Brouillon

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A1 Connais-tu l’histoire du vent Qui souffle joyeusement Qui lorsqu’il est content Souffle souffle sur les nuages Qui se promènent tranquillement Souffle, souffle sur les nuages Jusqu’à les faire se cogner Jusqu’à les faire se fâcher Jusqu’à les faire pleurer Souffle souffle sur les nuages Et dans un grand éclat de rire Part vite s’endormir

***

Une étoile qui s’ennuyait se mit à briller Un lutin un peu chagrin répara son passepoil Une caresse lumineuse Un baiser de couturier La joie et l’amour étaient nés


*** A11 Dans la rue des quatre chiffons La maison est en carton L’escalier est en papier Si vous voulez y monter Vous vous casserez Le bout du nez Le facteur y est monté Il s’est cassé le bout du nez

En allant chercher du pain Je rencontre trois lapins Je les mets dans mon panier Ils se mettent à grignoter Je les mets dans mon placard Ils me mangent tout mon lard Je les mets au coin du feu Ils s’endorment tous heureux

L’araignée Gypsie Monte à la gouttière Tiens voilà la pluie Gypsie tombe par terre Mais le soleil a chassé la pluie

L’araignée Gypsie Tisse une grande toile Les goûtes de pluie Font comme des étoiles


Gypsie s’endort au creux de sa toile.

Il était une fois Une marchande de foie Qui vendait du foie Dans la ville de Foix Elle se dit ma foi C’est la dernière fois Que je vends du foie Dans la ville de Foix

Quelle heure est -il ? Madame Persil Huit heures et quart ! Madame Placard En êtes-vous sûre ? Madame Chaussure Assurément Madame Piment

Un deux trois Je m’en vais au bois Quatre cinq six Cueillir des cerises Sept huit neuf Dans mon panier neuf Dix onze douze


Elles seront toutes rouges


A12

Le temps a laissé son manteau De vent, de froidure et de pluie Et s’est vêtu de broderie, De soleil luisant, clair et beau. Il n’y a bête ni oiseau Qu’en son jargon ne chante ou crie : « Le temps a laissé son manteau De vent de froidure et de pluie » Rivière, fontaine et ruisseau Portent, en livrée jolie, Gouttes d’argent, d’orfèvrerie Chacun s’habille de nouveau Le temps a laissé son manteau De vent, de froidure et de pluie Et s’est vêtu de broderie De soleil luisant, clair et beau

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Un pissenlit, qui se marie Fait une fleur avec son coeur Églantine mousseline pour danser dans les prés Chardon bleu, tu piques tous ceux Qui te cueillent sous les feuilles Où tu sais te cacher loin des yeux de l’été Muguet, hochet, coquet jouet, du mois de mai


Coquelicot, je t’aime trop Pour te cueillir sans un soupir Pâquerette, tu me guettes Dans le vent du printemps Bouton d’or, tu danses et tu dors Dans les touffes qui t’étouffent Sur le bord du sentier Dans le creux des fossés Bleuet fluet, tu fais le guet Le long des haies

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Savez vous messieurs et mesdames Ce qu’il faut dans une maison Quatre murs une chaude flamme De la joie en toute saison Et pour égayer les âmes Des fillettes et des garçons Des chansons des chansons

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Si vous arrivez au lac des flocons Vous s'rez les premiers Au pays gelé Allons passe passe passe BIS Allons passe donc BIS Si vous traversez la porte de l'hiver Vous s'rez les premiers Au pays tout vert Allons passe passe passe Allons passe donc Si vous continuez sur l'pont des couleurs Vous s'rez les premiers Au jardin en fleur Allons passe passe passe Allons passe donc Si vous voyagez sur l'vent des pensées Vous s'rez les premiers au pays doré allons passe passe passe BIS allons passe donc BIS Si vous arrivez au lac des flocons vous s'rez les premiers au pays gelé allons passe passe passe allons passe donc allons passe passe passe allons vite dormons


___________________________________________________ A2 L'ARAIGNÉE GYPSIE L'araignée Gypsie monte à la gouttière, Tiens, voilà la pluie, Gypsie tombe par terre, Mais le soleil, a chassé la pluie. L'araignée Gypsie a tissé sa toile, Les gouttes de pluie brillent comme des étoiles, Gypsie s'endort, elle est bien fatiguée. Soudain sur sa toile, se pose une mouche, Gypsie se réveille, l'eau monte à sa bouche, Elle met la table et trotte sur sa toile.

Madame la mouche, vous êtes imprudente, Je vais vous croquer, petite insolente, Mais dans le ciel, s'envole la mouche.

L'araignée Gypsie est toute chagrine, Son repas s'envole, elle a bonne mine, Elle se recouche, après tout, qui dort dîne.


A3

Arlequin tient boutique

Il vend des bouts de réglisse Meilleurs que votre bâton, Des bonshommes en pain d’épice Moins bavards que vous, dit-on. Il a des pralines grosses Bien plus grosses que le poing, Plus grosses que les deux bosses Qui sont dans votre pourpoint Il a de belles oranges Pour les bons petits enfants Et de si beaux portraits d’anges Qu’on dirait qu’ils sont vivants.

L'escargot déménage !

Le matin l’escargot


Las de traîner son logis S’en va chercher un maçon Pour construire une maison. Il va trouver le pivert L’atelier n’est pas ouvert. Il frappe chez le lièvre, Le lièvre a de la fièvre. Il sonne chez l’écureuil, L’écureuil a mal à l’œil. Il s’en va chez le serpent, Le serpent a mal aux dents. Tant pis dit l’escargot gris Je garderai mon logis !


A4




CHACHAT A5

Il était une fois un petit chaton que son papa et sa maman appelèrent Chachat. Il vivait dans une maison toute bleue, comme la nuit. Chachat adorait sa maison, dorloté par son papa et par sa maman. Il aimait tellement sa maison qu'il aurait voulu ne jamais en sortir. D'ailleurs, il n'en sortait jamais. Il avait peur. Oh, il savait bien qu'un jour, il serait obligé d'aller dehors mais lorsqu'on lui en parlait, il miaulait si fort en se cachant sous son oreiller que ses parents avaient décidé d'attendre encore un peu. Il faut dire que Chachat avait son caractère et ses habitudes ! Voilà qu'un matin, alors qu'il avait décidé de jouer avec ses clochettes, une chose étonnante arriva. D'habitude, il lui suffisait d'écouter ce que racontaient les clochettes pour les comprendre. Tadi tadi tada ! Chachat adorait ce jeu. Mais ce matin-là, elles chantèrent : Tadi tadi tada pouak ! Oh ! Incroyable ! Quelqu'un avait placé une nouvelle clochette, juste là ! Elle était jaune comme le soleil et elle ne sonnait pas comme les autres. Ce qui détruisait la douce harmonie des clochettes. Chachat n'en croyait pas ses oreilles. Tadi tadi tada pouak ? Ah non ! Décidément ce n'était pas possible. Qui avait osé faire cela ! Ce ne pouvait pas être papa, ni même maman. Mais alors qui ? Chachat commença à chercher, quand, soudain, il vit une petite souris cachée la ! Dans le coin ! Il décida de l'attraper pour lui demander des comptes. Mais la souris était la plus rapide.


Pfiou, elle avait disparu par un trou et Chachat, sans réfléchir, la suivit. Et pfiou ! Il se retrouva dehors. Surpris, il regarda autour de lui. Plus de souris, juste beaucoup mais vraiment beaucoup d'herbes et de belles fleurs. Mmmm ! Comme ça sentait bon ! En regardant bien, il s'aperçut que d'autres chatons étaient la, tout autour de lui, aussi apeurés que lui de se retrouver là. Chachat prit son courage à deux pattes et s'approcha. C'est ainsi qu'il trouva des copains. Quelle joie ! Il n'était plus tout seul à jouer ! et pour jouer, ils jouèrent. Ils sautèrent par dessus les fleurs, coururent après les papillons, grimpèrent aux arbres. Bref, toute la journée passa dans les jeux avec ses amis. Le soir, lorsqu'il rentra chez lui, il se jeta dans les pattes de sa maman et son papa avec fierté et leur raconté ses découvertes. Tout excité, il sautillait partout. Quand il retrouva ses petites clochettes Tadi tadi tada pouak ! Il déplaça juste d'un cran la nouvelle petite jaune. Voilà qui créait une autre harmonie : Tadi pouak tadi tada ! Ou alors : Pouak Tadi tadi tada ! Ou encore : Tadi tadi pouak tada ! Cela lui faisait moins mal aux oreilles. Alors, tranquillement, il alla se coucher sur son petit coussin, pour rêver au lendemain.


Peuplier et Petite Mousse A6

Quand on regarde une peuplier, on remarque tout de suite sa forme élancée, toute tendue vers le ciel, comme un flambeau de joie, surtout quand le vent fait murmurer ses feuilles au printemps et en été. Et pourtant, à l’origine le peuplier était un arbre comme les autres, ni plus droit, ni plus grand. Il se perdait dans la foule des autres arbres dont rien ne le distinguait. Ses branches allaient un peu dans tous les sens au gré de leur fantaisie et cherchant surtout la fraîcheur. Car le peuplier affectionne le bord des rivières et des ruisseaux. Un jour, il y a très, très longtemps, le premier peuplier que Dieu mit sur la terre s’éveilla et fut tout étonné de voir à son pied une sorte de tapis vert, d’une douceur de velours ; il tendit la branche qui se trouvait la plus proche du sol et sentit, en effet, combien cela était doux. Et tout à coup, il entendit un petit rire cascadant et ces mots : « Arrête de me caresser ainsi, tu me chatouilles. Bonjour, je m’appelle Mousse. Cela ne t’ennuie pas que je m’installe près de toi ? Tu sais, je ne te gênerai pas et je garderai toujours de la rosée, pour que tu puisses te désaltérer et devenir grand ». Surpris, Peuplier regarda cette petite herbe minuscule, sa couleur lui plut, et puis elle était si jolie et paraissait si fragile que son cœur se sentit tout gonflé de tendresse. -- J’accepte, lui dit-il, nous serons amis ; tu me donneras la fraîcheur qui m’est nécessaire et je t’abriterai des rayons du soleil, car ils te brûleraient. » Ainsi naquit entre Mousse et Peuplier une douce tendresse. Peuplier était heureux. Quand il était fatigué par les cris et les chants des oiseaux, il secouait ses branches : tout le monde s’envolait et il pouvait enfin, dans le silence, entendre la voix de petite Mousse. Elle était très curieuse et comme elle était petite, elle ne voyait pas ce qui se passait audessus d’elle, alors elle posait toujours des tas de questions qui amusaient Peuplier, et auxquelles il répondait toujours avec bonne grâce .


-- Dis-moi Peuplier, comment sont les alentours ? Y a-t-il des fleurs ? Comment sontelles ? Est-ce que les oiseaux ont fait beaucoup de nids cette année ? Et le ciel, comment est-il ? Le ciel surtout l’intéressait beaucoup. Elle entendait souvent les oiseaux quand ils venaient boire au bord de la rivière, dire : -- Quel beau ciel, aujourd’hui , pas un nuage ; il fera beau, nous pouvons entreprendre notre voyage. » Ou bien : -- Les nuages arrivent, il serait temps de penser à nous installer et à faire des provisions pour le mauvais temps ! Elle savait qu’il avait de multiples aspects et que de lui dépendait la joie ou la tristesse de chacun. Elle aurait tant voulu le voir, mais elle avait beau s’étirer, se mettre sur la pointe de ses petites racines, elle ne voyait toujours rien. Parfois son désir était si grand qu’elle en pleurait. Peuplier, qui l’aimait beaucoup, voulut lui faire plaisir et un jour il pensa : « Je vais relever mes branches et ainsi peut-être pourra-elle en voir un petit bout. » Quand au matin la petite Mousse s’éveilla, elle vit qu’il faisait plus clair autour d’elle. Comme toujours, elle leva les yeux vers son cher Peuplier pour lui demander d’où venait cette clarté. Alors elle vit, entre les branches, très loin tout là-haut, un morceau de voile bleu, d’un bleu si doux qu’elle en resta pétrifiée d’étonnement ; jamais elle n’avait rien vu d’aussi beau ! Mais tout à coup, cela disparut car Peuplier, fatigué, avait laissé retomber ses branches. -- Oh non, je t’en prie, relève-les, laisse-moi voir le ciel, il est si beau, lui dit-elle. Mais Peuplier était trop fatigué, il ne pouvait pas les relever à nouveau ; et comme la petite Mousse vit qu’il faisait des efforts, elle s’écria : -- Cela ne fait rien, repose-toi. Maintenant je sais ce qu’est le ciel, je suis si heureuse et c’est à toi que je le dois, merci ! » Dans leur joie partagée chacun se sentit plus près l’un de l’autre. Et ainsi chaque jour, Peuplier, pendant un court instant, relevait ses branches pour permettre à petite


Mousse d’apercevoir un coin de ciel.

Au bout d’un certain temps de cet exercice

quotidien, Peuplier se sentit assez fort pour garder ses branches relevées pendant tout un jour, et il dit à petite Mousse : -- Viens, grimpe après mon tronc, monte jusqu’en haut de la plus haute branche et tu pourras enfin te rassasier de ciel, ma petite curieuse. » Alors petite Mousse essaya, elle s’étira, sortit de terre, et s’agrippant au tronc rassurant, elle commença à grimper, mais bientôt elle se sentit fatiguée. -- Je ne peux pas Peuplier, je ne peux pas. Je n’arriverai jamais. Tant pis, laissemoi ici, je suis trop faible pour monter si haut ! -- Si, tu peux, il faut continuer. Tu dois monter et surtout te dépêcher car je crains de ne pas être assez fort pour garder longtemps mes branches ainsi. Allons courage, le ciel est si beau ! Viens ma douce, viens ma mie ! Alors les oiseaux, émus par tant d’amour et de courage, lui dirent : -- Mais oui, Peuplier a raison, continue encore un peu ! » et de leurs ailes, ils l’aidèrent à monter. Ainsi poussée, aidée, encouragée, la petite Mousse arriva à la cime du Peuplier. Pendant un court instant, elle ferma les yeux, éblouie, perdu dans ce bleu. Puis elle les ouvrit, laissant la joie pénétrer dans son cœur, par ses yeux brillants de larmes. -- Oh que c’est beau, que c’est beau Peuplier, c’est si beau ! » Et Peuplier, malgré sa fatigue, lui dit doucement : -- Je sais petite Mousse, je le connais depuis si longtemps ; mais aujourd’hui il me paraît encore plus beau. On dirait qu’il a mis sa plus belle robe pour fêter ta venue. » Alors tous deux entendirent une voix tout au fond de leur cœur qui disait : -- Non, rien n’est changé, seulement parce que vous vous aimez, et que chacun de vous a essayé de donner à l’autre le bonheur sans regarder à sa peine, il vous a été donné de tout voir sous son plus bel aspect.


Vous verrez toujours et partout la beauté, la bonté et la douceur, parce que toutes ces qualités sont en vous. Et pour vous récompenser, toi Peuplier, tu resteras toujours ainsi, les branches dressées vers le ciel en un geste d’amour. Et toi, petite Mousse, tu resteras toujours le tapis doux et frais pour son corps assoiffé de fraîcheur. Ainsi tous deux, vous serez le lien d’Amour entre le ciel et la terre. En été, tu auras des feuilles pour qu’elle puisse grimper tout au long de ton corps sans que les rayons du soleil la touchent et tu la protègeras de leur trop forte ardeur. En hiver, elle sera à ton pied ; alors tes feuilles tomberont sur elle pour la protéger du froid, car tu es le plus fort. Elle a besoin de toi comme tu as besoin d’elle. » Et c’est depuis ce temps-là que les peupliers ont des branches qui se dressent toutes vers le ciel en un geste d’offrande. Eunice de Jésus (conte de l’Alouette n°2) A7 LE MANTEAU DE SAINT-MARTIN Une nuit d'hiver, alors qu'il faisait une ronde, un soldat de la garde croise un mendiant. N'ayant plus de solde à offrir car il avait déjà tout distribué, Il prend son manteau et, d'un coup d'épée, le partage avec cet homme transi de froid. La nuit suivante, il rêve du Christ vêtu du manteau offert. Il décide à ce moment-là de servir la paix plutôt que la guerre. Il ne veut pas entrer dans les conflits et même, sur le champ de batailles, il se conduit comme un bouclier en laissant ses armes de côté. Il arrive des miracles : l'ennemi réclame la paix ; les brigands le laissent partir ; le Diable le fuit. Les évêques lui proposent de vivre dans de riches palais. Il refuse et continue d'habiter sa cabane en bois. Il sait parler aux anges et aux saints. À sa mort, quand son corps fut tranporté entre Tours et Poitiers, des fleurs ont écloses tout le long du chemin. En souvenir, on nomma le 11 novembre « été de la Saint-Martin ». Sa cape fut conservée dans une habitation : la « capelle » devint « chapelle ».


Aujourd'hui on fête la saint Martin avec des lanternes : c'est une fête des Lumières.


SAINT-GEORGES ET LE DRAGON Un jour, Georges arriva dans une ville de la Libye nommée Silène. Or, dans un étang voisin de la ville habitait un dragon effroyable. Personne n'avait pu remporter la victoire sur cette bête. Parfois, il s'approchait des murs et empoisonnait de son souffle tous ceux qui passaient. Pour apaiser la fureur de ce monstre et l'empêcher d'anéantir la ville entière, les habitants lui offraient, chaque jour, deux brebis. Quand il n'y eut plus une seule brebis à donner, on décida de tirer au sort parmi les jeunes gens de la ville. Celui ou celle qui était désigné par le sort, était livré en pâture au dragon. Et déjà, presque tous les jeunes gens de la ville avaient été dévorés lorsque, le jour de l'arrivée de saint Georges, le sort désigna la fille unique du roi comme victime. Vêtue d'une robe de mariée, attachée à un rocher aux marches de la ville, la princesse attendait donc la mort. Georges pose d'abord une condition avant d'en finir avec le monstre : il ne tuera le dragon que si le peuple se convertissait au christianisme. On baptisa alors quinze mille habitants sur le champ. Georges s'approcha de l'étang. Le monstre souleva sa tête au-dessus de l'eau. Le courageux soldat, monté sur son cheval et armé du signe de la croix, attaqua bravement le dragon qui s'avançait vers lui. Il brandit haut sa lance, fit au monstre une blessure qui le renversa sur le sol. Alors, le Saint dit à la princesse : "Mon enfant, n'aie pas peur et lace ta ceinture autour du cou du monstre!" C'est ce que fit la princesse. Le dragon se mit à la suivre comme un petit chien tenu en laisse. La bête fut ensuite conduite par la princesse jusqu'à la ville où elle fut décapitée.



B1

Le temps a laissé son manteau De vent, de froidure et de pluie Et s’est vêtu de broderie, De soleil luisant, clair et beau. Il n’y a bête ni oiseau Qu’en son jargon ne chante ou crie : « Le temps a laissé son manteau De vent de froidure et de pluie » Rivière, fontaine et ruisseau Portent, en livrée jolie, Gouttes d’argent, d’orfèvrerie Chacun s’habille de nouveau Le temps a laissé son manteau De vent, de froidure et de pluie Et s’est vêtu de broderie De soleil luisant, clair et beau

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Un pissenlit, qui se marie Fait une fleur avec son coeur Églantine mousseline pour danser dans les prés Chardon bleu, tu piques tous ceux Qui te cueillent sous les feuilles Où tu sais te cacher loin des yeux de l’été


Muguet, hochet, coquet jouet, du mois de mai Coquelicot, je t’aime trop Pour te cueillir sans un soupir Pâquerette, tu me guettes Dans le vent du printemps Bouton d’or, tu danses et tu dors Dans les touffes qui t’étouffent Sur le bord du sentier Dans le creux des fossés Bleuet fluet, tu fais le guet Le long des haies

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Savez vous messieurs et mesdames Ce qu’il faut dans une maison Quatre murs une chaude flamme De la joie en toute saison Et pour égayer les âmes Des fillettes et des garçons Des chansons des chansons

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Si vous arrivez au lac des flocons Vous s'rez les premiers Au pays gelé Allons passe passe passe BIS Allons passe donc BIS Si vous traversez la porte de l'hiver Vous s'rez les premiers Au pays tout vert Allons passe passe passe Allons passe donc Si vous continuez sur l'pont des couleurs Vous s'rez les premiers Au jardin en fleur Allons passe passe passe Allons passe donc Si vous voyagez sur l'vent des pensées Vous s'rez les premiers Au pays doré Allons passe passe passe BIS Allons passe donc BIS Si vous arrivez au lac des flocons Vous s'rez les premiers Au pays gelé Allons passe passe passe Allons passe donc Allons passe passe passe Allons vite dormons


___________________________________________________ B5


La pêche miraculeuse d’Ysengrin 5ème aventure du Roman de Renart

C’était un peu avant Noël. Partout, on salait le cochon, on torchonnait les jambons, on fumait les saucisses et on préparait les boudins. Ysengrin lui aussi voulait bien se mêler aux joies des préparatifs. Il alla donc trouver Renart. –

Dites-moi, beau neveu, où donc aviez-vous trouvé ces anguilles délicieuses que vous m’aviez fait goûter l’autre jour, et dont le fumet est encore présent à mon souvenir ?

Je les avais pêchées moi-même dans un étang tout près d’ici.

Vraiment ! Est-il indiscret de vous demander le chemin ?

Mais pas le moins du monde. C’est une joie de vous faire profiter de mes bons coins !

C’est trop gentil à vous Renart !

Le corbeau Tiercelin qui passait par là, n’en revenait pas de tant de gentillesses et se demandait lequel était en train de duper l’autre. –

Partons donc, mon cher oncle, et si vous suivez bien mes instructions, je peux vous promettre une pêche miraculeuse.

La nuit était claire et glaciale, et l’étang se trouvait fortement gelé. On n’y voyait qu’un trou que les paysans entretenaient soigneusement et près duquel ils déposaient le seau qui leur servait à puiser de l’eau. –

Voici l’endroit et voici l’instrument, fit Renart. Quand je veux du poisson, c’est là que je viens. Je me fais attacher le seau à la queue et j’attends patiemment. Dès que le seau me semble plein, je le tire hors de l’eau et j’apporte ma pêche à Ermeline qui en fait ce que vous savez.

Ermeline est une cuisinière de tout premier ordre, remarqua Ysengrin avec courtoisie.

Giremonde ne lui est pas inférieure, fit Renart en retournant la politesse. Je n’oublie pas cette petite rate qu’elle prépara l’autre jour à mon intention. Là, mon oncle, vous voilà installé… le seau solidement attaché plonge bien dans le trou, il ne vous faut qu’un peu de patience. Quant à moi, je reste dans les parages à guetter les lapins de la garenne, qui sortent quelques fois au clair de lune pour se dégourdir les jambes… tout prêt naturellement, à vous donner un coup de main si besoin en était.

Bonne chasse, Renart !

Bonne pêche, Ysengrin !

Tapi sous un buisson, la tête entre les pieds, Renart ne quitte pas de l’œil son compère qui, posé sur le bord du trou, la queue plongeant en partie dans l’eau, attend le poisson. Or, comme le froid est extrême, l’eau ne tarde pas à se figer, puis à se transformer en glace qui serre fortement la queue d’Ysengrin. Se sentant tiraillé,


il croit que le seau s’est alourdi parce que le poisson y arrive en quantité et il se réjouit. –

Tant de poissons en si peu de temps, songe-t-il, Renart avait raison de m’annoncer une pêche miraculeuse !

Toutefois, incommodé par ce qu’il croit être le poids du seau, il se décide à regagner le bord de l’étang. Mais la glace a pris de la consistance, le trou s’est fermé, serrant la queue d’Ysengrin, qui ne peut plus bouger. Il s’agite, se démène, tire en avant, puis à droite, puis à gauche… En vain, la glace ne cède pas. A la fin, il se décide à appeler Renart. –

Je suis las et transi de froid, dit-il, je voudrais bien sortir, mais il y a tant de poisson dans le seau que je ne peux le soulever. Venez à mon aide, beau neveu !

– Renart, qui faisait semblant de dormir, relève la tête, et feint l’étonnement : –

Quoi ! Mon oncle, vous êtes encore là ! Le jour va se lever, hâtez-vous de fuir !

Mais je te dis que le seau est trop lourd et que je ne peux pas bouger.

Ah ! fait Renart sur un ton de gronderie paternelle, vous avez voulu trop prendre… Le sage a bien raison de dire : « Qui trop désire, tout perd. »

La nuit passe, l’aube paraît, le soleil se lève. La terre est toute blanche de neige et le froid redouble. Messire Constant des Granges, un honnête fermier dont le manoir est proche de l’étang, se lève et inspecte l’horizon pour connaître le temps qu’il fera. Soudain, il aperçoit le loup. Il sonne du cor, il appelle les chasseurs et les chiens, prend ses armes et fait seller son cheval. Renart, sans attendre la fin de l’aventure, file prudemment sous bois, laissant seul Ysengrin. Malgré ses efforts désespérés, celui-ci n’est pas parvenu à se dégager. Un chasseur et ses chiens attaquent vigoureusement le loup, qui se défend, mordant les uns, déchirant les autres de ses puissantes griffes, tenant le reste de la meute à distance par ses hurlements effroyables. Messire des Granges arrive à la rescousse et, de sa puissante épée, croit tuer le prisonnier. Mais le coup tombe à côté et c’est seulement la queue qu’il coupe. Voici donc Ysengrin délivré. Sans s’attarder à pleurer le bout de sa queue, il s’élance. Les chiens s’écartent pour lui laisser le passage, prêts à le poursuivre tout aussitôt. Naturellement, le loup ne les attend pas et il disparaît dans les bois avant que bêtes et gens ne soient revenus de leur surprise. Une fois sauvé, le pauvre Ysengrin gémit sur son infortune et maudit Renart. –

Hélas ! Que pensera de moi Giremonde ma digne épouse ?... Et quelle figure ferai-je désormais à la Cour ?...Ah ! Renart, si jamais l’occasion se trouve de te faire réparer tes fautes !....




B51 SILENCE C’est l’histoire d’un petit garçon nommé Silence. C’est ainsi qu’on l’appelait tout le temps, parce qu’il avait peur de beaucoup de choses, et plus particulièrement des bruits. Il avait peur du tonnerre, des avions, des motos… il disait que lorsqu’il entendait cela, il pensait que tout allait s’écrouler, qu’il allait se passer quelque chose de dangereux. Il ne savait pas pourquoi, c’était comme ça ! Un jour où il devait encore se boucher les oreilles pour ne pas mourir de peur, il vit un lutin perché sur un coussin : « Bonjour, je suis le lutin des sons. Je suis descendu aujourd’hui car je t’entends beaucoup pleurer. Moi, je fais des sons pour vous amuser, pour vous faire rêver, pour vous faire imaginer lorsque vous les entendez ! Les sons sont des compagnons de vie que vous pouvez reconnaître et nommer ! A chaque moment de la journée, il y a un son. Comment t'appelles-tu ? – Silence, répondit Silence, un peu étonné quand même. – Eh bien , mon cher Silence, sais-tu que même le silence a des sons ? Même si on ne les entend presque pas ? – Excusez-moi, répondit Silence, mais je trouve que vos bruits sont nettement trop forts. Ils grondent, ils pètent, ils claquent et moi, cela me fait très peur ! Le lutin réfléchit un instant. Il lui proposa un casque magique hermétique à la musique. Silence en fut tout ému et remercia chaleureusement le lutin. Il coiffa tout de suite le casque : magnifique ! Plus aucun son!Mais au bout de trois jours Silence s’ennuyait. Il n’entendait plus les mots doux de maman, ni le rire de papa et encore moins les petits bruits rassurants de doudou… Alors il se mit à crier, à pleurer, à taper du pied. Il se sentait si seul. Soudain, le lutin apparut. Oh ! Qu’il avait l’air fâché ! Il enleva le casque de Silence : « Mais que se passe-t-il ? Tu étais si content et voilà que tu pleures et cries encore plus fort qu’avant !


– C'est parce que comme je n'entends plus les bruits rassurants, j'ai encore plus peur qu'avant. – Bon, viens avec moi : je veux te montrer la Fabrique des Sons. Et ils s’envolèrent dans un endroit que Silence ne connaissait pas. C'était bizarre : on voyait le monde de très haut et on avait suspendu toute une collection d'instruments et d'outils divers et variés De gros nuages gris avançaient vers la maison de Silence. Alors, le lutin lui donna un objet étrange et lui ordonna de le remuer bien fort pour prévenir que la pluie allait arriver. Dans les mains de Silence, le tonnerre retentit ! Ensuite, ils virent un avion passer dans les nuages. Silence reçut un autre objet : « Vite ! Tape dessus pour que les enfants puissent regarder le ciel et rêver de voyages ! » Des mains de Silence s'échappa le vrombissement de l'avion. Et leur visite continua. Même si Silence n’était pas très rassuré au milieu de tous ces bruits, il jouait patiemment de chaque instrument du lutin. La nuit finit par descendre sur la terre. Pour voir clair, on avait allumé la lune et les étoiles. – Bon, voici le dernier, dit le lutin à Silence, avec un clin d’œil. Gratte-moi ceci. » L'hululement de la chouette en sortit, qui lui faisait tellement plaisir, quand il était dans son lit. Ensuite, ils s'amusèrent avec les sons de la terre : à les faire rebondir pour qu’ils partent loin, à les écraser pour qu’ils soient plus doux, à les chatouiller pour qu’ils soient plus joyeux. De retour chez lui, Silence s’endormit la tête pleine de sons. Et le lendemain, il n’avait plus peur de rien. Aux roulements du tonnerre, il se mettait au tambour pour l'accompagner en fanfare. Au son de l’avion, il ouvrait ses bras pour s’envoler avec lui. Et au son de la moto, il s'e=inventait des courses-poursuites modèles réduits. Silence ne sut jamais si le lutin était vraiment venu ou si ce n’était qu’un rêve. Pourtant, à chaque fois que le vent soufflait, il lui semblait entendre sa voix. Ce qui est sûr en tous cas, c'est qu'il décida d'écouter vraiment les sons au lieu de simplement les entendre et même d'en faire son métier : musicien.


B6 Conte Amérindien Lorsque le vent du nord se mit à souffler vers le sud, il chassa devant lui le vieil homme Hiver qui s’arrêta sur les bords du grand lac. Alors le vieil homme Hiver enroula sa longue barbe dans la grande forêt et construisit patiemment sa demeure. Le vent lui, continuait à faire rage, sifflant et hurlant. Brisant branches et feuilles, arrachant pousses et nids. Le vent du nord est en effet cruel. L’Hiver construisit un logis bien bizarre pour se protéger du vent. Une sorte d'igloo aux murs de glace et au sol un tapis de neige. C’était de la neige qu’il se mit à faire tomber car il savait qu’elle protègerait les graines confiées au sol. Il vécut ainsi, très occupé, pendant plusieurs lunes. Depuis ce jour, le paysage avait bien changé : sources et rivières devenaient glace, les animaux avaient disparu et seul les loups hurlaient à la lune. Une fois l'igloo terminé, il n’eut plus rien à faire et commença peu à peu à s’ennuyer. Un soir qu’il regardait au sud, il vit venir vers lui une jeune fille d’une ravissante beauté. Chose étrange, au lieu de se tasser et de craquer, la neige fondait sous ses pieds. Tout en elle respirait la joie, la douceur et la bonté. Ses yeux étaient des étoiles, ses cheveux noirs comme des plumes de corbeaux et ses joues avaient la couleur de l’églantine. Et quand elle respirait, l’air se réchauffait. Le vieil homme Hiver l’invita en sa demeure et ils discutèrent ainsi toute la nuit. L’Hiver charmé ne s’aperçut pas que l’air se réchauffait. Comme il n’était pas habitué à cette chaleur, il finit par s’endormir. La jeune fille alors fit venir le soleil, les oiseaux et l’eau, puis elle murmura aux graines : «Il fait moins froid, vous pouvez sortir » On vit alors de jeunes pousses se montrer timidement et sourire au soleil. Enfin, elle appela le vent du sud et lui demanda de raccompagner le vieil homme Hiver dans les grandes plaines blanches. En un nuage, le vieil homme fut parti et bientôt la forêt se remplit de lumière, de chansons et de parfums.


B7 L’Œil de Sainte Lucie

En vous promenant sur la plage, vous avez peut-être ramassé une sorte de coquillage bien particulière. C'est une spirale blanche et brune, plate qui tient au bout du doigt. On dirait un disque, mais il s'agit d'une porte pour certains coquillages. Figurez-vous qu'il existe une histoire et que la mer dépose ces trésors dans le sable pour qu'on garde le souvenir d'une jeune fille nommée Lucie. Il y a bien longtemps, presque deux mille ans, vivait à Syracuse, au bord de la mer, deux femmes : la mère et la fille. Elles se tenaient à l'écart de la méchanceté du monde et vivaient simplement, à leur mesure, en faisant de bonnes actions et en distribuant l'aumône aux pauvres car leur famille était riche et bien établie. Lucie, la fille, priait beaucoup la Vierge Marie. Elle avait fait le vœu secret de ne jamais se marier et de sacrifier toute sa vie au service de Dieu. Un jour, sa mère tomba malade. Son mal était incurable et tous s'attendaient à la voir mourir bientôt. Lucie redoubla de prières, invoqua la Vierge Marie et s'en remit à Sainte Agathe, sainte patronne de Catane, la ville construite aux pieds du volcan Etna. « Vierge Agathe, accordez la santé à ma mère. Si elle ne meurt pas, alors je consacrerai toute ma vie à la prière, je ne me marierai jamais et je chanterai les louanges du Seigneur jusqu'à ma mort. Sainte Agathe, accordez-moi ce miracle. – Lucie, Vierge Lucie, ma sœur, pourquoi viens-tu me demander ce que tu pourras bientôt accorder toi-même à ta mère ? – Sainte Agathe, gardienne de la ville de Catane, vous avez fait tant de miracles : la fièvre de ma mère peut être apaisée comme vous avez apaisé le feu de l'Etna. – Lucie, Vierge Lucie, tu seras bientôt gardienne de la ville de


Syracuse et tu feras des miracles toi aussi. – Pour la santé de ma maman chérie, j'offrirai mes yeux. » Le lendemain, la mère de Lucie fut guérie miraculeusement. Comme promis, la jeune fille s'arracha les yeux et les jeta à la mer, pour garder toujours son esprit tourné vers Dieu et ne pas être tentée par le monde. La Vierge Marie, touchée par la pureté et la grandeur de ce geste, lui redonna des yeux plus beaux encore et accorda à la Nature le bénéfice des yeux de Sainte Lucie. C'est ainsi que dans les mers, c'est le Turbo Rugueux, un coquillage biscornu qui les reçut. Le pêcheur qui en remonte à la surface aura de la chance toute sa vie. Sur la terre, autour de la mer Méditerranée, les yeux de Sainte-Lucie poussèrent comme des graines et donnèrent un bel arbre nommé de Bois de Sainte-Lucie. Ses fleurs blanches ont des pétales en forme de cœur ; ses baies ont des vertus médicinales et ses amandes délicieuses parfument le pain oriental. Jusqu'à aujourd'hui, partout où vous verrez Sainte Lucie, vous aurez de la chance : c'est quand la lumière gagne sur l'obscurité. Et comme nous dit le dicton : "A la sainte Luce, le jour avance du saut de puce".



C1 Je t’aime, toi aussi « Maman ? – Oui, mon ange. – Est-ce que tu m'aimes tous les jours ? – Tous les jours, mon ange, je t'aime. – Et moi, est-ce que je t'aime ? – C'est toi qui sais si tu m'aimes quand même... – Même quand je me démène ? – Même quand tu te démènes, je t'aime. Je t'aime parce que tu es toi ; je t'aime pour ta frimousse ; je t'aime parce que tu as les dents qui poussent et qui t'embêtent ; je t'aime plus encore chaque jour et je t'aime pour tous les moments d'amour que tu me donnes, que je te donne, comme on les donne à tous les autres mais pas tout à fait les mêmes. – Maman, je ne comprends pas ce que tu dis... – Je sais, mon amour, mais c'est ça l'amour : ça ne se comprend pas, ça se vit, dans son cœur et dans son âme. »


C11

Il fait chaud On me secoue On me pince On me pousse On me couvre Puis plus rien

j’ai froid j’ai peur j’ai soif j’entends tout un tas de petits bruits autour de moi Il faut que je me lève

Je pousse sur mes pieds Va-t-on me les croquer ? Va-t-on me chatouiller ? Rien

J'étire alors mon buste Mais soudain un flot de lumière Je ferme les yeux Je m’étire, je m’étire Du mieux que je puisse faire


Il fait chaud On me secoue Mais c’est si doux Doucement, tout doucement J’ouvre mes bras et mes yeux Quel émerveillement Pour moi le Zinnia

C12

Fleur de printemps

Fleur aux mille couleurs ! – Quand tu es née, un papillon t'a frôlée, séchant ton cœur tremblant. – Tu as brûlé en été. – Tu as pris ses couleurs à l'automne. – En hiver, tu as gelé. – Au printemps, timidement, tu en as réchappé. – Alors tu as repris vie : en ton centre, le nectar sucré de la rosée. –

Alors, de bonheur, tu as fleuri en t'ouvrant à la vie.


C13

Souricette était la plus heureuse des petites souris. Elle était aussi la plus mignonne et la plus aimée. Elle savait tout faire : peindre et dessiner, chanter et danser, et même jouer de la musique. Bref, c'était une perle de souris. Son père décida de lui trouver le mari le plus puissant de toute la terre. Il réfléchit des jours et des nuits. Il se dit : « Qui est le plus haut, le plus beau et le plus fort dans notre univers ? Voyons, voyons... Je sais : c'est le soleil ! » il prit son baluchon et partit derechef à la rencontre du Soleil pour lui proposer la main de sa fille. Il marcha des jours et des nuits. Il arriva enfin auprès de l'astre du jour : « Ô Soleil, toi qui est le plus grand et le plus puissant de notre univers, veux-tu épouser Souricette, mà fille chérie ? – Certes, certes, Père Souriceau, ta fille est bien jolie. Mais je ne suis pas le plus puissant de l'univers. La preuve, c'est que ma lumière est arrêtée par le Nuage ! – Tu as raison, Ô Soleil. Je m'en vais trouver le Nuage qui te fait de l'ombre. Puisqu'il est le plus fort, je lui offrirai la main de ma fille.» Le Père Souriceau s'en alla donc trouver le Nuage : « Ô Nuage, toi qui est plus fort que le Soleil et donc le plus puissant de notre univers, veux-tu épouser Souricette, mà fille chérie ? – Certes, certes, Père Souriceau, ta fille est bien charmante. Mais je ne suis pas le plus puissant de l'univers. La preuve, c'est que je ne peux pas résister au Vent qui me pousse là où il veut ! – Tu as raison, Ô Nuage. Je m'en vais trouver le Vent qui fait la pluie et le beau temps. Puisqu'il est le plus fort, je lui offrirai la main de ma fille.» Père Souriceau s'en alla trouver le Vent qui soufflait dans les champs.


« Ô Vent, toi qui est plus fort que le Nuage et donc le plus puissant de notre univers, veux-tu épouser Souricette, mà fille chérie ? – Certes, certes, Père Souriceau, ta fille est bien mignonne. Mais je ne suis pas le plus puissant de l'univers. La preuve, c'est que le Mur m'arrête net ! – Tu as raison, Ô Vent. Je m'en vais trouver le Mur qui t'impose ses règles. Puisqu'il est le plus fort, je lui offrirai la main de ma fille.» Père Souriceau continua sans se lasser jusqu'aux pieds du Mur. « Ô Mur, toi qui est plus fort que le vent et donc le plus puissant de notre univers, veux-tu épouser Souricette, mà fille chérie ? – Certes, certes, Père Souriceau, ta fille est bien belle. Mais je ne suis pas le plus puissant de l'univers. La preuve, c'est que le Souricet qui est là tout près grignote mes pierres ! – Tu as raison, Ô Mur. Tiens, tiens, je m'en vais trouver le Souriceau qui te grignote les pieds. Puisqu'il est le plus fort, je lui offrirai la main de ma fille. » – Père Souriceau s'approcha alors de Souricet, qu'il connaissait bien, puisqu'ils étaient voisins. « Dis-moi, Souricet, toi qui est plus fort que le Mur et donc le plus puissant de notre univers, veux-tu épouser Souricette, mà fille chérie ? – Avec plaisir, Père Souriceau. Si j'épouse votre fille, je serai le Souricet le plus heureux de l'Univers ! – Voilà bien une réponse de Souriceau, ma foi ! Figure-toi que je reviens de voyage... » Et patati, et patata. C'est ainsi que Souricette trouva le mari le plus charmant du monde. La famille Souris s'agrandit dans la joie, l'amour et le bonheur, tantôt sous le soleil, tantôt sous les nuages, selon le bon vouloir du vent et toujours à l'abri des belles pierres du mur. Histoire inspirée de La plus Mignonne des Petites Souris du Père Castor.


C3

Les deux arbres

J’ai trouvé deux arbres : - L’un, de guingois... - L’autre, robuste ! Le premier : je l’ai coupé. J’ai gardé trois morceaux de bois ; j’ai scié, raboté, clouté. Et j’ai réalisé une belle cabane cachée dans les feuillages. C’était un beau triangle, solide, enveloppé et stable.

J’y suis monté...mais le vertige m’a pris !

J’ai trouvé deux montagnes : - L’une, très usée... - L’autre, la tête dans les nuages ! La première : je l’ai creusée. J’ai gardé trois rochers ; j’ai ciselé, taillé, posé. Et j’ai réalisé un beau château de marbre. C’était un beau rectangle, spacieux, lumineux et confortable

J’y suis entré... mais la solitude m’a envahie !


J’ai trouvé deux lacs : - L’un, aussi gros qu’un sac... - L’autre, majestueux et doré ! Le premier : je l’ai vidé. J’ai gardé 3 fétus et un bout de campagne ; j’ai noyé, sapiné, enduit Et j’ai réalisé une maison. C'est un beau rond, chaud, doux et tendre

J’y ai pénétré... et la joie m’a surpris !

Une larme a glissée en souvenir de mes amis détruits. J’ai alors planté un arbuste - que le vent ne pourra fendre, – afin de me souvenir de ces vies.

Connaissez-vous ? Connaissez-vous la taupe, qui creuse, qui creuse, avec ses pattes fouisseuses, des labyrinthes souterrains ? Connaissez vous la fourmi, qui construit, qui construit, avec une épine de sapin, un château aux portes de pépin ?


Connaissez vous l'araignée, qui tisse, qui tisse, avec un fil de soie, une toile toute lisse ? Connaissez-vous mon chez-moi ? Comme la taupe, j'ai creusé une cave gardant le frais Comme la fourmi, j'ai construit une maison d'airain Comme l'araignée, j'ai tissé des décorations de dentelles Et au son de la vielle, j'y ai ajouté des rires, des chansons et l'amitié ! C4 En sortant de l'école nous avons rencontré un grand chemin de fer qui nous a emmenés tout autour de la terre dans un wagon doré. Tout autour de la terre nous avons rencontré la mer qui se promenait avec tous ses coquillages ses îles parfumées et puis ses beaux naufrages et ses saumons fumés.


Au-dessus de la mer nous avons rencontré la lune et les étoiles sur un bateau à voiles partant pour le Japon et les trois mousquetaires des cinq doigts de la main tournant la manivelle d'un petit sous-marin plongeant au fond des mers pour chercher des oursins. Revenant sur la terre nous avons rencontré sur la voie de chemin de fer une maison qui fuyait fuyait tout autour de la terre fuyait tout autour de la mer fuyait devant l'hiver qui voulait l'attraper. Mais nous sur notre chemin de fer on s'est mis à rouler


rouler derrière l'hiver et on l'a écrasé et la maison s'est arrêtée et le printemps nous a salués. C'était lui le garde-barrière et il nous a bien remerciés et toutes les fleurs de toute la terre soudain se sont mises à pousser pousser à tort et à travers sur la voie de chemin de fer qui ne voulait plus avancer de peur de les abîmer. Alors on est revenu à pied à pied tout autour de la terre à pied tout autour de la mer tout autour du soleil de la lune et des étoiles A pied à cheval en voiture et en bateau à voiles.




C6 Conte Amérindien Lorsque le vent du nord se mit à souffler vers le sud, il chassa devant lui le vieil homme hiver qui s’arrêta sur les bords du grand lac. Alors le vieil homme hiver enroula sa longue barbe dans la grande forêt et construisit patiemment sa demeure. Le vent lui, continuait à faire rage, sifflant et hurlant. Brisant branches et feuilles, arrachant pousses et nids. Le vent du nord est en effet cruel. L’hiver construisit un logis bien bizarre pour se protéger du vent. Une sorte de hogan aux murs de glace et au sol un tapis de neige. C’était de la neige qu’il se mit à faire tomber car il savait qu’elle protègerait les graines confiées au sol. Il vécu ainsi, très occupé, pendant plusieurs lunes. Depuis ce jour, le paysage avait bien changé, sources et rivières devenaient glace, les animaux avaient disparu et seul les loups hurlaient à la lune. Mais le hogan fini, il n’eut plus rien à faire et commença peu à peu à s’ennuyer. Un soir qu’il regardait au sud, il vit venir vers lui une jeune fille d’une ravissante beauté. Chose étrange, au lieu de se tasser et de craquer, la neige fondait sous ses pieds. Tout en elle respirait la joie, la douceur et la bonté. Ses yeux étaient des étoiles, ses cheveux noirs comme des plumes de corbeaux et ses joues avaient la couleur de l’églantine. Et quand elle respirait l’air se réchauffait. Le vieil homme hiver l’invita en sa demeure et ils discutèrent ainsi toute la nuit. L’hiver charmé ne s’aperçut pas que l’air se réchauffait. Comme il n’était pas habitué à cette chaleur il finit par s’endormir. La jeune fille alors fit venir le soleil, les oiseaux et l’eau puis elle murmura aux graines : « il fait moins froid, vous pouvez sortir » On vit alors de jeunes pousses se montrer timidement puis sourire au soleil. Enfin elle appela le vent du sud et lui demanda de raccompagner le vieil homme hiver dans les grandes plaines blanches. En un nuage le vieil homme disparut et bientôt la forêt se remplit de lumière, de chansons et de parfums.


C7

SAINT-FRANÇOIS

PARLE AUX OISEAUX.

Il y a mille ans de cela, vivait en Italie un jeune garçon qui avait 6 frères et sœurs. Sa mère le nomma Giovanni et son père Francesco, ce qui donne en français Jean et François. Il alla à l'école pour apprendre le latin et choisit de devenir marchand. En Italie, à cette époque, le commerce était plutôt risqué, mais il était toujours joyeux et ne s'en inquiétait pas, jusqu'au jour où il fut jeté en prison. Son père avait de l'argent : ille fit libérer. C'est alors que François réfléchit sérieusement à changer de métier : « Je voudrais bien devenir soldat, se dit-il, pour protéger ma ville, avoir un cheval et devenir un noble chevalier. » Mais un rêve l'arrêta dans ses projets : le Christ lui apparut entouré de paix, d'amour et de lumière. Peu de temps après, alors qu'il priait dans une chapelle, il entendit une voix qui disait : « Répare ma chapelle en ruine. » Il se mit aussitôt au travail et dépensa l'argent de son père pour payer les ouvriers. Il distribue aussi tous ses biens aux pauvres. Furieux, son père le chassa de la maison. François laissa tous ses biens sur place et même ses habits et décida de s'en remettre à son église. L'évêque le prit sous sa protection en lui donnant une cape. François partit sur les chemins et reconstruisit de nombreuses chapelles écroulées. Il consacrait toute son énergie à bâtir des endroits de prières et à organiser les monastères. Il remerciait chaque jour Dieu de lui avoir permis cette vie. Son cantique a traversé les siècle jusqu'à aujourd'hui : « Très haut, tout- puissant, bon Seigneur, à toi sont les louanges, la gloire, l'honneur, et toute bénédiction. A toi seul, Très-Haut, ils conviennent, et nul homme n'est digne de te nommer.


Loué sois-tu, mon Seigneur, avec toutes tes créatures, spécialement messire frère Soleil qui est le jour, et par lui tu nous illumines. Et il est beau et rayonnant avec grande splendeur, de toi, Très-Haut, il porte le signe. Loué sois-tu, mon Seigneur, pour sœur Lune et les étoiles, dans le ciel tu les as formées claires, précieuses et belles. Loué sois-tu, mon Seigneur, pour frère Vent, et pour l'air et le nuage et le ciel serein et tous les temps, par lesquels à tes créatures tu donnes soutien. Loué sois-tu, mon Seigneur, pour sœur Eau, qui est très utile et humble, et précieuse et chaste. Loué sois-tu, mon Seigneur, pour frère Feu, par lequel tu illumines la nuit, et il est beau et joyeux, et robuste et fort. Loué sois-tu, mon Seigneur, pour sœur notre mère la Terre, qui nous soutient et nous gouverne, et produit divers fruits avec les fleurs colorées et l'herbe. Loué sois-tu, mon Seigneur, pour ceux qui pardonnent par amour pour toi et supportent maladies et tribulations. Heureux ceux qui les supporteront en paix, car par toi, Très-Haut, ils seront couronnés. Loué sois-tu, mon Seigneur, pour sœur notre Mort corporelle, à qui nul homme vivant ne peut échapper.


Malheur à ceux qui mourront dans les péchés mortels, heureux ceux qu'elle trouvera dans tes très saintes volontés, car la seconde mort ne leur fera pas mal. Louez et bénissez mon Seigneur, et rendez-lui grâces et servez-le avec grande humilité. » (Trad. Sources Chrétiennes, n°285) François avait aussi un talent particulier : il savait parler aux oiseaux et à tous les animaux. Il utilisait son pouvoir pour faire le bien autour de lui. Un jour, il arriva dans la ville de Gubbio, en Italie. Les habitants vivaient dans la terreur car un loup énorme dévorait ceux qui s'aventuraient dans la campagne. Au-delà des portes de la ville, il fallait sortir avec des fourches et des piques pour se défendre. François décida d'aller trouver le loup. Avec un compagnon, ils traversèrent les champs déserts, pleins d'ossements. Tout-à-coup, ils entendirent le hurlement de la bête. François dit alors très clairement : « Frère Loup, viens ici au nom du Christ. » Le loup obéit. « Frère Loup, tu es méchant. Tu tues les autres créatures de Dieu et même des hommes. Tu mérites les fourches comme voleur et comme assassin. Mais je suis venu faire la paix entre toi et les habitants de Gubbio. » Le loup remua la queue et les oreilles en signe d'obéissance et suivit François jusqu'à la ville. Les habitants se concertèrent et décidèrent que puisque le loup s'était amendé, on lui fournirait chaque jour de quoi manger à sa faim. Il fut bientôt connu et respecté comme le loup blanc dans le village. À sa mort, on l'enterra près de la chapelle Saint-François.



D4

À quoi ressemble ta maison ? J’habite un champignon D’acier et de béton Dressé au cœur de la cité Du haut de mon balcon J’aperçois l’horizon Et je commence à voyager Et toi, dis-moi comment tu vis Dans quel village, dans quel pays Abri de paille ou de béton À quoi ressemble ta maison Peaux de chèvres cousues Sur des branches tordues Elle est fragile ma maison Du Mali au Niger À travers le désert Elle suit les hommes quand ils s’en vont Et toi, dis-moi comment tu vis Dans quel village, dans quel pays Abri de paille ou de béton À quoi ressemble ta maison De Pologne en Espagne Tirée par un cheval Grand-père a traîné sa maison Devant sa caravane Il disait : « Les tziganes Sont les enfants de l’horizon » Et toi, dis-moi comment tu vis Dans quel village, dans quel pays Abri de paille ou de béton À quoi ressemble ta maison Enfant des bidonvilles Du Chili au Brésil N’a pas connu d’autre maison Qu’un abri de misère Fait de tôles et de pierres Trois murs en planches, l’autre en chiffon Et toi, dis-moi comment tu vis Dans quel village, dans quel pays Abri de paille ou de béton À quoi ressemble ta maison


D5


LE PETIT COQ NOIR

Il était une fois un petit coq noir au plumage lustré et au jabot brillant. Il portait sa crête rouge avec arrogance et possédait la voix la plus stridente des coqs alentour : « COCORICO ! COCORICO ! COCORICO » ! Il appartenait à une très pauvre femme et ils vivaient seuls tous les deux dans une petite maison à l’écart du village. Toute la journée, le petit coq noir grattait la terre ou le tas de fumier devant la maison pour y trouver des graines, des vers ou des miettes. Parfois, il s’aventurait jusqu’au jardin pour y picorer une tomate bien mûre. Un jour que le petit coq grattait ainsi, il déterra tout à coup une pièce d’or, qui se mit aussitôt à luire au soleil ! Mais juste à ce moment-là passait le sultan, le sultan ventru, le sultan pansu. -- Petit coq noir, donne-moi ta pièce d’or » dit le sultan. -- Pour ça non, dit le petit coq, je la donnerai à ma maîtresse, qui en a bien plus besoin que toi ! Sans se soucier des cris du coq, le sultan prit la pièce et l’emporta dans son palais, où il la déposa dans son coffre à trésors. Le petit coq en colère l’avait suivi. Il se percha sur les grilles qui entouraient le palais du sultan et se mit à crier à tue-tête : « SULTAN VENTRU ! SULTAN PANSU ! RENDS-MOI MON BEL ECU ! » Tant et si bien que le sultan appela la sentinelle qui gardait les portes de son palais : -- Attrape ce petit coq, lui dit-il, et jette-le dans le puits, il se taira ! La sentinelle attrapa le petit coq et le jeta dans le puits plein d’eau. Mais au fond du puits, le petit coq se mit à marmotter : -- Pompe, mon petit jabot, pompe toute l’eau ! Et toute l’eau du puits passa dans le jabot du petit coq qui ne fut pas noyé. Il sortit sain et sauf du puits et retourna au palais où il se percha sur la fenêtre de la chambre du sultan : « SULTAN VENTRU ! SULTAN PANSU ! RENDS-MOI MON BEL ECU ! » Le sultan en colère appela son jardinier et lui dit : -- Attrape cet insolent petit coq et mets-le dans le four brûlant, ça le fera taire ! Le jardinier attrapa le petit coq et le mit dans le four brûlant. Mais dans le four, le petit coq se mit à marmotter :


-- Crache, mon petit jabot, crache toute l’eau ! Et toute l’eau sortit du jabot du petit coq et refroidit le four. Le petit coq ne fut donc pas brûlé. Il sortit du four, s’envola à nouveau pour retourner au palais, entra par la fenêtre dans la chambre du sultan et alla se percher sur le dossier de son fauteuil où il se mit à crier de plus belle : « SULTAN VENTRU ! SULTAN PANSU ! RENDS-MOI MON BEL ECU ! » Le sultan furieux appela son fidèle vizir et lui ordonna : -- Attrape cet insupportable oiseau et mets-le dans une des ruches, que les abeilles le piquent jusqu’à ce qu’il se taise ! Je ne veux plus l’entendre ! Le vizir mit le petit coq noir dans une des ruches de paille. Mais dès qu’il fut dans la ruche, le petit coq se mit à marmotter : -- Petit jabot sans pareil, avale les abeilles, avale les abeilles ! » Et toutes les abeilles rentrèrent dans le jabot du petit coq qui ne fut pas piqué. Il sortit sain et sauf de la ruche, retourna au palais, alla se percher sur l’épaule du sultan et lui cria dans l’oreille : « SULTAN VENTRU ! SULTAN PANSU ! ME RENDRAS-TU MON ECU ? » Le sultan fou de rage s’écria : -- Et bien puisque personne n’est capable de venir à bout de toi, je t’étoufferai moimême ! » et il attrapa le petit coq, le mit sous son caftan et voulut s’asseoir dessus. Mais, sous le caftan du sultan, le petit coq se mit à marmotter : -- Petit jabot sans pareil, lâche les abeilles, lâche les abeilles. Et voilà que toutes les abeilles se mettent à bourdonner, à bourdonner et à piquer le gros derrière du sultan ! -- Ouille, ouille ! Qu’on lui ouvre le coffre au trésor, qu’il reprenne son écu d’or, qu’il prenne tout ce qu’il voudra mais que je n’entende plus jamais parler de lui ! Le petit coq courut dans la salle du trésor où il retrouva son écu d’or, puis se mit à marmotter : -- Petit jabot brillant, pompe l’or et l’argent, pompe l’or et l’argent ! Et les pièces d’or et d’argent passèrent du coffre du sultan dans le jabot du petit coq ! Quand celui-ci fut bien plein, le petit coq noir quitta le palais et retourna dans son village où l’attendait sa vieille maîtresse. Il lui donna d’abord fièrement son écu d’or, puis il marmotta : -- Petit jabot brillant, crache l’or et l’argent !


Et devant les yeux de la maîtresse éblouie, le tas d’or monta, monta… Elle en eut bientôt jusqu’aux genoux ! Et avec tout cet or, que fit-elle ? Elle acheta une grande ferme, la plus grande de tout le village et elle s’y installa avec son petit coq. Puis elle acheta des poules, des vaches, des moutons, des cochons et ils vécurent tous ensemble heureux dans cette belle maison. Et s’ils ne sont pas morts, c’est qu’ils y vivent encore !


D61

LA QUEUE DES ANIMAUX Jadis, les animaux n’avaient pas de queue. Le cheval ne pouvait pas chasser les mouches. L’écureuil sans queue avait du mal à sauter de branche en branche. Le renard était bien moins beau et ne parlons pas du lion ! Le sage roi des animaux, le lion, prit la décision de remédier à cette situation. Il réfléchit pendant longtemps à la façon dont il allait s’y prendre et à la fin, il fit appeler le renard pour lui demander conseil. « Tous les animaux ne peuvent pas avoir la même queue , estima le renard. –

Je sais cela, moi aussi, répondit le lion. Mais comment départager les animaux sans se montrer injuste ?

C’est simple. Ceux qui arriveront les premiers recevront les plus belles queues, déclara le Renard.

Excellente idée, acquiesça le Lion. Cours vite dans la forêt et préviens tous les animaux qu’ils doivent se présenter à midi, au bord du ruisseau, pour la distribution des queues. » Le renard transmit le message et courut vite vers le ruisseau pour arriver le premier. Il fut

suivi de près par le cheval, l’écureuil, le chat et le chien qui arrivent toujours les premiers quand on distribue quelque chose. Vinrent ensuite les autres animaux : l’éléphant, le cochon et le lièvre se présentèrent les derniers. Lorsque tous les animaux furent réunis dans la clairière, le lion se mit à distribuer les queues. Il se servit d’abord lui-même : ce fut une superbe queue, longue et dorée, terminée par un plumeau. Ensuite, le lion attribua de très belles queues bien touffues au renard et à l’écureuil. Le cheval opta pour une magnifique queue en crin. Le chien et le chat reçurent encore des queues fort présentables, mais les animaux qui arrivèrent les derniers, se trouvèrent bien démunis. L’éléphant eut une maigre cordelette avec quelques soies au bout. Il en fut si navré qu’il en porte aujourd’hui encore la trompe basse. La queue du cochon était fine comme un ver de terre. Il la fit boucler pour la rendre plus jolie. Le pauvre lièvre resta sans queue. Le chien et le chat commencèrent à se disputer pour savoir lequel d’entre eux avait la plus belle queue. À la fin, le chien attrapa le chat et lui arracha d’un coup de dents l’extrémité de la queue. Le chat s’enfuit dans l’arbre et depuis ce jour, il préfère se sauver devant le chien. Le lièvre ramassa le bout de la queue du chat et le colla sur son derrière. Ceci explique pourquoi la queue des lièvres est si petite. Conte traditionnel bochiman




D6

LES 7

PONTS DE LA

MULATIÈRE

Jusqu'au XVIIIème siècle, la ville de Lyon s'arrêtait à Perrache. Si les habitants de Saint-Genis-Laval voulaient aller en pèlerinage à la chapelle de Fourvière, ils devaient faire un grand tour par le sud, franchir le pont de Givors, revenir par Gerland et traverser le Rhône à la Guillotière puis la Saône à Bellecour. Une belle ballade de plus de vingt kilomètres ! Il faut dire aussi que la confluence du fleuve et de la rivière était tout en marias vaseux et puants où il ne faisait pas bon s'aventurer. On y rencontrait d'étranges apparitions et on risquait de s'embourber ou de perdre son chemin. C'est un ingénieur du Roi qui décida de remblayer la place. Une fois les marais asséchés, on pouvait circuler normalement. Il était temps de construire un pont pour relier directement Oullins et Lyon. LE

PREMIER PONT

On construisit un pont de bois, à l'endroit le plus étroit de la Saône. On le nomma le Pont Bellevue parce qu'il était en face de la propriété Bellevue, tout simplement. Il était un peu branlant quand même. Les charrettes qui le traversaient faisaient des vibrations. Il n'a duré qu'une année. L'hiver suivant : la Saône a monté et l'a emporté. Quelle catastrophe ! Il fallait tour recommencer. LE

DEUXIÈME PONT

Pour le deuxième pont, il fallut attendre longtemps. D'abord, parce qu'on ne savait pas qui allait le payer. Alors on décida de faire un péage. Chaque attelage qui voudrait passer devrait payer. Les marchands


participeraient ainsi à leur manière à la construction. Bien sûr, ceux qui voulaient passer à pied seulement n'avaient rien à payer. Ensuite, au moment où les travaux démarraient enfin, il y a eu la révolution française. On a tout stoppé. Il fallait savoir qui dirigerait le pays : le Roi ou un Président ? Presque dix ans plus tard, on ouvrit le Pont Bellevue n°2 à la circulation. Malgré le péage, la circulation était très intense : les chevaux, les carrioles, les charettes, les équipages, un monde formidable avait besoin de traverser là. Madame de Bellevue qui habitait toujours en face, se trouva fort incommodée du bruit et du dérangement. Elle écrivit une lettre d'indignation à la Préfecture, qui ne savait pas trop quoi faire. En effet, on était déjà en train de se demander si un train pouvait passer là, et question bruit, la locomotive à vapeur, c'est quelque chose. Heureusement que Madame de Bellevue n'avait pas encore entendu parler de ce projet ! LE

TROISIÈME PONT

Les ingénieurs du Chemin de Fer étaient prêts à construire des rails entre Saint-Etienne et Lyon. Mais le pont Bellevue ne convenait pas : trop étroit et trop fragile pour les tonnes de métal de la locomotive. En plus, les trains ne franchissent pas les collines. Il leur faut des tunnels. On creusa le tunnel sous Fourvière et on installa un nouveau pont un peu plus au sud. Les premières voitures avaient fait leur apparition. Les locomotives étaient de plus en plus majestueuse. Pour contenter tout le monde, on construisit un pont très large, à double usage : pour la route et pour les rails. LE

QUATRIÈME PONT

Les inondations de la Saône étaient redoutable pour le pont de pierre et de bois. Les ingénieurs décidèrent alors de le renforcer avec du métal et du fer. Ils gardèrent l'idée du pont mixte pour les voitures et pour les


train. Le trafic était de plus en plus dense et les locomotives de plus en plus lourdes. Les embouteillages étaient fréquents déjà en 1870 ! En plus, pour le chemin de fer, il fallait faire passer la locomotive seuls d'abord, à petite vitesse pour que ça ne vibre pas trop, puis les wagons tirés par les chevaux. Quelle histoire ! LE

CINQUIÈME PONT

Pour le chemin de fer, on creusa un nouveau tunnel et on ajouta un autre pont extrêmement solide, un peu en amont. On décida de le construire tout en métal avec des piles en pierre. Ce pont était très résistant : la preuve, la SNCF l'utilise encore aujourd'hui et vous le connaissez à coup sûr, si vous passez à côté, sa forme très spéciale en arceaux retournés !

LE

SIXIÈME PONT

Comme on avait besoin d'un pont pour la circulation des voitures, le pont numéro 6 fut construit, sur la commune de la Mulatière. En pierre et en métal, il fut détruit pendant la guerre, mais on réussit à le réparer. C'est celui qu'on utilise aujourd'hui.


LE

SEPTIÈME PONT

Et le septième ? me demanderez-vous. C'est celui de l'autoroute. Il est collé à l'autre pont. Nous l'utilisons dans le sens La Mulatière-Lyon, tandis que l'ancien est réservé au sens Lyon-La Mulatière. Même s'il y a encore des bouchons, ils sont traversés par des touristes, qu'ils viennent de Paris, de l'est ou du nord de la France, mais également de Belgique, des Pays-Bas, du Danemark, bref par ceux qui empruntent l'autoroute du Soleil. En somme, des centaines de milliers de touristes européens traversent la Saône dans les deux sens, chaque année.


D71

LA NUIT DE LA SAINT-JEAN

Il y a bien longtemps qu’advint cette étrange nuit de la Saint-Jean . Même le plus anciens des Anciens se gratte la barbe en disant: « Je ne m’en souviens pas, je ne me souviens de rien. » Si vous allez en Estonie, cependant, vous verrez bien cette pierre noire sur l'église de Rouge, la pierre qui est devenue noire lors de la fameuse nuit où se produisit cette terrible aventure. Cette nuit-là, le soleil ne se couchait pas. Il restait au bord de l'horizon et le ciel restait rouge oranger. À minuit, des feux apparurent alors au sommet des collines. On en voyait des milliers, proches ou lointains : ils surmontaient les forêts et paraissaient même suspendus sous les nuages , comme les étoiles du ciel. Mais le feu de Munamägi était toujours le plus grand de tous, car il devait briller sur tout le pays des Estoniens. Ses flammes étaient si hautes qu'on voyait les poissons effrayés au fond du lac. Les gens venaient du pays entier, de près comme de loin et s’en donnaient à cœur joie. C'était une belle fête. Quand le jour se levait, chacun s’en retournait, et les chemins débordaient de monde. Mais cette année-là, tout devait se passer différemment. L’histoire remontait à quelques semaines auparavant, lorsque le fermier Tabi avait trouvé dans la forêt un démon à moitié mort, abandonné, faible et misérable. Pris de pitié, Tabi était retourné chercher son cheval pour conduire le diable chez lui. Tabi n’osa pas installer le diable dans sa demeure. Il l’enferma dans la grange, avec le foin. Il le nourrit de lait et de pommes de terre, et en quelques jours le diable retrouva une mine florissante. Lorsqu’il voyait le fermier, sa femme ou leurs enfants, son visage s’éclairait. Des jours heureux s’écoulèrent ainsi ; les enfants jouaient avec le diable, et lui apprirent à chanter. Sa voix était affreuse. Il faisait


aboyer les chiens toute la nuit. Le secret devenait difficile à garder. Il fallait qu'il retourne dans la forêt. Cela n’avait rien de facile. À peine atteignaient-ils le portail que le diable faisait demi-tour, regagnait paisiblement son abri et se remettait à chanter. Une nuit, pendant qu’il ronflait bruyamment, Tabi l’installa sur la charrette et le conduisit au cœur de la forêt. Mais au petit matin, le diable était de retour. Le fermier s’inquiétait. Déjà, tous les villageois savaient qu’il hébergeait un démon, et chacun venait contempler l’étrange créature. Au bout de quelques semaines, la nouvelle finit par arriver aux oreilles du pasteur. Ce dernier savait quoi faire. C’était justement la veille de la Saint-Jean, et sur la colline, le bûcher géant était déjà prêt. Les villageois et le pasteur se saisirent du diable et le conduisirent pieds et poings liés jusqu’à la montagne, pour le mettre sur le bûcher. Le

soir,

tout

le

village

s'était

réunis

autour

du

bûcher.

Au moment d'allumer le brasier, il se fit un profond silence. On n’entendait pas une voix. Le diable réveillé par le feu éternua. Et quand il comprit ce qui lui arrivait, il poussa un cri terrible. À ce moment, une chose prodigieuse se produisit. Les arbres disparurent subitement de Munamägi et toute la colline devint, en un instant, ronde comme un œuf et glissante comme de la glace. Personne n’arrivait plus à se tenir debout sur sa surface et toute la foule glissa vers le bas, avec de grands hurlements. Ils se rendirent compte que le bûcher continuait à brûler. Il avait été fixé là par le signe de croix du pasteur, contre quoi la puissance du démon ne pouvait rien. Certains eurent pitié du pauvre diable : « Qui est courageux, pour aller sur la colline et libérer le diable ? Allons-y tous ensemble : pas le moment d’hésiter, quand il risque de brûler ! » --Montez vite l’aider, ou il va cramer ! --Apportez une échelle et une corde, sinon on n’y arrivera pas ! »


Tabi se mit à grimper en s'agrippant à la colline de Munamägi comme il pouvait, avec les ongles, avec les dents. Il disparut dans les flammes. On vit des étincelles, des flammes et un nuage de fumée. Mais Tabi avait de la chance. Il émergea bientôt de la fumée, tenant par la main le démon, devenu glabre et lisse de peau. Il n’avait plus la moindre trace de poil, pas même sur le crâne, autour des cornes. Il s’envola soudain et, après avoir décrit une grande courbe dans les airs, piqua vers la forêt derrière les fermes L’enthousiasme s’empara de la foule. « Vive Tabi, hourra ! Vive Tabi, brave gars !... »

Cependant, la colline de Munamägi avait repris son aspect habituel. Le grand feu de Saint-Jean flambait en crépitant,. Tout le pays était comme un ciel étoilé, parsemé de feux qui se détachaient de chaque bosquet en clignotant comme des vers luisants. La fête dura jusqu’au matin, puis la lumière du jour remit chacun en route.

Le pasteur, de son côté, avait eu si peur qu'il s'était enfui vers sa maison. Emporté par son élan, il s’était précipité contre le mur de l’église, trouvant la mort dans le choc. Et la pierre contre laquelle il s’était écrasé devint toute noire.

Quant à Tabi, une surprise l’attendait chez lui. Il s’aperçut que l’herbe des marais, dans sa grange, était devenue du trèfle de la meilleure qualité et que la charrette sur laquelle il avait conduit le diable dans la forêt s’était changée en une élégante voiture. Ses vaches maigres étaient maintenant grasses et meuglaient comme des trombones.

Le diable resta invisible. Mais l’année suivante, pour la Saint-Jean, Tabi se rendit


compte que celui-ci était passé dans la cour pendant la nuit : il reconnaissait bien l’empreinte de ses pieds fourchus. Un an plus tard, à la même époque, Tabi disposa dans la grange un plateau de pommes de terre et un baquet de lait. Au matin, les deux récipients étaient vides, mais au fond de chacun d’eux se trouvait un joli tas de pièces d’or.

Les fils de Tabi, qui, enfants, avaient joué à empoigner les cornes du démon et lui avaient chatouillé affectueusement la nuque, devinrent des hommes robustes.

Le vieux diable vient encore aujourd’hui visiter la ferme de Tabi à chaque nuit de Saint-Jean, sans se montrer aux hommes. Il vit sans doute dans les fourrés épais, mangeant les baies des marais et paressant au soleil.

D'après un conte de Juhan JAIK traduit de l’estonien par Jean Pascal Ollivry



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