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Grégory Le Floch ÉLOGE DE LA PLAGE

Porté par une plume alerte, un éloge original et profond, inspiré de lectures choisies, sur ce lieu unique qu’est la plage.

Le Livre

Voici une lecture inspirée, nourrie de références littéraires, picturales et cinématographiques (Eugène Boudin, Rohmer, Nanni Moretti, etc.), de ce lieu unique entre tous qu’est la plage. Attaché à lui par sa propre pratique d’écriture (il n’écrit que sur la plage), baigné comme Proust dans la réminiscence de ses berges et de ses embruns, Grégory Le Floch interroge l’imaginaire collectif qui a peu à peu transformé en

Occident l’image de cet espace de confins au départ inhospitalier, lié à l’errance marine et aux naufrages, en simulacre moderne de paradis offert à tous. Mais loin de se contenter d’un simple tableau historique, l’auteur dessine au gré de sa fantaisie les contours d’un paysage mouvant, menacé aujourd’hui de disparition par les aléas climatiques.

Points Forts

• Entrée au catalogue d’un auteur dont le deuxième roman De parcourir le monde et d’y rôder a obtenu les Prix Décembre, Wepler, de la Découverte Transfuge, ainsi que du Récit de l’Ailleurs de Saint-Pierre-et-Miquelon.

• La singularité de la démarche est séduisante : l’auteur avoue ne pouvoir trouver l’inspiration pour écrire ses romans que sur une plage. À partir de là, il déploie de manière intime son rapport original à ce lieu unique, en marge des convenances sociales.

• Un texte riche en questionnements, nourri de nombreuses références culturelles, empruntées aussi bien à la littérature, à la peinture, au cinéma.

• Une réflexion forte sur l’imaginaire collectif de la plage, sur l’évolution de sa perception au fil des siècles.

3 mai 2023

12  ×  19,5 cm

204 pages 18,00 €

ISBN : 978-2-743-65993-6 -:HSMHOD=[Z^^X[:

L’AUTEUR

Grégory Le Floch est né en 1986. Il est l’auteur de trois romans (Dans la forêt du hameau de Hardt, éditions de l’Ogre, 2019, De parcourir le monde et d’y rôder, Christian Bourgois, 2020 et Gloria, gloria, Christian Bourgois, 2023) et de nouvelles.

• Un livre engagé qui évoque les menaces écologiques qui pèsent sur cet espace aujourd’hui menacé par les changements climatiques.

• Le livre est parsemé d’évocations fines et subtiles des paysages de plage.

Quelques Chiffres

• GfK, De parcourir le monde et d’y rôder : 2 100 grand format, 1 400 poche

Avec les textes de:

Laurence Campa (Vietnam)

Denitza Bantcheva (Bulgarie)

Ananda Devi (Île Maurice)

Hélène Frappat (Corse)

Sorour Kasmaï (Iran)

Leila Sebbar (Algérie)

Véronique Tadjo (Côte d’Ivoire)

Jeanne Truong (Cambodge)

Laura Ulonati (Italie)

M Moires De Nos M Res Des Femmes En Exil

sous la direction de de Laurence Campa

Exil et transmission des mères à leurs filles, récits vécus.

« Un beau livre qui raconte entre photos et documents personnels les récits des diasporas du XXe siècle. » France Inter «Une exploration de la transmission entre générations et de la richesse du métissage. »

Télérama

Ce livre réunit neuf autrices, toutes issues des diasporas du XXe siècle, autour des thèmes de l’exil et de la transmission. La filiation féminine est au cœur de leurs récits intimes où s’entremêlent les voix des grand-mères, mères, tantes et filles. Pour illustrer leurs souvenirs, elles ont fouillé dans leurs archives familiales, parcelles de l’histoire collective, formant un bouquet sensible et attachant.

• Un « livre cadeau » pour la fête des mères original et soigné qui réunit une grande variété de parcours de vies, d’expériences de l’exil, de milieux sociaux.

• Trouver sa place en tant que femme venue d’ailleurs : chacune raconte le chemin qui lui a permis de se libérer de ce double déterminisme, de genre et d’origine.

• Le lien entre les générations est au cœur de ces récits intimes où s’entremêlent les voix des grands-mères, tantes, mères et filles.

• La dimension témoignage confère à ce bouquet de récits vécus un caractère attachant et accessible à un large public.

20 x 27, relié

176 pages, 39€

9782845979277

REV 24 mai 2023

Littérature

Beaux-Livres

Fête des mères

Ces deux photographies datent de 1960 et sont concomitantes. L’une provoque l’autre: en épousant mon grand-père – parti vivre, et surtout travailler, depuis trois ans en France –, ma grand-mère va à la ville faire cette photo d’identité. Elle servira pour le dossier administratif qui lui permettra de le rejoindre à Nice. C’est pour ça qu’elle part, pour devenir sa femme; sa femme au foyer et rien d’autre. Comme beaucoup d’immigrées de ce milieu (pauvre) et de cette époque. Leur noce de traviole paraît déjà empesée de cette destinée. Pourtant, ma grand-mère s’était cousu une robe moderne, courte. Elle avait trouvé le modèle dans le magazine Grand Hôtel, qu’elle lisait en cachette de sa mère.

Laura Ulonati

Italique

Née en Italie en 1982, Laura Ulonati a grandi et fait ses études en France. Elle est l’auteure d’Une histoire italienne (Gallimard, 2019, finaliste du prix du Premier Roman 2019 et lauréate du prix Henri de Régnier de l’Académie française 2020) et de Dans tout le bleu (Actes Sud, 2021).

C’est l’heure de la lumière. Sur la mer, l’aube prend d’abord au sauvage d’un lilas, au profond d’une vendange. Un éclairage qui s’allume quand le bord haut du soleil touche l’horizon ; quand il accoste sur les galets. L’aurore devient alors plus rousse. Plus riche pour couvrir – sans jamais renoncer à la force de sa transparence – le profil naissant de la ville. La clarté aiguise de blé le fronton d’un palais; elle donne à l’ossature des toits de tuiles cette perfection de la ligne définie et saturée. Nice se rapproche comme un visage à l’instant de vérité. Voilà que sa face brûle: des flammes dansent dans les mille pupilles de ses fenêtres, sur les dômes crânes et chauves de ses hôtels. Une légende, une hydre dont le ventre est plein. L’or, en amant avide, y grimpe par la vallée, court dans son lit pour lécher le pied des terrasses ; pénétrer de ses rayons la toison des oliviers, chaque repli des collines. Partout, l’ombre a reculé, sauf dans cette forêt de tours adossée aux pentes abruptes d’une montagne. Un contrefort oublié où, comme dans un cul, un peu de nuit stagne toujours. Un arrière-pays d’usines et de cheminées, puant et laid qui, en réalité, cache le vrai nombril du monde : celui de ma Nonna.

C’est l’heure de la lessive. Sur le balcon étroit d’un immeuble fripé, Nonna étend ses blouses colorées dans son petit matin secret. Avant que le voisin ne la surprenne avec ses bigoudis; dans cette chemise légère qui laisse deviner les auréoles brunes de ses seins lourds. Avant que l’été ne l’essouffle; qu’il ne fasse gonfler ses jambes et ne l’enferme derrière la pénombre de ses persiennes constamment tirées. Le prélude d’une journée, lente et répétée, dans cette ville qui ne semble pas savoir qu’elle est double, une moitié ennemie de l’autre. Du côté pile, le scintillement des dents des vacanciers, des rires de piécettes qui sautent dans les vagues. Du côté face, le prix à payer. Mais moi, je sais que la fraîcheur ne se trouve pas dans la baignade, le long de plages aux noms de décors en carton-pâte – Castel, Opéra, Beau Rivage… Elle se niche miroirs. Une cartographie secrète de chemins de traverse qui me fait parcourir chaque piste de biais. Un drôle de dahu aux yeux plissés, pour mieux distinguer l’entrée des souterrains vers les friches du passé. Des correspondances entre ici et là-bas, pour trouver en chaque chose de quoi ranimer son univers: les tuiles génoises de la cathédrale Sainte-Réparate ; de quoi se forger une carapace colorée. Les accents occitans du marché Saleya, plus faciles à apprendre que le français. Les sentiers naturels de la Méditerranée où cueillir les asperges sauvages, les champignons. Ces fruits secs que Nonna ramasse puis tresse à chaque Toussaint: un gâteau pour ruminer le souvenir des disparus. La recette de sa mère et de sa mère avant elle. Et celle encore avant. Une poupée gigogne grosse jusqu’à la dernière génération, jusqu’à la dernière fille. Jusqu’à moi.

Arrivée à Nice. Sous son parasol, la pin-up un peu crispée est déjà enceinte. Je n’ai jamais vu ma grand-mère en maillot de bain, à part sur cette photographie. C’est peu de temps après qu’elle a dû se transformer en une mère à blouse fleurie. À soucis. Trois autres grossesses ont suivi. La dernière s’est terminée dans une clinique clandestine: le nom du docteur s’échangeait sous les tabliers dans le quartier. Un mois de salaire, c’était le prix à payer: ça valait mieux qu’une autre bouche à nourrir. Qu’un autre souci.

Les paysages ne sont jamais que de simples panoramas, de gentils tableaux à contempler: ils sont des palimpsestes; des livres ouverts constitués de couches successives, de strates à gratter pour accéder à l’épaisseur de la mémoire. Ils en sont les supports, l’immuable matière. Et à Nice, peut-être plus qu’ailleurs, les paysages s’étalent un peu en dedans, un peu au dehors. Ils invitent à un perpétuel voyage dans l’espace et dans le temps. Une histoire instable de bascule – un coup italienne, un autre française – qui fait qu’à l’heure lascive du crépuscule, quand l’air embaume la mer, le jasmin et le mimosa, la lumière rasante découpe en ombres élargies une éclipse. Un profil spectral: la silhouette d’une colline oubliée. Une épiphanie quand, aux ruelles ocres du Vieux Nice, se superposent celles d’un village fané : Montecchio. Petit tas de maisons perchées au-dessus de la plaine jaune du Tibre. La masure des origines est en recul de la place du lavoir. Tout en escaliers, toute maigre. À peine une tranche de maçonnerie coincée entre ses voisines: de quoi se tenir chaud l’hiver et cancaner ensemble comme des commères. À l’étage, des mains ouvrent une fenêtre: celles de la femme du frère aîné. Celui qui a tout gardé. Les pâtures, les blés. Même la cruche que Nonna devait remplir plusieurs fois par jour à la fontaine. Au mur nu de la pièce à vivre, près du poêle, une photo

Des cartes de scopa. Àce jeu, les cartes les plus fortes sont les denari. Les deniers que l’on passe son temps à compter; des sous qui ressemblent à des soleils. Cet argent pour lequel on quitte son pays, avec le sale espoir de finir un jour pire qu’un patron. LaFortuna que l’on recherche, les yeux fiévreux, dans leur divination, n’est pas faite d’autre chose.

Difficile de dater cette photo. Michèle est-elle à Paris ou en vacances quelque part? Elle semble très heureuse, sûre de son charme. Était-elle déjà mariée? Ou bien était-ce juste avant son mariage? Qui a pris la photo? Je ne vois que son beau sourire, sa coiffure à la mode, sa robe légère, ses lunettes noires qui lui donnent un air de starlette et cette légèreté qu’elle n’affichait pas souvent.

Véronique Tadjo

La Beaut De Ma M Re

Née d’une mère française et d’un père ivoirien à Paris en 1955, Véronique Tadjo a grandi et fait ses études à Abidjan. Elle s’est ensuite spécialisée en Littérature et civilisation noire-américaine à la Sorbonne et à Howard University. Grand Prix littéraire d’Afrique noire pour Reine Pokou (Actes Sud, 2005), elle est aussi l’auteure de En compagnie des hommes, sur l’épidémie d’Ebola (Don Quichotte/Seuil, 2017).

Plus que tout, elle craignait le courroux du Seigneur et se drapait de charité chrétienne. Étrangement, pour une femme de négoce, son rapport à l’argent était empreint de culpabilité. À quel moment Michèle sentit-elle l’appel de l’art? Très tôt. À force de persuasion, elle parvint à convaincre ses parents de la laisser suivre sa vocation artistique. Après une formation dans l’atelier de Maître Yencesse à Dijon, où elle étudia le modelage et la sculpture, elle entra en 1950 à l’École des arts appliqués à l’industrie de Paris. Pour la première fois, elle goûta à la liberté. Certes, elle n’avait pas encore trouvé sa voie, se demandant comment elle allait parvenir à ne pas se laisser écraser par le poids de l’histoire quand tout semblait avoir déjà été dit. Les grands maîtres de l’art sont de redoutables gardiens du temple. C’était une provinciale, ça se voyait comme un nez au milieu de la figure. Et justement, elle avait un grand nez. Je n’ai jamais su de qui elle l’avait hérité, ce nez aquilin.

Ma mère ne faisait pas partie du monde parisien si sûr de lui – à la fois ouvert et fermé. Si elle savait qu’elle ne serait jamais une vraie parisienne, ce qui l’attirait par-dessus tout, c’était l’aspect cosmopolite de la grande ville, sa diversité, sa variété. Plusieurs registres, plusieurs temps, plusieurs latitudes. C’était l’époque où les habitants accueillaient à bras ouverts des étudiants noirs venant des colonies d’Afrique, alors que le vent des indépendances se levait. Bouillonnement d’idées nouvelles, lieu de rencontres, foisonnement de cultures, revendications, affirmations, Paris était tout cela à la fois.

Un jour, elle rencontra un jeune étudiant qui avait l’habitude de prendre ses repas au même restaurant universitaire qu’elle. Joseph Ehoué Tadjo venait de loin, d’un petit village appelé Maféré, dans le Sud-Est de la Côte d’Ivoire. Sa famille, son village avaient réuni assez d’argent pour lui payer un billet d’avion et plusieurs mois dans une chambre d’hôtel, en attendant qu’une fois sur place, le gouvernement français lui accorde une bourse d’études. C’est vrai que Joseph était beau.

Les pommettes hautes, le visage lisse, la peau d’un noir sans faille. Il portait en lui les promesses d’un ailleurs en plein devenir. Quelque chose d’indéfinissable et d’extrêmement séduisant. Il paraît que ce fut Michèle qui déposa son plateau à côté du sien. Elle avait juste dix-huit ans et elle découvrait le milieu des étudiants africains, la musique, la nourriture, les préoccupations politiques, les enjeux de tout un continent.

Ils se marièrent en 1952, pressés par la naissance imminente de leur fils. Je vins après, au moment où Joseph pensait déjà à rentrer dans son pays. Empêtrée dans la maternité à ce moment-là, Michèle a dû savoir qu’elle avait manqué sa chance. Paris commençait déjà à lui échapper. Quatre ans plus tard, ce fut le grand départ pour l’Afrique.

À Abidjan, tout l’étonna, la déstabilisa, la fascina. Si elle était anonyme en France, en Côte d’Ivoire, sa peau ne la quitta plus jamais. Elle chercha à trouver sa place au sein d’une société encore divisée par le lourd passé colonial. Et elle partagea l’euphorie et l’effervescence de l’indépendance. Fête de tous les espoirs. Elle entreprit de nouvelles études aux Beaux-Arts d’Abidjan tout en préparant le diplôme supérieur français de peinture, qu’elle obtint à Marseille. Elle travailla pendant une période pour le laboratoire botanique de l’Université d’Abidjan, où elle produisit des planches du répertoire des graminées locales. Elle dessinait avec précision jusqu’à la moindre rainure des feuilles, la forme délicate des plantes et leur beauté fragile.

C’est alors qu’un événement bouleversa sa vie d’artiste : le premier Festival mondial des Art nègres de Dakar, auquel elle assista avec son mari en 1966. Manifestation artistique internationale fulgurante de créativité. Célébration du talent des artistes noirs, sur le continent et dans la diaspora. Ce fut le déclic, l’éblouissement, l’inspiration qu’elle avait tant cherchée. Elle découvrait une communauté de pensée et d’action à la jonction de deux mondes, à la croisée des chemins. Elle se jura de trouver la fusion.

ÀParis dans l’appartement de la rue Fourcroy (17e) que mes grands-parents avaient mis à la disposition du jeune couple. Patrice, mon frère doit avoir trois ans, moi, pas encore un an. Notre père a fini ses études de droit et d’économie, et nous allons bientôt partir pour Abidjan. Quelles étaient les activités de Michèle? Avait-elle le temps de s’adonner à son art ou était-elle entièrement consumée par sa vie de mère?

Michèle voulait s’assurer que son mari pourrait voyager avec elle en France, qu’ils pourraient passer des vacances ensemble. Mais en réalité, mon père était très casanier. Il n’avait qu’une envie, se rendre à Maféré, son village dans le Sud de la Côte d’Ivoire. C’est là-bas qu’il se sentait bien, là qu’il était le plus détendu. Qu’est-ce qu’un couple?

Massi, ma grand-mère maternelle, à Odessa en 1916. Portrait réalisé à mes douze ans, dans un atelier réputé de Téhéran, situé juste en face de l’ambassade des États-Unis et réquisitionné lors de la crise des otages américains car ses fenêtres donnaient sur le jardin de l’ambassade.

Sorour Kasmaï

VSIO TITCHIOT !

Romancière, traductrice, éditrice, Sorour Kasmaï est née à Téhéran. À la suite de la Révolution islamique de 1979, elle a quitté clandestinement son pays. Un périple qu’elle raconte dans La Vallée des Aigles. Autobiographie d’une fuite (Actes Sud, prix Adelf 2006). Elle est également l’auteure de trois autres ouvrages dont le dernier s’intitule Ennemi de Dieu (Robert Laffont, 2020).

Sa photo trônait sur le buffet de l’appartement de Téhéran, un peu passée, légèrement jaunâtre, mais toujours élégante et stoïque, symbole d’un temps révolu où tout était à sa place. Les cheveux en arrière, la raie au milieu, la forme du front identique au mien… J’aimais son regard énigmatique et triste… Quel âge avait-elle? Dix-neuf ans, m’avait-on répondu. Dixneuf ans! Nous avions le même âge. Même âge et même coiffure. Elle s’appelait Massi, ma grand-mère maternelle.

J’ai fui l’Iran quatre ans après la Révolution islamique de 1979. J’ai quitté le pays à dos de cheval, via les montagnes du Nord-Est iranien, avant de franchir clandestinement la frontière turque. Ma fuite a duré trois mois et connu beaucoup de péripéties 1

Tout a commencé un soir, lorsque retentit la sonnerie de la porte. Ils étaient venus m’arrêter en me présentant le mandat sur lequel je ne pus qu’apercevoir le cachet «individu suspect et dangereux ». Ils mirent ensuite l’appartement sens dessus dessous, à la recherche de je ne sais quelle littérature subversive. Une demi-heure plus tard, ordre me fut donné de prendre quelques affaires «car je n’allais pas m’en tirer comme ça». Je compris tout de suite que c’était la fin. La fin de la Révolution, la fin de nos rêves, la fin de l’innocence. En quittant l’appartement, je me retournai pour y jeter un dernier coup d’œil. Ma mère n’était pas là pour me dire adieu, mais il y avait Massi, debout sur le buffet, le regard embué et triste. Je la fixai. Comprenait-elle ce qui m’arrivait? Elle qui avait le même âge que moi. Mais les pâsdârs claquèrent précipitamment la porte avant de me faire dévaler l’escalier.

Une semaine plus tard, ramenée à l’appartement sous escorte policière, je me tenais à nouveau debout au milieu de la pièce, face à un dilemme insoluble: servir d’appât pour faire 1La Vallée des Aigles, autobiographie d’une fuite, Actes Sud, 2006.

Massi avait fui le pays en compagnie de son père, trois ans après la Révolution constitutionnelle de 1906. Après avoir ordonné de tirer à coups de canon sur le Majles (l’assemblée des députés du peuple), le souverain Qadjar, Mohammad Ali Shah, et une partie de sa cour s’étaient réfugiés en Russie.

Arrivée en septembre 1909 à Odessa, sur les rives de la mer Noire, la famille royale élut domicile dans un palais de style néogothique que les Odessites continuent d’appeler, encore de nos jours, «le Palais du Shah ». Le précepteur des jeunes princes et sa fille Massi, âgée de douze ans, y prirent également leurs quartiers, sans savoir qu’ils y demeureraient plus d’une décennie.

En grandissant, Massi devint l’amie et la confidente de la princesse Khadija, l’accompagnant à l’hippodrome, au théâtre et à l’opéra. Elles y portaient des robes de dentelle, des chaussures à talon et des chapeaux à la mode qu’elles avaient rapportés de leur voyage en Europe. Treize mois durant lesquels la famille royale avait visité Karlsbad, Berlin, Rome, Paris… et goûté aux délices de la vie moderne.

Pourtant, en avril 1914, deux mois avant l’attentat de Sarajevo et l’éclatement de la Grande Guerre, l’ex-Roi avait soudain décidé de rentrer «à la maison ». « Il n’y a pas plus belle et plus accueillante ville au monde qu’Odessa, la cosmopolite.» C’était, à ses yeux, le paradis sur terre. La mer, les palmiers, le parfum épicé des acacias, les voiles blanches des canots… Et puis, surtout, l’escalier monumental dévalant vers le port où s’affairaient les matelots en maillot rayé, à quelques pas de la carcasse brûlée du cuirassé Potemkine, encore présent dans tous les esprits.

Le 17 août 1916, la famille royale se préparait à se rendre au théâtre pour une représentation qui faisait couler beaucoup d’encre: La Mouette de Tchekhov. Au Théâtre impérial, la famille du Shah prit place dans la loge du Tsar et les accompagnateurs dans celle d’à côté. Le beau dignitaire céda à Massi

John Waters

Sale Menteuse

Une romance feel-bad

Roman traduit de l’anglais (États-Unis) par Laure Manceau

Menteuse invétérée, voleuse pathologique, arnaqueuse de génie : Marsha Sprinkle ne compte plus ses ennemis. Certains sont bien déterminés à lui régler son compte et lui faire ravaler ses bobards. À commencer par sa mère et sa fille, son ex-complice lubrique

Daryl et une sautillante bande d’hurluberlus, fétichistes du trampoline, tous lancés à ses trousses. Mais Marsha est intelligente, incroyablement fourbe et celui qui l’attrapera n’est pas encore né.

“Méchant, violent, et obscène ? Outrancier, « rebondissant », et hilarant ? Tous ces qualificatifs s’appliquent au premier roman de John Waters, autoproclamé Pape du trash et Vieux dégueulasse […]. Les mésaventures que vivent ses personnages sont absurdes, grossières, sanglantes, comiques et bizarrement charmantes, tandis que le diabolique John Waters continue de mettre la gomme et plaide malicieusement pour l’acceptation de la différence et l’amour.”

Donna Seaman, Booklist

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Noter

u Après une pause de 19 ans (Dirty Shame, 2004), il signera son retour sur grand écran avec une adaptation de son roman u M. Je-sais-tout : + de 10 000 ex. (AS), parution du Babel en avril 2023

Premier Roman Du Cin Aste Iconique

L’AUTEUR

John Waters est l’auteur de plusieurs livres, dont Role Models (2010), Carsick (2014) et M. Je-sais-tout (2021). Il a également écrit et réalisé plus d’une douzaine de longs-métrages et continue de se produire sur scène dans le monde entier avec ses stand-ups This Filthy World, A John Waters Christmas et dernièrement

The End of the World. Après vingt ans d’absence sur grand écran, il signera son retour à la réalisation avec l’adaptation de Sale menteuse (Liarmouth en VO), dont le tournage est programmé en 2023.

DERNIÈRE PARUTION

Sale menteuse

Marsha Sprinkle n’est pas du genre à perdre une occasion de mentir. C’est pathologique. Embobiner l’emplit de sérénité, la fait se sentir intellectuellement supérieure et, oui, plus jolie. L’escroquerie et le vol comptent également parmi ses péchés mignons. Aidée de son complice et faux chauffeur Daryl, qui travaille pour elle en échange de la promesse de faveurs sexuelles une fois par an, la belle quadragénaire s’est fait une spécialité de subtiliser des valises sur le tapis à bagages de l’aéroport de Baltimore-Washington. Une affaire qui roule, jusqu’au jour où l’un de leurs casses tourne au fiasco. Prise en chasse par la police, Marsha profite de la confusion générale pour se faire la malle, laissant ce débile de Daryl – abstinent depuis douze mois –sur sa faim et terriblement courroucé : c’était jour de paie ! Bien décidé à faire honorer leur contrat, il se lance à ses trousses. Ainsi débute une course-poursuite rocambolesque et décadente à travers le Nord-Est des

États-Unis.

Une traque à laquelle se joignent bientôt

Adora, la mère de Marsha – une chirurgienne plastique pour animaux – et Poppy, sa fille – gérante d’un club illégal de trampoline –, ainsi que ses acolytes fétichistes du rebond. Tous ont un point commun : ils haïssent cette sale menteuse de Marsha et sont fermement déterminés à l’envoyer raconter ses bobards dans l’au-delà.

Mais Marsha est intelligente, incroyablement fourbe et celui qui l’attrapera pour lui faire dire la vérité n’est pas encore né. Vraiment ?

Sexe, crime et règlement de compte familial : tels sont les ingrédients de ce premier roman salement décapant et déconseillé aux âmes sensibles, tout droit sorti de l’esprit brillamment tordu de John Waters. Le cinéaste légendaire et auteur à succès de M. Je-sais-tout signe un livre à son image : hilarant, outrancier, déjanté, pervers, choquant. Tout simplement culte.

J’aimerais tant que tu sois là

Roman traduit de l’anglais (États-Unis) par Marie Chabin

Pour Diana O’Toole, tout se passe à merveille. Elle sera mariée à trente ans, aura eu ses enfants avant trente-cinq et déménagé en banlieue de New York, tout en grimpant les échelons dans le monde impitoyable de la vente d’œuvres d’art. Elle est spécialiste adjointe chez Sotheby’s, où elle s’apprête à faire décoller sa carrière en décrochant la mise aux enchères d’un Toulouse-Lautrec. Elle n’est pas encore fiancée mais à coup sûr son petit-ami, Finn, interne en chirurgie, va faire sa demande pendant leur escapade romantique aux Galápagos – quelques jours avant ses trente ans. Pile dans les temps.

ROMAN

14,5 × 24 CM

352 PAGES

PRIX PRÉVISIONNEL

23,50 €

MISE EN VENTE

3 MAI 2023

978-2-330-17896-3

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PAR L’AUTEURE DE

C’est alors qu’un virus qui semblait si lointain fait son apparition dans la ville et, la veille du départ, Finn lui annonce que tout le personnel est réquisitionné à l’hôpital. Il faut qu’il reste. Tu devrais y aller quand même, insiste-t-il, car ce serait dommage de perdre un séjour non remboursable. Et donc, à contrecœur, elle part.

Mais rien ne se passe comme prévu, tout va de travers. Son bagage est perdu, le wi-fi est quasi inexistant, l’hôtel réservé est fermé à cause de la pandémie et l’île entière confinée et sous couvre-feu. Totalement isolée, Diana doit sortir de sa zone de confort. Elle commence lentement à tisser des liens avec une famille locale quand une adolescente cachant un secret s’ouvre à elle, malgré la méfiance de son père à l’égard des touristes.

Sur l’archipel des Galápagos, où Darwin élabora sa théorie de l’évolution fondée sur la sélection naturelle, Diana se rapproche de cet homme, se met à réfléchir à ses relations, à ses choix, à elle-même – et se demande si, une fois rentrée chez elle, elle aussi aura évolué pour devenir quelqu’un d’entièrement différent…

L’AUTEURE

Jodi Picoult est née en 1966 à Long Island, dans l’État de New York. Après avoir étudié la littérature à Princeton et les sciences de l’éducation à Harvard, elle se consacre à l’écriture à partir des années 1990. Son œuvre, traduite en trente-sept langues, compte vingt-cinq romans, vendus à plus de vingt-trois millions d’exemplaires à travers le monde.

Ont paru chez Actes Sud : La Tristesse des éléphants (2017), Mille petits riens (2018), Une étincelle de vie (2019) et Le Livre des deux chemins (2021).

Noter

u Film en cours d’adaptation par Netflix

“Cette Américaine au succès xxl signe des romans hollywoodiens, au sens noble du terme, attrape son lecteur au collet par une intrigue haletante pour ne plus le lâcher, lui prodiguant rebondissements, émotions et personnages à foison.”

Olivia de Lamberterie, America u Le Livre des deux chemins : 10 000 ex. en édition courante, parution simultanée en Babel u Une étincelle de vie : 27 000 ex. (AS + Babel) u Mille petits riens : 93 000 ex. (AS + Babel) u La Tristesse des éléphants : 60 000 ex. (AS + Babel)

ROMAN

11,5 × 21,5 CM

320 PAGES

PRIX PRÉVISIONNEL

23 €

MISE EN VENTE

3 MAI 2023

978-2-330-17964-9 -:HSMDNA=V\^[Y^:

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