Soleo 27 - juin 2011

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So le o Magazine de l'Agence Europe-Education-Formation France

Juin 2011 N°27

FRANCE MÉTROPOLITAINE SAINT PIERRE-ET-MIQUELON

SAINT MARTIN POLYNÉSIE FRANÇAISE

GUADELOUPE

SAINT BARTHÉLÉMY MARTINIQUE MAYOTTE GUYANE

WALLIS ET FUTUNA LA RÉUNION

NOUVELLE CALÉDONIE

TERRES AUSTRALES ET ANTARCTIQUES FRANÇAISES

Outre-mer 2011 - ANNÉE DES

2e

Agence de la mobilité internationale et européenne

2f.fr


Sommaire 03 EDITO Antoine Godbert, directeur Agence Europe-Education-Formation-France

04 ZOOM Attractivité internationale des universités françaises 05 Sommet mondial 2011 des universités : recommandations des Présidents en matière de mobilité 06

Les étudiants souhaitent la création d’un Erasmus mondial

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Et pourquoi pas un Erasmus pour tous ? Emmanuelle Gardan

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Universités françaises : les stratégies les plus payantes à l’international. Points de vue de hauts responsables

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Patrick Hetzel

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Louis Vogel

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Sonia Dubourg-Lavroff

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Antoine Godbert

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Belgrade : Le programme Tempus fête ses 20 ans. Quitterie Gadret

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Dans les coulisses de l’Agence nationale Le contrôle des projets européens permet le rapprochement avec les bénéficiaires. Marie-José Biondini

16 PLUS D’EUROPE ET D’INTERNATIONAL 16

Portrait : Comenius : « Le Galilée de l’éducation ». Marie Chatardovà, Ambassadeur de la République Tchèque en France

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Le Prix de l’éducation à l’Europe de la Fondation Hippocrène. Michèle Guyot-Rose

20 DOSSIER SPÉCIAL « 2011 – ANNÉE DES OUTRE-MER » 21 22 Martinique : l’exigence de l’ouverture à l’international. André Siganos. Laurent Prévost 23

Un marathon Comenius de 40 000 kms. Max Steph

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Guadeloupe : « Absentéisme zéro ». Julie Elbourg

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La Réunion : île métisse et européenne. Chantal Manes

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Les Overseas britanniques dans le programme EFTLV. Kursat Levent Egriboz

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Nouvelle Calédonie. Energies du futur et citoyenneté scolaire. Françoise Rouam

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Martinique. Du bon emploi de Comenius et d’Erasmus. Christine Delphin

30 BREVES

Ecrivez à Soleo ! soleo@2e2f.fr © Couverture : Shutterstock Images


Edito

N° 27 JUIN 2011

© Photo : Sophie Pawlak

figure d'avant-garde dans cette connaissance. En cette année nationale de l'Outre-Mer, Soleo a donc voulu mettre en lumière une évidence encore trop peu connue : les programmes d'Education et Formation Tout au Long de la Vie (EFTLV) peuvent aussi remplir leur mission très loin de Bruxelles, comme vous allez le découvrir dans le dossier central de ce numéro 27.

L'

Europe est un continent étrange. Il a, depuis deux siècles et demi, réussi à prendre une importance au niveau mondial, en inadéquation avec sa démographie. Beaucoup chez nous prophétise son déclin et, pourtant, plusieurs experts américains n’hésitent pas à affirmer que le 21ème siècle sera tout autant européen que chinois. Et cela grâce à la capacité économique et technologique des Etats membres, mais aussi parce que l'Europe communautaire constitue une exception politique qui va continuer longtemps à intriguer le monde. Parmi les sujets qui maintiennent la fascination mondiale pour l’«exception européenne», la défense déterminée des valeurs à vocation universelle qui ont construit la démocratie – régime désormais quasi exclusif sur le continent à la triste exception biélorusse exceptée – figure en place dominante. Mais on y trouve aussi la capacité à penser le monde, une capacité certes partagée avec les Etats-Unis et sans doute bientôt la Chine, et qui demeure bon an mal an en Russie, mais qui est encore trop balbutiante dans les nouveaux pôles émergents, en Inde, au Mexique, en Indonésie, en Iran ou au Brésil.

Sur un plan plus général, plus la mobilité internationale des personnes en formation est intense, plus fine pourra être la connaissance du monde. C'est pourquoi l'Agence Europe-Education-Formation France (2e2f), à l'instar de nombre de ses homologues parmi les 33 Etats qui participent à EFTLV, souhaite pouvoir également prendre en charge des programmes de mobilité sortante bi ou multilatéraux, au-delà de ses programmes communautaires traditionnels. Ils doivent permettre d'intensifier les relations au monde, pour les plus jeunes d'abord, mais aussi pour toutes les générations. La période est propice pour réfléchir à une telle évolution. Le 4ème Sommet mondial des universités organisé par la Conférence des Présidents d’Université (CPU) dans le cadre de la présidence Française du G8-G20 et le séminaire conjoint DREIC-CPU-Agence2e2f à Bordeaux ont rappelé l’importance d’envisager un renouveau quantitatif et qualitatif des mobilités pour gagner la bataille de l’attractivité de long terme pour les étudiants. Plus que jamais les opérateurs de mobilité sortante et entrante doivent être mobilisés dans ce but. Plus récemment, un rapport remis à la Ministre de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche et en grande partie rédigé par l'Agence a mis en avant la nécessité d’installer 2e2f au cœur des problématiques de guichet unique de mobilité pour tous les publics. Ces constats sont un début. La force de l’Europe à l’échelle mondiale viendra de sa capacité à être au centre des échanges de la société de la connaissance. La force de la France au sein de l'Union européenne viendra de son efficacité à être attractive pour des personnes mobiles venues du monde entier – et, pas uniquement, des étudiants –, mais aussi des possibilités offertes aux Français de tenter une aventure académique ou professionnelle hors de nos frontières.

Or, pour être en mesure de penser le monde, il importe d’abord de bien le connaître. Jusque dans ses confins les plus reculés. Jusque dans ses contrastes les plus saisissants. Jusque dans ses diversités les plus prometteuses.

En affirmant sa position de leader comme opérateur national de mobilité sortante dans le domaine de la formation, l'Agence 2e2f est prête à assumer ces nouveaux défis. Il n'y a rien de plus enthousiasmant que d'aider à maintenir l’exception européenne, quand elle aide à s’inscrire au monde et à mieux le découvrir. « L’univers est une espèce de livre dont on n’a lu que la première page quand on n’a vu que son pays » aimait à rappeler Paul Morand. Nous n’avons donc pas encore lu tous les livres. Mais l’été peut permettre de rattraper un peu de retard. Bon été, donc, de lecture mondiale.

Les habitants des régions Ultra Périphériques (RUP), ces collectivités d'Outre-Mer qui permettent à l'Union européenne d'être présente au cœur de pratiquement tous les grands espaces de la planète, font

Antoine GODBERT Directeur Agence Europe-Education-Formation-France


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ZOOM

Attractivité INTERNATIONALE DES UNIVERSITÉS FRANÇAISES En cette année de présidence française du G8-G20, l’attractivité internationale des universités est au centre des préoccupations. Le 4ème Sommet mondial des universités organisé en mai dernier à Paris l’a rappelé lui aussi, en posant la question du « développement durable et de la société de la connaissance. Quelle structuration et coopération pour les universités du 21ème siècle » ? Devant des présidents et des recteurs venus de 40 pays du monde, Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, a souligné que « jamais les idées n’ont circulé aussi vite ; jamais les enseignants-chercheurs n’ont été aussi mobiles ; jamais les étudiants n’ont été aussi nombreux à choisir de se former dans une autre nation que la leur ». Du point de vue des établissements français, les stratégies les plus payantes à l’international sont donc au centre du débat. Elles ont constitué le cœur du séminaire conjoint CPU-Dreic-Agence 2e2f, des 30 juin et 1er juillet, à Bordeaux, et seront essentielles à l’évolution des programmes Erasmus et Tempus. Dans ce numéro, quatre hauts responsables de l’enseignement supérieur français donnent leur point de vue (p.8).

Université de Franche-Comté. Sommet mondial des universités, Dijon, 5, 6, 7 mai 2011

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© Université de France Comté - France


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© www.focale.info_Thomas_Hazebrouck

SOMMET MONDIAL DES UNIVERSITÉS 2011

RECOMMANDATIONS DES PRÉSIDENTS, RECTEURS ET VICE-CHANCELIERS D’UNIVERSITÉ DANS LE DOMAINE DE LA MOBILITÉ INTERNATIONALE DES ÉTUDIANTS ET DES ENSEIGNANTS-CHERCHEURS :

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- Les universités et les gouvernements devraient tous deux concevoir la mobilité comme une part intrinsèque des stratégies internationales, non comme une simple preuve de leur internationalisation.

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- Les universités et les gouvernements devraient viser un équilibre entre mobilités entrantes et sortantes, et ne pas promouvoir uniquement la mobilité à destination des étudiants et enseignants-chercheurs mais également celle des autres catégories de personnels.

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- Les universités et les gouvernements doivent imaginer et développer de nouveaux modèles de mobilité, comprenant différentes formes d’échanges basées sur l’excellence, la compétence et les affinités mutuelles.

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- Les universités doivent poursuivre leurs efforts pour rendre la mobilité plus attractive en mettant en œuvre des cursus dédiés, un environnement linguistique approprié, des services d’information, services aux étudiants et une aide financière spécifiques, de même qu’en facilitant le transfert des crédits d’enseignement.

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- Les universités et les gouvernements devraient mettre en place des indicateurs de réussite appropriés, comprenant notamment le nombre d’étudiants, d’enseignants-chercheurs et de personnels entrants et sortants, une mesure de la satisfaction et de la qualité des expériences de mobilité, et de leur contribution à l’évolution des carrières individuelles. http://www.university-summit2011.org http://www.cpu.fr/Besancon_Dijon_2011.1249.0.html

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© Université de France Comté - France

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SOMMET MONDIAL DES UNIVERSITÉS 2011 LES ÉTUDIANTS VOUDRAIENT VOIR S’ÉLARGIR L’EUROPE DE LA MOBILITÉ « Nous souhaitons voir la création d’un programme d’échanges mondial comme le programme Erasmus ». Cette proposition ambitieuse émane des débats du Sommet étudiant qui s’est tenu à Besançon, lors de la première partie du Sommet mondial des universités. Elle a été présentée aux présidents d’universités, le 6 mai à Paris. Voici un extrait des recommandations de cette délégation d’étudiants en faveur de la mobilité internationale :

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- Nous devons préparer les étudiants à un environnement et une économie mondialisés, avec une mobilité à la fois des étudiants et des enseignants.

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- Nous devrions encourager la coopération entre les universités à l’échelle mondiale dans les pays développés et les pays en voie de développement.

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- Nous devrions travailler à promouvoir et financer la mobilité universitaire. Cela suppose de solutionner les complications administratives du type obtention de visas, de même que la diversité socio-économique des personnes étudiant à l’étranger avec l’implication et l’aide des gouvernements et institutions sociales. - Nous devons structurer les opportunités internationales afin qu’elles profitent à tous les pays impliqués et pas seulement aux étudiants à titre individuel. - Nous aimerions voir la création d’une base de données de tous les programmes disponibles pour les étudiants internationaux, complétée par des avis et témoignages d’anciens bénéficiaires. - Nous aimerions que tous les pays et universités apportent leur soutien aux étudiants se préparant à étudier à l’étranger de manière à ce que ceux-ci n’aient pas tout à prendre en charge seuls. - Conscients de la vulnérabilité des étudiants étrangers, nous aimerions que tous les gouvernements dégagent de l’argent pour fournir un soutien et des services de base aux étudiants internationaux. - Nous souhaiterions qu’une aide linguistique et des conseils soient disponibles pour tous les étudiants internationaux, avant, pendant et après leur séjour, pour les aider à s’adapter aux nouvelles cultures, situations universitaires et de vie courante, langues, avec les difficultés psychologiques et autres qui peuvent toucher les étudiants à l’étranger, de même qu’une aide particulière au profit des étudiants handicapés. - Nous souhaiterions que les universités coopèrent à la reconnaissance des diplômes. Texte intégral de la Déclaration : http://www.university-summit2011.org/besancon_page.php?page=14

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PROGRAMMES 2014-2020 : ET POURQUOI PAS UN

Erasmus pour tous ? La Commission européenne vient de publier l’évaluation intermédiaire du programme Education et Formation tout au long de la vie (EFTLV) pour la période 2007-2009 . La préparation de la future génération de programmes 2014-2020 bat également son plein depuis déjà plusieurs mois. Une proposition ambitieuse est attendue pour la fin de l’année. L'agence 2e2f contribue activement à cette préparation.

Séminaire européen Comenius Regio. Bordeaux, 11 et 12 mai 2011

E http://ec.europa. eu/dgs/education_ culture/evalreports/ education/2011/ llpsum_fr.pdf

Elle a accueilli à Bordeaux Jan Truszczynski, le directeur général pour l’Education et la Culture, une rencontre qui fut l’occasion pour Antoine Godbert de transmettre à la Commission européenne les recommandations de notre agence pour la préparation du nouveau programme 2014-2020.

Davantage de transversalité Le programme EFTLV 2007-2013 est le premier programme intégré de l’histoire de la politique européenne d’éducation et de formation. Il faut toutefois aller plus loin. Beaucoup plus loin. Les sousactions, et donc les projets financés, restent encore très cloisonnés en termes de publics-cibles et de contextes d’apprentissage : les étudiants dans Erasmus, les adultes dans Grundtvig, etc. L’idéal d’éducation et la formation tout au long de la vie doit donc s’imposer de manière plus concrète dans le futur programme. Cela commence dès maintenant, avec la réflexion en cours sur 2014-2020. Il faut dépasser la logique actuelle de séparation des publics et penser l’avenir de manière résolument transversale.

Un nom plus fédérateur D’ici la fin de l’année, la Commission européenne présentera sa proposition de décision établissant un nouveau programme. L’enjeu de son appellation n’est pas des moindres. Nous avons besoin d’un nom générique facilement assimilable, plus fédérateur que l’actuel « EFTLV » (ou « LLP » en anglais), pour incarner un programme qui compte parmi les réalisations les plus positives de la construction

© Photo : Sophie Pawlak

Jan Truszczynski, Directeur Général pour l’Education et la Culture à la Commission européenne, Antoine Godbert, directeur Agence Europe-Education-Formation France.

européenne. Et pourquoi pas Erasmus ? Ce sousprogramme, qui fêtera l’an prochain ses 25 ans, peut compter sur un nombre signifiant d’ambassadeurs. Car il est, et de très loin, le programme le plus connu du grand public. Mettre en œuvre une famille de programmes sous le label Erasmus plutôt que de multiplier les sous-programmes, permettrait d'être fidèle à une succès-story tout en envisageant un avenir positif.

Une politique de contrôles plus rationnelle Autre ligne défendue par l’agence : la rationalisation des contrôles*. Si l’on veut que le futur programme reste attractif pour tous, et en particulier pour les petites structures, la valeur ajoutée de la coopération européenne, le développement personnel et l’amélioration des pratiques professionnelles doivent impérativement primer sur le temps consacré aux contrôles. Ceux-ci devraient donc être à l’avenir modulés en fonction de la taille et de l’importance des projets. Des seuils de déclenchement clairs et transparents devraient être établis. La France est le deuxième bénéficiaire de ces programmes en termes de financements, derrière l’Allemagne et devant l’Italie. Elle reçoit une enveloppe de près de 95 millions d’euros de crédits d’intervention pour l’année 2011 J

Emmanuelle Gardan Responsable de la Mission Prospective Agence Europe-Education-Formation France * Voir en page 16 l'article sur le contrôle des projets par l'agence 2e2f

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Construire sa marque pour gagner en attractivité à l’international

PATRICK HETZEL Quelles sont les stratégies les plus payantes à l'international pour les universités ?

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doit être pensé et construit comme consubstantiel à l’activité d’enseignement supérieur et de recherche. L’international doit donner lieu à une réflexion de nature à la fois politique et stratégique. Cela nécessite d’identifier les leviers stratégiques pour améliorer le positionnement international des universités françaises. Se positionner, c’est à la fois occuper un terrain, un espace et c’est faire le nécessaire pour que ce soit visible et lisible.

Patrick HETZEL Directeur général pour l'enseignement supérieur et l'insertion professionnelle

Lorsque l’on cherche un cap, une orientation en matière de politique publique, la loi est une source d’inspiration très légitime. Avec l’article 1 de la LRU (Libertés et responsabilités des universités) du 10 août 2007, 6 missions sont confiées aux universités dont 2 concernant la dimension européenne et internationale : la coopération internationale et la participation à la construction de l’espace européen de l’enseignement supérieur et de la recherche. Cela veut dire que nous avons un modèle européen à défendre et à valoriser. La stratégie européenne et internationale d’un établissement est nécessairement au cœur de son projet de développement. L’international ne doit pas être un ajout, un supplément d’âme, un simple service ou département universitaire : l’international

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De ce fait, le premier levier de changement stratégique c’est celui qui consiste à se préoccuper de la culture interne de nos organisations universitaires. L’international doit être « porté » politiquement dans les universités. Cela ne peut être l’affaire de quelques-uns, mais doit être l’affaire de tous : équipes présidentielles, personnels et étudiants. Le deuxième levier pour améliorer le positionnement de nos universités françaises, c’est d’avoir une stratégie de « marquage », une « bannière » qui fait sens et sur laquelle il est possible de capitaliser. Cela peut se faire autour d’un site : « Université de Strasbourg », « Université de Lyon » ; d’un lieu mythique comme « La Sorbonne » que tout le monde revendique ou d’un mix intelligent entre un référent substantiel et d’un lieu, « Paristech » par exemple. Le troisième levier c’est de se fixer des objectifs précis et donc de rentrer dans une démarche de ciblage. Faire de l’international « tout azimut » n’a pas de sens. Il faut concentrer ses actions et ses messages sur des zones ou des thématiques prioritaires. Ce qui compte, ce ne sont pas tant la quantité des échanges que leur qualité. C’est en conjuguant ces leviers qu’un établissement assure sa modernisation, qu’il construit sa marque et gagne en attractivité à l’international. J


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Améliorer la qualité de nos missions, témoigner d’une approche cohérente découlant de la stratégie politique d’ensemble de l’établissement

LOUIS VOGEL

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Louis VOGEL Président de la Conférence des Présidents d’université

La mixité des équipes d’enseignants-chercheurs, celle des étudiants ; le nombre et la qualité des actions de coopération internationale, tant en formation qu’en recherche ; la visibilité des établissements au niveau international : voilà des éléments certainement « payants » pour l’attractivité de nos établissements ! Cette politique d’internationalisation est une partie incontournable de nos stratégies d’établissement, qui participe à l’amélioration de la qualité de nos missions. Ces différents éléments doivent, pour porter leurs fruits, être plus que la somme des activités et initiatives particulières, en témoignant d’une approche cohérente, découlant de la stratégie politique d’ensemble de l’établissement. Nos contrats, évalués par l’AERES* tiennent d’ailleurs tout particulièrement compte du volet international et de nos stratégies dans ce domaine. En recherche, un établissement a intérêt à valoriser l’internationalisation de ses enseignants-chercheurs et chercheurs, gage de son attractivité. La mobilité entrante des chercheurs, lorsqu’elle s’inscrit dans le cadre des programmes européens, peut constituer en soi un indicateur positif d’évaluation puisqu’une participation à ces programmes extrêmement sélectifs est un gage de reconnaissance internationale dont tiennent compte les évaluations. Cette politique internationale d’établissement peut être caractérisée en amont par le montage de partenariats de recherche pérennes entre laboratoires, notamment par la création de laboratoires inter-établissements ou de contrats de coopération entre laboratoires français et étrangers de façon à favoriser les échanges des chercheurs en mobilité entrante ou sortante.

La valorisation de ces coopérations passe également par une incitation aux publications communes entre laboratoires français et étrangers. En ce qui concerne les activités de formation, un établissement a intérêt à favoriser la codiplomation dès le niveau masters mais surtout au niveau doctoral, par la délivrance de double-diplômes, diplômes conjoints, cotutelles de thèse ou encore par la délocalisation de formations à l’étranger. La cotutelle de thèse est en soi un élément de compétitivité et d’excellence puisque la renommée d’un diplôme ou d’une filière est mesurable par la qualité des étudiants qui s’y inscrivent et constitue ainsi une base immédiate d’analyse comparée justifiant de l’employabilité internationale du diplômé. L’internationalisation d’un établissement passe également par sa politique de formation interne et la promotion qu’il fait de cette « culture internationale », notamment vis-à-vis de ses personnels administratifs. Une université doit penser sa stratégie internationale d’établissement en fonction de son intégration sur un territoire et d’une mutualisation éventuelle de ses services internationaux en relation directe avec les autres acteurs, par exemple dans le cadre d’un PRES, ce qui donne un poids plus important à sa dynamique internationale. L’harmonisation de la politique de l’établissement doit se faire en cohérence avec la politique de relations internationales des collectivités territoriales et des acteurs économiques, sociaux et culturels de son environnement. La représentation de l’université à l’étranger en sortira renforcée, cette approche coordonnée constituant un atout pour chacun. Une politique qualitative d’accueil des étudiants et des enseignants chercheurs peut aussi être un instrument extrêmement favorable de développement à l’international, par le biais d’outils comme la facilitation d’acquisition de logement, de l’obtention du visa, d’un numéro de compte bancaire, d’une assurance etc., à l’instar de ce que réalisent les centres d’accueil EURAXESS**. Les étudiants et les enseignants chercheurs - s’ils sont bien accueillis seront en effet les meilleurs ambassadeurs des établissements – et du pays- qui les ont accueillis J

* Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur ** Euraxess France est un réseau de plus de 20 centres localisés sur l’ensemble du territoire français pour apporter une aide personnalisée aux chercheurs ainsi qu’à leur famille à chaque étape de leur mobilité

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Une stratégie « payante » est celle qui permet l’atteinte d’objectifs. Un tel qualificatif ne va pas de soi...

SONIA DUBOURG-LAVROFF

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Sonia DUBOURG-LAVROFF Directrice des relations européennes et internationales et de la coopération du ministère de l'éducation nationale et du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche

Les établissements d’enseignement supérieur français n’ont pas tous lancé une réflexion approfondie sur l’articulation de la dimension internationale et européenne avec les principales missions qui leur incombent. Aujourd’hui, les établissements sont poussés, grâce à leur grande autonomie de gestion, à repenser leurs identités qui sont plurielles. Ils ont une position internationale à défendre. Celle-ci sera d’autant plus forte qu’ils l’auront définie en plein accord avec les autres acteurs des territoires où ils seront implantés et surtout avec leurs professeurs et cadres administratifs. Ils réussiront une stratégie internationale en choisissant des priorités géographiques et des modalités d’intervention adaptées à leurs ambitions raisonnables et particulières. Mais qu’ils généralisent la mobilité des étudiants ou installent un établissement secondaire ailleurs dans le monde, qu’ils privilégient l’enseignement du français à des débutants ou les cotutelles de thèses, ils devront obéir à quelques règles : prioriser, évaluer, encadrer les initiatives par des partenariats formalisés et respecter les identités des établissements avec lesquels ils vont installer une relation de confiance et d’amitié pour longtemps ! J

ADHÉSION À L’ACA

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C’est officiel : l’Agence 2e2f est désormais membre d’ACA - Academic Cooperation Association (Bruxelles). Ce think-tank dédié à l’internationalisation de l’enseignement supérieur est reconnu pour la qualité de ses études, publications et conférences, notamment dans le champ de la mobilité étudiante. Il rassemble les organisations nationales d’une quinzaine de pays, comme le DAAD, le British Council ou le Nuffic. Cette adhésion est la reconnaissance du rôle stratégique de l'Agence sur le plan national en tant qu'opérateur de la mobilité sortante. http://www.aca-secretariat.be

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Réfléchir à la mise en oeuvre rapide d'un opérateur de mobilité sortante qui pourra guider les établissements

ANTOINE GODBERT

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Antoine GODBERT Directeur de l'agence Europe-EducationFormation France

Depuis quelques années, les géopoliticiens insistent sur l'importance des stratégies de « soft power » dans la compétition entre les grands pôles mondiaux. L'attractivité des établissements d'enseignement supérieur ainsi que leur capacité à se projeter à l'étranger constitue une partie désormais non négligeable de ce « soft power ». Dans ce contexte, les universités doivent réussir à utiliser leur présence à l'international comme un levier important de leur développement, tout en concourant au rayonnement de leur pays d'origine. C'est cette dualité qui assure aujourd'hui la force d'Oxbridge, de Stanton ou de Columbia, bien au-delà des photographies instantanées que constituent les classements internationaux, aiguillons certes nécessaires pour des réorientations de moyen terme mais tremplins peu utiles à long terme. Il y a fort à parier que les réflexions en cours sur la mise en place de critères objectifs pour un classement européen insisteront d'ailleurs sur cette capacité à privilégier les stratégies de long terme, en lien étroit avec les milieux économiques et les forces vives des territoires.

Le plus important est donc de savoir envisager le long terme, ce que rendent désormais possible les nouvelles opportunités offertes par la loi LRU. C'est de la capacité à savoir se présenter comme un moteur du triangle de la connaissance entre entreprises innovantes et laboratoires de recherche performants que les universités pourront construire une dynamique positive à l'international. C'est ainsi qu'elles sauront attirer les meilleurs enseignants-chercheurs comme l'ont montré depuis 10 ans les universités polytechniques de Lausanne et de Zurich. C'est ainsi qu'elles retiendront les meilleurs doctorants à l'échelle mondiale, comme le démontrent chaque année les meilleures universités californiennes ou pennsylvaniennes. C'est ainsi qu'elles seront attractives pour des étudiants venus d'espaces très diversifiés qui seront les premiers à apprécier les investissements de long terme, qu'ils concernent le patrimoine, les équipements ou les liens avec les entreprises exportatrices, comme le mettent en œuvre aujourd'hui les meilleurs établissements chinois, singapouriens ou brésiliens. C'est ainsi enfin qu'elles pourront dépasser les luttes traditionnelles internes à notre système national au profit d'une énergie créatrice commune. Ce choix en faveur du long terme a des conséquences. Il implique désormais de privilégier des partenariats moins nombreux, mais plus solides, construits au niveau des équipes doctorales ou des départements, plutôt que de laisser chaque enseignant-chercheur construire son petit réseau. Il conduit à réfléchir à la mise en œuvre rapide d'un opérateur de mobilité sortante qui pourra guider les établissements vers les cibles géographiques et scientifiques les plus intéressantes pour leur développement comme pour le rayonnement de la France et de l'Union européenne. Ce choix nécessite enfin de donner aux services en charge des relations internationales un rôle accru au sein des universités mais aussi les moyens d'entretenir des relations efficaces avec leurs homologues des autres universités incluses sur un même territoire – en particulier au sein des PRES –, avec leurs équivalents dans l'enseignement scolaire (DAREIC notamment) et ce, afin de réfléchir à la construction de filières d'excellence dès le plus jeune âge dans les collectivités, afin de mettre en avant des stratégies facilitant les économies d'échelle en termes de lobbying et de présence à l'étranger, et, enfin, au sein des entreprises les plus performantes à l'international pour assurer des débouchés rapides aux étudiants de toute origine. J

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LE PROGRAMME

Tempus FÊTE SES 20 ANS D’EXISTENCE À BELGRADE

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« Investir dans l’éducation est le moyen le plus rapide de résoudre les écarts de développement » : c’est par ces mots que le président serbe, Boris Tadic, a ouvert les cérémonies de célébration des 20 ans du programme Tempus dans la capitale serbe. « Participer au programme Tempus est pour la Serbie le moyen de partager les valeurs de civilisation de l’Europe » a-t-il ajouté, exprimant clairement le souhait de son pays d’accéder au statut de candidat officiel à l'entrée dans l’Union européenne. Rarement un programme n'aura été aussi lié à une histoire politique.

David O’Sullivan, Directeur général administratif du Service européen pour l'action extérieure, un des « pères fondateurs » de Tempus, a rappelé que le programme avait été créé en un temps record dans les mois qui ont suivi la chute du mur de Berlin en novembre 1989 : "Il faut agir dans le domaine de l’éducation", avait suggéré le président François Mitterrand dès décembre 1989. Le 7 mai 1990, le programme Tempus était adopté avec un budget de 320 millions d’ECU pour 1990-1993, largement supérieur à celui dédié alors au programme Erasmus. « Le programme est allé largement au-delà des rêves les plus fous de ses fondateurs » a conclu David O’Sullivan devant les 200 représentants des 56 pays participant à la conférence.

1. Rapport de conférence des Communautés européennes «La dynamique Tempus dans l’enseignement supérieur, 14-15.11.1997, Slovénie», Communautés européennes, Luxembourg, 1998.

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En 20 ans, Tempus s’est en effet progressivement ouvert à tous les pays du voisinage européen dans les confins orientaux, puis en méditérranée, et enfin, en Asie Centrale. « Tempus a servi de catalyseur pour la réforme de l’enseignement supérieur au sein des 56 pays participants » a rappelé Stefan Füle, Commissaire à l’élargissement et à la politique de voisinage. « Ce programme a été l’une des pierres angulaires du processus d’élargissement de l’Union européenne et a contribué à la prépa-

ration des pays candidats à l’adhésion. Aujourd’hui, il continue à jouer un rôle capital en participant à la modernisation des établissements d’enseignement supérieur et en créant un espace ouvert permettant de renforcer la coopération avec l’Union européenne ». Il est vrai que s’étendant du Portugal a la Mongolie et couvrant plus de 2 200 établissements d’enseignement supérieur, le programme Tempus constitue "le plus vaste réseau universitaire de toute l’histoire de l’enseignement supérieur"1. Pour Jordi Currel, directeur général Education et Culture à la Commission européenne, «les changements sociaux en cours dans les pays voisins de l’Union européenne et les défis auxquels les systèmes d’enseignement supérieur sont confrontés permettent aisément d’imaginer que Tempus continuera à jouer un rôle clé dans les 20 prochaines années. Comme cela a été souligné à l’occasion du dernier World Economic Forum : le capital humain est en train de remplacer le capital financier en tant que moteur de la prospérité économique. C’est pourquoi nous devons apporter une attention particulière au développement de notre capital humain. Les réformes doivent donc continuer dans l’enseignement supérieur »


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BELGRADE

Conférence du 20 ème anniversaire Tempus Belgrade, le 29 mars 2011

La grande famille Tempus, largement mobilisée autour de ce 20ème anniversaire, peut donc se tourner avec sérénité vers l’avenir : s’il est encore trop tôt pour tracer les contours précis des programmes 2014-2020, la Commission européenne, s’est engagée à poursuivre les activités et objectifs actuellement couverts par ce programme sans égal J

Quitterie Gadret Chargée du programme Tempus, Pôle développement Agence Europe-Education-Formation France.

20 ANS DE PROGRAMME TEMPUS EN QUELQUES CHIFFRES - 1.4 milliards € de financements, soit un budget moyen de 68 millions € par an - Plus de 1400 établissements d’enseignement supérieur européens et 800 établissements des 27 pays partenaires impliqués depuis 1990 - Plus de 3800 projets de coopération financés LA FRANCE EST PARTENAIRE DE 1335 PROJETS EN 3ÈME POSITION DERRIÈRE LE ROYAUME-UNI ET L'ALLEMAGNE

INFORMATION TEMPUS : WWW.2E2F.FR

Antoine Godbert, Directeur Agence Europe-EducationFormation France, Zarko Obradovic, Ministre de l’éducation serbe, Sonia DubourgLavroff, Directrice des relations européennes et internationales et de la coopération du ministère de l'éducation nationale et du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche

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DANS LES COULISSES DE L'AGENCE NATIONALE OOM

Le contrôle DES PROJETS

Pour ses lecteurs, Soleo poursuit son travail d’explication de la gestion des projets européens pour laquelle œuvrent, à l’Agence nationale, 40 collaborateurs. Dans ce numéro, Soleo a choisi d’exposer un sujet qui peut paraître ingrat, le contrôle des projets, mais qui, en réalité, s’avère être un instrument de rapprochement de l’Agence avec ses interlocuteurs sur le terrain, tout autant qu’un instrument d’évaluation financière et qualitative.

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Comme toute utilisation de deniers publics, celle des fonds européens par les bénéficiaires du programme EFTLV fait l’objet de contrôles financiers, qualitatifs et procéduraux requis par la Commission européenne et strictement encadrés. LE CONTRÔLE DE LA BONNE UTILISATION DES FONDS ET LE PRINCIPE D’ÉQUITÉ DES BÉNÉFICIAIRES

Le principe qui prévaut est celui de l’équité des bénéficiaires : mêmes règles d’utilisation par tous des fonds européens dédiés au programme EFTLV. Dans ce cadre, toutes les actions sans exception doivent être passées au crible des contrôles et nul ne saurait y échapper sous peine de manquement à la réglementation européenne en vigueur. Les dossiers soumis à vérification sont sélectionnés par l’Agence et répartis en quatre catégories : - le contrôle in situ en cours de réalisation de projet, - le contrôle approfondi sur pièces après réalisation, - l’audit in situ financier, - l’audit in situ de système et financier.

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Ces divers modes opératoires visent à recueillir l’assurance d’une saine gestion des projets européens, d’un triple point de vue financier, qualitatif et procédural. LE CONTRÔLE FINANCIER DE L’UTILISATION DES FONDS

Tandis que le travail inhérent au contrôle approfondi s’effectue au vu des pièces prouvant la réalisation effective du projet et des mobilités y afférant, certaines actions telles Erasmus et Leonardo Transfert d’Innovation donnent lieu à audit financier in situ : dans ce cas, c’est au sein de l’établissement qu’a lieu le contrôle de toutes les pièces du dossier. L’APPRÉCIATION QUALITATIVE

Mais le contrôle des projets n’est pas exclusivement financier, loin s’en faut. C’est ainsi que l’évaluation qualitative peut avoir lieu sous forme d’une visite aux porteurs de projet au sein même de leur établissement et pendant la réalisation du projet. Basées sur des entretiens, ces visites sont destinées à s’assurer du bon déroulement du projet, et s’inscrivent dans une démarche pédagogique et de conseil.


DANS LES COULISSES

L’évaluation qualitative peut aussi s’inscrire dans le cadre d’un contrôle approfondi sur pièces, la vérification de l’utilisation de la subvention allant de pair avec l’assurance que le projet a effectivement donné lieu à des travaux pédagogiques et une réalisation finale de qualité. LE CONTRÔLE DE SYSTÈME ET DE PROCÉDURES

Enfin, l’audit de système, sous forme de visite in situ avec entretien avec les acteurs du projet est réservé aux établissements d’enseignement supérieur dans le cadre d’Erasmus, ainsi qu’aux organismes porteurs de projet Leonardo Transfert d’Innovation. Il vise à situer l’établissement dans son contexte, à évaluer les procédures en vigueur ainsi que la gestion du projet, jusque dans son aspect financier. LA PHILOSOPHIE DU CONTRÔLE

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plus près du terrain. C’est dans cet esprit que les divers contrôles et audits donnent lieu à des recommandations que les porteurs de projet, en mesurant le bienfondé, mettent en œuvre sans délai. On aura compris que, loin d’être une formalité purement réglementaire, les contrôles et audits représentent une occasion et un moment privilégiés pour l’agence de rentrer en contact étroit avec les porteurs de projet, et réciproquement. Principe d'équité - transparence dans la gestion financière, qualité des travaux de coopération et optimisation des procédures – sont les tenants et aboutissants d’une politique qualité qui trouvera sa pleine réalisation dans une coopération et une synergie étroites entre l’Agence et les porteurs de projet

Marie-Josée Biondini

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Marie-José Biondini Responsable de la Cellule Contrôles primaires Agence Europe-Education-Formation France

Que les organismes ou les particuliers bénéficiaires soient occasionnels ou récurrents, la philosophie du contrôle réside dans un souci d’amélioration constante de la gestion des projets, par une démarche pédagogique, et au

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Comenius LE « GALILÉE DE L’ÉDUCATION »

Après Grundtvig dans le numéro 26, Soleo poursuit la présentation des grandes figures qui ont donné leur nom aux programmes éducatifs européens. Portrait du grand intellectuel tchèque dont les principes éducatifs inspirent encore l’Europe. Par Son Excellence, Madame MARIE CHATARDOVÁ, Ambassadeur de la République Tchèque en France.

Jan Amos Komenský1, aurait sans doute pu présider aux destinées de la République tchèque moderne car à l’instar du président philosophe Masaryk et de nombreux dirigeants tchèques à sa suite, il fut un intellectuel de premier plan chez qui l’action fut l’aboutissement de sa réflexion. Sa vie fut pensée avant d’être vécue et les vicissitudes qui en résultèrent n’eurent pas de prise sur sa volonté. Ce trait de caractère qui est cultivé chez les Tchèques, leur donne une propension parfois agaçante à être sceptiques sur leur situation mais en même temps, ce scepticisme favorise un certain pragmatisme puisque la pensée en action est en permanence à la recherche d’une confirmation de l’expérience.

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Comenius a vécu ainsi dans une situation extrême, alors que l’Europe est déchirée et que sa situation personnelle en est profondément affectée. D’une part, il subit les guerres de religion pendant lesquelles certaines régions d’Europe centrale perdent 2/3 de leur population. Ses deux premières épouses disparaissent, de même que sa bibliothèque. D’autre part, il est un homme de son temps,

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héritier des guerres hussites, du millénarisme, de l’ésotérisme. A l’aube des Lumières, les intellectuels sont bouleversés par la vision du monde moderne en train de naître. Une « pureté d’artiste », marque exclusive du génie Dans ce contexte troublé, Comenius conserve des instincts très purs d’explorateur, s’agissant en particulier de la pédagogie. Quelques années après la mort de ses deux premiers enfants, il développe une approche singulière, reconnue dans toute l’Europe, par-delà les divisions politiques et confessionnelles. Jules Michelet le qualifiera de « Galilée de l’éducation »2. Comme tous les génies prolifiques, on ne peut résumer ses idées en quelques lignes, quelques livres ou quelques bibliothèques... En fait, tout dépend des objectifs de la démonstration et ce qui frappe avec Comenius c’est justement qu’il soit cité toujours, quelles que soient les conclusions de ceux qui font référence à lui. Son premier « message » en matière pédagogique n’est donc pas technique, c’est plutôt une attitude face aux problèmes, une « pureté d’artiste » qui est la marque exclusive


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du génie. Tous les pays à toutes les époques entreprennent des réformes de l’enseignement. Dans nos sociétés démocratiques, les pédagogues sont souvent critiqués et pourtant, ils ne sont pas mus par une volonté maléfique. « L’attitude Comenius », si l’on peut dire, est de retenir en priorité dans ces réformes ce qui est conforme au pragmatisme et à la raison. Des recommandations pratiques pour l’éducation Un autre grand aspect de la pensée de Comenius qui dépasse là encore ses recommandations pédagogiques, c’est la prévalence de l’ordre. Pasteur de l'Unité des frères de Bohème, il oppose dans son livre le plus connu3 un monde idéal à une société décadente et pose une approche là encore très pragmatique : « Dieu veut certes que ses enfants soient libres, mais non capricieux : c’est pourquoi il les a entourés de certaines règles, mieux et plus parfaitement que tout ce que j’ai pu voir dans le monde. En vérité, j’avais vu là-bas des désordres en quantité : qui découlaient d’une part, de ce qu’il n’y avait aucune règle fixe, d’autre part, de ce que, s’il y en avait, on ne s’y tenait pas ». Pour Comenius, les écoles de son temps ont leur part de responsabilité dans le désordre, puisqu’il les considère comme « des chambres de torture pour l’intelligence, d’où ne sortaient que des ânes sauvages, des mulets sans frein et dissolus »4. Les recommandations pratiques de Comenius sont aujourd’hui bien connues, telles que : - réglementer la vie des écoles afin que les bonnes relations entre maîtres et élèves s’appuient sur une coopération entre l’école et les parents5 ; - ouvrir largement l’enseignement à tous les enfants et le rendre universel6 ; - développer chez les enfants le sens d’un progrès humain fondé sur le savoir, capable d’améliorer la sagesse des individus et leur situation matérielle7 ; - respecter le rythme biologique des enfants en leur ménageant des périodes de repos adaptées ; - faire comprendre les enseignements et ne pas se contenter de les apprendre

« Le niveau d'éducation des jeunes tchèques, de 20 à 24 ans ayant atteint au moins un niveau d'éducation secondaire supérieur est un des plus élevés dans l’Union européenne . »

par cœur ; - enseigner les langues étrangères pour permettre une meilleure compréhension des peuples. Des principes d’une grande modernité porteurs de succès L’œuvre de Comenius est très diffusée en République tchèque8, notamment parce qu’à l’époque de la renaissance nationale au début du XIXème siècle, les Tchèques y ont retrouvé des préoccupations très proches. Des générations de pédagogues depuis l’indépendance de la Tchécoslovaquie en 1918 ont donc été structurées autour des principes de Comenius. Cette « imprégnation » a été efficace en complément des méthodes traditionnelles transmises du temps de l’empire habsbourgeois. Ainsi, le niveau d'éducation des jeunes de 20 à 24 ans ayant atteint au moins un niveau d'éducation secondaire supérieur est un des plus élevés dans l’Union européenne9. Inversement, le nombre de jeunes ayant quitté prématurément l'école sans études ni formation et dont le niveau d'études ne dépasse pas l'enseignement secondaire inférieur est un des plus faibles d’Europe. Il y a là le résultat d’un ensemble efficace : la méthode syllabique est utilisée pour apprendre à lire. Les enseignants occupent une place respectée à la fois par les parents et par les enfants, mais dans le même temps, ils sont à l’écoute de chacun, sans barrière. L’enseignement des langues étrangères est développé dès les premières années de primaire de façon intensive. Le cadre public gratuit est ouvert à tous, mais les écoles ont une grande autonomie

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qui favorise une émulation entre elles et récompense les bonnes pratiques pédagogiques. L’enseignement primaire a lieu le matin mais l’après-midi, des activités sportives ou artistiques sont proposées par les écoles en complément des études ou de la garderie. Ce fonctionnement si simple à mettre en œuvre est un lointain héritage des recommandations de Comenius. Audelà des souffrances d’une existence en exil, au-delà des modes de son temps, le plus tchèque des pédagogues et le plus pédagogue des Tchèques a transmis un héritage à l’Europe. Il est naturellement une référence pour ceux qui souhaitent améliorer l’enseignement et l’éducation J

1 - « Comenius » (1592-1670) 2 - Dans son essai « Nos Fils » (1869) 3 - Le labyrinthe du monde. (1623). Au chapitre 44 4 - Cité dans l’introduction de « Art et enseignement de la prédication » (2006). L’Harmattan 5 - Leges scholae bene ordinatae (1653) 6 - Didactica magna universale omnes omnia docendi artificium exhibens (Ecrit entre 1633-1638, édité en 1657) 7 - Fortius redivivus, sive De pellenda scholis ignavia (1652) 8 - Jan Kumpera a publié une bibliographie très précise dans son ouvrage : « Jan Amos Komenský : poutník na rozhraní v k » (Ostrava – 1992), dans laquelle on constate le nombre élevé des éditions en langue tchèque 9 - Près de 92% par rapport à une moyenne européenne de 79% (2009) Eurostat

Son Excellence, Madame Marie Chatardovà Ambassadeur de la République Tchèque en France

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PLUS D'EUROPE ET D'INTERNATIONAL

LE PRIX DE

l'éducation À L'EUROPE DE LA FONDATION HIPPOCRÈNE PAR MICHÈLE GUYOT-ROSE

Créé en 2010 en s’inspirant de l’esprit des « Pères » de l’Europe, le Prix Hippocrène récompense les meilleurs projets de partenariats européens élaborés par une classe et ses enseignants. Le Prix a été remis cette année, à cinq classes sélectionnées pour « l’audace » de leur projet, lors d’une cérémonie à l’Hôtel de ville de Bordeaux. Trois Recteurs était présents ainsi que l’Agence 2e2f, co-organisatrice de l’évènement.

© Photo : Sophie Pawlak

Michèle Guyot-Rose, Présidente de la Fondation, rappelle ici en quoi « la désaffection des jeunes à l'égard de la participation aux dernières élections européennes a été un déclencheur pour inciter la Fondation à accroître ses soutiens aux actions destinées à renforcer "l'éducation à l'Europe".

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Michèle Guyot-Rose Présidente Fondation Hippocrène

La Fondation Hippocrène, depuis sa création, a soutenu des projets en faveur des jeunes Européens ou réalisés par eux, avec l'objectif de favoriser leur intégration dans l'ensemble européen et d'accéder ainsi à la citoyenneté européenne. Ce choix des fondateurs, Jean et Mona Guyot, s'inspirait directement de l'esprit des "Pères" de l'Europe et s'appuyait sur la conviction que les jeunes étaient porteurs de la construction de l'Europe de demain. La rencontre, l'échange et l'ouverture aux autres sont des notions déterminantes dans le choix des soutiens apportés par la Fon-

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dation car ils constituent le meilleur moyen pour appréhender ce que sont des Européens qui habitent un autre pays, comment ils vivent l'Europe et pour faire disparaître des préjugés qui sont encore très vivaces. Ce processus est incontournable pour accéder à une véritable citoyenneté européenne. Cultiver « la part de l’autre » L'originalité et la diversité, voire l'audace des projets proposés en 2011 par les classes des cinq Académies participant au Prix Hippocrène, ont parfaitement répondu à l'objectif d'ouverture, de découverte et de mise en situation dans le contexte inhabituel d'un pays dont on ne connaît pas toujours la langue, ni les habitants, ni les coutumes et pour y réaliser des projets très concrets. Le projet "La part de l'autre", retenu par le jury pour l'attribution du Grand Prix 2011, illustre très bien la recherche de l'objectif fixé en conduisant les élèves de la classe de 4ème bilangue du Collège Marguerite Duras de Libourne, successivement à Münster, en Allemagne et à Dublin en Irlande, pour des échanges bilatéraux avec des élèves de ces villes. Aller à la rencontre de "l'autre", constater sa différence et l'accepter et ainsi se donner les moyens de comprendre est une étape vers l'adhésion au projet euro-


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Remise des prix 2011 de la Fondation Hippocrène. Salons de l'Hôtel de ville. Bordeaux. 12 mai 2011. Le prix national a été décerné au collège Marguerite Duras de Libourne.

péen qu'est l'Union ! Le jury a été convaincu par cette aventure européenne qui s'étalera sur deux ans, fera un passage à Bruxelles et offrira l'occasion aux élèves de rencontrer Eric Emmanuel Schmidt, auteur de l'ouvrage "La part de l'autre". Elle est d'autant plus remarquable qu'elle associe tous les membres de l'équipe pédagogique (8 professeurs, 9 matières) dans une démarche très construite touchant à de nombreux centres d'intérêt. Chasser les préjugés Cinq autres projets aux intitulés prometteurs ont été récompensés au niveau académique : "Paris-Londres 2011 : des identités adolescentes au prisme du cinéma" (lycée Turgot de Paris), "Echange scientifique franco-britannique" (lycée Maine-de-Biran de Bergerac), "Ensemble in one World" (lycée René Cassin de Gonesse), "La citoyenneté européenne au cinéma" (lycée Stanislas de Wissenbourg), "L'école élémentaire d'Azille à la découverte de l'Europe" (l’école élémentaire d’Azille). Le retour des élèves sur leur expérience démontre une nouvelle fois que l'éducation à l'Europe dès le plus jeune âge reste le meilleur moyen pour préparer les générations futures à vivre l'Europe ensemble et pour chasser les préjugés et les

peurs irraisonnées qui alimentent le repli sur soi et le rejet des différences. La remise des prix cette année était d’autant plus significative qu’elle s’insérait dans les festivités de la semaine de l’Europe organisée par l’Agence 2e2f dont les actions de mobilité, en particulier Comenius et Erasmus, sont de la même inspiration que celle du Prix. La reconduite du Prix en 2012 Nous avons pu observer, grâce à notre Prix, toute la richesse des projets proposés et des expériences conduites dans les établissements par des équipes imaginatives et volontaires autour de l'Europe et de la citoyenneté européenne. Ce constat est indéniablement un encouragement à poursuivre en 2012 dans l'esprit défini lors de la conception du Prix. Nous avons été très heureux d’avoir pu réaliser l’édition 2011 avec le Ministère de l’éducation nationale et espérons pouvoir pérenniser ce partenariat. Nous étudions actuellement, outre la possibilité d’étendre le Prix à l’échelle nationale, de trouver auprès de fondations d'autres pays européens un ou des partenaires pour initier une opération analogue à l'échelle de deux ou plusieurs pays européens !

5 académies ont participé en 2011 (Bordeaux, Montpellier, Strasbourg, Versailles et Paris). La Fondation a remis à chaque classe lauréate un prix de 5000 € et un grand prix national de 10.000 €. Le Ministère de l’éducation nationale et la Fondation se sont partagés les frais de déplacement des lauréats.

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DOSSIER SPÉCIAL PLUS D’EUROPE ET D’INTERNATIONAL

2011 - ANNÉE DES

Outre-mer

FRANCE MÉTROPOLITAINE SAINT PIERRE-ET-MIQUELON

SAINT MARTIN POLYNÉSIE FRANÇAISE

SAINT BARTHÉLÉMY

GUADELOUPE MARTINIQUE MAYOTTE GUYANE WALLIS ET FUTUNA LA RÉUNION

NOUVELLE CALÉDONIE

TERRES AUSTRALES ET ANTARCTIQUES FRANÇAISES

LE RÔLE DÉTERMINANT DES RÉGIONS ULTRA-PÉRIPHÉRIQUES DANS LA COHÉSION DE L’UNION EUROPÉENNE

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DOSSIER SPÉCIAL

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L'EXIGENCE MARTINIQUE

d'ouverture

À L’INTERNATIONAL DE LA MARTINIQUE

Le séminaire académique sur les Relations internationales qui vient de s’achever en Martinique annonce, selon une enquête menée par le Rectorat, que 56 % des établissements scolaires locaux ont organisé pour leurs élèves un voyage d’étude à l’étranger ces trois dernières années. Les autorités éducatives et territoriales veulent aller plus loin par une série de mesures incitatives en faveur de la mobilité où l’Europe tient une large place. Par André Siganos et Laurent Prévost.

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André SIGANOS Recteur de l'académie de Martinique

L’un des axes du projet de développement 2010-2013 pose les bases pour la Martinique de l’ouverture à l’international et à la culture par l’organisation de stages en entreprises à l’international pour les jeunes en formation » ? Dans ce dispositif, quelle place prend l’Europe et les valeurs qu’elle porte ? Il faut d’abord comprendre pourquoi la Martinique a un besoin particulièrement pressant d’une augmentation très significative de son internationalisation : non seulement, à l’heure de la mondialisation, il n’est plus envisageable, comme partout ailleurs, que les jeunes ne fassent pas l’expérience de mobilités nécessaire à leur ouverture d’esprit, à l’acquisition de compétences nouvelles dues à ces séjours à

l’étranger, non seulement l’immersion linguistique et culturelle est devenue un atout imprescriptible pour une insertion professionnelle réussie dans le monde d’aujourd’hui, mais le positionnement géopolitique de notre région rend en outre quasi obligatoire cette ouverture internationale. Il va de soi que l’Europe, dans ce cadre, joue un rôle majeur, non seulement parce que les dispositifs d’aide à la mobilité sont particulièrement puissants et bien organisés, mais parce que, en dépit de notre voisinage caribéen et américain, c’est bien le modèle européen des études universitaires qui prévaut ici, avec un attrait tout particulier pour des pays comme l’Irlande, l’Allemagne, les Pays-Bas, l’Italie ou l’Espagne. A cela s’ajoute l’ancrage très français de la Martinique, quoi qu’on en dise : le fait que des jeunes participent par ailleurs à toutes sortes de compétitions et de rencontres, notamment sportives, au niveau national, les amène tout naturellement à circuler en Europe et à souhaiter un séjour dans l’un de ses pays. Le séminaire académique sur les relations internationales* que je viens d’organiser montre qu’à peine la moitié de nos établissements commence à développer une vraie sensibilité internationale. Ce qui est réconfortant, c’est que tous les programmes européens suscitent l’enthousiasme. En quoi, selon vous, la formation des jeunes par une mobilité en Europe participe-t-elle au développement de la cohésion territoriale ? Cette question est particulièrement délicate. Il va de soi que l’Europe comme destination d’étude ou de séjour professionnel ou culturel, parce qu’elle constitue un trait commun territorial, participe au développement d’une cohésion territoriale renforcée depuis bien longtemps par l’aide extrê-

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DOSSIER SPÉCIAL

mement substantielle que l’Europe apporte aux Régions ultrapériphériques (RUP). Mais c’est surtout à la cohésion sociale que participe fortement l’Europe par les mobilités qui se font chez elle, notamment par la diffusion des valeurs européennes. Reste que cette mobilité, source d’une élévation très significative de l’ambition dont manquent trop souvent ici nos jeunes, débouche quelquefois sur un appétit que ne pourra plus combler notre petit territoire et peut se solder par une perte de substance : l’appel de l’ailleurs devient si important que nos élèves décident parfois de quitter définitivement leur région. Il importe donc de trouver le juste équilibre entre une mobilité sortante et une mobilité entrante qui permette de vivre aussi sur place plus amplement aux côtés de la jeunesse européenne et de donner l’envie à celle-ci de développer ici leurs talents. C’est la raison pour laquelle l’internat d’excellence qui va voir le jour à Fort-de-France (de la 6ème aux classes préparatoires aux grandes écoles et dont la thématique est précisément celle des relations internationales), sera doté d’une section internationale et devra attirer des jeunes européens, tout comme doivent se développer les échanges en partenariat avec des

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Si l’ouverture sur la coopération régionale reste la priorité de l’académie de Guyane, avec une préférence appuyée pour les projets en direction du Brésil, du Surinam et de la Caraïbe, la Guyane s’ouvre aussi à l’Europe et aux programmes européens d’éducation et de formation. On peut citer le très bon projet de mobilité Leonardo du lycée Gaston Monnerville de Kourou qui fait partir pour huit semaines de stages 18 jeunes de Bac Pro « Comptabilité » vers le Royaume-Uni et l’Irlande.

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Autres exemples individuels : Frédérique Loumeto, à la recherche d’un emploi dans l’éducation a choisi l’action « assistanat Grundtvig » pour partir 45 semaines au Royaume-Uni enseigner le français et aider son établissement d’accueil à mettre en place le programme EFTLV vers les Dom-Tom (Guadeloupe, Guyanne, Martinique). Laurent PRÉVOST Préfet de la Martinique

établissements européens qui commencent à voir le jour. Il est également important que les jeunes de Martinique puissent découvrir l’international par une mobilité de « zone » : en direction des îles voisines, de Saint-Domingue, de la Barbade, mais aussi du continent américain : la découverte d’une identité européenne passe également par la comparaison ! C’est pourquoi d’ailleurs les trois recteurs de Guadeloupe, Guyane et Martinique viennent de signer la fondation d’un conseil de coopération des académies des Amériques (COCAAM) qui va nous permettre de nous porter tous ensemble dans des actions internationales. L’Agence 2e2f, pour toutes ces raisons, est pour nous d’une aide très précieuse J

Propos recueillis par Dominique Ardiller Rédactrice en chef de Soleo

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GUYANE

Initiative individuelle aussi pour le rédacteur en chef de Réseau France Outre-mer, JeanGilles Assard, également président du Geldar de Kourou Footeball Club qui profite d’une bourse de formation Grundtvig pour aller parfaire son anglais au Richard Language College de Bornemouth (UK). Ses activités l’obligent à le parler couramment. Il compte aussi sur Grundtvig pour déposer un projet avec les seniors de son association, autour du sport, en partenariat avec le Royaume-Uni… A suivre…


DOSSIER SPÉCIAL

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UN MARATHON

MARTINIQUE

Comenius DE 40 000 KMS ET BIENTÔT DES JEUX OLYMPIQUES EN GRÈCE

Le projet Comenius, Keep Fit and ActiveBe Healthy and Happy, du Lycée Raymond Néris du Marin cultive, avec ses dix partenaires européens, l’adage : « une tête bien faite dans un corps fort » Témoignage de Max Steph, enseignant en mathématiques et sciences physiques, responsable du projet.

Baie du Marin, Martinique

« Le Lycée Professionnel Raymond Neris accueille environ 700 élèves âgés de 15 à 20 ans. Plusieurs formations y sont dispensées : bureautique (secrétariat et comptabilité) ; maintenance automobile et nautique ; métallerie ; boulangerie pâtisserie ; coiffure ; électrotechnique ; métiers de la couture. Depuis plus de 20 ans, le lycée s’est ouvert à l’international. Nous avons réalisé des projets avec le Canada, Miami, la Barbade, Sainte-Lucie. Toutefois les financements de ces derniers étant insuffisants et difficiles à obtenir, nous nous sommes intéressés aux projets européens. Le premier projet européen multilatéral terminé, certains partenaires en ont proposé un autre basé sur l’hygiène alimentaire. C’est tout naturellement que nous avons été invités à y participer. Notre travail sur ce projet est d’informer les élèves et la communauté sur les conséquences d’une nourriture malsaine et d’un manque d’exercices physiques et de les sensibiliser à une vie active et saine comme étant un investissement sur l’avenir. Ce projet permet aux élèves d’améliorer leurs compétences linguistiques (en anglais) et de s’approprier un vocabulaire spécifique. En géographie, les participants peuvent découvrir l’Union européenne, son histoire, sa diversité ainsi que ses prérogatives.

très opportuns pour nos élèves qui peuvent découvrir d’autres échelles que celle de la Martinique, d’autres cultures, acquérir des compétences linguistiques, développer la solidarité, la tolérance ainsi que le savoirvivre et le respect de l’autre. Je suis enseignant de mathématiques et de sciences physiques depuis une trentaine d’années. Cela fait près de quinze ans que je m’intéresse aux projets internationaux afin de permettre à mes élèves de s’ouvrir sur l’extérieur et pour moi d’établir des contacts avec des collègues étrangers. Le projet, Keep Fit and Active-Be Healthy and Happy, promeut l’importance d’une alimentation équilibrée et souligne les bienfaits de l’exercice physique dont l’absence est de nos jours un sujet de préoccupation pour un nombre croissant d’adolescents dans notre île. Cette situation est d’autant plus dramatique que les fast-foods fleurissent ici. Le projet a donné lieu à un marathon insolite qui s’est déroulé dans notre lycée de la façon suivante : les étapes étaient des villes européennes du projet et nos élèves ont dû les relier en pratiquant la course à pied et la course de « yoles » (voiliers traditionnels). Nous avons ensuite totalisé les distances « symboliques » parcourues dans notre établissement et dans les écoles partenaires du projet. Il fallait parcourir 40 OOO km. Le marathon s’est terminé avec une course à pied, en Espagne en avril 2011, qui réunissait toutes les écoles. Nous travaillons maintenant à des « Jeux olympiques » qui auront lieu en Grèce en 2012 et dont l’organisation sera discutée lors du prochain meeting de Roumanie, en octobre 2012. »

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Découvrir d’autres échelles que celles de l’île Les partenariats européens nous enrichissent culturellement. Ces rencontres permettent en effet aux enseignants d’échanger les méthodes et démarches pédagogiques (réussites, échecs, méthodes d’apprentissage). Et ils sont

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DOSSIER SPÉCIAL

ABSENTÉISME

zéro GUADELOUPE

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« Le projet Comenius Change ? We can de l’Ecole mixte 1 de Grand-Camp aux Abymes, a suscité un véritable engouement au niveau de l'équipe pédagogique et un réel changement de mode de travail. Nous notons actuellement un absentéisme zéro, tant au niveau des élèves qu'au niveau des collègues impliqués dans ce partenariat. Personne ne veut manquer une occasion de travailler ensemble pour respecter toutes les échéances du projet. »

Ainsi témoigne Julie Elbourg, professeur des Ecoles, responsable du projet Change ? We can dont le thème porte sur l'Education à l'Environnement et au Développement Durable (EEDD). « Nous souhaitons que les élèves participent à la préservation de la nature par des actions concrètes : étude de la filière du recyclage, sensibilisation à la collecte sélective et à la façon dont les tonnes de déchets ont une incidence, à court et à long terme, sur la faune, la flore et l’homme. Nous souhaitons également améliorer le niveau linguistique de nos élèves, qu'ils deviennent plus conscients de notre citoyenneté européenne, malgré notre éloignement du continent européen et qu'ils sachent accepter l'Autre avec ses différences en travaillant à une œuvre commune. Les autorités locales nous soutiennent de bout en bout, que ce soit pour nous équiper en matériel informatique nécessaire à une bonne communication avec nos partenaires ou pour mettre à notre disposition du matériel nécessaire à la sensibilisation des élèves à la collecte sélective par exemple. Une équipe d'ambassadeurs du tri est intervenue à l'école pour en expliquer les techniques, au travers de jeux et d’animations diverses. Du côté des enseignants, nous avons amélioré notre connaissance du système scolaire de nos partenaires, nos compétences linguistiques en anglais (langue de contact entre nous), nos compétences en Technologies de l’information et de la communication (TIC). Là encore, les autorités de l'éducation nous soutiennent et le projet fait l'objet de reportages fréquents, le dernier en date est consultable sur le site : http://www.ac-guadeloupe.fr/ Nous nous impliquons aujourd’hui dans un nouveau projet, Treasure Islands, (2011-2013) pour lequel j’ai effectué une visite préparatoire en septembre à Dartford (Angleterre). Nous attendons avec impatience le verdict pour juillet. » J

Julie Elbourg Professeur des Ecoles firmin-elbourg@orange.fr

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L'équipe du projet.

Julie Elbourg


DOSSIER SPÉCIAL

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LA RÉUNION

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La Réunion

Cascades du voile de la mariée

ÎLE MÉTISSE ET EUROPÉENNE

Perdu sur la montagne, entre deux parois hautes, Il est un lieu sauvage, au rêve hospitalier, Qui, dès le premier jour, n’a connu que peu d’hôtes ; Le bruit n’y monte pas de la mer sur les côtes, Ni la rumeur de l’homme : on y peut oublier.

Le Bernica, chanté par Leconte de Lisle dans un de ses poèmes les plus célèbres, est emblématique de La Réunion, terre de contrastes saisissants entre mer et montagne, feu du volcan et vagues de l’océan, creux des ravines et vertige du piton des neiges, pluies cycloniques d’été et sécheresse d’hiver, cirques inaccessibles et côtes surpeuplées. Sauvage et pourtant hospitalière, cette tête d’épingle dans l’océan indien vient d’être classée au patrimoine mondial de l’Unesco pour la beauté unique de ses « remparts » et de ses « hauts ». Terre de métissage, elle se caractérise par la très grande variété des populations qui l’habitent, issues d'Afrique (les Cafres), d'Inde (les Malbars et les Z'arabes), de Chine, de Madagascar, des Comores, et d' Europe, arrivés au cours des différentes phases de la colonisation et du développement de l'île. Forte de ses origines diverses et consciente des différentes étapes de son histoire, La Réunion s’est choisie une identité clairement ancrée dans l’Europe. Département français depuis 1947, elle est aussi une Région ultrapériphérique de l’Union européenne située dans l’Océan Indien, à proximité de l’Afrique et de l’Asie. Cette situation géographique originale lui confère un rôle spécifique par rapport à l’Europe, rappelé récemment par Mostapha

Fourar, recteur et chancelier des universités de l’Académie : « Dans le domaine de l’éducation, comme dans beaucoup d’autres, la réunion a un rôle clé à jouer, de rayonnement et de relais d’influence de la France et de l’Europe dans la zone de l’Océan Indien.

« L’académie de la Réunion fait partie des DOM les plus présents dans le programme EFTLV : 1er rang pour Erasmus en 2009 ; 2ème rang en 2010 pour l’ensemble des actions » Des financements sont mobilisés par l’ensemble des acteurs concernés, Etat, CT, Europe et gouvernements des pays partenaires de la zone pour contribuer à l’amélioration des systèmes éducatifs en valorisant l’expertise réunionnaise ». Ces paroles ont marqué l’ouverture de la deuxième réunion du conseil de coopération éducative de l’Océan Indien, crée en décembre 2010 ; il constitue l’outil au service de cet objectif de rayonnement : à partir d’une étude des besoins des pays partenaires, trois domaines prioritaires ont fait l’objet de plans d’actions ciblées : la francophonie, la formation professionnelle et technique, l’enseignement supérieur.

Pour maintenir son niveau d’expertise dont il fait sa carte maîtresse, le système éducatif de l’île doit relever quelques défis importants pour assurer la formation et l’insertion professionnelle d’une population dont 36% sont âgées de moins de 20 ans. Un de ces défis est celui de la mobilité, question rendue particulièrement sensible par la géographie. L’académie de la Réunion fait partie des DOM les plus présents dans le programme EFTLV (1er rang pour Erasmus en 2009 ; 2ème rang en 2010 pour l’ensemble des actions) . Il n’en reste pas moins vrai que celui-ci ne peut satisfaire l’ensemble des demandes dans sa configuration actuelle et que d’autres solutions doivent aussi être trouvées pour répondre au besoin d’ancrage régional. A l’heure où la Commission européenne a ouvert la réflexion sur son futur programme 2014-2020, il faut souhaiter, à l’instar de Philippe Leyssene, ambassadeur délégué à la coopération régionale dans l’Océan indien, qu’elle saura considérer les spécificités des régions ultra-périphériques comme une opportunité à valoriser en adaptant les outils financiers existants et en renforçant la dimension régionale des politiques de l’UE J

Chantal MANES Chargée de la Sous-Direction des affaires européennes et multilatérales, Direction des relations européennes et internationales et de la coopération, Ministère de l'éducation nationale et du Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche

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DOSSIER SPÉCIAL

LES OUTRE-MER DE NOS VOISINS EUROPÉENS DANS LEUR

implication

AU PROGRAMME

EDUCATION ET FORMATION TOUT AU LONG DE LA VIE (Lifelong Learning Programme, LLP)

Kursat Levent Egriboz, directeur d’Ecorys, agence qui gère au Royaume-Uni les programmes Grundtvig et Leonardo da Vinci, fait un tour d’horizon des initiatives en cours dans leurs Overseas Territories ( OSTs). Ces initiatives peuvent s’appuyer sur des visites d’étude, le programme Leonardo et, dans un avenir proche, Comenius Regio.

K

other partners in the Netherlands, Germany and France to share good practice in managing nature reserves in the face of climate change.

Kursat LEVENT EGRIBOZ Directeur d’Ecorys

How do your overseas countries and territories participate in the LLP ?

RETROUVER SUR SOLEOWEB l’intégralité de l’entretien avec Kursat Levent Egriboz. Il s’y exprime sur la mise en place, avec le British Council, d’une plate-forme internet faisant office de guichet unique de la mobilité pour le public britannique ; il y expose aussi quelques préconisations pour l’avenir du programme LLP 2014-2020. http://www.europe-education-formation.fr/magazine/

Propos recueillis par Nicolas Jean Mission Prospective Agence Europe-EducationFormation France

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“The short answer to this question is through perseverance and extraordinary motivation! Overseas Territories (or OSTs) are of course eligible to participate in the LLP but many organisations and individuals can struggle to overcome the practical difficulties of applying, receiving funding and participating in projects. The programme is flexible enough to help such applicants and we ensure that we allocate enough funding for the additional travel and subsistence costs they incur for participating. As a National Agency it's our job to try and make the process as easy as possible for them so for example we need to be flexible when dealing with the complex arrangements for making grant payments to their accounts. It can be difficult to promote the programme to OSTs so we try and use intermediary organisations to reach potential applicants. Although we receive only a small number of applications for the OSTs each year, we have been able to fund some excellent activities. For example St Helena National Trust are participating in a Leonardo Partnership project working with the National Trust in the UK and

Clifton Gayle from the Cayman Islands Government, Ministry of Education, Sunrise Adult Training Centre went on a five day visit in May 2011 organised by Mamak Guidance and Research Centre in Ankara, Turkey, to learn about vocational guidance of students with special needs. The visit offered the opportunity to find out more about the new approaches and methods used in vocational guidance for students with special needs, the different viewpoints in defining interests and abilities and the assessment process of these students. The study visit included visits to various organisations and schools, including special education schools, centres related to special needs and universities with special education departments. We have also funded activities involving the Overseas Territories of other participating countries. Chris Williams from Lincolnshire School Improvement Service went on a five day visit in April 2011 organised by Education Nationale - Inspection de l’Education Nationale - Académie de La Réunion in Saint-Denis, La Réunion, France on the topic of Education for Active Citizenship and sustainable development. The study visit provided Chris Williams with an array of opportunities to learn about the issues of sustainable development that La Réunion is facing and the projects and actions in place to reduce them and also to develop valuable links which could lead to collaborations between schools in Lincolnshire and La Réunion. Furthermore Chris has plans to develop a Comenius Regio project with his Italian colleague from the visit and to return to La Réunion for leading some workshops on Comenius Partnerships in the near future.” J


DOSSIER SPÉCIAL

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ENERGIES DU FUTUR ET

NOUVELLE CALÉDONIE

citoyenneté SCOLAIRE

Le projet Comenius du lycée Lapérouse de Nouméa, « Citizenship at school. Students rules », est un partenariat entre 10 établissements européens : Espagne, Grèce, Turquie, Danemark, Pologne, deux établissements en Italie et trois aux Pays-Bas. Françoise Rouam, enseignante, responsable du projet, nous donne sur le vif les grandes étapes de ce projet où les partenaires ont accompli des parcours pédagogiques et kilométriques étonnants.

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île de Lifou. Iles Loyauté.

« Le projet a pu démarrer en 2009 grâce à l'action E-twinning qui est la première passerelle avec l’Europe pour monter un projet Comenius. Un établissement polonais, près de Cracovie, m’a contactée en février 2009 pour nous inviter à rentrer dans un projet concernant 10 établissements. Les élèves ont travaillé sur les énergies du futur dans leur pays, la citoyenneté dans leurs établissements et sur les règles en milieu scolaire. Cinq séminaires s’échelonnent sur deux ans. Le premier séminaire a eu lieu en novembre 2009 en Pologne. C’était le premier séminaire de contact. Nous y sommes tous allés mais sans élèves, avec deux intervenants par délégation. Nous avons donc fait connaissance à ce moment-là. C’était une réelle opportunité pour nous qui venions du Pacifique. C’était la première fois qu’un établissement calédonien participait à un programme de cette envergure. Quel enthousiasme et dynamisme ont émergé lors de ces cinq premiers jours ! Nous nous trouvions en contact avec la diversité européenne. Il a fallu mettre en place le calendrier de travail jusqu’au séminaire suivant, en avril 2010, à Lefkada en Grèce. Certains dans le groupe, dont la Pologne et la Sicile, avaient déjà réalisé des programmes Comenius. Les Danois découvraient l’expérience comme nous. Nous nous sommes trouvés en décalage

avec le calendrier scolaire de l’hémisphère Nord. Les tâches étaient à effectuer de décembre à avril. Or nous sommes à ce moment-là en grandes vacances scolaires. J’ai donc lancé les travaux avec mes élèves par emails, en décembre, puis début février. Il leur a fallu beaucoup travailler entre février et mars afin que nous arrivions en Grèce avec les productions, un calendrier commun aux 10 établissements. Chaque étape du projet fut une grande première : le déplacement de trois élèves chez nos partenaires grecs de Lefkada qui fut pour eux la première rencontre avec la réalité européenne. Les échanges se faisaient en anglais avec des accents différents; puis ce fut le séminaire de Nouméa où les danois sont arrivés les premiers avec une exposition conçue par les élèves sur l’histoire de la construction européenne, plats typiques à la cantine, excursion avec les partenaires sur l’île de Lifou, l’une des îles Loyauté. Ce fut extraordinaire pour les Européens. Le gouvernement, l’association des parents d’élèves, les parlementaires locaux, tous ont apporté leur soutien. Tout est bénéfique dans le projet, tant du côté des élèves qui gardent un contact entre eux par email et facebook, que du côté des enseignants. Nous déposons un nouveau projet pour 2012-2014… Vive l’Europe et ses programmes d’éducation ! » J

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DOSSIER SPÉCIAL

MARTINIQUE

Erasmus & Comenius UNE VRAIE DYNAMIQUE EN MARTINIQUE

Rencontre avec Christine Delphin, Chargée de mission en Martinique pour la formation et l’insertion professionnelle par l’international auprès de la Délégation Académique aux Enseignements Techniques (DAET), en collaboration avec la Dareic. Une mission vient de lui être confiée pour optimiser les mobilités sous toutes leurs formes : Erasmus stage, partenariats Comenius… Elle rentre elle-même d’une mission de terrain en Espagne sur les traces d’étudiants Erasmus actuellement en stage.

L'

« L’objectif de ma mission consiste à booster la mobilité stages des élèves de Bacs Professionnels et de BTS, accompagner les montages de projets et leur suivi. Comme il est difficile en Martinique de trouver des terrains de stages pour certaines formations et alors que l’on souhaite faire évoluer les pratiques locales (transport, hygiène, couture, industrie..), il est vital que les jeunes en formation aient des expériences qui leur offrent ouverture pour eux-mêmes et pour ce qu’ils pourront réinvestir dans le développement économique de la Martinique. Pour les BTS il s’agit aussi de leur offrir des stages dans des entreprises différentes, aux dimensions qui n’existent pas ou peu localement. L’axe 3 du projet de développement 20102013 de l’académie « relever pour l’académie les grands défis du XXIème siècle » fait la part belle à l’organisation de stages en entreprises en international ».

L’engagement aujourd’hui des établissements scolaires martiniquais dans les Programmes Européens d’Education et de Formation Tout au Long de la Vie Les lycées qui demandent des chartes Erasmus le font souvent pour les étudiants relevant de BTS à stage obligatoire à l’étranger comme

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c’est le cas pour Commerce International ou Assistant de Manager. Le lycée général et technologique Joseph GAILLARD situé à Fort-de-France, dont l’ouverture à l’international est ancienne, offre ses bourses Erasmus à l’ensemble des sections BTS qu’il héberge. Etant situé en zone d’éducation prioritaire, il fait de cette ouverture un atout pour les jeunes, notamment dans son implication dans des projets Comenius pour des élèves de seconde qui sont ainsi préparés, avec enthousiasme, à leur futur départ en stage en BTS. Huit sections de BTS co-existent dans ce lycée et les bourses sont offertes à tous les étudiants pour des stages, de 9 à 13 semaines, alors que les exigences des référentiels sont souvent de 6 semaines. Les étudiants du BTS « Assistant de Manager » saisissent cette chance, mais d’autres sections tertiaires aussi : comptabilité, informatique de gestion, ou industrielle, technico-commercial, économie sociale et familiale, électro technique. Les mobilités s’effectuent vers l’Espagne, l’Angleterre, l’Irlande et les Pays-Bas via des organismes intermédiaires, des partenaires du projet Comenius acceptant, pour certains, d’accueillir des stagiaires. Les partenariats avec les Pays-Bas s’établissent souvent suite à une visite d’étude.


DOSSIER SPÉCIAL

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"Le choc climatique" : stagiaires en Irlande

La mobilité pour comparer d’autres systèmes et d’autres normes augmente les chances d’employabilité Les jeunes partis l’an dernier passent actuellement leur BTS. Ils ont validé le niveau de langue par le passage du TOEIC ou du BULATS. Avec ces titres, ils ont reçu leur Europass lors d’une cérémonie académique présidée par le Recteur. Les enseignants notent aussi une meilleure maîtrise de la langue étrangère aux examens et une meilleure autonomie des jeunes en deuxième année de BTS au retour du stage. A noter que l’approche d’autres systèmes s’avère très enrichissant pour les étudiants. La découverte par exemple des normes anglo-saxonnes en électro-technique qui sont aussi celles des îles anglophones de la Caraïbe peuvent offrir un marché de l’emploi à ces jeunes. Il en va de même en comptabilité avec la découverte du système de nos voisins (Trinidad, Barbade etc.), qui peut intéresser les entreprises locales qui commercent avec eux. Ouverture d’esprit, adaptabilité, sont la plus-value d’une mobilité. Notre île, toute petite et mal servie en transports en commun, ne favorise pas l’autonomie des jeunes très

entourés par leurs parents pour les transports par exemple. Les entreprises sont sensibles à ce type d’expérience qui responsabilise les étudiants et développe souvent réactivité, créativité, maturité. » J

Christine DELPHIN Chargée de mission en Martinique pour la formation et l’insertion professionnelle par l’international auprès de la Délégation Académique aux Enseignements Techniques

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BREVES

Réunion des directeurs des Agences nationales européennes. Bordeaux. Quai des Chartrons.

RÉUNIONS DES DIRECTEURS DES AGENCES NATIONALES EUROPÉENNES EN CHARGE DU PROGRAMME D'ÉDUCATION ET DE FORMATION TOUT AU LONG DE LA VIE

Antoine Godbert, Directeur de l'agence Europe-EductionFormation France et François Neuville, Délégué académique aux relations européennes et internationales (Dareic) de Paris

BORDEAUX, LE 13 MAI 2011

Dans le cadre de la semaine de l’Europe, l’Agence 2e2f a réuni une vingtaine de directeurs des agences nationales venus de toute l’Europe pour discuter de façon informelle et conviviale de sujets tels que la future programmation 2014-2020, l’organisation propre à chaque agence ou encore la coopération à mettre en place entre les agences européennes. A partir des conclusions des groupes de travail de la Commission européenne pour le futur programme, 2014-2020, les discussions ont permis de confronter les points de vue et de formuler une position commune. Ce type de réunion informelle jugée fructueuse à l’unanimité par les participants devrait se tenir régulièrement augurant d’une coopération inter-agences plus dynamique et vivante. (Pays participants : Belgique, Bulgarie, Croatie, Espagne, Finlande, Hongrie, Irlande, Lituanie, Luxembourg, Norvège, Pologne, République Tchèque, Royaume-Uni, Slovaquie, Slovénie, Suède, Suisse, Turquie). La prochaine réunion aura lieu à Sopot, en Pologne.

SESSION DE FORMATION AUX PROGRAMMES PARIS, LYCÉE LOUIS-LE-GRAND LE 18 MARS 2011

Une "session de formation sur les programmes européens d’éducation et de formation tout au long de la vie (EFTLV) destinée aux enseignants référents pour l’action européenne et internationale (ERAEI)" de l'académie de Paris a été organisée par la DAREIC de Paris. La politique européenne en matière de partenariats scolaires a été présentée par Antoine Godbert, en présence de François Neuville. Délégation académique aux relations européennes et internationales et à la coopération : http://www.ac-paris.fr/portail/jcms/piapp1_7176/europe-et-international

ECOLE SUPÉRIEURE DE L’EDUCATION NATIONALE (ESEN) POITIERS, LE 9 MAI 2011, POUR LA JOURNEE DE L'EUROPE

Antoine Godbert est intervenu devant 250 inspecteurs stagiaires de la France et des Dom, dans le cadre d’une session de formation à la mobilité internationale. Les nouveaux dispositifs de formation des personnels d’encadrement de l’éducation nationale incluent désormais une formation aux politiques éducatives et systèmes éducatifs internationaux et une mobilité individuelle d’au moins 5 jours dans un pays étranger. Le Directeur de l'Agence 2e2f a présenté le cadre des programmes européens d’éducation et de formation et les différents types d’actions européennes dont pouvaient bénéficier les stagiaires : visites d’études , partenariats Comenius et mobilité Leonardo da Vinci.

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2011, ANNÉE DES OUTRE-MER QUELQUES REPÈRES

Cette année répond à plusieurs grands objectifs parmi lesquels celui de présenter les sociétés et les cultures d’outre-mer dans la dynamique de leur modernité et de leurs traditions, en faisant mieux connaître leurs spécificités et leur apport dans les domaines politique et social, économique, culturel et environnemental ; et de placer en perspective l’environnement géographique, l’environnement francophone et l’environnement international des territoires ultra-marins avec un accent mis sur leur lien particulier avec leur environnement francophone insulaire ainsi que leur insertion spécifique dans l’Union Européenne. Le colloque organisé les 17 et 18 mai derniers à l’université René Descartes : "Enseigner l’Outre-mer, enseigner en Outre-mer" a posé la question du multilinguisme de la francophonie et de la scolarisation, rappelant que le respect de la diversité linguistique était une valeur fondamentale. La Commission européenne définit le multilinguisme à la fois comme « la capacité d’une personne à utiliser plusieurs langues et la coexistence de plusieurs communautés linguistiques dans une zone géographique donnée ». Les dispositifs d’apprentissage de la langue française et des langues maternelles, notamment par des intervenants en langue maternelle, doivent permettre une scolarisation réussie de l’élève tout en préservant la diversité des langues et en contribuant au dialogue interculturel. Des États Généraux du Multilinguisme d’Outre-mer seront organisés à Cayenne, fin 2011.

Soleo www.2e2f.fr Directeur de la publication Antoine Godbert Rédactrice en chef Dominique Ardiller Maquette, iconographie Julia Robisco Presse Lydie Lagouarde

Ont collaboré à ce numéro Marie-José Biondini Son Excellence, Marie Chatardovà Christine Delphin Sonia Dubourg-Lavroff Julie Elbourg Quitterie Gadret Emmanuelle Gardan Michèle Guyot-Rose Patrick Hetzel Kursat Levent Egriboz

Ecrivez à Soleo ! soleo@2e2f.fr Chantal Manes Laurent Prévost Françoise Rouam André Siganos Max Steph Louis Vogel

Crédits photo Sophie Pawlak Université de France Comté Shutterstock Images Diffusion gratuite. Édité avec le soutien financier de la Commission européenne. Le contenu de cette publication et l’usage qui pourrait en être fait n’engagent pas la responsabilité de la Commission européenne.

Impression Laplante 33700 Mérignac ISSN 1634 - 443X Régie publicitaire France Édition Multimedia 66334 Cabestany Magazine imprimé en France à 30 000 exemplaires sur papier PEFC.

10-31-2222 / Certifié PEFC / pefc-france.org

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