VERS UNE FRAGMENTATION DU LOGEMENT La fonction a laissé place à la sensation
Albane Vassault
Vers une fragmentation du Logement
Promoteur de mémoire : Pierre Blondel Mémorant : Albane Vassault Année académique de défense : 2019-2020
Faculté d’architecture la Cambre-Horta
Je tiens à remercier chaleureusement monsieur Pierre Blondel, pour m’avoir permis d’aboutir ce travail et m’avoir guidée en toute confiance. Maman, pour m’avoir soutenue, toujours admirée, aidée, et pour la relecture de ce travail. Papa, pour ton sarcasme honnête, pour m’avoir donné l’envie de bâtir et de m’avoir toujours soutenue. Anne, pour m’avoir permis de m’ouvrir sur le monde et m’avoir donné envie d’aller toujours plus loin.
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LA TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION
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LES PRINCIPES GÉNÉRAUX Phénoménolo...quoi ?
16 16
FRAGMENT PREMIER : LE FORMEL
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DES PROCESSUS DE COMPOSITION : écrits de références Concentrique, Centralisée
Symétriques Périphérique Intégré Organique Tramé Radiale Linéaire
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24 26 28 30 32 34 36 38
COMPTER JUSQU’A DOUZE : un projet commenté Le logement dans tous ces états
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LAISSER LA FONCTION DISPARAITRE : un jeu mathématique La fonction occupe 75% du logement La fonction occupe 50% du logement
68 72 74 76
FRAGMENT SECOND : LE SENSATIONNEL
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L ’ESSENS DES SENS : un projet commenté
79 82 86 90 94
La fonction occupe 25% du logement
La vue Le toucher L’ouie L’odorat
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LA TABLE DES MATIÈRES
REPENTI La colère L’orgueil L’avarice La paresse La luxure La gourmandise L’envie Les 7 péchés spatialisés AMBIANCES ET SENSATIONS Le plein Le vide Mère nature reprends ses droits (par le végétal) Les humeurs Ne pas déranger (L’intimité) Pas plus de 4 personnes à la fois s’il vous plait (par le nombre de pers) Une vie linéairement ordonnée (par ordre d’utilisation)
98 100 103 107 108 112 115 116 118
PLACE AU(X) RÊVE(S)... Le rêve de Pieter et Yann : le temps d’une nuit Le rêve de Caliopée, Nuss et Lu : perdre son temps Le rêve de Gabriel : prendre son envol Le rêve de Gus, Iris et Lou : en roue libre Le rêve de Felicien : à la lisère du bois Le rêve de Simon et ses douze enfants : l’espace ludique Le rêve de Christian : vertigineux
142 146 148 150 152 154 156 158
120 122 126 128 130 134 136 138
160
CONCLUSION
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BIBLIOGRAPHIE
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INTRODUCTION
Extrait de quelque chose.1 Définition : le Larousse
1
Partie plus ou moins importante de quelque chose, par opposition au tout.2 Définition : le Larousse Action de diviser par compartiment.3 Définition : Goldschmidt Bertrand
Aujourd’hui, dans notre société occidentale, la manière de compartimenter un logement se fait la plupart du temps en suivant la fonction : la chambre ou l’on dort, la salle de bain où l’on se lave, la cuisine où l’on prépare le repas. Cette répartition fonctionnelle n’a pas toujours été le cas. Elle a pu être symbolique, sacrée, genrée, contextuelle (l’avant et l’arrière). Le logement a parfois aussi été considéré comme une succession de pièces (pièces en enfilades). Aujourd’hui encore c’est le cas dans certaines sociétés, notamment au Maghreb où certains espaces abritent plusieurs usages. D’autre part, certains logements se sont progressivement défragmentés avec l’abandon du cloisonnement intérieur débouchant à un logement composé d’une seule pièce dans laquelle toutes les fonctions pourrait avoir lieu.
10
CORMIER, Monique. Les Dictionnaires Larousse. Montréal : Presses de l’université de Montréal, 2005 2
ibidem
3 GOLDSCHMIDT, Bertrand. L’aventure Atomique. Le monde diplomatique, n°192, octobre 1962
Le loft en est l’exemple type. (Malgré cela on observe que dans de pareils espaces, les habitants ont recloisonné l’intérieur pour recompartimenter l’espace. Une désillusion pour l’espace libre du loft). À travers une approche fragmentée, ce travail tente de façon expérimentale de requestionner l’habitat. Comment le logement se fragmente-t-il et se façonne t-il, lui donnant alors la possibilité d’accueillir de nouveaux espaces : des espaces sensibles ? Notre méthode de réflexion et de conception se détachera d’un mode de penser et de faire du projet traditionnel. Le théorique se mêlera à l’onirique, il faudra alors s’ouvrir et accepter la logique emmêlée qui guide la réflexion du début à la fin. L’iconographie occupera une place importante dans ce cheminement, elle appuie, crée, souligne, ouvre et nourrit les propos énoncés. À travers ce voyage fragmenté, le lecteur devra se perdre et laisser de côté la part rationnelle qui se trouve en lui. Les dessins non référencés sont réalisés par l’auteur.
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Plusieurs fragments. Plusieurs histoires. Plusieurs univers. Compartimentation, division, fractionnement, lambeau, morcellement, segmentation, miette, comminution, débris, éclat, tesson, extrait.
La fragmentation apparaît ici comme un outil de travail, un outil de recherche conceptuel qui va permettre le développement de projets en adoptant un mécanisme basé sur la compartimentation des espaces internes dans un logement. S’organisant autour d’une trentaine de projets fragmentés, cette recherche tente de s’appuyer sur des phénomènes théoriques réels et vérifiés pour ensuite glisser vers des théories non-conventionnelles frôlant l’irréel. Les chapitres se construisent les uns par rapport aux autres, en essayant de se nourrir continuellement des principes énoncés antérieurement, semblables à un système de poupées russes où l’une ne peut se constituer sans sa précédente. Le travail se développe suivant deux étapes, deux fragments, la première développe une méthode de composition basé sur les principes formels. Elle se
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4 CHING, Francis. Architecture, form space & order. New York : J. Wiley, 2007
compartimente par la forme, elle est mathématique, structuraliste, presque systématique. La deuxième développe une approche par le sensible et l’émotionnel. Les espaces fonctionnels s’éteignent peu à peu pour laisser place à de nouveaux lieux, non basés sur la fonction. Le fragment premier s’articule alors dans un premier temps autour d’un inventaire des principes de composition formels énoncés dans le livre de Francis D.K. Ching, Architecture, form, space et order. 4 Le chemin se poursuit en se prêtant au jeu d’une série d’exercices de projet. Par le dessin en plan uniquement, en prenant comme base de réflexion un logement entre mitoyen de 8m x 12m, deux façades, cinq fenêtres, une porte. On suppose une distribution par coursive. Ce plan type sera décliné et fragmenté tout au long des exercices, se plaçant comme une limite nécessaire à l’élaboration de ce travail. La représentation se fera uniquement en plan dans ce travail, mais soyons conscients qu’un tel exercice pourrait prendre place également en coupe. Le premier exercice se prête au jeu d’un fractionnement graduel partant d’un espace unique qui se
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compartimente au fur et à mesure en douze espaces. Ensuite une étude mathématique, prenant en compte le pourcentage d’espaces fonctionnels dans le logement, joue à le réduire au plus infime possible. Par espaces fonctionnels il faut comprendre : espaces répondants aux besoins primaires, aux besoins du corps. Le fragment second s’appuie sur ces théories formelles pour envisager des domaines basés sur les sensations, les ressentis et les ambiances. Cette deuxième partie se nourrit également des principes élémentaires de Francis D.K. Ching pour créer des espaces que l’on qualifiera au long du travail de sensibles, ou sensationnels (ne vous méprenez pas, le mot « sensationnel » désigne ici un espace relatif à la sensation et non quelque chose d’époustouflant). La recherche de ces émotions passe par quatre exercices de recherche par le projet interrogeant plusieurs thématiques distinctes. La première est l’étude des sens qui s’inspire du livre de Marc Crunelle 5, «L’architecture et nos sens», lequel constitue une base théorique nourrissant alors la réflexion afin d’en tirer un univers, une spatialité
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5 CRUNELLE, Marc. L’architecture et nos sens. Bruxelles : s.n, 1995
composée par les sens. La suivante dresse une scène des vices de l’homme où les sept péchés capitaux prennent leur légitimité et se spatialisent afin de créer des espaces accueillant au mieux ces déviances. Puis, découlant du thème de ces sens et péchés, mais également des principes formels, une thématique sur les ambiances et sensations vient se prêter au jeu de l’exercice de projet en proposant des situations de fragmentation curieuses et créatives. Enfin, une immersion iconographique dans l’univers du songe, du rêve, complétera ce travail qui tente de se détacher de l’habitat traditionnel tel qu’on le connait aujourd’hui. A travers ce parcours, le mémoire tente avant toute chose de se détacher voir de se libérer de l’approche traditionnelle de conception du logement.
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PRINCIPES GÉNÉRAUX
«La perception n’est pas une science du monde, ce n’est même pas un acte, une prise de position délibérée, elle est le fond sur lequel tous les actes se détachent et elle est présupposée par eux » Merleau-Ponty
Phénoménolo...quoi ? Étude des sens et de la perception, la phénoménologie est une approche philosophique découlant de l’utilisation du vécu. Elle se construit en se calquant sur le monde existant, celui que nous connaissons et qui nous entoure. Edmond Husserl, philosophe du XXe siècle et fondateur de la théorie, explique qu’il s’agit d’une approche descriptive et en aucun cas d’une analyse ou d’une explication. Cela vient du grec phainomenon, qui signifie «ce qui apparait» et logos qui désigne l’étude. 5 Elle aime être qualifiée de science exacte, comme le dit Merleau Ponty 6 en précisant qu’elle est en réalité un compte rendu de l’espace. Compte rendu du vécu et du vivant, elle est la relation entre l’homme et ce dans quoi il évolue, la façon dont il utilise l’espace de façon intuitive.
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5
CRUNELLE, Marc. ibidem
6 MERLEAU-PONTY, Maurice. Phénoménologie de la perception. Paris : Gallimard, 1945
L’homme a d’ailleurs pendant longtemps construit lui-même son habitat, le rendant ainsi optimisé, adapté, sur mesure, car basé sur son utilisation de l’espace. Inconsciemment, nos ancêtres construisaient alors suivant une composition basée sur la phénoménologie. 7 BERNARD, Nicolas. J’habite donc je suis : pour un nouveau rapport au logement. Charleroi : Labor, 2005
8
YANKEL, Fijalkow. Sociologie du logement. Paris : Éditions La Découverte, 2016
Malgré cela, l’homme est depuis toujours également régit par son habitat, subissant ainsi une stigmatisation. 7 En effet, il s’est vu être associé à cet endroit, lequel va définir son niveau social, devenant une sorte de justification, de valeur relative à l’individu : les rois dans de vastes châteaux forts, les plus pauvres dans des fermes aux toits de chaume. Plus tard s’y substituent les villas modernistes aux jardins luxueux contrastant avec les barres d’immeubles de logement sociaux. L’habitat apparait comme identité. Cependant, si l’on en revient à l’origine de la conception, l’habitat ne s’est pas fait en fonction de la classe sociale, il représentait un toit, un abri, pour se protéger du monde extérieur. 8 A l’origine un seul espace, puis petit à petit l’habitation s’est complexifié, l’espace unique s’est divisé
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en deux ou trois espaces. L’approche moderne laisse penser à une fragmentation fonctionnelle de cet espace : une pièce de nuit, une pièce de vie diurne. Mais souvent nous observons que la division interne vient placer au sein du foyer un espace éloigné de la fonction, par exemple un espace sacré, mystique, voué au culte. La fragmentation des espaces peut également être genrée, comme par exemple à l’heure où les sexes ne se mélangeaient pas entre eux : le boudoir des dames, le bureau des hommes, le salon de réception. À l’heure du modernisme on rejette ces espaces en surplus, lesquels ne répondent pas aux besoins vitaux de l’homme : besoin de manger, de dormir, besoin de se laver. Avec le mouvement moderne l’habitat se rationalise. Les normes, règles et coûts régissent plus que jamais les constructions. Le structuralisme, dans un souci d’optimisation des coûts devient le principal générateur de la forme des constructions. Dans son livre, Monique Eleb 9 soulève une question intéressante en relation avec cette manière de construire qui influence la façon de vivre des habitants ; la forme de l’habitat autrefois définie par ses
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9
ELEB, Monique. Le logement contemporain : entre confort, désir et normes. Bruxelles : Mardaga, 2013
fonctions internes ne laisse que peu ou pas de place aux sensations, au mystique, au sacré. « Les plans des architectes ne correspondent-ils pas, encore aujourd’hui, le plus souvent à l’état de la société telle qu’elle était il y a trente ou cinquante ans ?» Monique Eleb Aujourd’hui, nous pouvons nous poser la question d’une architecture dans laquelle la fonction ne serait plus génératrice de la forme. 10
MESMIN, Georges. L’enfant, l’architecture et l’espace. Tournai : Casterman, 1971
Georges Mesmin qualifie l’époque dans laquelle nous vivons aujourd’hui d’époque technicienne qui est selon lui génératrice d’espaces qui « déroutent et traumatisent ». 10
«La possession de l’espace par l’homme ferait alors partie intégrante de l’apprentissage du bonheur» Georges Mesmin
En ce sens, l’architecte prend alors le rôle d’un éducateur chargé d’amener une nouvelle dimension à l’architecture, stigmatisant moins la façon dont nous vivons. En ce sens, comment l’architecture du logement pourrait-elle aussi accueillir d’autres lieux : de rêverie, d’ennui, de cultes ou de jeux ? Aujourd’hui, en juillet 2020, après trois mois
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« Le problème n’est pas d’inventer l’espace, encore moins de le ré-inventer (...) mais de l’interroger, ou, plus simplement encore, de le lire » Georges Perec
Coupe dans la maison des Barbapapa, fiction pour enfant TISON, Annette. La maison de Barbapapa. Paris : dragon d’or, 2003
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de confinement nous venons de vivre une expérience où notre logement devenait notre lieu de ‘tout’, ce qui rend cette question encore plus pertinente. Après avoir passé trois mois seul ou en famille, à travailler, peindre, être maître d’école, ou même faire du bricolage, manger, dormir, se laver, cuisiner. On a été amené à se requestionner sur notre lieu de vie, qui est entrain de devenir bien plus qu’une simple habitation. Ce travail s’est construit à cheval sur cette période, participant ainsi à nourrir le propos. Le terme de maison signifie en réalité bien plus qu’un toit. Dans la Grèce Antique, oikos signifiant «la maison», celle-ci représente le foyer en tant que tel et la vie qu’il abrite. Il s’agira alors de créer un lieu adapté, qui ne soit plus uniquement murs et plafonds, mais générateur de vie, ne répondant plus uniquement aux besoins primaires humains mais également à l’essence de la vie ; au(x) rêve(s). Il s’agit alors de se demander comment concevoir un logement «sur-mesure» sans pour autant en altérer sa flexibilité.
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Première page PEREC, Georges. Espèces d’espaces. Paris : Galilé, 2017
FRAGMENT PREMIER : LE FORMEL
« L’élément d’architecture appartient avant tout au domaine de la représentation mentale : c’est un objet cognitif, un objet pour penser et concevoir un projet d’architecture, ou pour décrire une réalisation construite » Jean-Pierre Goulette
11
GOULETTE, JeanPierre. Sémantique de l’espace. Intelletica n°29 , Fevier, 1999
12 LURÇAT, André. Formes. Composition et lois d’harmonie. Éléments d’une science de l’hestétique architecturale. Paris : Vincent Fréal et cie, 1955, p18
La forme, qu’elle soit intuitive, géométrique, rationnelle, plus ou moins complexe, n’est en apparence qu’un trait épais sur un dessin, une esquisse, qui, perçu par le quidam ne représenterait pas plus qu’un gribouillis sur une feuille de papier. Mais pour un architecte, une forme est l’ouverture du champ des possibles, elle est la phase préliminaire à la spatialisation. 11 Une composition formelle fait référence bien souvent à une composition intuitive qui ne se base pas sur son contexte et ne prend pas en compte les caractéristiques historiques. Elle est en réalité uniquement génératrice d’espaces. Les éléments ne sont aucunement indépendants, puisque chacun de leur mouvement aura un impact sur ceux qui l’entourent. Pour André Lurçat, composer est avant tout un acte de recherche d’une harmonie, le tout doit être homogène. 12 La forme ne vient donc jamais seule, elle doit être comprise dans un ensemble architectural, mais encore faut-il connaître les parties qui la constituent.
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DES PROCESSUS DE COMPOSITION Nous passerons rapidement sur une série de méthodes de composition analysés par l’ouvrage de Francis CHING afin de les utiliser dans nos fragmentations ultérieures. Les illustrations sont tirés du livre de Francis CHING à l’exception du plan de la solo house de KGVDS. Concentrique, Centralisé Un espace dans un espace contenant un espace qui contient un espace contenu dans un espace.
Les figures sont indépendantes les unes des autres tout en s’appliquant à une organisation où elles se regroupent, se relient, comme un aimant en un seul point, qui est le centre du dessin. Elles gravitent autour d’un noyau commun. Il apparait alors comme le cœur, générateur de l’espace qui s’articule autour de lui. 13
13 CHING, Francis. Architecture, form space & order. New York : J. Wiley, 2007, p208
« A centralized organisation is a stable, concentrated composition that consists of a number of secondary spaces grouped around a large, dominant, central space » Francis D.K. Ching
La composition centralisée désigne une continuité spatiale entre les pièces qui s’emboîtent les unes dans les autres, devenant alors une à une l’espace tampon de la suivante. Aucune n’est la principale, toutes sont secondaires, elles se démarquent par leurs tailles particulières, elles deviennent l’enveloppe des unes et des autres en créant un jeux de spatialité et d’intimité. L’organisation spatiale centralisée se veut stable et mono directionnelle. Divers systèmes peuvent être observés ; radial, loop, spiral.
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SchÊma d’une organisation concentrique
Greenhouse House, Salisburg, Connecticut, 1973-1975, John M. Johansen
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Symétrique
« La symétrie est définie comme la similitude de parties opposées par E. Viollet-Le-Duc » A. Brack Miroitement parfait du plan architectural.
Les espaces peuvent alors être organisés suivant les principes de symétries, ils se trouvent alors de même forme et de même taille. La symétrie peut s’opérer autour d’un ou plusieurs axes. Extra-mathématique, la symétrie compose selon un ou plusieurs axes.14 Principe longtemps vu comme synonyme de l’harmonie, même si cette dernière parle plus de proportion et de dimensionnement, elle relie la symétrie comme principe de composition. Longtemps vu comme un idéal, la symétrie a été au cœur des quêtes de composition spatiale des architectes classiques comme Palladio. Rapport de parité, rapport d’égalité, la symétrie compose et oppose, elle génère l’espace et le divise en le répétant. Elle ne s’oppose pas aux principes de modularités et de flexibilités. 15 Quand les formes et les tailles peuvent également varier selon leur importance et s’éloigner alors du principe de symétrie, apparaissant alors comme une réponse sur mesure à une situation donnée.
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14 BRACK, André, COPPENS, Yves, GREEN, André, MINOT, Gilles. La symétrie aujourd’hui. Paris : Seuil, 1989
15
SZAMBIEN, Werner. Symétrie, goût, caractère : théorie et terminologie de l’architecture classique. Paris : Picard, 1986
schémas d’une organisation symétrique
Villa Capra, Vicenza, Italy, 1552-1567, Andrea Palladio
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Périphérique Un seuil, une limite, une ceinture.
Processus de composition agissant avec l’enveloppe du bâtiment, avec sa périphérie. L’enveloppe apparait dans la composition architecturale comme un élément qui referme ; un lien avec l’extérieur qui est synonyme d’une certaine forme de protection, laquelle ne se spatialise pas. Elle ne trouve que difficilement sa légitimité en architecture. Imaginons que l’enveloppe s’épaississe, devenant un espace à part entière, elle pourrait alors abriter toute une série de zones qui ne joueraient plus seulement le rôle de filtre avec l’extérieur, mais deviendraient un espace fragmenté, accueillant des espaces lumineux prenant vie. Une composition périphérique induit inévitablement l’établissement d’un espace centrale. Cet espace sera le négatif de la forme de la périphérie, et dépendra donc de cette dernière. Il apparait comme espace clos et protégé de part son positionnement central et entouré d’un espace seuil tout autour de lui.
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Solo house, Matarranya, Spain, 2017, KGVDS
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Intégré
« A large space can envelop and contain a smaller space within its volume » Francis D.K. Ching
Des objets en gravitation.
Des objets se disposent librement dans le plan, leurs formes viennent influencer directement leur environnement spatial et deviennent des fragments interdépendants ; si l’un devient plus gros, l’autre deviendra plus petit, et vice versa. 16 Leur relation charnelle trouve son équilibre dans la diversité des orientations qui leurs sont conférées, ils prennent alors leur caractère, leur identité, leur particularité. Créant une nouvelle dynamique, l’espace intégré s’émancipe de son hôte qu’il condamne à devenir un espace résiduel. Malgré cela, la forme enveloppante peut également apporter une certaine diversité, cette dernière peut s’orienter différemment de l’espace enveloppé créant ainsi une grille secondaire et une dynamique nouvelle. Le plan objet, comme le nommeraient les practiciens, désigne des objets autour desquels on peut tourner, créant des dilatations et compressions de l’espace.
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16 CHING, Francis. Architecture, form space & order. New York : J. Wiley, 2007, p198
schéma d’une organisation intégré
Glass house, New Canaan, Connecticut, 1949, Philip Johnoson
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Organique
« Organic architecture works with metamorphosis (the process of grow and change) and the notion of ‘design from within’, whereby each design starts from seed concept and grows outward, changing in form » David Pearson
La nature comme ligne directive du dessin.
Elle évoque une architecture qui se crée avec son environnement, par son environnement, comme son environnement. Ce qui l’entoure la définit, elle grandira avec. Elle n’est pas une simple imitation de formes non géométriques et de gestes informels et intuitifs. 17 Elle ne se calque pas sur la forme du feuillage ou du tronc d’arbre qui ne serait alors qu’une pâle imitation et ne rejoindrait en rien les principes fondamentaux de l’organicité.
17 PEARSON, David. New organic architecture. Berkeley : University of California press, 2001
« In order to create for life, we must create as nature does, organically and not geometrically » Hugo Haring
Malgré cela, elle génère des formes engendrant des espaces, une forme en créant une autre, son extérieur définira une sensation tandis que la partie interne de celle ci en provoquera une autre. 18
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18
MAZZOLENI, Ilaria. Architecture follows nature, biomimetic principes for innovative design. Boca Raton : CRC press, 2013
Plan de la Casa Mila, Barcelone, 1912, Antonio Gaudi
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Tramé « A grid organization consists of forms and spaces whose positions in space and relationships with one another are regulated by a three-dimensional grid pattern or field. » Francis D.K. Ching Une grille générée par un ensemble.
Elle contient généralement des lignes perpendiculaires et parallèles. Elles établissent un motif régulier de points à leur intersection. Ce quadrillage peut s’étendre en trois dimensions, créant ainsi un ensemble d’unité d’espaces modulables. Son pouvoir résulte de la régularité et de la continuité de son motif, qui imprégnera les éléments qu’elle organise. C’est donc un champ dit stable de points et de lignes de référence partageant une relation commune. Elle se matérialise en architecture par un système structurel de colonnes et de poutres. La grille offre alors des possibilités de flexibilité, les espaces qui peuvent être vus comme des formes indépendantes peuvent alors se soustraire, s’ajouter, ou se répéter tout en conservant les propriétés intrinsèques du système. Des glissements, interruptions, disloquements, ou rotations viennent enrichir la grille.19
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CHING, Francis. Architecture, form space & order. New York : J. Wiley, 2007, p242
Schémas d’une organisation tramée
Snyderman House, Fort Wayne, Indiana, 1972, Michaerl Graves
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Radial « A central space from which linear organizations of space extend in a radial manner » Francis D.K. Ching Composition arborescente du plan.
L’extension de manière radiale part du centre et évolue vers ses extrémités, créant une dynamique de composition spatiale qui va du cœur vers l’extérieur. L’organisation se fait de manière linéaire, elle s’oppose à la composition centralisée qui se veut introvertie. 20 On fait face ici à un système extraverti qui s’efforce de trouver du lien avec le contexte qui l’entoure. «Radiale» désigne un mouvement dynamique qui suggère une rotation autour de l’espace central. Celui-ci génère des axes irréguliers offrant une diversité de réponses spatiales dépendantes de la fonction et du contexte. La forme architecturale qui en découle se détache de l’élément de circulation commun qui devient dans ce cas un espace à part entière où la vie prend le dessus sur le simple passage. Ce procédé s’applique à l’intérieur comme à l’extérieur et vient créer des poches, des sous espaces plus ou moins intimes au sein du bâtiment et de son jardin.
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20
CHING, Francis. ibidem, p228
SchÊma d’une organisation radiale
Kaufmann Desert house, Palm Springs, California, 1946, Richard Neutra
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Linéaire « A linear sequence of repetitive spaces » Francis D.K. Ching Séquence, répétition, série.
Les espaces peuvent être reliés les uns aux autres ou totalement indépendants. Ils communiquent entre eux ou sont hermétiques. Une communication visuelle, auditive ou sensorielle peut s’établir. L’organisation linéaire ne répond qu’aux principes fondamentaux de l’expression d’une direction et signifie le mouvement, l’extension, la croissance. Afin d’en limiter la croissance, un espace ou une forme dominante peut venir se placer à son extrémité, il peut s’agir d’une entrée élaborée ou articulée ou d’une fusion avec une autre forme du bâtiment. 21 Ce type d’organisation spatiale laisse place à une entière flexibilité s’adaptant sans le moindre problème à la fonction qu’elle occupe. Linéaire ne s’oppose pas au segmenté, au courbe età la diagonale. Il est d’avantage l’indicateur d’un mouvement qui vient montrer un rythme à caractère régulier.
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21
CHING, Francis. ibidem, p218
Schéma d’une organisation linéaire
Marcus House, Dallas Texas, 1935 Frank Lloyd Wright
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COMPTER JUSQU’A DOUZE Un projet commenté
Appartement entre mitoyens. Dimension de huit mètres sur douze. Surface de quatre-vingt seize mètres carré. Deux façades, cinq fenêtres, une porte d’entrée.
Ce premier exercice se prête au jeu de se compartimenter graduellement, de l’espace unique à l’appartement douze espaces. Le processus est de comprendre comment cette fragmentation qui se veut formelle vient en réalité révéler les qualités et défauts d’un système d’appartement urbain. « L’espace de notre vie n’est ni continu, ni infini, ni homogène, ni isotrope. Mais sait-on précisément où il se brise, où il se courbe, où il se déconnecte et où il se rassemble ? » Georges Perec L’espace vient alors se fractionner, subissant ou profitant de nouveaux cloisonnements à chaque étape du procédé mis en œuvre. La hiérarchie des pièces telle qu’on l’expérimente aujourd’hui est bousculée, tiraillée. Dans toute habitation on trouve un nombre variable de pièces correspondant chacune à 22 PEREC, Georges. une série d’actions précises.22 Espèces d’espaces. Comment, chaque fragmentation supplémentaire Paris : Galilé, 2017, p58 impacte la composition interne et l’utilisation de chaque espace ? Comment, de cette fragmentation, peut-on voir de nouveaux espaces se créer ?
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L’espace unique
Deux espaces
Trois espaces
Quatre espaces
Cinq espaces
Six espaces
Sept espaces
Huit espaces
Neuf espaces
Dix espaces
Onze espaces
Douze espaces
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1200
800
figure 1 AccrochĂŠe
figure 2 Libre Plans type d’appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : 1 espace
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L’ESPACE UNIQUE
22 LUCAN, Jaques. Composition, non-composition, architecture et théories, XIXe-XXe siècles. Lausanne : Presses polytechniques et universitaires romandes, 2010, p21
L’espace unique, 96m2. Où entrer, dormir, manger, se reposer, lire, se laver, préparer un repas, recevoir, rêver, prier, faire de la musique, aller aux toilettes se fait dans un seul et même espace. Est-ce un studio ? un loft ? une yourte moderne ? Il s’agirait d’un espace dans lequel la notion de composition s’est soustraite pour ne devenir qu’une seule entité. Jaques Lucan qualifie la notion de composition, ou plus particulièrement le terme composer d’être en réalité un tout qui serait formé par l’assemble de plusieurs parties.22 Il n’y a pas de hiérarchie notable, seul le mobilier peut faire office de module pouvant recréer des sous-espaces intimisés. (figure 1) Malgré cela, les éléments peuvent se composer en périphérie mais peuvent également être composés de façon intégré, les objets semblent alors flotter dans l’espace, ils se détachent du contour, on peut circuler autour d’eux. (figure 2) Un espace unique dans lequel on peut tout faire mais où l’on risque de ne rien y faire. Une seule pièce où la lumière vient pénétrer parfaitement, mais où aucune atmosphère n’invite, ni ne crée une ambiance chaleureuse. Les parties diurnes et nocturnes se mêlent et s’emmêlent, cet environnement non qualifié n’est pas architecturé, il est un vide. Sans mobilier on s’apercevrait à peine qu’il s’agit d’un appartement.
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figure 1 jour / nuit hierarchisé
figure 2 jour / nuit sans hierarchie
« Lorsque, dans une chambre donnée, on change la place du lit, peut-on dire que l’on change de chambre, ou bien quoi ? » Georges Perec
Plans type d’appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : 2 espaces
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DEUX ESPACES
Deux espaces, 96m2.
La nuit se distingue du jour, elle prend sa place et revendique son intimité.
Deux espaces, deux ambiances, deux moments. Les espaces ne sont pas encore définis, ils flottent dans l’immensité de cet appartement sans trouver comment ni ou se placer. La question réside dans le dimensionnement et ses conséquences sur l’utilisation de ces deux espaces Une fragmentation répondant aux standards de la société moderniste : un espace nocturne, un espace diurne, l’espace nocturne étant plus petit que l’espace diurne car il ne servirait qu’a y dormir. L’espace est hiérarchisé, ordonné. La pièce de vie, diurne longtemps considéré comme l’espace où l’on passerai le plus de temps, présente des dimensions plus grande que la partie dite nocturne. (figure 1) Une fragmentation où les deux espaces ont la même surface des pièces en enfilades : trouve-t-on un espace nocturne, un espace diurne ? un espace de réception et un espace solitaire ? Ces deux entités égales libèrent l’utilisation de l’habitant, on entre alors dans un système flexible, ou les actions peuvent s’interchanger. Cet espace se distingue du premier en rejetant la hiérarchie. (figure 2)
45
On peut imaginer également une fragmentation de l’espace en séparant la zone humide de la zone sèche, on aurait alors d’un coté les lieux de cuisine et d’hygiène, et de l’autre les espaces de réception, de sommeil et de détente. (figure 3) Le deuxième espace doit-il être nécessairement divisé en deux entités servant une fonction ? Mais pourquoi pas, comme dans les yourtes d’Asie central ce deuxième espace ne pourrait-il pas être réservé a un espace sacré, mystique ? On a affaire alors à un déplacement de la part du fonctionnel dans le logement qui se réunit dans un seul et même espace. La fragmentation fait apparaître alors cet espace spirituel, cet espace sacré au sein du logement. (figure 4) Si l’on compose l’espace en s’appuyant sur les principes de composition évoqué dans le premier chapitre, on pourrait imaginer une organisation de ces deux espaces qui comprendrait un espace central et un espace périphérique, l’espace au centre profite alors uniquement d’un second jour, mais nous pouvons considérer que la partie nuit ne nécessite pas de lumière directe si elle est équipée d’un système de ventilation efficace. Un espace de vie périphérique, autour duquel on peut courir et ou les relations visuelles offrent un jeu pour l’habitant. (figure 5)
46
figure 3 sec / humide
figure 4 sacrĂŠ
Plans type d’appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : 2 espaces
47
figure 5 composĂŠ
figure 1 fragmenté
figure 2 composé Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : 3 espaces
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TROIS ESPACES
Trois espaces, 96m2.
Entrer, cuisiner, manger, recevoir. Se réunir, parler, se reposer, lire, rêvasser. Dormir, se laver, s’habiller, se réveiller.
Trois pièces en enfilade, l’appartement se fragmente et accueille maintenant une pièce qui sépare l’espace où l’on mange, rempli d’odeurs, d’un espace plus molletonné, d’une mesure suffisamment grande pour accueillir une piste de danse ou un grand salon de réception. Il sert d’espace tampon entre l’entrée et la partie nuit, qui se veut être la partie la plus intime du logement. On a alors un cheminement vers une plus grande privacité. Les espaces de taille équivalentes offrent alors également une notion de flexibilité, et d’interchangeabilité, un espace peut en devenir un autre et vice versa, les actions qui s’y effectuent ne sont jamais figées. (figure 1) Composé de façon symétrique l’appartement accueille la cuisine et ses odeurs qui deviennent une entrée s’articulant autour de la chambre, royaume de la nuit, et le salon l’enveloppant de ses bras doux. Au centre l’espace est intime, protégé et préservé. (figure 2)
49
Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : 4 espaces
50
QUATRE ESPACES
Quatre espaces, 96m2 :
L’apparition de la salle de bains.
23
NEUFERT, Ernest. Les éléments de constitruction, 5e edition. Paris : Dunod, 1969, p187
La salle de bains est un espace où l’homme peut effectuer quotidiennement ses besoins liés à l’hygiène corporelle. Ernest Neufert indique qu’une salle de bains devrait avoir une superficie comprise entre 2,5m2 et 5,2m2. 23 L’évacuation des tuyaux d’une salle de bains est optimisée dès lors que tous les équipements sanitaires se situent sur un seul et même mur. Ce n’est alors pas un espace que l’on habite compte tenu de ses dimensions, c’est un espace que l’on utilise traditionnellement, on n’y reste pas, les mouvements doivent être efficaces. Sa proportion est alors moindre comparé à d’autres espaces. La salle d’eau doit être alimentée de tuyaux d’arrivé d’eau ainsi que de tuyaux d’évacuation. Une arrivée d’air ou système de ventilation est nécessaire à cet espace humide. Tout comme dans les exemples précédents, la circulation se fait de pièces en pièces, chaque espace conditionne le suivant. Comment un espace peut-il conserver sa qualité tout en servant d’autres pièces ? Comment ne pas tomber dans le cliché de la pièce couloir qui finalement n’attraye plus, ne protège plus, ne vit plus.
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« Vivre, c’est passer d’un espace à un autre, en essayant le plus possible de ne pas se cogner » Georges Perec
Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : 5 espace
52
CINQ ESPACES
Cinq espaces, 96m2. 25
Le passage, http://www.wikipedia.org
Bienvenue à l’élément de distribution !
Le couloir, la galerie, le déambulatoire, le promenoir, l’allée, la coursive, mais aussi : l’arcade praticable, le crypte couloir, la galerie vomitoire, le souterrain, la galerie technique, le passage spatio-temporel, la rue.25 La liste n’est pas exhaustive, il y en aurait autant de déclinaison qu’il y aurait de manière d’utiliser cet élément. Arpenter, marcher, courir, entrer, se perdre, marcher vite, se cogner, apercevoir, déambuler, tourner en rond, faire les quatre cent pas, crier, omettre, se croiser, traverser, ranger, s’ennuyer, parler, penser.
« Le couloir est un passage long et étroit de communication entre pièces qui commande l’entrée à plusieurs pièces.» Definition : wikipedia
Ce cinquième espace, un élément distributif, simplement utilitaire, un élément que l’on ne voit pas, que l’on qualifie à peine. Malgré cela c’est un élément central, souvent une artère principale du bâtiment. Il influe sur le dimensionnement des espaces, l’intimité et la hiérarchie de ces espaces. Agissant également en qualité d’espace tampon, d’espace neutre.
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figure 1
figure 2 Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : 6 espaces
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SIX ESPACES
Six espaces, 96m2.
La salle à manger prend son indépendance.
Une salle
26
Définition stan-
dard de la cuisine: http://WWW.linternaute.fr
pour manger. Elle désigne la pièce dans tout édifice où l’on prend de façon régulière des repas en commun. Elle se compose d’une grande table et de chaises, souvent un lustre pour éclairer la tablée et le repas qui y sera servi. Elle communique la plupart du temps directement avec la cuisine, lieu où les repas sont confectionnés. 26 Lieu de haute convivialité, elle rassemble les idées du monde, comme l’assemblée de la maison, là où l’oncle Charles entame un monologue politique, où Chantal essaie de servir la dinde sans tacher sa robe, où grand-père, en bout de table, râle sur tout le monde. Les enfants adorent et détestent cette pièce, mère nourricière remplissant leurs estomacs avides, ennui mortel lors de ces interminables repas de familles. Mais c’est une pièce ou l’on se retrouve pour travailler, car sa grande table s’y prêtera parfaitement et donnera tout le confort nécessaire pour s’étaler. On pourra s’y retrouver pour coudre, lire, dessiner, peindre, rire, se cacher, stocker, sculpter. L’utilisation de la trame dans une composition pour ces six espaces amène une grande flexibilité, les percés ponctuelles des parois définissent cependant des ambiances variés. (figure 2)
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Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : 7 espaces
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SEPT ESPACES
Sept Espaces, 96m2.
Place aux enfants.
Un septième espace se distingue, celui de la chambre d’enfant. Pièce agrémentée généralement d’un lit une place, ou lit d’enfant aux dimensions plus restreintes adapté à la taille du petit humain (70cm x 180cm), d’une table de chevet, avec un tiroir dans lequel il pourra y mettre ses petits objets les plus secrets, d’une armoire, d’un bureau et peut être agrémenté de décorations et rangements annexes tel que des coffres à jouets. le salon se réduit, la salle de bains s’adapte, elle accueille maintenant une double vasque, ainsi qu’une baignoire. Les espaces trouvent une proportion plus raisonnable. Tous les espaces présents jusqu’à maintenant sont définis comme fonctionnels, répondant à un besoin.
27
PEREC, Georges. Espèces d’espaces. Paris : Galilé, 2017, p57
Une entrée pour déposer ses affaires, ranger les chaussures, se débarrasser. Un salon pour recevoir, se détendre, lire, discuter. Une cuisine pour préparer un repas. Une salle à manger pour déguster le repas. Une salle de bains pour se laver, répondre aux besoins relatifs à l’hygiène corporelle. Une chambre de parents, pour le sommeil des parents. Une chambre d’enfant, pour le sommeil de l’enfant. 27
57
Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : 8 espaces
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HUIT ESPACES
Huit espaces, 96m2. 28
Le salon de musique, http://www. wikipedia.org
29 Le salon de musique, http : // www.patrimoine-histoire.fr
Un espace sonore. Un espace musical.
Le huitième Espace. Un espace en plus, ne correspondant plus à une fonction primaire de l’habitat. Courant au XIXe siècles, il représentait dans les demeures bourgeoises, des salons recevant des personnages importants tel des artistes, des musiciens. 28 Ce genre d’espace était alors réservé à la noblesse, à ceux qui habitaient dans de vastes demeures. Un salon, un piano, un salon de musique. Espace où l’on joue d’un instrument, écoute, rêvasse, imagine, travaille, persévère, comprend, entend, espace de partage, de joie, de convivialité. Le salon de musique, espace sonore, espace insonorisé. 29 Il est important de prendre en compte la nuisance de l’ajout d’un tel espace au sein d’un appartement partagé par des occupants ne vacant pas tous à la même occupation au même moment. L’espace doit ainsi contenir des parois acoustiques adaptées qui capturent le son et atténuent les vibrations et donc la propagation du bruit. En tant qu’extension du salon, il oblige la salle de bains à se faufiler entre les deux chambres, intimisant ainsi l’arrière de l’appartement.
59
Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : 9 espaces
60
NEUF ESPACES
Neuf espaces, 96m2.
Qu’est ce qu’un espace inutile ?
30
« (...) une pièce inutile, absolument et délibérément inutile. Ça n’aurait pas été un débarras, ça n’aurait pas été une chambre supplémentaire, ni un couloir, ni un cagibi, ni un recoin. Ç’aurait été un espace sans fonction. Ça n’aurait servi à rien, ça n’aurait renvoyé à rien. » Georges Perec 30
PEREC, Georges. Espèces d’espaces. Paris : Galilé, 2017, p66
Dans notre monde moderne, il n’y a pas de place pour rêver, pour se perdre dans ses pensées, pour ne penser a rien, pour s’ennuyer. Regarder le plafond, regarder les murs, regarder ses mains. Ne penser à rien. Le salon se scinde, il n’est à présent composé que de deux fauteuils et d’une petite table ronde. La salle à manger est devenue le cœur, espace par excellence de réception et de rassemblement (cf p 47). Le salon de musique s’est ouvert sur une pièce secrète, une pièce sans nom. Confortable, chaleureuse, molletonnée, chaude, douce, enveloppante, intime, neutre, ennuyante. L’espace suit une composition tramée en s’autorisant des libertés, le plan sort de la trame permettant des espaces d’entre deux, des espaces de seuils.
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Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : 10 espaces
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DIX ESPACES
Dix espaces, 96m2.
Enfin, la salle de jeux.
Un espace, un lieu de rêveries. Une salle aménagée de balançoires, toboggans, filets, murs d’escalades, tapis moelleux, échelles. On y joue, rigole, grimpe, saute, réfléchit, court, se distrait, s’apaise, se réunit, s’exclame, crie, se chamaille. Elle se veut attenante à la chambre des enfants, supposant qu’elle s’offre comme une extension de leur propre chambre. Alors les adultes n’ont-ils pas le droit d’y mettre les pieds ? Est-elle entièrement réservée à ces petits humains ? « L’apprentissage de la possession de l’espace fait partie de l’apprentissage du bonheur » Goerges Mesmim 31
MESMIN, Georges. L’enfant, l’architecture et l’espace. Tournai : Casterman, 1971,
La chambre d’enfant accueille alors deux enfants. Cette extension permet d’avoir une chambre commune en ayant deux espaces distincts. Lorsque l’un dort encore, l’autre peut jouer sans le déranger. 31 Comme un espace tampon, il privatise la chambre qui ne donne pas alors directement sur l’espace distributif de l’appartement. Le salon a pris place de l’autre coté de l’appartement, profitant de plus d’espace, l’espace de musique est réduit au minimum requis pour accueillir le piano.
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Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : 11 espaces
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ONZE ESPACES
Onze espaces, 96m2.
Place à la littérature.
Le salon se scinde, se spécialise, un espace pour recevoir, sonore, agité, convivial. Un espace pour lire et méditer, silencieux, calme, solitaire. Le salon de lecture apparait dans les maisons particulières comme le lieu de rassemblement de toute forme de collections d’œuvres, peinture, sculpture, dessins, livres, journaux, brochures. Elles sont individuelles ou communautaires, offrant un accès à la culture et à la littérature. Les espaces se temporisent, se rétractent, se modulent, se compactent, créant de nouveaux lieux. La chambre des parents se réduit pour accueillir ce nouveau lieu calme. L’espace de lecture est à la chambre des parents ce que l’espace de jeux est à la chambre des enfants ; un seuil, un espace de transition. Les espaces centraux profitent d’un second jour.
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Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : 12 espaces
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DOUZE ESPACES
« J’irais dormir à Denfert, j’écrirais place Voltaire, j’écouterais de la musique place Clichy, je ferai l’amour à la Poterne des Peupliers, je mangerais sur la Tombe-Issoire, je lirais près du parc Monceau » Geogres Perec
Douze espaces, 96m2. La limite 32
PEREC, Georges. Espèces d’espaces. Paris : Galilé, 2017, p66
Les espaces se fragmentent, se spécialisent, on atteint alors le point culminant, la charnière où l’on passerait d’un espace viable et utilisable à un placard à balais. 32 Un espace pour entrer, un espace pour cuisiner, un espace pour jouer de la musique, un espace pour prier, un espace pour manger, un espace pour discuter, un espace pour rêver, un espace pour jouer, un espace pour lire, un espace pour dormir, un espace pour se laver. Entités d’ambiances variées, le tout n’est composé que de parties.
« Un rien à l’égard du tout, et un tout à l’égard de l’univers » Blaise Pascale 33 BERNARD, Nicolas. J’habite donc je suis : pour un nouveau rapport au logement. Charleroi : Labor, 1971
L’habitat définit une identité, il se définit à travers l’homme, et l’homme se définit à travers lui en retour. 33 Ils sont interdépendants. Mais peut-on dire que chaque logement ressemble à son habitant ?
67
LAISSER LA FONCTION DISPARAITRE un jeux mathématique « Ce qui m’apparaît, en tout cas, c’est que dans la partition modèle des appartements d’aujourd’hui, le fonctionnel fonctionne selon une procédure univoque, séquentielle, et nycthémérale : les activités quotidiennes correspondent à des tranches horaires, et à chaque tranches horaires correspond une des pièces de l’appartement. » Partons du principe que nous occupons aujourd’hui des logements où 100% du logement est fonctionnel, par fonctionnel comprenons un espace qui répond à une fonction précise, à un besoin quotidien. Que se passerait-il si nos logements évoluaient, si la part de fonctionnel diminuait petit à petit : si de 100% de fonctionnel on passerait petit à petit à 75%, puis, 50% jusqu’à 25% ? La réduction des espaces fonctionnels permet une croissance de la dimension des espaces dit non-fonctionnels, des espaces sensationnels qui viennent alors articuler le logement jusqu’à en devenir les éléments fédérateurs de la composition de l’espace. On considère ici un appartement type contenant une entrée, un salon, une cuisine, une salle à manger, une salle de bains, un cabinet de toilettes, ainsi que deux chambres. Que se passe t-il alors lorsque la part de non fonctionnel dépasse la part de fonctionnel ? Ou se constitue la limite de ce système ? Lorsque la part de fonctionnel ne représente plus que 25% de l’espace total de l’appartement, peut-on encore créer des espaces viables ?
68
Georges Perec
75 %75 % 75 % 75 %75 % 75 % 75 % 75 %75 %
50 %50 %50 % 50 %50 % 50 % 50 % 50 % 50 %
75 %75 % 75 % 75 %75 % 75 % 75 % 75 %75 %
les espaces fonctionels occupent 75 % du logement
les espaces fonctionels occupent 50 % du logement
50 %50 %50 % 50 %50 % 50 % 50 % 50 % 50 %
75 %75 % 75 % 75 %75 % 75 % 75 % 75 %75 %
50 %50 %50 % 50 %50 % 50 % 50 % 50 % 50 %
les espaces fonctionels occupent 25 % du logement
25 %25 %25 %
69
25 %25 %25 %
25 %25 %25 %
70
pages 60-61
71
PEREC, Georges. Espèces d’espaces. Paris : Galilé, 2017, p60-p61
LA FONCTION OCCUPE 75 % DU LOGEMENT
Logement 96m2 Fonctionnel : 67m2, 75 % Non fonctionnel : 29m2, 25%
Les espaces sensationnels prennent (leur) place repoussant les espaces fonctionnels vers des dimensions plus restreintes, ils se faufilent et créent trois espaces, trois moments, trois ambiances. Ensemble ils créent une barrière, un filtre qui privatise l’espace nuit, se retrouvant alors à l’abri de l’agitation et du bruit de la ville. (figure 1) Deux d’entre eux servent de passages d’un bout à l’autre de l’habitation. Le dernier est devenu une continuité de la salle destinée à se laver, elle est une pièce agrémentée d’une baignoire géante. (figure 2) Laure, Guillaume et Lucette vivent tous les trois de façon assez distinctes, Laure a besoin de beaucoup bouger elle ne tient pas en place, alors que Guillaume est un amoureux du calme et de la nature. Lucette apprécie une baignade après une longue journée de travail. Les espaces, spécialisés viennent agrémenter leur lieu de vie, ces espaces ne sont pas secondaires, ils deviennent les lieux de vie de l’habitation, répondant aux attentes et aux envies de chaque habitant.
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figure 0 : TÊtris de pièces fonctionnelles
75 % 75 %75 %
figure 1 : le non fonctionnel prends sa place
75 % 75 %75 %
Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2
73
figure 2 : les deux se lient
75 % 75 %75 %
LA FONCTION OCCUPE 50 % DU LOGEMENT
Logement 96m2 Fonctionnel : 48m2, 50 % Non fonctionnel : 48m2, 50%
Les espaces sensationnels s’agrandissent, on observe que les espaces répondant à des besoins voient leur dimension se réduire. Dans cette hypothèse les parts de fonctionnels et de non-fonctionnels est équivalente. L’espace se compose, les pièces non fonctionnelles viennent opérer une séparation entre l’espace nuit et l’espace jour. (figure 1) Martine et Julien sont passionnés de danse et de littérature, leur fille Emilie joue du piano. Leur logement se compose au gré de leurs passions, créant des espaces qualifiées et personnalisés. L’entrée est un long couloir qui est en réalité une bibliothèque dans laquelle on peut déambuler, cette dernière donne sur un espace jonché de poufs, les matériaux sont doux, moelleux, on pourrait rester dans cette pièce pendant des heures à lire. La bibliothèque permet d’accéder aux chambres qui deviennent simplement des lieux où l’on dort, la salle de bains se veut efficace. Les espaces de musique et de danse se connectent et peuvent se désolidariser. L’espace de cuisine se regroupe avec l’espace de salle à manger. (figure 2) Les espaces perdus n’existent pas, tous sont spécialisés.
74
75 %75 % 75 %
figure 0 : Tetris de pièces fonctionnelles
50 %50 % 50 %
75 %75 % 75 %
figure 1 : le non fonctionnel prends sa place
50 %50 % 50 %
Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2
75
75 %75 % 75 %
figure 2 : les deux se lient
50 %50 % 50 %
LA FONCTION OCCUPE 25 % DU LOGEMENT
Logement 96m2 Fonctionnel : 24m2, 25 % Non fonctionnel : 72m2, 25%
Quand la sensation dépasse la fonction. Les espaces tels qu’on les connait aujourd’hui sont réduis à minima, peut-être même plus viables, comment fait on le tour du lit ? Comment accéder à la douche ? (figure 0) On fait face à la limite du système mais il est intéressant de le scénariser. (figure 1) Emile et Lucie partagent leur espace avec Paul, le frère de Lucie. Emile est écrivain. Paul et Lucie travaillent à l’extérieur. La famille est très pieuse et prie tous les jours de façon assidue. Leur logement s’adapte à leur mode de vie, l’entrée est très fermée pour créer une vraie séparation avec la ville, elle dispose d’un grand placard afin d’y déposer les chaussures. L’entrée débouche sur le bureau de Emile, entouré de livres, éclairé d’une lumière artificielle spéciale afin de ne pas abîmer ses ouvrages précieux. L’espace central devient sacré, aucune cloison ne le touche, créant ainsi une circularité praticable autour de cet élément. Des percés sont opérés afin d’y laisser entrevoir l’occupation de la pièce sans en altérer son intimité. Cœur de l’appartement ce lieu sacré est comme un noyau autour duquel les autres espaces viennent s’articuler. (figure 2)
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75 %75 % 75 %
50 %50 %50 %
figure 0 : Tetris de pièces fonctionnelles
25 %25 %25 %
75 %75 % 75 %
50 %50 %50 %
figure 1 : le non fonctionnel prends sa place
25 %25 %25 %
Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2
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75 %75 % 75 %
50 %50 %50 %
figure 2 : les deux se lient
25 %25 %25 %
78
FRAGMENT SECOND : LE SENSATIONNEL
« Form ever follows function » Louis H. Sullivan
34
SULLIVAN, Louis H. The tall office building artistically considered. Lippincott’s magazine, n°57, Mars 1896
35 GUILLOËT, Christophe. La sensation fonctionnelle de l’architecture. Esthétique et compléxité. sous la dir de Kapoula, Lestocart et Allouche. juillet 2014
La fonction est aujourd’hui pensée comme systématique, comme un dogme, un concept « La forme suit la fonction » 34, comme le rappelait Louis H. Sullivan, le fonctionnel régissant ainsi la poésie du bâtiment. On estime que l’esthétique est moindre face à une sensation fonctionnelle, on doit répondre aux besoins du corps, à l’usage et à la construction du bâtiment. L’espace fonctionnel se place dans l’espace, l’architecte porte la responsabilité de la bonne utilisation et compréhension de cet espace. Le beau. Christophe Guilloët opère une stratégie de rejet du «beau», théorie que les esthètes auraient utilisé dans le champ de l’ontologie. 35 Où l’étude des perceptions et des sensations est à mettre en avant. Les émotions que l’architecture déclenche, que la forme provoque. Des formes géométriques pures qui se rencontrent, formant alors un lieu commun.
« Jeux savants, corrects et magnifiques des volumes assemblés sous la lumière » Le Corbusier L’architecture est certes à l’origine une forme, une
Dessin, Pablo Picasso, numéro 130, 1935
79
sculpture, une géométrie, mais elle transporte, vibre, vie, fait ressentir. Elle est une véritable présence, et est difficilement décrite par des mots. Les sens sont des choses que l’on ressent, le vocabulaire est pauvre en ce qui concerne la description des émotions, des couleurs, des sensations de chaleurs, de fraicheur, des odeurs, et de la vision. 36 Tout ces éléments, ses sensations influencent et façonnent les endroits où nous habitons aujourd’hui.
36 HOLL, Steven, PALLASMAA, Juhani, PÉREZ-GÓMEZ, Alberto. Questions of perception, phenomenology of architecture. San Francisco: William Stout Publishers, 2006
« L’espace domestique est une projection de l’être » André Frédéric Hoyaux
L’espace domestique comme le décrit André Frédéric Hoyaux est un espace personnel, dans lequel l’homme vivra beaucoup de moments de sa vie. Ainsi, l’espace qui l’entoure est son cocon, à son image qui répondra avec précision à ce qu’il souhaite, à ce dont il à besoin pour évoluer et s’épanouir pleinement. L’être doit s’approprier et s’identifier à ce monde qui lui appartient pour se détacher du monde extérieur complexe, contradictoire, violent et désordonné. 37 La domestication des mondes le rassure et remet les choses à son échelle, ce qui rend à l’être humain l’impression de reprendre le contrôle, de redevenir maître de ses choix.
80
37
HOYAUX, Frédéric. L’espace domestique au monde domestiqué, construire, habiter, représenter. Paris : Editions Bréal, 2003, p33-45
38 YOUNES, Christiane, QUEYSANNE, Bruno, SANSOT, Pierre, MAGLIONE, Jean, TANI, Bernard, DURAND, Roger, HERBERT, Jean-Loup, POIRIER, Georges, MANGEMATIN, Michel, PIETILA, Reima. L’architecture entre nos sens et le sens. Clermond-Ferrand : École d’architecture, 1986
Cela fait partie de son rapport au monde : le «Hic et Nunc» qui sont respectivement «le moi et le monde». L’idée principale étant de « ramener l’homme à lui même », il doit retrouver le familier, l’appropriable et l’éloigner de ce qui lui échappe. L’affirmation identitaire s’établit à partir de la construction de soi, de l’habiter, du corps, de l’espace, de l’histoire. En ce sens, construire, concevoir des espaces architecturaux doit être fait en permettant cette dialectique. 38
« Construire, c’est d’abord se construire. Aménager l’environnement, c’est d’abord réconcilier l’homme avec lui-même (...)le corps étant le premier habitat de l’homme. » Christiane Younes
Cette partie se consacrera ainsi à une fragmentation par les sens, une série de trois exercices viendra appuyer le propos en élaborant trois systèmes de fragmentations. Le premier s’appuyant sur l’étude des cinq sens, le second sur les sept péchés capitaux, puis sur l’étude des ambiances et sensations.
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L’ESSENCE DES SENS Fragmentation visuelle ; la vue
« Voir, c’est construire une description symbolique de la scène observée » Jonh Frisby
Voir, identifier, percevoir, comprendre, analyser, fixer, ressentir, s’informer. Le processus d’identification visuelle de l’œil se détache de la photographie qui est un processus simple d’observation et de réduction d’une image. Lorsqu’on voit, on observe et fixe les choses, nos mouvements, actions et ressentis se font en fonction d’elle. L’homme contemple et traite les informations renvoyées par les cônes de notre vision afin d’interpréter la réalité, de la ressentir de l’analyser. Ce travail passe par une exploration visuelle, l’œil va effectuer cette exploration lorsqu’il y a plusieurs objets simultanément placés en face de lui. On observe que cette exploration contient des règles de priorité, les objets plus proches et les objets plus éclairés seront traités en premier grâce à une succession de fixations et de saccades. L’œil nous renvoie alors l’image qui sera comprise et interprétée par notre cerveau. 39 L’humain a besoin de ce cheminement, cela répond à un besoin fondamental, celui de se déplacer et de se positionner dans l’espace. Les êtres humains sont des organismes mobiles et articulés, leurs déplace-
82
39
CRUNELLE, Marc. L’architecture et nos sens. Bruxelles : s.n, 1995, p57
ments sont alors un point clé de leur survie. Ces images ainsi que cette interprétation de la réalité peuvent être opérés car le cerveau nous en renvoie une image synthétisée, ce qui représente alors l’espace dont nous sommes conscients. Le fond se détache de la forme car elle est un élément plus complexe et plus détaillée. La complexité des objets, leur réflexion lumineuse, les fait apparaître dans l’esprit comme éléments premiers de l’analyse de l’œil. La perception peut être biaisée par des illusions d’optique, des principes de composition de l’espace qui vont avoir pour effet de tromper le regard, de lui faire croire en une réalité faussée. On peut arriver à des effets de perspective accélérée ou ralentie en changeant le parallélisme des parois. La luminosité, l’éblouissement, la lumière artificielle, l’obscurité sont des facteurs qui influent également sur notre perception des objets et des espaces qui nous entourent. Dans l’église Notre Dame du Haut à Ronchamp, l’œil est baigné dans la pénombre, il s’habitue, s’accommode à ce manque de luminosité afin de devenir
83
efficace, mais dans cette cathédrale au long du parcours, après un passage dans une galerie obscure, le visiteur se trouve soudainement immergé dans une lumière intense, on a alors une sensation d’éblouissement, où la lumière devient maître de l’espace, elle se dégage des murs.
Et la lumière fut !
« Le blanc soumet les formes à l’obligation de se définir nettement, sans ambiguïté. Les gammes du blanc sont les gammes de la lumière » F. Soris cité par Marc Crunelle
Dans l’exemple dessiné, le logement offre une perméabilité des espaces entre eux, des espaces supplémentaires viennent privatiser la salle d’eau ou une chambre. La lumière pénètre en second jour dans la grande pièce centrale de rassemblement. Les murs intérieurs se détachent des murs mitoyens, suffisamment pour venir créer une percée lumineuse sans laisser la vue libre. De la cuisine, Daniel voit sa fille Lucie jouer dans sa chambre, Lucie tourne la tête et voit le jardin intérieur tamisant la lumière entrant dans la grande salle à manger. Des Comment peut-on alors gérer l’intimité dans un tel système ? La fragmentation permet une réponse intéressante puisqu’elle vient créer des sous-espaces supplémentaires.
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Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : visuelle
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Fragmentation tactile ; le toucher
Le toucher est définissable selon deux axes différenciés : le toucher actif et le toucher passif. Le toucher passif sera celui que l’on ne peut contrôler, que l’on devra se contenter de subir, comme l’eau qui coule sur notre peau ou encore une sensation de fraicheur, d’humidité. Le toucher défini comme actif va apparaître avec le processus d’exploration : l’action de marcher, d’arpenter les sols, de saisir une poignée de porte, de poser sa main sur une table, c’est un type de toucher intentionnel. Le toucher s’inscrit dans une pratique de l’espace, une gestuelle qui va aider l’homme à définir les formes, les textures, le degré de chaleur, mais c’est également ce qui lui permet de se maintenir en équilibre de façon autonome. Le sol, que nous touchons en permanence ou presque, rend le sujet impliqué constamment dans l’espace, ces deux pieds reposant continuellement sur une surface. Il est intéressant de voir comment le toucher kinesthésique des pieds est à chaque fois stimulé d’une nouvelle manière. Marc Crunelle 40 analyse les différentes matérialités présentes sur le sol de maison traditionnelle de plu-
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CRUNELLE, Marc. L’architecture et nos sens. Bruxelles : s.n, 1995, p10
sieurs pays différents. Il énumère alors la succession de ces matérialités diverses et les sensations qui en découlent. « A l’extérieur du gravier qui crisse et sur lequel nos pieds cherchent toujours un peu d’équilibre ; puis un seuil en pierre stable mais creusé au centre ; ensuite, dans le hall, de larges dalles en pierres plates aux joints fortement marqués ; du plancher aux joints serrés dans le couloir, du parquet dans le salon et finalement un large tapis épais et moelleux devant le feu ouvert » Marc Crunelle On se rend alors compte que plus l’on se rapproche
du cœur du logis, plus la matérialité devient chaleureuse et douce. Le cœur doit représenter quelque chose de réconfortant, d’invitant, avec la présence de matériaux plus doux. Provoquant un sentiment de sécurité, les sols sont en général fait pour que la liberté de mouvement soit la plus fluide possible, avec le moins d’aspérités possibles, le moins d’irrégularités, de façon à ce que l’on puisse se mouvoir sans y penser. L’extérieur se présente avec une forte présence tactile et une plus grande énergie consommée. Les sols intérieurs eux, auront tendance à être sécurisants et à faciliter nos gestes. Le toucher sécurisant, le toucher d’exploration peut
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aussi se transformer en toucher plaisir, si une matière nous apporte une sensation agréable de douceur, de confort, de chaleur en hiver ou de fraicheur en été. Ces touchers plaisirs font partie généralement d’un toucher actif, mais un sol, une cascade d’eau ou un courant d’air en été peuvent également être un toucher passif qui devient un toucher plaisir. Dans le dessin ci-contre, à l’extérieur, un gravier crisse, déséquilibrant nos pieds ; puis un seuil, une dalle de béton froide et un peu irrégulière ; dans le hall d’entrée de larges pierres stables dont les jointures sont creusées ; un parquet en chêne aux joints serrés dans l’espace d’accueil ; de petits carreaux de faïence dans la salle d’eau ; les chambres reposent sur une moquette, tapis douillet de la maison ; la salle à manger se matérialise sur un parquet croisé ancien. Nos pieds en recherche d’une perpétuelle stabilité sont décontenancés, ils doivent sans cesse se réadapter. Nos mains cherches les sensations, les murs ont des températures, des matériaux différents. Le toucher passif devient actif, il tâtonne, piétine, cherche, tente de s’accommoder à chaque changement de matérialité, certaines surfaces l’incommodent, d’autres le rassurent, agissant directement sur sa perception de l’espace intérieur. La composition symétrique offre une atmosphère rassurante pour un utilisateur malvoyant.
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Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : tactile
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Fragmentation sonore ; l’ouïe
Le son exact est imperceptible à l’oreille nue, le cerveau descellera les sons plus ou moins aigus qui entrent dans sa zone audible ( entre 20 Hz et 20 000 Hz). Le son perçu est en réalité une vibration conduite par l’air, elle est donnée par une amplitude ou niveau de pression. On exprime le son en décibels, celui-ci se décompose en différentes fréquences qui sont appelés «spectres». Le son, donc les vibrations, se propage en ligne droite, le rendant comparable à un rayon lumineux. Suivant cette théorie, il sera réfléchi lorsqu’il rencontrera un obstacle, on appelle cela la loi des miroirs. Elle variera en fonction de la distance à laquelle se trouve l’obstacle rencontré. 41 Selon la nature des matériaux, le son change : un matériaux dur comme on peut rencontrer à l’intérieur d’un bâtiment, de type béton, maçonnerie, métal, bois, fer, ou encore la surface de l’eau vont alors se comporter comme de parfaits miroirs et le son sera renvoyé sans perdre (ou presque) de son intensité. A l’inverse, les matériaux poreux et perméables à l’air comme la terre ne sont que partiellement réflecteurs, ils absorbent ainsi une partie de l’énergie acoustique, ce qui va avoir l’effet de diminuer le son. L’air a un impact sur l’énergie sonore, il va la diminuer dans sa course car elle se dissipe lentement
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dans l’air, ce mouvement n’est pas du à la disparition du son mais à sa dissolution. Les surfaces présentant des aspérités comme les sols naturels ou les parois jonchées de reliefs vont freiner la propagation du son qui aura beaucoup de mal à circuler au ras de ces surfaces imparfaites. Toutes ces caractéristiques sont à prendre en compte lors de la conception d’un bâtiment, car l’espace devient un assemblage d’obstacle qui peuvent constituer un véritable jeu sonore, le bâti module alors l’espace sonore. La qualité du son est à prendre en compte puisque comme son intensité, elle diminuera en fonction des surfaces qu’elle rencontrera. Comme l’explique Marc Crunelle, les cours fermées par des parois orthogonales présentent une réverbération discontinue qualifiée par l’auteur d’agressive, les sons brefs en revanche, dit impulsifs sont accentués par des phénomènes d’échos flottants. Il évoque également que si l’on prend l’exemple d’une colonnade, elle ne réfléchira que les sons aigus aux longueurs d’ondes inférieurs au diamètre des colonnes. Alors qu’un espace aux proportions plus
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grandes renverra un son plus neutre. L’utilisation d’un objet sonore au bruit diffus peut être utilisé pour «colorer» la rumeur, cet objet est souvent matérialisé par une cascade d’eau ou une fontaine. C’est ce que l’on appelle les sons blancs. Dans le plan ci-contre les parois se modulent, les murs accueillent des revêtements spéciaux en mousse et formes triangulaires, agissant sur l’acoustique. Des murs qui rejettent le parallélisme créent ainsi un effet d’entonnoir impactant la musicalité du bruit. Un écho se manifeste et laisse entendre la vie qui frémit dans l’appartement. Les murs non-orthogonaux de la salle de musique imposent une géométrie particulière aux chambres qui tirent avantage de cette dernière pour profiter d’un plus vaste espace. Le piano chante, les enfants rient, le repas frémit sur le feu, des verres s’entrechoquent, la vie est bruyante. Cet exemple d’espace s’organise de façon périphérique, accueillant une pièce centrale comme cœur de la maison. Elle vient s’armer de parois ayant la possibilité de capter le son afin d’assurer le plus grand calme dans les chambres. Une seule de ses parois n’en est pas recouverte, c’est une colonnade qui agira sur le bruit en créant des obstacles à celui-ci mais sans le filtrer complètement ce qui lui permettra d’atteindre l’espace de confection des repas.
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Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : sonore
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Fragmentation olfactive ; l’odorat
« Les premières nous charment, nous arrête un moment, nous détendent ; les autres nous mettent en alerte, nous rendent vigilants, nous crispent ou nous font fuir. » Marc Crunelle
L’odeur nous enveloppe, nous embaume, nous emprisonne, nul ne peut lutter contre elle. Elle agit d’une façon très forte et quasi instantanée sur notre ressenti et peut provoquer un caractère agréable ou désagréable. Lorsque l’on entre dans une pièce où l’odeur est forte, sa stimulation s’estompe alors avec le temps, notre appareil olfactif s’adaptant. 42 Les odeurs sont culturelles, elles s’apparentent à un souvenir ou à une habitude, l’odeur de la ville pour un citadin est neutre, elle est rassurante, l’odeur de la campagne va en revanche apparaître comme extrêmement inconfortable pour un citadin et ce vice-versa pour quelqu’un issu d’un milieu rural. Elles ont une capacité très forte à garder en mémoire des souvenirs, des situations qui leur sont liées. Elles peuvent très rapidement raviver un souvenir, ce que l’on appelle communément la Madeleine de Proust. Sensation de retour dans un souvenir d’enfance, fréquemment ravivée par un goût ou une odeur.
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Alors si l’odeur est envahissante, enveloppante et imprévisible, elle ne nous demande jamais notre avis, nous n’en sommes pas maîtres, il est extrêmement difficile de la contenir, de la contrôler. On peut détourner le regard pour ne pas voir quelque chose qui nous dérange, on peut ne pas toucher une surface qui a l’air hostile, ou ne pas mettre à la bouche un mets non enviable. L’odeur ne se contrôle pas, l’odeur du poisson grillé qui émane de la cuisine ou le parfum de tante Sarah trouveront leur chemin jusqu’à nos narines inconfortées. Cependant, un détachement s’opère entre l’humain et l’odeur, elle va relater une culture, un patrimoine olfactif, il est impossible pour un être humain de décrire une odeur de façon parfaite car elle est dépendante de l’expérience de chacun. Nous sommes des êtres dont les modes de représentation se basent sur la vue, l’odeur ne se visualise pas et crée alors un objet abstrait dont on ne peut spécifier les couleurs et les formes. De plus, le langage se trouve dépourvu de vocabulaire concernant cette sensation.
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L’odeur en architecture est donc un paramètre difficile a définir, car si elle ne se contrôle pas, ne se gère pas et est propre à chacun. Comment, au sein d’un logement peut-on alors travailler avec elle ? De la figure dessinée se dégage des matériaux ou revêtements de qui sols ont une identité olfactive à part entière. Irène se souvient que petite chez sa meilleure amie, le sol de la salle de bains était recouvert de fibre de coco. Lorsqu’elle prenait une douche, la fibre de coco devenait humide et dégageait alors une odeur spéciale, rassurante. Cette odeur ravive en elle des souvenirs de batailles d’eau et de moments conviviaux. La cuisine centrale exalte ses senteurs et embaume l’entièreté des espaces.
« Un chou-fleur, qui bouillottait bruyamment dans la cuisine, emplissait le logement de son odeur fétide » Roger Martin du Gard
La salle de bain, bercée d’odeurs de savon, de parfum mais aussi d’odeurs négligeables se fragmente et vient parfumer l’habitation d’un doux parfum. Des essences de plantes comme du jasmin peut etre utilisé près des chambres afin qu’une légère odeur vienne caresser les nuits des habitants. La maison comme un palais d’odeurs.
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Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : olfactive
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REPENTI Les sept péchés capitaux
C’est à la fin du quatrième siècle qu’un moine théologien ascétique, Evagre le Pontique vivant en Egypte, fait le constat que l’homme est menacé par de mauvaises attitudes. Il rédige alors un traité pratique dans lequel il isole ce qu’il appelle les passions ou maladies de l’âme. C’est selon lui, la victoire sur ces passions qui rend l’homme capable de Dieu. Le but est alors d’aider les chrétiens à repérer les tendances qui peuvent les mener à faire de mauvais choix. 43 Les péchés capitaux se nomment ainsi car ils dérivent d’une racine latine, caput, qui signifie tête. Ils seraient alors représentants des autres vices, et par la même occasion ils pourraient entraîner d’autres vices et donner naissance à d’autres péchés encore plus graves. L’architecture joue un rôle sur nos actions de la même façon qu’elle joue un rôle sur nos sensations. Comment ces péchés pourraient être alors spatialisés dans un lieu comme un logement ? Comment un espace pourrait-il répondre parfaitement à un péché ? Qu’est ce qui pourrait lui donner l’opportunité d’être exprimé de façon à ce qu’il ne dégénère pas d’avantage ? Les péchés sont rendus possible grâce à la libération de nos sens.
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43 MANGUEL, Alberto. Les sept péchés capitaux. Paris : Editions Joëlle Losfeld, 1996
« La conscience ? Elle n’empêche jamais de commettre un péché. Elle empêche seulement d’en jouir en paix ! » Théodore Dreiser
Peinture de Pieter Bruegel, La patience triomphe des vices avec l’aide de la foi, 1557
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La colère « La colère est un mouvement déréglé de notre âme, qui nous porte à nous venger, ou à repousser avec violence ce qui nous déplaît. » Paroisse Saint-Joseph
L’ébullition, l’aigreur, l’agitation, l’agressivité, l’animosité, l’éréthisme, la colère, la crise, le déchaînement, le dépit, l’effervescence, l’exaspération, l’excitation, l’explosion, la fureur, la haine, la hargne, l’impatience, l’indignation, le mécontentement, la querelle, la rage, la rancœur, les représailles, la vengeance, la violence. Dans le milieu psychiatrique, la gestion de la colère passe par un environnement sain et neutre, où le patient peut alors se trouver en posture sereine. L’architecture joue un rôle sur nos émotions ne serait-ce que par la lumière et les couleurs qui nous entourent. Le rouge a tendance à nous exciter alors qu’une couleur comme le bleu ou le vert nous apaise.44 La lumière qui agrémente un espace est également primordiale, les lampes aux éclairages jaunâtres ont tendance à dégager une atmosphère plus douce pour l’être humain.
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GOULET, Jean. Guide pratique pour la gestion de la colère. Avec la collaboration de CHLOULT Louis et NGÔ Thanh-Lan. Montréal : Tcc Montréal, 2017
scène de crise de colère, Louis de Funès 1967, dans le film Oscar
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L’architecture peut alors avoir une fonction apaisante, mais doit aussi pouvoir s’ouvrir sur le monde extérieur. 45 « Un espace suffisamment ouvert pour que le patient ne se sente pas enfermé et suffisamment contenant pour qu’il ne se sente pas esseulé. » Victor Castro L’architecture de la psychiatrie illustre cette sensa-
tion qui en réalité est une expérience vécue par la plupart du commun des mortels. Comme l’évoque l’architecte Peter Zumthor, 46 l’atmosphère agit sur notre perception émotionnelle, et donc notre survie. L’émotion de colère est sans doute la plus instantanée de nos émotions et pourrait alors trouver sa place au sein d’un logement adapté.
A-t-on besoin d’un espace pour crier ? L’émotion de la colère peut se matérialiser par le besoin de se défouler, d’extérioriser cette rage ; renverser des livres sur un bureau, casser un verre, renverser des chaises, taper du poing sur les murs, jeter des objets par la fenêtre et surtout s’exprimer très fort, hausser le ton et crier de façon expressive. 47 L’espace se façonne alors, entre un ring de boxe et une chambre dans un asile, à la fois neutre et démunie de tout élément perturbateur, mais tout en comprenant des objets pouvant être brusquement lancé par terre, ou contre les murs de la pièce.
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45 BUBIEN, Yann et JAGLIN-GRIMONPREZ, Cécile. Architecture pour la psychiatrie de demain. Rennes : Presses de l’ehesp, 2017
46 ZUMTHOR, Peter. Atmosphères. Boston : Birkhäuser : 2008
47 LAPAQUE, Sébastien. Les sept péchés capitaux : la colère. Paris : J’ai lu, 2007
L’orgueil
« L’orgueil est l’estime déréglée de soi-même, qui fait qu’on se préfère aux autres et qu’on veut s’élever au dessus d’eux. » Paroisse Saint-Joseph
L’arrogance, l’ambition, la bouffissure, la complaisance, la crête, le dédain, l’estime, la fatuité, l’impertinence, l’immodestie, la gloriole, la présomption, la suffisance, la pose, l’ostentation, l’outrecuidance, la hauteur, la mégalomanie.
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MALANDIN, Pierre. L’homme au centre du monde. Gallica, les essentiels littérature, s.d
Les comportements de l’orgueil se manifestent en un désir de l’individu à vouloir se placer au centre de l’attention, à vouloir diriger, parler plus fort, être au centre de l’attention. L’orgueil pourrait être perçu comme un acte d’ambition, de certitude, d’amour de soi-même ne laissant pas, ou peu de place à la faille, l’infériorité ou le rejet. La création et la communication sont des actes pouvant engendrer un comportement orgueilleux, le donneur d’ordre, comme un architecte peut être perçu comme présomptueux. 48 Montesquieu glorifie l’homme, relatant du fait que si l’homme est placé au centre du monde, cela lui reconnait de nouveaux droits, tout en acceptant de nouveaux devoirs. Alors, puisque selon lui l’homme doit être replacé au centre, prenons le à la lettre.
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Comment un espace peut-il devenir orgueilleux ? Prenons un espace carré, comme une salle de réunion, de rencontre dans laquelle l’individu peut exercer une oration sans contraintes, cette pièce doit-elle être littéralement au centre de l’appartement ? C’est alors un espace central, dans lequel est placé une zone légèrement surélevée, elle aussi centrale, cette dernière est éclairée de manière zénithale. L’acoustique, comme dans les synagogues, est étudiée afin que seul soit entendue la voix de l’orateur, résonnant haut et fort. Alors aurait-on un exemple d’une pièce qui se veut aussi orgueilleuse que son utilisateur pourrait l’être ? La lumière baigne l’individu au centre de sa lumière le faisant apparaître comme l’être possédant la connaissance. Cette estrade est là afin qu’on ne voit que lui, dominant les autres humains de la pièce. Ces derniers deviennent que des fourmis dont la vocation unique est uniquement d’écouter avec émerveillement les paroles dudit orateur. Ce même espace est entièrement composé de miroirs ne laissant à l’être central qu’une vision de luimême.
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David Bailly, VanitĂŠ aux portraits, 1651
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Don Rosa, Picsou, 1994
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L’avarice
« L’avarice est un attachement désordonné aux biens de la terre, et principalement l’argent. » Paroisse Saint-Joseph
L’économe, l’égoïsme, l’âpreté, l’avidité, la chiennerie, la crasse, la cupidité. L’avarice se définit comme l’amour inconditionnel pour l’argent, non pas le fait de le dépenser ou de l’utiliser, ni même de spéculer mais le fait de la posséder. L’être avare ne veut cette richesse matérielle que pour lui et lui seul, sans aucune vocation à l’usage. Comment peut alors se matérialiser un espace répondant aux besoin de l’avare ? L’oncle Picsou, par exemple s’est lui simplement contenté d’une piscine remplie de pièces d’or dans laquelle il a pût plonger, s’enivrer, se retrouver en totale immersion. Cet espace peut également devenir une pièce secrète, inconnue de tous, servant de refuge pour l’avare, pour y placer ce qu’il a de plus précieux. Elle prend place à l’arrière d’une cheminée, là où, le feu dormant, une brique se soulève entraînant l’ouverture menant sur une étroite galerie, un passage vers le coffre fort. Les parois sont renforcées d’un isolant épais afin que nul individu passant à proximité immédiate ne puisse jamais la découvrir. L’avare qui à force de trop se cacher finira par enfouir sa propre personne.
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La paresse « La paresse est un amour déréglé du repos, qui fait qu’on néglige ses devoirs d’état et de religion, plutôt que de se faire violence. » Paroisse Saint-Joseph
Le «farniente», l’indolence, l’oisiveté, la nonchalance, la mollesse, la fainéantise, la lenteur, l’inaction, l’assoupissement, l’atonie, l’indolence, l’oisiveté, le lampinage, la néantise, la flemme, l’apathie. Rejetant le moindre travail ou effort elle ne doit pas être confondue avec un repos réparateur, propice à la réflexion et à l’introspection. En réalité, la paresse est originellement nommée Acédie qui désigne une paresse spirituelle et non physique comme on le croirait aujourd’hui. 49 La paresse comme un repos de l’âme, l’occasion de se ressourcer, de prendre un nouveau départ, commencer sur de bonnes bases, un souffle nouveau. Le temps mort que tout cerveau humain réquisitionne pour fonctionner correctement. L’architecture peut-elle être paresseuse ? A l’antipode de la pratique architecturale, une architecture paresseuse ne serait alors qu’une maison sans mur, sans toiture et sans sol ? Peut-être est-il mieux de tourner la question dans l’autre sens : l’architecture peut-elle servir la paresse ? Alors qu’est-ce qu’un espace inutile 50 comme le dé-
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49 LAPAQUE, Sébastien. Les sept péchés capitaux : la paresse. Paris : J’ai lu, 2007
50 PEREC, Georges. Espèces d’espaces. Paris : Galilé, 2017, p66
finit Georges Perec ? Un espace dans lequel on ne ferait rien, qui ne serait ni un endroit de stockage, ni un débarras, juste une pièce vide, sans prétention, sans fonction définie, une pièce créée pour ne rien y faire. Peut-on comparer la paresse et l’ennui ? Un espace où l’on se contenterait de se prélasser, de regarder le temps passer, loin de toute stimulation extérieure, loin des bruits de la ville, loin des tracas quotidiens.
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LAFARQUE, Paul. Le droit a la paresse. Paris : Le temps des cerises, 1848
Alors paresser, ne serait-ce qu’un moment, ne pourrait-il pas être, au delà du péché, un moment intime et clos. L’espace est une chambre, un espace simple, éclairé de manière zénithale où les étoiles en sont la seule source lumineuse. Tapissée de tissus molletonnés aux motifs rêveurs, la pénombre invitant à une relaxation où notre vision. Un endroit pour se retrouver, non pas pour prier, ni pour lire, un espace pour ne rien faire, pour exercer ce que Paul Lafargue appelle le droit a la Paresse. 51 Condamnant l’amour du travail à n’être qu’une folie issue d’un système capitaliste, qui de plus entraine une misère individuelle et sociale depuis des siècles.
« Cette folie est l’amour du travail, la passion furibonde du travail, poussée jusqu’à l’épuisement des forces vitales de l’individu et de sa progéniture. » Paul Lafarque
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Estampe, FĂŠlix Vallotton, La paresse, 1896
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« Quand je n’ai rien à faire, et qu’à peine un nuage Dans les champs bleus du ciel, flocon de laine, nage, J’aime à m’écouter vivre, et, libre de soucis, Loin des chemins poudreux, à demeurer assis Sur un moelleux tapis de fougère et de mousse, Au bord des bois touffus où la chaleur s’émousse. Là, pour tuer le temps, j’observe la fourmi Qui, pensant au retour de l’hiver ennemi, Pour son grenier dérobe un grain d’orge à la gerbe, Le puceron qui grimpe et se pend au brin d’herbe, La chenille traînant ses anneaux veloutés, La limace baveuse aux sillons argentés, Et le frais papillon qui de fleurs en fleurs vole. Ensuite je regarde, amusement frivole, La lumière brisant dans chacun de mes cils, Palissade opposée à ses rayons subtils, Les sept couleurs du prisme, ou le duvet qui flotte En l’air, comme sur l’onde un vaisseau sans pilote ; Et lorsque je suis las je me laisse endormir, Au murmure de l’eau qu’un caillou fait gémir, Ou j’écoute chanter près de moi la fauvette, Et là-haut dans l’azur gazouiller l’alouette. » Théophile Gautier, Far-niente, Premières Poésies
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La luxure « L’impureté est une affection déréglée pour le plaisir de la chair. » Paroisse Saint-Joseph
La chair, la concupiscence, la coucherie, la débauche, la dépravation, l’impulsivité, l’excès, l’immoralité, l’impudite, l’impureté, la lacsiveté, la lubricité, la paillardise, le plaisir, le stupre, la turpitude. Considérée au moyen-âge comme le péché le plus scandaleux et répréhensible. Elle symbolisait la trahison auprès des fidèles et la désobéissance à Dieu. Rejetée car repésentant la part animale de l’homme, la fonction la plus primitive que nous avons en nous, elle est considérée comme incontrolable et fondamentalement dérangeante. Elle a été présenté par certain comme une domination sexuelle, un désir de possession, une envie violente naturelle au détriment d’une envie domptée culturelle. Cet abandon au péché de la chair se «soignerait» grâce à l’abstinence et le jeûne. 52 L’espace architectural réserve peu de place à un pareil univers. Serait-il acceptable dans notre société d’avoir, en plus de la chambre à coucher où l’on dort, une chambre annexe dédié a une vie plus libertine ? Une vie de la nuit, une vie intime. La chambre rouge, le donjon, la salle de jeux, le cagibi. Un espace dédié aux échanges charnels, un
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COLOSIMO, Anastasia. Le journal de la philo. série : les septs péchés capitaux, épisode 5 : la luxure, Janvier 2019
espace approprié où tout est permis, les lumières se tamisent, les installations rendent la pratique aisée, les plafonds sont bas, la pièce est tapissée d’un rideau rouge foncé, elle doit être confortable, bien camouflée rien ne devant pouvoir troubler l’activité du lieu.
Peinture, Gustave Courbet, le sommeil, 1866
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Peinture, Jan Davidsz de Heem, petit dĂŠjeuner avec coupe de champagne et pipe, 1642
Estampe anonyme, Gargantua a son grand couvert, 1838
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La gourmandise « La gourmandise est un amour déréglé du boire et du manger. » Paroisse Saint-Joseph
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Savoir : le péché de gourmandise, https://alimentarium.org
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PEREC, Georges. Espèces d’espaces. Paris : Galilé, 2017, p 64
L’appétence, l’appétit, l’avidité, le bonbon, la boulimie, la chatterie, la douceur, la faim, la gloutonnerie, la goinfrerie, l’insatiabilité, l’intempérance. On entend souvent ; la gourmandise est un vilain défaut ! Alors que le péché de gourmandise désigne en réalité un acte de gloutonnerie. On parle d’excès de bouche associé à un plaisir immodéré suscité par la consommation excessive d’aliments, mais cela n’est pas une forme pathologique comme pourrait l’être la boulimie. Souvent associé au péché de luxure : plaisirs conduisant à la volupté et au dérèglement des chairs, ventre et bas-ventre trouveraient alors un lien charnel. 53 Là encore, la gloutonnerie rabaisserait l’homme au stade animal, le poussant à renoncer au principe de charité et de partage. Un égoïste qui dévore ? L’idée n’étant pas de canaliser le péché mais au contraire de lui donner un cadre, un espace. Alors, une cuisine magique dans laquelle les plats foisonnent à l’infini, un fauteuil confortable attelé à une table pour déguster les précieux mets du gourmand. L’ambiance se veut propre, entièrement dévouée à la nourriture, le sens du goût exalté, dans de bonnes conditions. La définition se veut proche de celle d’une cuisine, mais en admettant la définition sensorielle de cet espace, elle pourrait se transformer en gustatorium comme le définirait Georges Perec. 54
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L’envie « L’envie est une tristesse que l’on ressent à la vue du bien du prochain, ou une joie coupable du mal qui lui arrive. » Paroisse Saint-Joseph
La jalousie, l’aversion, la répugnance, la convoitise, la rivalité, la répulsion, la haine, le désir, le souhait, le caprice, la concupiscence, l’appétence.
Synonyme de désir face au bonheur d’autrui ou à ses avantages, l’envie ne doit cependant pas être confondue avec la jalousie. L’envie peut en effet l’engendrer mais elle s’en distingue dans la mesure où la jalousie est créée par la peur de perdre quelqu’un ou quelque chose. L’envie elle est simplement le fait de désirer ce qui ne nous appartient pas, ce que l’on désire sans pouvoir l’avoir. C’est souvent la convoitise d’un objet appartenant a autrui, laquelle peut générer des sentiments de malveillance, de diffamation ou de haine. 55 L’envie d’être là où l’on ne se trouve pas, l’envie d’être ailleurs, d’entrer dans ce bâtiment aux façades ornées et travaillées. L’envie d’être dans la cuisine lorsqu’on est dans le salon, d’être dans la salle de bain lorsqu’on est dans la cuisine, d’être sur la terrasse lorsqu’on est dans la salle de bain. L’espace de l’envie, celui qui ferait rêver le moindre visiteur, est alors indéfinissable puisque propre à chacun. Il découle d’un désir profond personnel. Ce péché est alors celui qui fait sûrement le plus appel à nos sensations, car l’envie est fondée sur le désir, le désir lui même sur une recherche du plaisir. Le plaisir étant la sensation recherchée par l’homme depuis la nuit des temps.
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D’AQUIN, Saint Thomas. La somme théologique, traité théologique et philosophique. s.n, 1266
Peinture, Marc Chagall, L’envie aus les sept péchés capitaux, 1925
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Le colérique
Le luxueux Le paresseux
L’orgueilleux
L’avare
L’envieux
Le gourmand
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Les 7 péchés spatialisés
Chacun son espace, chacun son vice. L’idée n’est pas de bannir le péché, ni de l’encenser mais simplement de lui donner un espace dans lequel il peut être extériorisé, trouver sa place, exister.
Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : 7 péchés capitaux
Le hall d’entrée, connecté à l’extérieur accueille l’envie, l’envieux voit ce qu’il se passe dans le logement, il voit l’extérieur, il voit ce qu’il n’a pas. L’envie est partout, il veut constamment être dans la pièce où il n’est pas, il les observe à travers un petit orifice. La pièce au fond du couloir est celle du paresseux, une salle molletonnée, les parois se façonnent pour bercer l’utilisateur, c’est une sorte de salon inactif. S’en suit l’espace du colérique de forme circulaire afin d’évacuer les énergies mauvaises du sujet et de les renvoyer à lui-même. La luxure prend place dans une pièce plus intimiste, elle représente la chambre, un rideau tamise la lumière et protège l’espace des regards indiscrets. L’avare se cache dans l’antichambre de la salle d’eau, une pièce secrète dernière le cabinet de toilette, il peut y accéder en empruntant différents passages. Le gourmand, dans son gustatorium géant jouit sans limites de son amour inconditionnel pour la nourriture. Au cœur de l’appartement, une pièce, centrale et orgueilleuse accueille en son centre une estrade éclairée de manière zénithale. L’orateur mis en lumière est l’être central.
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AMBIANCES ET SENSATIONS
« La sensation pure sera l’épreuve du choc indifférencié, instantané et ponctuel. » Maurice Merleau-Ponty Des ambiances, des sensations.
Gaston Bachelard décrit la maison comme un véritable cosmos, lieux de souvenirs intimes et d’images immémoriales. Où il ne s’agit pas de les décrire ou de les décrypter mais finalement d’en comprendre les qualités et d’en analyser les raisons de son confort. 56 Le ressenti, le souvenir, les sensations se rattachent à un patrimoine culturel, deux individus ressentent l’espace en fonction de leur vécu, de leur histoire, les sensations qu’ils développent, ou les souvenirs que ce même espace ravive, tout cela est propre à leur culture, histoire et propre expérience. 57 En ce sens, essayer de faire de la phénoménologie de l’espace 58 revient à interpréter ce patrimoine, cette culture, à ré-intèrpreter le vécu de tout un chacun afin de le traduire en architecture. On se retrouve alors à composer des espaces sur mesure, adaptés et spécialisés. Nos souvenirs façonnent nos habitats comme ils façonnent la façon dont nous nous comportons.
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56 BACHELARD, Gaston. La poétique de l’espace. Paris : Quadrige, 2020, p56
57
CRUNELLE, Marc. L’architecture et nos sens. Bruxelles : s.n, 1995, p3
58 MERLEAU-PONTY, Maurice. Phénoménologie de la perception. Paris : Gallimard, 1945, p26
La maison lieu intime, la maison lieu commun, la maison lieu partagé, la maison lieu de partage, la maison abri, la maison qui abrite, la maison pleine, la maison vide, la maison temporelle. « À la porte de la maison qui viendra frapper ? Une porte ouverte on entre Une porte fermée un antre Le monde bas de l’autre coté de ma porte. » Pierre Albert-Birot
Dans ce chapitre, les logements se modulent suivant un nouvel angle de vue, celui du ressenti, de la sensation et des ambiances. Divers procédés spatiaux et compositionnels viennent nourrir cet exercice nouveau qui s’agrémente des précédents essais. Chaque espace trouve sa légitimité, son atmosphère et répond précisément à un moment de la journée, à une humeur, à un besoin d’intimité, à un nombre de personnes.
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Le plein
Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : aucune
La masse
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Une masse, un plein, définit en architecture une grande quantité de matière, donc un volume important par son poids et ses dimensions. 59
ROWE, Colin et KOETTER, Fred. Collage city. Cambridge : Cambridge Mass, 1978
Le plein est représenté par un poché, théorie utilisée fréquemment dans le champ de l’urbanisme pour faire apparaître le caractère de la ville. Ce poché urbain peut cependant être pris dans deux directions distinctes, noircir le vide, noircir le plein. Le principe étant de désigner la matrice solide que constitue les éléments spatiaux majeurs. 59
« L’une est une accumulation de vides dans un plein peu travaillé, et l’autre, une accumulation de pleins dans un vide peu travaillé ; et dans chaque cas, le fond laisse apparaître une catégorie totalement différente de figures -d’un coté, l’objet, et de l’autre, l’espace. » Colin Rowe et Fred Koetter
A l’échelle de l’architecture, le poché se matérialise de la même façon, on peut alors traiter l’architecture comme si elle était une sculpture. Où sculpter un bloc de bois amènerait par cette théorie de soustraction et d’identification du plein et du vide à la création d’une forme identifiable. La sculpture se crée par cette méthode de soustraction, mais ce qu’il en résulte redeviendra une masse façonnée.
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Dans une proposition architecturale, les formes extrudées deviennent alors des espaces, la magie du plan se met en place. Ces espaces en soustraction peuvent alors évoluer en profitant de la masse creusée afin de créer une identité architecturale de type massive. Les espaces intérieurs peuvent alors se libérer des limites de la parcelle puisqu’ils deviennent des sortes de galeries ne subissant plus l’influence de ce qui les entourent. Les épaisseurs des murs varient et le plan trouve un caractère presque vernaculaire. C’est aléatoire et ne correspond à aucune logique écologique ou acoustique, l’espace résultant est un négatif. Peter Zumthor décrit le bâtiment comme un corps, comme une masse, avec une membrane qui l’entoure. 60 Il s’agit là du corps lui-même pris en considération littéralement, cette masse parvenant à contenir d’autres espaces. Dans cette expérimentation, les espaces intérieurs viennent se façonner au gré de leur nécessité, des niches viennent agrémenter les espaces principaux amenant rangements, lieux de vie ou de sommeil. La lumière perçant ces épaisses parois se tamise, laissant entrer un rayon lumineux. Les allèges deviennent elles aussi des espaces librement appropriables.
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60 ZUMTHOR, Peter. Athmosphères. Boston : Birkhäuser : 2008, p23
Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : Par la masse
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Le vide
Par opposition au plein qui est une méthode de composition basé sur la soustraction de la matière, une fragmentation par le vide serait alors un procédé d’addition de matière. Les espaces deviennent indépendants les uns des autres, ils suivent une composition d’ordre intégré, ils se disposent alors librement dans le plan influant alors sur l’espace en négatif qu’ils créent. Leur forme, leur taille et leur positionnement sont générateur de différents espaces et en conséquence de différentes atmosphères. On voit apparaître des éléments qui se fixent aux limites du mitoyen, et d’autres qui se détachent, dont certains sont des îlots indépendants autour desquels on peut circuler librement, tandis que d’autres se contentent de n’avoir que trois façades mais permettent de libérer un espace extérieur plus large. Ce processus de composition permet à tous les espaces de bénéficier d’un éclairage naturel direct. Le projet de SANAA, Moriyama House illustre déjà ce procédé en décomposant la maison traditionnelle japonaise pour la répartir en unités sur le terrain. Les espaces non fonctionnels prennent place alors à l’intérieur comme à l’extérieur, l’espace extérieur se façonne et se crée grâce au positionnement des volumes dans l’espace. Du plus étroit au plus ouvert, chacun vient créer une ambiance unique, plus ou moins intimisée.
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Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : Par le vide
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Mère nature reprend ces droits
L’organique est ce qui se façonne au gré de la nature, de son environnement, se matérialisant concrètement par des formes de type courbes qui rejettent les principes de compositions modernistes, et les angles trop droits. 61 Ici, l’appartement se développant entre deux mitoyens, les limites doivent rester formelles, c’est l’espace intérieur qui se façonne alors grâce à la musique organique. Mais une fragmentation par le végétal signifierait aussi repenser ce qui fractionne l’espace, le mur de brique se transforme en un mur de plantes, la salle de bain se trouve dans une bulle semi-transparente en briques de verre. Le végétal peut agir en qualité de barrière visuelle tout en laissant passer l’air et une lumière qui se tamise, les espaces secondaires trouvent alors une source de lumière semblable à celle que l’on trouverait au milieu d’une forêt, où les faisceaux de lumière parviennent à percer les maigres écarts entre une feuille et une branche. On retrouve alors une atmosphère divine, presque irréelle de ces halos lumineux. Les espaces deviennent intimes, la nature apporte à l’homme un sentiment de bien être et d’apaisement. Les parois courbes accueillent et façonnent un mobilier intégré, tel un canapé ou un meuble de cuisine. La composition est symétrique à l’image de la nature qui la génère.
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61 PEARSON, David. New organic architecture. Berkeley : University of California press, 2001
Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : Par la végétation
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Les humeurs
illustration des quatres humeurs fondamentales, Albrecht DĂźrer, La philosophie, 1502.
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62 ACADEMIE FRANCAISE. Dictionnaire de l’Académie française, neuvième édition. Paris : Fayard, 2005, p101
63
HYPOCRATE, Oeuvres complètes. Traduit par LITTRÉ Emile, Paris : JB. Baillère, 1850, p14
La théorie des humeurs se veut rattachée à la médecine antique. Elle se base sur la théorie suivante : le corps est constitué de quatre éléments principaux : l’air, la terre, l’eau et le feu. Chacun possédant ses propres qualités : chaud, froid, sec ou humide. Tous ces éléments constituent ensemble l’équilibre physique et psychique de la personne. 62 Des déséquilibres entraîneraient des conséquences allant de la simple saute d’humeur à une menace sérieuse pour la santé du sujet. Cette théorie archaïque a évolué et aujourd’hui on ne considère plus les choses de cette façon : des méthodes de soin jugés obsolètes pour pallier ces déséquilibres étaient plus dangereuses que bénéfiques pour la santé : la saignée en est un exemple. Mais si l’on se base sur ces quatre éléments pour créer un système architectural, on peut alors diviser le système en quatre parties distinctes correspondant chacune à un élément, donc une humeur. 63 Le sang, produit par le foie, reçu par le cœur est associé à un caractère jovial et chaleureux. La pituite ou lymphe, se rattache au cerveau et définit un caractère lymphatique, apathique. La bile jaune, venant également du foie, décrit une personne plus encline à la violence, la force et le
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contrôle. Enfin, L’atrabile ou bile noire, qui vient de la rate, est associée à la mélancolie, la tristesse. Considérant que, nous, humains passons tous par ces quatre phases, l’appartement accueille des espaces qui correspondent à chacune d’entre elles : le flémagique, qui est un être presque apathique que l’on pourrait qualifier de «blasé» dans un langage familier. Il profite d’une pièce froide, sans lumière, vide, qui contient éventuellement un espace sanitaire ne procurant aucune émotion remarquable. Le sanguin lui, s’associe à un air chaud et humide, et un caractère irrémédiablement joyeux. Il danse, crée, saute et exprime sa joie à travers des divertissements variés. Les vapeurs chaudes d’une douche n’est-elle pas l’endroit idéal pour le joyeux qui aime un air chaud et humide ? L’atrabilaire, être triste, mélancolique, froid, prend place et se réconforte dans un environnement où il se soulage avec des sucreries, regarde un film ou s’assoie dans un canapé pour pleurer et enfin, finir mélancoliquement dans les bras de Morphée. Le bileux, enclin à la colère, a besoin d’un espace pour se défouler, extérioriser cette humeur.
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Le bileux
L’atrabiliaire
Le sanguin
Le flémagique
Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : Par les humeurs
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Ne pas déranger
Un système périphérique de couches successives contenant en son cœur, le plus intime des espaces : les toilettes. Le principe d’une organisation périphérique est en réalité une enveloppe, qui, en s’épaississant peut accueillir des espaces. 64 Ces enveloppes jouent ici le rôle de filtres entre la ville et le plus intime des espaces. Ces cinq espaces qui s’organisent en périphérie de l’espace central créent des pièces longues et étroites, offrant une circularité interne, chacun devenant alors l’unité entourant l’autre. Mais l’espace intime est-il le même pour tout le monde ? Certaines personnes pourraient définir cet espace comme accueillant le sommeil, moment de la journée où nous sommes le plus vulnérable, tombant dans une léthargie où nous devenons des êtres passifs durant quelques heures. Ces espaces placés en anneaux autour du cœur, amènent une dimension de protection acoustique, mais également une dimension labyrinthique qui rend l’accès à la pièce centrale incommode. La notion d’intimité est culturelle et prendra alors place de manière distincte selon l’occupant. Cet espace plus ou moins privé influencé par les seuils, les barrières, les enveloppes, les espaces tampons et autres espaces agissent en qualité d’entre deux.
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64 CHING, Francis. Architecture, form space & order. New York : J. Wiley, 2007
Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : Par l’intimité
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Pas plus de quatre personnes à la fois s’il vous plaît
Un être humain mesure en moyenne 1,70 m en plan bras tendus (qui équivaut également au standard de distanciation sociale face à la pandémie du coronavirus). Si on considère que cette mesure est une référence et que l’on trace alors autour du centre du crâne de l’individu un cercle d’un rayon de 0,85 m, on obtient alors l’espace nécessaire qu’il lui faut pour se mouvoir librement, pour respirer, et effectuer des actions sans gêne. Ce cercle représente alors une surface de 2,26 m2. Si l’on envisage ces dimensions comme génératrices du dimensionnement des espaces intérieur du logement, combien de personnes peut contenir un vestibule ? Combien de personnes éprouvent le besoin d’être présentes au même moment dans une chambre ou une salle de bains ? Ce paramètre vient alors influencer la taille et la forme des espaces qui s’adaptent à l’affluence humaine dans une pièce donnée. Un espace dans lequel on se trouve assis ne nécessitera pas la même surface qu’un espace dans lequel on se trouve debout. On trouve alors dans cette organisation incongrue de nouvelles mesures et proportions qui sont inhabituelles dans le monde du logement : un vestibule qui serait plus grand qu’une cuisine, et même qu’une chambre à coucher. Une salle de bains pouvant accueillir deux utilisateurs est alors plus volumineuse qu’un espace de lecture solitaire ou de rêverie. L’intimisation des espaces est servi par ce type de fragmentation.
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Page de droite : Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : Par le nombre de personne
Salle de Yoga : 3 personnes
Salle de rêveries : 1 personne Salle de jeux d’echec : 2 personnes debout + 2 personnes assises.
Salle de bain : 1 à 2 personnes
Chambre à coucher : 1 à 2 personnes couchées
Salon de récéption : 2 à 6 personnes
Vestibule : 1 à 2 personnes Salon de lecture : 1 personne debout + 1 personne assise
Cuisine : 1 personne
137
138
9 à9 h1 9h 15
9h 15 9h à
84 0à
8h
Si l’habitat était vu de façon complètement chamboulée, si seul importait l’ordre et le temps pour effectuer chacune de ces actions, alors chaque espace correspondrait à une activité, à un moment de la journée. Attention, on ne revient pas en arrière, on doit suivre à la lettre l’organisation linéaire du logement. Cette linéarité est un principe formel de composition, soutenant un ensemble d’espaces qui
9h
0 12
à8
h4
2 h1 à8 10 8h
8h
à8
h1 0
Une vie linéairement ordonnée
CHING, Francis. Architecture, form space & order. New York : J. Wiley, 2007, p218
se répartissent suivant un axe donné formant alors une séquence, en répétition ou en série. Le linéaire propose un mouvement, puisque formé grâce à un axe, à une direction donnée précise. 65 Souvent régulière, cette organisation permet une liberté de composition dans le dimensionnement des espaces internes.
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7h 5 21
h2 5à
1h à2 h1 9
21
21 5à h1 21
8
25
9 h1
h1 hà 20
2à h3 17
21
h 20
2 h3 17 hà
h4 0 14
17
à1
7h
5
h4 0 14 13 h4 0à
0 7à h1 13
5à h1 13
13
13 h1
h4
7
h1 5 13 9h 35 à
h3 5 à9 9h 19 65
Plan type d’un appartement entre mitoyens étiré mesurant 8m x 12m soit 96m2 fragmentation : linéaire
Le quotidien de Paul 7h55 : le réveil sonne, sur la table de chevet 7h58 : sortie du lit, dans la chambre 7h58 à 8h : traversée du long couloir de 39m soit 2 minutes, dans le couloir 8h à 8h10 : De l’eau sur le visage, dans la salle d’évier 8h10 à 8h12 : passage aux toilettes, dans le cabinet de toilettes 8h12 à 8h 40 : confection et avalage d’un petit déjeuner complet, dans la cuisine qui contient une table 8h40 à 9h : nettoyage du corps et brossage des dents, dans la salle de douche 9h à 9h15 : choix et enfilage de la tenue vestimentaire qui le suivra toute la journée, dans le dressing 9h15 à 9h19 : passage aux toilettes, dans le cabinet de toilettes 9h19 à 9h35 : arrosage des plantes, dans la serre 9h35 à 13h15 : écriture de ses mémoires (Paul est écrivain), dans son bureau-bibliothèque 13h15 à 13h17 : passage aux toilettes, dans le cabinet de toilettes 13h17 à 13h40 : confection du déjeuner, dans la cuisine 13h40 à 14h40 : engloutissement du déjeu-
140
ner,dans la salle à manger. 14h40 à 17h : exercices de relaxation, méditation et yoga, dans la salle de relaxation 17h à 17h32 : détente dans un bain chaud, dans la salle de bains 17h32 à 20h : lecture, dans le salon de lecture 20h à 21h15 : confection du dîner et dégustation du dîner, dans la cuisine du soir contenant une table à manger 21h15 à 21h19 : passage aux toilettes, dans le cabinet de toilettes 21h19 à 21h25 : Déshabillage, mise en place du pyjama, dans le dressing 21h25 à 7h55 : Endormissement du sujet, dans la chambre À répéter.
141
142
Place au(x) rĂŞve(s)...
Peinture, Salvador DalĂŹ, La Madone de Port Lligat, 1950
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Le rêve comme échappé.
Le rêve se détache du réel, tout en étant un élément intrinsèquement lié à ce dernier. Le réel s’en nourrit, l’homme à besoin du rêve. Le rêve comme une porte ouverte à l’imaginaire, au non conventionnel, une petite porte que notre subconscient nous ouvre vers un univers infini, libre, surréaliste. Aparté dans nos vies, on aime penser qu’il est notre moment d’évasion, le moment où nous nous détachons du monde. 66 Il y parvient car il représente la part en nous que nous ne parvenons pas à contrôler, celle qui apparait à nous, avec laquelle nous devons jauger. La rêverie ne se rattache jamais à un objet direct et proche, elle se situe immédiatement dans l’espace, dans l’ailleurs, dans un monde presque parallèle. Le rêve se veut libre, dénué de tout jugement, sans préjugés, il est à l’image d’un enfant dont l’univers infini le laisse être et ressentir de façon incontrôlée. Le rêve comme berceau de l’enfance.
Il désigne l’inconscient, l’incontrôlable, l’émotionnel pure. Petite chose fétide et fragile, le rêve est avant tout l’au delà, le lâché prise. L’enfant fait entrer le rêve dans le réel, lorsqu’il joue, lorsqu’il dessine, ou lorsqu’il raconte des histoires.
144
66 BACHELARD, Gaston. La poétique de l’espace. Paris : Quadrige, 2020, p 56
67
BACHELARD, Gaston.ibidem. p 259
Son imagination n’a pas de brides, elle est à l’image du rêve : libre. On peut parler alors d’immensité 67, qui serait selon Gaston Bachelard, une catégorie philosophique de la rêverie. Elle se nourrirait, selon lui, de spectacles variés par inclination native, la rêverie se place devant le monde et contemple sa grandeur.
« La contemplation de la grandeur détermine une attitude spéciale, un état d’âme si particulier que la rêverie met le rêveur en dehors du monde prochain, devant un monde qui porte le signe de l’infini. » Gaston Bachelard
En ce sens, la rêverie se nourrit de nos souvenirs, de notre vécu et se sert de ces spectacles variés pour exister et prendre possession de nous. Le rêve comme contemplation première.
Si la rêverie ne prend pas sa racine dans notre passé et qu’elle se détache de nos souvenirs, elle devient alors, dans les termes de l’écrivain, immense. Semblable au monde dans lequel nous vivons, cette immensité est calme et tranquille lorsqu’elle s’apparente à la rêverie. Se détachant de l’objet, la rêverie peut s’apparenter alors à la forme de phénoménologie la plus pure. Car elle se détache de tout phénomène, de toute image.
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Le rêve de Pieter et Yann : le temps d’une nuit 146
« Dans cette chambre que j’habite J’assemble tous les paysages J’entre au bois diamant Le ciel est un aveu » Objet, Paul Eluard
147
« Elle est retrouvée. Quoi ? – L’éternité. C’est la mer allée Avec le soleil. Ame sentinelle, Murmurons l’aveu De la nuit si nulle Et du jour en feu. Des humains suffrages, Des communs élans Là tu te dégages Et voles selon. Puisque de vous seules, Braises de satin, Le Devoir s’exhale Sans qu’on dise : enfin. Là pas d’espérance, Nul orietur. Science avec patience, Le supplice est sûr. » L’éternité, Arthur Rimbaud
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Le rĂŞve de CaliopĂŠe, Nuss et lu : perdre son temps 149
« Le vent ne te fait pas peur Garde le mouvement secret De la chute impérieuse au moment du déclin Et ta première plume du premier jour clair Toi-même voix menue tu rirais de t’entendre Siffler les brins d’herbe cueillir L’élan de la graine de force L’élan de l’arbre muet qui tient tête à la terre. » Plante-aux-oiseaux, Paul Eluard
150
Le rĂŞve de Gabriel : prendre son envol 151
« Ah ! belle liberté, qui me servais d’escorte, Quand le pied me portait où libre je voulois ! Ah ! que je te regrette ! Hélas, combien de fois Ai-je rompu le joug, que malgré moi je porte ! Puis je l’ai rattaché, étant né de la sorte, Que sans aimer je suis et du plomb et du bois, Quand je suis amoureux j’ai l’esprit et la voix, L’invention meilleure et la Muse plus forte. Il me faut donc aimer pour avoir bon esprit, Afin de concevoir des enfants par écrit, Pour allonger mon nom aux dépens de ma peine. Quel sujet plus fertile saurais-je mieux choisir Que le sujet qui fut d’Homère le plaisir, Cette toute divine et vertueuse Hélène ? » Sonnets pour Hélène, Pierre de Ronsard
152
Le rêve de Gus, Iris et Léo : en roue libre 153
« Qu’est ce que l’homme dans la nature ? Un néant à l’égard de l’infini, un tout à l’égard du néant, un milieu entre rien et tout. » Blaise Pascal
154
Le rêve de Felicien : à la risière du bois 155
« Sûre de leur retour avec la nuit tombante, la maison, en songeant aux siens, se réjouit ; son toit fumant déjà révèle une âme aimante, et, comme un cœur rempli d’allégresse et d’attente, le feu de son foyer palpite dans la nuit. » Louis Mercier 156
Le rêve de Simon et ses douze enfants : la cour de récréation 157
« Parfois, la maison s’agrandit, s’étend. Il faut une plus grande élasticité de rêverie, une rêverie moins dessinée, pour l’habiter. » Gaston Bachelard
158
Le rĂŞve de Christian : vertigineux 159
CONCLUSION
Tout au long de ce travail composé de fragments expérimentaux, le fil conducteur a été cette recherche de spatialités nouvelles, d’une architecture désinhibée de son attachement à la fonction. L’exercice, plus ou moins complexe selon les thématiques abordées, tente de donner une réponse architecturale et spatialisée. Il vient trouver une approche alternative en se détachant de la composition traditionnelle architecturale. Le travail en plan qui compose tous les exercices proposés permet de mettre dans un contexte équitable chaque projet. Ils peuvent alors être comparés les uns aux autres, mais également s’additionner, se soustraire ou s’enrichir mutuellement. L’espace se libère, on peut alors jouer avec les distances, jouer avec les mesures, jouer avec les espaces. 68 L’architecture devient Jeu, elle libère la rêverie, l’innocence, l’âme enfantine. Du livre de Francis D.K Ching sont tirés des principes de compositions formels qui ont nourrit le travail. La majorité des projets constituant ces projets expérimentaux s’appuient sur les principes de composition énoncés dans ce chapitre. Chacun de ces exercices apporte des réponses, des 69
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68 PEREC, Georges. Espèces d’espaces. Paris : Galilé, 2017, p167
69 CHING, Francis. Architecture, form space & order. New York : J. Wiley, 2007, p197 - p253
nouveaux axes de réflexion, des nouvelles pistes de recherches, sans jamais amener de solutions précises car l’architecture n’est jamais noire ou blanche, elle se nourrit, se compose, s’améliore, se spécialise sans jamais atteindre de perfection. Art subjectif, elle se façonne au gré de son auteur et de son utilisateur. Le plan comme un langage commun apparait ici comme la limite dans la création des essais laissant également la porte ouverte sur une continuité du travail en volumétrie. A travers cette série de projets expérimentaux, l’une des caractéristiques qui apparaît est celle d’une architecture spécifique. A l’image du monde dans lequel nous vivons aujourd’hui, l’architecture doit-elle également être hyper-spécialisée ? Adaptée précisément à l’usager ? Sur mesure ? La question contraire qui en découle serait alors de se demander : qu’en est-il de la flexibilité de ces constructions ? Une même habitation sur-spécialisée peut-elle convenir à plusieurs individus ? Ces logements hyper-spécialisés sont-ils en mesure d’accueillir la notion de flexibilité ? Comment amener cette notion de flexibilité, d’adaptabilité ?
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Une veste sur mesure, taillée parfaitement pour vous, dans votre tissu préféré et la couleur qui vous va le mieux, correspondant à votre mode de vie, sera optimisée pour répondre précisément à vos attentes. Mais peut-elle être portée par quelqu’un d’autre que vous ? Que se passe-t-il lorsque l’on décide de vendre la veste ? La société aujourd’hui range l’individu dans des cases, on crée des bâtiments spécialisés, un immeuble destiné à accueillir des personnes âgées, un immeuble pour étudiants, un pour jeunes couples, un pour personnes célibataires, jusqu’où allons-nous? L’idée de l’appartement adapté est finalement la même théorie, rejetant l’espace multifonctionnel, en d’autres termes l’espace vide, dans lequel on fait tout, dans lequel on ne fait rien. Mais cette théorie ne s’applique plus à la société en général et à un immeuble, elle s’applique à une personne en particulier. On rejette alors une spécialisation par le fonctionnel pour la remplacer par une spécialisation par l’activité, par la sensation. L’adaptabilité rejetant la flexibilité des espaces ? Qu’en est-il de la voie de la non-fonctionnalité complète ?
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Les architectes Diener et Diener créent un logement à Amsterdam (figure 1, cf page suivante) qui se veut d’une grande flexibilité, les pièces suivent une trame régulière mesurant 3,2 mètres sur 4, elles sont toutes égales, mais foncièrement toutes différentes. L’idée première est de permettre à une habitation de pouvoir se moduler, qu’un espace ne soit pas prédéfini permettant aux actions qu’ils s’y passent de s’interchanger. Mais le système a ses limites, car premièrement les pièces ne sont jamais toutes les mêmes, elles peuvent avoir les mêmes dimensions géométriques mais la lumière qui y entrera, la chaleur qui s’y dégagera sera toujours unique et propre à chaque espace. De plus, les salles humides comme les salles de bains ou les cuisines ne peuvent être placées au bon vouloir de l’occupant puisqu’elles nécessitent l’installation de tuyaux d’arrivée et d’évacuation d’eau, ce qui doit être conçu et intégré pendant la construction. En mettant de côté ces deux espaces et en se disant que tous les autres trouvent cette flexibilité, on se rend compte que la salle à manger se retrouvera à côté de la cuisine, qu’elle sera gênée par ses dimensions se voulant standard, dimensions trop étroites
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pour une salle a manger, mesures qui gêneront à leur tour la chambre d’enfant qui nagera dans une pièce, à l’inverse, trop grande. La liberté et l’hyper-flexibilité des espaces est un leurre, une jolie théorie sur le papier mais qui ne peut s’appliquer réellement. Eric Lapierre (figure 2) fait aussi l’exercice d’un logement qui est, d’apparence complètement neutre. Il compartimente sa maison en 16 espaces égaux, il avoue lui-même : « “L’intérêt, c’est aussi de faire toutes ces pièces identiques pour montrer à quel point elles sont différentes.” Il comprend bien que la façon dont la pièce interagit dépend de son contexte proche : si elle donne sur l’extérieur, si elle est mitoyenne, si elle n’a pas de plafond, si elle communique avec quatre autres espaces. Il rejette cependant la hiérarchie des espaces. Ici encore l’idée est belle mais elle ne se réalise pas. L’auteur indique que pour pallier le manque d’intimité généré par des espaces flexible il crée une pièce secrète qui ne serait alors accessible que par la chambre du propriétaire. Tout est dit, l’espace est défini, il ne nous reste plus que 14 espaces. S’en suit un chemin évident vers la salle de bain, puis le salon
164
Plan de la maison KNMS de Diener et Diener. Fragmentation : flexible
figure 1
Plan de la maison «neutre» de Eric Lapierre. Fragmentation : 16 espaces aussi flexibles qu’inapropriables.
figure 2
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qui prend place dans ces trois espaces en enfilades et ainsi de suite. La tentation de créer un pareil système pour répondre au rejet du fonctionnel est grande, mais elle ne constitue qu’une réponse partielle au problème. Car comme on a pu le voir dans les deux exemples précédents, ces espaces se veulent adaptables et appropriables sont finalement inadaptés et difficilement appropriés. Les espaces doivent se créer en fonction de l’action qu’ils abritent afin de répondre à leur nécessité de bonne utilisation, le salon de musique doit avoir des parois acoustiques, la bibliothèque rejette la lumière directe, le trampoline a besoin d’une grande hauteur sous plafond. Dans l’exercice que nous avons développé sur la réduction du pourcentage de fonctionnel (figure 3, ci-contre) l’hyper-spécialisation de ces espaces peut également constituer un frein, une limite. Dans le logement de Emile et Lucie qu’ils partagent avec Paul, l’espace central est un espace sacré c’est le cœur du logis, l’entrée débouche sur un espace tapissé de livres du sol au plafond, la salle de jeux et l’espace de réception communiquent afin de servir au mieux les soirées que Emile et Lucie adorent par-
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Plan type d’un appartement entre mitoyens, 8m x 12m soit 96m2
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tager avec leurs amis. Ce même logement pourra-til convenir à Martine, Yann et Victor ? Le logement aseptisé du post-modernisme, blanc, neutre, appropriable, vide, froid, fonctionnel.
S’opposant au logement nouveau, vivant, coloré, spécialisé, approprié, rempli, chaud, sensationnel ? L’adaptabilité, la flexibilité, l’appropriation d’un appartement sont des critères primaires et essentiels dans la conception d’une habitation. Mais il ne s’agit pas ici uniquement de répondre à l’envie ou au mode de vie précis de l’habitant. Il s’agit de réintroduire dans nos demeures la part que la société a jugée inefficace et a bannie de nos logis sans même que l’on s’en aperçoive : la part de sensation, de création, d’inutile, de jeux, de rêve, en réalité la part qui nous échappe.
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« Et voici que je suis devenu un dessin d’ornement Volutes sentimentales Enroulement des spirales Surface organisée en noir et blanc Et pourtant je viens de m’entendre respirer Est-ce bien un dessin Est-ce bien moi. » Pierre Albert-Birot
Mémoire de deuxième cycle universitaire 2019-2020
Faculté d’architecture la Cambre-Horta