Survol

Page 1

Survol



Survol

1



Sommaire

À mon père p 5 Guy Lavigueur

RCA

p7

Guy Lavigueur, À Vol d’Oiseau p 9 Avant-propos p 12 Empreintes terrestres p 13 Hommage aux pilotes p 44 Remerciements p 45 English Summary p 46 Crédits p 48

3


4

Papa Lucien 1950 Mont-Joli, QuĂŠbec


À mon père

En plus de me transmettre le goût et le plaisir de voler, mon père m’a aussi enseigné l’aéronautique, la mécanique, la météo, la navigation et…le respect de toutes les conditions qui permettent à un plus lourd que l’air de rester dans le ciel. Lucien a obtenu son brevet de pilote en 1947, à bord d’un Tigermoth de de Havilland, en décollant d’une piste de gazon. Depuis, il a totalisé plus de 20 mille heures de vol sur quatre continents à bord de plus de cent modèles d’avions, sans jamais avoir été pilote de ligne! Dans les années 60, accompagné de mes frères, il était tout à fait normal et courant d’aller faire un « tour d’avion ». Mon père faisait une première passe au-dessus de la maison, juste assez bas pour nous signaler qu’il allait amerrir. On partait alors à la course vers la rivière avec un goûter et notre intarissable soif d’aventure. Quelques minutes plus tard, on se retrouvait à 1000 pieds d’altitude en route vers une nouvelle destination. Aujourd’hui, il vole toujours, pour son plaisir et le mien. Guy Lavigueur

5


6


Guy Lavigueur,

RCA

« Mont-Joli. 1958. J’ai trois ans. Pour la première fois, je monte dans le cockpit d’un biplace. C'est mon père qui pilote le monomoteur. Je me contente de demander, aussitôt l’avion décollé, de fermer le moteur trop bruyant! Ce premier vol est-il à l’origine de ma passion pour la photographie aérienne? » Depuis plus de vingt ans, je survole des lieux d’où j’extirpe patiemment des signatures uniques, créées tantôt par des forces implacables, tantôt par des ‘réalisations du génie humain’. Je scrute, sonde, monte, cherche, repère, quadrille, redescends, fouille, retourne dix fois au-dessus du même territoire. Tout à changé. » En Guyane, au Sénégal, en Arizona, en France, à Bali (Indonésie), au-dessus des Rocheuses, des Grands Lacs, de l’Abitibi, Guy Lavigueur saisit ce qu’il appelle « des empreintes terrestres ». Ce portrait de notre planète vue d’en haut, il souhaite nous le faire partager. Le spectateur est invité non pas à scruter les détails ou tenter de déceler le territoire d’origine de ses photos mais tout simplement à admirer et à expérimenter lui aussi, à sa façon, ces vues inédites. Admis à l’Académie royale des arts du Canada en 2004, Guy Lavigueur a exposé à quelques reprises, tant à Montréal qu’à Granville Island, au Emily Carr Institute of Art & Design. Il a contribué à plusieurs publications émanant du milieu artistique. En parallèle à son travail d'artiste, il possède à Montréal son propre studio de photo. Il se spécialise par ailleurs en photographie aérienne. Le photographe qui travaille ainsi à vol d’oiseau en « grandeur nature » a aussi collaboré à la conception d’une vingtaine de timbres-poste pour la Société canadienne des postes du Canada.

7


8


Guy Lavigueur : À Vol d’Oiseau

Par René Viau

C’est du haut du ciel que Guy Lavigueur tente de nourrir notre imaginaire. Proposant des chemins de traverses entre ce qu’il voit et ce qu’il capte avec son appareil photo, ses oeuvres nous rappellent que le regard porte en lui un savoir « cultivé » souvent hérité de la peinture, et ce, au-delà des indices de la réalité qui s’impriment de façon physico-chimique sur le papier. Dans ses photos aériennes, Lavigueur pose la question du lieu et de sa représentation documentaire. Son interprétation du paysage qu’il arpente à vol d’oiseau est toute personnelle. Ses vues de la terre deviennent autant de déplacements vers un nouvel off shore poétique. Comme en échappée, ses visions photographiques ressemblent davantage à des toiles de peintres qu’à ce qu’on s’attendrait a priori à trouver en regardant à travers le hublot d’un avion. Le jade vert moussu des forêts s’empourpre de touches violacées. On oublie alors les résineux et les feuillus, les coloris de l’automne. Notre œil se concentre sur l’invasion mouvementée de ces orangés et de ces magentas sur un champ de couleur assombrie. Acceptant d’être déboussolés, nous voici conduits vers des contrées où les eaux à la couleur de la boue et de varech d’estuaires fluviaux s’éloignent du bleu céruléen, si rassurant, d’une carte imprimée. Après avoir perdu la carte, nous voici dépaysés au sein même des paysages accrochés sous nos yeux. L’errance devient alors ce territoire à emprunter pour parcourir ces surfaces inédites. Cette odyssée traverse les latitudes et subvertit nos habitudes. Ce voyage est une façon de s’égarer, d’oublier nos réflexes conditionnés.

9


Ici, la graphie compte autant que la « géo ». Là, un éclat noir déchire comme une griffe une surface en éclats. C’est en fait la photo d’un pont qui traverse un cours d’eau à moitié gelé. Sur une autre photo, des traits rosés étendent leurs tracés chenillés. Plus loin, le vert domine. Moussu. Foisonnant. Le graphisme des réseaux dans une autre image pourrait être celui que dessinent les ramures d’une feuille. L’infiniment grand rejoint l’infiniment petit; les échelles se télescopent. Des vagues océanes traversent cette autre photo à la manière de jets à huile sortis du tube et ramenés rageusement à la spatule comme dans le cas d’une toile gestuelle des années 50. Les signes forment une représentation qui se réinvente dans son propre récit. Nous parlons de paysage mais aussi d’autre chose, de visions héritées de la peinture. Pour notre perception ainsi aiguisée, ces nouvelles formes transforment ces photos et nous racontent le récit de cette transformation. Où sommes-nous devant ces archipels de points minuscules qui tranchent sur un fond argenté ? Le delta marbré d’une rivière qui serpente à travers des terres agricoles nous éblouit de ses couleurs métalliques. Sur une autre photo, l’empreinte en forme d’Y des forêts d’arbres qui se découpent sur des champs de blé apparaît en une géométrie contrastée comme un signe. Tout autant qu’aux cadrages, le photographe est particulièrement sensible aux textures « rendues » souvent en camaïeu. Les couleurs semblent s’imprégner au sol devenu comme pour les tableaux abstraits un fond surface saturé. Les arbres et les rochers pourraient s’accrocher, tels les pigments d’une encre rugueuse, sur cette étendue de neiges boréales qui rappellent davantage la feuille de papier encrée et imbibée au lavis. Le turquoise des eaux transporte un même air d’irréalité. Et cette route qui partage

10


d’un trait la photo ? L’écorce géodésique contient des nouvelles calligraphies à chaque fois renouvelées. Des lignes saccadées tranchent en formes de bâtons le jaune cadmium alors que la découpe sombre de l’eau apparaît dans un halo que n’aurait pas dédaigné Rothko. Ces harmonies en vert, ces compositions ultramarines, ces impressions crépitantes rappellent certaines toiles de Mark Tobey. Devant elles, pour reprendre le mot d’Oscar Wilde, « ce n’est pas tant l’art qui imite la nature mais bien la nature qui imite l’art ».

Se déconditionner le regard À l’âge du satellite-espion, du relevé informatique intégral, tandis que Big Brother surveille maintenant le moindre mètre carré de notre planète désormais quadrillée en village global, la vue aérienne redevient un espace d’aventure et d’exploration artistique. Chez Guy Lavigueur, cela s’impose en nous en fonction d’autant de rappels cultivés, de souvenirs d’émotions esthétiques et plastiques. Tributaires de l’addition des réactions, des contemplations de l’œil et de l’intelligence de la mémoire visuelle de chacun, ces œuvres se font incitations à se déconditionner l’esprit et le regard au profit de nouveaux ailleurs picturaux et poétiques.

11


Avant-propos

Mon plus grand désir, quand je suis en vol, est de partager la beauté et l’originalité du relief terrestre avec le plus grand nombre. Bien sûr, rien ne se compare totalement au fait d’être suspendu au dessus de ces endroits magiques. Mais le fait de capter des images et de les diffuser me permet à tout le moins de rendre hommage à la beauté de la planète bleue tout en faisant comprendre la nécessité de la protéger... Ce recueil se veut avant tout une invitation à saisir les occasions qui se présentent d’apprécier les panoramas dont nous fait don notre « Terre ». Il contient des photographies réalisées dans différents pays, au fil de mes voyages, mais le but de cet ouvrage n’est pas de faire deviner ce qu’elles représentent exactement ni l’endroit où elles ont été prises. Elles n’ont été réunies que pour le plaisir des yeux. Guy Lavigueur

12


Empreintes terrestres

Dakar Beach, 1982 Dakar, SĂŠnĂŠgal

13


14

Ovni d’automne, 2005 Montréal, Québec


Dégel félin, 2005 Montréal, Québec

15


16


Duel d’eau, 2003 Rapides de Lachine, Montréal, Québec

17


18

Perpendiculaire 3, 2001 Montérégie, Québec


Enjambée no 2, 2006 Nouvelle-Écosse, Canada

19


20

Haut-voltage no 7, 2004 Montérégie, Québec


Vagues-en-verts, 2007 Bali, IndonĂŠsie

21


22

Jardinage 2, 1999 Montérégie, Québec


Timbis no 20, 2007 Bali, IndonĂŠsie

23


24


Palette d’automne no 13 2002 Lanaudière, Québec

25


26

Tentaculaire no 3, 2005 Nouveau-Brunswick, Canada


Clair de terre, 2003 Centre-du-QuĂŠbec

27


28


Seul-à-deux, 2005 Île Bizard, Québec

29


30

Polichinelle no13, 2003 Mauricie, QuĂŠbec


Figure de broue, 2005 Rapides de Lachine, MontrĂŠal, QuĂŠbec

31


32


Aubrac no 36, 2007 Aubrac, France

33


34

Yamask, 2007 Centre-du-QuĂŠbec


Plaques tectoniques, 2003 Abitibi-Témiscamingue, Québec

35


36


Bleu no 2, 2002 Lac Saint-Jean, QuĂŠbec

37


38

Amibation, 2005 Outaouais, QuĂŠbec


Spongieux no 5, 2005 Bas-Saint-Laurent, QuĂŠbec

39


40

Sidemen, no 45, 2007 Bali, IndonĂŠsie


Submersion no 21, 2001 Lac Ontario, Ontario, Canada

41


42

Shawi no 12, 2006 Mauricie, QuĂŠbec


Mort ou vif, 2006 Abitibi-Témiscamingue, Québec

43


Hommage aux pilotes

Le présent ouvrage ne couvre qu’une infime partie des régions que j’ai survolées pour produire mes photographies. D’une région à l’autre, je rencontre des pilotes qui, souvent, ne me connaissent pas et ne savent pas ce que je leur demanderai comme voltige pour revenir au sol avec une « récolte » prometteuse. Ces neufs pilotes, professionnels ou privés, totalisent plus de 100 000 heures de vol. Je leur consacre cette page pour les remercier de leur collaboration, de leur patience et, dans biens des cas, de leur habileté à me montrer des lieux susceptibles de devenir mes « empreintes terrestres ». Sans eux, rien de tout ceci n’aurait été possible. Guy Lavigueur

René Dousset Benoît Baril Annecy, Haute-Savoie, Dorval, Québec, France Urbain Delmase Langogne, Lozère, France

Gian Piero Ciambella Saint-Hubert, Québec, Dominique Régnier Haute-Loire, France Henri Nectoux Costaro, Haute-Loire, France

Lucien Lavigueur, Montréal, Québec,

Captain Machfuld Bali, Indonésie

Alexandre Lafrance Québec, Teri Goiziou St-Jean, Terre-Neuve, Canada


Remerciements

La préparation d’un tel document, comme celle d’une exposition, nécessite inspiration, créativité et…réflexion. Plusieurs personnes ont aussi donné leurs conseils, leur avis, leur soutien et leurs encouragements. L’artiste remercie : François Dallaire, pour avoir crû à la qualité artistique des œuvres et de la démarche. Suzanne Joubert, pour le partage de ses expériences, pour ses conseils, sa sagesse et ses encouragements. Dominique Laurent, pour l’ouverture d’esprit à l’égard de la photographie comme forme artistique. René Viau, qui a su si joliment transposer en mots les particularités de mes photographies. Mes collègues et amis photographes : Carl Valiquet, Paul Labelle, Pierre Arpin, Pierre Halmaï, Paul Casavant, Luc Morin et Christian Fleury, avec qui j’ai pu échanger en profondeur sur différents aspects de la photographie comme forme d’art. L’Académie Royale des Arts du Canada qui, en m’accueillant parmi ses membres, m’a fait rencontrer des artistes qui sont d’importantes sources d’inspiration. Ma famille et mes amis, dont le soutien et l’enthousiasme ont souvent alimenté ma motivation. La nature, pour tous les sujets qu’elle m’offre.

45


English Summary

To my father

In addition to imparting his passion for flying, my father also taught me aeronautics, mechanics, weather forecasting, navigation and … respect for all conditions that enable a heavier-than-air craft to stay airborne. Lucien obtained his pilot’s license in 1947, flying a de Havilland Tigermoth and taking off from a grass runway. Since that time, he has accumulated over 20,000 flying hours on four continents in over 200 different types of aircraft without ever having worked as an airline pilot! In the 1960s, accompanied by my brothers, it was perfectly normal and habitual for us to take an “airplane tour.” My father would make a first pass over the house, just low enough to signal that he was going to land on the water. We would then run down to the river with a snack and our never-ending thirst for adventure. A few minutes later, we would be cruising at 1,000 feet, on route to a new destination. Today, he still flies for his pleasure and for mine. Guy Lavigueur

Bird’s Eye View

By René Viau High in the sky, Guy Lavigueur attempts to feed our imagination. Presenting shortcuts between what he sees and what he captures with his camera, his works remind us that our perceptions are coloured by our cultural knowledge derived from painting. Each of his views of the earth is a shift towards a new poetic dimension, closer to a painting than what one would expect to see when looking out the window of an airplane. Our eye is drawn to an undulating collision of oranges and magentas on a darkened background. We are disoriented by the landscapes before our eyes. This odyssey transcends latitudes, subverts our habits, and enables us to lose ourselves and forget our conditioned reflexes. Graphics as important as geography Here, a lightening bolt of black slices a sparkling surface like a claw. In fact, it’s a photograph of a bridge spanning a half-frozen body of water. Further on, green dominates. The infinitely large meets the infinitely small; scale condenses. Ocean waves cut cross a photo the way oil paint from a tube is swept across a canvas with a pallet knife. The elements reinvent their own story. The photographer is as sensitive to framing as he is to textures, which are often rendered monochromatically. Irregular lines, like sticks, slice across cadmium yellow, forming a halo around a dark and somber body of water in a way that even Rothko wouldn’t scorn. To quote Oscar Wilde, “Art does not mirror nature, nature mirrors art.”

46


Seeing anew In the age of the spy satellite and integrated communications, when Big Brother keeps watch across a planet that has become a global village, the aerial view has become a place of both adventure and artistic exploration. Relying on our cumulative reactions, visual contemplations and visual memory, the works of Guy Lavigueur encourage us to see anew, putting us in touch with a distant yet poetic pictorial world. Biography Guy Lavigueur

Born in Mont-Joli, Quebec, Guy Lavigueur grew up in the milieu of commercial and recreational aviation. He became interested in photography at a young age. While studying at the Dawson Institute of Photography in Montreal, he went on many flying excursions with his father, a pilot, to master the art and technique of aerial photography. In 2004, the Royal Canadian Academy of Arts welcomed Guy Lavigueur among its prestigious members. He has exhibited numerous times in Montreal, and at the Emily Carr Institute of Art & Design in Granville Island. Given his involvement in the artistic community, he has contributed to the production of various works on artists, art and design. He owns a photo studio in Montreal where he does commercial photography and also offers commercial aerial photography. Guy Lavigueur has also contributed to the development of more than 20 stamps for Canada Post Corporation.

Foreword

My greatest desire when flying is to share the beauty and uniqueness of the earth’s topography with as many people as possible. It goes without saying that nothing can be compared to being suspended above these magical landscapes. Capturing these images and sharing them nonetheless allows me to pay tribute to the magnificence of the Blue Planet while promoting the importance of protecting her. Above all, this collection is an invitation to seize every opportunity to appreciate the panoramas that are the earth’s gift to us. It contains photographs taken in different countries over the years of my travels but is not meant to be a guessing game to discover what the photograph represents or where it was taken. Rather, it has been assembled solely for the pleasure of the eye. Guy Lavigueur

47


Crédits

Conception graphique : François Dallaire,

RCA

Textes : René Viau, Guy Lavigueur Révision et corrections : Micheline Brodeur Traduction : Paul Globus ©Guy Lavigueur 2008, Tous droits réservés Dépôt légal : Bibliothèque et Archives nationales du Québec Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada Lavigueur, Guy, 1955 – ISBN No: 978-2-9810443-0-3 Classement et répertoriage Achevé d’imprimer à Saint-Hyacinthe sur les presses de l’Imprimerie Maska Inc. en mars 2008

48



ImprimĂŠ au Canada/Printed in Canada


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.