Expansion Madagascar N°07

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G R IT U AT

Le Magazine du Syndicat des industries de Madagascar

N° 7 - Janv. / Fév. 2011

D’INDUSTRIALISATION

Un bilan mitigé

Nos Régions | SAVA Une Région de prédilection pour les cultures de rente Je consomme Malgache, nous y gagnons !

J’achète Malgache et tous nous y gagnons !

Point de vue | André Ramaroson « Nous pouvons produire ce dont les consommateurs ont besoin » Manjifa ny vita gasy aho, tombony ho an’ny rehetra ! Mividy ny vita gasy aho, tombony ho antsika rehetra

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Sommaire

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éditorial. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 Capital eco.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

50 ANS D’INDUSTRIALISATION | Un bilan mitigé.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

POINT DE VUE | Olivia Ratrimoarivony.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

POINT DE VUE | Thierry Ramaroson.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 POINT DE VUE | André Ramaroson. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18 POINT DE VUE.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 Richard Fienena | MEI...

Le Magazine du Syndicat des Industries de Madagascar

« Lutter contre les importations frauduleuses ou sauvages ». . . . . . . . . . . . . . . . . . 21

Région | sava.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 REGION SAVA | Une Région de prédilection pour les cultures de rente.. . . . . . 24 1 bis, Rue Patrice Lumumba Antananarivo - Madagascar Tél. : +(261) 20 22 240 07 E-mail : syndusmad@moov.mg Site web : www.sim.mg

Coopérative « SAVA Volamaitso » | Relancer la filière cacao. . . . . . . . . . . . . . . . . . 25

Vanille Mad | Des laboratoires pour vérifier la qualité des produits. . . . . . . . 26

Vanille | Le déclin de la filière.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

Bois de rose | Les opérateurs demandent un atelier. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30

Agro-industrie | Soavoanio, en difficulté financière.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32

« Soa Finiavana » | L’unique société de transformation de fruits

et légumes de Sambava.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34

Directeur de publication Claude Ratefiarisoa

AFH Export | Leader dans l’exportation des épices.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34

Coordonnatrice Léa Ratsiazo

Tableau de Bord Economique.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36 Les industries au quotidien.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38

Fondateurs Hery Ranaivosoa, Fredy Rajaonera, Laurent Rajaonarivelo, Stéphane Raveloson, Damase Andriamanohisoa, Karim Barday, Francis Rajaobelina, Franck Fohine, Claude Ratefiarisoa

Ont collaboré à ce numéro - Fanjanarivo Symonette - Felana Lalatiana - Mialy Razanajatovo

La vie du sim. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40

Régie Publicitaire : Mialy Razanajatovo

Chronique des lecteurs. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42

Maquette : Hery Lalaina Razafimamonjiraibe Impression : Imprimerie NIAG Tél. 22 204 20 - niag@iris.mg Dépot légal : N°07-Décembre 2010


EDITO

Editorial Mesdames et Messieurs, chers lecteurs, Avec cette parution n° 7, EXPANSION MADAGASCAR entame sa deuxième année d’existence. En dépit d’une conjoncture difficile, notre magazine s’est maintenu et s’est développé grâce à vous. Nous vous adressons nos plus vifs remerciements. Sans vos encouragements et conseils avisés, sans votre participation à la rédaction d’articles pertinents sur la vie économique du pays, et bien évidemment, sans l’appui des annonceurs, EXPANSION MADAGASCAR serait resté du domaine du rêve. Une fois encore merci, et nous comptons plus que jamais sur votre soutien indispensable pour l’avenir. Comment est né EXPANSION MADAGASCAR ? Au plus fort de la crise, alors que les acteurs de la vie économique tant publics que privés, nationaux ou internationaux, techniques ou financiers, se concentraient sur d’autres questions, le Comité Directeur a organisé des réunions d’échanges avec quelques membres représentatifs du secteur (petites, moyennes et grandes entreprises) afin de réorienter les actions de l’Association. Parmi les recommandations, il a été évoqué de renforcer le lobbying, de faire connaître la mission du SIM et l’importance du secteur industriel à un public plus large, d’informer ce dernier des idées et propositions d’amélioration du climat des affaires, et de promouvoir le secteur. Avons-nous atteint notre objectif ? La réponse est sans ambages OUI. La preuve en est que les demandes ne sont pas totalement satisfaites. C’est ainsi qu’il a été décidé de mettre notre magazine en ligne. A titre d’illustration, le nombre annuel de visiteurs est passé de 300 entre 2008 et 2009, à plus de 3000 depuis mai 2010. Les relations avec les partenaires se sont dynamisées, en particulier avec l’Administration avec laquelle des avancées majeures ont été constatées à travers l’adoption de mesures visant à l’amélioration du climat des affaires. Bien sûr, l’idéal est loin d’être atteint, nous restons cependant confiants pour l’avenir et croyons possible de maintenir et même de renforcer cette relation de partenariat avec l’Administration pour travailler avec elle au renforcement et à l’essor du tissu industriel malgache. En point d’orgue, EXPANSION MADAGASCAR présente dans ce numéro une rétrospective de 50 années d’industrialisation à Madagascar. Alors que la réussite des pays dits développés s’est faite en grande partie grâce à une industrialisation réussie, force est de constater que La Grande Ile présente un bilan industriel mitigé, voire négatif, qui explique une partie de la faiblesse du développement économique de Madagascar. Malgré les potentialités du pays, les stratégies successives infructueuses engagées, la reconnaissance insuffisante de l’industrie comme élément clé du développement du pays, et l’absence d’une politique de développement industriel réellement volontariste et courageuse, sont très certainement à l’origine des retards enregistrés. Nous visiterons ensuite la région de la SAVA (Sambava – Antalaha – Vohémar – Andapa) qui est historiquement la région la plus riche de Madagascar, célèbre pour sa vanille qui en a fait sa renommée mondiale mais dont le déclin actuel est à déplorer. Cependant le développement du cacao se révèle prometteur. Et en attendant les détails de la loi des finances 2011, que nous ne manquerons pas de vous décortiquer et analyser dans notre prochain numéro, nous vous souhaitons un Joyeux Noël et une très Bonne Année 2011.

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EXPANSION MADAGASCAR - JANVIER / FEVRIER 2011 - N°7



CAPITAL ECO

50 ANS D’INDUSTRIALISATION

Un bilan mitigé Faisant souvent figure de parent pauvre de la politique économique, l’industrie n’a jamais réussi à contribuer à plus de 15% du PIB depuis l’indépendance. Tous les régimes qui se sont succédé l’ont pourtant classée parmi les secteurs prioritaires. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres quand on regarde de près les réalités sur le terrain : l’industrie, base du progrès de tout pays développé, souffre mille morts à Madagascar. Une situation qui ne date pas seulement d’aujourd’hui. Le constat est donc sans appel : l’industrie affiche un bilan mitigé si l’on se penche sur les 50 dernières années. Un survol des grandes périodes des politiques économiques adoptées depuis l’Indépendance permet d’y voir plus clair.

1960 – 1975 Le plan quinquennal contribue à l’essor de l’industrie Avant l’indépendance, un plan décennal (1947 – 1957) a été déjà adopté pour alléger la charge de la France vis-à-vis de ses colonies. Elle était, en effet, au bord de la ruine après la deuxième Guerre mondiale. Calqué sur le Plan Marshall proposé par les Américains pour sauver l’Europe de la ruine après la deuxième Guerre mondiale, le plan décennal avait pour but « l’amélioration du niveau de vie des habitants de Madagascar qui ne peut être assurée que par le développement parallèle de sa production et du commerce ». Cette production ne fait pas référence à des secteurs bien définis. Et quand on analyse l’affectation des ressources financières, l’industrie n’a pas une place particulière dans ce plan. Financé à hauteur de 57 milliards de francs CFA, le plan met l’accent sur : - l’amélioration des moyens de communication (68,4% des crédits alloués) - la production dont notamment l’agriculture (13,3%) - l’équipement social (18,3%)

Une économie pré industrielle après la « politique du ventre » Après l’Indépendance, le régime Tsiranana a adopté le plan quinquennal en 1964. Encore fortement encadré par les Français, le pays semble ne pas changer grand-chose dans la façon de diriger les affaires de la Nation. Le plan quinquennal censé s’étaler sur 5 ans a été prolongé jusqu’en 1972. Son objectif ne diffère pas trop de celui du plan décennal sous l’ère coloniale. Il vise à améliorer la vie quotidienne des Malgaches et à répondre aux critiques contre le pouvoir en place accusé d’avoir trop d’accointances avec l’ancien colonisateur. Ce plan est défini comme un outil pour « transformer directement et rapidement les données socioéconomiques de l’île, sans révolution, sans léser aucun intérêt, en profitant de tous les moyens (…) aussi bien la dynamique du secteur privé libéral et capitaliste que des cadres plus stricts des entreprises d’Etat » selon la déclaration du Président de la République d’alors. Le mot « secteur privé » attire l’attention mais Philibert Tsiranana ne pousse pas sa politique jusqu’à parler de politique et de dynamique pour l’industrie. Il s’agit, en fait, d’une économie pré industrielle. C’est ainsi que Tsiranana privilégie « la politique du ventre » en misant sur l’augmentation de la production agri-

cole et l’exportation. L’allocation des ressources financières prévues pour le plan quinquennal (165 milliards de Fmg) le prouve : - 51% pour le transport - 23% pour l’agriculture - 17% pour l’industrie

L’industrie pour stabiliser la macroéconomie Si l’on se réfère au tableau sur la répartition des investissements inscrits dans le plan quinquennal, l’industrie ne vient qu’en 3ème position. Ce qui conforte les objectifs visés par ce plan. Ces objectifs sont : - d’assurer l’alimentation des Malgaches - d’accroître l’exportation pour réduire le déficit de la balance commerciale - de transformer certains produits pour freiner la fuite des devises via les importations ; et de stabiliser ainsi l’économie du pays Ainsi, l’industrie n’est pas considérée comme un moteur de croissance, un réservoir d’emplois, un générateur de valeur ajoutée et donc de richesses… Elle est réduite en un simple outil pour la stabilité macroéconomique. En fait, c’est l’agriculture qui vient en première ligne. Cette priorisation est motivée par les données démographiques

Répartition des investissements du plan quinquennal (en milliard de Fmg) Budget public et subventions extérieures

Organismes publics et semipublics

Capital privé

Investissements humains

Total

Infrastructures et transports

33,64

16.85

26.68

6.25

83.42

Agriculture

20.60

2,24

8,68

7,14

38,68

Industrie

2,25

3,08

22,62

-

27,95

Equipements sociaux

10,48

1,03

0,35

0,60

12,46

Divers (commerce, information, coopération etc.)

2,03

0,56

-

-

2,59

Secteurs

(Source : Madagascar Afrique, n°9, 1967)

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Fanjanarivo Symonette car sous la première République, le pays compte 5 millions de ruraux, contre 650 000 citadins et villageois. Le plan est majoritairement dédié à la plus grosse frange de la population qui devrait, par conséquent, améliorer sa situation monétaire. Cette étape devrait à terme contribuer au développement du marché national et éventuellement celui de l’industrie.

Un climat propice pour le développement industriel malgré tout Même si le régime Tsiranana mise peu sur l’industrie, il a adopté le Code des investissements selon l’ordonnance n° 62-024 du 9 septembre 1962. Le Président de la République fait appel, en effet, à tous les investisseurs pour venir injecter leur argent au pays. Le Code est censé faciliter la tâche aux investisseurs. La Société nationale d’investissement (SNI) créée selon l’ordonnance n° 62026 du 19 septembre 1962, va dans le même sens puisqu’elle a pour rôle d’être un intermédiaire financier. La Banque nationale malgache de développement a été également mise en place en 1963, alors que le Bureau de développement et de promotion industrielle l’a été en 1966 pour aider l’implantation des nouveaux investisseurs. Ces instruments aident à faire émerger des industries même si le plan quinquennal ne priorise pas le secteur. Le tissu industriel connaît un développement certain avec la contribution du secteur privé et grâce à un environnement des affaires serein. En 1966, la mise en place de nouvelles unités industrielles a créé 700 emplois et généré des investissements totaux de 1 220 millions de Fmg. Notons toutefois que l’industrie locale a pour mission de se substituer aux importations, comme le prévoit le plan quinquennal. Dans ce cas, elle est essentiellement tournée vers le marché national et ne cherche pas trop à élargir ses horizons vers l’exportation. La priorité réside dans la réponse aux demandes locales. C’est ainsi que des industries comme la Papeterie de Madagascar (PAPMAD) à Ambohi-

manambola (Antananarivo) a vu le jour en 1965. Le fonds d’investissement initial de cette unité s’élève à 540 millions de Fmg. PAPMAD est prévu produire 7 000 à 8 000 tonnes de papier de qualité diverse par an. Outre cette unité, il y a aussi la Société malgache de raffinage (SMR) à Toamasina en 1964 et 1965. A son démarrage, cette entreprise de raffinerie de pétrole traite 540 000 tonnes de produit brut. Cette capacité est revue à la hausse de 720 000 tonnes en 1972, tandis que sa capacité de stockage est de 255 000 m3 dont 143 000 m3 pour le pétrole brut et 112 000 m3 pour les autres produits. La raffinerie emploie 346 personnes. Elle a été nationalisée en 1976. Un climat des affaires propice aux investissements permet la mise sur pied d’autres unités industrielles, mais toujours tournées vers les demandes locales. L’on peut citer la Société textile de Mahajanga (SOTEMA), la Direction de la construction et d’armement navale (DCAN) à Antsiranana devenue SECREN ou Société d’études de construction et réparation navales plus tard. La SOTEMA emploie 2 800 personnes. Créée en 1968, cette unité est une société d’Etat mixte avec un capital de 3 510 675 000 Fmg. Elle ferme ses portes en 1997 pour des difficultés financières. Ses dettes sont estimées à 140 milliards de Fmg à cette époque. L’unité est cédée au groupe SOCOTA en 1998. Quant à la DCAN, elle a été créée avant l’Indépendance, soit en 1945, mais sous le plan quinquennal, elle reçoit du gouvernement un appui conséquent. Ce qui a permis de générer de nombreux emplois dans le Nord du pays. L’emplacement géographique de ces différentes unités industrielles dans quelques chefs-lieux de province reflète une volonté de développer le pays dans son intégrité territoriale. Mais les provinces de Fianarantsoa et de Toliara semblent être omises dans la mise en œuvre de cette politique.

1975 – 1980 Le mirage de l’investissement à outrance dans l’industrie La sortie de Madagascar de la zone franc en 1973 est l’une des décisions jugée spectaculaire et puis catastrophique pour l’industrie dans la révision de l’accord de coopération franco-malgache depuis 1960. L’autre décision marquante est la transmission aux mains des Malgaches du contrôle des bases militaires françaises de Diégo Suarez. Ces différents changements dans l’accord de coopération élaborés par le ministre des Affaires étrangères d’alors, Didier Ratsiraka, ont pour objectif de conférer au pays plus d’autonomie tant sur le plan économique que politique. Sitôt arrivé au pouvoir en 1975, le capitaine de frégate Didier Ratsiraka institue un régime socialiste dont la politique est condensée dans la Charte de la révolution socialiste, plus connu sous le nom de Livre rouge. Il s’attèle à une réforme administrative focalisées


CAPITAL ECO sur les structures décentralisées (ou « Vondrombahoaka Itsinjaram-Pahefana » VIP). Cette réforme a besoin d’être traduit sur le terrain, d’où la mise en place d’universités dans les chefs-lieux de faritany et l’investissement à outrance dans l’industrie. Mais contrairement à l’approche du régime Tsiranana qui donnait aux préfectures la possibilité de définir elles-mêmes leurs priorités, celui de Ratsiraka opte pour la centralisation des initiatives économiques. C’est ce qui explique également la vague de nationalisation de plusieurs entreprises et industries. L’économie malgache prend ainsi un nouveau tournant. Dès la fin de 1976, plus de 60% de l’économie sont dans les mains de l’Etat. L’idée est de se réapproprier les moyens de production pour aider les Malgaches à se rendre maîtres de leur propre destinée. Et en 1980, l’investissement industriel représente 57% du total des crédits selon l’Institut national de la statistique (INSTAT).

L’échec de l’investissement à outrance Le souci du régime socialiste est de rééquilibrer les activités économiques sur le territoire national. La multiplication des investissements dans les industries nouvellement nationalisées ou sorties de terre par le régime est la mesure d’accompagnement de cette politique. Cette course à l’investissement à outrance est mal calculée la plupart du temps. Si nous prenons l’exemple de la ZEMA, l’unité de production d’engrais d’Ambovombe, cette industrie est située dans une zone où l’agriculture est peu développée à cause de la sécheresse récurrente. Or, l’exportation n’est pas non plus envisageable car Ambovombe ne dispose pas d’un port. De plus, la route reliant Ambovombe à Toliara, là où l’on peut embarquer des marchandises pour l’export, est en très mauvais état. Et le petit port de Fort-Dauphin n’est pas approprié à l’exportation. Le port d’Ehoala est seulement opérationnel depuis 2009. Mais même des unités installées au bon endroit comme la KAFEMA (unité de torréfaction de café) de Manakara ne donnent pas le résultat escompté. La réforme agraire ne réussit pas à changer grand-chose dans la filière café. La production y est marquée par le non renouvellement des plantations et donc d’un faible rendement. Le couple production/transformation s’en trouve handicapé. Et quand on y ajoute des usines surdimensionnées et non adaptées tant à la production qu’au marché ainsi que la mauvaise gouvernance des industries et des entreprises nouvellement étatisées, l’échec de l’investissement à outrance est plus que désastreux pour l’économie nationale.

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Répartition des sociétés contrôlées par l’Etat en terme de pourcentage sur le territoire :

(Source : Archives BNI-CL)

Le secteur privé, parent pauvre du système socialiste L’Etat multiplie les investissements dans les secteurs et les industries stratégiques. La traduction de cette politique est l’élaboration du Code d’investissement de 1973. Ce document a pour objectif de promouvoir le traitement des produits locaux issus de l’agriculture et d’encourager les industries de substitution aux importations. Mais il faut rappeler que le transfert de bénéfices et de dividendes est interdit. La sortie de Madagascar de la zone franc en 1973 crée chez les investisseurs potentiels des incertitudes supplémentaires. Malgré le Code d’investissement donc, les investissements étrangers se raréfient. Quant au secteur privé en général et l’industrie appartenant à des privés en particulier, ils ne bénéficient d’aucun soutien pour leur développement. C’est à cause de la mainmise de l’Etat sur un grand pan de l’économie dont notamment les industries liées au secteur agricole, les banques et assurances. L’idéologie égalitariste d’obédience marxiste-léniniste adoptée par le régime Ratsiraka exerce d’ailleurs des pressions et menaces sur la classe dite bourgeoise. Une partie de celle-ci est pourtant aux commandes d’unités industrielles. De plus, la sortie de la zone franc en 1973 a provoqué plus tard des problèmes dans le système monétaire. L’on peut citer la pénurie de devises et donc le rationnement de ces ressources, pourtant indispensables pour l’importation d’intrants et de matériels. Vers la fin des années 70 toutefois, plus précisément en 1977, la balance commerciale affiche un certain équilibre grâce à un contexte commercial international favorable. Mais cet équilibre est sitôt détruit par l’approche économique du régime socialiste. Le régime Ratsiraka

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Investissement à outrance Une belle théorie sur papier

Le régime socialiste est parti de beaux documents pour mener à bon port l’économie nationale. Mais avec ces théories, celle-ci a fait, au contraire, naufrage. L’industrie fait partie des premières victimes. Rappelons qu’en 1977, le régime élabore deux documents majeurs : > le plan triennal le manifeste sur les options prioritaires du développement économique jusque dans les années > 2000 Concernant la production, le manifeste prévoit le développement d’une base industrielle lourde et indépendante. Le régime définit trois étapes pour y parvenir : > 1978 – 84 : investissement à outrance dans le secteur secondaire (produits de base, énergie, intrants) tandis que la stagnation de la consommation devrait permettre de réinvestir le surplus. > 1985 – 92 : résorption du chômage et hausse du niveau de vie par habitant, accompagnées du développement autonome de l’industrie lourde et de la diversification des industries légères. > 1993 – 2000 : plein emploi, hausse de la consommation, développement harmonieux du secteur industriel. Cette politique pour le développement industriel suit la logique de « l’import - substitution », c’està-dire qu’il s’agit de financer les investissements importants et d’importer les biens d’équipements nécessaires pour atteindre les objectifs de développement, « ceci par une augmentation de l’épargne domestique ».

L’industrie sous le régime socialiste | « Une grande déconvenue »

« L’industrie a été une grande déconvenue de cette politique (celle du régime socialiste). Avec des usines surdimensionnées ou mal-implantées, les techniciens ont confondu vitesse et précipitation. Des complexes aux normes internationales ont ainsi vu le jour sans pour autant fonctionner. Divers exemples sont à relever en ce domaine : C’est le cas de l’abattoir de Mahajanga situé à l’entrée de la ville, sur la RN4. Ce grand ensemble dans les années 80 n’avait que peu fonctionné. Vers la fin des années 80, il a même été fermé. La seule activité qui s’y faisait était le prêt de son groupe électrogène à la JIRAMA dont la centrale thermique n’arrivait pas à alimenter la ville en électricité avec de fréquentes pannes dues au délestage... Les complexes de fabrication d’outillage agricole TOLY ont aussi été un de ces exemples. Présents sur trois sites avec un capital de 660.000.000 Fmg, TOLY n’avait jamais fonctionné... Les usines LALASOA et la ZEREN (respectivement pour la transformation du soja et la confection d’engrais) sont souvent citées en exemple comme les usines n’ayant pas fonctionnées, mais d’autres usines ont aussi vivoté comme le FAMAMA (Famokarana Mahabibo Malagasy pour la production de noix de cajou) à Mahajanga ou encore l’usine de construction de voiture Karenjy à Fianarantsoa ». (Source : Les partis gouvernementaux et l’espace malgache de 1960 à 2001 par Lala Herizo Randriamihaingo, pour l’obtention du Diplôme d’études approfondies ou D.E.A. au Département Géographie, Université d’Antananarivo)



Les industries créées et nationalisées, souvent victimes de l’investissement à outrance

CAPITAL ECO

Nombre des employés

Capital (en Fmg)

Mahajanga

-

-

Abattage et conservation de viande

Morondava

-

-

Abattage et conservation de viande

COROI

Nationale

-

-

FAMAMA

Mahajanga Toliara Mahajanga

-

-

790

1.701.600.000

5 008

53.768.050.000

85 1.108 -

26.260.000 2.000.000.000 -

-

-

7 328

219.000.000

Industrie sucrière

950

500.000.000

Industrie sucrière Plantation et transformation de l’huile de coprah Industrie pétrolière Plantation et transformation du palmier à huile

Sociétés

est conscient de ces différents échecs et dès son retour au pouvoir en 1997, l’Amiral choisit la politique de libre entreprise. De quoi permettre au secteur privé de jouer un rôle moteur dans la croissance et la lutte contre la pauvreté. Mais un fossé sépare l’idéologie des réalités.

La limite et l’échec économique de l’investissement à outrance Les dirigeants et techniciens du régime socialiste voient trop grand en mettant en place des usines surdimensionnées et non viables au final. Dans « La politique industrielle à Madagascar : les traits marquants de 1960 à nos jours », l’INSTAT relève que les grands projets industriels ont peu d’effets à cause d’une mauvaise évaluation des besoins, du mauvais entretien des matériels, de l’approvisionnement difficile, de l’étroitesse du marché intérieur et du système de prix administrés aux fortes rigidités. Le choix pour l’investissement à outrance débouche donc sur un échec industriel et économique cuisant, d’autant plus que le monde connaît sa deuxième crise pétrolière en 1979. L’économie mondiale plonge dans une nouvelle crise alors que Madagascar est en train de faire la course à l’industrialisation semée de calculs erronés. En 1979, la balance commerciale est de nouveau déficitaire à cause de la baisse des prix des produits d’exportation. En revanche, les prix du pétrole et des produits importés augmentent. Résultat : le pays est obligé d’emprunter auprès des banques extérieures avec souvent une échéance à court terme et des taux d’intérêts élevés. Ces emprunts financent l’achat d’intrants pour les industries publiques, l’approvisionnement en produits pétroliers, les importations de riz… Répartition des sociétés publiques sous le régime socialiste à Madagascar

Abattoir frigorifique de Mahajanga Abattoir frigorifique de Morondava

HASYMA JIRAMA

Nationale

LALASOA LANSU MAMISOA SECREN SEVIMA SICE

Ambanja Manakara Antananarivo Fort-Dauphin Antsirabe Antsiranana Antananarivo Nationale

SINPA

Nationale

KAFEMA

SIRAMA SIRANALA

Mahajanga Brickaville Nosy-Be Morondava

Activités

Importation de marchandises générales et exportation de produits agricoles Plantation et transformation d’anacarde Collecte et transformation du coton Production et distribution d’électricité et d’eau potable Industrie caféière Transformation du soja en lait de soja Pêche et commercialisation de la langouste Transormation du soja en huile Construction et réparation navale Industrie de conserve de viande Commerce et distribution Collecte et distribution de produits agricoles

SOAVOANIO

Sambava

SOLIMA

Nationale

1 570

2.504.500.000

Toamasina

-

-

788

-

-

666 000 000

Confection d’outillage mécanique

-

-

Commerce et distribution Transformation d’engrais chimique

SOMAPALM SOPRAEX

Fianarantsoa

SUMATEX

Toliara Toliara Farafangana Nationale Toamasina

TOLY Tranombarotra ROSO ZEREN

Recherche en produits pharmaceutiques Industrie textile

(Source : Ministère chargé de l’Industrie)

Bref, l’investissement à outrance n’a pas aidé le tis- 1983 - 1990 su industriel à se développer. Il a également obligé le pays à s’endetter lourdement : de moins de 300 La libéralisation ne fait pas avancer millions de dollars à la fin des années 70, la dette l’industrie extérieure du pays a dépassé le seuil des 5 mil- Conscient de son échec, le régime Ratsiraka a liards de dollars à la fin des années 80. Toutefois, abandonné le régime socialiste à la fin des années ces dettes n’ont pas donné les résultats escomptés. 70 et négocié en juin 1980 le premier accord de La raison en est les calculs erronés concernant les politique d’ajustement avec le FMI pour pousindustries nouvellement créées ou nationalisées. ser le pays dans l’ère du libéralisme. Mais dans la Mais aux problèmes économiques s’ajoutent les pratique, la mise en œuvre d’une politique de libépénuries de toutes sortes et la déliquescence de ralisation et de déflation se fait vers 1983 lorsque la classe moyenne. Celle-ci constitue pourtant le Madagascar signe le 4ème accord stand-by avec noyau dur de la clientèle de l’industrie. « Si Mada- le FMI. Sur le plan sectoriel, cette politique est gascar avait été une entreprise, on aurait parlé de compensée par des aides sectorielles plus conséfaillite et de dépôt de bilan. Mais un Etat n’est pas quentes. Pour l’industrie, il s’agit du Crédit d’ajusune entreprise et quand un régime est en difficulté, tement du secteur industriel (CASI). il disparaît ou s’adapte à la situation » La part de l’industrie dans le PIB de 1960 à 1987 selon Lala Herizo Randriamihaingo dans son mémoire pour l’obtention Secteur Secteur Secteur Année du Diplôme d’études approfondies primaire secondaire tertiaire (D.E.A.) au Département Géographie, 1960 35% 10% 55% Université d’Antananarivo.

(Source : Archives BNI-CL)

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Localisation

EXPANSION MADAGASCAR - JANVIER / FEVRIER 2011 - N°7

1972 1979 1987

24% 23% 28%

15% 16% 14%

61% 61% 58%

(Source : FMI 1995, Calcul du projet MADIO/INSTAT)


De plus, la signature de l’accord avec le FMI est assortie de critères dont certains touchent l’industrie. Citons l’arrêt de nouveaux investissements portés par l’Etat et la libéralisation progressive des prix industriels. Le 5ème accord signé en 19851986 renforce ces mesures et se traduit par : - la libéralisation des prix des produits industriels - l’augmentation des prix des produits agricoles - l’expansion limitée du crédit interne

L’échec des stratégies industrielles des années 80 Les accords signés avec le FMI comportent des réorientations sectorielles exprimés dans des stratégies économiques et sectorielles. Pour l’industrie, le régime oriente ses actions sur la mise en place d’une industrie autocentrée à organiser sur deux axes principaux sur période 1982-1988. Ces deux axes portent sur - une meilleure répartition des moyens de production pour une mise en valeur des ressources nationales - une meilleure interrogation des activités des différentes unités industrielles La stratégie économique sur cette période porte également sur l’indépendance énergétique, la diversification des produits d’exportation et la réponse satisfaisante aux besoins en produits de première nécessité et notamment en produits vivriers. Et une deuxième stratégie économique et sectorielle est élaborée pour la période 1986-1990. Pour le secteur industriel, elle prône • la redynamisation des activités industrielles par la libéralisation du secteur de l’industrie et une politique fiscale moins antiéconomique • la réhabilitation ou le renouvellement et la modernisation des équipements industriels, une action qui vise notamment les industries des produits de première nécessité, les industries tournées vers l’exportation et les industries des biens intermédiaires • la rentabilisation des unités existantes • la promotion des activités tournées vers l’exportation via la diversification des produits manufacturés à exporter Malgré tout, l’industrialisation du pays demeure faible. Son poids dans l’économie ne varie guère d’une décennie à l’autre. Il a même tendance à reculer par rapport à son niveau post-Indépendance. C’est seulement pendant la période de l’investissement à outrance que la part de l’industrie dans le PIB a quelque peu retrouvé ce niveau des années 60. Mais cette évolution positive n’est que factice parce qu’elle ne s’est pas traduit par le développement du secteur. Au début des années 90, la part de l’industrie dans le PIB qui est de14% est bien loin de celle du Sénégal (près de 19%), de la Côte

d’Ivoire (20%), du Kenya (22,4%) et du Zimbabwe (36,6%).

Croissance de l’investissement privé mais bilan mitigé pour l’industrie A la fin des années 80, les réformes orientées vers la libéralisation font augmenter l’investissement privé. De 3,7% du PIB en 1989, il est passé à 7% en 1990 selon les données de l’INSTAT. Sur la même période, cette part est proche de 21% pour la Malaisie, 8,8% pour la Ghana, 10,8% pour le Kenya, 10,7% pour le Zimbabwe. A Madagascar, l’augmentation de l’investissement privé bénéficie à l’industrie. Trois secteurs sont particulièrement concernés et ils dominent d’ailleurs l’industrie. Il s’agit de l’alimentaire, du textile et du bois. Sur cette période, l’industrie sucrière est la plus importante du secteur avec une production moyenne de 100 000 tonnes dont une grande partie est exportée. Depuis, les unités de la SIRAMA sont en décrépitude. Sans la location-gérance, des unités de cette entreprise auraient fermé définitivement, d’autant plus que l’Etat actionnaire n’a pas jugé nécessaire d’en renouveler et de moderniser les équipements. Dans son étude sur la politique industrielle à Madagascar de 1960 au milieu des années 90, l’INSTAT souligne : « La branche agroalimentaire bénéficie d’un niveau de protection nominale assez significatif. Pourtant, on enregistre une nette régression de la production nationale pour les produits de consommation. Il en est de même pour les fruits et légumes transformés et les confiseries. Par contre, on note une amélioration dans les activités de transformation de poissons et de fruits de mer ».

Le contrôle des prix mis à l’index Appliqué jusqu’au milieu des années 80, le contrôle des prix est évoqué dans le Document de politique industrielle de 1982 comme un outil pour « orienter les détenteurs de fonds d’investir leur capital dans chaque branche suivant les priorités établies par le plan ou suivant les principes de développement ». Le même document évoque le système des prix comme « un instrument adéquat de gestion du secteur industriel ». Seulement, l’office des prix traite les informations de manière arbitraire. Il ne tient pas compte de plusieurs facteurs dont le coût élevé des transports dû à la dégradation des infrastructures routières. Pour l’industrie, des modalités différentes sont appliquées selon les branches du secteur. Ces diverses approches sur les prix débouchent sur un traitement inégal des industries selon les priorités fixées par l’Etat. Elles ne favorisent pas le développement du secteur privé et les empêchent d’optimiser leurs activités dans une logique de

croissance. Outre les effets néfastes du contrôle des prix, il y a aussi l’insuffisance de l’épargne intérieure. De 1970 à 1979, l’épargne intérieure brute finance environ 32% de l’investissement. Et de 1979 à 1984, elle arrive seulement à financer près de 17,9% de l’investissement.

La dévaluation, désastreuse pour l’économie et le pouvoir d’achat La dévaluation du Fmg fait partie du paysage économique avec comme l’objectif de donner un nouveau souffle à l’économie nationale. Mais les secteurs de l’exportation censés en bénéficier sont limités aux produits de rente dont le marché est exposé aux fluctuations des cours internationaux. Sinon, la production manufacturière pour l’exportation est marginale. Du coup, la dévaluation ne donne pas les résultats escomptés, d’autant plus que l’industrie locale souffre de l’absence d’industries en amont qui devraient l’approvisionner en intrants et en matériels. On doit aussi y ajouter l’inexistence d’un réseau local de sous-traitants. Bref, le pays n’a jamais élaboré une politique d’industrialisation en bonne et due forme, à même de l’aider à développer son tissu industriel et de le hisser au statut de pays émergent. C’est l’une des raisons principales de l’échec de la libéralisation et de la vision d’aller vers une économie de marché. Et en 1994, le gouvernement Ravony décide le flottement du Fmg et c’est désormais au Marché interbancaire des devises (MID) de déterminer le prix du FMG par rapport aux devises étrangères. Cette mesure libérale est prise à une période où l’économie est sortie d’une longue crise. Elle débouche sur une inflation galopante qui renchérit les prix. Les ménages n’en sont pas les seules victimes. Les industries aussi. Les prix des intrants et surtout des intrants importés ainsi que des matériels industriels augmentent. Il faut conjuguer ce problème avec le recul du pouvoir d’achat des consommateurs, ce qui a des répercussions sur le niveau de production. Dans un ouvrage sur la situation économique à Madagascar et les relations du pays avec les institutions de Bretton Woods, l’économiste JeanJacques Ratsietison avance que la monnaie locale a dévalué de plus de 4 000% depuis la premier Programme d’ajustement structurel. Une situation qui handicape toutes les branches de la production et qui paupérise la population. En effet, le pays doit encore important une bonne part des machines et des intrants industriels dont il a besoin. Il en est de même pour les denrées alimentaires et pour d’autres produits de première nécessité. La dévaluation de la monnaie locale renchérit pourtant les prix à l’importation.

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CAPITAL ECO Afin de donner un aperçu de l’industrie sur ces cinquante dernières années et tracer les perspectives du secteur, des industriels dont certains sont des monuments vivants du secteur, nous livrent leur vécu, leurs critiques constructives et leurs propositions.

Point de vue | Olivia Ratrimoarivony

Secrétaire Général du groupe STMP « Il faut inciter les opérateurs à investir dans la transformation » L’Expansion : Quel bilan tirez-vous du cheminement du groupe dans le secteur industriel ? Olivia Ratrimoarivony : Nous avons démarré au milieu des années 90 et nous avons pu nous lancer dans le secteur industriel grâce à des mesures incitatives mises en place à cette époque. Ces mesures portaient sur la détaxation des matériels et des intrants importés pendant 5 ans. Elles ont été possibles dans le cadre du système d’agrément pour les investissements destinés à la production. Bref, il s’agissait d’octroyer des facilités fiscales et douanières aux investisseurs. Voilà pourquoi nous avons pu nous lancer et développer nos activités. Puis, des assistants techniques étrangers étaient venus nous transmettre leur savoir-faire et de nouvelles technologies. Et petit à petit, l’ensemble de l’usine est piloté par les Malgaches. Au début, nous avons compté 30 employés et à l’heure actuelle, nous en dénombrons 350 au niveau de la SMTP et 1 000 dans tout le groupe. L’Expansion : A vos débuts, comment s’est présenté le marché ?

Olivia Ratrimoarivony : Nous avons fabriqué des produits qui n’existaient pas sur le marché. On peut citer les tuyaux PVC à joint automatique et les tuyaux PCMD à bande bleue alimentaire. Nous avons également demandé la certification qualité de l’usine. Et grâce à l’appui de l’ONUDI (Organisation des Nations unies pour le développement industriel) qui a assuré 70% du financement, nous avons décroché cette certification. Il s’agissait de révolutionner les habitudes des consommateurs et des les éduquer pour qu’ils puissent utiliser des produits de qualité, plus faciles et plus rapides à manier. Ainsi, ils n’avaient plus à coller les tuyaux pour l’eau potable, contrairement à avant. Lorsque nous avons obtenu la certification, nous avons pu exporter sur les Comores et Mayotte dès la fin des années 90. Et nous continuons à exporter sur Mayotte. L’Expansion : Cela veut-il dire que la question de compétitivité est un faux problème pour l’industrie puisque vous pouvez exporter ? Olivia Ratrimoarivony : Non, le problème de la compétitivité se pose à cause de la cherté de l’électricité. Chez nous, elle représente 45% du coût de revient. Puis, il y a un autre blocage : on a trop favorisé la zone franche au détriment des industries locales. Les entreprises franches bénéficient d’importantes détaxations, alors que les entreprises de droit commun doivent tout payer. Actuellement, de nombreuses entreprises franches s’en vont, alors que nous, nous sommes toujours là et ce, malgré la crise et les orages. Donnez-nous les mêmes faveurs que la zone franche parce que nous aussi, nous créons des emplois comme elle. Il faut inciter les opérateurs à investir dans la transformation et ne pas se limiter à privilégier la zone franche et les grands projets miniers. Il faut faire comme Maurice qui détaxe l’importation d’intrants et de matériels et qui affiche un taux d’IBS inférieur à celui de Madagascar. Elle accorde même un taux zéro d’IBS pour les entreprises nouvellement créées sur un délai de 5 ans. Nous avons intégré les groupes régionaux tels le COMESA, la COI et la SADC où les entreprises bénéficient souvent de facilités diverses. Voilà pourquoi notre marché est inondé des produits de ces pays, alors que chez nous, les entreprises n’ont pas accès aux mêmes facilités. Il faut aussi soulever un autre blocage : dans les appels d’offres pour la fourniture de matériels comme les tuyaux, les industries locales sont désavantagées dès le départ. Car contrairement aux entreprises étrangères, elles ne bénéficient pas des mêmes facilités fiscales que ces dernières. Or, l’avenir est dans la création d’emplois via le développement de l’industrie locale. Il est dans l’industrialisation de notre économie.

Point de vue | Thierry Ramaroson

Directeur Général de la SAVONNERIE TROPICALE « L’industrie devrait être le moteur de la croissance » L’Expansion : Comment voyez-vous l’industrie malgache 50 ans après l’Indépendance ? Thierry Ramaroson : La Savonnerie tropicale a été créée en 1967-1968 et inaugurée par le Président Philibert Tsiranana, il faut démystifier certaines interprétations erronées. Créée pour l’industrialisation de Madagascar pour se substituer aux importations mais non pas pour avoir un monopole dans le secteur, contrairement à ce que certains avancent. A cette époque, l’unité industrielle SIB de Mahajanga existait déjà, SNHU de Tuléar aussi. Il n’y a donc jamais eu une situation de monopole. Mais nous sommes la première industrie moderne de savon avec capital et direction malagasy dans l’océan Indien. Le premier constat qui se dégage du bilan du secteur industriel est le manque d’égards et de prérogatives de la part des autorités, l’impérieuse nécessité de défendre les industries via des mesures incitatives pour promouvoir l’emploi et l’investissement. Car il ne faut pas oublier que l’industrie est un réservoir d’emplois, un moyen d’économiser nos devises, une voie pour développer la soustraitance… L’industrie est aussi créatrice de valeur ajoutée et donc de richesses. L’Expansion : Pourriez-vous être plus explicite sur le développement de la sous-traitance dans le sillage de l’industrie ? Thierry Ramaroson : Il ne faut pas oublier cet effet d’entraînement de l’industrie. Plus l’industrie se développe, plus elle a besoin de sous-traitants pour mieux se recentrer sur sa vocation première qui est de produire. Elle cède donc à des PME/PMI des activités comme la cartonnerie, le transport, etc. Etant donné qu’elle a cette capacité de développer tout un pan de l’économie, il faut la mettre à sa vraie place. On dit toujours chez nous que l’industrie et le secteur privé sont le moteur de la croissance. Mais ce n’est pas le cas sur le terrain, alors que l’industrie est économiquement et socialement utile. L’Expansion : Que proposez-vous pour y remédier ? Thierry Ramaroson : Si l’industrie est considé-


rée comme le moteur de la croissance, cela devrait se refléter dans les lois de finances. Si nous prenons l’exemple du Brésil, il a des similitudes avec Madagascar en terme de richesses minières, de potentiel touristique, de TIC, etc. Mais c’est maintenant, après avoir été un pays en développement, la 8ème puissance économique mondiale, alors que nous, nous sommes classés parmi les pays les plus pauvres. Pour le Brésil, il y a eu le miracle Lula (l’ancien Président brésilien). Ce dernier a élaboré et mis en œuvre une politique sociale très forte en parallèle avec la promotion des IDE (Investissements directs étrangers). Chez nous, la politique sociale a été réduite à une portion congrue. Sinon, il faut développer la classe moyenne pour booster la consommation et accroître la compétitivité des industries locales. Mais pour le moment, la suppression des droits de douanes sur des produits importés et l’invasion de produits importés qui ne respectent pas les normes en vigueur créent un environnement malsain pour les industries locales. L’Expansion : L’on dit également que la taille restreinte du marché local ne permet pas à l’industrie de se développer. Thierry Ramaroson : Non, la demande locale existe bel et bien et la taille de ce marché n’est pas

restreinte, contrairement à ce que les bailleurs de fonds avancent. La preuve en est cette invasion de produits importés. Il faut, certes, développer l’exportation comme les bailleurs de fonds le préconisent, mais cela ne veut pas dire qu’il faut laisser le marché local aux seuls importateurs. En effet, il ne faut pas oublier que la croissance est aussi tirée par la demande intérieure. La Chine et le Brésil le savent très bien. D’après une étude de l’ONUDI (Organisation des Nations unies pour le développement industriel) en Tunisie, il faut d’abord répondre aux demandes locales avant de se déployer sur le marché international. Chez nous, le marché intérieur est volé par les importations où il n’y a ni création d’emplois ni de valeur ajoutée… Le secteur importation ne fait rien non plus sur le plan social. On laisse également des industriels locaux fabriquer des produits qui ne respectent pas les normes. Le ministère du Commerce fait des efforts mais l’industrie locale revient de très loin. Elle a dû procéder à des chômages techniques, même en 2010. Le climat des affaires non plus n’est pas au beau fixe. L’Expansion : Et qu’en est-il de la remontée fulgurante de l’informel ? Nuit-elle à l’industrie locale ? Thierry Ramaroson : C’est un problème de

pauvreté et de réglementation. Car il ne faut pas oublier qu’il y a informel et informel. Le premier n’est inscrit nulle part et ne paie rien à l’Etat. Le second l’est, par contre, mais il paie seulement une partie de ses obligations fiscales, il fait de la vente sans facture pour contourner le paiement de la TVA… Tout ceci exerce une concurrence déloyale sur les entreprises effectivement formelles. Ce problème appauvrit le pays et renforce la mauvaise gouvernance parce que les gens rechignent à payer leurs obligations fiscales s’ils ne constatent aucun retour. L’Expansion : Etre une industrie citoyenne se résume-t-il ainsi au paiement effectif de tous les impôts et taxes ? Thierry Ramaroson : Payer ses impôts et taxes est un devoir sacré et un acte citoyen. Mais être une industrie citoyenne ne se limite pas à cela. Il faut aussi fabriquer des produits de qualité pour les consommateurs, s’impliquer dans le social en créant des emplois et en réinvestissant les bénéfices, etc. Le groupe Tiko était une réussite exemplaire dans ces domaines. Et si le régime précédent a donné aux industries les mêmes mesures incitatives que ce groupe, la situation aurait été différente pour l’industrie locale. Celle-ci aurait dû être un grand réservoir d’emplois et l’on sait que l’emploi est un bon facteur de lutte contre la pauvreté.

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CAPITAL ECO

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Les entreprises franches textiles sont génératrices de valeur ajoutée. Leur part dans le secteur secondaire est en constante croissance depuis 1994 (voir tableau). Mais leur part dans le PIB total demeure faible, même si elles sont de grandes pourvoyeuses d’emplois : de 32 490 en 1994, les salariés du secteur sont passés à 120 000 en 2007. Une importante hémorragie en termes de pertes d’emplois a été constatée en 2009 à cause des impacts conjugués de la crise économique mondiale et de la crise politique à Madagascar. Concernant la part de valeur ajoutée créée par les entreprises franches, elle commence à grimper d’une manière plus significative à partir de 2000. Cette date correspond à l’éligibilité de Madagascar à l’AGOA. Dans une étude de 2009 sur les entreprises franches, Friedrich Ebert Stiftung précise : « La continuité de la dynamique de contribution substantielle des entreprises franches à la croissance économique du pays est surtout imputable au maintien du statut et des privilèges du pays par rapport à l’AGOA et aux retombées des différentes réformes destinées à l’attraction des investissements dans le pays ».

Il faut rappeler que cette loi américaine autorisant l’absence de quota et la franchise douanière pour les produits des pays éligibles, a, entre autres, comme objectif d’aider ces pays à développer l’intégration verticale des secteurs concernés dont notamment le textile. Mais cet objectif n’est pas atteint. La preuve en est le déclin de la filature et du tissage fortement handicapés par divers problèmes dont les coûts des facteurs élevés, la concurrence des produits asiatiques… Pour ce qui est des coûts des facteurs, l’eau et l’électricité coûtent plus chers qu’à Maurice et au Sri Lanka. Il en est de même pour le loyer industriel, le transport, etc. Il faut y ajouter l’absence d’une vraie politique industrielle.

C’est ainsi qu’en 2007, la part de la valeur ajoutée de ces entreprises dans le secteur secondaire approche les 16%, contre 7% en 1999. Et de 2000 à 2005, les investissements dans les entreprises franches sont de 110 millions de dollars, soit près du tiers des investissements réalisés à Madagascar sur cette période. Mais l’inéligibilité à l’AGOA depuis janvier 2010 a provoqué l’effondrement des exportations vers les Etats-Unis. Il faut y ajouter le manque d’intégration verticale du secteur : les importations des entreprises franches constituent les 3/4 de leur approvisionnement total en intrants en 2005, contre un peu plus de 54% en 1994. Malgré une constante hausse donc, la valeur ajoutée créée par les entreprises franches au niveau national demeure faible.

Conséquence : l’industrie du textile est fortement dépendante des intrants extérieurs. Et comme les unités de confection s’inscrivent dans l’industrie légère, elles peuvent choisir de voir ailleurs suivant les facteurs de compétitivité ou à cause d’incidents politiques et/ou économiques. C’est le cas en 2009 et en 2010 où les entreprises franches textiles ont préféré délocaliser en Asie ou à Maurice à la suite de la crise politique à Madagascar. L’une des caractéristiques des entreprises de confection (sa catégorisation dans l’industrie légère) expose ainsi le pays à une fuite rapide de capitaux et à des pertes

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Part du secteur secondaire dans le PIB total Part EF* dans le PIB total Part EF dans la VA** du secteur secondaire

2000

Evolution de la part des entreprises franches au PIB (aux prix de 1984 et en %) : 1997

Quoi qu’il en soit, l’industrie locale doit être bien préparée avant que notre pays adhère à un tel accord. Il ne faut pas entrer dans ce système n’importe comment. Mieux vaut se cantonner à l’APE intermédiaire qu’on a déjà signé car il faudra encore élaborer et mettre en œuvre une politique économique et industrielle, instaurer une sécurisation des investissements pour prendre d’autres décisions capitales en toute connaissance des causes. Sinon, l’industrie locale sera mise en pâture aux produits importés concurrents. L’industrialisation de Madagascar est encore à sa naissance et on l’oblige de signer l’APE. Dans ce cas, le secteur privé a sa responsabilité, celle de s’assumer, d’assurer et de s’imposer par le biais de la relève. Car c’est un crime économique d’abandonner l’industrie dans cette libre concurrence avec des pays industrialisés.

La valeur ajoutée en constante croissance

La zone franche a été mise en place au début des années 90 pour tirer l’exportation vers le haut. Principalement composée d’investisseurs étrangers, elle compte notamment des entreprises textiles essentiellement focalisées sur la confection. Comme quoi, la filature et le tissage, une industrie lourde, sont restés aux mains d’entreprises locales. Mais ces dernières sont en déclin, alors que les entreprises franches connaissent une croissance en flèche, sauf depuis 2008, une année marquée par les impacts de la crise économique mondiale. Puis, le pays lui-même est en crise depuis 2009. Cette crise s’est traduite au début 2010 par la suspension de Madagascar à l’AGOA.

1996

Toujours dans le domaine du marché local, l’Association des industries africaines est contre l’APE (Accord de partenariat économique à signer avec l’Union européenne). Des ministres de l’Industrie et certains pays africains sont également contre. Ils pointent notamment du doigt les barrières non tarifaires (les normes sanitaires et phytosanitaires) érigées par les pays membres de l’Union européenne, comme c’est aussi le cas dans les échanges avec les Etats-Unis. Pour ce qui est de l’APE, il y a heureusement la liste des produits sensibles non concernés par le libre échange.

record d’emplois en cas de problèmes nationaux ou internationaux.

1995

L’Expansion : Bref, vous dessinez un bilan plutôt mitigé de l’industrie. Comment se dessine l’avenir du secteur ? Thierry Ramaroson : Qu’est-ce que nous allons léguer aux générations futures ? Il faut que la relève s’assume et assure. Pour ce faire, notre industrie locale a besoin d’un environnement propice au maintien et à la création d’emplois, à l’investissement générateur de richesses… Il ne faudra pas s’attendre à une relance de l’économie en général et de l’industrie en particulier sans l’assainissement du marché et notamment de l’importation et des entreprises partiellement formelles qui exercent une concurrence déloyale et le redressement de l’industrie.

Secteur textile | L’intégration verticale en grande perte de vitesse

1994

L’Expansion : Comment donner à l’industrie la place qu’elle mérite ? Thierry Ramaroson : La 4ème République devrait être synonyme de changement en tant que pays en voie d’industrialisation. Il faut d’ores et déjà ancrer chez nos futurs dirigeants la nécessité de défendre l’industrie. Il faut noter que tous les pays riches sont des pays industrialisés. Il faut tirer les leçons du passé pour éviter la répétition des crises sociales comme le pays en a vécues régulièrement sur les dernières décennies.

* EF : entreprises franches, ** VA : valeur ajoutée

EXPANSION MADAGASCAR - JANVIER / FEVRIER 2011 - N°7

(Source : INSTAT)



CAPITAL ECO

1992 – 2003 DCPE et DSRP : peu d’apports pour l’industrie Les Documents cadre de politique économique (DCPE) et les Documents de stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP) sont des variantes de l’ajustement structurel mis en place dans le pays depuis les années 80. Ils se veulent, en fait, un ajustement structurel à visage humain, c’est-à-dire un ajustement qui intègre le développement et donc le côté socioéconomique pour la population. Les deux premiers DCPE (1996-1999 et 1997-2001) sont notamment focalisés sur la nécessité de donner place libre au secteur privé considéré comme moteur de l’économie. Ils portent également sur la privatisation des entreprises d’Etat. Celles-ci comprennent essentiellement des industries et des entreprises commerciales et de services comme la SOLIMA, TELMA, SOPRAEX… Comme quoi, les deux DCPE et le DSRP (une sorte de révision corrigée des DCPE) sont basés sur l’équilibre macroéconomique qui n’est pas toujours synonyme de croissance suffisamment répartie au niveau des secteurs et en terme de lutte contre la pauvreté. Ces documents accentuent aussi la libéralisation, notamment par les opérations de privatisation. Ils ne mettent pas trop l’accent sur le développement industriel. Parmi les axes stratégiques du DSRP, il est question de dynamiser le secteur privé mais surtout les entreprises franches et les industries tournées vers l’exportation. Les industries enregistrées au droit commun et tournées vers le marché intérieur sont comme mises hors course. Si elles sont quelque peu concernées par le DSRP, c’est au niveau de la nécessité émise par les autorités de créer des zones industrielles, dans des recommandations plutôt floues sur des points comme la promotion des investissements et de la technologie, la mise en œuvre d’une politique d’intégration de l’économie rurale à l’économie industrielle.

« Autres industries manufacturières et PME » C’est ce qu’on peut lire dans la rubrique dédiée au développement des secteurs porteurs du DSRP mis à jour en juillet 2003. Ainsi, même si l’Etat reconnaît les problèmes de l’industrie locale – technologie obsolète et concurrence des produits importés -, il la relègue au dernier rang des secteurs porteurs. Il propose toutefois des solutions comme la mise à niveau et la restructuration par l’amélioration de la productivité dans des secteurs porteurs comme l’agro-industrie et la construction. Il faut seulement noter que le programme de mise à niveau n’a pu se concrétiser qu’en 2009 avec le soutien de l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel (ONUDI). Ce programme porte sur la période 2009-2011 pour la phase 1 et de 2012 à 2014 pour la phase 2. Mais la crise politique a tout freiné. Comme quoi, la mise en place de facilités pour les in-

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« Une politique industrielle audacieuse » Le MAP qualifie ainsi la politique industrielle que le régime veut mettre en place. Dans l’engagement 6 du document focalisé sur la nécessité de rendre dynamique le secteur privé, cette politique résumée en quelques lignes dans le MAP se traduit comme suit : Les principales priorités se résument : - au développement du secteur agribusiness dans les régions grâce à un travail de sensibilisation des acteurs économiques et au renforcement des capacités techniques et organisationnelles des producteurs ; - la dynamisation du secteur industriel en développant les industries de transformation, la recherche et développement ainsi que la mise en place de Bourses de sous-traitance et de partenariat (BSTP) - à la mise en place de nouvelles Chambres de commerce et d’industrie (CCI) et au renforcement des capacités dans l’optique d’appuyer les entreprises locales, les PME et l’artisanat par le renforcement de leurs capacités - la mise en place de zones industrielles aménagées et équipées pour attirer les investisseurs et mieux organiser les activités productives. En réalité, il s’agit d’une pré-ébauche de politique industrielle car il faut encore tout un monde pour élaborer une telle politique. Dans les principes d’arbitrage pour l’affectation des ressources toutefois, le MAP intègre l’industrie dans le secteur des services et la considère parmi les secteurs porteurs de croissance. C’est ainsi que le document évoque la nécessité de financer des actions autour de : - la promotion du tissu industriel de transformation de produits locaux - l’accompagnement des PME/PMI dans leur trajectoire de production et de prospection

dustries est une denrée rare à Madagascar.

De 2003 à nos jours Après l’échec des DCPE et DSRP reconnu par les bailleurs de fonds eux-mêmes, ces derniers incitent à l’élaboration d’un document par les soins propres des pays en développement. C’est ainsi que sous le régime Ravalomanana, le pays a élaboré le Madagascar action plan (MAP) qui devrait courir de 2007 à 2012. Dans les orientations stratégiques de ce document, la filière agro-industrie est mise en avant : « La transformation des produits permet de mieux répondre aux besoins des consommateurs, d’éviter des pertes, de créer des emplois et de la valeur ajoutée, base d’enrichissement de la collectivité nationale, d’investissements futurs, et source d’impôts pour l’Etat et les collectivités territoriales décentralisées ». Il est aussi question de développer des zones industrielles et des pôles de croissance autour de secteurs porteurs comme l’agriculture, les mines, l’industrie et le tourisme. Mais le MAP mise plus sur l’industrie minière et les activités de transformation connexes qui devraient se développer tout autour de cette industrie. Les autres secteurs de transformation manufacturière sont ainsi plutôt laissés de côté. Le MAP fait seulement émerger les secteurs suivants dans les actions prioritaires : - la filière maïs : développement de l’offre pour la filière élevage et l’exportation - la filière oléagineux : développement d’un secteur artisanal et agroindustriel - la filière sucre : appui au développement de la capacité exportatrice - la filière coton : appui au développement de la capacité exportatrice, développement d’un secteur filature-tissage visant une intégration de la filière coton/textile - filière biocarburants : appui à la production de matières premières

Le SIM propose un plan d’actions sur les facteurs clés Mais afin de résorber les différents problèmes inhérents au développement de l’industrie, le Syndicat des industries de Madagascar (SIM) propose à l’Etat un plan

EXPANSION MADAGASCAR - JANVIER / FEVRIER 2011 - N°7

d’actions focalisé sur les facteurs clés. Ce plan touche 6 facteurs : • L’accès aux marchés via le renforcement de la position des produits industriels malgaches sur le marché national et sous-régional avec des produits de qualité, compétitifs et à haute valeur ajoutée. Pour ce faire, le SIM propose : > la mise en place d’un dispositif efficace de préservation du marché intérieur grâce à la mise en application effective des textes en vigueur, au renforcement du système de normalisation et d’accréditation > l’élaboration d’une réglementation spécifique pour l’importation, le transport et la fabrication de produits alimentaires > l’édition d’un guide des exportateurs pour les marchés sous-régionaux > la mise en place de mesures incitatives pour les équipements industriels > l’augmentation du taux d’utilisation de la capacité de production (30 à 50%) à 70% grâce à des mesures pour encourager la maîtrise technologique dont surtout la maintenance des équipements, et grâce à des facilités pour créer des pépinières et des clusters d’entreprises • Les matières premières et les intrants : le SIM propose : > la détaxation des matières premières importées par les entreprises de droit commun, comme cela se fait dans plusieurs pays de la sous-région > la mise en place d’un cadre fiscal incitatif pour les intrants importés • L’énergie, le transport et les communications : ces trois facteurs clés sont très importants dans la performance et la compétitivité des industries. Afin de mieux les maîtriser et surtout de réduire les tarifs, le SIM propose une politique concertée sur : la libéralisation, la réhabilitation, la formation, et les investissements. • Les ressources humaines : ce facteur dispose d’importants potentiels à développer. Pour les exploiter en faveur de l’économie en générale et de l’industrie en particulier, le SIM propose d’élaborer une politique de formation initiale et professionnelle appropriée • Une fiscalité simple, incitative, stable et équitable : c’est une voie pour réduire les pressions fiscales sur le secteur formel grâce à l’élargissement de l’assiette fiscale et l’augmentation des recettes de l’Etat • La mise sur pied d’une institution spécialisée pour


Comparaison d’un échantillon de coûts de facteurs

Télécommunication (USD/min)

Internet

Electricité

Eau

Appel local

Appel international

Appel vers les USA

Haut débit (USD/mo)

Lesotho

0,33

0,36

1,08

814

0,04

7,07

0,49

Madagascar

0,08

0,75

0,90

840

0,08

12,02

0,26

Le plan du SIM à moitié suivi

Maurice

0,03

0,19

0,19

188

0,06

3,25

0,38

Faisant écho aux propositions du SIM, l’Etat a mis en place la détaxation et l’Economic development board of Madagascar (EDBM). La mission de cette entité consiste essentiellement à faire la promotion de Madagascar en tant que destination pour les Investissements directs étrangers (IDE) et à contribuer à l’amélioration du climat des investissements. Entre 2006 et 2007 donc, le pays gagne 11 places dans le Doing business de la Banque mondiale en passant du 160ème au 149èmé rang. Et en 2008, il est à la 144ème place avant de chuter à cause des impacts de la crise politique. Concernant la promotion des IDE, des moyens et grands projets notamment agroindustriels émergent. Ils sont pour la plupart liés au développement d’agro-carburants comme la filière canne à sucre pour l’éthanol, le jatropha pour le biodiesel. Mais ces projets ont mis beaucoup de temps à démarrer à cause de l’absence d’une politique nationale sur les énergies renouvelables devant inclure la délimitation de zones destinées à l’agro-industrie. Les investisseurs potentiels évoquent également l’absence d’une politique fiscale incitative. Sinon, la prospection pétrolière attire plusieurs compagnies dont le n°1 américain ExxonMobil et d’importantes compagnies chinoises. Seulement, ce secteur ne donne pas des résultats sur le court et le moyen terme.

Mozambique

0,06

0,42

0,77

594

0,05

5,25

0,88

Afrique du Sud

0,06

0,26

0,54

42

0,08

0,88

1,38

Tanzanie

0,07

0,47

1,11

1 900

0,06

6,01

0,67

Tunisie

0,01

0,48

0,52

18

0,07

1,48

0,68

France

0,02

0,17

0,17

34

0,07

-

1,99

Irlande

0,05

0,15

0,19

43

0,12

8,70

1,63

Ghana

0,02

0,28

0,39

252

0,05

12,29

0,77

Kenya

0,04

0,16

0,88

1 690

0,06

3,68

0,42

Mali

0,03

0,59

0,89

1 089

0,12

2,91

0,56

Sénégal

0,23

1,07

1,07

57

0,14

13,10

1,56

Nigeria

0,16

0,43

1,45

236

0,28

-

0,91

Ouganda

0,07

0,38

0,76

3 548

0,10

2,33

0,76

financer les investissements, l’amélioration du cadre réglementaire, la mise en œuvre d’actions de communication ciblée pour assurer une bonne information des chefs d’entreprise sur les mécanismes de financements existants

L’effet mirage de la détaxation Cette mesure se veut être incitative aux investissements et notamment aux investissements industriels et agricoles. Mais elle a notamment favorisé l’importation de matériels informatiques et de bureautique et de véhicules de transport plutôt que d’équipements destinés à l’industrie, au secteur BTP et aux activités agricoles. Dans son étude sur l’analyse de la détaxation réalisée en 2004, le Centre de recherches, d’études et d’appui à l’analyse économique à Madagascar (CREAM) précise, par ailleurs : « En fait, les controverses proviennent du fait que d’autres facteurs viennent masquer les coûts qu’a pu engendrer la mesure économique ». Or, la loi n°2003-026 du 27 août 2003 sur la détaxation consiste à détaxer des biens d’équipements et des marchandises : des droits de douane ; de la taxe d’importation ; des droits d’accise ; de la taxe sur la valeur ajoutée ; de la taxe statistique à l’importation ; et du droit de timbre douanier. Mais en fin de compte, ces différents avantages douaniers ne donnent pas les effets escomptés comme cité plus haut. Et pour cause, l’environnement économique ne s’y prête pas. En 2003, la reprise économique n’est qu’à ses débuts après les impacts laissés par la crise postélectorale de 2001-2002. Autrement dit, les industries n’utilisent pas encore la totalité de leur capacité de production. Il faut y ajouter l’accès difficile aux crédits

Tarif industriel (USD/kWh)

Demande de puissance industrielle (USD/KVA)

Tarif industriel (USD/m3)

Pays comparateurs

(Source : Snapshot Africa 2007, Banque mondiale)

bancaires de moyen et de long terme, lesquels sont pourtant adaptés aux investissements. D’après les données de la Banque centrale, ce type de crédits représente 26,4% des créances des banques sur les secteurs parapublics et privés durant les quatre derniers mois de 2003. Et comme la détaxation ne porte pas uniquement sur des biens d’équipement, des entreprises ont choisi plutôt le commerce en important des marchandises concernées. C’est ce qui explique l’abondance des importations de matériels informatiques et de bureautique. Mais même là aussi, la dépréciation de la monnaie malgache et l’inflation annulent les avantages qu’on devrait tirer de la détaxation. Bref, cette mesure fiscale est loin de profiter à l’industrie qui évolue dans un contexte économique morose.

Tsena mora, une réponse à un des problèmes de l’industrie La crise politique actuelle coupe court à la réalisation du MAP. Depuis, le pays est en transition. Une période qui ne favorise pas tellement la mise en place d’une politique industrielle. Seulement, l’invasion de produits importés et les fraudes à l’importation prennent de l’ampleur. Ce phénomène nuit beaucoup à l’industrie locale. Le régime de la transition répond aux doléances des industriels par la mise en place de « Tsena mora ». Ces marchés sont censés résorber quelque peu les problèmes de perte de part de marché causés par les fraudes à l’importation. Pourtant, cette solution ne peut être que conjoncturelle (lire le point de vue de M. André Ramaroson) Rappelons qu’en 2009, le SIM a déjà proposé un plan d’actions pour la reprise post-crise. En attendant, le secteur industriel est toujours en butte à plusieurs problèmes, à savoir : - la faiblesse des infrastructures physiques et sociales - l’impact du coût et de la disponibilité des facteurs de production, en particulier l’énergie - la volatilité des taux de change - un climat des affaires pesant.

Développement de l’industrie Ce que l’Etat devrait faire

Dans une étude et diagnostic sur la politique industrielle sur la période 1960 – 2005, l’INSTAT émet quelques recommandations qui demeurent d’actualité : « Ce diagnostic de la politique industrielle à Madagascar nous a permis de constater le manque d’une stratégie de moyen-long terme. Malgré les changements fréquents d’objectifs et d’actions, les résultats obtenus sont médiocres. Les différentes phases de politique industrielle et de systèmes économiques (économie administrée ou économie de marché) n’ont pas permis à Madagascar de former un tissu industriel permettant de constituer une base solide pour son développement économique. Les structures de l’économie n’ont guère évolué depuis les trente dernières années. Le pays reste à dominance agricole, la part du secteur secondaire dans le PIB est actuellement juste à son niveau post-indépendance. Le mauvais choix de stratégie de développement pendant la deuxième République a intensifié l’erreur commise pendant la phase de transition. Les tentatives de développement des industries d’import-substitution ont rencontré rapidement leurs limites à cause de la faiblesse de la demande interne et la dépendance de ces industries avec l’extérieur. Conjuguée avec le protectionnisme, ce modèle de développement n’a pas permis à Madagascar de démarrer son industrialisation. Au de-là de l’instabilité de l’objectif, l’absence d’une politique fiscale cohérente et compatible au développement du secteur industriel est une faiblesse de l’économie malgache. Nous avons souligné que ce problème, à part son coût qui est extrêmement lourd pour les entreprises, constitue un handicap pour leur épanouissement. Le protectionnisme et les différentes réglementations ont entraîné une stagnation de la production industrielle. (…) Les grands axes de développement du secteur industriel dans les années à venir doivent être conçus de manière stable mais souple. Madagascar doit profiter de ses avantages comparatifs et exploiter ses potentiels par le développement d’une part des industries à forte intensité de main d’oeuvre et d’autre part des PMI. Et pour suivre l’évolution et la tendance du marché, la compétitivité sous tous ses aspects (prix et hors-prix) des entreprises est importante. Cela suppose un certain nombre d’actions en matière de promotion et d’incitation de la part de l’Etat. Il doit jouer le rôle de facilitateur et de promoteur. Il convient de souligner que la réussite d’une politique industrielle relève de la cohérence de la politique économique globale. Et dans la mesure où nous avons opté pour une politique de croissance tirée par les exportations, dorénavant les critères de sélection des entreprises doivent être basés sur leurs performances à l’exportation. Et il faut le rappeler qu’une telle politique n’est soutenable à long terme avec la contraction continue de la demande interne ».

N°7 - JANVIER / FEVRIER 2011 - EXPANSION MADAGASCAR

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CAPITAL ECO

Point de vue | André Ramaroson

Président Directeur Général de la SAVONNERIE TROPICALE « Nous pouvons produire ce dont les consommateurs ont besoin » L’Expansion : Vous êtes l’un des rares industriels malagasy à s’être lancé dans l’industrie avec un capital et un personnel d’encadrement entièrement malagasy au lendemain de l’Indépendance. Comment une telle initiative a-telle été possible à cette époque ? André Ramaroson : Le Code des investissements mis en place sous le régime Tsiranana a beaucoup aidé dans la création d’industries en tant que mesures d’accompagnement de l’industrialisation de Madagascar, il comportait en plus des mesures incitatives comme l’exonération de droits de douane et de taxes d’importation sur les intrants et les machines industriels pendant 5 ans. Il en était de même pour l’IBS (Impôt sur les bénéfices des sociétés).. L’Expansion : Et qu’en était-il de l’accès au financement ? André Ramaroson : Il y avait la Banque de développement qui accordait des prêts à long terme assortis de taux normaux et de délai de remboursement allant jusqu’à 12 ans pour la construction de bâtiments industriels. Le délai de remboursement pour les crédits à moyen terme était de 7 ans pour l’achat des matériels industriels. Là aussi, les taux étaient normaux, contrairement aux taux prohibitifs actuels. Depuis longtemps déjà, les industriels réclament des mesures incitatives car sans cela, l’industrie ne se développera pas. Rappelons qu’à l’époque où nous avons créé la Savonnerie tropicale, la concurrence du savon de Marseille était déjà là. Comme quoi, les mesures d’accompagnement et incitatives ne sont pas synonymes de protectionnisme mais d’outil pour aider l’industrie à s’épanouir après 5 ans d’existence en détaxation. L’Expansion : L’industrie locale pouvaitil répondre aux normes et qualité à cette époque ?

André Ramaroson : L’exemple de la Savonnerie tropicale d’abord, c’est un parmi les symboles de l’Indépendance Nationale, c’est-à-dire que nous pouvons produire localement ce dont les consommateurs ont besoin. Et cette production répond à la qualité et aux normes requises parce que nous avons pu acquérir des machines à la pointe de la technologie. C’est grâce à un facile accès au financement. Madagascar possède une seule savonnerie moderne jusqu’à présent et était la première à l’époque dans l’Océan Indien et non moins un parmi les fleurons de l’Industrie Nationale. L’Expansion : Qu’est-ce qui s’est passé parce que l’industrie a vivoté plus tard ? André Ramaroson : Nous sommes sortis de la zone franc en 1973. Ce qui a provoqué le contrôle de changes, la pénurie de devises et donc les limitations imposées aux importations. Les industriels ne pouvaient plus importer le volume suffisant de matières premières pour faire fonctionner normalement leur usine. Puis, il y a eu cette révolution socialiste des dirigeants de l’époque qui consistait à couper l’herbe sous les pieds de la soi-disante classe bourgeoise au nom de l’égalité des classes. En voulant tout politiser, il est même arrivé d’étatiser des industries créées par des nationaux comme nous! En réalité, l’Etat ne voulait pas du secteur privé, alors qu’à la fin des années 70, la Savonnerie tropicale atteignait sa vitesse de croisière. En 1980 donc, un pseudo conflit social a été enclenché au sein de mon usine. Je ne pouvais plus diriger durant 3 ans et l’usine a fait l’objet de dilapidations et était au bord de la faillite. Comble de malheur, le néo-libéralisme à l’appui de la révolution socialiste est mis en place par l’ouverture du marché intérieur, la libre concurrence accentuent encore la fragilité du tissu industriel du Pays en dehors des monopoles. Madagascar bascule d’un extrême à l’autre d’où mêmes causes mêmes effets.

L’Expansion : Et vous avez décidé de poursuivre au lieu d’abandonner. André Ramaroson : Des multinationales comme Colgate-Palmolive ou Procter and Gamble voulaient reprendre l’usine. Mais si nous avons vendu, quelle serait notre contribution à l’économie nationale ? Quand j’ai eu gain de cause à l’issu du pseudo conflit social créé dans mon usine, on m’a laissé tranquille. Mais le contexte d’alors a incité les opérateurs privés à créer des groupements comme le CONECS dans les années 80 et le FIVMPAMA dès le début des années 70. Sans ces groupements, le secteur privé n’aurait aucune force et aucun poids. L’Expansion : Comment expliquer la stagnation, voire le recul actuel de l’industrie ? André Ramaroson : Notre économie est soumise à la mondialisation. Où sommes-nous les Nationaux ? Nous ne pouvons que dresser un constat d’échec de tous les régimes qui se sont succédé au pays. Y a-t-il une volonté de sortir de cette emprise ? Cette question est liée à la gouvernance et aux mesures devant conduire le pays vers l’industrialisation. Mais celle-ci sera-t-elle en nos mains réellement ? L’Expansion : Cela veut-il dire que vous êtes contre le système de libéralisme économique ? André Ramaroson : C’est le citoyen qui parle. Le libéralisme est de mauvais aloi dans un pays qualifié comme parmi les plus pauvres du monde. Les bailleurs de fonds devraient ne plus nous imposer. Les Programmes d’ajustement structurel et le libéralisme ont fait beaucoup de mal à Madagascar. Dès qu’on parle de défendre l’industrie, les bailleurs de fonds avancent que c’est du protectionnisme. Il s’agit pourtant de défendre le pays encore en voie d’industrialisation. Et le problème devient critique quand on y ajoute ce que font certains importateurs qui sont de véritables saboteurs de l’industrie locale. Ils affaiblissent celle-ci, la remettent en cause et poussent même les industriels à vendre aux étrangers. Ces importateurs font venir à Madagascar des produits hors normes en quantité phénoménale, alors que le pays dispose de textes sur les normes. Sinon, ils s’adonnent à des importations frauduleuses. Ces importateurs nous volent notre part de marché


qui ne cesse de chuter depuis cinq ans. L’Expansion : Les industriels n’ont-ils pas finalement peur de faire face à la concurrence des produits importés ? André Ramaroson : Nous demandons à ce que les autorités nous aident à défendre l’industrie locale. C’est parce qu’en face, certains importateurs ne jouent pas le jeu. Il faudra les sanctionner. Cela ne veut pas dire que nous avons peur de la concurrence, nous n’aurions pas créé la Savonnerie tropicale. A l’époque où nous l’avons fondée, le marché était déjà inondé de savon de Marseille. Mais les règles du jeu étaient claires à l’époque et la concurrence déloyale et les fraudes n’avaient pas cours, contrairement à ce qui se passe depuis ces dernières années. Ces fraudes et tricheries dans les importations n’ont pas été combattues comme il devait. L’Expansion : Tous ces problèmes ne s’expliquent-ils pas par l’absence d’une vraie politique industrielle depuis l’Indépendance ? André Ramaroson : Sous la première République, le Code des investissements pouvait être assimilé à une politique industrielle. Il incitait les nationaux à investir et notamment à investir dans l’industrie. Mais en fin de compte, le pays n’avait

jamais élaboré une politique industrielle. Il n’y avait rien de bien défini là-dessus depuis 50 ans. Pareil pour l’économie et le social. C’est la gouvernance et la politique politicienne qui sont en cause chez nous. Les dirigeants successifs étaient des amateurs qui apprenaient seulement leur métier, une fois arrivés au pouvoir. Le pays leur sert donc toujours de cobaye. En une quarantaine d’années, l’industrie a vu passer une vingtaine de ministres. On sait pourquoi le secteur n’avance pas. Les changements fréquents de responsables ne permettent pas d’élaborer et de mettre en place une industrialisation cohérente. Les industriels ont beau dire aux dirigeants qu’un pays développé est un pays industrialisé, rien ne change. Sous le régime Ravalomanana, ce dernier nous a bien écoutés et il a appliqué point par point les mesures incitatives que nous avons demandées. Seulement, il ne l’a pas fait pour l’industrie locale mais uniquement pour ses propres usines. L’Expansion : Faut-il subventionner l’industrie locale pour l’aider à se développer ? André Ramaroson : Dans ou après une crise, c’est nécessaire pour aider l’industrie à lutter contre les importations sauvages. Il faut relever

que certaines importations servent au blanchissement d’argent sale, lequel finance des actions de déstabilisation économique. La réponse de l’Etat aux problèmes des importations sauvages est la mise en place des « Tsena mora ». C’est d’ailleurs la première réponse concrète de l’Etat aux revendications des industriels qui ont toujours bataillé pour inciter à consommer malagasy et la suppression de la TVA sur les PPN comme le riz, les produits de grande consommation ou de consommation courante. L’Expansion : Faut-il pérenniser les « Tsena mora » ? André Ramaroson : Cette mesure est un ballon d’oxygène pour les industries qui ont perdu beaucoup de part de marché à cause des importations sauvages. Elle a été élaborée intelligemment car elle aide à la fois les industriels et les consommateurs dont le pouvoir d’achat est faible et qui sont également inondés de produits importés dont la plupart ne répondent pas aux normes. Le « Tsena mora » n’est peut-être pas le remède. C’est seulement conjoncturel et dans notre cas, il représente seulement un petit pourcentage de notre chiffre d’affaires. Mais dans son approche, l’Etat devra privilégier les produits industriels locaux pour approvisionner son Armée par exemple. En fait,

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CAPITAL ECO les gouvernants devraient changer d’état d’esprit et faire preuve de patriotisme économique. Ce type de patriotisme a été toujours ignoré jusqu’ici. Certes, les nationaux ne peuvent pas réaliser des grands projets de la dimension de celui de QMM à Fort-Dauphin et de Sherritt à Ambatovy, mais il faut les aider à mettre le pays sur la voie de l’industrialisation. Pour ce faire, nous avons besoin de dirigeants conscients et engagés, c’est-à-dire qui savent ce qu’il faut faire, des dirigeants crédibles qui font passer l’intérêt de la Nation où se trouvent les intérêts de chacun engagés. L’Expansion : Quelles sont vos propositions pour développer l’industrie ? André Ramaroson : Il faut des mesures incitatives comme sous la première République une banque de développement. Le Code des investissements mis en œuvre à cette époque a été très efficace et s’avérait indispensable pour permettre aux nationaux de créer des PMI (Petites et moyennes industries) avec un taux bancaire préférentiel. Lorsque des gens ont constaté ce que la Savonnerie tropicale a vécu, certains hésitent et d’autres préfèrent utiliser leurs capitaux pour cupidité effrénée par pure et simple spéculation. Quant à l’Etat, il devrait gérer encore les secteurs stratégiques ou de services publics comme l’électricité et le transport ferroviaire, etc… L’Expansion : Etes-vous donc contre les privatisations ? André Ramaroson : Pourquoi un pays très pauvre comme Madagascar doit-il céder des secteurs stratégiques à des privés ? En étatisant des entreprises comme la Jirama et les banques, Didier Ratsiraka a bien fait. Mais au lieu de privatiser sèchement des secteurs stratégiques et les passer aux mains des étrangers, il aurait fallu les céder progressivement aux nationaux. Remarquez, les banques ne jouent pas le jeu avec des taux prohibitifs. Puis, elles n’accordent pas des prêts à long terme. Madagascar est probablement le seul pays indépendant à ne pas avoir sa propre banque ! J’ai appris qu’une entreprise étrangère dans le secteur des télécoms a bénéficié d’un taux d’intérêt de 2%, alors que les nationaux peinaient à obtenir un taux de 12% à 15%. Et actuellement, un grand projet immobilier également porté par des étrangers bénéficie d’un taux de 9%. Si les banques accordent pourtant aux nationaux les mêmes facilités, ces derniers pourront développer leurs activités, leur chiffre d’affaires et leur part de marché, créer des emplois… Puis, il est difficile d’obtenir des crédits à long terme dont le remboursement court sur 15 ans minimum.

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L’Expansion : Et quelles mesures fiscales proposez-vous ? André Ramaroson : La TVA sur les produits de grande consommation ou de consommation courante est une mesure anti-sociale imposée par le FMI. Elle pénalise les consommateurs dont le pouvoir d’achat est déjà faible. La TVA sur les produits de luxe ne pose aucun problème. Que les privilégiés paient pour aider les non privilégiés ! L’Expansion : Si rien ne change, que deviendra l’industrie locale ? Dans le cas contraire, que pourraient apporter des changements dans ce secteur ? André Ramaroson : Le pays entrera bientôt dans une nouvelle République et il faut penser au changement. Si les nouveaux dirigeants adoptent une politique industrielle assortie de mesures incitatives, Madagascar deviendra comme ces pays émergents de l’Asie du SudEst qui n’avaient pas besoin du FMI pour leur développement et leur croissance économique. La mise en place de mesure de sauvegarde de l’OMC est impossible à actionner. La crise actuelle nous ouvre enfin les yeux sur les méfaits commis par ces institutions sur l’économie des pays pauvres comme la nôtre. Sinon, il faut voir comment le Brésil a développé la classe moyenne de son pays pour donner un grand coup de pouce à la consommation et donc au développement de la production locale. La bonne gouvernance et le développement des autres secteurs porteurs devraient accompagner tous ces efforts. Il faut aussi des réformes mais auparavant, il faut d’abord assainir pour redresser et enfin relancer. Il faut des réformes dans les politiques économique, industrielle, sociale, agricole… en se référant sur les leçons du passé. Il faut donc bien analyser la situation, être capable de l’assainir et apporter des réformes. C’est comme cela que le pays peut aller vers l’industrialisation à maîtriser par les nationaux. C’est une voie incontournable pour tout pays qui veut progresser. Ce n’est pas seulement avec le commerce et les services que nous deviendrons un pays émergent. Et si rien ne change, le pays traversera d’autres nouvelles crises qui seront synonymes de pertes d’emplois, de fermetures d’entreprises et d’usines, de délocalisation d’unités industrielles. Car il faut souligner qu’au lieu de faire preuve de patriotisme économique, certains nationaux ont préféré délocaliser leurs unités à cause de l’absence d’assistance à l’industrie en danger. Quant à nous, nous assumons notre rôle en tant qu’industrie citoyenne.

EXPANSION MADAGASCAR - JANVIER / FEVRIER 2011 - N°7

L’Expansion : Monsieur le Ministre, nous venons de célébrer la journée de l’industrialisation de l’Afrique, Quel bilan pourriez-vous dresser des 50 dernières années de l’industrie à Madagascar ? MEI : Tout d’abord, je tiens à remercier le SIM et le GEFP pour l’appui et la participation à cette célébration sans lesquels, il n’y aurait eu aucune célébration. Vos représentants ont témoigné que l’industrie malgache a beaucoup à donner et qu’elle peut encore se développer, ne craint pas la concurrence mais moyennant certaines facilitations du climat des investissements. Tout ceci me permet de faire la transition vers votre question. «Quel bilan émettre ou dresser sur l’Industrie à Madagascar depuis les 50 dernières années ? ». D’une manière générale, tout comme la plupart des PMA, l’assise industrielle de Madagascar reste encore faible. Et pour le démontrer, il faudrait la prendre par ère politique, c’est-à-dire de l’indépendance à l’avènement de la deuxième république, et de cette date à nos jours : - Entre 1960 et 1975, les étrangers (grandes familles coloniales) détiennent les grandes industries à Madagascar. Durant cette période, force est de constater que les activités industrielles ont connu un essor remarquable en ce sens que la production approvisionne directement, sans aucune autre concurrence, le marché français. - Après 1975 : Madagascar a fermé ses frontières, les quotas établis auparavant par la France n’existent plus, d’où la valeur ajoutée manufacturière par habitant régresse. Elle n’est plus que de 25 dollars en 2000, en recul par rapport à la situation en 1990 qui est de 28 dollars et 42 dollars en 1980), juste la moitié du seuil de 50 dollars requis pour le décollage industriel. Par ailleurs, l’activité manufacturière proprement dite (hors énergie et industries extractives) se situe entre 11% et 12% du PIB entre 1990 et 2008 (également en recul par rapport à la situation de 1980 à 13,1%). Du point de vue monographique, la base industrielle malgache composée majoritairement de PMI, est principalement localisée, pour plusieurs raisons, sur l’axe Antananarivo-Antsirabe, où l’on recense la majorité des industries agro-alimentaires et du bois, la quasi-totalité des industries de Zones et Entreprises Franches, et une grande partie des industries mécaniques. Par ailleurs, les industries œuvrant au régime de droit commun (c’est à dire hors Zones et Entreprises Franches) constituent pour la plupart d’entreprises faisant de la substitution d’importations. Ces entreprises stagnent et se retrouvent non préparées à soutenir la concurrence des produits


Point de vue de Richard Fienena | Ministre de l’Economie et de l’Industrie (MEI)

POINT DE VUE

« Lutter contre les importations frauduleuses ou sauvages » importés encouragés par la libéralisation. L’entrée de Madagascar dans le système de régionalisation du marché, notamment suite à l’adhésion à la SADC, a encore exacerbé la concurrence que les entreprises de droit malgache ont subie. En ce qui concerne la situation actuelle des industries locales, elle peut s’expliquer par plusieurs raisons. Les faibles performances handicapent les industries locales en raison de l’isolement du secteur par rapport aux courants technologiques. L’absence de maîtrise au niveau technique et des normes de qualité, l’absence de spécialisation, des qualifications insuffisantes du personnel aussi bien sur le plan de la gestion qu’au niveau technique, les difficultés à obtenir des matières premières de qualité, un marché intérieur peu exigeant, la faible connaissance des marchés extérieurs, les difficultés d’accès au financement pour la constitution d’un fonds de roulement significatif, l’utilisation d’un outil de production non renouvelé, une absence de transformation industrielle de proximité, la défaillance des infrastructures (énergie, routes, ports, aéroports, …). Tout se traduit finalement par une production de qualité insuffisante, une faible productivité, et partant, un manque de compétitivité de la production intérieure par rapport aux importations. Sur le plan du financement, alors que les entreprises présentent une très faible capacité d’autofinancement, l’accès aux crédits est quasiment impossible pour la majorité des entrepreneurs privés. Si la santé du secteur financier s’est beaucoup améliorée depuis la privatisation des banques d’Etat, le défi revient à résoudre le manque (voire l’absence) de crédit à long terme, qui est manifestement une contrainte à l’investissement. Avec un accès très limité au financement externe pour le secteur privé, le système bancaire actuel du pays n’est pas en mesure de répondre aux besoins des entreprises privées. On note par ailleurs une sous capitalisation des entreprises entraînant le recours à des emprunts inadaptés tel l’utilisation de crédits à court terme qui s’avèrent coûteux pour financer des actifs qui devraient être supportés par des emprunts plutôt à long terme. Alors que les opportunités existent si l’on se réfère aux avantages que les pays moins avancés jouissent au niveau du commerce international pour ne citer que les Franchises en droit et Sans contingentement même si les termes de l’échange ne sont pas en notre faveur. L’Expansion : Dans vos propos, vous faites toujours référence et différencie les entreprises au régime de droit commun et les entreprises franches. Il semble que l’industrie locale n’obtient pas de l’Etat l’appui pour son développement, alors qu’il privilégie des secteurs comme la zone franche. Comment expliquer ce traitement inégal et quel en est le remède ? MEI : Le développement de l’industrie locale ne concerne pas uniquement le secteur de la « Zone franche», mais tous les secteurs industriels. En ce sens, outre l’actua-

lisation du texte relatif au régime de Zone Franche, le Gouvernement s’est attelé également à la mise en place du Programme de Mise à Niveau et de Modernisation des industries locales lequel vise à appuyer le secteur privé par le renforcement de la compétitivité des industries locales et ce, à travers le renforcement de capacité nationale de production, la gestion et le suivi de la structure d’appui à mettre en place, l’opérationnalisation du système de normalisation et de certification approprié. Ce Programme sera à valider dès rétablissement de la conjoncture qui prévaut. Un autre exemple est l’implication de Madagascar au PRPIA (Programme Régional pour le Promotion de l’Investissement en Afrique) qui résulte de la collaboration entre l’ONUDI et le Réseau des Agences de Promotion des Investissements en Afrique (AfrIPANet). Il devrait permettre aux entreprises malgaches d’intégrer ultérieurement un réseau d’entreprises mondialement connu et accéder à la BSTP (Bourse de Sous Traitance des Produits). Finalement, en collaboration avec l’OMPI (Office Mondial de la Propriété Intellectuelle) la mise en place du CATI (Centre d’Appui à la Technologie et à l’Innovation) est en cours d’étude actuellement Le gouvernement s’attelle à la mise en œuvre de ces grands programmes pour que, d’une part, nos entreprises puissent faire face aux défis de la mondialisation et que d’autre part notre pays puisse attirer plus d’investissements étrangers qui pousseront vers l’avant le secteur industriel local. Pour résumer, on ne peut donc pas parler de traitement inégal. L’Expansion : Les entreprises franches textiles n’hésitent pas à voir ailleurs au moindre incident. Que faire pour un développement vertical plus générateur d’emplois et d’activités stables dans des branches comme la production de matières de coton, la filature et le tissage ? MEI : La filière cotonnière à Madagascar est pratiquement en difficulté depuis quelques années, surtout depuis 2008, depuis les problèmes financiers rencontrés par HASYMA (déjà privatisée), après laquelle les campagnes n’ont pu être effectuées que partiellement et les nouvelles plantations n’ont pas été réalisées. Les actions prévues par l’Administration n’ont pas été également entreprises, entre autres : - Le déblocage de fonds se rapportant à la stratégie de valorisation de la production cotonnière pour l’année culturale 20082009 ; - La réalisation des décisions prises par le Task Force créé en vue de l’élaboration et la mise en œuvre d’une stratégie de valorisation de la production malgache de coton. Les appuis financiers sont par conséquent primordiaux pour la relance de cette filière et partant, le développement vertical plus générateur d’emplois et d’activités stables dans les branches liées comme la filature, le tissage. Et tout ceci revient à mes propos antérieurs, le manque (voire l’absence) de crédit à long terme, l’accès très limité au financement externe pour le secteur privé sont autant

de contraintes à l’investissement, notamment pour les opérateurs intéressés par la filière. En se projetant sur le long terme, on peut dire que le secteur textile malgache est porteur et il ne faut pas perdre espoir dans la mesure où une politique adaptée au développement du coton aura un impact sur la disponibilité des intrants au niveau national donc entraînera une diminution du coût de production (actuellement le secteur importe une grande partie de ses intrants). Par ailleurs, il ne faut pas perdre de vue que les entreprises textiles malgaches sont des entreprises «combatives». La preuve : le textile malgache a su résister au démantèlement de l’accord multifibre. Certes, la crise a eu un impact sur le secteur à cause de l’effet AGOA mais en termes d’investissement c’est le long terme qui prime. Long terme veut dire : reprise à la normale de nos relations avec l’extérieur avec les avantages conséquents : AGOA, accord de partenariat économique etc… Finalement, il ne faut pas oublier que, dans ce domaine, Madagascar est une référence en matière de qualité et que sa main d’œuvre a un coût relativement faible. L’Expansion : Peut-on dire que Madagascar a une politique industrielle ? Si oui, laquelle et quelles sont les grandes lignes ? MEI : A ce jour, la Lettre de Politique Industrielle (LPI) définit les grands axes stratégiques pour le développement de l’industrie et constitue la Politique Industrielle de Madagascar. La mission assignée à la LPI consiste, entre autres, à accompagner la mise en œuvre des stratégies pour une économie à forte croissance. Pour ce faire, le Gouvernement prévoit les grandes lignes de politique telles : - L’amélioration de l’environnement des affaires et la promotion des investissements Qui préconise de mettre en avant une politique attractive à l’égard des investisseurs par la mise en place et le renforcement de la capacité opérationnelle de l’EDBM (en tant qu’outil de politique et structure originale de promotion des investissements), l’application de la nouvelle loi sur les investissements (plus pratique, transparente et d’avant-garde), la refonte de nouveaux textes en matière foncière (permettant aux étrangers l’accès à la propriété foncière), la simplification du système fiscal et douanier, etc… - Le renforcement de la base nationale du secteur privé C’est-à-dire induire une industrialisation à grande échelle qui utilisera de façon intensive la main-d’œuvre excédentaire, à travers des initiatives hardies visant à libérer le potentiel entrepreneurial national) et des mesures agressives axées prioritairement sur l’offre (services d’extension industrielle, pépinières d’entreprises, micro-finance, etc…) et visant à stimuler à le développement des entreprises locales, des MPE et de l’artisanat. - L’appui à l’intégration de Madagascar à l’économie mondiale Qui recherche à relever les capacités technologiques et commerciales des entreprises à vocation exportatrice, à travers des programmes de restructuration/mise à niveau

industrielle et de mise en place des infrastructures technologiques, dans le cadre d’une nouvelle stratégie industrielle visant à pénétrer des marchés d’exportation avec des produits à forte valeur ajoutée. - Favoriser le développement des filières d’action privilégiées Par laquelle, il faut privilégier l’action de développement et favoriser l’implantation de nouveaux projets d’investissement, au niveau d’un certain nombre de filières considérées comme hautement prioritaires pour leur effet d’entraînement. Ces filières concernent le tourisme, l’agri business, l’industrie légère d’exportation, les mines, les infrastructures, et les technologies de l’information et de la communication. En d’autre termes, couplée avec la politique des Petites et Moyennes entreprises, la lettre de politique industrielle devrait permettre au plan national de mettre en réseau les acteurs économiques avec entre autres comme objectif l’amélioration de la compétitivité, l’innovation et le positionnement des Petites et Moyennes Entreprises dans le tissu industriel et ce, tout en créant des emplois qualifiés. Il faudrait cependant être très méticuleux dans la mise en œuvre des dispositifs pour la réalisation de ces politiques (aide à l’investissement des PME, ingénierie financière etc…). L’Expansion : Après tout ce long exposé et pour clôturer, quelles sont vos propositions fiscales, douanières et évidemment vos actions contre les importations sauvages pour le développement de l’industrie de Madagascar ? MEI : En fait, depuis un certain temps, tel que je l’ai dit à Fianarantsoa, en collaboration avec mes collègues du ministère des finances et du commerce, des actions ont été déjà entamées pour lutter contre les importations frauduleuses ou sauvages comme vous dites. La note N°575 MFB/SG/DGB du 24 aout 2010 visant quelques produits très sensibles œuvre dans ce sens. Il s’agit de l’application des valeurs minimales comme base de taxation douanière sur les produits tels que le sucre, le ciment, la farine, l’huile de palme, l’oléine de palme, l’huile de coco. Quels que soit les prix de facturation, les prix de référence priment pour la taxation aux frontières. Dans cette optique, le Conseil National de Normalisation est en cours de création, il établira la norme des produits à Madagascar suivant l’ISO ou le CODEX. Par ailleurs, le Comité National des Mesures Correctives Commerciales (CNMCC) est déjà créé et a pour objet d’élaborer les réglementations nationales, de mener les enquêtes, et d’appliquer les mesures correctives afin de protéger les producteurs nationaux ou les branches de production nationales face aux pratiques commerciales préjudiciables à leurs égards. Le CNMCC pourrait appliquer les mesures de sauvegarde, d’anti-dumping ou des mesures compensatoires. Pour conclure, je me permets de vous dire, il ne faut pas faire des états d’âme face aux importations sauvages et aux fraudeurs dans la mesure où les industries locales sont pénalisées ainsi que les fiscalités intérieure et extérieure.




Felana Lalatiana

Région | SAVA

REGION | SAVA

Une Région de prédilection pour les cultures de rente La Région Sava est divisée en quatre Districts à savoir Sambava, Antalaha, Vohémar et Andapa, subdivisés euxmêmes en communes. La Sava compte au total 79 communes dont quatre communes urbaines. Les fokontany, subdivisions administratives et communautés de base au sein des communes, forment la base de la pyramide de l’Administration territoriale. La Région Sava compte au total 803.fokontany, répartis dans les quatre Districts cités plus haut. La Région s’étale sur 23.600 Km² de superficie. Trois Districts occupent la presque totalité de la Région ; les superficies de Sambava, Antalaha, Vohémar et Andapa représentent respectivement 21, 24, 37 et 18% de l’ensemble du territoire. La Sava est essentiellement influencée par l’Océan Indien. Trois de ses quatre Districts se trouvent sur la côte orientale, faisant face aux courants forts de l’Est. La Sava présente dans son ensemble un aspect rural. Seuls les chefs-lieux des Districts de Sambava, Antalaha, Vohémar et Andapa ont une vocation urbaine. Les quatre Districts de la Sava présentent une certaine homogénéité de problématique socio-économique et une similarité d’axes d’intervention possibles de développement. Cette zonage se justifie par ailleurs par un certain nombre de traits caractéristiques communs telles qu’une végétation riche mais fortement menacée par la pratique des « tavy », une précipitation relativement abondante, une population moyennement homogène vivant dans un enclavement relatif et, enfin, la pratique de cultures de rente (vanille, café, girofle, poivre…). En fonction des unités naturelles, on peut distinguer cinq sous-régions relativement homogènes :

• La zone littorale, composée d’une bande étroite de plaine longeant la côte, d’une longueur de 270 km environ et une largeur comprise entre 8 et 15 km. Cette plaine littorale se caractérise par la prédominance des cultures vivrières (riz et autres), de caféiers et de vanilliers en périphérie. L’altitude maximale de 60

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m permet en outre un accès moyennement aisé.

• La zone intermédiaire, dont l’altitude est comprise entre 60 et 250 m, est privilégiée par sa nature et sa situation géographique. Elle est constituée de terrains alluviaux riches en éléments fertilisants. C’est le domaine des cultures de rente par excellence. La culture de la vanille occupe les terres alluviales dans les vallées d’Ampanefena au Nord jusqu’au Sud d’Antalaha.

• La cuvette intramontagnarde de l’Ankaibe est réputée par l’existence d’excellents sols de culture. Zone d’immigration, la cuvette d’Andapa est également le grenier à riz du Nordest malgache. Par ailleurs, la cuvette d’Andrafainkona, dans la partie Ouest du District de Vohémar, se caractérise par la fraîcheur de son climat, lequel lui offre une opportunité particulière pour le développement de l’agriculture et de l’élevage. • La zone montagneuse se caractérise par un relief accidenté et une altitude pouvant aller jusqu’à plus de 2000 m (Marojejy). Cette zone couvre les zones forestières du Cap Masoala et des bordures du Tsaratanana. Elle est souspeuplée et la vie rurale y reste dominée par les cultures vivrières annuelles sur les zones de défrichements forestiers. L’essentiel des ressources provient encore des campements de culture établis par les paysans sur des « tavy ». Malgré les besoins des secteurs d’économie de plantation, le paddy récolté ne donne lieu à aucune commercialisation. • La zone d’élevage dans le nord, laquelle s’étend de la Commune rurale de Tsarabaria jusqu’au fleuve Loky, sépare la Sava de la Diana. Dans cette zone, plus on avance vers le nord, plus le climat est sec. La végétation se conforme à ce climat relativement aride. Cette zone sous-peuplée est dominée par l’élevage bovin pratiqué sous sa forme primitive. En saison sèche, les troupeaux souffrent du manque d’eau, créant ainsi des problèmes tels que la dégradation de l’état de santé des animaux, la divagation à la recherche de l’eau. Plusieurs abreuvoirs

EXPANSION MADAGASCAR - JANVIER / FEVRIER 2011 - N°7

existaient dans le temps, mais faute d’entretien, aucun d’entre eux ne fonctionne plus actuellement. En matière d’activité, il n’y a que l’élevage bovin qui soit pratiqué dans cette zone, hormis l’agriculture, plus précisément les cultures vivrières telles que le riz pluvial, le manioc, le maïs, l’arachide, etc. Pôle de développement En terme de pôle de développement existant, l’on peut classer la Région Sava en quatre zones dont les limites coïncident à celles des 4 communes urbaines, Chefs-lieux des actuels Districts. (Communes urbaines de Sambava, Antalaha, Vohémar et Andapa). D’autres pôles moins importants sont en train de se créer tels que les chefslieux des communes d’Ampanefena, Amboangibe, Ambodiangezoka,… La Sava dispose d’importants réseaux hydrographiques à travers l’existence de plus d’une dizaine de grands fleuves qui traversent la Région. En effet, de nombreux fleuves profondément encaissés la sillonnent du Sud-est au Nord-est. Dans l’ensemble, les fleuves ne sont navigables que dans la partie qui traverse la plaine littorale, d’une longueur excédant rarement les 15 km. A partir des fortes pentes, les fleuves sont inaccessibles et les crues, qui y sont particulièrement brutales, présentent des débits très élevés. A titre d’exemple, il est à signaler que la crue annuelle de la Bemarivo atteindrait plus de 2000 m3/ seconde, selon les services techniques locaux. Ces nombreux fleuves constituent d’importantes opportunités pour le développement des cultures irriguées, ainsi qu’une source d’énergies renouvelables pour l’hydroélectricité. Malheureusement, ils ne sont pas exploités dans ce sens. Les principaux fleuves de la Région sont, du nord au sud :

1.1. District de Vohémar : Manambato, Fanambana et Manambery ; 1.2. Districts d’Andapa et de Sambava : Bemarivo, Androranga, Lokoho, Mahanara, Sambava et Ankatoka ; 1.3. District d’Antalaha : Ankavanana, Ankavia, Ankaviahely, Sahafihitra

et Onive. Les ruisseaux côtiers y sont également abondants, prenant source dans les collines et massifs internes. Ils donnent lieu à des bassins-versants de superficie moyenne et des vallées forestières de petite étendue. Les effets des crues sont amplifiés dans la zone littorale par le colmatage continu des embouchures. Selon l’étude Dirasset/Pnud, « évoquer l’industrie dans la Sava, c’est plutôt pour signaler son absence ». Cet état de chose trouve une explication d’origine historique, laquelle a voulu que la colonisation française a spécialisé le Nord-est dans la production de cultures de rente. En effet, la politique coloniale a voulu que la Région Sava ne soit pas une zone industrielle, mais ayant plutôt comme vocation principale la fourniture de produits à haute valeur marchande. Les principales cultures de la Région sont la vanille avec une production près de 867 tonnes, le café (7000t), le riz (215.000t) et l’ananas (7950 t). La Région est également réputée pour l’élevage bovin, lequel se trouve essentiellement à Vohémar. Selon les données recueillies auprès de la Région, l’on a recensé près de 250.000 têtes de bovins. L’inaccessibilité, un blocage au développement de la Région Le mauvais état des infrastructures routières constitue un blocage majeur du développement de la Région Sava. En effet, l’axe Ambilobe-Vohémar, qui mesure 150 km, est impraticable durant la saison de pluies. « De janvier à avril, cette route est inaccessible », s’est plaint le président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de la Sava, Eden Clermont Ratombozafy. L’avion constitue le seul moyen de déplacement de la population dans ce cas ; or, le coût du transport aérien est trop élevé. De plus, la desserte aérienne ne se fait que 3 fois par semaine. Les opérateurs sont contraints d’envoyer les marchandises par bateau, ce qui augmentera également le coût de transport. Outre cela, la Région ne dispose pas encore de Direction régionale de l’industrie.


Coopérative « SAVA Volamaitso »

Relancer la filière cacao Suite à la baisse du prix de la vanille et à la fusariose, une maladie qui ronge lentement les plantations de vanille, les paysans regroupés au sein de la coopérative « SAVA Volamaitso » ont décidé de se tourner vers le cacao. « J’avais 6 hectares de plantation de vanille ; mais suite à la fusariose, actuellement je n’en possède plus qu’une moitié d’hectare », s’est plaint Jean-Michel Benisoa, président de la coopérative « SAVA Volamaitso ». « La fusariose est une maladie fatale qui frappe les lianes de vanille. Nous n’avons d’autre solution que de remplacer les plantes mortes. Outre cela, cette maladie est contagieuse. Si une liane dans une parcelle est atteinte, il faut s’attendre à ce que toute la parcelle soit affectée. Dès la première apparition de la maladie sur une liane, nous sommes contraints de condamner toute la parcelle. Malgré ce virus qui affecte la plantation, notamment dans la Sava, aucune mesure n’a été prise au niveau de l’administration », déplore Jean-Michel Benisoa. Facile à entretenir « Le cacaoyer est plus facile à entretenir

que les plants de vanille », explique le président de la coopérative « SAVA Volamaitso ». Selon ses explications, le cacaoyer ne demande pas de fécondation, ils sont plus souples et résistent mieux aux cyclones que les vanilliers. « La longévité d’un cacaoyer varie entre 50 à 80 ans alors qu’il donne sa première production dès la 3ème ou la 4ème année », ajoute notre interlocuteur. « De plus, la production se fait toute l’année. L’on enregistre tout de même une baisse de récolte pendant 45 jours, entre mars et avril », poursuit-il. La production sur 10 années de récolte se chiffre comme suit : Année

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Production (kg/pied)

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Concurrencer la Sambirano « Les conditions climatiques dans la Région Sava sont favorables à la plantation de cacaoyer et répondent mieux aux exigences de la plante qu’à Sambirano », a en outre annoncé le président de la coopérative « SAVA Volamaitso ». Notons que la plantation de cacao demande une

température moyenne optimale située entre 21 et 25°C. La moyenne des minima quotidiens des températures doit être supérieure à 15°C, sans jamais descendre en-dessous des 10°C. La croissance et la production de cacao sont étroitement liées à l’alimentation en eau car le cacaoyer est très sensible à une déficience hydrique. Les pluies doivent donc être assez abondantes. La plantation demande une moyenne de 1250 à 1500 mm de pluies par an. La saison sèche ne doit pas excéder 3 mois. Outre cela, à l’état naturel, le cacaoyer pousse à l’ombre des autres arbres. Compte tenue de tous ces paramètres, la Région Sava répond aussi bien que la Diana aux conditions climatiques de plantation de cacaoyer. En effet, Les températures moyennes dans cette région tournent autour de 25°C sur les plaines côtières pour diminuer un peu sur les reliefs. Plantation sur 10.000 ha Pour la coopérative « SAVA Volamaitso », la filière cacao constitue un moyen pour sauver les paysans de la Région de la dégradation de la filière vanille. Cela empêchera également la population

de saccager les richesses naturelles de l’Ile dont les bois précieux. « Nous allons planter 10.000 ha de cacaoyer soit 6.250.000 pieds dans les 4 districts de la Sava », a annoncé le président de la coopérative. Selon ses dires, la coopérative a déjà commencé à faire la vulgarisation. Elle fournit les pépinières et accompagne les paysans dans la plantation. Pour ce faire, elle a engagé des techniciens. « La coopérative assure la fourniture des jeunes plants, le défrichement, la trouaison ; bref, elle allège les dépenses des paysans qui tiennent chacun un carnet sur les dépenses effectuées par la coopérative et dont ils doivent rembourser la moitié à la première année de récolte et le reste à la deuxième. Le paysan s’engage pour sa part à fournir ses produits à la coopérative, au même prix que sur le marché ». La coopérative a déjà distribué 25.700 pieds de cacaoyer pour Bemanevika, 20.000 pieds pour Antanandava, 35.300 pieds pour Befandriana, 20.000 pieds pour Andapa et 25.000 pieds pour Antalaha. Le prix d’un jeune plant de cacaoyer est de 500 Ar pour le paiement au comptant et 600 Ar pour le paiement


Région | SAVA à la récolte. Pour un 1 ha de plantation, il faut 625 jeunes plants. Meilleurs prix Contrairement à la vanille, le cours du cacao a connu une nette embellie. Le prix de cette matière première est en ce moment à son plus haut niveau. Sur le « Liffe » de Londres, la tonne de cacao pour livraison en mars 2011 cotait 1925 livres sterling, vendredi vers 13H30

GMT contre 1811 livres la tonne pour l’échéance de décembre, le vendredi précédent vers 15H00 GMT. Sur le « NYBOT-ICE » américain, le contrat pour livraison en mars valait 2929 dollars la tonne contre 2790 dollars pour la même échéance une semaine plus tôt. Notons qu’en quinze ans, la consommation de cacao des Français a presque doublé. La hausse de la demande en Asie et en Europe a

favorisé la spéculation et explique l’envolée des prix. Dans la Région Sava, le kilo de cacao marchand s’achète à 6.000 Ar alors que le prix de la fève de cacao est de 1.000 Ar le kilo. « Avec une plantation de 8 millions de pieds de cacaoyer, nous pouvons faire entrer des devises allant jusqu’à 540 milliards de fmg, soit l’équivalent des devises apportées par 2.000 tonnes de vanille », a expli-

qué Jean Michel Benisoa. « Pour que les producteurs puissent avoir de bon prix, nous sommes actuellement en train de faire les démarches pour s’intégrer dans le commerce équitable. Plus tard, nous allons entrer dans le marché bio équitable, mais pour ce faire, il faut trouver du financement pour la certification », conclut Jean Michel Benisoa.

Vanille Mad

Des laboratoires pour vérifier la qualité des produits

La société « Vanille Mad » appartient au groupe Trimeta, laquelle a été lancée par HG Hiridjee en 1964. Basée à Madagascar, la compagnie a augmenté la production de vanille. Trimeta est un leader mondial dans les commerces d’épices, d’huiles essentielles et d’arômes pour l’industrie alimentaire. La compagnie s’est ensuite diversifiée dans d’autres produits et a été parmi

les meilleurs dans l’industrie au cours des 40 dernières années. Trimeta s’est imposée comme leader dans le commerce de vanille et de sa gamme de produits, à savoir le girofle, la cannelle, le gingembre, le poivre, le piment, le café et la noix de cajou et a créé sa propre usine pour la distillation et l’extraction des huiles essentielles. Trimeta a grandi à pas de géant depuis sa création et approvisionne l’ensemble du marché des épices. Le groupe s’est également taillé un créneau de choix sur le marché mondial et a recours à l’utilisation des technologies de pointe pour garantir que ses produits soient conformes aux normes exigées par le marché et le client.

« Vanille Mad » possède 2 agences, l’une à Toamasina, spécialisée dans les filières girofle et huiles essentielles et l’autre à Sambava. Cette dernière se spécialise dans la collecte, le conditionnement et le stockage de la vanille. « Vanille Mad » ne possède pas de plantation mais travaille avec des planteurs et des collecteurs fidélisés. « La société achète les produits sur les bases de contrats qu’elle a conclus. Elle est parmi les plus grandes exportatrices de vanille à Madagascar », a déclaré René Tiazara, Directeur d’agence à Sambava. « Chaque collecteur a un numéro. Nos produits ont toutes leurs traçabilités. Ceci nous permet également de fidéliser les bons collecteurs », ajoute notre interlocuteur avant de préciser que « nous faisons des sélections et des tris avant l’entrée des produits et nous assurons du calibrage, de la qualité et de l’absence de clou, ainsi que de la teneur en eau des produits. Ces derniers passent en fait par une cinquantaine de processus, ainsi que plusieurs étapes. Un long processus Après le tri à l’entrée, les produits vont au séchage au soleil et(ou) séchage à l’ombre. Viennent ensuite le triage (par couleur, taux d’humidité, longueur), le classement, le mesurage et la mise en boîte. Cette dernière opération suit également certains critères. Elle est faite en fonction de classification (selon la couleur des grains) et de mesure (selon la longueur). Les colis sont conditionnés spécialement pour garder la meilleure saveur et la couleur des gousses intactes pour l’exportation. Les vanilles ont besoin de conditions de stockage adéquates pour conserver leur saveur et arôme intacts. Elles devraient être stockées dans un endroit frais et sec, sans changement de température. Les vanilles sont conservées sous vide dans un sac

hermétique pour conserver leur saveur intacte réelle. La société effectue des vérifications périodiques. Experte en emballage, « Vanille Mad » veille à ce que l’arôme soit retenu et le goût intact. Enfin, la rigueur observée durant l’expédition rend meilleurs le goût et l’arome des vanilles de « Vanille Mad ». « Le processus demande beaucoup de temps, l’on ne peut pas expédier les marchandises qu’au plus tôt 6 mois après la récolte ; l’idéal est de le faire 9 mois après la récolte », a déclaré René Tiazara. Rigueur dans le respect de la qualité « Chaque importateur a son cahier de charge qu’il nous envoie. Ce cahier contient leurs exigences, que ce soit en teneur en vanilline ou en teneur en humidité ou autres. Pour répondre à tous ces besoins, nous avons mis en place un laboratoire qui fait les analyses sur échantillonnage », a expliqué René Tiazara. Une partie des résultats de ces analyses sont envoyés à l’importateur qui fera une confrontation avec les résultats obtenus dans leur laboratoire. « Si la qualité est assurée, nous expédions les marchandises », annonce le directeur d’agence de « Vanille Mad » à Sambava. D’après le laborantin de « Vanille Mad », la plupart des produits qui entrent dans la société a un taux de vanilline supérieur à 1,5%. « Il y a même ceux qui ont des taux de 3%, mais la plupart ont un taux de vanilline comprise entre 1,5 à 2,5% », explique-t-il. Le respect de la qualité doit être strict tout au long du processus. « Pour nous, ce n’est pas la quantité qui prime mais la qualité », a confié René Tiazara. « La société œuvre pour l’amélioration du niveau de vie des producteurs en certifiant nos produits bio Ecocert. Grâce à cela, ils auront plus de reve-



Région | SAVA Pour la prochaine campagne nous ence qui touche 865 parcelles représentant 621 familles. « Nos gousses de vanille sont certifiées biologiques par Ecocert SA - F

Appel à la prise de responsabilité de l’Etat

de l’Agriculture, afin qu’il voie d’un peu plus près cette maladie car, à long terme, elle pourrait affecter la filière

core eu d’impact sur nos collectes. D’ailleurs, les paysans procèdent à Soulignons que le prix d’achat de la vanille rouge pour les exportateurs se situe entre 19.000 et 24.000 Ar le kilo.

néanmoins, nous faisons appel à l’administration, notamment au ministère

Vanille

Le déclin de la filière Sur les 60.000 ha de surfaces occupées par la plantation de vanille à Madagascar, 42.518 se trouvent dans la Région Sava, 2.183 dans la Diana, 839 dans la Région Atsinanana et 48 ha dans la Région Alaotra-Mangoro. Sur les 80.000 planteurs de vanille dans tout Madagascar, près de 70.000 se trouvent dans la région Sava, ce qui amène à conclure que plus de 80% de la production de vanille de la Grande Ile sont fournis par cette Région. Chute de prix

des chutes incessantes. Lors de la dernière campagne, le prix s’est situé noncé Ita Jacques, de l’établissement Ita Jacques, lequel est spécialisé dans la collecte de vanille. Selon ses dires, le prix d’achat aux exportateurs varie entre 14.000 et 25.000 Ar. le kilo, se-

s’achètent à 14.000 Ar. le kilo, tandis que ceux qui ont des dimensions de 10 à 12 cm s’acquièrent entre 15.000 vanilles mesurant plus de 13cm s’achètent entre 18.000 et 22.000 Ar. et, enfin, les vanilles noires sont proposées à plus de 25.000 Ar. le kilo. L’abondance de l’offre en vanille sur le marché et notamment la constitution de stock risque encore d’empirer la situation. En effet, selon le dernier atelier de la vanille qui s’est déroulé à Sambava, le 4 juin dernier, la situation du marché Pays Madagascar et chez les traders Ouganda Inde Indonésie Papouasie. NG Comores Autres Total stocks flottants Consommation attendue jusqu’au 31 décembre 2010 Report de stock fin 2010

Les stocks disponibles permettent de couvrir la totalité des besoins jusqu’à fin 2010 et même pour une partie de 2011 (650 T environ). Vue l’abondance de l’offre sur le marché, l’on peut encore s’attendre à une baisse de prix pour la prochaine campagne. L’atelier de la vanille

Ita Jacques.

ces produits non matures n’aient pas atteint la qualité requise. Outre cela, il dénonce également la vente de vanilles mal conditionnées, notamment dans la Capitale. « A Antananarivo, l’on rencontre souvent des personnes qui vendent de la vanille partout. Or, la plupart de ces produits ne sont pas bien conditionnés. Les touristes, ainsi que les consommateurs malgaches non connaisseurs, achètent ces produits, qui nuisent à l’image de la vanille de Madagascar », déplore Ita Jacques. Rappelons que, d’après René Tiazara, Directeur d’agence de « Vanille Mad » à Sambava, il faudra attendre 9 mois après la récolte pour avoir de bons produits, le conditionnement devant passer par plusieurs étapes obligatoires.

Le tableau qui suit montre l’évolution de la production de vanille, ainsi que le report de stock.

L’atelier national de la vanille à Sambava a annoncé que le report de stock (650 T) ne permet pas de combler la baisse attendue de la production mondiale de 2010 pour satisfaire la totalité des besoins en vanille natu-

Maladie Mise à part la chute de prix, l’on constate également la chute de production à Madagascar. Les autres pays commencent à grignoter la part de marché de la Grande Ile. Depuis quelques années, une maladie affecte les vanilliers et aucune mesure n’est tation est vieille et peu de paysans font s’étonner que des maladies rongent les vanilliers. Suite à cette maladie, nous avons constaté une chute de 30 à 40% de la production. La collecte est actuellement plus Stocks flottants difficile qu’aupa1600 50 50 60 30 20 1810 t 1160 650 t Année Production Mada Production autres pays Production totale Report stock

2004

2005

2006

2007

2008

2009

1400

1850

2200

2000

1750

400

500

700

1000

800

1500 600

1800

2350

2900

3000

2250

2100

-

-

350

1150

1950

2200

Offre globale dispo

1800

235

3250

4150

4500

4300

Consommation globale

1800

2000

2100

2200

2300

2500

-

350

1150

1950

2200

1800

300

32

28

24

20

20-22

Stock non consommé Prix moyen FOB

Source : atelier de vanille Sambava juin 2010 de la situation temporaire de surstock, les exportateurs malgaches vont tout faire pour retenir le marché local et acheter peu cher, dans le but de réaliser une marge intéressante à court terme. En effet, la prochaine entrée en campagne risquerait d’être baissière voire catastrophique pour les paysans vendeurs de vert et de situation qui prévaut dans la

De l’espoir « Malgré tout, il y a encore de l’espoir, la vanille de Sambava est réputée pour sa qualité et sa haute teneur en vanilline. Il faudra respecter la qualité et, pour cela, il faut suivre les règlements en vigueur, notamment la date d’ouverture de campagne et les conditionnements nécessaires avant de mettre les produits sur le marché », a annoncé Ita Jacques. Selon ses dires, il y a des personnes qui vendent de la vanille avant l’ouverture de campagne. Il ne faut pas s’étonner que

relle en 2011. Le fort probable déficit qui apparaîtra en 2011 risquerait de se prolonger. La baisse de capacité mondiale de production ne se redresse pas instantanément (alors que la demande mondiale croît à un rythme soutenu et devrait dépasser les 2500T par an dans les années à venir). La relance de la filière est donc primordiale.



Région | SAVA Bois de rose

Les opérateurs demandent un atelier La Région Sava compte deux parcs nationaux très riches en biodiversité. Le premier, le Parc national de Masoala, qui a été créé en 1997, s’étend sur une superficie de 235.000 ha. Il s’agit de la plus grande des aires protégés de Madagascar. Avec ses forêts tropicales humides, la zone abrite des arbres précieux dont le bois de rose, ainsi que différentes faunes endémiques de la Grande Ile dont les lémuriens. Le second est le Parc national de Marojejy, lequel abrite également des forêts denses et humides, ainsi que des faunes et flores endémiques de Madagascar. Les 2 parcs ont connu de fortes pressions depuis la crise de 2009. Le trafic de bois précieux, notamment le bois de rose, s’est intensifié au détriment de ces richesses extraordinaires de la Sava car c’est surtout dans cette région que se pratique le trafic de bois de rose si on fait abstraction de la Région Analanjirofo. Beaucoup d’argent et peu d’impacts pour la population Selon les études menées par Hery Randriamalala et Zhou Liu sur le trafic de bois de rose, la campagne 2009 de bois précieux à Madagascar représentait au minimum 52 000 tonnes de bois précieux abattus, venant de 100 000 arbres de bois de rose (Dalbergia spp.) et d’ébène (Diospyros spp.), avec une fourchette de 75 000 arbres au minimum et 150 000 au maximum. Plus de 60 000 de ces arbres sont situés dans les aires protégées, ce qui représente au minimum 4 000 hectares de parc et 10 000 hectares (8 000 minimum, 13 000 maximum) de forêt intacte non classée ayant fait l’objet de coupes sélectives. Le bois de rose provient de la région de Marojejy pour un tiers et de celle de Masoala pour les deux autres tiers. Environ 500 000 autres arbres (par ex. Dombeya spp.) ont également été abattus pour servir de bois de flottage aux rondins de bois précieux et des dizaines de milliers de lianes ont été coupées pour lier les radeaux. Par ailleurs, près de 36 700 tonnes ont été exportées dans 1 187 conteneurs, quasi-exclusivement à destination de la Chine (50 tonnes d’ébène vers l‘Allemagne), pour un prix de vente estimé à 220 millions de dollars américains. Ces exportations ont généré 20,5 millions

30

de dollars (41 milliards ariary, en prenant un taux moyen de 2 000 ariary pour un dollar) de recettes pour l’Etat malgache, lequel en est ainsi le premier bénéficiaire, mais talonné de près par le principal exportateur. La fraude pour l’ensemble de la filière est évaluée à 4,6 millions de dollars (9,2 milliards ariary), tandis que le montant des devises non rapatriées pourrait s’élever à 52 millions US$ (104 milliards ariary). Si cette activité a rapporté environ 1 300 US$ (2,6 millions ariary) à chaque intervenant local, le bénéfice moyen d’un exportateur atteint les 75% de son chiffre d’affaires. L’industrie illégale de bois de rose profite à un groupe de 23 individus, selon le N°5 de « Madagascar Conservation et Développement » (MCD) et l’Institut suisse Jane Goodall. Selon ce journal, les importateurs et fabricants de meubles chinois touchent 25 fois plus que l’ensemble des intervenants malgaches dans les exportations de bois de rose ; et 357 fois plus que les villageois riverains des forêts abattues. Depuis l’interdiction de coupe sur le territoire chinois en 1998, les importations de bois en provenance des pays tropicaux et tempérés ont été multipliées par 6. La Chine protège donc ses propres forêts en « exportant de la déforestation ». Actuellement, une équipe de scientifiques du Jardin botanique du Missouri a trouvé des dizaines de souches de bois de rose, des dépôts et des camps de bûcherons au cours de leur inventaire entre les rivières Ankavia et Ratsianarana, dans la partie orientale du Parc national de Masoala, selon le rapport de Wildmadagascar. Les chercheurs estiment à près de 10.000 les personnes qui travaillent dans le parc, abattent les arbres et chassent la faune, y compris les lémuriens. Les botanistes ont trouvé plusieurs pièges aux lémuriens, instruments qui sont de plus en plus vendus sur le marché. « En Chine, un lit en bois de rose de Madagascar vaut jusqu’à un million de dollars chacun ; mais moins de 0,1% des bénéfices sont versés à la population locale », a déclaré Alexander von Bismarck de l’EIE, dans un communiqué lors de la dernière conférence

EXPANSION MADAGASCAR - JANVIER / FEVRIER 2011 - N°7

internationale sur la biodiversité à Nagoya (Japon). Von Bismarck ajoute en outre que les enquêtes ont permis de savoir que les commerçants chinois ont souvent été conscients du fait que le bois qu’ils achetaient était illégal. Réglementation Les opérateurs en bois de rose dans la Sava n’ont pas nié que l’instabilité politique qui prévaut dans le pays a favorisé l’accroissement du trafic. « Cependant, nous tenons à souligner que nous avons des autorisations en bonne et due forme sur l’exploitation forestière, nous avons des papiers sur nos stocks de bois y compris les bois de rose », a annoncé Coco Rasamy, un opérateur en bois de rose dans la Région Sava. « Ce ne sont que quelques opérateurs qui ont empoché la grosse somme d’argent de 72 millions ariary à verser par container lors de la dérogation accordée par l’Etat sur l’exportation de bois de rose », rajoute cet opérateur. De ce fait, nombre de stocks se trouvent encore dans la Région Sava. Cet opérateur estime que ces stocks sont évalués à environ 20.000 tonnes. « La rétention de ces stocks susciterait que l’on veuille ou non avoir recours à la corruption. De hautes personnalités au sein de l’Etat nous proposent des prix bradés de ces bois alors qu’ils peuvent les vendre à des prix nettement plus élevés », a ajouté un autre opérateur sous couvert d’anonymat. « Ces personnes ont la possibilité d’expédier les marchandises, contrairement à nous. Mais vue la baisse du prix, nous avons préféré garder nos bois », poursuit cet opérateur. Selon ses dires, les pressions exercées par ces personnes sont trop fortes. Pour résoudre le problème, les opérateurs en bois de rose proposent la tenue d’un atelier sur le bois de rose. « Le Ministère de tutelle a promis de tenir cet atelier, lequel n’a pas encore vu le jour jusqu’à aujourd’hui », souligne Coco Rasamy. « Tous les acteurs concernés doivent participer à cet atelier, à commencer par les environnementalistes, les représentants de la population locale, l’administration et bien sûr les opérateurs », insiste cet opérateur, avant d’ajouter que les opérateurs en bois de rose sont prêts à restaurer l’environnement et à apporter leurs contributions

au développement des localités où ils travaillent. « L’exploitation de bois de rose pourrait beaucoup apporter au pays si nous savions la réglementer, comme en Guyane où les opérateurs et les industries de parfumeries plantent des bois de rose », a fait remarquer notre interlocuteur, ajoutant en outre que « le bois de rose est une ressource renouvelable, contrairement aux produits des mines. Certains projets miniers nécessitent la destruction et ensuite la restauration de forêts primaires. Pourquoi donc interdire l’exploitation de bois de rose. Avec les ressources que l’on peut tirer de ces richesses, la restauration n’est pas difficile », conclut Coco Rasamy. Transformation Si les opérateurs se battent pour la tenue d’un atelier sur le bois de rose, les artisans de la Sava, eux, transforment ces bois en articles de décoration et meubles. Parmi eux, M. Kofa, qui tient un petit atelier à Antalaha. « Nous gagnons des bénéfices à plus de 100% », déclare cet artisan. D’après lui, il n’arrive pas à suivre les commandes. « Nos clients se trouvent dans les 4 coins de l’Ile. Parmi eux, des nationaux, mais également des étrangers », annonce-t-il. Les prix des marchandises varient entre 3.000 et 70.000 Ar. la pièce, selon l’article. Kofa se charge d’envoyer les marchandises, les frais d’envoi étant à la charge de l’acheteur. Cet artisan emploie 4 personnes et possède une machine à bois. Cet artisan arrive à transformer 12m de bois de rose chaque jour. Le prix d’un mètre de bois brut est de 20.000 Ar. Selon ses dires, ce tarif a connu une hausse d’environ 10% depuis. « Ce qui nous différencie des autres artisans, c’est que nous misons sur la qualité. Le prix de nos produits est bien sûr un peu plus cher qu’ailleurs », confie-t-il. Kafo était un menuisier. « Je peux fabriquer des meubles en bois de rose, mais cela dépend des commandes », affirme-t-il. Selon ses dires, lors de notre rencontre, il venait de recevoir une commande de meuble. Après le tri des bois, Kofa passe ceux-ci à la machine, procède à l’assemblage, puis à la finition. Il lui faut environ 2 heures pour fabriquer une cafetière, par exemple.



Région | SAVA Agro-industrie

Soavoanio, en difficulté financière La plus grande société de la Sava, la Soavoanio, est actuellement en difficulté financière. En effet, le chiffre d’affaires de la société n’a cessé de se dégrader depuis 2008 alors que deux ans auparavant, elle était en train de se redresser après une longue période de déficit en 2003, 2004 et 2005. En 2007, la société a même enregistré un résultat financier positif de 258.576.000 Ar. « Les mauvaises conditions climatiques dont le passage des cyclones ont eu des impacts désastreux sur les plantations, conduisant ainsi à la mauvaise récolte », selon les explications des responsables sur place. D’après Claude Andréas, Président du Conseil d’administration de la société, l’insuffisance d’entretien ainsi que le vieillissement des plantations sont les causes principales de cette perte de vitesse. Quoi qu’il en soit, l’avenir des 5.000 personnes qui travaillent pour la société s’en trouve compromis. Lors de son dernier passage dans la région, le Président de la Haute Autorité de la Transition a promis de payer les arriérés de salaire des employés de cette société. Mais en attendant, suite à cette difficulté, les horaires de travail ont dû être réduits.

En vue d’un éventuel redressement, la société s’est lancée dans l’artisanat depuis 2006. Elle fabrique différents produits issus du recyclage du cocotier. Outre l’artisanat, ses principaux produits sont la noix de coco (nis de bouche, noix de second triage, noix de semence), le coprah, les plants de cocotier, le miel, ainsi que des cultures associées à la plantation de cocotiers comme le maïs, l’haricot, l’arachide et le riz. Auparavant, la société produisait également de l’huile ; mais depuis l’année 2009, la situation dans laquelle elle se trouve ne lui a plus permis d’exercer cette activité. Evolution de la production Année

Noix de coco (unité)

Traitement des noix récoltées Sur la quantité récoltée

Destination

40%

Noix de bouche

10%

Noix de 2nd triage

50%

Coprah/huile -5 à 6 noix pour 1kg de coprah -2kg de coprah pour avoir 1kg d’huile (taux d’extraction 54%)

Source : Soavoanio Origine de la Soavoanio La Soavoanio a vu le jour grâce au projet « Opération Cocotier Sambava » (OCS) financé par le Fonds européen de Développement (FED) dans le cadre Coprah (tonnes)

Huiles (tonnes)

1978

250000

12

-

1983

8500000

1.200

-

1988

24.000.000

3.700

13

1993

33.200.000

3.200

500

2000

27.400.000

3000

65

2004

16.000.000

1.300

130 57

2005

17.300.000

1200

2006

15.000.000

1250

5

2007

17.500.000

1225

3,5

2008

16.130.356

1112

8

2009

7171079

441

-

2010

5000.000

200

-

Source : Soavoanio

Etat financier Année

Chiffre d’affaires

résultats

En milliers d’Ariary

Chiffre d’affaires

résultats

En euros

2002

1.601.215

171910

630000

2003

1463116

-5399

57500

-2000

2004

183922

-58630

720000

-23000

2005

2581537

-111733

1106000

-44000

2006

268238

7922

1055000

31000

2007

3442646

258576

1354000

102000

2008

3582329

-10718

1362000

-4076

2009

1682094

-866615

640000

-330000

Source : Soavoanio

68000

du IIème FED, entre 1968 et 1978. La plantation dont disposait ce projet s’étalait dans 3 zones dont 159 ha pour la zone I, 1034 ha pour la zone II et 1031 ha pour la zone III. Les variétés de cocotiers plantés sont de type grand local. C’est toujours au cours de ce projet qu’un champ semencier/ jardin grainier a été aménagé pour pouvoir obtenir la variété hybride, plus performante. Ce champ semencier couvrait 32 ha. Après la IIIème FED, l’Union européenne a décidé de poursuivre le projet dans le cadre du IVème FED pour l’entretien des plantations déjà existantes et l’extension sur une zone IV, avec une nouvelle plantation de 1.240 ha de variété hybride, entre 1979 et 1986. Plantation actuelle Zones

Forte demande « Les produits de la société n’arrivent pas à suivre la demande notamment pour la noix de bouche », déclarent les responsables. D’après lui, les particuliers, dont les restaurants et les agro-industries d’Antsiranana, Mahajanga, Toamasina, Comores, Mayotte et La Réunion sont les principaux consommateurs des produits de la Soavoanio. Pour la noix de 2nd triage, la société exporte vers l’Ile Maurice, mais des demandes sont également enregistrées dans la Région SAVA même. Les huileries sont les principaux consommateurs de coprah, tandis que les industries de savonnerie-cosmétique et agroindustrielles, ainsi que les particuliers constituent la clientèle de la Soavoanio pour l’huile de coco. Pour la noix de semence, la société exporte vers Mayotte et La Réunion, mais en vend également sur le marché local. Plan de relance « Pour redresser la Soavoanio, il faut un programme de renouvellement soutenu des vieux cocotiers de type grand local par des variétés hybrides plus performantes », préconisent les responsables avant de poursuivre que la mise en place de mesures d’accompagnement à ce renouvellement par un programme de fertilisation et d’entretien adapté est également nécessaire. Selon ses dires, la société n’a jamais reçu de subvention de l’Etat, malgré le fait que celui-ci soit l’actionnaire majoritaire depuis sa création. « L’exploitation rationnelle du terrain par la mise en place de cultures intercalaires lors du renouvellement doit être de mise pour compenser le manque à gagner dû à l’abattage des vieux cocotiers. La Soavoanio entend également exploiter les sous-produits et rechercher d’autres débouchés ; mais la diversification de ses activités, comme la transformation des produits bruts en vue de la consommation directe, comme la crème de coco et le lait de coco, ainsi que la mise en place d’unités de transformation en produits finis des articles à base de coco, comme la savonnerie ou la raffinerie s’avèrent également nécessaires », déclarent les responsables. « Mais le plus important reste la recherche de partenariats, pour la réalisation de toute ces activités » concluent-ils.

Lieux de plantation

Superficie (ha)

Zone I

Bemanevika-ampasy-Ambatojoby

1509

Zone II

Lavatsisaraka-Antongompahitra

1034

Zone III

Antohomaro-Antanandronono

Jardin grainier

Mahatsara

Zone IV

Anjala-Andranojoby-Masorokely

Total

1031 32 1240 4.846



Région | SAVA « Soa Finiavana »

L’unique société de transformation de fruits et légumes de Sambava Bon nombre de produits de la SAVA partent sur le marché à l’état brut. Vu l’abondance des produits sur le marché en période de saison et la faiblesse du prix de vente, M. Théophile a décidé de procéder à la transformation de ses produits. Il a commencé par la transformation du manioc en farine, puis de l’arachide en beurre de cacahuète. « Dans le temps, je travaillais en brousse. La population environnante a dégusté mes produits et les a appréciés. Ensuite, j’ai commencé à vendre ceux-ci sur le marché. Actuellement, je me concentre sur la transformation des fruits et légumes et je suis le seul à le faire dans la Région SAVA », a déclaré Théophile. Ainsi, l’entreprise « Soa finiavana », une unité de transformation qui fabrique de la confiture, de la sauce de piment et gingembre, du beurre de cacahuète, a démarré ses activités en 2001 en utilisant des matériels très simples. L’entreprise emploie 2 personnes et entend devenir une entreprise très compétitive au niveau national. « Nous sommes actuellement à la recherche d’un atelier de fabrication avec mini-laboratoire. Pour cela, nous sommes en train de chercher le financement nécessaire », a annoncé le Directeur-gérant de cette entreprise artisanale.

La qualité comme cheval de bataille « Nous misons sur la qualité. Ainsi, nous faisons de notre mieux pour réduire le taux de sucre dans nos produits », a confié Théophile. A part cela, cette entreprise artisanale de transformation agroalimentaire a banni les produits chimiques de tout le processus de production. « Nos produits sont bio », se félicite le gérant de la « Soa finiavana ». Sur la fabrication de ses produits, Théophile a son petit secret qu’il n’a pas voulu divulguer. « Notre production varie en fonction de la demande ; cependant, en moyenne, nous écoulons à peu près 200 boîtes par semaine », ajoute Théophile qui fabrique toute une gamme de produits dont la confiture de litchi, d’ananas, de papaye, de mangue, de carambole, de tomate, de patate douce, de tamarin, de cerise, de prune, d’orange… ainsi que différentes sauces comme les sauces de piment, de gingembre, de piment au gingembre, ainsi que des fruits confits à base de citron, papaye, bilimbi, banane séchée… mais ce sont surtout les confitures de litchi et d’ananas qui séduisent le plus les consommateurs. Les produits sont présentés dans des boîtes en plastique de 300 et 600g. Selon les dires de Théophile, la trans-

formation lui a permis de conserver plus longtemps ses produits, mais également d’avoir de la valeur ajoutée, de l’ordre de 40 à 50%. Les produits de « Soa finiavana » sont du reste certifiés par le ministère de la Santé. Notons également que Théophile a déjà reçu des formations en norme et qualité, ainsi qu’en entreprenariat. Il a également pris les soins de déposer la marque « Soa Finiavana » auprès de l’Office malgache de la Propriété industrielle (OMAPI). Et, pour être totalement aux normes et dans un souci de rassurer la clientèle, les produits de la « Soa finiavana » présentent une date de péremption, indiquée sur l’étiquette d’emballage. « Après plusieurs expériences, nous avons fixé la date de péremption à 1 an et demi après celle de la fabrication », explique le dirigeant de la « Soa Finiavana ». Problème d’emballage Comme toute entreprise artisanale opérant dans la transformation des fruits et légumes, l’emballage est le principal obstacle au développement de l’activité de la « Soa Finiavana ». « Contrairement à ce qui se passe dans d’autres localités dans le pays, l’emballage aux normes n’est pas toujours disponible ici et on a du mal à trouver de l’emballage de bonne qualité. Nous sommes encore

contraints d’utiliser des emballages en plastique », déplore M. Théophile. Mis à part le problème de disponibilité et de qualité, le prix de l’emballage reste également exorbitant et représente 30% du coût de production. Or, « l’emballage tient un rôle important dans la présentation du produit », ajoute le dirigeant de la « Soa finiavana ». Sucre « A part l’emballage, le prix du sucre a également connu une hausse importante par rapport à l’année dernière. La disponibilité du sucre blanc sur le marché constitue parfois un blocage à la production », annonce Théophile. En revanche, la « Soa finiavana » n’a pas de problème sur la disponibilité des fruits, lesquels sont en abondance, toujours d’après Théophile. « Nous avons la chance de nous trouver sur une île où il y a autant de fruits qu’on en désire. Par rapport aux produits importés, les confitures et autres fruits et légumes transformés localement sont nettement meilleurs car ils sont constitués en majorité de fruits et légumes, contrairement aux produits importés, lesquels contiennent davantage d’eau et de sucre. De plus, nos produits sont également biologiques ; alors, j’incite les consommateurs à les apprécier », conclut Théophile.

AFH Export

Leader dans l’exportation des épices Si la plupart des sociétés spécialisées dans l’exportation d’épices se soucient peu de la provenance de ses produits, l’AFH Export, elle, a décidé de mettre en valeur et d’exporter les épices de la Sava et notamment la vanille, le café et le cacao. D’après Kaizar Djivadjy, Président Directeur général d’AFH Export, leurs principaux clients sont l’Europe et l’Asie, notamment Singapour. « Nous exportons annuellement environ 1.000 à 2.000 tonnes de café et 1.000 de vanille », déclare Kaizar Djivadjy. « Pour la vanille, chaque opérateur a son partenaire. La confiance est déjà établie entre les deux parties », ajoutet-il. La société emploie en permanence

34

200 personnes. Quant au personnel temporaire, son effectif varie en fonction du temps de campagne pour chaque produit. Détermination des prix des produits Concernant la fixation du prix d’un produit, le Président Directeur général d’AFH Export a souligné que celui-ci ne doit pas être fixé d’avance mais plutôt suivre la loi de l’offre et de la demande. Une fixation à l’avance du prix d’un produit pourrait donc avoir des impacts négatifs sur la filière. « Le rapatriement de devises doit également

EXPANSION MADAGASCAR - JANVIER / FEVRIER 2011 - N°7

s’effectuer en fonction du prix réel sur le marché », poursuit notre interlocuteur. D’après Kaizar Djivadjy, le prix du cacao a connu une baisse de 20% par rapport à l’année dernière. Le kilo s’achète actuellement à 5.000Ar. Contrairement à cela, le prix du café a connu une amélioration, passant de 2.000 à 2.500Ar le kilo. Investissement « Pour 2011, nous allons investir 1 million de dollars dans la construction de bâtiments en vue de la mise en œuvre de notre projet de création d’une usine

d’extraction d’huile de palme brute pour notre savonnerie », confie Kaizar Djivadjy. Notons que, outre l’exportation d’épices, AFH Export possède également une unité de production de plastique.



Tableau de Bord Economique TABLEAU DE BORD DE L’ECONOMIE | SECTEUR REEL

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EXPANSION MADAGASCAR - JANVIER / FEVRIER 2011 - N°7


TABLEAU DE BORD DE L’ECONOMIE | SECTEUR MONETAIRE


Les industries au quotidien

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EXPANSION MADAGASCAR - JANVIER / FEVRIER 2011 - N째7



VIE DU SIM

La vie du SIM Les Evénements du bimestre • Le SIM, présent à l’atelier sur les mesures correctives commerciales du 19 au 22 Octobre 2010 Le Secrétariat de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), en collaboration avec le Ministère du Commerce, a organisé du 19 au 22 Octobre 2010 à l’Espace Dera Antananarivo, un séminaire national sur l’état des négociations au niveau de l’OMC et les mesures correctives commerciales. Cet atelier a été animé par des experts au niveau national et des experts de l’OMC et a vu la participation de responsables issus du secteur public et du secteur privé dont le SIM. Le Directeur Exécutif, Monsieur Claude RATEFIARISOA, a présenté le 19 Octobre un exposé sur les problèmes rencontrés par les opérateurs économiques de Madagascar : barrières tarifaires et non tarifaires, concurrence déloyale, problèmes d’accès au financement, capacités en matière d’offre. Des cas concrets à l’appui ont été relatés par Monsieur MALAVERGNE de la SOMACOU. • Publireportage sur le SIM dans le cadre de l’émission « Les nouveaux défis : Internationalisation des entreprises réunionnaises » Des journalistes réunionnais de France Télévisions ont réalisé un publireportage sur le SIM le 11 Novembre dernier dans le cadre de l’émission « Les nouveaux défis : Spéciale Internationalisation des entreprises réunionnaises ». Deux industries membres : LECOFRUIT et LA CHOCOLATERIE ROBERT ont été filmées, en guise d’illustrations du publireportage. • Journée de l’Industrialisation de l’Afrique – JIA 2010, célébrée le 20 Novembre 2010 à Fianarantsoa « Industrie compétitive pour le développement de l’Afrique », tel a été le thème commun à tous les pays africains pour la célébration de la Journée de l’Industrialisation de l’Afrique du 20 Novembre 2010. Pour le cas de Madagascar, cette célébration s’est tenue à Fianarantsoa. Comme à l’accoutumée, le SIM a participé activement à la préparation et à la célébration de cette journée. Ont été au programme, des visites d’usines : Lazan’i Betsileo, INNOVEX et SIDEXAM et une conférence-débat sur le thème cité supra.

Les récentes actions menées • Le nouveau contrat d’approvisionnement en énergie électrique ayant fait l’objet d’échanges Une séance d’information et de mise au point sur l’application du nouveau contrat de fourniture d’énergie électrique en Moyenne et Haute Tensions a été organisée au siège du SIM le 20 Octobre dernier, laquelle a vu la participation des représentants des autres groupements professionnels en plus des membres du SIM. • Valeur minimale à déclarer en douane : A mettre en place pour les produits finis importés Au cours de sa rencontre avec le Directeur Général des Douanes pendant le courant du mois d’Octobre 2010, le Président du SIM a mis en relief la nécessité de mettre en place des valeurs de référence pour les produits finis importés suite aux cas concrets de déclarations à des prix anormalement bas constatés par les industries locales. Quelques propositions de produits ont été communiquées au Directeur Général des Douanes.

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EXPANSION MADAGASCAR - JANVIER / FEVRIER 2011 - N°7

• Avancement du projet CAPDEV-OI Le SIM en tant que facilitateur dans la mise en relation des partenaires Ayant signé un accord de partenariat avec l’Organisation Patronale des Comores –OPACO en Novembre 2008, le SIM a joué le rôle de facilitateur dans le cadre de la mise en relation de la CCIFM, coordinatrice du projet CAPDEVOI, avec celle-ci. A cet effet, le Directeur Exécutif du SIM a accompagné la CCIFM aux Comores les 01, 02 et 03 Octobre 2010 pour y présenter le projet CAPDEV, faire un état des lieux de la situation et se concerter sur la mise en œuvre de l’action. Le SIM, représenté à l’atelier sur la convention d’affaires et le compagnonnage industriel Deux représentants du SIM et de ses groupements membres ont participé à l’atelier du 08 Octobre 2010 conduit par Monsieur Thierry PELEAU, Directeur Général de l’Institut pour la Promotion des Activités de Développement – IPAD. Les thèmes traités au cours de cet atelier ont concerné les principes, les rôles et missions des organisations intermédiaires des îles de l’Océan Indien dans la conduite d’une convention d’affaires réussie, et dans la mise en œuvre d’un programme de compagnonnage industriel. Le SIM, participant aux premières sessions de formation organisées dans le cadre du projet CAPDEV-OI Des sessions de formation ouvertes à tout le personnel de toutes les Organisations Intermédiaires partenaires et non partenaires du projet CAPDEV-OI ont été organisées les 04 et 05 Novembre 2010, lesquelles ont porté sur les thèmes : « L’Information Economique » d’une part et la « Démarche Stratégique dans une Organisation Intermédiaire et le Rôle des Elus » d’autre part. Trois représentants du SIM y ont participé. Le SIM comme accompagnateur de ses membres Non seulement le comité de pilotage du SIM a sensibilisé les membres à présenter leurs projets de développement en vue de leur permettre de trouver des partenaires européens pouvant les aider à les réaliser, mais un accompagnement leur a été fourni dans le cadre du remplissage du formulaire de description de projet. Le comité de pilotage s’est réuni trois fois pour étudier les dossiers des membres porteurs de projets. Au total 18 dossiers ont été validés et sont actuellement en cours de miniaudits.

• Problèmes de concurrence déloyale, au centre des discussions avec le Président de la HAT Quelques administrateurs du SIM ont rencontré le Président de la Haute Autorité de la Transition le 26 Octobre 2010 à Ambohitsirohitra en vue de discuter des problèmes de concurrence déloyale touchant les industries locales. Suite à cette rencontre, une lettre a été adressée à ce dernier pour relater les


Journée de l’Industrialisation de l’Afrique Organisée conjointement par le Ministère de l’Economie et de l’Industrie, l’ONUDI, le Groupement des Entreprises Franches et partenaires et le Syndicat des Industries de Madagascar, La célébration de la journée de l’Industrialisation de l’Afrique s’est déroulée le 20 novembre 2010 à Fianarantsoa. Présidée par Monsieur Richard FIENENA, Ministre de l’Economie et de l’Industrie, les participants ont débuté la journée par des visites d’unités industrielles : - LAZAN’I BETSILEO, entreprise de production de vins, elle mise sur la qualité de ses produits pour faire face à la concurrence des produits importés qui inondent le marché, et entend à terme exporter sa production. - INNOVEX, entreprise spécialisée dans la production d’extraits, se lance actuellement dans la plantation de l’artémisia annua en vue de l’extraction de l’artémisine, principe actif des médicaments antipaludéens appelés à remplacer les dérivés de la quinine. - SIDEXAM, producteur de thé dont 80% sont destinés à l’exportation. Elle est victime des barrières non tarifaires de l’île Maurice qui devrait être son marché naturel étant la proximité et le régime de libre échange dans la COI et COMESA. L’après midi a été consacré à une conférence débats sur le thème de la journée « Industrie compétitive pour le Développement de l’Afrique » Nous vous livrons le discours de M. Laurent Rajaonarivelo, représentant le Président du SIM, à l’ouverture de la conférence : « Mesdames, Messieurs, Permettez moi tout d’abord de vous présenter les excuses de Monsieur Hery RANAIVOSOA, Président du Syndicat des Industries de Madagascar, qui a bien voulu être parmi nous mais a eu un empêchement en dernière minute. Monsieur Charles GIBLAIN, Président du Groupement des Entreprises Franches et Partenaires nous a fait parvenir également un message nous informant qu’il est encore retenu à l’étranger et regrette de ne pas être parmi nous à ce moment.

« Industrie compétitive pour le développement de l’Afrique », tel est le thème commun à tous les pays africains pour la célébration de la Journée de l’Industrialisation en Afrique pour cette année 2010, un thème qui renferme de nombreux défis afin de placer réellement l’Industrie en tant que moteur de la croissance économique, et en tant que secteur clé sur lequel repose l’intégration d’un pays en voie de développement comme Madagascar au commerce mondial, face au contexte de la globalisation. Parler de compétitivité n’est pas l’affaire d’une seule personne ou d’une entreprise. Elle nécessite la synergie d’un ensemble d’acteurs car plusieurs critères influent pour qu’une industrie soit compétitive : des lois et réglementations aux infrastructures, de la gestion à l’efficacité des ressources humaines, du coût à la qualité des facteurs de production etc.… Tout le monde doit être conscient qu’il a une part de responsabilité si nous voulons que nos unités de production soient compétitives. C’est dans ce sens, que le SIM a publié le magazine EXPANSION MADAGASCAR depuis 2009, afin que chacun prenne conscience du problématique du secteur industriel, des opportunités d’investissement que regorgent nos différentes régions, et agir en conséquence en ce qui le concerne. Le choix de la Haute Matsiatra pour célébrer la journée de l’Industrialisation n’est pas fortuit. Il vient du constat publié dans notre magazine, parution n° 5, qui relate que l’industrie existe bel et bien dans la Haute Matsiatra mais ceux qui ont fait la renommée de la région il y a 50 ans ont disparu (vous les connaissez tous), mais d’autres par la suite naissent. Dans une même branche d’activités du secteur industriel, certains connaissent un essor, d’autres vivotent et une partie a disparu (cas du vin). Des activités qui devraient logiquement se développer au fur et à mesure de la croissance des besoins, s’amenuisent au contraire de jour en jour. Quelle est la solution pour que l’industrie malgache soit compétitive et joue pleinement son rôle dans le développement de la nation ? Cette compétitivité ne peut se concrétiser qu’à travers la mise en place d’un cadre favorable à la dynamisation de l’Industrie malgache, d’où

différentes formes de concurrence déloyale dont sont victimes les industries malgaches, rappeler les propositions de mesures opportunes qui permettront non seulement d’y remédier, mais également de redresser et dynamiser la filière industrielle à Madagascar. • Loi de Finances 2011 : Aucun alourdissement fiscal supplémentaire ne sera toléré Les industriels étant déjà handicapés par un régime fiscal lourd, le SIM a porté à la connaissance du Président de la Haute Autorité de la Transition qu’il est impossible pour eux de faire face à d’éventuelles augmentations de charges fiscales dans le cadre de la Loi de finances 2011. Qui plus est, les propositions du SIM pour cette loi de finances ont été déjà transmises au Ministre des Finances et du Budget • Résultats de l’analyse conjoncturelle : Situation des industries membres du SIM 83% des industries membres du SIM ayant répondu à l’enquête de conjonc-

l’élaboration par le SIM en 2007 du Manifeste : « Les Facteurs Clés de Succès pour une Stratégie de Développement Industriel à Madagascar » lesquels intègrent l’implication effective des instances administratives et des Partenaires Techniques et Financiers au développement pour appuyer le secteur industriel à jouer pleinement le rôle stratégique qui lui est dévolu ; et pour se relever de la crise que nous subissons actuellement, le SIM a proposé en Avril 2009 un plan de relance du secteur industriel qui a été discuté à plusieurs reprises avec ces mêmes instances. Parler de compétitivité suppose qu’il y a concurrence qui, avec la mondialisation, se situe entre la production nationale et les produits importés. Il est certain que devant cette situation, la synergie, le dynamisme commun des acteurs nationaux que j’ai évoqués plus haut sont les clés de réussite pour sortir vainqueur de cette compétition. Mais, le SIM a toujours insisté pour que cette concurrence soit loyale et saine et à ce titre nous avons proposé : - la mise en place de procédures claires et précises applicables à l’ensemble des intervenants ; - l’application effective des normes et règlementations en vigueur ; - la prise de mesures incitatives à l’investissement qui sont déjà appliqués dans les pays concurrents pour que la compétition soit à armes égales - l’application d’une politique volontaire et courageuse. - Avoir une vision à moyen et long terme avec l’établissement d’une feuille de route sur les cinq années à venir Pour terminer, sans vouloir parler de protection aveugle des industries locales, même si certains grands pays l’applique, j’estime qu’il est de notre devoir à tous de préserver notre outil de production source de richesses pour le pays, et pour ce faire, un partenariat public-privé fort, franc et réaliste s’avère obligatoire car comme dit l’adage malgache, « izay tsy mahay sobika mahay fatam-bary » pour assurer un développement réel de l’industrie malgache. Je vous remercie de votre attention »

ture réalisée en Septembre 2010 affirment que leurs ventes au second trimestre 2010 ne se sont pas améliorées par rapport au premier trimestre. Ces résultats ainsi que ceux des enquêtes précédentes démontrent que les ventes réalisées par les industries n’ont cessé de régresser au fur et à mesure que la durée de la crise se prolonge. Ce qui rejoint l’avis de la majorité des industriels (80% des réponses recueillies) selon lequel les méfaits de l’environnement défavorable au niveau des activités industrielles se sont intensifiés par rapport à 2009. Environnement défavorable qui se manifeste entre autres par la concurrence déloyale des produits importés, les ventes sans factures, la forte présence des produits dans le secteur informel pénalisant les ventes, la corruption accrue à tous les niveaux de l’administration, l’insécurité grandissante. Ce qui témoigne que beaucoup d’actions restent à prendre dans le cadre de l’amélioration du climat des affaires, à commencer par la sécurisation des biens et des personnes.

N°7 - JANVIER / FEVRIER 2011 - EXPANSION MADAGASCAR

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CHRONIQUE DES LECTEURS

POINT PACOM, «TOUT POUR CONSTRUIRE » POINT PACOM est le distributeur agréé des grandes marques de la place, pour le ciment, (Holcim, Lafarge), la peinture (Somalaval, Aurlac), la plomberie (Coprax) notamment. Le choix de ses partenaires est clair : la qualité, la fiabilité et la robustesse des produits. La gestion des stocks fait la différence et la force de POINT PACOM SA ; la recherche permanente du meilleur rapport qualité-prix est une obsession, presque une deuxième nature. Aux particuliers comme aux professionnels, POINT PACOM SA propose une gamme complète de produits, d’outils, d’accessoires avec une garantie et l’assurance d’un service après-vente efficace. POINT PACOM SA se tient à la disposition de ses clients, les conseille sur les produits et leur utilisation, et les accompagne jusque dans leurs projets. Sa notoriété et sa réussite, POINT PACOM SA la doit au dynamisme et à la ferme volonté de ses dirigeants de participer au développement économique du pays, ayant bien compris le lien entre leur destin personnel et celui du pays. Cette entreprise familiale a commencé avec la Quincaillerie de la Cité Perrier, fondée par Paul Randriamifidimanana, grand-père de l’actuel Administrateur Général, Laza Randriamifidimanana. Après 19 ans de gouvernance, Ntsoa Randriamifidimanana passe le flambeau en 2010 à son fils, Laza, qui préside le groupe avec la même ferveur que son père. Sanda Solofoson Randriamifidimanana, la cadette, prend en charge la gestion du patrimoine. La relève se met en marche, la passation s’effectue au rythme du temps bien mesuré ; les valeurs du travail, se transmettront assurément.

POINT PACOM SA comprend deux branches : POINT PACOM spécialisé dans la vente de matériaux de construction, de produits de gros œuvres et Pro IMMO Construction, la branche construction, le prolongement logique après la distribution. Pro Immo Construction, « PIC » plus simplement, la branche spécialisée dans la construction et la promotion immobilière, résulte d’une volonté du groupe de diversifier son activité. Entreprise à dimension humaine, PIC est convaincu qu’en privilégiant la proximité, en choyant ses clients, en misant sur son savoir-faire, son sérieux, elle s’inscrit en tant qu’acteur et partenaire de leurs projets. Toujours à l’écoute de ses clients, elle sait identifier leurs besoins, et essaie d’y répondre jusqu’à satisfaction. PIC compte plusieurs réalisations, dont celles de villas pour les cadres d’ Ambatovy, dans le projet Sherritt, sur la côte Est. Pour vos études, vos constructions de toute dimension, vos aménagements, vos rénovations, vous pouvez confier vos projets à l’équipe de Pro Immo Construction, habituée à travailler dans les normes strictes comme sur le projet Ambatovy.

A bientôt, au plaisir de vous rencontrer.

Année après année, POINT PACOM confirme sa position parmi les leaders dans la distribution et compte à ce jour cinq points de vente, un sixième est en construction.

POINT PACOM Antaninandro : 22 339 24 POINT PACOM Ambodiraotra : 22 246 05 POINT PACOM Ankorondrano : 22 628 65 / 22 649 17 POINT PACOM Andranomena / PIC : 22 440 70 / 22 488 56 BDB Imerinafovoany : 034 02 187 72

Nouvelle brasserie de Madagascar (NBM) | Inaugurée le 19 novembre dernier à Ambatolampy Après avoir obtenu toutes les autorisations nécessaires pour son démarrage, la Nouvelle brasserie de Madagascar a été inauguré le 19 novembre dernier à Ambatolampy, là où est située l’unité de brasserie. Celle-ci produit la marque Skol qui veut dire « à votre santé » en danois. Skol est une marque internationale et elle est la 3ème bière la plus bue dans le monde. Après moult difficultés dans l’obtention de certaines autorisations, la NBM fonctionne désormais et constitue la 2ème brasserie à Madagascar. Doté d’un investissement de 18 millions d’euros, cette unité qui emploie 120 personnes, prévoit de produire 8 500 000 bouteilles de bière par an. L’actionnariat de la NBM se répartit entre Phoenix beverages Ltd de l’île Maurice pour 40%, Unibra de Belgique pour 40% et Proparco, la filiale de l’Agence française de développement (AFD) pour 20%.

Manjifa ny vita gasy aho, tombony ho an’ny rehetra ! MIVIDY MALAGASY AHO SATRIA : • Fantatro ny mpamokatra. • Manara-penitra ny kalitao. • Ampahafantarina ahy ny tokony ho fampiasana ny vokatra. • Mora vidy kokoa.

1bis, Rue Patrice Lumumba Tsaralalàna Antananarivo-MADAGASCAR tel : (+261) 20 22 240 07 / 034 07 240 07 fax : (+261) 20 22 225 18 email : syndusmad@moov.mg site web : www.sim.mg

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ARY INDRINDRA : • Miaro ny asa fiveloman’ireo mpiara-belona. • Manampy amin’ny fampitomboana ny harinkarempirenena. • Manohana ny fampiasam-bola hamokarana eto Madagasikara.

Mividy ny vita gasy aho, tombony ho antsika rehetra !

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