Le Fer et les Fleurs : Etienne-Nicolas Méhul - Liseuse

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Docteur en histoire de l’EHESS (Paris), Étienne Jardin effectue des recherches sur la vie musicale française au xixe siècle. Responsable scientifique des publications et des colloques au Palazzetto Bru Zane, il a dirigé les ouvrages Quatre siècles d’édition musicale (Peter Lang, 2014), Archives du concert (Actes sud, 2015) et Music and War from French Revolution to WWI (Brepols, 2017).

ISBN 978-2-330-08019-8

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ACTES SUD DÉP. LÉG. : SEPT. 2017 40 e TTC France www.actes-sud.fr

LE FER ET LES FLEURS : ÉTIENNE-NICOLAS MÉHUL (1763-1817)

Directeur scientifique du Palazzetto Bru Zane (Venise), docteur en musicologie de Paris IV-Sorbonne et ancien pensionnaire de l’Académie de France à Rome (Villa Médicis), Alexandre Dratwicki est spécialiste de la musique française du xixe siècle. Diplômé du Conservatoire de Paris (esthétique), il a enseigné l’histoire de la musique dans plusieurs universités et a été producteur à Radio France. La publication de sa thèse, Un nouveau commerce de la virtuosité (1780-1830), a reçu le prix des Muses 2007 de l’essai. Il a dirigé plusieurs ouvrages collectifs dont Le Concours du prix de Rome de musique (1803-1968) chez Symétrie (2011).

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Né sous l’Ancien Régime, Étienne-Nicolas Méhul (1763-1817) a traversé les tumultes de la Révolution et les ors de l’Empire pour mourir à l’aube de la Restauration. Sa musique est un parfait exemple de Sturm und Drang à la française : classique par ses formes, elle aspire à une nouvelle esthétique, celle de l’expression du sentiment dans toute sa versatilité. Le style de Méhul balaye ainsi une palette de coloris très large, allant de la pompe martiale (Adrien, Horatius Coclès) à l’affliction (Mélidore et Phrosine, Euphrosine), en passant par le religieux (Joseph), le pittoresque (Les Deux Aveugles de Tolède) et même l’exotisme de l’ossianisme, alors en pleine vogue (Uthal). Si Méhul paraît plus à l’aise dans le style tragique, il laisse cependant de nombreux ouvrages légers. À l’occasion du bicentenaire de sa mort, cet ouvrage collectif entend réaffirmer l’importance d’un artiste qui fut aussi membre actif du Conservatoire de Paris et de l’Institut de France. Des facettes encore méconnues de son catalogue y sont mises en lumière, notamment la musique de scène des Hussites, ses quatre ballets-pantomimes ou encore ses symphonies tardives. Des statistiques précises donnent une image exacte de sa présence dans la vie musicale des années 1780-1815. Enfin, l’analyse du regard que portèrent sur lui Berlioz, Cherubini et Castil-Blaze permet d’affiner les spécificités de son génie et les limites de ses expérimentations sonores, et de comprendre comment, de compositeur, il devint symbole.

Le Fer et les Fleurs : Étienne-Nicolas Méhul (1763-1817) sous la direction d’Alexandre Dratwicki et Étienne Jardin

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DANS LA MÊME COLLECTION lettres de charles gounod à pauline viardot,

Actes Sud/Palazzetto Bru Zane, 2015. (xviiie-xixe siècle),

archives du concert, la vie musicale française à la lumière de sources inédites

Actes Sud/Palazzetto Bru Zane, 2015. reynaldo hahn, un éclectique en musique,

Actes Sud/Palazzetto Bru Zane, 2015. Actes Sud/Palazzetto Bru Zane, 2015. ce que dit la musique, Actes Sud/Palazzetto Bru Zane, 2016. nouvelles lettres de Berlioz, de sa famille, de ses contemporains, Actes Sud/Palazzetto Bru Zane, 2016. Camille Saint-Saëns – Jacques Rouché, correspondance (1913‑1921), Actes Sud/Palazzetto Bru Zane, 2016. Camille Saint-Saëns, le compositeur globe-trotter (1857‑1921), Actes Sud/Palazzetto Bru Zane, 2017. le concerto pour piano français à l’épreuve de la modernité,

© Actes Sud/Palazzetto Bru Zane, 2017 pour la présente édition isbn 978‑2-330-08019-8

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Une collection coéditée par Actes Sud et le Palazzetto Bru Zane. Le Palazzetto Bru Zane – Centre de musique romantique française a pour vocation de favoriser la redécouverte et le rayonnement international du patrimoine musical français du grand xixe siècle (1780‑1920). La collection Actes Sud/Palazzetto Bru Zane – ouvrages collectifs, essais musicologiques, actes de colloques ou écrits du xixe siècle – donne la parole aux acteurs et aux témoins de l’histoire artistique de cette époque ainsi qu’à leurs commentateurs d’aujourd’hui.

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Sigles : A-KN : Augustiner-Chorherrenstift, Klosterneuburg A-Wgm : Gesellschaft der Musikfreunde, Vienne A-Wn : Österreichische Nationalbibliothek, Vienne A-Wsjm : Sankt Josef zu Margareten, Vienne A-Wsfl : Sankt Laurenz am Schottenfeld, Vienne CZ-Pkřiž : Chevaliers de la croix avec l’étoile rouge, collection de

musique, Prague CZ-Pnm : Musée national, musée Tchèque de la Musique, départe‑ ment de l’histoire de la musique, Prague D-B : Staatsbibliothek zu Berlin Preußischer Kulturbesitz, Mu­ sikabteiliung D-Mf : Bayerische Staatsbibliothek, München D-NATk : Benediktinerabtei Niederaltaich Sankt Mauritius, Niede‑ ralteich F-BO : Bibliothèque Mériadeck (Bordeaux) F-Pan : Archives nationales F-Pc : Bibliothèque du Conservatoire F-Pn : Bibliothèque nationale, Département de la Musique F-Po : Bibliothèque-Musée de l’Opéra SK-BRnm : Slovenské Národné Múzeum, Bratislava US-NYp : New York Public Library

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La musique est, de tous les arts, le plus généralement cultivé, le plus universellement aimé, et cependant le moins connu dans les causes qui produisent ses plus grands effets dramatiques. De là vient que tout le monde en parle et que peu de personnes en raisonnent juste. Les uns s’égarent en lui accordant trop, les autres s’aveuglent en lui refusant tout. Si tous ceux qui aiment ce bel art, étaient moins ses amants que ses amis, et qu’ils voulussent se donner la peine de l’approfondir avant de le juger, ils seraient bientôt d’accord, et nous ne serions plus témoins des querelles interminables qui les divisent, mais soit orgueil ou paresse les hommes aiment mieux disputer que s’instruire. Au milieu de ces débats, de ces partis dont ils sont tour à tour l’idole ou la victime, pourquoi les compo­ siteurs gardent-ils le silence ? ne sont-ils pas dépositaires des secrets de leur art ? n’en doivent-ils pas le tribut ? Lorsque l’opinion les place à une certaine hauteur, c’est pour être dirigée par eux, et les rendre responsables des progrès de l’erreur. Attendront-ils pour élever la voix, que tous les genres confondus par l’ignorance aient corrompu le goût et précipité l’art dans les deux cahots des systèmes ? (Nota : Encore me plaindrais-je moins de l’ignorance que de l’erreur. La première est docile et ne refuse aucune impression ; l’autre décide en souveraine et dans les impressions, choisit toujours les pires. La première ne fait ni bien ni mal, la seconde produit un mal certain, l’autre enfin ne fait point avancer l’art, mais l’autre la recule et l’embrouille, ce qui est plus fâcheux que s’il n’existait pas. Dans le premier cas on en serait quitte pour ne rien savoir encore, dans le second on sait tout ce qu’il faut pour s’empêcher d’apprendre quelque chose.) Alors il ne sera plus temps, et malgré leurs efforts, ils seront entraînés par le torrent qu’ils auront laissé déborder. 9

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Je suis loin pourtant d’exiger qu’ils consacrent entièrement leurs veilles à neutraliser par leurs écrits, l’influence du mauvais goût et les caprices de la mode. Le bien faire est préférable au bien dire, et une bonne partition prouvera toujours plus que de bons préceptes. (Nota : On me demandera ce que j’entends par une bonne partition, car l’esprit de Système dira toujours que nul n’aura d’esprit que nous et nos amis. Une bonne partition sera celle que l’opinion aura jugée telle, quand l’opinion sera éclairée comme je vais le dire plus bas, on pourrait même assurer d’avance que la bonne partition est celle dont les effets plaisent même à l’ignorance et déplaisent à l’erreur.) Cependant, je voudrais que lorsqu’un ouvrage est destiné à voir le jour, il fut toujours accompagné d’un examen dans lequel les compositeurs rendraient un compte détaillé de leurs intentions, des moyens qu’ils ont employés pour les exprimer, des principes qui les ont dirigés, des règles qu’ils ont suivies, et des convenances qu’ils ont dû observer, par rapport au genre qu’ils ont traité. De pareils écrits forme‑ raient à la longue une poétique musicale, dans laquelle on apprendrait à distinguer le style qui convient à chaque genre en particulier, et même aux ouvrages de même genre qui ne diffèrent entre eux que par des nuances plus ou moins fortes. Cette poétique aurait surtout l’avantage de n’être pas l’ouvrage d’un seul homme. Tous les artistes étant appelés à l’enrichir du tribut de leur savoir, l’influence des écoles, des préjugés nationaux et des hommes à la mode se neutraliseraient. Le concours de toutes les opinions ferait connaître la vérité, et la vérité une fois connue fixerait les opinions, qui toutes ensemble constituent ce que je nomme l’Opinion cette Reine du Monde qui seule a le droit de décider si une partition est bonne ou mauvaise. N’en doutons pas ; si depuis la naissance de la musique dramatique jusqu’à nos jours, les musiciens célèbres avaient suivi la marche que je propose, nous ne serions pas dans cet état de mobilité qui égare les artistes et les amateurs. (Nota : L’anarchie dans les arts produit toujours la tyrannie du mauvais goût, parce que celui-ci prononce toujours hardiment tandis que le talent est toujours modeste. La multitude se déclare pour celui qui décide, et c’est alors que l’erreur trompe l’ignorance. Cela n’arriverait pas si chaque juge était obligé de motiver ses arrêts, si chaque compositeur développait ses motifs.) Les secrets du génie se retrouveraient dans la pensée écrite des grands hommes, et cet immense testament serait le pal‑ ladium du bon goût. En le méditant, le musicien philosophe soulèverait 10

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le voile qui cache les causes qui ont concouru aux progrès de son art, et pourrait prétendre à l’honneur d’en reculer les bornes. Faisons donc pour nos successeurs, ce que nos devanciers n’ont pas songé à faire pour nous. Formons un fanal de toutes les lumières, il guidera les pas du jeune artiste et répandra son éclat sur les succès de l’artiste consommé. En proposant à tous les compositeurs ce nouveau moyen d’acquérir des droits à la reconnaissance publique, je devrais placer l’exemple à côté du précepte, pour que ceux qui peuvent faire mieux que moi ne soient point arrêtés par la crainte d’innover. Mais des motifs affligeants pour un artiste ennemi de toute espèce d’intrigue et d’esprit de parti, me forcent à garder le silence, pour n’avoir pas la douleur d’entendre dire autour de moi, que sous prétexte de servir mon art, je n’ai cherché qu’un moyen adroit de parler de mes ouvrages. Je laisse donc aux maîtres de toutes les écoles, qui enrichissent nos théâtres de leurs productions, l’honneur de poser les fondements d’un édifice qui s’élèvera d’âge en âge, et qui attestera leur gloire aux siècles futurs. Étienne-Nicolas Méhul (Préface à la partition d’Ariodant, 1799.)

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Introduction Alexandre Dratwicki et Étienne Jardin

Le citoyen Méhul ouvre une route nouvelle parmi les compositeurs 1. L’effigie d’Étienne-Nicolas Méhul (1763‑1817) trône aujourd’hui encore dans de nombreux lieux de musique : que son nom orne une façade, son buste un foyer, son portrait un plafond d’opéra, le compositeur – avec Boieldieu ou Cherubini – symbolise une époque de l’histoire de la musique française. Et ce, alors même qu’il ne fut plus guère joué à peine dix ans après sa mort, si ce n’est à l’occasion des reprises ponctuelles de Joseph tout au long du siècle… et à chaque fois que la France en guerre trembla pour son salut, en entonnant fièrement Le Chant du départ, hymne révo‑ lutionnaire dont l’auteur ne pouvait assurément pas prévoir la longévité 2. Il existe bel et bien un “mythe Méhul”, fût-il nettement moins populaire que les légendes qui entourent Mozart ou Beethoven. Toute cette image‑ rie née de la pensée romantique, cette glorification qui n’existait pas pour les compositeurs baroques, s’appuie sur une passion du xixe siècle pour la vie secrète des artistes et leur destin d’exception. Deux catégories s’op‑ posent cependant : d’un côté les auteurs “maudits” – devenu sourd comme ­Beethoven, mort trop jeune comme Mozart ou malade et incompris comme  1.  Gazette nationale ou Le Moniteur universel, 21 floréal an ii (10 mai 1794), p. 937.  2.  La popularité tardive du Chant du départ est notamment attestée par son usage dans le film d’Yves Robert La Guerre des boutons (1962) : à plusieurs reprises, les enfants entonnent cet hymne après leurs batailles. En mai 1974, Valéry Giscard d’Estaing clô‑ ture par ailleurs ses meetings de campagne en faisant chanter ce même chant (voir, par exemple, l’extrait du journal télévisé de l’ORTF du 6 mai 1974 sur le site de l’INA : http:// www.ina.fr/video/I04145573/valery-giscard-d-estaing-le-chant-du-depart-video.html).

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Schubert – ; de l’autre des figures plus lisses, mais dont l’œuvre est brandie en étendard flamboyant d’une école nationale – Weber en Allemagne, Ros‑ sini en Italie, Méhul (notamment) en France. Aux uns, l’anecdote sombre et personnelle, aux autres, la synthèse lumineuse et universelle. Méhul est élu très tôt pour siéger dans ce cénacle des immortelles gloires françaises. Certainement parce que les deux grandes “confréries” artistiques qu’il par‑ ticipa à créer en 1795 – la classe des Beaux-Arts 1 de l’Institut de France et le Conservatoire de musique – avaient à disposition de quoi assurer la postérité de leurs membres les plus prestigieux : la première définissait le Beau quand la seconde s’employait à l’enseigner. Et, autour de 1815, le passé de la France postrévolutionnaire était bien trop récent pour qu’on se prive de béatifier immédiatement après sa mort un compositeur de la stature de Méhul. De là ces portraits gravés ou imprimés, ces médailles, ces bustes, ces blasons augustes qui ornèrent et ornent toujours nombre d’édifices musicaux. Le centenaire de la Révolution, et ceux de la naissance puis de la mort de Méhul relancèrent périodiquement l’intérêt pour son souvenir. Né sous l’Ancien Régime, l’homme a traversé les tumultes de la Révo‑ lution et les ors de l’Empire pour mourir à l’aube de la Restauration. Sa musique est un parfait exemple de Sturm und Drang à la française (appelons-le préromantisme “tourmenté”) : classique par ses formes, elle aspire à une nouvelle esthétique, celle de l’expression du sentiment dans toute sa versatilité, et plus volontiers dans ses méandres torturés ou pathé‑ tiques 2. Le style de Méhul balaye ainsi une palette de coloris très large, allant de la pompe martiale (Adrien, Horatius Coclès) à l’affliction intime (Mélidore et Phrosine, Euphrosine), en passant par le religieux (Joseph), le pittoresque (Les Deux Aveugles de Tolède) et même l’exotisme de l’ossia‑ nisme, alors en pleine vogue (Uthal). Si Méhul paraît plus à l’aise dans le style tragique, il laisse aussi quelques ouvrages légers (La Dansomanie, Une folie, La Journée aux aventures, etc.). À l’occasion du bicentenaire de sa mort, cet ouvrage collectif entend réaffirmer l’importance de cet artiste  1.  Plus précisément : la classe “Littérature et Beaux-arts” de 1795 à 1803, qui se scinde en deux classes à partir de cette date. L’actuelle Académie des beaux-arts prend sa forme moderne en 1816.  2.  Pour une contextualisation de l’émergence du “sentiment romantique”, voir notam‑ ment : Barthélémy Jobert et Frédéric Dassas, De la rhétorique des passions à l’expression du sentiment, Paris : Cité de la Musique, 2003.

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Introduction

en mettant notamment en lumière des facettes restées méconnues de son catalogue : par exemple la musique de scène des Hussites, ses quatre ballets-pantomimes ou encore ses symphonies tardives. Avant de poursuivre, il convient de rendre un hommage tout particulier à Elizabeth Bartlet dont les travaux musicologiques consacrés à Méhul furent non seulement pionniers, mais dépassèrent de loin le simple travail de bio‑ graphe. Une thèse soutenue en 1982 1 (et éditée en 1999 2) fut prolongée par de nombreux articles dont l’un est reproduit dans le présent volume, toujours d’actualité presque trente ans après sa première publication 3. Avant elle, la musicographie s’est intéressée avec une constance méritée à la figure de l’artiste, la notice nécrologique de Quatremère de Quincy 4 (1817) – dont on sait désormais qu’elle fut largement préparée par Cherubini – inaugurant cette longue liste. Il faudrait ensuite citer les articles de dictionnaires ou d’encyclopédies de Choron et Fayolle 5 (1811), Fétis 6 (1864) et Radiguer 7 (1931), et surtout les ouvrages aux ambitions diverses de Vieillard 8 (1859), Pougin 9 (1889) et Brancour 10 (1910). À part, dans sa forme et son ton, l’article de Berlioz inséré dans Les Soirées de l’orchestre mérite l’attention 11.  1.  M. Elizabeth C. Bartlet, Étienne Nicolas Méhul and Opera during the French Revolution, Consulate, and Empire: a source, archival, and stylistic study, Ph. D., University of Chicago, 1982.  2.  M. Elizabeth C. Bartlet, Étienne-Nicolas Méhul and Opera: Source and Archival Studies of Lyric Theatre during the French Revolution, Consulate and Empire, Heilbronn : Lucie Galland, 1999.  3.  M. Elizabeth C. Bartlet, “Méhul et Bonaparte”, Ardenne Wallonne. Cercle d’histoire régionale de la pointe de Givet et terres limitrophes, 37 et 38 (1989). Cet article est repris dans le présent ouvrage.  4.  Antoine-Chrysostome Quatremère de Quincy, “Funérailles de M. Méhul”, Séance de l’Académie royale des beaux-arts 20 octobre 1817, Paris : Institut royal de France, [1817].  5.  Alexandre Choron et François Fayolle, “Méhul”, Dictionnaire historique des musiciens, t. 2, Paris : Valade, 1811, p. 38.  6.  François-Joseph Fétis, “Méhul”, Biographie universelle des musiciens, t. 6, Paris : FirminDidot, 1864, p. 62.  7.  Henri Radiguer, “É.-N. MÉHUL”, Encyclopédie de la musique et Dictionnaire du Conservatoire, t. 3 : Histoire de la musique. xviiie et xixe siècles. France, sous la direction d’Albert Lavignac et Lionel de La Laurencie, Paris : Librairie Delagrave, 1931, p. 1630‑1639.  8.  Pierre-Ange Vieillard, Méhul, sa vie et ses œuvres, Paris : Ledoyen, 1859.  9.  Arthur Pougin, Méhul, sa vie, son génie, son caractère, Paris : Librairie Fischbacher, 1889.  10.  René Brancour, Méhul, Paris : Henri Laurens, ca 1910.  11.  Il est, pour cette raison, reproduit in extenso dans le présent ouvrage.

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Plus près de nous, Méhul est fréquemment mentionné dans les écrits des musicologues spécialistes de son temps, notamment Jean Mongrédien, Patrick Taïeb, Michel Noiray, David Charlton, Mark Everist, etc. En 2005, enfin, paraît une nouvelle biographie signée Adélaïde de Place 1.

Portrait de Méhul attribué à Antoine Gros, 1799 © Musée Carnavalet, Histoire de Paris

1.  Adélaïde de Place, Étienne-Nicolas Méhul, Paris : Bleu nuit, 2005.

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Méhul et la vie politique C’est précisément à Adélaïde de Place que revient la tâche d’initier la pre‑ mière partie de ce livre, évoquant Méhul dans son contexte historique. Au premier article consacré à la période révolutionnaire répond la réédition du texte d’Elizabeth Bartlet sur les rapports entre Méhul et Napoléon. Ces deux études montrent la parfaite capacité de Méhul à épouser les courbes des revirements politiques sans jamais renier sa personnalité artistique. Fut-il réellement le chantre le plus zélé de la Révolution ? Son Chant du départ, hymne patriotique à la mélodie entêtante, est pour beaucoup dans cette image d’Épinal que la peinture romantique a même immortalisé. Il est en tout cas certain que le compositeur ne rechigna jamais à l’ouvrage pour fournir des pièces de circonstance honorant tel ou tel événement, et selon des contingences pragmatiques souvent contraignantes 1. La musique de plein air, en particulier, requérait des effectifs instrumentaux souvent limités aux instruments à vent dont il fallait parfaitement connaître l’étendue et surtout les limites. C’est au Conservatoire que Méhul put se familiariser avec la spécificité de chaque instrument, non pas comme élève, mais comme inspecteur des classes. Méhul et les institutions Âgé de trente ans, Méhul est nommé à l’Institut national de musique – qui n’est pas encore tout à fait le Conservatoire – le 21 novembre 1793. Il y occupera un rôle essentiel, tant dans la vie quotidienne de l’école que dans le maintien de l’exigence élevé de ses objectifs. Les documents d’ar‑ chives rassemblés par Constant Pierre 2 et leur dépouillement méticuleux par Frédéric de La Grandville en témoignent. Et c’est sous le titre glorifiant d’inspecteur que Méhul agira, selon les modalités décrites dans ce livre par Diane Tisdall. Mais il reste à l’heure actuelle curieusement difficile de savoir s’il exerça pleinement une activité de professeur de composition.  1. Voir notamment : Laura Mason, Singing the French Revolution. Popular Culture and Politics, 1787‑1799, Ithaca : Cornell University Press, 1996.  2.  Constant Pierre, Le Conservatoire national de musique et de déclamation, documents historiques et administratifs recueillis ou reconstitués, Paris : Imprimerie nationale, 1900.

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Comme l’écrit Frédéric de La Grandville : “au Conservatoire, il est établi par les trois règlements de 1796, 1800 et 1808 que « les inspecteurs sont des compositeurs ». Certes, Gossec, Méhul et Cherubini ont composé (Le Sueur a été démis en 1802), mais Gossec a seul enseigné la composition au Conservatoire. Méhul et Cherubini se consacrent à l’inspection des classes, hors de mineures exceptions.” Si on ne lui connaît pas de véri‑ table classe avant 1816, on sait en revanche qu’il forma assidûment au moins un élève, et pas des moindres : Louis-Ferdinand Hérold, le futur auteur de Zampa et du Pré aux clercs. C’est grâce à l’enseignement de Méhul qu’Hérold décroche brillamment le prix de Rome en 1812 avec sa cantate La Duchesse de La Vallière 1. Que Méhul ait été le professeur idéal pour obtenir ce prix ne fait aucun doute car, à l’instar de Gossec et au contraire de Le Sueur et Cherubini, Méhul siège au sein de la classe des beaux-arts de l’Institut de France depuis sa création en 1795 2 : il assiste aux délibérations plénières 3 et juge chaque année les candidats du concours (à partir de 1803 4). Si l’occupa‑ tion d’un académicien n’est pas aussi prenante que celle d’un inspecteur du Conservatoire, certaines tâches au long cours requièrent toutefois un réel engagement. Hormis l’organisation et l’évaluation du prix de Rome, c’est surtout la publication collégiale d’un Dictionnaire de l’Académie des beaux-arts qui va harasser Méhul pendant de longues années, entre 1810 et 1817 5. Car l’homme n’est pas du genre à refuser la besogne, comme l’explique Louise Bernard de Raymond. D’autant qu’on lui sait une plume solide et facile. Il avait d’ailleurs été sollicité pour la rédaction  1.  Hérold, pendant son séjour à la Villa Médicis, sera particulièrement impatient de connaître le jugement de Méhul sur les œuvres qu’il enverra chaque année à Paris. Voir Alexandre Dratwicki (dir.), Hérold en Italie, Lyon : Symétrie-Palazzetto Bru Zane, 2009.  2.  Lire à ce sujet : Marie-Pauline Martin, “Ouvrir le prix de Rome à la musique ou l’émulation des arts réunis : enjeux et réalité d’une idée républicaine (1789‑1803)”, Le Concours du prix de Rome de musique (1803‑1968), sous la direction d’Alexandre Dratwicki et Julia Lu, Lyon : Symétrie-Palazzetto Bru Zane, 2011.  3.  Dratwicki et Lu (dir.), Le Concours du prix de Rome de musique (1803‑1968). Les 35 entrées d’index de ce livre disent assez l’importance de Méhul dans l’activité de la classe des beaux-arts.  4.  Date de la création du prix de Rome de musique, le prix de l’Institut étant jusqu’alors limité à la peinture, la sculpture, l’architecture et la gravure.  5.  Le projet n’aboutira que partiellement en… 1858.

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du Traité d’harmonie de Catel et des méthodes de chant et de solfège du Conservatoire. À l’Institut, on reconnaît son écriture dans beaucoup de rapports sur les envois de Rome ou dans les comptes rendus de brevets musicaux soumis à la docte assemblée. Cet engagement institutionnel se retrouve d’une autre manière au sein des théâtres lyriques, peut-être plus involontairement. Car la soumission de Méhul à la politique – sinon par conviction du moins par obligation ou calcul – fait de lui un compositeur “officiel” idéal pour promouvoir certaines valeurs étatiques fortes 1. Sa carrière, ballottée d’une salle à l’autre dans la décennie 1790 comme le montre David Charlton, l’oblige à être attentif aux inclinations politiques des directeurs de salle et de leur public 2. La vie mouvementée d’Adrien, opéra interdit en 1792 et créé dans des circonstances rocambolesques en 1799, est peut-être l’épisode le plus représentatif du poids de la censure pendant la période révolutionnaire. L’article d’Étienne Jardin suggère cependant que Méhul connut des périodes de disgrâces difficiles à traverser. Méhul à l’ouvrage À tout instant, Gossec fustigeait les “modernes”. Il écrivait à son élève Chelard : Mélodie, mélodie ! C’est le refrain des gens sensés et de la partie saine du public. Détours d’harmonie, transitions barbares, chromatique outré, c’est celui des fous et des maniaques. Vous savez, mon ami, que, de ce côté, nous voyons briller la majeure partie de nos jeunes musiciens français 3.

1.  Voir Mark Darlow, Staging the French Revolution. Cultural Politics and the Paris Opéra, 1789‑1794, New York : Oxford University Press, 2012.  2. Voir Emmet Kennedy, Marie-Laurence Netter, James P. McGregor et Mark V. Olsen, Theatre, Opera and Audiences in Revolutionary Paris. Analysis and Repertory, Westport and London : Greenwood Press, 1996.  3.  Lettre de François-Joseph Gossec à André Hippolyte Chelard, “Paris 27 juillet 1812”, reproduite dans Julien Tiersot, Lettres de musiciens écrites en français, t. 1, Turin : Bocca frère, 1924, p. 223‑227.

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Et d’ajouter plus loin : “[Guériront-ils] de cette fièvre modulatrice, de ce délire fruit de l’amour du chromatique ? C’est ce que le temps nous appren‑ dra 1.” À n’en pas douter, Gossec incriminait là l’esthétique de Méhul dont le style particulièrement véhément s’appuie sur une harmonie instable et volontiers modulante, chargée de septièmes diminuées. L’imagination de l’auteur se retrouve tout autant dans sa capacité à revisiter le rythme (ce dont témoignent ses quatre ballets-pantomimes) et à innover en matière d’orchestration (privant par exemple son opéra Uthal de tout violon). Mais la qualité de la musique de Méhul ne s’arrête pas à sa facture, si expérimentale et innovante soit-elle. C’est sa dramaturgie même – c’est-à-dire sa maîtrise du rythme narratif, du “temps scénique” – qui en fait le fleuron du premier romantisme. Comme l’explique Maxime Margollé, Euphrosine sembla l’effet d’un coup de massue précisément par sa capacité à fusionner dans une progression idéale les éléments dramaturgiques les plus divers. De ce point de vue, une étude des récitatifs de Méhul serait à mener de manière systématique car elle révélerait sans doute une variété (et une évolution ?) qu’on trouve chez peu de ses contemporains. D’un récitatif presque sans accompagnement (à la manière du “secco” italien) dans certains passages d’Adrien, Méhul évolue vers le récit accompagné de manière systématique et chargée. Il n’est pas rare que ses œuvres de maturité fassent appel à un plus grand orchestre dans un récit que dans l’air qui le suit. La fin des années 1790 voit également la technique du mélodrame s’insinuer dans la texture opératique, et le panel d’effets dont regorge par exemple Ariodant place Méhul à la pointe du progrès lyrique de son temps (combinant des progressions “texte parlé = > mélodrame = > récit = > air = > ensemble”). Une telle compétence théâtrale s’exprime également sans difficulté dans les genres théâtraux parlés, et notamment dans celui, difficile, du mélodrame (musique de scène accompagnant la parole), ainsi que l’analyse Emilio Sala redécouvrant la partition des Hussites conservée à Bordeaux. Enfin, le triomphe de l’ouverture du Jeune Henri souligne les capacités prémonitoires de la pensée de Méhul, qui invente le poème symphonique cinquante ans avant que Liszt puis Saint-Saëns ne l’imposent en Europe. Pour la première fois, des chiffres précis, analysés par Étienne Jardin, donnent une idée exacte de la présence de Méhul dans la vie musicale  1.  Même référence.

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Introduction

parisienne de son vivant. Aux côtés de huit productions très populaires, on voit l’artiste connaître des revers de fortune au fil des créations, auquel il répond par la production de genres nouveaux pour lui (la symphonie, notamment, à partir de 1808). On observe aussi la persistance d’un cer‑ tain opéra-comique pathétique (Joanna, Héléna, Valentine de Milan – ce dernier achevé par son neveu adoptif Joseph Daussoigne-Méhul) multi‑ pliant les insuccès sous l’Empire alors que Méhul semble convaincu de son intérêt artistique. Cette incompréhension de l’auditoire témoigne de la versatilité du goût du public. Et de la difficulté de s’imposer durablement lorsqu’on fait figure de “compositeur de transition” (comme l’écrit JoëlMarie ­Fauquet 1, pour déplorer cette image convenue). Postérité De fait, la postérité de Méhul est paradoxale, comme nous l’écrivions pour commencer cette introduction. S’il n’eut pas les obsèques flamboyantes d’un Grétry, mort en 1813, il ne disparaît cependant pas dans l’indifférence. L’anec‑ dote des élèves du Conservatoire chantant l’“Hymne au sommeil” d’Uthal sur sa tombe semble véridique. Pour autant, sa postérité devra attendre les années 1830 pour prendre son essor. Une nouvelle période du romantisme émerge de façon sensible pour les penseurs et le public qui la vivent : l’éclosion du grand opéra, les aspirations tragiques de l’opéra-comique sous la plume d’un Hérold ou d’un Boieldieu vieillissants, les succès de Liszt et Paganini, l’inauguration de la Société des concerts du Conservatoire sont légitimés par la revendication d’une ère nouvelle. Ce futur, écrit consciemment, s’appuie sur un passé que l’on “muséifie” presque sans recul : Méhul et avec lui Catel, Kreutzer, Dalayrac, Grétry, Gaveaux, Isouard parmi tant d’autres deviennent subitement les roses d’un jardin de l’Histoire que l’orgueil français cultive avec fierté sans vraiment savoir si leurs ouvrages traverseront le temps. Et ces fleurs délicates, qui laissent aujourd’hui le souvenir erroné d’une élégance et d’une légèreté “à la française”, sont pourtant les auteurs d’une “musique de fer 2”  1.  Joël-Marie Fauquet, “Méhul”, Dictionnaire de la musique en France au xixe siècle, Paris : Fayard, 2003, p. 764.  2.  Au sujet de cette expression, qui explique une partie du titre de ce livre, on peut rappeler le mot d’Arnault : “La musique de cet ouvrage [Horatius Coclès (1794)] est

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élaborée en pleine période révolutionnaire dont on n’a plus guère conscience, malheureusement. Quant à Méhul, en particulier, laissons Joël-Marie Fauquet donner la pleine mesure de l’importance symbolique de sa musique : On peut dire qu’elle féconde le xixe siècle. Le duo d’Euphrosine (1790) sera un modèle de musique dramatique que César Franck proposera à ses élèves, Stratonice (1792) décidera de la vocation musicale de G. Onslow, Le Chant du départ (1794) sera sur toutes les lèvres quand se jouera le destin de la nation, Le Jeune Henri (1797), présent au répertoire de la Société des concerts du Conservatoire, verra l’écho de sa chasse répercutée par de nombreuses œuvres, celles de Berlioz comprises, Ariodant (1799) prêtera son air “Femme sensible, entends-tu le ramage” à l’un des cantiques les plus chantés jusqu’au xxe siècle Reviens pécheur à ton Dieu qui t’appelle. Quel musicien n’envierait à Méhul cette gloire qui, pourtant, aujourd’hui le laisse méconnu 1 ?

d’une extrême sévérité ; c’est de la musique de fer, pour me servir de l’expression de son auteur, qui, s’étudiant à caractériser dans ses compositions les mœurs du peuple qu’il faisait chanter, et l’époque où se passait l’action, avait porté cette fois un peu loin peut-être l’application d’un excellent système.” (Arnault, Souvenirs d’un sexagénaire, cité dans Pougin, Méhul, p. 88.)  1.  Fauquet, “Méhul”, p. 764.

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Docteur en histoire de l’EHESS (Paris), Étienne Jardin effectue des recherches sur la vie musicale française au xixe siècle. Responsable scientifique des publications et des colloques au Palazzetto Bru Zane, il a dirigé les ouvrages Quatre siècles d’édition musicale (Peter Lang, 2014), Archives du concert (Actes sud, 2015) et Music and War from French Revolution to WWI (Brepols, 2017).

ISBN 978-2-330-08019-8

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ACTES SUD DÉP. LÉG. : SEPT. 2017 40 e TTC France www.actes-sud.fr

LE FER ET LES FLEURS : ÉTIENNE-NICOLAS MÉHUL (1763-1817)

Directeur scientifique du Palazzetto Bru Zane (Venise), docteur en musicologie de Paris IV-Sorbonne et ancien pensionnaire de l’Académie de France à Rome (Villa Médicis), Alexandre Dratwicki est spécialiste de la musique française du xixe siècle. Diplômé du Conservatoire de Paris (esthétique), il a enseigné l’histoire de la musique dans plusieurs universités et a été producteur à Radio France. La publication de sa thèse, Un nouveau commerce de la virtuosité (1780-1830), a reçu le prix des Muses 2007 de l’essai. Il a dirigé plusieurs ouvrages collectifs dont Le Concours du prix de Rome de musique (1803-1968) chez Symétrie (2011).

ACTES SUD / PALAZZETTO BRU ZANE

Né sous l’Ancien Régime, Étienne-Nicolas Méhul (1763-1817) a traversé les tumultes de la Révolution et les ors de l’Empire pour mourir à l’aube de la Restauration. Sa musique est un parfait exemple de Sturm und Drang à la française : classique par ses formes, elle aspire à une nouvelle esthétique, celle de l’expression du sentiment dans toute sa versatilité. Le style de Méhul balaye ainsi une palette de coloris très large, allant de la pompe martiale (Adrien, Horatius Coclès) à l’affliction (Mélidore et Phrosine, Euphrosine), en passant par le religieux (Joseph), le pittoresque (Les Deux Aveugles de Tolède) et même l’exotisme de l’ossianisme, alors en pleine vogue (Uthal). Si Méhul paraît plus à l’aise dans le style tragique, il laisse cependant de nombreux ouvrages légers. À l’occasion du bicentenaire de sa mort, cet ouvrage collectif entend réaffirmer l’importance d’un artiste qui fut aussi membre actif du Conservatoire de Paris et de l’Institut de France. Des facettes encore méconnues de son catalogue y sont mises en lumière, notamment la musique de scène des Hussites, ses quatre ballets-pantomimes ou encore ses symphonies tardives. Des statistiques précises donnent une image exacte de sa présence dans la vie musicale des années 1780-1815. Enfin, l’analyse du regard que portèrent sur lui Berlioz, Cherubini et Castil-Blaze permet d’affiner les spécificités de son génie et les limites de ses expérimentations sonores, et de comprendre comment, de compositeur, il devint symbole.

Le Fer et les Fleurs : Étienne-Nicolas Méhul (1763-1817) sous la direction d’Alexandre Dratwicki et Étienne Jardin

ACTES SUD / PALAZZETTO BRU ZANE

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