Extrait "Magnum et la street photography"

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Une immersion dans les archives photographiques de Magnum, à la rencontre des œuvres exceptionnelles de : Abbas Christopher Anderson Eve Arnold Olivia Arthur Bruno Barbey Jonas Bendiksen Ian Berry Werner Bischof René Burri Robert Capa Henri Cartier-Bresson Chien-Chi Chang Antoine d’Agata Bruce Davidson Carl De Keyzer Raymond Depardon Bieke Depoorter Carolyn Drake Thomas Dworzak Nikos Economopoulos Elliott Erwitt Martine Franck Stuart Franklin Leonard Freed Cristina García Rodero Jean Gaumy Bruce Gilden Burt Glinn Jim Goldberg Harry Gruyaert David Alan Harvey Thomas Hoepker Sohrab Hura

David Hurn Philip Jones Griffiths Richard Kalvar Hiroji Kubota Sergio Larraín Guy Le Querrec Herbert List Steve McCurry Constantine Manos Peter Marlow Susan Meiselas Inge Morath Trent Parke Martin Parr Paolo Pellegrin Gueorgui Pinkhassov Mark Power Raghu Rai Eli Reed Marc Riboud George Rodger Moises Saman Alessandra Sanguinetti Ferdinando Scianna David Seymour Jacob Aue Sobol Alec Soth Chris Steele-Perkins Dennis Stock Newsha Tavakolian Peter van Agtmael Alex Webb Patrick Zachmann

TEXTE DE STEPHEN MCLAREN

ISBN : 978-2-330-12815-9 45€ TTC France

MagnumCouvFr.indd Toutes les pages

14/04/2020 15:17


.Introduction L’essence même de ce qu’on nomme aujourd’hui la street photography – le goût de saisir au vol les images qui se présentent dans l’espace public – est gravée dans l’ADN de l’agence Magnum depuis sa création en 1947. Souvent, entre deux reportages de commande, on voit ses photographes s’amuser de ces petits drames dont la rue est prodigue et qui, sous leur œil aguerri, peuvent aboutir à des images aussi fascinantes qu’énigmatiques, dont le potentiel narratif ferait la joie d’un Tolstoï ou d’un Proust.

Henri Cartier-Bresson Espagne, 1933.

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jonchées de débris. De telles images, parues à l’époque dans les journaux et les magazines, sont en même temps des exemples accomplis de street photography, transcendant leur vocation première de témoignage d’actualité.

Qu’est-ce que l’“esprit de la rue” ?

René Burri Henri Cartier-Bresson. La Havane (Cuba), 1963.

La street photography adore l’incongru, l’improbable, l’incohérent, l’ineffable. Elle se délecte de nos travers humains, de nos mœurs étranges et de la bizarrerie des paysages sociaux qui nous entourent. Elle célèbre l’ambiguïté, suggérant des réalités parallèles auxquelles nous n’accédons que rarement ou pour une fraction de seconde à peine. Tradition plutôt que genre, la photographie de rue consiste en une panoplie d’outils d’improvisation à déployer dès que l’instant s’y prête, tel un jazzman cherchant son riff. À ses sommets, elle nous ouvre à une large palette d’émotions, de l’ironie provocante d’un Elliott Erwitt à la compassion, l’étonnement et parfois l’effroi émerveillé. Magnum étant avant tout un collectif de photojournalistes, on ne s’étonne pas que leurs meilleures photographies de rue apparaissent souvent au détour d’un reportage d’actualité : ainsi des images irréelles prises par le Français Bruno Barbey sur les barricades de Mai 68 ; ou dix ans plus tard, quand le Britannique Chris Steele-Perkins, passant plusieurs mois à Belfast (Irlande du Nord) dans les premiers jours des “troubles”, détourne son objectif des miliciens armés pour s’intéresser aux enfants qui jouent dans les rues 7

Quiconque apprécie l’ambiance capricieuse et enivrante de la vie dans une grande ville aime à se dire qu’il a l’“esprit de la rue”. Nul ne veut passer pour le provincial de service, cible des pickpockets et aigrefins en tout genre, celui que le chauffeur de taxi dépose au mauvais bout de la rue ou à qui le garçon de café extorque le double du tarif. Qu’il existe une forme de culture propre à la rue et aux situations de foule, qui permet de se débrouiller dans la jungle urbaine, de savoir où vaquer à ses affaires en sécurité, qui tenir à l’œil ou comment se tirer d’une situation délicate, chacun le comprend aussi. Mais le vrai “esprit de la rue” du photographe ne s’arrête pas à cela : il distingue celui qui intuitivement comprend le milieu urbain et sa faune propre. Pour le photographe de rue vraiment engagé, passer pour suspect est un risque à courir ; ne reste plus ensuite qu’à jouer le jeu… ou à jouer des coudes ! Tous les photographes Magnum de ce livre possèdent assurément ce don-là. Chacun se trouve dans la ville comme chez lui, se glissant dans le flot du trafic et flairant ces instants un peu magiques où l’image peut survenir. Tel un bon chauffeur de taxi, le photographe de rue sait comment fonctionne une ville, comment interagissent ses habitants et “où ça se passe”. Se souvenir de l’heure où le soleil d’automne se posera sur le parc de Washington Square, ou quelles rues de Soho sont les plus bondées un vendredi soir, c’est avoir l’“esprit de la rue”. Un jour de 2010, je tombai sur l’Australien Trent Parke, photographe chez Magnum, en pleine City de Londres. Il n’était que neuf heures du matin, mais pour lui, sur le terrain depuis l’aube, en sandales, c’était déjà la fin de la meilleure lumière – celle, me fit-il remarquer, où l’on voit se refléter sur le visage des banlieusards le rouge chaud des autobus typiques de la ville. Ça, c’est l’“esprit de la rue”. Un vrai photographe de rue, comme ceux qu’on découvre ici, est également passé maître dans l’art de percevoir ce moment où la réalité frémit de l’imminence d’un bon cliché – quand une fine nuance dans l’atmosphère appelle à presser le pas, scruter et se tenir prêt à déclencher. Que la bouffée d’animation accompagnant une masse de passagers débouchant du métro alerte un groupe d’amis ; que le cri d’un travailleur de chantier fasse lever les yeux des passants ; qu’un régiment de touristes, aux premières gouttes de pluie, ouvre instinctivement ses parapluies… clic ! “C’est avant et après que l’on pense, note Henri Cartier-Bresson, jamais dans l’instant même où l’on prend la photo. La réussite dépend de l’étendue de sa propre culture générale, des valeurs que l’on porte en soi, de sa clarté d’esprit et de sa vivacité.” .Introduction


Tout ce qui importe, c’est la curiosité. Gueorgui Pinkhassov

Thomas Dworzak Passage pour piétons. Erevan (Arménie), 2014.

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Peter Marlow Employés d’hôtel s’inclinant au départ des clients. Japon, 1998.

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.En chemin




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Ci-dessus, en haut

Ci-dessus, en bas

Nikos Economopoulos Addis-Abbeba (Éthiopie), 2012.

Nikos Economopoulos Arba Minch (vallée de l’Omo, Éthiopie), 2015.


Nikos Economopoulos La Havane (Cuba), 2017.

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Pages suivantes

Nikos Economopoulos Trinidad (Cuba), 2015.

.Nikos Economopoulos


Elliott Erwitt Colorado (États-Unis), 1955.

Elliott Erwitt Pittsburgh (Pennsylvanie, États-Unis), 1950.

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Elliott Erwitt New York (États-Unis), 1955.

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.Elliott Erwitt



.Herbert List

Peintre de formation académique avant de fuir le régime nazi en 1936, l’Allemand Herbert List fut un photographe compulsif, faisant alterner scènes de rue, paysages, portraits d’artistes ou natures mortes irréelles.

En 1953, vivant alors avec une amie à Rome, il se blessa au pied et se retrouva cloîtré dans leur appartement pour plusieurs semaines. L’idée de ne pouvoir sortir pour capter l’atmosphère électrique de la Rome des années 1950 a dû lui paraître comme une peine de prison. Tout comme André Kertész, autre grand photographe qui se retrouva confiné dans son appartement, Herbert List invente une manière inédite d’observer la vie urbaine en la photographiant depuis sa fenêtre à un étage élevé. Des heures durant, il se laisse capter par les pans d’humanité qui défilent, jouant ou flânant, dans le faubourg ouvrier qu’était encore alors le quartier du Trastevere. Apprécié jusque-là pour ses portraits et paysages composés avec un art méticuleux sous l’objectif du Rolleiflex, il se sent littéralement libéré en tant que photographe en découvrant, sans quitter son appartement, la rapidité et la souplesse que lui apporte la combinaison du boîtier Leica et du téléobjectif : “Les images que je captais spontanément, avec la même ivresse que si elles dormaient depuis longtemps dans mon inconscient, étaient souvent plus fortes que celles que j’avais si soigneusement composées. Je les saisissais au passage dans toute leur magie.”

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On retrouve dans ces images prises en plongée les deux écoles qui avaient influencé sa photographie : le surréalisme et le Bauhaus. Le pavage luisant des rues lui fournit une trame géométrique sur laquelle il dispose nonnes, travailleurs, groupes d’enfants et couples d’amoureux, découpant d’adorables tranches de vie romaine, dont beaucoup n’ont été exposées ou publiées que très rarement.


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Constantine Manos Daytona Beach (Floride, États-Unis), 1997.

Constantine Manos Daytona Beach (Floride, États-Unis), 1997.

Mes images préférées ont toujours été des images complexes, qui laissent les réponses et les solutions au spectateur. Constantine Manos

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Constantine Manos Daytona Beach (Floride, États-Unis), 1997.

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.Constantine Manos


Une immersion dans les archives photographiques de Magnum, à la rencontre des œuvres exceptionnelles de : Abbas Christopher Anderson Eve Arnold Olivia Arthur Bruno Barbey Jonas Bendiksen Ian Berry Werner Bischof René Burri Robert Capa Henri Cartier-Bresson Chien-Chi Chang Antoine d’Agata Bruce Davidson Carl De Keyzer Raymond Depardon Bieke Depoorter Carolyn Drake Thomas Dworzak Nikos Economopoulos Elliott Erwitt Martine Franck Stuart Franklin Leonard Freed Cristina García Rodero Jean Gaumy Bruce Gilden Burt Glinn Jim Goldberg Harry Gruyaert David Alan Harvey Thomas Hoepker Sohrab Hura

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