Extrait de "Daniel Larrieu"

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Mémento > 1982 > 2012

Un désir de traces et de réflexions partagées a présidé à la conception de cet ouvrage. Il a été entrepris et minutieusement réalisé pas à pas. Initié il y a une dizaine d’années autour de premiers entretiens, il offre un parcours de lecture entre textes images. Album de vie et mémoires artistiques tissent ce cheminement, tel un processus ouvert à l’imaginaire, aux différentes formes d’écritures. Ainsi s’esquisse un paysage dansé, la geste d’un livre façonné par une pensée chorégraphique, son mouvement, sa perception du monde. Ce faisant, il est aussi le vivant témoignage d’un métier, de ses pratiques et de l’histoire contemporaine d’un art encore mal connu.

Débuter J’ai découvert la danse contemporaine avec Wes Howard le mercredi après-midi au collège horticole de Hyères. J’étais pensionnaire et les activités artistiques s’y développaient. En dehors du plaisir physique de prendre un cours de danse, je me souviens d’improvisations dans un gymnase froid, au sol dur, sur des tapis, seul ou en groupe, à partir de consignes simples. Exprimer l’intériorité en dansant sur l’espace des tapis et l’extériorité hors de ces tapis. Encore adolescent, j’éprouvais soudain la sensation de comprendre mieux le monde. J’avais la possibilité de m’exprimer par le corps, sans paroles, et je pouvais me servir de mes propres expériences de la vie. J’avais la sensation d’exister. Dans ces cours, j’ai fait mes premières découvertes : sentir la différence entre expression et impression corporelle, rejoindre quelque chose d’intérieur, de personnel et de singulier. J’étais entré dans l’espace du ressenti, un champ de l’expérience à vivre qui résonne physiquement. (Extrait de l’entretien entre Daniel Larrieu et Irène Filiberti.)

ASTRAKAN

ISBN : 978-2-330-03418-4 40 € TTC France DÉP. LÉG. : NOV. 2014

ASTRAKAN

Irène Filiberti

CouvLarrieu_ok_qc_corrok.indd 1

Mémento > 1982 > 2012

Daniel Larrieu

Danseur et chorégraphe, Daniel Larrieu a commencé son parcours artistique dans les années 1980. Second prix avec Chiquenaudes, du concours de Bagnolet qui à l’époque lance toute une génération de jeunes chorégraphes, il investit les scènes de la danse contemporaine, dont il devient l’une des figures emblématiques. Ses pièces aux univers changeants font sa réputation à l’image de Waterproof (1986) créé dans une piscine. Directeur du Centre chorégraphique national de Tours de 1994 à 2002, il reprend ensuite ses activités d’artiste indépendant avec sa compagnie, Astrakan. Arts plastiques, danse in situ ou sur scène, théâtre, ses projets prennent des chemins variés, toujours marqués par un langage singulier, délicat et poétique et des collaborations avec de nombreux artistes de différents champs.

Daniel Larrieu

ASTRAKAN

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Daniel Larrieu Mémento > 1982 > 2012

Collection Danse dirigée par Christian Dumais-Lvowski

ASTRAKAN


Daniel Larrieu Mémento > 1982 > 2012

Collection Danse dirigée par Christian Dumais-Lvowski

ASTRAKAN


Sommaire Introduction ............................................................................................................. p. 7 Daniel Larrieu Mémento 1982 - 2012 ............................................................................................................... p. 9 Textes de Daniel Larrieu 1978 - 1979 ................................................................................................ p. 9 1982 - 1993 ............................................................................................... p. 12 1994 - 2002 .............................................................................................. p. 102 2003 - 2012 .............................................................................................. p. 188 2013 ............................................................................................................... p. 255

Entretien .................................................................................................................... p. 258 Texte d’Irène Filiberti et Daniel Larrieu Légendes .................................................................................................................... p. 278 Répertoire ................................................................................................................. p. 284 Remerciements ...................................................................................................... p. 299


Sommaire Introduction ............................................................................................................. p. 7 Daniel Larrieu Mémento 1982 - 2012 ............................................................................................................... p. 9 Textes de Daniel Larrieu 1978 - 1979 ................................................................................................ p. 9 1982 - 1993 ............................................................................................... p. 12 1994 - 2002 .............................................................................................. p. 102 2003 - 2012 .............................................................................................. p. 188 2013 ............................................................................................................... p. 255

Entretien .................................................................................................................... p. 258 Texte d’Irène Filiberti et Daniel Larrieu Légendes .................................................................................................................... p. 278 Répertoire ................................................................................................................. p. 284 Remerciements ...................................................................................................... p. 299


En 2010, après le très beau voyage sur la côte est du Groenland et avoir dansé sur des plaques de glace à la dérive, j’annonçai aux danseurs de la compagnie que je ne voulais plus travailler la danse à la place qui avait été la mienne pendant trente ans. Il me fallait prendre des chemins de traverse et laisser émerger en moi de nouveaux désirs. Pendant la production de la chorégraphie Never Mind, c’était devenu un jeu. À chaque moment de répétition conclu, en réponse à une question, un problème d’espace ou d’interprétation, quelqu’un disait : — Ça, c’est fait ! Après avoir traversé les années 1980 dans l’insouciance de l’époque, j’ai été rattrapé dans les années 1990 par l’expérience institutionnelle. Puis, depuis dix ans, une lente maturation m’amène à revenir sur les scènes comme chorégraphe, auteur ou interprète de projets pluridisciplinaires. Mais, avant de poursuivre dans cette voie libre et engagée, j’ai le souhait de partager mon histoire. Par ce geste qui passe d’anecdotes en images, en souvenirs forcément incomplets, forcément relatifs, j’ai le désir de transmettre une manière de travailler, d’affirmer une place pour et par le mouvement dansé, de raconter les ponts que j’opère entre les arts, les conduites menées, les remarques personnelles sur ce qu’est la danse, enfin, la mienne. Ont été réunis près de deux cents images et documents qui recomposent un temps, des dessins, des traces, des notes, un entretien avec Irène Filiberti qui jongle avec les époques, les matières et les rencontres, et un catalogue de l’ensemble des pièces et des collaborations de 1982 à 2012. Le tout en partage.

Daniel Larrieu, Paris, novembre 2014.


En 2010, après le très beau voyage sur la côte est du Groenland et avoir dansé sur des plaques de glace à la dérive, j’annonçai aux danseurs de la compagnie que je ne voulais plus travailler la danse à la place qui avait été la mienne pendant trente ans. Il me fallait prendre des chemins de traverse et laisser émerger en moi de nouveaux désirs. Pendant la production de la chorégraphie Never Mind, c’était devenu un jeu. À chaque moment de répétition conclu, en réponse à une question, un problème d’espace ou d’interprétation, quelqu’un disait : — Ça, c’est fait ! Après avoir traversé les années 1980 dans l’insouciance de l’époque, j’ai été rattrapé dans les années 1990 par l’expérience institutionnelle. Puis, depuis dix ans, une lente maturation m’amène à revenir sur les scènes comme chorégraphe, auteur ou interprète de projets pluridisciplinaires. Mais, avant de poursuivre dans cette voie libre et engagée, j’ai le souhait de partager mon histoire. Par ce geste qui passe d’anecdotes en images, en souvenirs forcément incomplets, forcément relatifs, j’ai le désir de transmettre une manière de travailler, d’affirmer une place pour et par le mouvement dansé, de raconter les ponts que j’opère entre les arts, les conduites menées, les remarques personnelles sur ce qu’est la danse, enfin, la mienne. Ont été réunis près de deux cents images et documents qui recomposent un temps, des dessins, des traces, des notes, un entretien avec Irène Filiberti qui jongle avec les époques, les matières et les rencontres, et un catalogue de l’ensemble des pièces et des collaborations de 1982 à 2012. Le tout en partage.

Daniel Larrieu, Paris, novembre 2014.


1978

La première fois, le premier spectacle, bras ouverts vers le ciel, comme pour demander son compte. Et moi ? Ah, la jeunesse ! Image conservée dans un carton avec mention spéciale vite tracée au feutre : “attention”. Jeune homme dont les cheveux sont trop longs, mais bien raccord avec l’époque. Autre souvenir, la Sainte-Baume : là où Marie Madeleine a terminé sa vie dans une grotte, là où ma grand-mère venait à pied en pèlerinage depuis Marseille. C’est là aussi que, transformée en studio de danse pendant la semaine, la grange à la moquette bleue devenait un lieu de culte le dimanche, le spirituel et l’art liés sans confusion. Le lundi matin, on rangeait la grande croix de bois, on rebranchait le tourne-disque, on dansait en Lycra, guêtres, et collants de laine tricotés main, sur la musique des Temptations et l’on se brûlait les pieds sur la moquette synthétique bleu nuit, et cela n’avait aucune d’importance…

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1978

La première fois, le premier spectacle, bras ouverts vers le ciel, comme pour demander son compte. Et moi ? Ah, la jeunesse ! Image conservée dans un carton avec mention spéciale vite tracée au feutre : “attention”. Jeune homme dont les cheveux sont trop longs, mais bien raccord avec l’époque. Autre souvenir, la Sainte-Baume : là où Marie Madeleine a terminé sa vie dans une grotte, là où ma grand-mère venait à pied en pèlerinage depuis Marseille. C’est là aussi que, transformée en studio de danse pendant la semaine, la grange à la moquette bleue devenait un lieu de culte le dimanche, le spirituel et l’art liés sans confusion. Le lundi matin, on rangeait la grande croix de bois, on rebranchait le tourne-disque, on dansait en Lycra, guêtres, et collants de laine tricotés main, sur la musique des Temptations et l’on se brûlait les pieds sur la moquette synthétique bleu nuit, et cela n’avait aucune d’importance…

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1979

Un déjeuner sur l’herbe quelque part dans le Sud de la France. Je ne me souviens pas du tout de cette journée, disons, un dimanche – sinon, je n’aurais ni cravate ni chemise blanche –, je retrouve juste une certaine sensation gardée de l’époque. Certaines photographies que l’on conserve sont trimballées de déménagement en déménagement. On les retrouve au fond d’un carton, elles glissent toutes seules pour ainsi dire, vivantes et discrètes, d’une maison à une autre, marque-page d’un livre ou d’un cahier oublié. Annotées au dos : un nom, une date, un mot. Cette photographie est arrivée par la poste, surgissant du passé. Vers vingt et un ans, je débutais mon travail de danseur. À Aix-en-Provence, Odile Duboc donnait des cours dans son studio de danse tout blanc. Ailleurs, les Mirabelles, groupe théâtral avec Nini Crépon, jouaient Tchekhov, toutes travesties, toutes en noir, magnifiques.

Je suis arrivé à Paris à la fin de l’année 1979. J’ai travaillé avec la compagnie Le Four solaire d’Anne-Marie Reynaud et Odile Azagury. Puis j’ai dansé Grand écart de Régine Chopinot.

Hideyuki Yano donnait des cours quai de l’Ourcq. La Ménagerie de verre n’était pas encore ouverte.

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1979

Un déjeuner sur l’herbe quelque part dans le Sud de la France. Je ne me souviens pas du tout de cette journée, disons, un dimanche – sinon, je n’aurais ni cravate ni chemise blanche –, je retrouve juste une certaine sensation gardée de l’époque. Certaines photographies que l’on conserve sont trimballées de déménagement en déménagement. On les retrouve au fond d’un carton, elles glissent toutes seules pour ainsi dire, vivantes et discrètes, d’une maison à une autre, marque-page d’un livre ou d’un cahier oublié. Annotées au dos : un nom, une date, un mot. Cette photographie est arrivée par la poste, surgissant du passé. Vers vingt et un ans, je débutais mon travail de danseur. À Aix-en-Provence, Odile Duboc donnait des cours dans son studio de danse tout blanc. Ailleurs, les Mirabelles, groupe théâtral avec Nini Crépon, jouaient Tchekhov, toutes travesties, toutes en noir, magnifiques.

Je suis arrivé à Paris à la fin de l’année 1979. J’ai travaillé avec la compagnie Le Four solaire d’Anne-Marie Reynaud et Odile Azagury. Puis j’ai dansé Grand écart de Régine Chopinot.

Hideyuki Yano donnait des cours quai de l’Ourcq. La Ménagerie de verre n’était pas encore ouverte.

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1993 >


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1982

J’ai gardé mes agendas. Ils sont tous numérotés et me permettent de retrouver les dates de tournées, les rendezvous, les noms aussi ; enfin, quand je peux me relire. On ouvrait, impatient, la boîte aux lettres le matin. L’époque était manuelle. Le répondeur prenait les messages. “Bonjour, aujourd’hui c’est la Saint-Répondeur. Bonne fête à tous les messages.” C’était l’époque de Téléchat. Chaque année, j’assistais au concours de Bagnolet. Un gymnase, un jury de professionnels, un public attentif à de nouvelles expériences. La règle : présentation de pièces chorégraphiques de moins de dix minutes avec, au minimum, trois personnes sur scène. Dans la salle, silence et fous rires garantis. J’ai tenté l’aventure avec Pascale Houbin et Michèle Prélonge. Nous avons répété dehors, sur le chantier des Halles, à la galerie Vivienne, puis dans les jardins du Palais-Royal. Josette Baïz dansait, entourée de garçons, sur des sons d’orage et remportait le premier prix du concours. Nous, le deuxième, bien contents d’avoir été récompensés.

“Astrakan recherches chorégraphiques” était né, trait d’union entre “choré” et “graphisme”. Nom d’une ville russe, un port sur la Volga. C’est aussi le nom d’une fourrure dont l’atrocité de production est bien connue : la peau d’un agneau karakul tué prématuré pour conserver ce fameux plissement. À l’époque, l’idée de mêler le luxe de la fourrure et l’horreur de sa fabrication me rappelait la manière dont la danse était traitée, une forme de mépris cynique et de regards amusés.

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1982

J’ai gardé mes agendas. Ils sont tous numérotés et me permettent de retrouver les dates de tournées, les rendezvous, les noms aussi ; enfin, quand je peux me relire. On ouvrait, impatient, la boîte aux lettres le matin. L’époque était manuelle. Le répondeur prenait les messages. “Bonjour, aujourd’hui c’est la Saint-Répondeur. Bonne fête à tous les messages.” C’était l’époque de Téléchat. Chaque année, j’assistais au concours de Bagnolet. Un gymnase, un jury de professionnels, un public attentif à de nouvelles expériences. La règle : présentation de pièces chorégraphiques de moins de dix minutes avec, au minimum, trois personnes sur scène. Dans la salle, silence et fous rires garantis. J’ai tenté l’aventure avec Pascale Houbin et Michèle Prélonge. Nous avons répété dehors, sur le chantier des Halles, à la galerie Vivienne, puis dans les jardins du Palais-Royal. Josette Baïz dansait, entourée de garçons, sur des sons d’orage et remportait le premier prix du concours. Nous, le deuxième, bien contents d’avoir été récompensés.

“Astrakan recherches chorégraphiques” était né, trait d’union entre “choré” et “graphisme”. Nom d’une ville russe, un port sur la Volga. C’est aussi le nom d’une fourrure dont l’atrocité de production est bien connue : la peau d’un agneau karakul tué prématuré pour conserver ce fameux plissement. À l’époque, l’idée de mêler le luxe de la fourrure et l’horreur de sa fabrication me rappelait la manière dont la danse était traitée, une forme de mépris cynique et de regards amusés.

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1982

1981 à 1983 – travailler dehors. Juste répéter à l’air libre, persuadés de la beauté du lieu qui nous entoure. Liberté à l’œuvre, sous les yeux des enfants, des passants, échapper aux contingences habituelles qui pèsent et inventer de nouvelles conditions de travail. Et surtout prendre l’air. Il y avait des colonnes où s’abriter en cas de pluie et, derrière le jardin, un café corse, pour les pauses. Espace élégant, beau studio, clair, spacieux, pur marbre, libre et gratuit, sans réservation. On nous laisse faire. Les interdictions sont pour les vélos et les patins à roulettes, les chiens doivent être tenus en laisse, mais pour la danse… Ce sont les gardiens du Palais-Royal qui, sifflet en bouche, assurent l’application du règlement, mais en matière chorégraphique rien n’est écrit, alors rien ne trouble les bons usages du lieu. Des gens s’arrêtent et s’étonnent : — Le ministre de la Culture travaille juste là ! — Ah bon ? — Mais oui, c’est son bureau… Mais oui ! C’est là, le bureau de Jack Lang. Pour moi le Palais-Royal était un lieu de rêve où avait habité Jean Cocteau. Un jardin où, à une autre époque, les dames de petite vertu vendaient leurs services, là où aujourd’hui la Comédie-Française montre ses arrières.

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1981 à 1983 – travailler dehors. Juste répéter à l’air libre, persuadés de la beauté du lieu qui nous entoure. Liberté à l’œuvre, sous les yeux des enfants, des passants, échapper aux contingences habituelles qui pèsent et inventer de nouvelles conditions de travail. Et surtout prendre l’air. Il y avait des colonnes où s’abriter en cas de pluie et, derrière le jardin, un café corse, pour les pauses. Espace élégant, beau studio, clair, spacieux, pur marbre, libre et gratuit, sans réservation. On nous laisse faire. Les interdictions sont pour les vélos et les patins à roulettes, les chiens doivent être tenus en laisse, mais pour la danse… Ce sont les gardiens du Palais-Royal qui, sifflet en bouche, assurent l’application du règlement, mais en matière chorégraphique rien n’est écrit, alors rien ne trouble les bons usages du lieu. Des gens s’arrêtent et s’étonnent : — Le ministre de la Culture travaille juste là ! — Ah bon ? — Mais oui, c’est son bureau… Mais oui ! C’est là, le bureau de Jack Lang. Pour moi le Palais-Royal était un lieu de rêve où avait habité Jean Cocteau. Un jardin où, à une autre époque, les dames de petite vertu vendaient leurs services, là où aujourd’hui la Comédie-Française montre ses arrières.

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Un désir de traces et de réflexions partagées a présidé à la conception de cet ouvrage. Il a été entrepris et minutieusement réalisé pas à pas. Initié il y a une dizaine d’années autour de premiers entretiens, il offre un parcours de lecture entre textes images. Album de vie et mémoires artistiques tissent ce cheminement, tel un processus ouvert à l’imaginaire, aux différentes formes d’écritures. Ainsi s’esquisse un paysage dansé, la geste d’un livre façonné par une pensée chorégraphique, son mouvement, sa perception du monde. Ce faisant, il est aussi le vivant témoignage d’un métier, de ses pratiques et de l’histoire contemporaine d’un art encore mal connu.

Débuter J’ai découvert la danse contemporaine avec Wes Howard le mercredi après-midi au collège horticole de Hyères. J’étais pensionnaire et les activités artistiques s’y développaient. En dehors du plaisir physique de prendre un cours de danse, je me souviens d’improvisations dans un gymnase froid, au sol dur, sur des tapis, seul ou en groupe, à partir de consignes simples. Exprimer l’intériorité en dansant sur l’espace des tapis et l’extériorité hors de ces tapis. Encore adolescent, j’éprouvais soudain la sensation de comprendre mieux le monde. J’avais la possibilité de m’exprimer par le corps, sans paroles, et je pouvais me servir de mes propres expériences de la vie. J’avais la sensation d’exister. Dans ces cours, j’ai fait mes premières découvertes : sentir la différence entre expression et impression corporelle, rejoindre quelque chose d’intérieur, de personnel et de singulier. J’étais entré dans l’espace du ressenti, un champ de l’expérience à vivre qui résonne physiquement. (Extrait de l’entretien entre Daniel Larrieu et Irène Filiberti.)

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ISBN : 978-2-330-03418-4 40 € TTC France DÉP. LÉG. : NOV. 2014

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Daniel Larrieu

Danseur et chorégraphe, Daniel Larrieu a commencé son parcours artistique dans les années 1980. Second prix avec Chiquenaudes, du concours de Bagnolet qui à l’époque lance toute une génération de jeunes chorégraphes, il investit les scènes de la danse contemporaine, dont il devient l’une des figures emblématiques. Ses pièces aux univers changeants font sa réputation à l’image de Waterproof (1986) créé dans une piscine. Directeur du Centre chorégraphique national de Tours de 1994 à 2002, il reprend ensuite ses activités d’artiste indépendant avec sa compagnie, Astrakan. Arts plastiques, danse in situ ou sur scène, théâtre, ses projets prennent des chemins variés, toujours marqués par un langage singulier, délicat et poétique et des collaborations avec de nombreux artistes de différents champs.

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