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édito I n t e r c e lt i s m e , u n e c on s t r u c t i on e u r op é e n n e L e F e s t i va l i n t e r c e lt i q u e d e L o r i e n t c é l è b r e c e t t e a n n é e s e s q u a r a n t e a n s . On di t q u ’ u n de se s plu s c é l è br e s r e sp on s a bl e s , volon t ie rs p r o v o c at e u r , s e s e r a i t e x c l a m é u n j o u r : « L’ i n t e r c e lt i s m e , c ’ e s t m o i ! » . P o u r b e a u c o u p, l e r ê v e i n t e r c e lt i q u e s e m at é r i a l i s e e n e f f e t surtout lors des grandes manifestations musicales et culturelles des peuples atlantiques, de Lorient à Ortigueira, en passant par Glasgow ou Killarney. D’autres trouveront dans l’histoire des Celtes ou, plus près de nous, dans le renouveau du celtisme, matière à nourrir cette notion, quitte à s’en distancier. Au sens très large, l’interceltisme est aussi une façon de se reconnaître de près ou de loin dans les valeurs que véhiculent les cultures contemporaines des pays celtiques. Celles-ci évoluent cependant. Existe-til des points communs entre l’interceltisme d’un Polig Monjarret, porté par sa puissante “internationale” des cornemuses et les relations que tissent aujourd’hui des milliers de jeunes Bretons avec leurs “cousins celtes”, dans le travail, le sport, et leur manière de s’insérer dans une société globalisée ? Sont-ils forcément reliés par les éléments appartenant à l’héritage celtique, comme la langue ou encore les musiques traditionnelles ? Existe-t-il une forme d’interceltisme, basée sur des éléments plus contemporains, comme la manière d’envisager le rapport aux pouvoirs, à l’équilibre entre ruralité et urbanité, entre tradition et modernité, ou la construction européenne ? S’agit-il surtout de la volonté de quelques-uns de s’inspirer d’exemples puisés chez leurs voisins, pour parvenir à certains buts qui, au final, ne regardent qu’eux ? Ou au contraire, existe-t-il de véritables aspirations à se construire ensemble, à mêler une partie de ce que nous sommes, de nos histoires propres ? L’année du Celte Autant de questions auxquelles cette commémoration nous invite justement à réfléchir. Où en est-on finalement de ce qu’Olga Novo, dans ce numéro d’ArMen, qualifie joliment “d’aspiration à rêver la beauté de ce qui nous est commun”. Le Festival de Lorient a eu la bonne idée d’organiser le premier colloque international du genre, à l’automne prochain sur la question de l’interceltisme, en partenariat avec l’université de Bretagne sud et avec la participation scientifique de l’équipe d’ArMen. Il s’agira de faire le point sur le “celtisme et l’interceltisme aujourd’hui”. Parmi les thèmes abordés : la construction de l’idée celtique, les sentiments d’appartenance, les diasporas celtiques et les réseaux internationaux. Nous avons décidé d’accompagner cet événement en publiant une série d’interviews de personnalités du monde celtique et d’articles sur ce thème. Notre première contributrice évoque les relations interceltiques et le concept d’identité celtique contemporaine du point de vue galicien. On la retrouvera prochainement à travers d’autres articles sur la littérature et la langue de son pays. Dans ce numéro, nous avons également mené une enquête sur les relations entre la Bretagne et le pays de Galles, en nous intéressant aux jumelages qui relient leurs communes. En trois décennies, comme avec l’Irlande et plus récemment la Galice, des liens profonds et durables ont été tissés par ce biais avec la Bretagne. À tel point qu’on peut se demander s’il n’y a pas là l’une des formes les plus abouties de l’interceltisme contemporain. On peut d’ailleurs faire un parallèle entre les aspirations de millions d’Européens à se doter d’une maison commune, à dépasser leurs différences, à se révéler au contact de l’autre, à promouvoir des valeurs de paix et de libertés et les idéaux interceltiques. Comme toutes les grandes utopies, ils évoluent et se réinventent sans cesse, sans pour autant disparaître. C’est parce qu’ils ne seront jamais l’affaire d’un seul festival, d’un mouvement politique ou encore moins d’un homme que nous vous proposons d’y réfléchir ensemble à travers cette série d’articles et le colloque à venir.

Yann Rivallain, rédacteur-en-chef


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