Extrait de "Giuseppe Penone"

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Sous la direction scientifique de Laurent Busine Avec la collaboration de Benjamin Buchloh, Laurent Busine, Daniela Lancioni, Ruggero Penone, Didier Semin Cet ouvrage constitue la première monographie importante consacrée à l’œuvre de Giuseppe Penone, l’un des représentants les plus remarquables de l’Arte povera. Outre la beauté des formes et des matériaux, son travail de sculpteur se caractérise par la force des interrogations qu’il suscite sur la nature et sur l’homme. L’artiste révèle le rythme présent au cœur du cycle naturel de la vie, et l’empreinte du temps sur les êtres et les choses. Sept thématiques développées par Laurent Busine, directeur du Musée des Arts contemporains au Grand-Hornu, délient le fil de l’œuvre : le souffle, le regard, la peau, le cœur, le sang, la mémoire, la parole sont autant d’étapes pour retrouver la place de l’homme dans la sculpture. Suit un entretien entre Benjamin Buchloh, professeur à l’Université d’Harvard, et Giuseppe Penone, permettant une mise en perspective historique de l’œuvre de l’artiste. Didier Semin, professeur à l’École nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris, a bâti, pour sa part, une réflexion sensible à partir d’une œuvre remarquable : l’Arbre des voyelles, exposée de façon permanente au jardin des Tuileries, à Paris. À partir des premiers travaux jusqu’aux pièces récentes, en s’attardant aussi bien sur les sculptures, les dessins, les photographies que sur les écrits encore rarement publiés, la monographie comprend une étude critique due à Daniela Lancioni et un appareil scientifique apportant un éclairage sur l’œuvre entier de Giuseppe Penone et donnant la mesure de la place considérable qu’il tient dans l’art d’aujourd’hui.

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fig. 1 Soffi


Le souffle

L’histoire pourrait débuter ainsi : Sur la plus haute branche, un rossignol chantait. Un oiseau, chanteur admirable, posé sur la branche d’un grand arbre, chante et signale par sa voix aux autres oiseaux de son espèce les limites de son territoire. Ce chant n’est point destiné aux hommes mais, charmé par les trilles, les notes et les éclats de voix, l’un d’entre eux – un poète – écrivit : « Tu n’es pas né pour la mort, oiseau immortel. […] La voix que j’entends cette nuit qui finit L’entendirent naguère, empereur et manant Le même chant peut-être avait trouvé la voie Du cœur triste de Ruth, quand le mal du pays La submergeait de pleurs dans les blés étrangers1. » C’est magie de penser que l’air forme les notes sorties de la gorge du rossignol, et que celles-ci, portées par le vent, nous environnent, présentes et invisibles. Giuseppe Penone, qui a entendu le chant du monde, les rend visibles en faisant sortir une branchette ténue d’une bouche de bronze accrochée à un tronc d’arbre, reproduisant tout à la fois la respiration, la mélodie et l’évolution du chant dans l’espace. C’est sacré de se souvenir du mythe du souffle divin, qui donna la vie à un peu de boue amassée, et de le voir figuré par une autre bouche accolée à une masse de terre informe, non encore façonnée, non pétrie par des mains ou par le destin. Ce sont, seulement, justement, deux éléments juxtaposés, fondateurs de l’humanité légendaire : le souffle et la glaise ; avant la naissance de l’homme, avant même qu’il ne soit dans la conception ; dans le moment où l’acte créateur s’éveille. C’est humain de contempler le volume d’un corps qui respire et rejette dans l’espace l’air qu’il emprunta pour vivre : la masse d’air que nous inspirons et rejetons inlassablement est comme une outre géante sur laquelle s’inscrit le corps qui la génère. Des poumons composés de feuillages, comparables à toutes les autres feuilles, petites ou grandes, dont la nature est pleine, sont aussi la marque de la respiration des hommes, des arbres et de tous les êtres vivants. Tout respire : les arbres, les vents et les animaux, dont l’homme. Que sont les souffles devenus, les notes, les respirations et les vents qui composent l’espace et le monde ? Où continuent-ils de croître ?

Pour certains, une image de l’éternité lorsque le poète les associe, à la succession des êtres vivants, à la brièveté de l’existence du rossignol, à la brièveté de son chant, et que le sculpteur montre tout à la fois la permanence et l’évanescence des notes dans l’air. Pour d’autres, ceux qui font bouger les grands arbres, onduler les brindilles et les feuilles, ceux que rejettent en permanence les poumons insatiables, ils remplissent l’espace, tout comme les haleines blanchâtres dans une fraîche forêt ou les brumes légères lentement soulevées du sol humide. La tendre voix du rossignol et les bourrasques rudes, qui font ployer les arbres et creusent les marbres, sont identiques ; le souffle de l’homme couché sur un dernier lit de feuilles et les poumons gonflés sont identiques et, de même, la bouche collée à la terre un court instant. Ils sont, du corps et de la bouche, les zéphyrs et les autans, les formes invisibles le plus souvent, audibles parfois, palpables toutefois, qui s’élancent dans le ciel où nous continuons de croître. Ils occupent le temps et modifient l’espace, ainsi que les autres manifestations de la vie. Et le sculpteur, et le poète les rendent perceptibles, immobiles un moment, dans une plainte qui réunit l’instant et l’éternité : cette voix, ce souffle, l’entendirent naguère, empereur et manant ; dans un chant qui rassemble l’individu et l’éternité : Souffle de feuilles ; Respirer l’ombre.

1 John Keats, « Ode à un rossignol », mai 1819.

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fig. 9 Soffio



fig. 24 Albero fotografato dall’artista nel corso di un viaggio in Sardegna



fig. 89 Pelle di foglie


fig. 90 Pelle di foglie


fig. 119 Progetto per aderire agli alberi


fig. 120 Zucche


fig. 221 Malevitch


fig. 222 Tre parole dette nello stesso momento


Sous la direction scientifique de Laurent Busine Avec la collaboration de Benjamin Buchloh, Laurent Busine, Daniela Lancioni, Ruggero Penone, Didier Semin Cet ouvrage constitue la première monographie importante consacrée à l’œuvre de Giuseppe Penone, l’un des représentants les plus remarquables de l’Arte povera. Outre la beauté des formes et des matériaux, son travail de sculpteur se caractérise par la force des interrogations qu’il suscite sur la nature et sur l’homme. L’artiste révèle le rythme présent au cœur du cycle naturel de la vie, et l’empreinte du temps sur les êtres et les choses. Sept thématiques développées par Laurent Busine, directeur du Musée des Arts contemporains au Grand-Hornu, délient le fil de l’œuvre : le souffle, le regard, la peau, le cœur, le sang, la mémoire, la parole sont autant d’étapes pour retrouver la place de l’homme dans la sculpture. Suit un entretien entre Benjamin Buchloh, professeur à l’Université d’Harvard, et Giuseppe Penone, permettant une mise en perspective historique de l’œuvre de l’artiste. Didier Semin, professeur à l’École nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris, a bâti, pour sa part, une réflexion sensible à partir d’une œuvre remarquable : l’Arbre des voyelles, exposée de façon permanente au jardin des Tuileries, à Paris. À partir des premiers travaux jusqu’aux pièces récentes, en s’attardant aussi bien sur les sculptures, les dessins, les photographies que sur les écrits encore rarement publiés, la monographie comprend une étude critique due à Daniela Lancioni et un appareil scientifique apportant un éclairage sur l’œuvre entier de Giuseppe Penone et donnant la mesure de la place considérable qu’il tient dans l’art d’aujourd’hui.

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