en légumes frais du restaurant de l’hôtel. Un article publié dans le Monde résume son projet dans les mots suivants :

« L’architecte d’intérieur et designer n’a pas attendu la pandémie pour diminuer son empreinte carbone. Il a déserté les supermarchés depuis quinze ans déjà, n’achète plus ses produits qu’en circuits courts et pratique la décroissance dans sa vie privée comme professionnelle, teintant d’un vert chlorophylle le mythique mantra des designers modernistes, « less is more ». (…) Depuis près de trois ans, le voilà parti en croisade écologique avec la ferme intention de sortir des modèles de création et de fabrication habituels pour défricher d’autres territoires, plus cohérents avec sa prise de conscience d’un nécessaire retour à la nature, à la simplicité, au bon sens. » 2

1 https://www.maison.com/ailleurs/hotels/hotel-manapany-quintessence-luxe-9535/

2 Le Monde (site web), m-styles, samedi 16 octobre 2021

Hôtel Manapany, Saint Barth, île des Caraïbes

C. De l’île-nature à l’île écologique: La recherche de nouveaux modèles.

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HORIZONTAUX: De l’usage des îles

L’ exemple de l'île Seguin

C’est dans un état d’esprit différent mais cependant très proche que la génération hippie des années 70 s’est lancée à la recherche d’îlots naturels pour échapper à la société de consommation et pour réinventer d’autres manières de vivre en société. A cette époque, en pleine période de croissance industrielle, on ne pose pas comme aujourd’hui les problèmes globaux du réchauffement du climat, on n’espère pas non plus pouvoir changer les modes de pensée et de consommation de toute la société, mais on invente des micro sociétés dans lesquelles on cherche à construire une autre relation à la nature, à soi-même et aux autres. On se dirige alors vers la nature comme vers un lieu de contestation de la société, un lieu de sa refondation à échelle réduite autour des ressources offertes par la nature et par un choix de simplicité. Parmi ces expériences, nous pouvons citer par exemple celle qui s’est déroulée pendant huit années sur l’île de Kauai, la quatrième île de l’archipel de Hawaï.

Pour échapper aux violences policières dont les étudiants sont victimes dans le cadre des manifestations d’opposition à la guerre du Vietnam, en particulier sur le campus de Berkeley, un petit groupe de treize d’entre eux, bientôt rejoints par beaucoup d’autres, débarquent sur l’île de Kauai en 1969.

Île de Kauai, la quatrième île de l’archipel de Hawaï

Pour cette génération qui se définit par ses valeurs non-violentes et par son refus de participer à la guerre du Vietnam, l’île-nature représente tout d’abord le lieu où il est plus facile d’échapper à l’autorité et à la contrainte de l’Etat. Elle offre également le territoire espéré pour expérimenter d’autres formes d’organisation sociale. Comme dans la plupart des communautés hippies de l’époque, on expérimente à Taylor Camp un autre rapport à la nature, un rapport qui ne soit plus centrée sur sa transformation par le travail, un mode de vie autarcique basé sur une agriculture familiale, une relation à son corps et au corps des autres qui libère de l’obligation de porter des vêtements et donc de les fabriquer. L’île donne l’espoir de pouvoir reconstruire la société dans des conditions proches de celles de la société préindustrielle. 1

Cette expérience aurait pu être vécue dans un territoire non insulaire, mais le contexte de l’île, une nouvelle fois, amplifie la dimension symbolique de la rupture par rapport à la société et de la réconciliation avec la nature.

1 https://www.messynessychic.com/2013/08/29/paradise-lost-the-hippie-refugee-camp/

C. De l’île-nature à l’île écologique: La recherche de nouveaux modèles.

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ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

Les hippies sur l'île de Kauai

Comme pour Robinson Crusoé, l’un des principaux défis a consisté pour les premiers arrivants sur l’île de Kauai à se doter d’abris pour se protéger des intempéries. En utilisant les ressources naturelles de l’île, les forêts de bambous en particulier, les réfugiés de Taylor Camp se lancent dans la construction de maisons sur pilotis et de cabanes jusque dans la cime des arbres. Indépendamment des dangers naturels dont permet de se protéger cette architecture en hauteur, les serpents en particulier, on peut en interpréter le choix en relation avec la volonté d’isoler son habitat par les airs avec la même efficacité que l’île l’isole par les eaux.

Le fût des arbres fournissant les poteaux d’angle qui portent les étages et soutiennent la toiture, nous nous trouvons devant un type d’abri qui évoque la forêt de nos origines et qui apporte toute la sécurité associée à celle-ci. Si, indépendamment de nos systèmes de croyances, nous nous sentons si bien dans les cryptes et dans les églises, n’est-ce pas parce que les colonnades et les voûtes de celles-ci évoquent pour notre inconscient primitif les arbres sous lesquels nos ancêtres recherchaient une protection par rapport aux dangers des plaines et des espaces ouverts? Cette question m’a interpellée. A la lumière de plusieurs théories psychanalytiques, elle était posée il y a quelques années par le guide touristique qui faisait visiter la crypte de l’abbaye de Saint Benoît-sur-Loire…

Les cabanes de Taylor camp (John Wehrheim)

A toutes les époques et dans des contextes très différents, le refus de la société telle qu’elle est sous-jacent aux nombreux projets de retour à la nature, qui plus est lorsque le cadre d’une île accentue la distance et l’isolement par rapport à cette société. Parmi les colons anglais qui se sont installés en Nouvelle-Zélande au XIXe siècle, certains, impressionnés par la beauté paradisiaque des paysages naturels, ont rêvé de recréer aux antipodes de l’Angleterre le cadre et les modes de vie qui étaient ceux de l’Angleterre avant la révolution industrielle. Il s’agit pour ces colons de réapprendre à subvenir à leurs besoins à partir des seules ressources de la nature et de l’agriculture, sans avoir besoin d’acheter les biens de consommation produits par les manufactures. Il s’agit de contester le développement technique en démontrant que celui-ci n’est pas nécessaire pour apporter ce que la nature a déjà donné. Ce projet se heurtera rapidement au manque de compétences des colons dans le domaine de l’agriculture et ne connaîtra pas de lendemain.

Hay Ibn Yakzan et sa mère adoptive Hay Ibn Yakzan

Pour la relation privilégiée qu’elle permet d’avoir avec les enseignements de la nature, l’île entre également en conflit avec la société des hommes dans la littérature arabe du XIIe siècle. Bien avant que Daniel Defoe ne mette en scène au XVIIIe son Robinson sur une île déserte, un récit du philosophe Hay Ibn Yakzan idéalise le retrait du monde sur une île. Dans ce récit, un enfant né sans père ni mère, commence sa vie sur une île déserte. Nourri par une gazelle et élevé parmi les animaux sauvages, il essaie de comprendre le monde qui l'entoure en observant la nature. Il réussit progressivement à comprendre les fondements de l'univers et les lois de la vie.

Lorsqu’il se dirige vers les autres hommes pour clarifier et confirmer ses connaissances, il se heurte à l’indifférence, aux mensonges, aux préjugés, à la vulgarité. Il choisit alors de retourner sur son île isolée, laquelle devient pour lui le seul territoire où la pensée et la raison peuvent conduire à une compréhension du monde.1

1 https://www.franceculture.fr/emissions/questions-dislam/le-philosophe-autodidacte

C. De l’île-nature à l’île écologique: La recherche de nouveaux modèles.

MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité I . REGARDS HORIZONTAUX: De l’usage des îles II .

ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

Une réponse originale a été donnée par l’une des personnes ayant répondu au sondage que nous avons mis en place avec « Google Form » pour connaître les attentes des habitants de Boulogne-Billancourt au sujet de l’île Seguin. Celle-ci propose en effet de faire de cette île un espace déconnecté d’Internet et par conséquent de tous les réseaux numériques. De même que les colons néozélandais voulaient revenir à l’époque préindustrielle et à une sorte d’état de nature, leur nostalgie du paradis, de même cette réponse exprime le désir de revenir trente ou quarante ans en arrière, à une époque où la communication était moins rapide et moins instantanée qu’elle ne l’est aujourd’hui. Elle semble refléter le malaise, et parfois la souffrance, qui peuvent être provoqués par la rapidité des moyens de communication numériques et surtout par l’obligation ou le besoin d’être toujours connectés. Dans ce contexte, l’île réapparaît comme un lieu dans lequel on peut venir vivre autrement, dans le cas présent comme un lieu où on peut se recentrer sur soi-même en se déconnectant de la pression numérique du monde extérieur. Comment va-t-on se débrouiller avec soi-même une fois privé de tous nos SMS et de toutes les images que nous recevons des autres par le biais des messageries et autres réseaux sociaux ? Telle semble être le défi lancé par cette île déconnectée. Tel semble être également le problème de Robinson Crusoé sur son île.

D. L’île, un espace déconnecté: La chance ou le danger de revenir à soi-même.

Robinson Crusoé sur son île

Cette déconnection par rapport aux autres et à la société toute entière, Robinson Crusoé ne l’a pas vécu dans le contexte d’une zone « blanche », une zone sans accès à l’Internet, mais à la suite d’un naufrage qui l’oblige à trouver refuge sur une île déserte et ensuite à se donner les moyens d’y survivre. Dans le premier comme dans le second cas, l’homme se trouve brutalement privé de la communication avec ses semblables et doit apprendre à vivre devant et par rapport à lui-même. Les deux situations se distinguent malgré tout par le fait qu’on sort plus facilement d’une zone blanche (surtout lorsqu’on a fait le choix d’y entrer) qu’on ne peut quitter une île déserte sur laquelle on a fait naufrage. Les deux situations posent cependant la question de notre dépendance aux autres et aux relations que nous entretenons avec eux.

Si Robinson fait preuve de beaucoup d’ingéniosité pour résoudre les problèmes matériels en rapport avec son installation sur cette île déserte et sauvage, il reste en revanche très désemparé par l’expérience de sa solitude :

« Moi, dont la seule affliction était de me voir banni de la société humaine, seul, entouré par le vaste Océan, retranché de l’humanité et condamné à ce que j’appelais une vie silencieuse ; moi qui étais un homme que le Ciel jugeait indigne d’être compté parmi les vivants et de figurer parmi le reste de ses créatures ; moi pour qui la vue d’un être de mon espèce aurait semblé un retour de la mort à la vie, et la plus grande bénédiction qu’après ma félicité éternelle le Ciel lui-même pût m’accorder ; moi, dis-je, je tremblais à la seule idée de voir un homme, et j’étais près de m’enfoncer sous terre à cette ombre, à cette apparence muette qu’un homme avait mis le pied dans l’île! »

(Robinson Crusoé, Daniel Defoe, chapitre 2)

A quelle expérience aspirent les passants de l’île Seguin en demandant une île sur laquelle ils pourraient se rendre pour faire l’expérience de la déconnexion? L’expérience de leur liberté, de leur solitude, de leurs aspirations ou tendances anti-sociales? On peut seulement remarquer que cette proposition a été exprimée.

D. L’île, un espace déconnecté: La chance ou le danger de revenir à soi-même.

MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité I . REGARDS HORIZONTAUX: De l’usage des îles II .

REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

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2. Regards horizontaux: de l’usage des îles

II. REGARDS HORIZONTAUX: De l’usage des îles

A. Du bagne au Goulag: Les micro sociétés pénitentiaires

B. Les îles confinés: La place des îles dans la gestion des épidémies

C. Les atouts industriels du territoire des îles

MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité I . REGARDS HORIZONTAUX: De l’usage des îles II .

REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

II. REGARDS HORIZONTAUX: De l’usage des îles

Île Solovki en Russie

sociétés pénitentiaires

Comme

nous l’avons vu dans la première partie, les îles ouvrent des portes vers toutes les dimensions de l’imaginaire, interpellent nos représentations symboliques, enfantent des rêves et inspirent des formes de vie en marge des systèmes établis, en marge de la vie réelle. Si elles sont clairement perçues comme des lieux de passage entre deux mondes, elles n’en reçoivent pas moins des continents et des sociétés dont elles sont proches un certain nombre de fonctions qui détermineront l’aménagement de leurs territoires.

Nous envisagerons dans cette deuxième partie les fonctions de l’île dans le cadre des usages que la société continentale met en place pour répondre à ses besoins. Aussi bien pour offrir ses espaces clos à la détention des indésirables de la société, que pour isoler les malades contagieux ou pour créer une mini société ouvrière partageant le même lieu de vie et de travail, l’île met à la disposition du continent les spécificités de son territoire. Nous présenterons ici quelques exemples de ces îles, qu’elles soient dédiées à la détention (îles-prisons), à la protection sanitaire (îles de la quarantaine) ou à l’industrialisation (îles des usines). Le point commun entre ces activités réside dans le fait qu’on cherche à les éloigner de l’espace social, des lieux dans lesquels on vit. Après avoir été la terre des Dieux, après avoir hébergé les utopies paradisiaques et les rêveries d’un retour à l’état de nature, l’île entre désormais en interaction avec les besoins et les attentes de la société continentale. L’île devient un espace utile.

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REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

A. Du bagne au Goulag : Les micro sociétés pénitentiaires

Lorsque les îles sont des lieux inhospitaliers et hostiles, en particulier pour des raisons climatiques, elles accueillent fréquemment des colonies pénitentiaires dont la philosophie est d’imposer aux prisonniers des conditions de vie basées sur le travail, l’effort physique, la fatigue, la souffrance. L’enjeu de la détention dépasse alors la nécessité de protéger la société d’individus dangereux. Ces camps allient en effet la douleur morale de l’enfermement à la douleur physique de conditions de travail extrêmes avec l’objectif de déconstruire la personnalité des détenus en les conduisant à l’épuisement.

Un premier exemple nous est fourni par les bagnes que la France décide de déplacer dans ses colonies au début du XIXe siècle pour résoudre les problèmes de surpopulation des grandes prisons françaises. Ces dernières étaient implantées dans des villes portuaires comme Brest, Toulon ou Rochefort et représentaient des sources importantes d’insécurité pour les habitants. Ces prisons portuaires étaient d’ailleurs les héritières de bagnes plus anciens dans lesquels on enfermait les galériens, des hommes dont la force physique était exploitée sous la contrainte pour faire avancer les bateaux.

On justifie à l’époque la déportation des détenus dans ces camps lointains par le fait que la condamnation consiste en une exclusion de la société et que le travail comme l’effort physique peuvent contribuer plus efficacement à la réhabilitation des détenus que l’inactivité et l’ennui dans les prisons traditionnelles.

Les bagnes français se trouvent pour la plupart en Guyane française, une région du monde où les conditions climatiques sont très pénibles, insalubres, et l’intention du gouvernement de cette époque était également de renouveler une population coloniale que les maladies tropicales décimaient violemment et de combler le déficit de main d’œuvre engendré par l’abolition de l’esclavage en 1848.

Île Royale

Le plus important de ces bagnes se trouvait sur des îles situées au large de la ville de Kourou, les îles du salut. Ce petit archipel se trouve à bonne distance des terres et est de plus balayée par des courants marins dont la puissance représente le meilleur obstacle aux projets d’évasion. La plus grande des îles, l'île Royale, était le siège de l’administration de la prison. L'île Saint-Joseph abritait les cellules d’isolement pour les détenus faisant l’objet d’une mesure disciplinaire, et la colonie principale était située sur le petit îlot de l'île du Diable, ainsi nommé parce que les indigènes de l’époque précoloniale pensaient que cette île hébergeait l’esprit du mal. Dans ces îles éloignées de tout, les prisonniers subissaient des conditions de vie très dures. En dehors des travaux physiques qui leur étaient demandés, il souffrait de la chaleur, des violences morales et physiques de leurs gardiens et les épidémies étaient la cause de la mort de beaucoup d’entre eux. Lorsqu’ils mouraient, ils n’étaient pas jugés dignes d’être enterrés et leurs corps étaient jetés à la mer. Le paradis tropical que pouvait suggérer ces îles proches des Caraïbes se transformait en un véritable enfer pour les prisonniers.

Une fois qu’ils avaient accompli leurs peines dans les camps de travaux forcés, ils étaient obligés de continuer à vivre sur l’île pendant une période égale au temps de leur peine, voire même toute leur vie s’ils avaient été condamnés à une peine supérieure à 8 ans.

Les conditions de vie dans ces bagnes ont été dénoncées au début du XXe mais il faudra attendre 1938 pour qu’ils soient fermés et 1950 pour que les derniers prisonniers en reviennent.1

A. Du bagne au Goulag: Les micro sociétés pénitentiaires

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FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

Sous d’autres latitudes mais avec des conditions climatiques aussi extrêmes, la Russie impériale puis l’Union soviétique ont également déporté sur des îles leurs condamnés les plus inquiétants. Parmi ces îles, les plus connues sont sans doute les îles Solovki, un archipel composé de six grandes îles et d’une centaine de petits îlots qui est situé dans la mer Blanche, au centre de la baie d’Onega et donc à un peu plus de cent kilomètres du Cercle polaire.

La fonction carcérale de l’île principale, la grande île Solovki, remonte au XVIe siècle, environ cent ans après l’implantation du premier monastère sur l’île. Dès les origines, Solovki est un lieu d’exil et d’emprisonnement pour les dissidents qui critiquent l’église ou l’empereur.

Au XVIIIe la prison du monastère de Solovki est connue pour être l’une des plus terribles de l’empire russe. Au début du siècle suivant, un rapport est rédigé à la suite d’une inspection et indique que la sévérité des conditions de détention (cellules sans fenêtre, emmurement des prisonniers, tortures) est disproportionnée par rapport au délit des prisonniers. Il faudra cependant attendre cinquante ans pour que la prison du monastère soit définitivement fermée.

Île Solovki Trois ans après la révolution de 1917 qui conduit les bolchéviques au pouvoir, les îles Solovki redeviennent un camp de travail comparable aux bagnes dont nous avons parlé plus haut. Ce camp est ouvert pour anéantir l’influence de tous les opposants au régime communiste (nobles, membres de l’église, intellectuels, etc.). Les prisonniers exploitent la forêt, pratiquent la pêche et l’agriculture, et accomplissent des travaux de force tels que le chargement des wagons de chemin de fer, la construction des routes, la production de sel, de chaux ou de goudron…

Lorsque Staline arrive au pouvoir en 1928, le nombre des condamnés politiques explose et les conditions de détention s’aggravent. Le goulag de l’île Solovki se développe au point de devenir la tête d’une organisation qui comporte très vite douze camps de travaux forcés répartis sur les différentes îles de l’archipel. Les goulags ne fermeront pas à la mort de Staline et il faudra encore attendre 35 ans pour que le dernier d’entre eux ferme en 1991.

Le système des Goulags avait été fermement dénoncé dans l’opinion internationale après la publication du livre rédigé par Alexandre Soljenitsyne pendant sa détention dans un goulag et publié cinq ans plus tard à l’étranger, l’Archipel du Goulag.

A. Du bagne au Goulag: Les micro sociétés pénitentiaires

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HORIZONTAUX: De l’usage des îles II .

ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

Si les îles sont propices à l’installation de prisons ou de bagnes dans lesquels on «rééduque» durement les gens à l’abri des regards de la société, elles peuvent aussi offrir un environnement géographiques adapté à des régimes de détention plus souples que les régimes traditionnels, voire à des formes de semi-liberté. C’est le cas sur l’île de Bastøy qui est située à l’entrée d’un Fjord, non loin de la capitale de la Norvège, Oslo. Sur cette île, les Norvégiens développent depuis vingt-cinq ans l’expérience d’une prison semi-ouverte, les seules limites à la liberté des détenus étant données par les limites de l’île. Les prisonniers ne vivent pas dans des cellules, mais dans des maisons en bois confortables conçues pour six personnes, dans lesquelles ils disposent d’une chambre individuelle. Ils peuvent se déplacer librement sur le territoire de l’île, pêcher et même nager dans le fjord. Un tennis et un sauna sont également à leur disposition.

Extérieur de la prison

Chambre

Île de Bastøy Dans d’autres pays du monde, on serait choqués d’imaginer des conditions de vie si agréables pour des hommes ou des femmes condamnés à faire de la prison. On ne peut pas imaginer qu’un condamné puisse payer sa dette à la société sans être privé de confort. La loi norvégienne est claire à ce sujet: le régime de la détention ne doit priver un homme que de sa seule liberté d’aller et de venir et doit permettre à un individu de reconstruire sa relation à lui-même et aux autres, d’élaborer un projet de vie pour le futur et de retrouver sa place dans la société. « Les prisonniers d’aujourd’hui seront nos voisins de demain » affirme le directeur de la prison dans l’une de ses déclarations publiques. L’expérience de l’île de Bastoy a donné des résultats assez bons pour être poursuivie depuis 25 ans. Alors qu’en Europe, 63% des personnes emprisonnées commettent un nouveau délit dans les cinq ans qui suivent leur sortie de prison, en Norvège, ce chiffre descend à 30% et à 16% pour les détenus ayant effectué une partie de leur peine sur l’île.

En tant que territoire dédié à la détention, l’île peut donc être exploitée à des fins disciplinaires ou au contraire conçue comme un territoire, certes fermé, mais qui laisse aux détenus les libertés restreintes dont ils ont besoin pour que leur détention ne compromette pas leurs chances de réinsertion.

A. Du bagne au Goulag: Les micro sociétés pénitentiaires

MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité I . REGARDS

HORIZONTAUX: De l’usage des îles II .

SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

Le Lazzaretto Vecchio de Venise

A toutes les époques de l’histoire, y compris de notre histoire récente, des épidémies ont contraint à l’isolement, et parfois au séjour sur une île, des personnes frappées par une maladie contagieuse ou suspectées de pouvoir être malades.

Parmi ces îles affectées à la surveillance des voyageurs en quarantaine, l’une des premières se trouve dans la lagune de Venise. Au XVe siècle, la lèpre représente un risque sanitaire important à Venise car le port accueille tous les bateaux en provenance d’orient. La république de Venise ouvre donc un centre de quarantaine sur une île située à quelques kilomètres du centre de la ville.

Île des morts

Sur le modèle de ce premier établissement, d’autres lazarets (c’est le nom donné en français à ces établissements) ouvriront à proximité des grands ports d’Europe.

Non loin de la ville de Brest, devient ainsi au XVIIIe siècle une île de quarantaine et un hôpital pour les lépreux avec une île-cimetière à proximité, l'île des Morts.

B. Les îles confinés : La place des îles dans la gestion des épidémies

Hôpital Caroline sur l'île Ratonneau

Un autre lazaret important, l’hôpital Caroline, est construit un siècle plus tard sur l’île Ratonneau au large de Marseille pour héberger en quarantaine les voyageurs en provenance de pays dans lesquels sévissait la fièvre jaune, une maladie tropicale très dangereuse. Pendant la deuxième guerre mondiale, une épidémie de typhus a sévi dans les prisons de Marseille et les détenus malades ont été isolés dans ce centre de quarantaine.

Grosse-île

Au XIXe siècle, la pauvreté et la famine ont obligé de nombreux Irlandais à quitter leur pays et à s’embarquer pour le Canada, dans l’espoir de pouvoir trouver dans ce pays de meilleures conditions de vie. Dans le contexte de la misère sociale qui poussait les familles à émigrer, des maladies comme le typhus ou le choléra étaient fréquentes dans les grandes villes anglaises, en particulier les villes portuaires. Plus de cinq mille personnes par exemple sont mortes à Liverpool du choléra en l’année 1848.

Lorsque les bateaux de migrants arrivaient à destination, les gouvernements des pays d’accueil craignaient un risque de contagion pour leur population. C’est dans le contexte que le Canada, par exemple, soumettait les passagers de ces bateaux à une quarantaine sur la Grosse île, dans les eaux du fleuve Saint-Laurent, avant qu’il ne puisse atteindre les côtes du Canada et entrer dans la ville de Québec. Sur cette île, des infrastructures médicales permettaient de surveiller l’état de santé des arrivants mais plusieurs milliers d’entre eux ne sont jamais allés audelà de Grosse île qui est devenu le lieu de leur dernière demeure.1

1 Laget Pierre-Louis, Les lazarets et l'émergence de nouvelles maladies pestilentielles au XIXe et au début du XXe siècle, https://journals.openedition.org/insitu/1225

B. Les îles confinés : La place des îles dans la gestion des épidémies

MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité I . REGARDS

HORIZONTAUX: De l’usage des îles II .

FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

C. Les atouts industriels du territoire des îles

Dans

la plupart des cas, le territoire d’une île présente les mêmes atouts pour l’implantation d’une usine que les berges d’un fleuve ou les côtes d’un océan. Les voies de transport offertes par la navigation et l’abondance des ressources en eau sont sans doute parmi les plus importantes. Ces dernières sont particulièrement précieuses lorsqu’elles fournissent à l’usine la matière première de son énergie, l’énergie hydraulique, ou bien lorsque la fabrication comporte des besoins de refroidissement ou des activités de lavage. C’est pour trouver une réponse à ces différents besoins que les moulins d’autrefois comme les centrales nucléaires d’aujourd’hui s’implantent sur le cours des fleuves ou des rivières.

D’autres paramètres peuvent cependant conduire à choisir le territoire d’une île pour implanter une activité industrielle.

Le caractère dangereux de cette activité peut être à l’origine du choix d’un territoire qui réduit le risque d’exposition de la population. C’est dans ce contexte par exemple qu’une usine fabriquant des explosifs a été créée à proximité de Berlin sur le territoire d’Eiswerder, une petite île située sur le fleuve La Havel. Après avoir été exploitée pour la fabrication de bombes incendiaires au début du XIXe siècle, cette poudrerie a hébergé un laboratoire de recherche pyrotechnique avant de redevenir quelques années plus tard un site spécialisé dans la production de munitions. L’histoire industrielle de cette île a également été marquée par l’activité d’une usine chimique qui produisait les acides dont on avait besoin pour fabriquer les munitions. Cette usine a fermé ses portes après la deuxième guerre mondiale et ses bâtiments ont été transformés en studios pour accueillir des activités culturelles et artistiques.

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SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

L’île d’Eiswerder près de Berlin

Les nuisances sensorielles occasionnées par une activité industrielle, nuisances sonores et olfactives en particulier, représente la deuxième raison pour laquelle l’île peut offrir à l’industrie les atouts de son territoire. Avant d’aborder cet aspect dans la partie de cette étude consacrée à l’île Seguin, nous pouvons citer maintenant l’exemple des ateliers de tissage et de bonneterie qui recourent à des moyens mécaniques bruyants dans leurs processus de fabrication. Dans ce contexte, la première bonneterie de la ville d’Annecy, en Savoie, s’est installée au XIXe sur une île de la rivière qui traverse cette ville, la Thiou. Cette industrie utilisait du matériel hydraulique très bruyant, des foulons et des battoirs en particulier, pour frapper les étoffes en fin de fabrication dans un processus qui cherchait à les assouplir. Lorsque les turbines électriques ont remplacé les roues à aube, d’autres bonneteries viendront s’installer sur l’île saint Joseph pour tirer parti de ce lieu qui offrait, en plus des ressources en eau utiles à la production d’énergie hydraulique, un cadre adapté aux nuisances sonores occasionnés par son activité. Après le rattachement de la Savoie à la France en 1860, le complexe industriel Saint-Joseph n’a pas pu résister à la concurrence et a cessé ses activités. Les bâtiments ont été vendus, transformés, puis démolis. C’est à partir de 1950 que l’île a été transformée petit à petit en un parc.

Comme l’île Seguin, l’île Saint Joseph n’a pas échappé à son destin d’être désindustrialisée au destin de sa désindustrialisation et elle a été transformée en un grand parc. Sa situation urbaine très comparable à l’île Seguin est l’un des facteurs qui l’a conduit à devenir une île verte et ainsi à renouer avec ses origines naturelles.

Situation de l'île Saint Joseph

La manufacture de bonneterie d'Annecy sur l'Île SaintJoseph © cliché du Dauphiné Libéré du 11 avril 1962, coll. G. Grandchamp

En troisième lieu, le site d’une île s’impose pour l’implantation d’une industrie lorsqu’il fournit à celle-ci la matière première de son activité. C’est le cas de l’île d’Hashima au Japon où des gisements importants de charbon ont été découverts dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle. L’exploitation minière de cette île duré presque deux siècles et n’a jamais épuisé ses ressources en charbon. Cependant, dans les années 1970, en raison de changements dans la politique énergétique, l'île d'Hashima a fermé ses mines qui contenaient encore des millions de tonnes de charbon. Lorsque la mine a fermé, la population de Hashima s’élevait à environ 2 000 habitants. Ces personnes ont toutes quitté l'île dans les mois qui ont suivi sa fermeture, et l'île est restée inhabitée. Dans les années 2000, Hashima a attiré l'attention en tant qu'héritage de la modernisation et des vestiges de l'habitat collectif de l'ère Taishō à l’ère Shōwa. Comme les bâtiments étaient restés longtemps inhabités, ils commençaient à s’effondrer et cela a été médiatisé par de nombreux reportages. En raison des risques que représentaient ces bâtiments en ruines, l’île d’Hashima a longtemps été interdite au grand public. À partir de 2009, elle a officiellement ouvert une partie de son territoire aux visites touristiques. Depuis, elle fait partie des sites de la révolution industrielle Meiji au Japon et a été intégrée au patrimoine industriel mondial dans le domaine de la sidérurgie, de la construction navale et de l’extraction houillère. 1 1 https://www.welcomekyushu.jp/world_heritage/spots/detail/4

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SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

Île Hashima 1930, Courtesy Nagasaki Prefectural Library

À l'intérieur d'un immeuble résidentiel, 1960, Series of Japanese geography and folk culture: Vol.13, Shinkosha.

Le fait d’avoir classé cette île dans le patrimoine mondial fait l’objet de nombreuses polémiques jusqu’à aujourd’hui, parce que pendant la guerre, une grande moitié de la Chine, de la Corée du Sud et de la Corée du Nord étaient des colonies du Japon et que des milliers de chinois et de coréens ont été emmenés en captivité sur l'île avant de subir plus de dix ans d'esclavage et de persécution. La situation de cette île a sans doute aidé à cacher le crime des Japonais à cette époque parce que l’île est isolé par la mer; ce n’était pas possible pour les esclaves de se sauver parce que même s’ils réussissaient à nager jusqu’à la terre la plus proche de l’île, celle-ci restait sous le contrôle du Japon. Ce qui s’est passé sur cette île est enterré avec les esclaves qui n’ont pas réussi à survivre à leurs mauvaises conditions de vie. A l’extérieur de l’île, on ne pourra jamais connaitre vraiment les histoires cruelles de cette époque où l’esclavage fournissait la main d’œuvre industrielle.

Île Hashima est devenue une « île fantôme », 1995

Il est intéressant de remarquer que la reconversion de ces espaces industriels conduit le plus souvent à la création d’espaces verts ou à la mise en place d’équipements culturels. Ce destin est-il le résultat d’une incapacité à développer d’autres projets sur des sites trop fortement marqués par les activités qu’ils ont accueillies et par les moments de l’histoire qu’ils ont traversés ? L’art et la nature peuvent aussi apparaître ici comme des propositions, les seules peut-être, qui puissent « laver » le lieu de son passé et le réconcilier avec la mémoire des hommes.

MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité I . REGARDS HORIZONTAUX: De l’usage des îles II . REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

III. Représentations symboliques et fonctions sociales: L'exemple de l'Île Seguin

III. REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES ET FONCTIONS

SOCIALES: L’exemple de l'île Seguin

A. Il était une fois …: Du domaine des moines à l’usine Renault a. Le domaine des moines b. La tannerie d'Armand Seguin c. Le berceau de la modernité d. L'île Seguin, l'usine moderne

B. Panorama des projets d'architecture: De la cité des plaisirs aux cinq tours de bureaux a. La cité des plaisirs b. L'île des morts c. L'insularité poétique de Jean Nouvel

C. Quel futur pour l'île Seguin?

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SYMBOLIQUES

REPRÉSENTATIONS

ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

PontRenault

Île Seguin Sèvres

PasserelleSud

Pont Seibert

Paris

BoulogneBillancourt Sèvre

Saint-Cloud Île Seguin

Issy-les-Moulineaux

Meudon

Boulogne-Billancourt

PontDaydé

Île Saint-Germain

Meudon

III. REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’exemple de l'île Seguin

«Dans ma rêverie insulaire, l’île Seguin était destinée à l’abandon, et l’usine à tomber en ruines, peu à peu recouverte par la végétation, les ronces et le lierre emmêlés, colonisée par les mouettes, et quelques taggeurs tant qu’il reste des murs. Le temps serait passé en couches de plus en plus denses, la mémoire se serait perdue, et un jour un groupe d’hommes serait parti à l’aventure, aurait accosté, machette en main, boussole à la ceinture, aurait alors découvert, émerveillé, les ruines de l’usine Renault comme on découvre une cité inca ensevelie dans la jungle.

Car la mémoire n’est peut-être pas toujours ce que l’on entretient et transmet mais plutôt ce que l’on piste et fouille, ce que l’on exhume et révèle, un miracle, au gré du hasard ou de l’obstination.

Et l’île est cet espace mental où tout ce qui est enfoui sera, un jour, ramené à la surface.»

(Joy Sorman, «Une île dans la tête», 2020)

Paul Huet, Les inondations dans la forêt de l'Ile Séguin, 1833

Dans

cette partie, nous reviendrons sur l’île Seguin, un lieu singulier, porteur à la fois d'une mémoire collective et d'un imaginaire fort, marqué par une dimension industrielle historique et une identité symbolique insulaire, pour répondre aux questions que nous avons posées, à partir des notions d’insularité symbolique et d’insularité fonctionnelle, notions mentionnées et expliquées dans la première et la deuxième partie.

À partir des éléments historiques, j'ai essayé d'analyser les raisons pour lesquelles l'île est devenue une île industrielle, en reprenant et en développant une approche adoptée dans la première et la deuxième partie du mémoire. Ensuite, j'ai analysé les projets qui ont été pensés pour le réaménagement de l'île après le départ de l'usine Renault, pour comprendre pourquoi l'île est restée longtemps vide, souvent considérée comme un territoire d'enjeux et de défis. Est-ce que les projets d’aménagement sur l’île Seguin ont pris en compte les attentes des habitants? A la fin de cette partie, j'ai imaginé un futur pour l'île Seguin, à partir de ce que représente une île dans l’imaginaire des habitants. J’ai mieux compris ces représentations grâce au sondage que j’ai mis en place sur « Google Form » et grâce à l’analyse des singularités de l’île, dans son rapport aux symboles comme dans ses fonctions.

Tannerie sur l'île Seguin, 1795

MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité I . REGARDS HORIZONTAUX: De l’usage des îles II .

SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

III. Représentations symboliques et fonctions sociales: L'exemple de l'Île Seguin

A. Il était une fois...: Du domaine des moines à l’usine Renault

De la naissance de l’île par le mouvement des eaux à sa transformation en usine, ce lieu n’a cessé de marquer son époque. Celui qui l’a fait connaître aux yeux du monde se trouve être Louis Renault qui y a créé une entreprise moderne et révolutionnaire. L’histoire de l’île se définit cependant en quatre périodes: la première quand l'île appartenait à l'abbaye de Saint-Victor avant la fin du XVIIIe siècle; la deuxième, à la fin du XVIIIe siècle, quand l'île devient un lieu réputé pour le cadre bucolique et verdoyant qui inspire les peintres, et qu’elle se fait connaître pour ses petites industries; la troisième correspond à l’industrialisation, avec l’arrivée de Renault à Billancourt en 1898, la construction de guinguettes, de cafés et d’autres bâtiments juxtaposées; et la quatrième commence avec la démolition de l'usine Renault, et se poursuit avec la rénovation des quartiers à Boulogne-Billancourt, et les nouveaux projets dessinés sur l'île Seguin.

A. Il était une fois... Du domaine des moines à l’usine Renault

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REPRÉSENTATIONS

plan de roussel, 1731

a. 1150-1793 Le domaine des moines Un lieu stratégique de passage et de pouvoir

En 1150, le chevalier Arnold de Chailley donne l'île Seguin aux moines de SaintVictor pour les remercier d'avoir accueilli son fils comme chanoine régulier. Les moines louent leurs terres, près et vergers à des fermiers, principalement intéressés par la coupe de saules et d'osiers qu'on trouve en grand nombre sur les îles et dans la plaine de Billancourt. L'abbaye conserve la gestion des berges et des îles où des nombreuses pêcheries sont installées. L’île est restée un terrain naturel inoccupé par des activités humaines jusqu’à la fin du XVIIe siècle. En 1684, une nouvelle route pavée est ouverte à travers la plaine pour accéder plus facilement au château de Versailles. Cette route traverse l'île Seguin.

Dans cette période de l’histoire, l’île a été un endroit loin de la vie de la société, inexploré et vierge. On peut voir sur une carte de Roussel qui date de 1731, des activités d’agriculture, des jardins royaux et de premières habitations sur les bords de Seine. A cette époque, les îles Seguin et Saint Germain s’appelaient « Isles de Billancourt ».

Si l’île reste à cette époque un territoire naturel à l’écart des projets d’urbanisation, c’est sans doute premièrement parce que les risques d’inondations en rapport avec les crues de la Seine s’ajoutent aux difficultés d’accès qui sont propres à une île. Alors que les activités agricoles peuvent répondre aux besoins d’approvisionnement des marchés parisiens, l’aménagement de jardins royaux sur l’île Seguin au XVIIIe siècle indique que l’île est perçue à cette époque comme un lieu où la nature garde tous ses droits, un espace qu’on peut continuer de tenir à l’écart des activités humaines.

Gravure tirée du livre «Voyage de Paris à Saint-Cloud par mer et retour de Saint-Cloud à Paris par terre», © BnF – Gallica

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ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

b. 1794-1835 La tannerie d'Armand Seguin Le chimiste donne son nom à l'île

Armand Seguin (en costume à gauche) et Lavoisier lors d’une expérience sur la respiration, 1795

En 1794, l'île a été achetée par le chimiste entrepreneur Armand Seguin, dont elle tire son nom. Armand Seguin construit sur l’île une usine de tannerie qui met en œuvre de nouvelles méthodes pour travailler les peaux animales à l’échelle industrielle. L'île abrite également à cette époque des entreprises de blanchisserie. En 1801, il n'y avait pas moins de 400 ouvriers sur l'île, et pendant presque huit années, la tannerie Seguin produisait une grande quantité de cuir (30 000 peaux par an), ce qui mécontentait les riverains à cause de la pollution... Après la mort d'Arnaud Seguin, l'île a été divisée en 23 parcelles vendues à des propriétaires fonciers, des notaires et d'autres personnages.

On peut se demander ce qui justifie l’implantation d’une usine sur le territoire d’une île telle que l’île Seguin. Indépendamment des facilités de transport offertes par la navigation fluviale, l’île présente plusieurs atouts industriels : elle offre premièrement un territoire éloigné des habitations et ce point semble particulièrement important dans le cas d’usines telles que les tanneries qui sont malodorantes et qui exposent donc les riverains à de grandes nuisances olfactives. D’autre part, le contexte de l’île met à disposition des industries de grandes quantités d’eau et nous savons que les peaux animales doivent être lavées à grande eau avant et pendant le processus de tannage.1 Les peaux doivent tout d’abord être immergées pendant leur stockage pour conserver leur fraîcheur. Le tannage expose ensuite les peaux à différents composants chimiques dont elles devront être nettoyées en fin de fabrication par un long rinçage. Parmi les composants chimiques utilisés au XIXe siècle pour le tannage des peaux, on trouve des métaux lourds comme l’arsenic, le chrome ou le mercure, ainsi que de nombreux sels. Aujourd’hui les eaux usées des tanneries sont traitées sur le site des usines avant d’être rejetées dans l’environnement. A l’époque des tanneries Seguin, les cours d’eau tels que la Seine étaient utilisés pour le rejet des déchets, même lorsque ceux-ci étaient très toxiques.

domaine des moines à l’usine Renault

Installations de tannerie, 1795

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ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

MONDES

c. 19e-20e siècle Le berceau de la modernité

Les peintres et les guinguettes en s’installent sur l'île Seguin

On ne voit plus aucune trace d'urbanisation ou d'industrialisation sur cette île en friche mais on remarque le talent artistique des peintres. Plus de deux cents artistes, peintres, lithographes, dessinateurs, photographes, ont représenté cette belle boucle de la Seine, soit en vue plongeante depuis les collines de Sèvres, soit dans la perspective du parc de Saint-Cloud, ou bien encore depuis le pont de Sèvres. Aucun chemin ne traverse l'île, seuls un restaurant à deux étages et quelques maisons peut-être habitées sont visibles sur le bord des berges.

Entre 1817 et 1862, Paul Huet réalisera sur l’île Seguin de nombreuses peintures, aquarelles et eaux-fortes. Corot, Girard, Sisley, Canella, Jongkind, Turner et Bracquemond peindront à leur tour les paysages de l'île Seguin et de ses environs. Ces tableaux restent des témoignages précieux du cadre naturel de l'île avant qu'elle n'entre dans les autres moments de son destin industriel.

L'historien et romancier Pierre Miguel exprime sa nostalgie de l'île préindustrielle dans les mots suivants : «Ile exotique surgie de l'eau, derrière l'écran des peupliers, ces hautes futaies d'ormes avec leur mystère, les larges trouées autour desquelles s'enroule une certaine lumière, s'échappant soudain pour venir heurter de-ci de-là une écorce, une large feuille de datura. Qu'estu devenue, heureuse île Seguin, Pathmos du paysage romantique?».1

À la mort de Paul Huet en 1869, l’île Seguin est déjà délaissée par les artistes notamment à cause de l’arrivée du train, qui permet de s’éloigner plus facilement et plus rapidement de Paris. La création de l’école de Barbizon et l’établissement des impressionnistes à Giverny contribueront au délaissement des rives de la Seine. L’île Seguin devient un lieu de loisirs nautiques et un espace de tir au pigeon.

En 1850 les promoteurs commencent à s’intéresser à la région. Les plaines de Billancourt sont loties et on met en place des navettes qui facilitent le lien avec Paris.

1 Anne-Sophie Coppin (2009), L'île Seguin Demain, Paris, Beaux arts, 25p

Paul Huet, La Seine au Bas-Meudon, 1837.

A. Il était une fois... Du domaine des moines à l’usine Renault

L’intérêt que les peintres portent à l’île Seguin à cette époque s’inscrit dans le contexte des évolutions de la peinture aux XIXe siècle. Alors que la peinture de l’époque classique choisissait la plus grande part de ses thèmes dans les grandes scènes de l’histoire et de la mythologie, au XIXe siècle les peintres mettent la représentation de la nature au centre de leurs tableaux. On peut penser ici aux nombreux tableaux que le peintre Gustave Courbet consacre aux paysages du village d’Ornans dans le Doubs et à la rivière qui le traverse, La Loue. Dans le contexte de cette tendance, l’île Seguin retrouve toute sa relation à la symbolique qui fait d’elle un lieu sauvage et parfois inhospitalier.

E. Poteau, la vallée de la Seine et l’Ile Seguin, 1897. Vue depuis les hauteurs de Meudon.

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ET

d. 1919-1992 L'île Seguin, l'usine moderne Symbole d'une nouvelle industrie

Pointe amont de l'île Seguin, 1938

Avec l'arrivée de Renault, l'histoire de l'île Seguin ouvre une nouvelle page. Alfred Renault a fait fortune dans la draperie et les boutons et en 1898, son fils Louis construit sa première voiture dans un atelier temporaire dans le jardin familial. L'entreprise a connu une croissance rapide, avec 5 000 ouvriers en 1914.

En 1918, elle employait 23 000 personnes car la guerre avait provoqué un essor considérable avec la fabrication d'autobus, de moteurs d'avions, de chars et de camions.

Entre 1919 et 1927, d'importants travaux ont été réalisés sur l'île : elle a été surélevée de 3 mètres à 6 mètres pour éviter les inondations récurrentes.

En 1929, Louis Renault a été autorisé à renforcer le contour de l'île avec de la maçonnerie à 2,5 mètres au-dessus de la Seine et à construire une passerelle sur la Seine pour relier les deux parties de son terrain, ce qui lui permettra de raccorder le reste de l'île à une centrale thermique qui sera construite sur la pointe aval. Par la suite, la construction du pont de Daydé, en plus de l'accès direct à l'île depuis Billancourt, pourra également assurer l'alimentation électrique, l'arrivée d'eau potable, le retour des eaux usées, et le passage de la ligne de chemin de fer raccordée au réseau public. Parallèlement, le pont Seibert reliant l'île à Meudon est construit.

En septembre 1940, l'usine est réquisitionnée par les Allemands. Elle fabrique ensuite des équipements militaires (camions, voitures, moteurs d'avions et engins blindés), ce qui explique qu’elle ait été visée par de multiples bombardements de la part du Royaume-Uni et des États-Unis en mars 1942, avril et septembre 1943, provoquant chaque fois des centaines de morts.

Après la libération de Paris, Louis Renault tombe et est emprisonné pour avoir fait du commerce avec l'ennemi en septembre 1944; il meurt dans des circonstances difficiles quelques semaines plus tard. Ses usines ont été expropriées à la libération puis nationalisées, et elles ont commencé à produire des 4CV qui avaient été secrètement conçus pendant la guerre. La production est simplifiée en passant à un modèle unique produit en masse. Renault était la plus grande usine de France à l'époque, avec 30 000 salariés.

En 1961, la R4 remplace la 4CV et en 1967, un cinquième étage est ajouté au bâtiment pour moderniser les installations de peinture. Entre 1981 et 1984, l'usine a été entièrement repensée pour se moderniser : robots, convoyeurs aériens, postes de travail ergonomiques, etc. Il faut aussi injecter beaucoup de béton pour stabiliser le sol qui s'affaisse avec le temps. Comme Renault était en grande difficulté financière dans les années 1980, le gouvernement Rocard annonce en février 1989 la fermeture de l'usine. L’usine était isolée et le plan de production était trop compliqué et peu compétitif. L’activité de l’usine cessera complètement en mars 1992.

A. Il était une fois...

Du domaine des moines à l’usine Renault

Vue aérienne de l'île Seguin, 1936

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REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

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On comprend facilement pourquoi Louis Renault a installé une partie de son usine sur l’île Seguin. Comme nous l’avons vu précédemment à propos des tanneries d’Armand Seguin, l’environnement d’un fleuve procure à une industrie des ressources précieuses telles que des voies de transport et des ressources en eau, probablement utiles pour le travail et le refroidissement des métaux dans le cas d’une usine automobile. L’île isole également l’usine par rapport aux habitations, ce qui n’est pas un avantage négligeable dans le cas d’une industrie bruyante. La fabrication des automobiles demande en effet d’utiliser des presses hydrauliques, des emboutisseuses et d’autres moyens mécaniques très bruyants. Le site de l’île Seguin présentait aussi l’avantage d’être au centre d’un bassin de main d’œuvre, entre Boulogne et Billancourt d’un côté de la Seine, Sèvres et Meudon de l’autre côté.

En installant son usine sur une île, Louis Renault a également fait le choix de donner beaucoup de visibilité à l’image de son usine et de sa marque. Indépendamment des allures de forteresse que l’usine prendra au fil des années, les usines Renault s’implantent d’autant plus fortement dans le paysage et dans la conscience des Français que le site de l’île Seguin les détache visuellement des eaux de la Seine et du paysage urbain. Les frontons

qui portent le nom de la marque aux deux extrémités de l’île interdisent de se tromper: Renault, c’est l’île Seguin, l’île Seguin, c’est Renault. Par ailleurs, comme les usines Renault occupent intégralement le territoire de l’île, on peut facilement en déduire que sur le site de l’île comme sur celui du marché automobile français, il n’y a de place pour personne d’autre. Le message délivré devient dès lors celui-ci: toute l’île Seguin, c’est Renault, toute la construction automobile, c’est Renault. Autrement dit: il n’y a qu’un seul constructeur automobile en France. En tant qu’île, le territoire de cette usine contribue donc à amplifier les messages symboliques de puissance et d’indépendance qu’une entreprise peut souhaiter diffuser. Ces messages symboliques changeront en mai 1968 lorsque l’île Seguin deviendra le lieu de la contestation ouvrière.

Si l’entreprise Renault a reçu une part importante de son image de l’implantation de ses usines sur l’île Seguin, cette dernière a également reçu une nouvelle identité des soixante ans de son histoire industrielle. Le territoire de cette île reste fortement associé à la construction automobile et au souvenir de tous les ouvriers qui ont travaillé dans cette usine, en particulier de leurs luttes sociales. L’histoire ouvrière en relation avec la fonction industrielle de cette île au XXe semble avoir renouvelé l’identité symbolique de l’île Seguin.

A. Il était une fois...

Du domaine des moines à l’usine Renault

Grève des ouvrier dans l'usine Renault sur l'île Seguin

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HORIZONTAUX: De l’usage des îles II .

SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

B. Panorama des projets d'architecture:

De la cité des plaisirs aux cinq tours de bureaux

Île Seguin après la démolition de l'usine Renault, 2005

B. Panorama des projets d'architecture

De la cité des plaisirs aux cinq tours de bureaux

Après l'arrêt des activités de l'usine Renault, une société d'économie mixte est créée pour racheter l'île et gérer les projets après Renault. Renault a d'abord consulté plusieurs grands architectes, comme Renzo Piano et Alexandre Chemetov, et ils ont tous proposé de conserver et réutiliser au moins partiellement le bâtiment existant sur l'île. Peu de temps après, il y a eu une polémique entre les partisans qui soutenaient la protection des témoins du passé de la classe ouvrière sur l'île et les partisans de la démolition globale de l'usine sur l'île, ce qui a entraîné des retards dans la prise de décision. En 1992, le nettoyage des bâtiments a commencé presque immédiatement après, et le désamiantage et la dépollution du sol ont posé un grand problème. La démolition des bâtiments sur l'île Seguin a démarré en 2004 et elle s'est achevée en 2005.

En 2000, le projet de la Fondation Pinault prévoit de créer un musée pour sa collection d'art contemporain. En plus de la Fondation Pinault, l'île accueillera également des institutions comme l'Institut National du Cancer ou l'Université américaine de Paris. Cependant, les bénéfices de ces projets ne sont pas élevés, et aucun travail réel n'a été réalisé. Face à ces retards, François Pinault abandonne et part en créant sa propre fondation à Venise. Face à cette situation, un nouveau projet a été lancé en 2009 par la mairie de Boulogne et Jean Nouvel, l'architecte coordinateur du projet, propose un vaste espace architectural, cinq immeubles de bureaux dont un de 120 mètres de haut. Les habitants se sont fortement opposés au projet et un nouveau PLU a été adopté pour limiter la hauteur maximale des bâtiments à 50 mètres. Ce projet n’a pas abouti comme de nombreux autres projets.

En 2016, un nouveau projet a finalement donné naissance à la salle de concert Seine Musicale, qui a été construite sur la pointe aval et a été livrée en 2017. En 2019, la partie centrale de l'île a été acquise par Vivendi, et six bâtiments de bureaux et un jardin central seront mis en place. La pointe amont gérée par EMERIGE devrait comprendre un hôtel de luxe et un musée d'art contemporain. Les travaux ont été commencés mais à cause de la pandémie du Covid-19, ils n’ont toujours pas repris. On recommence à s’inquiéter pour le futur de l’île Seguin…

Nous découvrirons maintenant quelques-uns des résultats du sondage que j’ai diffusé auprès des habitants de Boulogne avec « Google Form », nous ferons des comparaisons entre ces projets avec et les attentes des habitants. Est-ce que ces projets correspondent aux représentations imaginaires de la population ? Comment concevoir un projet qui pourrait donner un futur lumineux à l’île et à la population?

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a. 1991 - 1992 La cité

des plaisirs

Dans un esprit de recherche libre et à son unique initiative, Nicolas Ledoux, étudiant en architecture et Mathieu O’Neil, jeune universitaire, s’associent en 1992 pour présenter le projet « L'île Seguin, la cité des plaisirs ». Contre-projet d’une situation générale qui tendait à faire disparaître de Paris les lieux de vie, l’île devient un lieu de création et de «récréation», «un perpétuel chantier, un lieu en mouvement, où régnerait une émulation extraordinaire». Tout ce qui disparaît ailleurs y serait concentré, squats, lieux de concerts et de plaisirs, espaces ludiques, afin de répondre «à la déshumanisation de Paris, à l’ennui du monde, au refus d'admettre un plaisir adapté à notre société». Ils ont osé le slogan «La Science a sa Cité, le Culture son ministère, le Sexe aura son île», car le plaisir se trouve aussi dans le quartier rouge avec «robots rabatteurs et vendeurs de préservatifs». Mais le projet présente aussi l’étude du rapport à l’autre car l’île sera autogérée par ses habitants, en relation avec les pouvoirs publics, et ses statuts seront définis par le conseil insulaire représentant les différents acteurs qui la composent.

Dans le contexte des valeurs morales de notre société, ce projet étonne par sa dimension utopique. Ainsi que nous l’avons vu plus haut, le territoire de l’île est souvent associé au rêve de pouvoir autrement dans la société. Ce projet fantastique de Nicolas Ledoux et de Mathieu O’Neil évoque pour moi l’île Utopia de Thomas More, l’île des esclaves de Marivaux et l’île des gauchers d’Alexandre Jardin. Le point commun entre ce projet et les îles imaginaires des écrivains réside dans le fait que l’île devient un lieu d’expérimentation et de libération. Ce qu’on a pas réussi à vivre dans les autres territoires, on l’attend et on va le chercher sur les îles. On invente une nouvelle société avec de nouvelles règles de vie. On exprime nos frustrations et notre mécontentement en créant une nouvelle société loin de la société réelle. Les îles représentent un endroit parfait pour accueillir cette nouvelle société car elles sont géographiquement isolées et coupées par l’eau des autres mondes. Son isolement protège des influences extérieures qui sont mauvaises pour la nouvelle vie sur l’île.

B. Panorama des projets d'architecture

De la cité des plaisirs aux cinq tours de bureaux

b. 1996 L'Île des morts

Ce projet, l’un des plus originaux de l’île Seguin, s’est inspiré du tableau d'Arnold Böcklin « L'île des morts ». Selon la tradition antique, les morts sont séparés en deux catégories : les ‘‘aimés’’ des dieux et les héros qui séjournent sur une île après leur mort alors que le commun des mortels se retrouve chez Hadès, le dieu des enfers. Ainsi que nous l’avons mentionné dans notre étude des représentations symboliques de l’île, les lieux séparés de la terre sont souvent associés au séjour des morts et plus précisément depuis l’antiquité (cf. La Divine Comédie de Dante) au repos des justes et des âmes en attente de jugement.

Aujourd’hui, les cimetières représentent des lieux de recueillement silencieux dans lesquels la famille des défunts vient rechercher une relation par l’esprit avec les proches qui les ont quittés. On peut comprendre que le territoire d’une île puisse être choisi pour implanter des lieux où l’on vient se mettre en relation avec ceux qui, pour être devenus invisibles, n’en demeurent pas moins présents dans nos vies. L’île est encore de ce point de vue un lieu intermédiaire entre ce que nous ressentons et ce que nous ne voyons pas.

Projet île des morts

Arnold Böcklin, Island of the Dead, Third Version (1883)

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SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

c. 2009 L'insularité poétique de Jean Nouvel

En 2009, Nicolas Sarkozy avait indiqué qu'il voulait une «île de tous les arts». Elle sera donc une terre d'accueil pour la musique, le cirque, le cinéma, l'art contemporain. Elle offrira une promenade, exclura les voitures sauf électriques, proposera des jardins dessinés par le paysagiste Michel Desvigne, des résidences d'artistes, des commerces et des restaurants. Le tout sur deux étages, avec cinq tours d'une centaine de mètres, abritant bureaux et hôtels. «J'ai dessiné un paysage urbain, avec un jeu de terrasses», explique Jean Nouvel «l'usine Renault était un bloc, le projet est sur deux niveaux, une sorte de Babylone moderne». À un bout, se trouverait une «pointe» musicale, avec une salle de concerts et un conservatoire. Sur l'autre extrémité, un bon kilomètre plus loin, les cirques Bouglione et du Soleil pourraient investir un immense lieu rond. Pas loin de là, la Fondation Cartier pour l'art contemporain, installée à Paris depuis 1994, pourrait prendre ses quartiers. Des galeries compléteraient le paysage. Au centre, Pathé a promis un grand complexe cinématographique.

Malgré ses proportions ambitieuses, le projet n'a pas abouti à cause de l'objection des habitants. Les associations consultées à ce sujet mettent en avant que les tours, les bureaux, représentent une modernité inappropriée pour cette île. La construction des cinq tours de bureaux et hôtels, pourrait attirer l’attention sur l’île mais ce site est perçu par les habitants comme un lieu à protéger, non pas aujourd’hui de la montée des eaux, mais d’une urbanisation qui pourrait lui faire perdre son âme. Dans les points de vue exprimés alors par ces associations, on sent alors que les habitants de Boulogne voudraient pouvoir réintégrer cette île dans le cadre naturel de ses origines… et pouvoir en profiter dans le cadre de leurs loisirs.

C. Quel futur pour l'île Seguin?

Île seguin 2016

Seguin

Comme semblent le montrer les doutes et les hésitations qui pèsent sur le futur architectural de l’île Seguin, la dimension symbolique d’un lieu, sa charge émotionnelle, peut représenter un obstacle à son réaménagement. On craint de désacraliser le site et le cas de l’île Seguin la sacralité est nationale puisqu’elle réside dans le passé industriel de la France et dans l’histoire ouvrière du XXe siècle. On peine également à le redéfinir dans de nouvelles fonctions, à l’envisager dans des fonctions qui s’écartent de son passé, à l’analyser même du point de vue de la fonction. Quant encore les fonctions seraient redéfinies, on devient incapable de se détacher du ou des projets antérieurs pour se projeter dans une nouvelle dimension esthétique.

C’est peut-être pour toutes ces raisons qu’aucun projet architectural d’envergure, ni d’ailleurs aucun projet de société, n’émerge des propositions que les habitants de BoulogneBillancourt ont exprimées en réponse aux questions de mon sondage « Google Form ». Le plus grand nombre des réponses s’oriente vers le désir très personnel de pouvoir profiter d’un lieu qui redonne à voir la nature.

Au sujet d’un livre qui a été publié récemment par les éditions Flammarion1, j’ai lu aujourd’hui dans le journal Les échos un court article qui mentionne les maladies psychiques qui peuvent résulter des peurs engendrés par le réchauffement climatique et par les instabilités de notre environnement.2 Parmi celles-ci, la solastagie, sorte de nostalgie du sol, est définie comme la « douleur de voir un lieu d'ancrage familier modifié sans retour ». Selon le même article, l’éco-anxiété correspondrait à notre « inquiétude face aux atteintes à l’intégrité de la terre » tandis qu’une dernier trouble de l’esprit résiderait dans le « refus de se projeter dans l’avenir ». A la lecture de cet article, je me suis demandé si ces trois peurs qui concernent la planète tout entière n’étaient pas également présentes dans les difficultés auxquels se heurtent le réaménagement de l’île Seguin.

Parmi les nombreux projets qui ont été proposés, à ce jour seul le projet de la Seine musicale a été réalisé. Le réaménagement de l’île ne sera donc pas le projet d’un seul grand architecte mais sera découpé en différents projets de taille variable, au risque de perdre en cohérence et en continuité. C’est peut-être dans le destin d’une île de donner naissance à des îlots…

1

2 https://www.lesechos.fr/weekend/perso/a-lire-les-effets-du-dereglement-climatique-sur-la-sante-1355138

Antoine Pelissolo et Célie Massini, Les Emotions du dérèglement climatique, Flammarion, 2021)

MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité I . REGARDS

HORIZONTAUX: De l’usage des îles II . REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

Mon intérêt pour le territoire de l’île et pour ce qu’il représente en France a été induit par le travail de projet que je réalise actuellement autour de l’île Seguin dans le cadre de mon PFE. Lorsque j’ai commencé à travailler sur ce projet, j’ai rapidement compris que le territoire de l’île Seguin était au carrefour de sensibilités très différentes, entre les deux extrêmes de son image industrielle et de son potentiel environnemental, entre la tentation de sa banalisation au sein du territoire urbain (construction d’immeubles de bureau) et la recherche de projets qui pourraient exprimer la dimension poétique de son insularité (lieux dédiés à l’art en particulier). En vue de mieux comprendre la singularité de ce territoire, il me semblait intéressant de pouvoir resituer ces images parmi les autres représentations auxquelles les îles sont associées dans la culture française. Il me fallait donc entrer dans le monde des représentations symboliques.

Les références aux symboles sont nombreuses dans le discours de l’architecture et de l’urbanisme et leur interprétation varie sensiblement d’une culture à une autre. Un occidental n’a pas conscience par exemple de l’analogie qui existe entre la forme d’un toit chinois et le tracé de l’idéogramme qui exprime la notion d’homme par l’écriture. Cette analogie résulte d’une croyance taoïste selon laquelle l’homme et le ciel constituent un ensemble; l’homme serait ainsi une sorte de microcosme de l’univers. Le toit est donc dans la culture chinoise le symbole de cette relation étroite entre l’homme et le ciel comme s’il contribuait à unir l’un et l’autre. Cette proximité, selon les croyances du taoïsme, peut en particulier lui permettre de prévoir les moments où il va pleuvoir ainsi que d’autres phénomènes climatiques. De la même manière, ma compréhension de la symbolique occidentale est limitée par des ignorances du même type. Pour ne citer qu’un exemple, du fait de références différentes et de mes connaissances culturelles encore limitées, je n’avais pas accès aux nombreux symboles qui dans la culture judéo-chrétienne reposent sur les signifiants du monde naturel et de l’alimentation : l’arbre, le jardin, l’agneau, le poisson, le pain, le vin, etc. Avant de pouvoir engager une réflexion sur les dimensions symboliques d’un territoire, il fallait que je prenne moi-même conscience du nombre et de l’importance de ces symboles.

Cette recherche m’a aidé à découvrir que l’île Seguin, à l’image de nombreuses autres îles, maritimes ou fluviales, était le reflet des contradictions qui opposent les exigences fonctionnelles du monde du travail (des bureaux, des hôtels, des immeubles de prestige pour le siège des entreprises, des centres de conférences) et les attentes poétiques de femmes et d’hommes qui se projettent sur les îles et qui attendent premièrement de cet espace qu’il les aide à reconstruire une relation poétique avec la nature et avec eux-mêmes.

L’île est indissociable de l’eau et de l’espace et elle attire notre esprit pour cette raison sur la consistance fragile et toujours changeante de la matière. Ses contours, dessinés et redessinés par les crues et par les caprices de l’eau sont également très incertains. Dans le contexte de la montée des eaux associée au réchauffement climatique, les îles apparaissent de plus en plus comme des lieux à tenir à l’écart des industries humaines. Il résulte de ce contexte que les projets exclusivement orientés vers une intégration de l’île aux fonctions économiques de son environnement, que celui-ci soit d’ailleurs rural ou urbain, entreront de plus en plus souvent en conflit avec les attentes immatérielles de nos contemporains.

Lorsque nous avons posé la question «En quoi l’île est-elle associée à des dimensions particulières de la vie humaine?», nous avions déjà compris que l’île était assimilée à un territoire hors ou en marge du monde, et que même si cet ailleurs changeait de contenu au fil des époques –nous l’avons vu au fil de ce mémoire, il représentait une sorte d’invariant que les projets de transformation comme celui de l’île Seguin devaient prendre en compte. Si les îles sont bien en relation avec l’héritage immatérielle d’une culture, on peut se demander comment définir cet héritage et ces valeurs communes à une époque où les références symboliques sont de moins en moins le fait d’une société ou d’une partie du monde et de plus en plus le résultat de choix individuels. C’est peut-être ici que se trouve la difficulté lorsqu’il s’agit de parvenir à un consensus autour de l’aménagement d’un territoire tel que celui d’une île.

MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité I . REGARDS

HORIZONTAUX: De l’usage des îles II . REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

ANNEXES

SONDAGE SUR GOOGLE FORME

Lien du sondage sur google forme: https://docs.google.com/forms/d/e/1FAIpQLSc5VlfciiBMDbXk3Kfw2_ gtCXgAw4kV41vwImSiVl0_7sco5g/viewform?usp=sf_link

Bonjour tout le monde, Je m’appelle Xiaoyu, et je suis étudiante en architecture à Paris. Je suis actuellement en train de préparer mon projet de fin d’études et j’ai choisi de travailler sur l’île Seguin, un endroit sensible, spécial, avec une longue histoire. Différents projets, que vous trouverez plus ou moins esthétiques, vont être construits au fil des prochains mois sur la partie centrale et sur la pointe amont de l’île. Dans mon projet de fin d’études, j’aimerais requestionner la manière de traiter l’île Seguin, tout en respectant son histoire, sa spécifi cité, et en prenant en compte le point de vue et les attentes des habitants de Boulogne-Billancourt, le tout en présumant qu’il soit possible de parvenir à un compromis entre les attentes des différents acteurs. J’ai premièrement besoin de savoir ce que vous ,en tant de Boulonnais, vous attendez ou attendiez de cette île. Connaissez-vous les projets qui ont été retenus et qui seront prochainement construits ? Ces projets vous semblent-ils pertinents et adaptés aux besoins de votre ville ? Aviez-vous un espoir ou un rêve personnel en ce qui concerne le futur de cette île. Voici quelques-unes des questions que vous retrouverez dans le questionnaire ci-dessous. Vos réponses me seront très utiles et me permettront de penser mon projet architectural en lien avec les attentes des habitants qui vivent sur un territoire. Merci par avance pour votre aide.

1. Quel âge avez-vous ?

0-14 0 0% 15-24 54 72% 25-64 7 9,4% 65ans et plus 14 18,6%

2. Quel est le domaine de votre profession ?

Administration 5 Agriculture 0 Alimentation 2 Animaux 0 Architecture 1 Armée 0 Artisanat d’art (Design, Mode) 1 Banque (Finance, Assurance) 3 Biologie 2 BTP (Urbanisme) 1 Cinéma (Audiovisuel, Jeux vidéo) 1 Commerce 6 Communication (Journalisme, Marketing) 6 Culture (Spectacle, Patrimoine) 3 Droit 3 Edition(Imprimerie) 2 Electricité (Electronique, Robotique) 1 Energie 1 Enseignement 5 Environnement 2

Gestion (Comptabilité, RH) 4 Hôtellerie (Restauration, Tourisme) 1 Humanitaire 0 Informatique 5

Lettres (Sciences humaines, Langues) 1 Matériaux 0 Mécanique 3 Santé 3 Sciences Physique 2 Secrétariat 2

Social (Petite enfance, Services à la personne) 1 Soins (Esthétique, Coiffure) 1 Sport 1 Transport 3

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REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

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3. Qu’est-ce que représente pour vous l’ île Seguin aujourd’hui ?

·Un lieu que vous n’avez jamais visité. 5

·Un lieu qui a perdu son identité avec le départ des usines Renault. 21

·Un lieu où vous aimeriez habiter dans le futur 5

·Le souvenir d’un jardin disparu et de promenades que vous avez perdues. 16

·Un lieu de concurrence pour les promoteurs. 35

·Un espace de compétition pour les architectes. 18

·Une salle de concert où vous êtes déjà allé /où vous aimeriez aller. 43

·Un lieu dans lequel je vis et que j'adore 19

·Un espace de liberté pour la circulation de l'air frais 37

·Un symbole d’inaction politique 20

·Un potentiel pour des jardins et d'autres lieux verts 39

·Un espace ouvert à de multiples potentiels artistiques 28

AUTRE :

·Un lieu de mémoire à pérenniser dans un cadre de verdure propice à la réflexion universelle sur la condition ouvrière 1

·Un espace pour lutter contre le réchauffement climatique, préserver un îlot de fraîcheur et un couloir de ventilation 1

·Une chance manqué de sauvegarder l’esprit du éco quartier. Bientôt 125000m2 de bureaux! Quel dommage 1

4. Etes-vous satisfait que ce lieu soit aujourd’hui au centre de nouveaux projets de construction ?

Oui 36 52,2% Non 33 47,8%

5. Connaissez-vous les projets qui ont été retenus et qui seront prochainement construits ?

Oui 43 62,3% Non 26 37,7%

6. Ces projets ont-ils pris en compte les besoins des habitants de Boulogne ? Quels sont selon vous ces besoins ?

Oui 1

Non 6

Pas assez de jardins/espace verts 5

Bien sûr que non puisque les habitants n’ont jamais été consultés. Leurs besoins sont de l’environnement, une vie plus douce et des équipements collectifs et des logements.

Non. Les besoins d'espace vert et libre de bâtiment n'a pas était pris au sérieux.

Non. Six tours de bureaux quand la ville (et surtout le quartier voisin du Trapèze) compte énormément de bureaux vides. Les boulonnais ont besoin d'accès au fleuve, d'espaces verts, de logement à prix abordable, d'espaces sportifs pour tous, de lieux de rencontre.

Absolument pas, dommage de construire des bureaux plutôt que de penser un espace ouvert aux Boulonnais. Non, avec la crise sanitaire, il devient urgente de préserver et prévenir les changements climatiques et organiser la résilience des riverains. Monte des eaux, végétalisation des berges. Je ne connais pas les projets mais j’aimerais vraiment qu’ils pensent à un projet autour d’un espace vert. Prioritairement besoin d'un projet respectueux de la nature et d'équipements qui favorisent la convivialité entre les boulonnais.

Ces projets répondent à la demande du maire de vendre le maximum de mètres carrés aux promoteurs. Cette île a un potentiel extraordinaire et les projets n'en tirent absolument pas partie. On arrive à une situation ubuesque dans laquelle les parties avales et amont vont attirer du monde le soir et le weekend et la partie centrale sera déserte. Un futur coupe-gorges... Par ailleurs, l'espace vert proposé est très limité : c'est un terrain en forte pente Non. Et ils ne sont pas ni avec les tendances actuels (télétravail), ni avec les politiques nationales sur la réduction des GES.

Je pense que cette île aurait du être uniquement consacrée aux loisirs ( musée Renault , espace jardin , restauration , bar , cinéma , terrain de tennis couvert , espace de jeu fermé pour les enfants l’hiver ....) Pas vraiment. Les boulonnais ont besoin d'espaces verts de liberté, de sports de plein air, de jeux de plein air pour les ado.

Il y a aussi les besoins de Meudon. Travaillant à Meudon sur seine j'ai vue sur Paris et Boulogne donc les besoins seraient que les constructions ne soient pas trop hautes pour ne pas masquer cette vue au loin. Plutôt espace vert cela manque terriblement à Boulogne.

La nature, des arbres Esthétique et espace libre et vert.

Ce serait vraiment bien que cette île soit un lieu culturel/artistique uniquement : en plus de salles de concerts, on pourrait imaginer : un conservatoire, musées, lieux pour permettre aux artistes de travailler et que nous pourrions rendre visite. Plus de la verdure avec des sculptures originales.

Culture et sport

On a besoin de parc urbain.

Un nouveau centre nautique? l’environnement, l’accès à la nature, le bien-vivre Non. Trop de tours trop haute set pas assez d’espaces verts Non et particulièrement en matière d'environnement et de hauteur de bâtiments Centre culturel, espace détente et rencontres décontractés pour les familles et les amis Manque de culture

Aucun besoin des habitants n’a été pris en compte. Seuls les intérêts financiers des promoteurs et de la Ville de Boulogne ont orienté ce projets de bureaux à l’heure où le télétravail est mis en avant. Ce lieu aurait dû être un poumon de verdure pour compenser la débauche urbanistique du quartier du Trapèze. Non, pas du tout - il faudra créer un espace inclusif pour les jeunes où ils peuvent vivre leur créativité Non. Espaces verts. Pas de hauteur. Aucun des projets ne prend en compte nos besoins. Nous avons besoin de verdure. Ils ont pris en compte les besoins des contribuables de Boulogne. Non les habitants ne veulent pas de tours, et plus de jardins

Les projets sont surtout orientés vers la construction de bureaux, alors qu'un parc où tout le monde peut se promener serait le bienvenu

Non : c’est projets représentent la bétonisation constante, et ne prend pas en compte le besoin grandissant d’espaces verts de cette région Logements

Intérêt de promenade, offre de services et commerces

Non... besoin : être sûrs que cela n'empirera pas les bouchons effrayant autour du pont de Sèvres....

Non. le besoin est de ne pas dupliquer sur cet espace, la politique habituelle de la ville de Boulogne. De repartir de zéro et d'avoir en tête le défi écologique

Non. Nous avons besoin de nature, de verdure, pas de béton.

Pas suffisamment. Beaucoup de boulonnais réagiront mais trop tard Verdure et art

Plus d'espaces verts, d'infrastructures pour la communauté (sportives, culturelles... Etc.)

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ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

7. Puisque les collectivités territoriales ont fait le choix de construire sur l’île, quels sont les équipements que vous auriez aimé voir privilégiés? (Multi réponses)

Bureau 3 Commerce 14 École 10

Équipement sportif 27 Parc 56

Logement 10

Équipement culturel (Art et culture) 50 Centre de culte 12 Hôpital 4 Restauration 20 Centre de recherche environnemental 20 Je ne sais pas 1

8. Quels sont les trois mots qui vous viennent à l’esprit lorsque vous pensez à cette île ?

Renault 13 paix 11 espace vert 10 béton 8 histoire 7 nature 7 seine 6 musique 6 rêve 6 gâchis 5 promenade 4 culture 4 opportunité 4 friche 3 berges 3 seine musicale 3 travaux 3 île 3 travail 3 verdure 3 politique 3 promoteurs 3 patrimoine ouvrier 3 architecture originale 3 art 2 destruction 2 moderne 2 Boulogne-Billancourt 2

autoritarisme, pont, inaccessible, écocide (crime), générations futures, tristesse, révolte, écologique, vivant, bucolique, transformation, dynamisme, intelligence, vide, déconstruit, reposant, îlot, infini, fric, sport, cœur, plénitude, pollution, argent sale, unique, paquebot, colère, impuissance, capitalisme, exclusion, potentiel, mon grand-père, mon père, piétons, sèvres, vue, privilégier, tour, la crainte de l'immobilier envahisseur, activités multiples, nouveauté, bureaux, tram, vaisseau, isolée, avenir, familiale

9. Quand île sera une nouvelle fois aménagée, est-ce un lieu que vous fréquenterez plus souvent?

Oui 27 38,6% Non 7 10%

Je ne sais pas 36 51,4%

10.Aviez-vous un espoir ou un rêve personnel en ce qui concerne le futur de cette île ?

Un lieu déconnecté.

Tout arrêter et reprendre le projet avec plus de verdure Une île avec deux pôles culturels dans ces extrémités, musique d'un côté, art visuel/cinéma de l'autre, avec un grand parc et espace libre de bâtiment au milieu.

Un grand parc, quelques folies pour des manifestations culturelles, une deuxième piscine, un lieu intergénérationnel, quelques salles omnisports

Laisser plus d’espaces verts entre la fondation Emerige et la Seine Musicale Désartificialisation de l’ile et végétalisation, espace de fraîcheur Une mini forêt avec pourquoi un centre équestre. Un lieu sans réseau

Le rêve et l'espoir que le projet actuel d'occupation du sol n'aboutisse pas. Qu'un autre puisse le remplacer.

En faire un lieu de promenade, mixte, avec des commerces et des bureaux mais surtout des lieux de vie (théâtre, expo, etc.) et surtout des espaces verts Des constructions de taille modeste, pas des immeubles de 8 étages et surtout pas de tour de 14 étages!

On aurait pu imaginer des ateliers gérés par les habitants (réparation de vélos, commerce circulaire, etc.) pour reprendre l'histoire ouvrière.

Que le IGH prévu n’est pas construit! Davantage de structures culturelles

Du vert, des parcs, de la nature. Uniquement consacré aux loisirs

La mémoire du passé ingénieux de cette ville.

Que ce lieu soit centré sur un thème : l’Art Privilégier la nature une île verte comme sa voisine l’île St Germain

Que les souhaits de chacun soit respecté Plus de culture et de verdure, un lieu déconnecté de l'internet.

Plus d'animation la nuit car il y a que 2 bars et pas assez chaleureux je trouve.. Tout est aujourd’hui figé. Tous les permis de construire sont lancés. J’attends l’Inondation du Siècle. Un endroit inclus et accessible pour tout le monde qui augmente la qualité de vie des citoyens et qui soutient la cohésion sociale Qu’elle ne devienne pas une zone densément urbanisée mais plutôt un lieu de verdure et propice à la balade.

Parc, jardin verdure, un lieu déconnecté C’est un bloc de béton sans âme.

Pas de tour! Un parc, un jardin où on peut se rencontrer, avec éventuellement un restaurant avec terrasse au bord de l'eau

Un grand espace préservé du béton et du bruit Un clin d’œil à Renault Pouvoir y accéder enfin, venir à bout des travaux

Que les travaux soient enfin terminés Parc et jardins potagers partagés.

Qu'elle soit un poumon vert... qu'elle soit facilement accessible. Que ce soit un lieu de vie et de promenade. Que beaucoup d'arbres y soient plantés et apportent oxygène et fraîcheur aux générations qui nous suivent. Que ces arbres à long terme forment une forêt! Hélas, mais rêve que ce lieu soit un espace de repos, détente et culture, loin du bruit et de la pollution visuelle que m'inspirent les tours qu'on prévoit d'y installer.

Un musée du syndicalisme Actuellement je trouve que les alentours de la Seine musicale ne sont pas agréables, manque de végétation.

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11. Parmi les réussites architecturales que vous connaissez, quelles sont celles qui selon vous pourraient inspirer le réaménagement de l’île Seguin ?

Les mini forêts urbaines

Un fusionnement des Jardins suspendus de Babylone et Musée Guggenheim Bilbao/ New York J’aurais rêvé d’un jardin comme Giverny.

Tout ce qui est aménagement de nouveaux parcs, d'espaces communautaires

Le parc de Billancourt, malgré la faible superficie est très réussi.

Parc des glacières

Le parc central de Valencia (Espagne)

Parc André Citroën 2

Il y a des idées à prendre à Lyon (Confluence), à Nantes avec des quais larges et réservés aux piétons Parc de l’île saint germain Île saint dénis

Île de Puteaux 2

Quasiment toutes les autres îles de la Seine, à commencer par l'île saint germain à Issy-les-Moulineaux pour sa mixité, l'île de Puteaux pour ses espaces verts, l'ile de la Jatte pour la faible hauteur des bâtiments

Une île reste toujours une étendue de terre entourée d'eaux, une dimension qui doit être gardée dans un projet respectueux de la nature et des riverains.

Eco quartier

Constructions basses

En bois et de faible hauteur, pas plus de 4 étages

Construction bioclimatiques, en bois ou en récupérant des façades historiques

Le Mucem à Marseille

Grand palais

Fondation Vuitton 2

Fondation Cartier La Défense

Un Gehry face à Ban. Et pas de multiplex....

Le Centre culturel Heydar-Aliyev, Bakou (Azerbaïdjan) de Zaha Hadid (même style de courbes et formes en cohérence avec l'architecture actuelle)

Le quartier du trapèze

Le Louvre d’Abou Dhabi Il y a dix ans il y a eu un projet de centre culturel qui était abandonné Immeuble paquebot Rudy Ricciotti

Les anciens frigos à Bercy Constructions basses

Pas d’idée là mais svp éviter le style du musée Albert khan, c’est une horreur ! Je suis très inquiète car dans l'ouest parisien toutes les constructions modernes sont moches à part le nouveau quartier face à l'île Seguin qui est plutôt coloré et sympa mais rive gauche c'est l'horreur Le nouveau quartier Seine Musicale Ni réussite ni ratage. Sauf sous-terrain Multiculturel comme la cité universitaire Bâtiments élégants, originaux, aériens

12. Si mes questions ne vous ont pas permis de dire ce que vous vouliez dire à propos du réaménagement de cette île, prenez la liberté de le dire maintenant !

Je trouve que c’est une erreur fondamentale de voir construire de nouveaux bureaux sur l’île, sachant que beaucoup de bureaux se trouvent sans locataires aujourd’hui dans le quartier Trapèze côté Boulogne-Billancourt de l’île.

Le chemin dont les choses évoluent sous l’œil du Maire Baguet (3e mandat) montre qu’on va rater une occasion

en or et unique dans le temps, de faire une île culturelle et verte, sans un côté commercial et sans “bétonisation", que n’apporte pas beaucoup à l’unité culturelle et sociétale de la vallée des Hauts-de-Seine.

Il faut demander aux boulonnais ce qu'ils veulent et en finir avec la dictature de l'immobilier de bureaux. Cela fait plus vingt ans que les associations environnementales riveraines de l’île luttent pour sa préservation comme îlot de fraîcheur. Cette fois ci c’est la mère des combats qui se joue. La marchandisation des bords de Seine est à son paroxysme, avec l’aide des maires qui n’ont rien compris au changement climatique, qui n’ont aucune vision globale et régionale, qui ne se soucie en aucune manière du bien-être de leurs habitants et qui n’ont en ligne de mire que de construire des m² de bureaux, pour le grand profit et le bonheur des entreprises du BTP.

La population boulonnaise dans sa totalité, a été complètement écartée des débats, qui durent depuis plusieurs années, sur le destin de l'Ile Séguin.

Les architectes sont prisonniers des demandes des politiques. Dommage car on doit pouvoir faire tellement mieux pour l'ile Seguin

C'est un gâchis qui dure depuis 30 ans cultivé par les ambitions de petit élu local, entretenu par les promoteurs et parfois emmené jusqu'au délire par des vedette comme Jean Nouvel. Les pointes aval et amont ont leurs créateurs. Le centre doit être modeste et en phase avec le défi de l'avenir : le climat.

Les associations qui se rebellent pour leur propre intérêt ( perte d’ensoleillement, travaux longs et sonores) de leur immeuble étaient au courant quand ils ont achetés que cette ile serait réaménagée un jour. .... alors oui il faut de la verdure mais on échappera pas à des immeubles plus ou moins jolis.

Cela fait trop longtemps que ça dure ! J'espère que cette île ne sera pas trop bétonnée et que nous aurons de la verdure y compris sur les bâtiments.

J'adore la Seine Musicale. Le reste de l'île ne devrait être qu'un grand jardin ! Donner le lieu aux promeneurs avec la possibilité de prendre un café un léger repas

L’île Seguin n’est qu’un terrain de spéculation immobilière avec une mairie qui est bien contente de vendre à bon prix.

L'espace est trop petit sur l'île et s'il y a la foule et bcp de monde ça perd tout son charme...peut être imaginer des tunnels passants sous la seine reliant les deux rives ... une balade plus originale

L’île Seguin n’existe plus depuis longtemps. Il ne reste qu’un bloc de béton accumulé par Renault au fil du temps. Sans ce béton, la surface de l’île serait plusieurs mètres sous le niveau de la Seine.

L’île Seguin n’aura pas sa superbe si les berges de Seine côté Boulogne restent si mal traitées et inutilisées Boulogne-Billancourt, lieu de passage vers la capitale, mérite mieux que des tours, de l'immobilier, de l'investissement, cette armada de projets qui n'ont pour but, pour la plupart, que la spéculation.

Qui pourra louer ou acheter sur cette île ? Toujours les mêmes. Au moins, si elle est consacrée à la nature, au canotage et sur le modèle de l'ancien petit Éden qu'était l'île de Chatou, de la Grande Jatte ... on pourrait végétaliser de façon originale : botanique, plantes aux vertus médicinales et pourquoi pas un kiosque pour les vendre ! Pas de tours ou vraiment des bâtiments de très faible hauteur.

L’aménagement de l'Ile est la partie visible de l'iceberg... Le scandale s'étend à tout le Trapèze où les promoteurs et la municipalité se sont "sucrés" et très peu a été fait pour la communauté...

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ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

Cartes historiques de Boulogne-Billancourt

Évolution de l'usine Renault à Boulogne-Billancourt

1898, les premiers ateliers couvrent 300m² et emploient 60 personne

1914, à la veille de la première guerre mondiale 7600m² 8000 personnes

1919, grande extension pendant la guerre 1914-1918 252000m² 14000 personnes

1939, la seconde guerre mondiale 614000m² 32500 personnes

1950, 5 ans après la nationalisation 662000m² 40500 personnes

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RÉFÉRENCES

RÉFÉRENCES DES PHOTOS

Le temple d’Isis sur l’île d'Aguilkia https://www.voyageegypte.fr/guide-egypte/destination/ile-agilkia

L’île du soleil – Lac Titicaca (Bolivie) https://www.britannica.com/place/Isla-del-Sol

Temple de Miyajima sur l’île d’Itsukushima https://www.evaneos.fr/experiences/119-rencontrer-les-kami-au-sanctuaire-ditsukushima-sur-lile-demiyajima/

Temple d’Hera à samos https://warwick.ac.uk/fac/arts/classics/intranets/students/modules/greekreligion/database/clunas/

L’île de Patmos https://www.grecehotels.com/dodecanese/patmos/index.htm

L’île de Gallinare https://pixabay.com/fr/photos/%C3%AEle-gallinare-mer-panorama-ciel-1941719/

L’île de Shaïtan https://vsesvoi43.ru/ozero/

L’île légendaire de Bujan https://i-fakt.ru/gde-naxoditsya-ostrov-buyan/

L’île de Valaam http://www.nemiga.info/rossiya/kareliya/valaam.html

Le monastère de Konovets https://stringfixer.com/fr/Konevsky_Monastery

Monastère Solovetski (îles Solovki)

https://alexandrederussie.com/russie/nord-ouest/carelie/iles-solovki-monastere-solovetski/

Gravure d'Ambrosius Holbein, Première édition de l'Utopie de Thomas More (1516) https://jym44.blogspot.com/2018/02/lutopie-thomas-more-1516.html

Arlequin porte Iphicrate sur son dos https://lettresfrancaises.fandom.com/fr

Affiche du film « L’île » https://www.livresenfamille.fr/drame-passion/3245-pavel-lounguine-l-ile.html

Références

L’île des gauchers

https://www.facebook.com/ileDesGauchers/

Site de Taylor camp https://fromtheheartproductions.com/wp-content/uploads/2014/11/taylor-camp-kauai-kevin-smith.jpg

Cabanes de Taylor camp

https://www.staradvertiser.com/wp-content/uploads/2019/02/web1_0215-WEB-Taylor-Camp-film-DianesHouse3.jpg

Hay Ibn Yakzan et sa mère adoptive

1001 inventions: The Enduring Legacy of Muslim Civilization, 3°édition, page 103

Illustration Robinson Crusoé (Daniel Defoe)

https://www.amazon.fr/Robinson-Cruso%C3%A9-Annotated-Daniel-Defoe-ebook/dp/B073X8Z47N

Ile-cimetière de San Michele à Venise

https://oliaklodvenitiens.wordpress.com/2011/05/01/cimetiere-san-michele-de-venise-hotes-etmonuments-celebres/

L’île du purgatoire et du paradis Représentation du Purgatoire d'après la Divine Comedie • Crédits : Costa/ Leemage – AFP https://www.franceculture.fr/emissions/les-chemins-de-la-philosophie/la-divine-comedie-de-dante-34entre-lame-et-le-corps-le-purgatoire

Tableau de Domenico di Michelino

Représentation symbolique de La Divine comédie de Dante par Domenico di Michelino (1417-1491)• Crédits : Immagina/Leemage – AFP https://www.franceculture.fr/emissions/les-chemins-de-la-philosophie/la-divine-comedie-de-dante-34entre-lame-et-le-corps-le-purgatoire

Joachim Patinir, Charon traversant le Styx Joachim Patinir, Charon traversant le Styx, 1524, Musée du Prado, Madrid, © Wikimédia https://fr.wikipedia.org/wiki/Charon_(mythologie)

Plan des Enfers

https://eduscol.education.fr/odysseum/le-plan-des-enfers

Paul Huet, Les inondations dans la forêt de l'Ile Séguin, 1833 https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Paul_Huet,_L%27Ile_S%C3%A9guin_in_Flood,_1833,_ NGA_111397.jpg

MYTHES ET UTOPIES : Les symboliques de l'insularité I . REGARDS

HORIZONTAUX: De l’usage des îles II .

SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

Tannerie sur l'île Seguin, 1795

https://levillagedebillancourt.fr/2020/05/27/le-seguin-de-lile-seguin/

Charles-Léopold, L'Ile Seguin, le pont de Sèvres et Saint-Cloud, 1738 https://www.boulognebillancourt.com/information-t ransversale/agenda/vis ite-virtuelle-lile-seguin-et-sesrevolutions-1459#/gallery-id-4118

Plan de roussel, 1731 http://www.la-declaration-ile-seguin.fr/?IleSeguinHistorique

Armand Seguin (en costume à gauche) et Lavoisier lors d’une expérience sur la respiration. 1981 https://culturesciences.chimie.ens.fr/sites/default/files/Precis_Chimie_Deguster_104-107.pdf

E. Poteau, la vallée de la Seine et l’Ile Seguin, 1897. Vue depuis les hauteurs de Meudon. https://levillagedebillancourt.files.wor dpress.com/2020/05/e.-poteau-la-vallc3a9e-de-la-seine-et-lileseguin-1897.jpg

Cartes postales du début du 20ème siècle, vue sur les berges de l’île Seguin https://picclick.fr/92-Bas-Meudon-Vue-Sur-La-Seine-173918352649.html

Pointe aval de l'île Seguin, 1938

https://www.challenges.fr/ile-de-france/bouygues-telecom-s-installe-sur-l-ile-seguin-et-vire-vinci_761522

Vue aérienne de l'île Seguin, 1936 https://www.ileseguin-rivesdeseine.fr/fr/urbanisme/ile-seguin-rives-de-seine-une-grande-operationdamenagement-au-coeur-du-grand-paris

Cartes historiques de Boulogne-Billancourt http://consultation.archives.hauts-de-seine.net/mdr/index.php/rechercheTheme/ requeteConstructor/1/1/A/414135/Boulogne-Billancourt

Île Seguin après la démolition de l'usine Renault, 2005 Google earth

La cité des plaisirs http://www.peripheries.net/article280.html http://www.linternaute.com/savoir/diaporama/ile_seguin/5.shtml https://www.lemoniteur.fr/article/les-projets-pour-l-ile-seguin-dans-le-moniteur.378604 http://www.linternaute.com/savoir/diaporama/ile_seguin/7.shtml http://www.perraultarchitecture.com/fr/projets/2538-daniel_buren_facade-enveloppe_de_lile_seguin.html

L'insularité poétique de Jean Nouvel

https://www.batiactu.com/edito/ile-seguin-trois-projets-jean-nouvel-soumis-aux-votes-33669.php

Île seguin 2016 http://www.lecourrierduparlement.fr/lile-seguin-resiste-encore-et-toujours-a-la-betonneuse/

Références

MÉMOIRES ET THÈSES

AHIER Alexandre, MULTIFONCTIONNALITE DES ESPACES ET CONFLITS D’USAGES: une lecture à partir de la théorie des jeux, Ecole polytechnique de l’Université de Tour, 2012-2013

Alain Michel, Stéphane Pouyllau, Rapport final du projet “ Usines 3D ”, HAL, 2017

Fornari Mattia, La “Cité des Arts” all’Ile Seguin, Parigi, Politecnico Di Milano, 2012-2013

Prisca Cez, L’île Seguin à Boulogne Billancourt-L’île de la controverse, Paul Verlaine Université Metz, 2005-2006

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REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES ET FONCTIONS SOCIALES: L’ exemple de l'île Seguin

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L'insularité poétique de Jean Nouvel https://www.batiactu.com/edito/ile-seguin-t rois-projets-jean-nouvel-soumis-auxvotes-33669.php

VIDÉOS ET CONFÉRENCES

"L'île Seguin : De Renault à Pinault" (2002) https://www.youtube.com/watch?v=y_u1oniCIag&t=667s

L'île Seguin, de Renault à la Seine musicale... 25 ans pour changer d'histoire https://www.youtube.com/watch?v=wtclH8samgc

Transformations | L'Île Seguin retourne en ville https://www.youtube.com/watch?v=-VGk4h-ktrc&t=698s

Avec Stéphane Bern contre la bétonisation de l'Île Seguin https://www.youtube.com/watch?v=EbIA4nZL28o

1930/2012 : L'Ile Seguin https://www.youtube.com/watch?v=WdfcvjTzbKA&t=72s

Visite de la Seine Musicale à Paris https://www.youtube.com/watch?v=EhL8_FbMQIQ

Paris : les quais de Seine avant les voies sur berge | Archive INA https://www.youtube.com/watch?v=uR7Gfeeb8vY

Ile Seguin : 10 ans https://www.youtube.com/watch?v=vrl9WZattko

L'Usine Renault (Île Seguin) (1950/2016) https://www.youtube.com/watch?v=bnTdmOAv17E

Louis Renault et l'île Seguin | Les bâtisseurs du Grand Paris https://www.youtube.com/watch?v=9rcuQuviyKU&t=96s

Vues simulées avant et après le projet de l'ile Seguin à Boulogne https://www.youtube.com/watch?v=zHfDeUlVsMQ

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HORIZONTAUX: De l’usage des îles II .

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XU Xiaoyu 2020-2021

ÎLES : DES TERRITOIRES ENTRE DEUX MONDES: Symbolismes et fonctionnalités des îles