CONFERENCES Aux sources de la violence. De l’enfance à l’adolescence, 8, 9 & 10 Octobre 2009, Paris. FFPP
LA TENTATIVE DE SUICIDE D’UNE ADOLESCENTE : ENTRE « MEURTRE DE SOI-MÊME » ET « ACCORCHAGE » Yves Morhain [Yves.Morhain@univ-lyon2.fr] Professeur de psychologie clinique et de psychopathologie Centre de recherche en psychologie et psychopathologie clinique, Université Lyon 2
Émilie Morhain [morhain_emilie@yahoo.fr] Psychologue clinicienne Centre de recherche en psychologie et psychopathologie clinique, Université Lyon 2 La réflexion métapsychologique proposée se centre sur la rencontre avec la mort dans les réaménagements narcissiques et identitaires à l’adolescence. Le passage à l’acte suicidaire de l’adolescent tiendrait lieu de pensée face à l’émergence pubertaire et permettrait une mise en sens de ce qui ne peut se symboliser. La tentative de suicide permettrait, à l’adolescent dépressif mélancoliforme, l’émergence de nouvelles représentations réelles, imaginaires et fantasmatiques. En réparation d’une blessure narcissique précoce vécue sur un mode traumatique, elle serait une tentative de réappropriation subjective de la vie psychique. A partir d’un cas clinique nous aborderons la problématique de la tentative de suicide de l’adolescent dans un lien à la mère défaillante dans sa qualité d’investissement, réactualisé par une rupture sentimentale. Face à une « mère morte » adoptive, dans la confrontation à l’émergence du « pubertaire » et à l’inexpliqué des origines et d’un avant la naissance, toute séparation est vécue sur le mode de la rupture, de la cassure où le travail de « deuil originaire » est mis en impasse. Dans une tentative de « soigner » sa blessure narcissique et lorsque les mots viennent à manquer, le sujet adolescent peut avoir recours à un objet d’addiction déshumanisé, ici, un violon qui apparaît comme une manière exclusive de se séparer de tous liens et sources de souffrance lorsqu’ils s’avèrent trop « éphémères », voués à la « passagèreté ». Le violon en tant qu’il abolit les liens pour éviter d’avoir à s’en séparer de manière douloureuse se situe entre « accordage » et « accrochage ». Il permet d’éviter de se confronter à la perte, met également à distance tout autre investissement qui pourrait être menaçant pour l’intégrité psychique. Une psychothérapie à médiation a pu permettre à cette adolescente de renouer progressivement avec ses envies, ses désirs et le plaisir de faire seule et avec les autres, pour en arriver à un travail de troc et de deuil en appui sur la sublimation. Le troc des anciennes représentations mortifères et destructrices contre de nouvelles représentations sources de vie se situerait dans la possibilité à pouvoir se saisir d’une pluralité de médiums pour pouvoir transformer sa vie interne. • • • • •
Freud, S. (1915). Passagèreté, Œuvres complètes, 13. Paris : PUF. Green, A. (1983). La mère morte. In Narcissisme de vie, Narcissisme de mort. Paris : Édition de Minuit. Morhain, Y., Roussillon, R., & al. (2009). Actualité psychopathologique de l’adolescence. Bruxelles : De Boeck. Morhain, Y. (2008). Trajectoires de la destructivité et rupture identitaire à l’adolescence. In Chouvier, B., & Roussillon, R. Corps, Acte et Symbolisation, Psychanalyse aux frontières. Bruxelles : De Boeck. Perret-Catipovic, A. (2004). Le suicide des jeunes. Saint-Maurice : Saint-Augustin.