DE LA CREATIVITE & DE L'AUTISME - Mémoire de fin d'études

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de la créativité et de l’autisme MÉMOIRE DE FIN D’ÉTUDES par Alexandre de CONTES Master Management du Design & de l’Innovation CFA de l’École de Design Nantes Atlantique

Conception graphique : Alexandre de CONTES Tous droits réservés © Image de couverture “Analytical and creative brain”, Designed by Freepik.com © Logo “CFA Créations & Innovations Industrielles”, L’École de Design Nantes Atlantique © Quatrième de couverture, par Alexandre de CONTES © C.BROWN, C. M. SCHULZ «Snoopy» Première édition, Mai 2016 Imprimé par



Abstract



Abstract The aim of this thesis is to consider the autism in the design process like an opportunity to discover another way to think. To deal with autism, it’s also to deal with the seclusion within. Both a psychic and social seclusion. Based on this fact, it is the responsibility of architects and spacial designers not to suggest a place which could lock up these users again. However, the risk remains in locking-up those people inside a label, putting them apart. “Design for all” or “universal design” and sometimes called “inclusive design” was created in order to tend to the meaning of the design which would take care of all users considering all their needs. But what if some of them are so marginalised by the society that they couldn’t be considered so far ? Marginal uses which then increase complexity of an object or a space in their context of use. What if design took into account marginal uses for the benefit of a real innovation for all ?

KEYWORDS Autism, autistic spectrum, ASD, pervasive developmental disorder, PDD, neurological disorder, Asperger’s syndrome, social development disabilities, repetitive behaviour, stereotypy, compulsive, sameness, restricted behaviour, communication lacks, synaesthesia, hypersensitivity, sensory abnormalities, cognitive approach, behaviourism, behavioural interventions, TEACCH, ABA, splinter skills.


Elijah, photog raphie par Timoth y Archiba ld, 2013.


Merci ! remerciements Je tiens à remercier toute l’équipe pédagogique du cursus Management du Design et de l’Innovation pour son soutien et son suivi. Les abonnés du forum de l’association Asperanza qui ont activement répondu à mes sollicitations et m’ont aidé à mieux comprendre mon sujet. À ma famille et tout particulièrement à ma conjointe pour sa patience et pour avoir gardé confiance en moi.



AVANT PROPOS


Auteur inconn u. Oeil de Caïn reflétan t les barreau x d’une cellule,


SUJET IA LE D U IT IN E E ID ' lques st, en que e c e t is t u une peine Et r e a ndamne a les o c e r t e sortes, , f ermement ou en iales double d h ysiologiques et soc p s e e c ontraint rivation d ent a la p u it st b su se liberte

AVANT PROPOS Les réflexions développées autour de l’autisme sont issues du thème de l’enfermement .

Thème préliminaire qui m’a conduit à m’orienter vers des champs de recherches aussi étendus que variés. Réfléchir sur l’enfermement, c’est ainsi réfléchir à notre condition, à notre société civile et aux enjeux qui s’y rattachent. Physique, voulu, contraint, normal, punitif, spirituel, juste, psychique, social, etc. autant d’adjectifs qui définissent des traits de l’enfermement. Parmi ces traits qui abondent sur cette notion, le trait psychique représentait une voie pertinente qui m’a permis de trouver mon sujet. Trouver le sujet qui me ressemble, en ce qu’il bouscule d’a priori et trouver le sujet qui rassemble, en ce qu’il soulève d’enjeux essentiels, sociaux et humains. D’aucuns auront qualifié ce choix de risqué. Le péril d’un écueil est bien réel si la réflexion et les investigations sur le sujet n’étaient que superficiellement explorées et si ces recherches mènent à me perdre dans des méandres qui n’aboutiraient à aucun projet in fine. Mais c’est aussi cette insécurité, cette tension, cette absence d’intuition, d’idée et de volonté préalable qui m’ont convaincu de l’important potentiel de ce sujet pour conclure mon cursus de designer. Il m’importe désormais de vous souhaiter une lecture de ce mémoire aussi agréable qu’utile.



TABLE des matières



TABLE des matières INTRODUCTION

21

PA R T I E 0 | C O N T E X T E QU’EST-CE QUE L’AUTISME(S) ? 1. Une définition plurielle pour un long parcours de compréhension 1.1. Formulations de définitions et origines historiques 1.2. Définition & sémiologie clinique 1.3. Multiplicité des typologies d’autisme 1.4. Syndrome d’Asperger et autisme de haut niveau 1.5. Définitions et explications de l’autisme par Josef Schovanec

25 35 39 41 44

2. Singularité cérébrale et perception particulière 2.1. Singularité du fonctionnement cérébral 2.2. Une perception du monde altérée 2.3. Le cas de la synesthésie 2.4. Un monde trop rapide 2.5. La pensée en images

46 47 50 51 53

3. Des origines au diagnostic jusqu’à la prise en charge 3.1. Origines des troubles du spectre autistique 3.2. Diagnostiquer un TSA ou un TED chez l’enfant 3.3. La prise en charge – Approches éducatives 3.4. La prise en charge – Structures d’accueil 3.5. Un diagnostic différent chez l’adulte

55 57 59 63 66

4. Données clés et pourquoi l’invasion n’est pas chinoise. 4.1. Données « épidémiologiques » 4.2. Prévalences 4.3. De l’intérêt des données pour le designer

67 69 71

Appendice 1 « Étiqueter l’autisme » : mon regard sur la neurodiversité

73


[ TABLE DES MATIÈRES ]

P R O B L É M AT I Q U E

80

PA R T I E 1 | C E T I D É AT E U R H O R S - N O R M E COMMENT LE DESIGN PEUT-IL APPRENDRE DE L’AUTISTAN ? 1. Apprendre l’Autistan 1.1. Vision d’une altérité culturelle singulière 1.2. Observer ou la question des caractéristiques singulières 1.3. Entrer en contact ou la question de faire connaissance 1.4. S’entendre ou la question de l’honnêteté et de l’intégrité

83 85 87 89

2. Est-il raisonnable de ne pas éradiquer l’autisme du secteur créatif ? 2.1. Un syndrome handicapant et «capacitant» à la fois 2.2. Talents et éclats de compétences 2.3. La pensée en images, un atout dans l’association d’idées

92 93 94

3. Raisonnement autistique et management créatif 3.1. La créativité 3.2. La réunion créative 3.3. Les théories créatives et la place d’un « knowledger » hors-norme 3.4. Ne pas pratiquer, ni saisir le second degré, un atout dans la communication projet ?

97 100 102 103

Appendice 2 « Usages, us et usure » : note sur cet usager et son objet

105

PA R T I E 2 | C E T U S A G E R H O R S - N O R M E COMMENT LE DESIGN PEUT-IL CATALYSER SON AUTONOMIE ? 1. Catalyseur d’autonomie ou de confort ? 1.1. L’habitat personnel ou la question de s’abriter, se reposer, résider 1.2. Les repères spatiaux ou la question de se repérer, s’orienter 1.3. Travailler et réfléchir ou la question de se concentrer, d’étudier

113 115 117

2. Le design comme levier de transition douce Le design inclusif et le design «for all»

120


[ TABLE DES MATIÈRES ]

PA R T I E 3 | C E T I N S P I R AT E U R H O R S - N O R M E L’AUTISME PEUT-IL ÊTRE VECTEUR D’INNOVATION(S) POUR TOUS ? 1. Les normes actuelles et leur prise en compte des usagers 1.1. Le contexte normatif général 1.2. Contexte normatif lié aux handicaps 1.3. Dans les faits 1.4. Contexte normatif concernant des éléments sensoriels : éclairage et acoustique

124 125 126 128

2. Aspects normatifs et innovation de rupture 2.1. L’innovation de rupture à l’écoute des usagers 2.2. L’innovation de rupture par la marginalité

3. L’autisme, une faculté de détection des signaux faibles ?

130 131 132

C O N C LU S I O N S

133

BIBLIOGRAPHIE

135

[ 19 ]



T S

R A

! T

INTRODUCTION


INTRODUCTION Selon une des définitions du CNRTL, l’espace est caractérisé comme une étendue, une surface déterminée ou encore comme un intervalle si l’on ne prend en compte que deux dimensions. Les terminologies liées à la conception en architecture d’intérieur et en design d’espaces sont directement issues de la notion d’enfermement, c’est à dire la situation d’un objet ou d’un sujet lorsqu’il est placé dans espace déterminé, c’est-à-dire borné. Ainsi, cloison et clôture sont les termes évidents de l’enfermement. Se pencher sur l’autisme, c’est se pencher sur la dimension spatiale en s’interrogeant sur le devenir d’une personne avec autisme dans un lieu. C’est également traiter d’un sujet où l’enfermement est psychique et social. Une double peine d’enfermement. Fort de ce constat, il incombe aux concepteurs d’espaces de ne pas proposer de lieu qui pourrait enfermer une troisième fois ces usagers. Il convient également de ne pas les enfermer à nouveau dans une catégorie à part entière, ce qui ajoute un enjeu, une dimension supplémentaire. Ces enjeux cumulés peuvent être alors un véritable Rubiks-Cube tant il faut savoir faire le deuil d’une facette du problème pour se voir afficher plus de nuances à une autre facette. Le courant du «design for all» ou «universal design» et parfois appelé «inclusive design» a été créé afin de tendre à une acception de la conception qui prendrait en compte tout type d’usager. Ce design inclusif pose le problème d’une prise en compte d’usages marginaux qui augmentent alors les modalités (et du même coup la complexité


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de la conception) d’un objet ou d’un espace dans leur contexte d’utilisation. Aussi louable soit-il, ce principe, dans son application, mène bien souvent à ajouter des contraintes supplémentaires par adjonction de fonctions devant toutes être intercompatibles. Qu’en serait-il d’une conception prenant en compte des usages marginaux au bénéfice d’une réelle innovation pour tous ?

Dans quelles mesures un esprit hors-norme peut-il être vecteur d’innovation et de créativité ? Se concentrant sur cette problématique, ce mémoire de fin d’études tâche de mettre en lumière le caractère positif de l’autisme pour et par la créativité. Un autisme synonyme de diversité, de personnalité et faisant montre de créativité, un autisme iconoclaste donc. En premier lieu et après un «tour» d’horizon, volontairement exhaustif du sujet, il s’agit d’exposer en quoi le langage autistique peut recéler de forces dans une démarche de créativité et de design. La seconde partie pose sommairement la question de ce que le design a pu apporter à ces usagers hors-normes et s’interroge, de manière critique, à la position du designer vis-à-vis d’une frange de la population marginalisée en ce qu’il a pu lui apporter notamment en matière d’autonomie. La dernière partie s’attache à détailler le contexte normatif lié aux handicaps et à proposer des éléments de réponse à la question suivante: les besoins spécifiques des usagers avec autisme peuvent-ils amorcer des changements innovants à la faveur de tous les usagers ?

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PARTIE 0 | CONTEXTE

QU’EST-CE QUE L’AUTISME(S) ?


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Premières pages d’un exemplaire original de Dementia praecox oder Gruppe der Schizophrenien d’Eugène Bleuler (1911)


QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

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1. Une définition plurielle pour un long parcours de compréhension Au cours de l’histoire, le terme « autisme » a été employé sous plusieurs contextes. Notamment en première instance afin de décrire un trouble singulier et infantile du comportement observé par Eugène Bleuler, un des pères fondateurs de la psychiatrie moderne1. Un terme réemployé par la suite par Léo Kanner2 et Hans Asperger3 pour nommer des enfants présentant des troubles particuliers se manifestant par un repli apparent du sujet sur lui-même. Le terme « autisme » a donc renvoyé tour à tour à des acceptions qui diffèrent. Ces acceptions trouvent toutes, au cours de l’histoire, leurs défenseurs et leur école propre (psychiatrie, comportementalistes, médecins, neuropsychologues, etc.) Ces « camps » se sont battus longtemps en l’absence d’un cadre défini en haute instance 4. La compréhension et la prise en charge de ces troubles ont été affublées d’un terrible retard faute d’un consensus entre ces écoles de pensée.

1.1. Formulations de définitions et origines historiques L’autisme est un trouble découvert tardivement. Les premiers travaux de recherches et de tentatives de définition ne datent que du début du XXe siècle. En 1911, le psychiatre suisse Eugène Bleuler, ancien disciple de Jean Martin Charcot à la Salpêtrière, publie Dementia praecox oder Gruppe

1 2 3

4

Eugen Bleuler (1857-1939) est un psychiatre suisse. Il est connu pour avoir inventé et introduit dans le vocabulaire psychiatrique les termes de schizophrénie et d’autisme. Leo Kanner (1894-1981) est un pédopsychiatre américain d’origine austro-hongroise. Il est connu pour avoir défini le tableau clinique de l’autisme infantile précoce. Hans Asperger (1906-1980), est le pédiatre autrichien qui a donné son nom au syndrome d’Asperger. Il a établi en 1943 la description d’une « psychopathie autistique de l’enfance » ou « Die ‘Autistischen Psychopathen’ im Kindesalter » en allemand. HOCHMANN J., AUTISME, Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 5 septembre 2015. Consultable sur : http://www.universalis.fr/encyclopedie/autisme/

PARTIE 0 | CONTEXTE


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QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

der Schizophrenien5 ou La démence précoce ou le groupe des schizophrénies en Français, dans lequel il définit ce que l’on appelait jusqu’alors « démence précoce » par le terme de schizophrénie qui signifie textuellement « fragmentation de l’esprit »6. Il contribuera à élaborer une classification clinique des formes de schizophrénie et sera un des pionniers de la psychopathologie7. Dans ce même ouvrage, il présente ce qu’il appelle autisme comme une des trois stratégies que déploie l’esprit pour se confronter à la réalité en précisant que l’autisme représente « l’écarter » ou « l’ignorer » et le présente comme un signe secondaire de la sphère instinctivo-affective provenant de l’inconscient.8 Le mot autisme qu’il formule alors est emprunté du latin autismus qui Portrait d’Eugène Bleuler en 1895

lui-même provient du grec par son préfixe autos(αὐτος) « soi-même » auquel a été adjoint le suffixe

latin –ismus qui est employé en latin scientifique dans la construction d’un nom masculin qui indique une particularité ou une maladie. Selon Bleuler, l’autisme associé au délire paranoïde d’une part et à la dissociation mentale d’autre part forme la schizophrénie. Cette idée va faire école jusque dans les années 40.

5

BLEULER E., Dementia Praecox ou Groupe des schizophrénies, Dementia praecox oder Gruppe der Schizophrenien (1911), Paris, Coédition GREC/EPEL, 1993, 671 pages.

6

CNRTL Portal lexical, Définition de « schizophrénie » [en ligne], consultée le 5 septembre 2015. Consultable sur : http://www.cnrtl.fr/definition/schizophrénie

7

POSTEL J., BLEULER EUGEN - (1857-1939), Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 5 septembre 2015. Consultable sur : http://www.universalis.fr/encyclopedie/eugen-bleuler/

8

ELLENBERGER H-F., Essai sur le syndrome psychologique de la catatonie, Paris, L’Harmattan, 2004, 129 pages, p.12.

PARTIE 0 | CONTEXTE


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De nombreux individus avec autisme sont alors considérés comme fous et sont internés dans des hôpitaux psychiatriques où ils sont souvent sujets de maltraitances et de traitements, tels que la lobotomie transorbitaire illustrée ci-dessous, au même titre que d’autres sujets atteints de psychopathologies graves.9

Photographie du Dr. Walter Freeman “opérant” un patient. Source inconnue, USA, circa 1940.

9

HOCHMANN J ;, Histoire de l’autisme, Paris, Odile Jacob, 2009, 528 p., p.373.


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QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

Hans Asperger en observation d’un enfant avec autisme, Université de Vienne, Autriche, Circa 1930. Crédit : Dr. Maria Asperger Felder

“ Tout ce qui sort de la norme, et donc considéré comme anormal, n’est pas nécessairement inférieur.” Hans Asperger (1938) 10

10

ATTWOOD T., Le syndrome d’Asperger : guide complet, Paris, Éditions De Boeck, 2010, première édition 2009, 487 pages, p.1.

PARTIE 0 | CONTEXTE


QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

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En 1943, le psychiatre américain d’origine autrichienne Léo Kanner rencontre dans son service ces enfants étranges, comme coupés du monde et fait une découverte extraordinaire. Il découvre que ces enfants sont, en réalité, intelligents et que certains ont même un vocabulaire étonnant et d’autres sont des prodiges en calcul mental, tous ont © Crédit : John Hopkins University

une incroyable mémoire. Il étudie et s’attache à décrire leurs activités et leurs gestes très répétitifs. Il écrit alors « ces enfants ont un désir anxieux et obsessionnel d’assurer l’immuabilité des choses ».11 Léo Kanner émet la théorie selon laquelle ces enfants viendraient au monde avec « une incapacité biologique innée à développer des contacts affectifs ».12

13

Cette conclusion est

Portrait de Léo Kanner en 1955

très audacieuse pour cette époque, car elle admettait que l’autisme n’est pas une conséquence, mais bien une cause, autrement dit que l’autisme ne serait pas une névrose qui se forme, mais bien un trouble développemental congénital. Cependant, il reviendra plusieurs années plus tard, en 1956, sur ce caractère inné et introduira malgré tout une notion d’influence de l’environnement parental et notamment une carence affective de la mère qu’il qualifiera de « emotional refrigeration » qui veut littéralement dire « réfrigération émotionnelle »14. En 1944, Hans Asperger va se passionner également pour ces petits génies enfermés en eux-mêmes. Il démontre qu’ils sont supérieurement intelligents et fait tout pour rééduquer ces enfants que l’on nommera

11

KANNER L., EISENBERG L., Early infantile autism 1943–1955, The American Journal of Orthopsychiatry, États-Unis, 1956, p. 607.

12

CHAPIREAU F., CONSTANT J., DURAND B., Le handicap mental chez l’enfant. Une synthèse neuve pour comprendre, agir, décider, Paris, Éditions ESF, 1997, 211 pages, p.112.

13

AMY M-D., Faire face à l’autisme, Paris, Éditions Retz, 1995, 175 pages, p.21.

14

IRWIN J., MACSWEEN J., KERNS K., History and Evolution of the Autism Spectrum Disorders in. International Handbook of Autism and Pervasive Developmental Disorders, États-Unis, Springer-Verlag New York, 2011, 555 pages, p. 4.

PARTIE 0 | CONTEXTE


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QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

autistes Asperger. Contrairement à Kanner, Asperger incite le contact permanent de l’entourage éducatif.

15

Il déclarera ainsi : « Nous croyons

que la nature d’une personne ne se révèle de façon authentique qu’à celui qui vit avec elle. »16

© Crédit : Francois Leclaire/Sygma/CORBIS

Vingt ans plus tard, Bruno Bettelheim, psychiatre américain et fondateur de l’école d’Orthogénie de Chicago, publie en 1967 l’ouvrage « La forteresse vide »

17

qui sera lu

partout dans le monde et en particulier en France. Théoricien de « la mère réfrigérateur », il compare dans son livre l’enfant autiste à un prisonnier des camps de la mort et les mères aux tortionnaires de ces camps.18 Portrait de Bruno Bettelheim en 1975

19 20

Il dit que

les enfants autistes ont été soumis à la cruauté de mères froides et sans amour et émet le postulat

que c’est par la présence de parents qui nient l’existence de leur enfant, que cet enfant développe un comportement autistique qu’il apparente à une psychose. 21 Affirmation reprise de nos jours par des représentants de cercles discutables tels que « le surmentaliste » Jean-Pierre Marie, qui, en 2008, paraphrase même Bruno Bettelheim en affirmant : « Possédant un état mental fragile et étant peu formé depuis leur naissance, les enfants autistes se replient instinctivement sur eux-mêmes pour éviter d’affronter un monde qu’ils trouvent effrayant »22. 15

HOCHMANN J., Histoire de l’autisme, Paris, Odile Jacob, 2009, 528 p., p. 258.

16

Ibid.

17

BETTELHEIM B., La forteresse du vide, Étas-Unis, Gallimard,1969, 592 p.

18

TYTELL P., BETTELHEIM BRUNO - (1903-1990), Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 12 septembre 2015. Consultable sur : http://www.universalis.fr/encyclopedie/bruno-bettelheim/

19

AMY M-D., Faire face à l’autisme, Paris, Éditions Retz, 1995, 175 pages, p.23.

20

BERSIHAND G., Bettelheim, Recueil de citations et analyse, Paris, Édité par Robert Jauze, 1977, 199 pages, pp. 15, 95 et 101.

21

Ibid, p. 97

22

MARIE JC., L’ére du surmental arrive…, Paris, BOD, 2008, 366 pages, p.179.

PARTIE 0 | CONTEXTE


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En France, l’éducateur Fernand Deligny23 est également persuadé en toute bienveillance de guérir ces « enfants mutiques » et les isole loin des contraintes dans les Cévennes, mais ce sera aussi un échec.24 La plupart de ces enfants ne parviendront jamais à s’ouvrir ni à communiquer, certains termineront malheureusement leur vie en hôpital psychiatrique.

L’abri de l’aire de séjour du Serret à Thoiras, créée par Fernand Deligny, France, circa 1976. Crédit : Alain Cazuc

23

Fernand DELIGNY (1913-1996) ancien instituteur français devenu éducateur. Travaux et méthodes sujets à controverse, il demeure pourtant une référence de l’éducation spécialisée. Il est notamment à l’origine des lieux alternatifs de l’éducation spécialisée que l’on regroupe sous le terme générique de « lieu de vie ».

24

HOCHMANN J., Histoire de l’autisme, Paris, Odile Jacob, 2009, 528 p., pp. 403-406.


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Portrait d’Eric Schopler, USA, Circa 1981. Crédit inconnu.

Lorna Wings, G-B., en 2011. Crédit : David Levene for The Guardian

Photographie de Margaret L. Bauman, USA, Circa 2011. Crédit The Autism Research Foundation


QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

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À la même époque, aux États-Unis, on considère que les parents ne sont que des boucs émissaires. En 1966, Eric Schopler25 un psychiatre américain, est choqué par l’approche de Bettelheim, il réfute et récuse alors l’hypothèse d’une pathologie acquise dans le contexte relationnel et incite l’omniprésence parentale.26 Il participe au développement de la méthode éducative qui sera nommée par l’acronyme TAECCH pour Treatment and Education of Autistic and related Communication Handicapped Children, ou Traitement et éducation des enfants autistes ou souffrant de handicaps de communication apparentés en français et dont « l’objectif est d’amener l’enfant, par des interactions successives, à de comportements de mieux en mieux adaptés. »26 En 1981, Lorna Wings, une psychiatre britannique qui s’intéresse depuis les années 60 à l’autisme, reprend les travaux de Hans Asperger, et apporte les preuves d’une unité des spectres sous une triade des déficiences27 qui sera la base de la définition clinique qui fait autorité de nos jours. En 1985, deux chercheurs américains, Margaret Bauman 28 et Thomas Kemper autopsient le cerveau d’un jeune autiste de 29 ans et montrent une anomalie indiscutable par rapport à un individu normal, certaines de ces anomalies ne pouvant être que de cause congénitale.29 Dorénavant, et c’est une affirmation définitive, on nait autiste, on ne le devient plus.

25

Eric Schopler (1927-2006) est un psychologue américain reconnu comme un pionnier dans la recherche sur l’autisme et dont les recherches ont mené à développer la méthode TEACCH, une méthode éducative basée sur une approche comportementaliste.

26

AMY M-D., Faire face à l’autisme, Paris, Éditions Retz, 1995, 175 pages, p.37. WING L., Asperger’s syndrome: a clinical account in. Psychological medicine, vol. 11, n°1,‎ Grande-Bretagne, 1981, pp. 115-129.

27

28

M. L. BAUMAN est une neuro-pédiatre et chercheuse Américaine. Elle est l’une des pionniers en matière de recherches sur les causes biologiques de l’autisme depuis plus de 30 ans. Elle a également fondé The Autism Research Foundation (TARF), The Autisme Research Consortium (TARC), Learning and developmental Disabilities and Rehabilitation Services (LADDERS) et The Autism Treatment Network (ATN). Elle a reçu en 2011 un prix d’honneur en distinction de plus de 30 années de contributions dans la recherche sur le champ de l’autisme. (Source : site du Massachussetts General Hospital - http://www.massgeneral.org/ about/newsarticle.aspx?id=2932 – consulté le 20 septembre 2015)

29

BAUMAN M., KEMPER T., The neurobiology of Autism, États-Unis, JHU Press, 2005, 404 pages, pp.61-63.

PARTIE 0 | CONTEXTE


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QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

1.2. Définition & sémiologie clinique a. Définition clinique Les Troubles du spectre autistique (TSA) désignent des troubles neurodéveloppementaux et forment un ensemble de troubles précoces du développement aussi appelés troubles envahissant du développement (TED). Ils sont caractérisés par une altération qualitative, totale ou partielle des facultés d’interactions sociales réciproques ainsi que de la communication et se manifestent également par un comportement altéré (au caractère restreint, stéréotypé et répétitif). Ces troubles apparaissent avant l’âge de 3 ans et persistent à l’âge adulte. À la lumière des récentes recherches en la matière, ces troubles auraient une origine génétique (mais pas uniquement) entrainant une anomalie de fonctionnement des centres cérébraux dont la fonction est de rassembler les informations de l’environnement, de les décoder et de réagir de façon adaptée. Par conséquent, les personnes ayant un TSA semblent isolées dans un monde intérieur 30. Les syndromes associés aux différents TED et TSA sont décrits dans les classifications diagnostiques internationales : CIM-10 et DSM-IV.31 Selon Nadia Chabane, pédopsychiatre à l’Hôpital Robert-Debré à Paris, les troubles du spectre autistique regroupent des manifestations cliniques hétérogènes incluant des particularités cognitives (déficience, compétences hors-normes), sensorielles (perceptions distinctes des stimulations visuelles, auditives, tactiles), motrices et émotionnelles, mais tous les individus avec TSA partagent un handicap plus ou moins sévère de la compréhension et des compétences sociales.32 S’agissant bien d’un « spectre » autistique, il y a un continuum de particularismes autistiques. Autrement dit, il y a autant de personnalités autistiques qu’il y a d’individus avec autisme. 30

INSERM Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale, Dossier d’information Autisme [en ligne], France, 2013. Consultable sur : http://www.inserm.fr/thematiques/neurosciencessciences-cognitives-neurologie-psychiatrie/dossiers-d-information/autisme

31

ATIH Agence Technique de l’Information sur l’Hospitalisation, Classification statistique internationale des maladies et des problèmes de santé connexes CIM-10 FR à usage PMSI, France, ATIH, 2015, Bulletin Officiel n°2015/9bis, 888 pages, pp.222-223. Consultable en ligne : http://www.atih.sante.fr/sites/default/files/public/content/2665/cim10_2015_final_0.pdf

32

CHABANE N., État des connaissances dans l’autisme, in. Tribunes Parlementaires Européennes, France, Avril 2012, p. 20.

PARTIE 0 | CONTEXTE


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CE QUE L’AUTISME N’EST PAS : Il est courant, et parce que véhiculé comme tel dans les médias, de qualifier l’autisme comme une maladie. Or, on ne qualifie plus l’autisme comme une maladie, mais bien comme un trouble neurodéveloppemental ou encore comme un désordre neurologique entraînant un handicap.

Pour les personnes ayant un TSA, il ne s’agit pas d’en «guérir», mais bien d’apprendre à vivre et à se développer avec ce handicap. Trés peu de personnes avec TSA dans le monde ont un «syndrome savant».

une pathologie une maladie psychiatrique

on devient autiste Il s’agit d’un trouble qui est congénital

ne permet pas de compter instantanément des cure-dents tombés au sol


[ 38 ]

QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

b. Sémiologie clinique La sémiologie est la science qui consiste en l’étude des signes cliniques ou symptômes. Ainsi, – et pour digresser un peu -, le Dr. Gregory House de la série américaine éponyme est un sémiologue. En l’absence d’une sémiologie appuyée de marqueurs biologiques et phénotypiques mesurables, mais selon les critères diagnostiques actuels, voici les principales manifestations des TSA 33 : Déficience dans la communication et les interactions sociales  Altération de la compréhension et de l’utilisation des signaux et des codes sociaux  Expression gestuelle déficitaire, absente sinon maladroite et inappropriée  Difficulté à partager ses pensées et ses sentiments  Difficulté à savoir quand et comment se joindre à une conversation  Contact visuel fuyant  Manque d’intérêt pour partager ses jeux ou ses plaisirs  Absence de comportements d’anticipation (par exemple, tendre les bras lorsqu’un parent s’apprête à les prendre)  Absence de geste de sollicitation aux jeux  Absence de jeux de mimes, de cache-cache  Difficulté à interpréter les émotions caractérisées par les mimiques des interlocuteurs  Difficulté à s’exprimer verbalement Intérêts spécifiques restreints, stéréotypies et autres comportements à caractère répétitif  Intérêts spécifiques et focalisés  Utilisation inhabituelle des jouets (une attention portée à une partie du jouet, alignement…)  Intolérance face aux changements et situations nouvelles  Besoin inflexible de respecter certains rituels ou routines  Répétition mot à mot des consignes données  Mouvement répétitif du corps (balancement, agitation rythmique des mains, etc.)  Fascination pour certaines stimulations sensorielles (par exemple, regarde, touche ou sent les objets de façon excessive)  Hypersensibilités sensorielles (par exemple, intolérance aux bruits forts) Un retard intellectuel ou un retard de langage peut être ou non associé. 33

VAINCRELAUTISME (Assoc.), Principales caractéristiques d’un enfant atteint d’autisme [en ligne], rubrique thématique, Site association Vaincre l’autisme, consulté en décembre 2015. Consultable sur : http://www.vaincrelautisme.org/content/caracteristiques

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[ 39 ]

UN CONTINUUM DE CARACTÉRISTIQUES :

Déficience dans l’établissement des rapports sociaux Isolement ou repli Inconscience d’autrui Manque d’affects Jugés froids, apathiques

Déficience dans la communication verbale et non-verbale Utilisation inappropriée du langage Ton, débit, cadence monocorde inflexions étranges de la voix. Emploi d’une syntaxe jugée inappropriée, trop soutenue

Besoin de stabilité et de rituels

Problème de compréhension et d’ expressivité de la communication

Gestion du stress qui n’est souvent pas comprise

Imitation déficiente

Mécompréhension et mésusages des langages non-verbaux Non-compréhension de l’implicite, de la langue de bois

Difficultés d’intégration

Comportements atypiques et sensibilité sensorielle hors-normes

Mouvements corporels stéréotypés et inappropriés

Intérêts particuliers et restreints

Hyper et hyposensibilité et surcharge sensorielle

Maladresse, mauvaise coordination, balancements incontrôlés, «flapping»....

Un sujet de prédilection, aptitude pour les tâches répétitives

Perception et traitement des sens exacerbés. Certains sens peuvent être favorisés au dépend d’autres


[ 40 ]

Illustration du dossier “Seeing The Spectrum” de Steven Shapin pour The New Yorker, The New Yorker, USA, paru dans le numéro publié le 25 Janvier 2016. Crédit : © LEO ESPINOSA


QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

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1.3. Multiplicité des typologies d’autisme Parmi des individus avec autisme, on peut être confronté à la fois à des personnes au handicap profond, avec, par exemple une grande dépendance et une absence totale de communication verbale, jusqu’ à l’autre extrême, des personnes dont le handicap permet tout de même un certain degré d’autonomie et qui peuvent même présenter des capacités intellectuelles au moins répondant aux normes si ce n’est, dans certains cas, supérieur. Il n’y a cependant pas de déterminisme concernant le type d’autisme avec lequel une personne doit vivre, il peut évoluer, au fil de l’âge de la personne, d’un type jugé comme étant lourd, plus handicapant vers un autisme plus «léger» tel qu’asperger. Selon la Haute Autorité de Santé, les TED (Troubles envahissants du développement) se subdivisent en plusieurs catégories

34

,

classification reprenant la CIM-10 et DSM-IV de l’OMS :

- Autisme infantile - F84.0 - Autisme atypique (en raison de l’âge de survenue et/ou de la symptomatologie) – F84.1 - Le syndrome de Rett – F84.2 - Trouble désintégratif de l’enfance – F84.3 - Hyperactivité associée à un retard mental et à des mouvements stéréotypés – F84.4 - Le syndrome d’Asperger – F84.5 - Les autres TED – F84.8 et 84.9

34

HAS Haute Autorité de Santé, État des connaissances – Autisme et autres troubles envahissants du développement, Paris, HAS, janvier 2010, p.25

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QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

1.4. Syndrome d’Asperger et autisme de haut niveau Il est à noter que le syndrome d’Asperger et l’autisme de haut niveau sont systématiquement et à tort, associés au « syndrome savant ». En réalité, une poigné seulement (une cinquantaine

)

35

de personnes, dont certains avec autisme Asperger, possèdent de telles aptitudes jugées extraordinaires. Le personnage de Raymond Babbit, autiste capable de compter instantanément le nombre de cure-dents d’une boite se vidant au sol ou de compter les cartes sur une table de Black Jack, dans le film Rain Man (1988), doit être à l’origine d’un tel stéréotype.36 Les personnes autistes de haut niveau et Asperger partagent le même socle ou triade de déficiences : une altération des aptitudes à la communication, à la socialisation ou la compréhension des codes sociaux et des altérations des sphères neuro-sensorielles. Des altérations entrainant ces individus à faire montre d’étrangetés et de maladresses.37 L’âge d’apparition du langage est, semble-t-il, ce qui distingue les autistes de haut niveau et les Aspies38 chez qui il apparait précocement. Le développement qui s’en suit s’en trouve différent, mais à l’âge adulte ces différences semblent s’estomper.

35

MORISSON J., Syndrome savant, un défi à la science in. Nexus Magazine, n°76, sept-oct 2011, p. 74.

36

LEVINSON B., Rain Man, États-Unis, 1988, long-métrage, 133 mn.

37

ASPERANSA (Assoc.), Le syndrome d’Asperger et l’autisme de haut niveau [en ligne], page internet, consultée le 4 septembre 2015. Consultable sur : http://www.asperansa.org/asperger_ahn.html

38

Aspie est un néologisme employé par la communauté d’individus avec Asperger pour se qualifier.

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© Crédit : Metro Goldwin Meyer Productions

© Crédit : ETHAN HILL pour Scientific American (2005)

[ 43 ]

© Crédit : stephenwiltshire.co.uk

À gauche, un cliché “ON SET” de Rain Man de Barry Levinson (1988) avec Tom Cruise et Dustin Hoffman, à droite, un portrait de Kim Peek, un savant autiste qui a inspiré le personnage de Raymond Babbit dans Rain Man.

Ci-dessus, Stephen Wiltshire, artiste brittanique de 41 ans réalisant un paysage de New York. Stephen Wiltshire est un artiste autiste doté d’une mémoire eidétique ou mémoire absolue, c’est à dire que son cerveau est capable d’enregistrer à jamais un ensemble vertigineux de détails et d’informations, visuelles dans son cas. Il est connu pour ses paysages reproduits dans les moindres détails aprés les avoir observé qu’une seule fois en hélicoptère.


[ 44 ]

Contre-page de l’article portrait “Être comme vous est un combat” de Djénane Kareh Tager pour CLES, CLES, France, paru dans le numéro juin-juillet 2014. Crédit photographique : © Pascal ITO


QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

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1.5. Définitions et explications de l’autisme par Joseph Schovanec Josef Schovanec, philosophe, écrivain français, militant pour la dignité des personnes avec autisme et lui-même autiste Asperger, préfère dire « avec autisme » qu’« autistes », car il explique : “ Tous les autistes sont d’abord des personnes et parce qu’en France « autiste » est synonyme d’« enfant », et qu’on oublie qu’il y a aussi des adultes autistes. C’est curieux quand on y songe. Quand on dit « aveugle » ou « sourd », on ne pense pas forcément à des enfants ! ” 39 Sur les déficiences sociales inhérentes à l’autisme, J. Schovanec explique : “ Vous pouvez avoir le prix Nobel et ne pas savoir dire bonjour de manière socialement adaptée, ce sont deux facultés complètement distinctes. ” 40 Par cette analogie simple, il explique de manière concise le nœud (social) du problème posé par ce trouble du développement. Il est convenu cliniquement aujourd’hui de ne plus définir l’autisme comme une maladie, mais bien comme un trouble du développement entrainant un handicap social. Ce point est important pour aborder le sujet sans parler de « traitement », qui par essence, renvoi à la notion de remédiation et sans évoquer le terme de « malade » en qualifiant un individu avec autisme, car il s’agit bien de personnes disposant d’un esprit hors-norme au sens premier du terme. Et Josef Schovanec explique, avec malice : “ Être autiste ce n’est pas plus bizarre ni plus pathologique que d’être Japonais ou Européen. ” 41

39

SCHOVANEC J., Je suis à l’est !, France, Plon, 2012, 285 pages,

40

SCHOVANEC J., in. Le cerveau d’Hugo, REVIL S., France, FRANCE TÉLÉVISIONS, 2012, documentaire-fiction, 95 mn., 5’05’’.

41

SCHOVANEC J., in. Autisme : une place parmi les autres ?, JULIENNE M. et BLANCHARD M., France, ARTE, 2015, documentaire, 91mn, 42’12’’.

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QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

Note sur le terme « neurotypique » Ce terme est utilisé pour désigner une personne qui ne présente pas de troubles autistiques, mais qui possède des facultés neurologiques dites « typiques », car rentrant dans la norme communément admise. Il évite les connotations négatives des termes « normal » et « valide ». Il n’est pas à confondre avec normopathe qui caractérise en psychopathologie, une personnalité qui se complait dans la normalité ou le normalisme excessif 42.

Évocation illustrative de la machinerie cérébrale. Source: GettyImage

42

PAUL, L’origine des souffrances de la planète identifiée : les humains normaux ! [en ligne], Billet, Blog L’Échelle de Jacob, publié le 28 mai 2012, consulté le 9 octobre 2015. Consultable sur : http://echelledejacob.blogspot.fr/2012/05/lorigine-des-souffrances-de-la-planete.html

“ À votre avis un portefeuille, c’est quoi ? C’est un arbre. C’est comme ça que les enfants autistes comprennent le langage. À mon avis, c’est une moindre tare que la conception du portefeuille chez un certain nombre d’hommes politiques. ”

Josef Schovanec

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2. Singularité cérébrale et perception particulière Les individus avec autisme ne ressentent pas leur environnement comme les neurotypiques. Ils ont des modes de perception des sons et des expressions des visages différents des autres.

2.1.  Singularité du fonctionnement cérébral Une étude de chercheurs belges et américains de 2013 43 a montré que chez un individu avec autisme les petits réseaux neuronaux, en ce qu’ils relient des zones peu éloignées du cerveau, sont beaucoup plus nombreux et privilégiés au détriment des plus grands réseaux de connexion, amoindris. En outre, l’hyperconnexion neuronale au niveau des zones adjacentes du même lobe cérébral chez les autistes permettrait ainsi le développement horsnorme de facultés dans des domaines bien spécifiques. Ce que nous dit cette étude c’est que cette lacune de connexions entre deux régions cérébrales éloignées participerait notamment aux difficultés pour l’individu ayant un TSA de décoder les expressions faciales en les associant à des émotions. De la même manière, les individus autistes ont de grosses difficultés à comprendre l’ironie, le second degré, l’humour et parfois même les adages, car il faudrait que leur esprit associe un signifiant qui n’a valeur que de symbole pour le signifié. Par exemple, les expressions « mettre la table » ou encore « tailler une bavette » ne trouveront qu’une résonnance littérale chez l’individu avec autisme. La citation ci-contre44 montre bien que Josef Schovanec, malgré son autisme et grâce à la faculté naturelle qu’a le cerveau humain de créer de nouvelles connexions par stimulation, ce que l’on désigne par « Plasticité cérébrale », a su développer la capacité à formuler une locution abritant un concept figuré, le concept de portefeuille financier que sous-tend sa plaisanterie. 43

TAQUET M., PETERS J., Le réseau cérébral fonctionnel des enfants atteints d’autisme : redondance et déconnexion, Publication scientifique, Belgique, ICTEAM institute, université catholique de Louvain, Juillet 2013.

44

TEDxAlsace, SCHOVANEC J., La comédie de la normalité, intervention publique filmée, Grande Salle de l’Aubette, Strasbourg, 13 février 2013, 19 min. Consultable sur : http://www. tedxalsace.com/speaker/josef-schovanec/


[ 48 ]

QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

2.2.  Une perception du monde altérée Une altération du synchronisme des informations sensorielles Une étude des chercheurs de l’université de Vanderbilt, aux ÉtatsUnis et publiée en 2014, vient compléter l’étude belge citée plus haut. En effet, ils se sont également concentrés sur la manière dont les informations, cette fois sensorielles, sont décodées et traitées par le cerveau d’un individu avec autisme.45 D’après leur publication dans Journal of Neurosciences, les altérations en matière de langage et de communication seraient liées à une désynchronisation dans le traitement des signaux auditifs d’une part et visuels d’autre part. “ Ce qui se passe chez ces enfants est un peu similaire à ce que vous percevez en regardant un film étranger mal doublé, avec un décalage entre le mouvement des lèvres et les sons.” Pr. Mark Wallace PhD, directeur de l’étude.

Pour illustrer ce phénomène, Marie Gomot, docteure chargée de recherche à l’UMR930 Inserm-Université François-Rabelais à Tours a déclaré qu’un de ces patients avec autisme lui a un jour dit : « Si je vous regarde, je n’arrive plus à comprendre ce que vous me dites ».46

45

STEVENSON R., SIEMANN J., SCHNEIDER B., EBERLY H., WOYNAROSKI T., CAMARATA S, WALLACE M., Multisensory Temporal Integration in Autisme Spectrum Disorders, Canada / États-Unis, The Journal of Neuroscience, N°34(3), 15 janvier 2014, pp. 691-697. Consultable sur : http://www.jneurosci.org/content/34/3/691.abstract

46

GARDIER S., Son et image coïncident mal dans le cerveau des autistes [en ligne], Paris, LeFigaro.fr, janvier 2014. Consultable sur : http://sante.lefigaro.fr/actualite/2014/01/27/21903-son-imagecoincident-mal-dans-cerveau-autistes

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The neural bases of multysensory processes, The Journal of Neuroscience, É.U., 2014

L’Autism Center of Excellence de San Diego (États-Unis) a observé ,en 2011 sur des IRM fonctionnelles, un défaut de synchronisation entre les zones des deux hémisphères cérébraux impliquées dans le langage.47 Cette découverte faite par l’équipe dirigée par le Dr. Eric Courchesne, neurobiologiste américain dont les études portent sur l’autisme, est une excellente nouvelle, car elle permettrait de disposer d’un marqueur biologique permettant de déceler l’autisme très tôt, lors de diagnostics postnatals.

Dr. VUAILLE B., Des troubles de la synchronisation cérébrale dans l’autisme, le Quotidien du médecin, Article du 23 juin 2011, consulté en décembre 2015

47


[ 50 ]

1

Captures du court-métrage Sensory Overload de Miguel Jiron. L’approche sensible de Miguel Jiron, graphiste, illustrateur et motion designer américain, est au service du message véhiculé par son court métrage aussi simple soit ce message. Le travail sur l’aspect « animation à la volée » m’a rappelé celui de Shin’ichirō Watanabe, dessinateur et réalisateur japonais connu en occident pour avoir réalisé en 2003 « Histoire d’un enfant », un épisode de la mini-série Animatrix de Andy et Lana Wachowsky. Ces coups de crayons encore animés de nervosité, de sursauts et non-effacés, se superposent, traduisant, selon moi, l’effet de superposition des informations sensorielles subies par un enfant autiste surprit par une telle crise.

Appelées surcharges sensorielles, ces phénomènes synesthésiques peuvent être perçus comme des agressions aigües et comme des expériences particulièrement traumatisantes surtout pour un enfant avec autisme. Comme l’illustrent les courts-métrages « Sensory Overload »1 du réalisateur mexicain Miguel Jìron et « Listen »2, la violence de ces crises peut amplifier les symptômes de repli de l’enfant.

1 JIRON M., Sensory Overload, Mexique, 2012, court-métrage animé, 2 mn 25s. Consultable en ligne : https://vimeo.com/52193530

2 BERNARD A., FERNANDEZ M., Listen, États-Unis, 2014, court-métrage animé, 2 mn 40s. Consultable en ligne : https://vimeo.com/103697707

Capture du court-métrage Listen d’Alexander Bernard et Marisabel Fernandez. Il s’agit d’un projet de fin d’études où ont été mêlées prises de vues réelles et animation. Les motion designers ont imaginés une scène de vie à travers les yeux d’un enfant autiste. Les concepteurs ont souhaité illustrer l’univers synesthète dans lequel peut être plongé un enfant autiste et ainsi inspirer plus de 2 tolérance à l’égard de ces enfants qui doivent faire face aux surcharges sensorielles.


QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

[ 51 ]

2.3.  Le cas de la synesthésie et de la surcharge sensorielle Certains sens peuvent être, à cet égard, exacerbés ou amplifiés, voire mélangés comme dans le cas de la synesthésie dont beaucoup d’autistes font l’expérience. La synesthésie est un phénomène d’origine neurologique où deux voire plusieurs sens se combinent. Ainsi certains autistes synesthètes, le plus souvent « de haut niveau», comme Daniel TAMMET48 auteur anglais, ont la faculté de percevoir la couleur d’un nombre ou d’une lettre. Il s’agit de la forme la plus courante de synesthésie nommée graphèmes-couleurs.49

“ La plus fameuse suite numérique de pi est appelée le point de Feynman, entre les 762ème et 767ème décimales : ...999999... Cette suite est ainsi appelée d’après Richard Feynman, un physicien, qui avait dit qu’il aimerait mémoriser les décimales de pi jusqu’à ce point - de sorte qu’en les récitant il puisse finir par : «....9, 9, 9, 9, 9, 9, et cætera.» Le point de Feynman est visuellement très beau pour moi. Je le vois comme une bande épaisse et profonde de lumière bleu sombre.” 50 Daniel Tammet, in. Je suis né un jour bleu (2006)

Phénomène sensoriel partagé par un certain nombre d’individus avec autisme, il est dépendant donc de la conformation et plus généralement des éléments constitutifs d’un espace, mais plus largement des stimulations sensorielles présentes dans un lieu. Il apparait donc important pour le designer d’espaces de prendre en compte cette susceptibilité potentielle de ces usagers sensibles.

48 49

50

TAMMET D., Je suis né un jour bleu, Born on a Blue Day - Inside the extraordinary mind of an autistic savant (2006), Éditions des Arènes, 2007, 285 p. RUIZ M., Perceptions des couleurs chez les synesthètes Graphèmes-Couleurs, Mémoire de Master Recherche en Sciences Cognitives, Paris, ENS-EHESS Paris Descartes, 2010, 79 p. TAMMET D., Ibid. p.225.

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2.4.  Un monde trop rapide Des chercheurs ont imaginé de ralentir la parole et les expressions pour aider les personnes ayant un TSA à mieux comprendre ce qu’on leur dit et les intentions des autres. Ce besoin de ralentir le monde provient de la théorie dite de «désordre du traitement temporo-spatial des informations sensorielles»51 initiée par les travaux de Bruno Gepner, pédopsychiatre français spécialiste de l’autisme et chercheur associé au CNRS, Laboratoire Parole et Langage de l’Université Aix-Marseille. Il affirme que la perception est première dans le mécanisme de traitement du monde environnant52. Ces études montrent que les stimuli dynamiques (mouvements de l’environnement, corporels ou faciaux, la parole) sont perçus, mais sont trop rapides pour être traités en temps réel par les individus avec TSA. Gepner et ses collaborateurs précisent que si la perception est altérée dès le début de la vie alors, en cascade, un ensemble de comportements, de communications, de relations, de façon « d’être au monde » vont être altérés également. Si les stimuli dynamiques posent problème aux personnes ayant un TSA, ils montreront en revanche, par compensation, une attention fine et accrue pour les stimuli statiques et développeront des aptitudes accrues dans le domaine visuospatial (puzzles, mémoire spatiale, graphisme), ou le calcul (les voies cérébrales dédiées au calcul sont en partie les mêmes que celles qui traitent les informations spatiales). Ces particularités seraient en corrélation avec des anomalies de la connectivité cérébrale fonctionnelle et de la synchronisation neuronale, c’est-à-dire de la mise en cohérence des différentes aires cérébrales et groupes neuronaux, que ce soit au repos ou lors de tâches cognitives simples ou complexes.

51

GEPNER B., Le monde va trop vite pour les personnes autistes ! Hypothèses neurophysiopsychopathogéniques et implications rééducatives, Publication en Neuropsychiatrie de l’Enfance et de l’Adolescence, France, 2006, pp. 371-374

52

GEPNER B., Perceptions atypiques, France, 2014, TV5 Monde, Interview Vidéo, 74sec. Consultable sur : http://autisme.tv5monde.com/?portfolio=ralentir-pour-percevoir


QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

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À l’état d’hypothèse, cette théorie offre la possibilité de faire des liens avec d’autres troubles comorbides, comme l’épilepsie (considérée comme une hypersynchronisation pathologique), et divers troubles du développement (dysphasie, dyslexie, dyspraxie…), et donne des pistes pour mieux distinguer les différents troubles, y compris au sein du spectre autistique. Enfin, cette théorie tend à montrer que le ralentissement des signaux visuels et auditifs, une voie thérapeutique nouvelle, permettrait, au stade infantile, d’améliorer la reconnaissance des expressions faciales, de favoriser le mécanisme d’imitation, et d’améliorer la compréhension du langage des individus ayant un TSA, même pour les cas les plus sévères. Partant de ce constat, un logiciel applicatif nommé existant sur plusieurs plateformes (Android, MS Windows, iOS) permet le ralentissement synchrone du son et de l’image sans déformation de la tonalité de la voix lors du visionnage de vidéos.

Portrait de Bruno Gepner, ©Julie Dachez, 2010. Cliché réalisé lors d’une entrevue réalisée en 2014 par Julie Dachez, maître de conférence en psychologie sociale à l’Université de Nantes, militante pour les droits des personnes avec autisme et elle-même diagnostiquée asperger.

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© AUTICIEL 2015

Logiral a été édité par Auticiel en 2015. Ce logiciel


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QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

2.5.  Une pensée en images Temple GRANDIN, chercheure américaine en ingénierie industrielle et asperger de haut niveau a animé en 2010 une conférence TED53 (acronyme cette fois de Technology, Entertainment and Design) aux États-Unis. Elle y explique comment elle a contribué à développer des techniques révolutionnaires liées à l’élevage et à l’abattage de cheptels bovins aux États-Unis. © Crédit : MATT NAGER

“ Le cerveau normal ignore les détails. Si vous construisez un pont, les détails sont importants parce qu’il s’écroulera si vous ignorez les détails. Une de mes importantes préoccupations aujourd’hui est le fait que les choses deviennent trop abstraites. ” 54 Temple GRANDIN (2010) Dans le téléfilm « Temple Grandin : le monde en images » réalisé en 2010 55, une adaptation de ses deux livres Emergence : labeled Autistic publié en 1986 56 et de Thinking in Pictures publié en 1997 57, on découvre à quel point son approche est stupéfiante de similarité avec la démarche du designer. On l’aperçoit se mettre à la place de l’usager, littéralement à la place des vaches. Elle analysait alors la moindre information, le moindre stimulus qui venait à elle. Le designer, à cet égard, dit recueillir et analyser les signaux faibles58. 53

GRANDIN T., The world needs all kinds of minds, TED2010, États-Unis, Février 2010, 19 mn. Consultable sur : https://www.ted.com/talks/temple_grandin_the_world_needs_all_kinds_of_minds [consulté le 20/08/2015]

54

GRANDIN T., Ibid., 1mn 27 sec.

55

JACKSON M., Temple Grandin : Thinking in Pictures, États-Unis, 2010, long-métrage, 107 mn.

56

GRANDIN T., Ma vie d’autiste, Emergence : Labeled autistic (1986), Paris, Odile Jacob, 1994, réédition 2001, 256p.

57

GRANDIN T., Penser en images, Thinking in Pictures (1996), Paris, Odile Jacob, 1997, 264p.

58

CAHEN P., Signaux faibles, mode d’emploi, Paris, Éditions Eyrolles, 2011, p.81.

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[QU’EST-CE 55 ] QUE L’AUTISME ?

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Affiche du film Temple Grandin, ©HBO USA, 2010.

“ Dans mon travail avec le bétail, j’ai relevé de nombreuses petites choses qui font reculer le bétail et que les gens ne remarquent pas. Par exemple, ce drapeau qui flotte juste devant la clinique vétérinaire. Cet espace allait détruire l’établissement vétérinaire entier. Tout ce qu’ils avaient à faire était de déplacer le drapeau.” 59 Ce qui rapproche encore plus la démarche de Temple Grandin de celle du designer, c’est dans l’élaboration de solutions jusqu’aux constats auxquels elle applique une approche pragmatique, analytique, logique. Une approche résolument et pourtant involontairement - on pourrait donc dire intuitivement - tournée vers l’innovation, un mécanisme de conception hors des sentiers battus et des évidences apparentes ! 59

GRANDIN T., Ibid., 1mn 53 sec.

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QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

3. Des origines au diagnostic, à la prise en charge 3.1.  Origines des TSA D’après

les

résultats

d’études

récentes, l’autisme

serait

multifactoriel . C’est-à-dire que l’autisme serait une des conséquences 60

d’une combinaison de facteurs à la fois génétiques61 62, neurobiologiques et environnementaux. Quoi qu’il en soit, et cela a déjà été abordé plus tôt, les origines sont congénitales ou prénatales. De fait l’autisme ne peut (et ne doit) plus être considéré comme une psychose ou psychopathologie. Malgré les classifications et la nature médicale des instances encadrantes (OMS, HAS), il est plus juste de parler d’un « trouble » générant un handicap - qui est accompagné d’un suivi, d’une aide – qu’à proprement dit d’une « maladie » - qui est accompagnée de soins, de traitement médical -, car il s’agit bien d’une altération qualitative du développement de l’individu qui échappe à toute tentative de médication par l’incursion de traitements par voies chimiques, notamment par les psychotropes, jugés et reconnus inefficaces par la HAS. Certaines études ont montré récemment que chez les individus ayant un TSA il était observé un taux anormalement bas d’ocytocine, la fameuse « hormone de l’amour » ou encore « hormone de l’accouchement ». Cette hormone joue un rôle crucial dans l’établissement des rapports

60

AUTISME QUÉBEC (Assoc.), Les causes de l’autisme (étiologie) [en ligne], dossier de rubrique, novembre 2015. Consultable sur : http://www.autisme.qc.ca/tsa/recherche/etiologie.html

61

FÉRON F. (dir.), Olfactory stem cells reveal MOCOS as a new player in autism spectrum disorders, Publication, 4 août 2015. Consultable sur : http://www.nature.com/mp/journal/vaop/ncurrent/full/ mp2015106a.html

62

LOUMÉ L., Découverte d’une pièce manquante dans le puzzle des troubles autistiques [en ligne], France, Sciences et Avenir, 2015. Article basé sur l’étude référencée précédemment (64) et consulté le 22 octobre 2015. Consultable sur : http://www.sciencesetavenir.fr/sante/20150729. OBS3366/decouverte-d-une-piece-manquante-dans-le-puzzle[...].html

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QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

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sociaux63 et est secrétée par l’hypothalamus et relarguée dans le système vasculaire par la voie de l’hypophyse postérieure. Des chercheurs ont observé de nettes améliorations des compétences sociales en administrant par pulvérisations dans les voies nasales d’ocytocine de synthèse (Syntocinon®) chez des sujets avec autisme de haut niveau ou avec autisme Asperger.64 65 Le professeur Yehezkel Ben-Ari physiologiste, biophysicien et chercheur français d’origine égyptienne, dans une étude récente, montre l’implication d’un fort taux d’ions chlorure dans l’équilibre intracellulaire de certaines cellules nerveuses dans l’apparition de troubles neurodéveloppementaux tels que l’autisme 66. Cette piste de recherche est en corrélation avec l’observation de déséquilibres en ocytocine 67. Une approche thérapeutique à base d’administration d’un diurétique est à l’étude depuis 2011 et semblerait être porteuse de résultats convaincants et encourageants. Les pistes sont nombreuses, si bien qu’une autre étude, sur une voie différente, fait état d’un lien théorique entre la prématurité et l’autisme68. Cette étude relève, en effet, un taux de 5% de sujets avec autisme chez les enfants nés prématurément contre un taux de 1% admis aujourd’hui. 63

DUBUC B., L’ocytocine : l’hormone qui crée des liens [en ligne], Canada, IRSC, consulté en décembre 2015. Consultable sur : http://lecerveau.mcgill.ca/flash/i/i_04/i_04_m/i_04_m_des/i_04_m_des.html

64

CNRS, Autisme : l’administration d’ocytocine améliore le comportement social des patients [en ligne], France, communiqué, 2010. Consultable sur : http://www2.cnrs.fr/presse/communique/1793.htm

65

JALINIÈRE H., Autisme : l’ocytocine testée en spray nasal [en ligne], France, Sciences et Avenir, octobre 2015. Consultable sur : http://www.sciencesetavenir.fr/sante/20150729.OBS3366/decouverte-dune-piece-manquante-dans-le-puzzle[...].html

66

CABUT S., Les diurétiques : nouveau traitement ?, Interview vidéo, France, Le Monde, février 2014, 9 mn. 51s. Consultable sur : http://www.dailymotion.com/video/x1bd21f_peut-on-soigner-l-autismeavec-des-diuretiques_news

67

INSERM, Autisme : l’hormone de l’accouchement contrôlerait l’expression du syndrome chez l’animal. [en ligne], Article, CNRS, 2014. Consultable sur : http://www.inserm.fr/espace-journalistes/ autisme-l-hormone-de-l-accouchement-controlerait-l-expression-du-syndrome-chez-l-animal

68

LEVALLOIS J., Autisme : pourquoi les prématurés sont plus à risque [en ligne], article, Pourquoidocteur.fr, publié le 5 mai 2015. Consultable sur : http://www.pourquoidocteur.fr/Articles/ Question-d-actu/10609-Autisme-pourquoi-les-prematures-sont-plus-a-risque

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[ 58 ]

QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

3.2.  Diagnostiquer un TSA ou un TED chez un enfant Les premiers témoins des troubles d’un enfant autiste sont évidemment les parents. Le handicap lié à l’autisme provient d’une constellation de symptômes. L’autisme est vécu de manière singulière, car chaque autisme se manifeste différemment symptomatiquement, mais également dans ses spécificités et dans ses besoins. Parmi ces spécificités, des traits communs apparaissent comme les difficultés de communication et d’interactions sociales, ainsi qu’une perception modifiée de l’environnement. D’autres symptômes biologiques comme des troubles de l’alimentation et du sommeil viennent compléter un tableau clinique très complexe. La simple observation du cumul de ces troubles amène bien souvent les parents à consulter un professionnel qui pourrait être apte à reconnaitre sinon évoquer l’hypothèse d’un TSA. Seulement, le professionnel consulté est bien souvent désarmé. En effet, ne s’agissant pas d’une maladie et n’ayant pas à sa disposition des marqueurs biologiques sur lesquels appuyer un diagnostic, il devra redoubler de finesse afin de choisir le test adapté au parcours, à l’âge, à l’aptitude à communiquer de l’enfant. Il n’y a, à ce jour, aucune méthode universelle pour poser un diagnostic, mais il existe cependant trois voies de diagnostic validées et à leur disposition. • L’ADI-R acronyme pour Autism Diagnostic Interview, qui a pour but de recueillir, lors d’un entretien auprès des parents, des informations quant aux symptômes de l’enfant. • L’ADOS pour Autism Diagnostic Observation Schedule, diagnostic comportemental qui se base sur des observations que l’on place sur une échelle. Ce diagnostic s’effectue dans le cadre clinique et peut être employé comme curseur de progression dans le suivi postérieur de l’enfant. • Le CARS pour Childhood Autism Rating Scale, échelle qui permet de mesurer le niveau de sévérité de l’autisme.69

69

BROUCHOUD V. (dir.), L’autisme en France, diagnostic et parcours de soins, Paris, FondaMental, 2013, 29 p.

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Des bilans orthophoniques, psychomoteurs, auditifs, neurologiques ainsi qu’une étude génétique et de l’imagerie médicale peuvent compléter le diagnostic afin de présenter un tableau des plus complets. Dans les faits, ces compléments d’analyses sont bien souvent non réalisés.

Un délai de diagnostic qui se réduit Comme le montre le graphique ci-dessous, le délai entre l’âge de détection des premiers signes d’alerte et la pose du diagnostic est de plus en plus court : plus l’enfant est jeune, plus ce délai est court.

Les résultats font apparaître qu’un tiers des patients a attendu moins de 5 mois, un tiers entre 5 et 20 mois et un tiers plus de 20 mois. Pour les experts, «ces résultats restent difficiles à interpréter et sont peu conformes aux observations de terrain comme aux retours d’expérience des parents qui sont nombreux à se plaindre d’une errance diagnostique. Si l’on considère toutefois qu’il s’agit là de la démarche diagnostique (c’est-à-dire le délai entre l’évocation d’un trouble du spectre autistique et la confirmation du diagnostic après les différents bilans), ces résultats paraissent plus plausibles». Source : L’Autisme en France, p.11 ©Fondamental/Doctissimo France, 2013.


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QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

3.3.  La prise en charge – Approches éducatives Ralenties par défaut de consensus entre les différentes écoles de pensée et d’une approche collégiale digne de ce nom, notamment à cause de la théorie de psychogenèse maternelle des écoles psychanalytiques freudienne et lacanienne, les approches éducatives et thérapeutiques sont balbutiantes en France. Il existe aujourd’hui une prédominance de 3 approches éducatives, qui, de concert, donnent des résultats jugés convaincants par les associations sur l’autisme. L’approche TEACCH, acronyme pour Treatment and Education of Autistic and related Communication handicapped Children ou Traitement et éducation des enfants autistes ou souffrant de handicaps de communication apparentés en français et que l’on a déjà abordé précédemment dans la partie historique, à propos de son initiateur : Eric Schopler. Cette approche éducative permet d’encadrer l’enfant ayant un TSA par un environnement adaptatif propice aux développements de compétences physiques et sociales. L’approche PECS, pour Picture Exchange Communication System ou Système de Communication par échange d’images en français a été créée par le psychologue et thérapeute comportementaliste Andy Bondy et par l’orthophoniste Lori Frost, tous deux Américains, à la fin des années 80. Cette approche propose un mode de communication par le langage des images. Elle peut s’effectuer dans tout contexte ou lieu et se veut complémentaire aux deux autres approches éducatives citées dans cette partie. Une première étude en 2002 entérine son efficacité70. 70

CHARLOP-CHRISTY MH, Using the picture exchange communication system (PECS) with children with autism: assessment of PECS acquisition, speech, social-communicative behaviour, and problem behavior, États-Unis, publication en Analyse appliquée du comportement, NIH, 2002. Consultable sur : http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/12365736?dopt=Abstract

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Classe TEACCH américaine donnée comme exemple par l’association Autisme74. Source : www.autisme74.com. Crédit inconnu.

Classe pour l’inclusion scolaire (CLIS) bordelaise qui emploie la méthode TEACCH. Source : tice33.ac-bordeaux.fr. Crédit inconnu.


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QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

L’approche ABA, pour Applied Behavior Analysis ou Analyse appliquée du Comportement. Cette approche comportementaliste (ou behavioriste) a été élaborée par le psychologue Danois Ivar Lovaas dans les années 60. C’est l’approche aujourd’hui privilégiée en Amérique du Nord voire la seule au Canada (appelé ICI pour Intervention Comportementale Intensive) et est appliquée pour tout trouble comportemental71. Par cette approche, les incitations et stimuli de l’environnement éducatif sont récurrents, insistés et intrusifs. Ces caractères visent à stimuler l’apprentissage qui est jugé déficitaire chez les enfants avec autisme. Pour Jacques Hochmann, psychiatre © Crédit : Babelio.com

et psychanalyste français, réputé dans la cause autiste auprès des associations et parents, le problème de l’ABA n’est pas tant dans le fait que cette méthode se présente comme la méthode providentielle que son Jacques Hochmann, circa 2010

irréfutabilité scientifique discutable, mais

réside dans le fait que des facteurs exotiques au conditionnement opérant peuvent avoir une influence positive sur le développement d’un enfant avec autisme et qu’à cet égard, on ne peut pas se permettre le sempiternel « it works then it’s true » qu’il juge d’ « un pragmatisme vulgaire ».72

71

AUTISME QUÉBEC (Assoc.), L’ICI : l’intervention la plus recommandée e nautisme, dont les effets bénéfiques font pratiquement l’unanimité [en ligne], dossier de rubrique, novembre 2015. Consultable sur : http://www.autisme.qc.ca/documentation/nouvelles-recentes-et-archives/archives/2011/ lici-lintervention-la-plus-recommandee-en-autisme-dont-les-effets-benefiques-font-pratiquementlunanimite.html

72

HOCHMANN J ;, Histoire de l’autisme, Paris, Odile Jacob, 2009, 528 p., p.443.

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La Méthode ABA s’appuie sur une mise à profit du mécanisme de récompense. Chaque réponse ou comportement jugé adapté par l’éducateur sera récompensé par des félicitations et encouragements, et appuyés alors d’une friandise (renforcement positif). Cette approche fait encore polémique, car certaines personnes ont l’impression qu’il s’agit d’un dressage. Certains répondent que si le dressage est effectivement un conditionnement, appelé conditionnement répondant (comme défini par Pavlov à la fin du XIXe siècle) il est à rappeler que l’apprentissage est régi par une autre forme de conditionnement, le conditionnement opérant (ou Skinnérien) sur lequel est basé le travail de Lovaas pour élaborer l’ABA 73.

Mécanisme du conditionnement répondant (Pavlovien) :

Source : doggiedrawings.net ©Lili Chin / Traduit par Sara Lemieux

73

ABA67 (Assoc.), Présentation de la méthode ABA, France, Article thématique sur site. Consultable sur : http://www.aba67.free.fr/?traitement_aba_presentation_03_definir_le_conditionnement


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QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

3.4.  La prise en charge – Structures d’accueil En France, il existe principalement six types de structure d’accueil qui peuvent accueillir des individus avec autisme. La majorité des structures sont à destination des enfants et adolescents. • Les CLIS pour Classes pour l’Inclusion Scolaire sont des classes incluses dans une structure scolaire «normale» et à destination d’élèves ayant de grosses difficultés et plus généralement pour des enfants ayant un handicap. Les CLIS permettent un apport et un suivi personnalisé de l’éducation. • Les IME pour Instituts Médico-Éducatifs sont des établissements de soins qui accueillent enfants et adolescents ayant un handicap mental. Ce type de structure accompagne les familles, apporte les soins, la rééducation ainsi que l’enseignement et établit un suivi des évolutions de l’enfant. • Les FAM pour Foyers d’Accueil Médicalisés qui accueillent des adultes en situation de polyhandicap nécessitant un soutien et suivi médical régulier. Les personnes accueillies en FAM ont en général plus d’autonomie que celles accueillies en MAS.74 • Les MAS pour Maisons d’Accueil Spécialisées qui accueillent des adultes en situation de polyhandicap grave. Il s’agit généralement d’un hébergement à temps complet, mais certaines proposent des permanences de jour. Pour aller en MAS, la personne en situation de polyhandicap doit avoir reçu l’agrément de la maison départementale pour les personnes handicapées. • Les ESAT pour Établissements et Service d’Aide par le Travail sont des structures permettant à une personne en situation de handicap d’exercer une activité dans un cadre protégé. Les personnes concernées sont des personnes n’ayant pas acquis suffisamment d’autonomie pour pouvoir intégrer un cadre ordinaire de travail. • Les SESSAD pour Service d’Éducation Spéciale et de Soins à Domicile ne sont pas des structures accueillantes au premier sens, mais ce sont des structures qui offrent et coordonnent l’action de professionnels auprès de différents organismes, structures ou encore à domicile. 74

SERVICE-PUBLIC.GOUV, Hébergement d’une personne en situation de handicap [en ligne] , dossier thématique. Consultable sur : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F15255

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En 2012 en France, alors que le cabinet du Premier Ministre décide d’élire l’autisme Grande Cause Nationale, la Haute Autorité de Santé publie en mars des recommandations officielles de bonnes pratiques de prises en charge dans le cadre du plan Autisme.75 Et cette recommandation s’est suivie d’une décision du Conseil d’État en décembre 2014 établissant le manque de structures d’accueil spécialisées en France et le besoin de créations dans ce sens.76 Note sur le caractère institutionnalisant des structures d’accueil Un courant décrit par Hocchmann visait à la désinstitutionnalisation, car, en effet, on peut penser que la mise en contexte de soins et de suivis permanent (ce qui est pourtant une bonne chose) peut provoquer un syndrome de dépendance à cette même structure et à ses enseignements et donc, par nature, un manque d’autonomie. Pour les autres enfants ayant un autisme, lorsqu’ils ont « fini » leur apprentissage dans ces structures et qu’on estime qu’ils peuvent réintégrer l’enseignement classique, ils sont pourtant « remis dans le système » à un âge où ils ne peuvent apprendre à être autonomes. Et cette lacune reste jusqu’à l’âge adulte où l’apprentissage de l’autonomie doit être apporté.

75

76

HAS Haute Autorité de Santé, Autisme et autres troubles envahissants du développement : interventions éducatives et thérapeutiques coordonnées chez l’enfant et l’adolescent [en ligne], France, HAS, 2012. Consultable sur : http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_953959/autisme-et-autres-troubles-envahissantsdu-developpement-interventions-educatives-et-therapeutiques-coordonnees-chez-lenfant-et-ladolescent

HAS Haute Autorité de Santé, Recommandation sur l’autisme : décision du Conseil d’État Communiqué de presse [en ligne], France, 23 décembre 2014. Consultable sur : http://www.hassante.fr/portail/jcms/c_2003431/fr/recommandation-sur-lautisme-decision-du-conseil-detat


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ENQUÊTE RÉALISÉE AUPRÈS D’ADULTES : Le recueil d’expériences de personnes avec autisme a été nécessaire. J’ai choisi de resserrer mon étude sur les personnes ayant Asperger, la forme d’autisme qualifiée de léger. Ce recueil m’a permis d’entrapercevoir des pistes d’améliorations de certains espaces. Ainsi, les questionnaires ont successivement balayé différentes typologies d’espaces et de situations quotidiennes permettant de développer mes axes d’études. Personnes avec autisme en recueil indirect

3,8 %

29,6%

Personnes avec autisme diagnostiqué

Personnes en cours de diagnostic

66,6% Nature et mesures des difficultés liées aux espaces : (pour les 26 répondants)

100

Importance de ces difficultés au quotidien : (pour

Bruits

80

les 26 répondants)

60

53,6%

40

au dessus de 7/10

La gêne est là mais a très peu

d'incidence

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

Ces difficultés sont un enfer au quotidien

20 0

Organisation spatiale Sphère perceptive

Sphère sensorielle


QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

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Parmi les structures précédemment décrites, celles dédiées potentiellement à l’acquisition de l’autonomie sont destinées pour une majorité aux enfants. Qu’en est-il des jeunes adultes ? 3.5.  Un diagnostic différent chez l’adulte De plus en plus d’individus, à la lumière des découvertes actuelles et de la levée des tabous, décident de s’interroger sur l’origine probable de leurs difficultés sociales rencontrées dans l’enfance. Bien souvent, ces personnes ont une forme d’autisme pouvant être jugé comme léger, ils ont donc bien souvent la forme Asperger ou bien dite de haut niveau de l’autisme. Aussi, certains d’entre eux ont décidé d’entamer un diagnostic tardif. Ce parcours de diagnostic, en France, peut être long et fastidieux (certains diagnostics peuvent s’échelonner sur 3 ans). Ce diagnostic se réalise via un CRA (Centre de Ressources sur l’Autisme). Il y a au moins un centre par région, mais les délais sont très longs, car les enfants sont prioritaires. Beaucoup abandonnent face à cette attente. Ce diagnostic doit être établi auprès d’une équipe pluridisciplinaire. “ Un réel diagnostic doit impérativement être posé par un psychiatre, en concertation avec d’autres spécialistes (psychologue, neuropsychologue, psychomotricien, orthophoniste, etc. selon chaque cas). Sans cela, rien n’est reconnu et le “diagnostic” n’en est tout simplement pas un.” 77 Alexandra « Aspergirl » en 2013 dans un billet sur son blog « Les tribulations d’une Aspergirl »

77

ALEXANDRA « ASPERGIRL », Diagnostic du syndrome d’Asperger, un long chemin (partie1/3) [en ligne], billet, Blog Les tribulations d’une aspergirl, 30 octobre 2013, consulté le 4 septembre 2015. Consultable sur : http://les-tribulations-dune-aspergirl.com/2013/10/30/diagnostic-du-syndrome-daspergerun-long-chemin-partie-1-3/

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QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

4. Données clés et pourquoi l’invasion

n’est pas chinoise. On estime à 100 000 le nombre de jeunes de moins de 20ans en France ayant des Troubles Envahissants du Développement dont 30% seraient des Troubles du Spectre Autistique.78 Afin de mieux saisir l’intérêt d’un regard du design porté à l’attention de l’usager avec autisme, il semble nécessaire de s’attarder sur les données quantitatives, en France, en matière d’autisme. Ces données permettent de mettre en relief les enjeux sociétaux liés à cette étude. Ainsi, quelles sont les données épidémiologiques et les prévalences enregistrées de nos jours ? Comment se caractérise l’évolution de ces données dans le temps ? De quelle manière, le designer doit prendre en compte ces données ?

78

INSERM Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale, Dossier d’information Autisme [en ligne], France, février 2013. Consultable sur : http://www.inserm.fr/thematiques/ neurosciences-sciences-cognitives-neurologie-psychiatrie/dossiers-d-information/autisme

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QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

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4.1.  Données « Épidémiologiques » L’épidémiologie est la science qui étudie, au sein de populations (humaines, animales, voire végétales), la fréquence et la répartition des problèmes de santé dans le temps et dans l’espace, ainsi que le rôle des facteurs qui les déterminent.79 L’épidémiologie retient quatre critères pertinents pour l’évaluation de l’occurrence d’un handicap comme l’autisme : 80 • Le taux d’incidence : taux périodique d’occurrence de nouveaux cas dans une population à risque de nombre constant. • La prévalence ponctuelle : une quantification à un instant T est considérée. • La prévalence périodique : est considérée une quantification à l’échelle d’une période (année par exemple) • La mortalité : qui n’est ici pas pertinente dans l’analyse d’un handicap comme l’autisme. Pour l’ensemble des troubles du spectre autistique, dans les années 90, le taux d’incidence était estimé entre 4 et 5 nouveaux cas pour 10 000. Aujourd’hui, ce taux serait aux alentours de 10 à 20 nouveaux cas pour 10 000.81

79

Dictionnaire LAROUSSE en ligne, définition d’épidémiologie [en ligne], France, consulté le 28 novembre 2015. Consultable sur : http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/épidémiologie/30371

80

COGGON D., ROSE G., BARKER D., Chapter 2. Quantifying disease in populations in. Epidemiology for the Uninitiated [en ligne], Grande-Bretagne,1997. Consultable sur : http://www.bmj.com/aboutbmj/resources-readers/publications/epidemiology-uninitiated/2-quantifying-disease-populations

81

PARTICIPATE, Comprendre l’autisme [en ligne], Belgique, article thématique, consulté le 8 septembre 2015. Consultable sur : http://www.participate-autisme.be/go/fr/comprendre-l-autisme/qu-est-ce-que-l-autisme/ autisme-en-chiffres.cfm

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[ 70 ]

QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

4.2.  Prévalences En 2015, le National Institute of Mental Health avance une prévalence de 1 naissance sur 68 au niveau mondial. La Haute Autorité de Santé, quant à elle, en France estimait en 2012 la prévalence nationale à 1 naissance sur 150 et ce chiffre, aujourd’hui réévalué se rapprocherait plus de 1 naissance sur 100 82. Le National Center on Birth Defects and Developmental Disabilities aux États-Unis a déployé, sur 10 ans, un programme qui révèle que 1 enfant sur 88 montrerait un TSA. Le CDC, le Centre de Contrôle et de prévention des maladies aux États-Unis avance le chiffre de 1 enfant sur 50 d’après un sondage effectué auprès des parents au cours de l’année 2011-2012. En Corée du Sud, les scientifiques parlent d’une prévalence de 1 sur 38. L’évolution fulgurante de ces prévalences dénote à la fois d’une évolution des méthodes et des fréquences de diagnostic et d’une croissance d’intérêt et de reconnaissance du sujet par les communautés scientifiques. D’autres facteurs pourraient avoir contribué à cette tendance à la hausse 83. La répartition d’occurrence de l’autisme par sexe est de 4 garçons pour 1 fille en moyenne. Cette prépondérance des garçons est plus marquée encore, de l’ordre de 6 garçons pour 1 fille, dans le cas d’un autisme sans retard mental.84

82 83

84

SAJIDI M., (dir.), Rapport 2013 : Situation de l’autisme en France, Paris, Association Vaincre l’autisme, 2013, pp. 11. HAS Haute Autorité de Santé, État des connaissances – Autisme et autres troubles envahissants du développement, Paris, HAS, janvier 2010, p.26 Ibid, p.27

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[ 71 ]


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QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

4.3.  De l’intérêt des données pour le designer Le designer doit donc prendre en compte des données aussi différentes que, parfois, contradictoires et variables voire évolutives pour appuyer son développement. Si le designer doit prendre en compte les paramètres d’évolutivité lors de la conception, il « répond »85 aux besoins en termes d’usage à un instant T, d’un nombre d’usagers potentiels conséquents quantifiés à un instant T. Si ces derniers varient en nombre dans le temps, ce n’est pas le cas des usages à proprement parler. Ce qui varie dans le temps sera le coefficient d’utilisation de ces usages qui varie spatialement et temporellement en fonction du nombre d’usagers et de l’adéquation de ces usages au contexte (social, économique, effet de mode). C’est en marketing, que la quantification des usagers appelés « cibles » et la détermination du coefficient d’utilisation des usages est nécessaire, pas en design. Non pas que le design soit un mouvement de l’esprit gratuit comme la démarche artistique86, mais là où il y a détection d’un usage potentiel sans que le contexte ni l’objet ne répondent favorablement à cet usage, il y a une méthodologie et une réflexion de design qui peuvent s’y insérer et catalyser l’émergence innovante de cet usage dans les meilleures conditions qui soient.

85

Le choix de relativiser le verbe répondre ici, avec des guillemets est la volonté double d’afficher, d’une part, l’acceptation de l’existence du terme dans la définition commune de l’action du designer et le fait, d’autre part, que je ne partage pas l’usage de ce terme qui soustendrait l’existence messianique d’un designer sinon d’un Design qui apporterait toutes les « réponses » aux problèmes de nos sociétés. Mon point de vue est que l’usager est le seul dépositaire de la solution ou de la « réponse » qui se trouvera catalysée voire cristallisée dans les propositions et hypothèses du designer (dans le meilleur des cas).

86

Gratuité relative et discutable dans les faits depuis que l’on parle de « marché » de l’art.

PARTIE 0 | CONTEXTE


QU’EST-CE QUE L’AUTISME ?

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Pour conclure, les données chiffrées ont bels et bien un intérêt pour saisir l’importance justifiée, de mettre en relief l’étude par un nombre d’usagers potentiellement concernés, mais ne déterminera pas, en tout cas en tant que tel de manière brute – c’est-à-dire sans lier ces données à des valeurs plus intangibles telles que le niveau de satisfaction - la façon dont la problématique sera abordée. Et parfois même, un faible nombre d’usagers potentiels, donc marginaux, pourra pourtant donner lieu à une réflexion de design pertinente et viable ! Le design s’inscrit dans la quotidienneté, dans une temporalité et un contexte sociétal, mais peut cependant se permettre d’échapper à ce dernier si l’usager qui le concerne devenait marginal, c’est-à-dire en situation d’exclusion de cette société. Beaucoup de projets de design sont aujourd’hui orientés vers l’inclusion de l’usager. In fine, le design ne prend fait et cause que pour l’usager. Dans le cas de l’autisme, il apparait que ces usagers potentiels que sont les individus avec autisme sont nombreux et de plus en plus nombreux, mais qu’ils sont pour autant marginalisés. On parle même « d’épidémie ». Cette marginalisation incohérente avec la réalité des chiffres montre le déni d’une société face à « l’anormalité » de la condition des personnes avec autisme.

PARTIE 0 | CONTEXTE


[ 74 ]

APPENDICE 1 ‘‘ Étiqueter l’autisme ’’ Mon regard sur la neurodiversité


APPENDICE 1 | “Étiqueter l’autisme”

[ 75 ]

Le designer prend aujourd’hui compte d’usagers et d’usages qui étaient autrefois mis à l’index. Au même titre que la population gauchère, historiquement liée à la maladresse, au mauvais augure voire au démon (Gaucher se dit Sinistra en Italien87, dont on peut relever la provenance étymologique ambivalente*), les individus avec autisme ne pourraient-ils pas être considérés comme faisant partie de cette humanité multiple ? On sait aujourd’hui que l’esprit d’un individu gaucher ne fonctionne pas de la même manière que celui d’un droitier et bien que ce ne soit prouvé que de manière empirique, il apparaitrait que dans certains cas, des gauchers se retrouveraient avec un avantage distinctif sur différents domaines et aptitudes88. La population féminine, historiquement associée à une faiblesse ou à un désavantage naturel, possède en réalité certains avantages que d’aucuns « mâles » souhaiteraient posséder. En effet, elles développent un sixième sens protectif à la naissance de leur enfant89, elles sont polychrones90 (nommé par l’anglicisme « multitasking ») grâce à la conformation de leurs connexions entre leurs hémisphères cérébraux91, elles seraient douées naturellement de tempérance, de leadership et seraient donc de meilleures leaders ou managers92. *

87 88

89

90

91 92

Ambivalence de la racine du mot italien Sinistra : « Sinistrum » signifiait, dans la Rome antique, Heureux, favorable, de bon augure, de bon présage alors que « sinister » signifiait, chez les Grecs, défavorable, contraire, fâcheux, funeste, fatal. Quant à « senestre » employé avant le quinzième siècle en France, il a été remplacé par « gauchier », « gaucher » et « gauchart » pour des raisons que les historiens ignorent aujourd’hui. GAFFIOT F., Définition de « Sinister » in. Dictionnaire latin français, France, Hachette, 1934, p. 1446. LOUAPRE D., Pourquoi y-a-t-il des gauchers ?, in. sciencetonnante.wordpress.com, billet de blog, France, 2014. Consultable en ligne : https://sciencetonnante.wordpress.com/2014/11/10/ pourquoi-y-a-t-il-des-gauchers/ KINSLEY C. et LAMBERT K., L’instinct maternel niché dans le cerveau in. PourLaScience, n°340, France, février 2006. Partiellement consultable en ligne : http://www.pourlascience.fr/ ewb_pages/a/article-l-instinct-maternel-niche-dans-le-cerveau-19572.php Polychrone \pɔ.li.kʁɔn\ (Adj.) Formé du préfixe poly- (plusieurs) et du suffixe -chronos (temps) est un qualificatif qui se dit d’une personne douée de la faculté de faire plusieurs choses en même temps. (Source : fr.wiktionary.org) MEDINA M., Pourquoi les femmes sont plus douées pour faire plusieurs choses à la fois in. Midi Libre, article de quotidien, France,2013. ZENGER J., Are Women Better Leaders than Men? In. Harvard Business Review, États-Unis, 2012, Billet de blog. https://hbr.org/2012/03/a-study-in-leadership-women-do#.T2eLbbvLi3E.facebook


[ 76 ]

APPENDICE 1 | “Étiqueter l’autisme”

“ Nommer est cette violence qui écarte ce qui est nommé pour l’avoir sous la forme commode d’un nom.”

Maurice Blanchot in. Le Livre à venir, Gallimard, Paris, 1959, p. 48. Réédition 1986, Collection Folio essais (n°48)

Définir

l’autisme

est

une

nécessité

pour

comprendre

et apporter une attention bienveillante à cet usager avec autisme. Amartya Sen, économiste indien, évoque dans son ouvrage « Identité et violence. L’illusion du destin »93, le danger d’enfermer des individus dans leur « identité » prétendue par le système. Il explique le fait que nous avons tous des identités multiples et que de nous enfermer ou de nous laisser nous enfermer dans l’une d’entre-elles serait la cause, selon lui, de la majorité des discriminations et de violences dans le monde. Je dois dire que je partage cette analyse. Ce que je pensais jusquelà et pense toujours est que s’attacher à définir pose des jalons, des limites à une diversité d’esprits qui, intrinsèquement, n’en a pas. Le risque de définition, selon moi, résiderait dans l’attachement à différencier, au seul regard de nos connaissances actuelles, les sujets autistes des sujets dits « normaux ». On ne s’attache d’ailleurs pas à définir la normalité tant la définition serait large, absconse et dénuée d’intérêt au quotidien en dehors des cercles philosophiques.

93

SEN A., Identité et violence. L’illusion du destin, France, Odile Jacob, 2007, 270 pages.


© Columbia Pictures/Sony Pictures

[ 77 ]

Affiche du film Bienvenue à Gattaca d’Andrew Niccol, USA, 1997


[ 78 ]

Image tirée de la série de science-fiction suédoise Real Humans, 2013 Une rangé de Hubots techniciens.

“ La normalité n’est qu’une question de consensus. Autrement dit, si la plupart des gens pensent qu’une chose est juste, elle devient juste.”

Paulo Coelho in. Véronika décide de mourir, Flammarion, Paris, première édition 1998.


APPENDICE 1 | “Étiqueter l’autisme”

[ 79 ]

Supposons que le besoin de connaitre sa place ou, de manière plus grégaire, d’être rassurée, pousse l’humanité à apposer des étiquettes et classer son environnement au travers de définitions tiroirs, ne sont-ce pas les différences et cette neurodiversité qui assureront la multiplicité et la diversité de l’humanité de demain ? Reconnaitre et définir ne sont pas nécessairement des synonymes d’étiqueter au même titre que la prise en compte de la neurodiversité n’est pas une doctrine holistique puisque prônant la mise en avant de particularités propres à chaque individu. Le lissage de traits des individus des sociétés urbanisées, dites «modernes» est un sujet traité par de nombreux auteurs depuis le début de l’industrialisation. D’aucuns, de Georges Orwell à Isaac Asimov en passant par Aldous Huxley, ont imaginé des futurs dystopiques intégrant cette notion de conformisme et d’étiquetage de classes sociales et intellectuelles dans leurs oeuvres. De l’importance du statut social que représente le fait d’être un Epsilon ou un Alpha dans Le Meilleur des Mondes (1932) d’Huxley, à la simplification destructrice de toute subtilité par le dictionnaire Novlangue de George Orwell dans 1984, la violence du conformisme et de ce que je me permet d’appeler le rationalisme social est d’une analogie frappante avec ce qui se tisse dans nos sociétés actuelles. Ce point est essentiel pour le designer qui est, à bien des égards, exclusivement associé aux desseins de la standardisation (et aux besoins des sociétés standardisées). Cette association pourrait mener le designer à adopter la posture d’un idéateur d’archétypes et de consensus, posture bien inconfortable voire frustratrice lorsque l’une des raisons d’être du designer, me semble-t-il, est de catalyser l’innovation au bénéfice de tous les usagers.


http://fixies.canalblog.com ©Fix’s

Illustration de Fix’s


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PROBLÉMATIQUE Dans quelles mesures un esprit hors-normes* peut-il être vecteur d’innovation et de créativité ?

* qualificatif mélioratif volontairement employé en lieu et place du qualificatif « autiste », une étiquette connotée négativement.



PARTIE 1 | CET IDÉATEUR HORS-NORMES COMMENT LE DESIGN PEUT-IL APPRENDRE DE L’AUTISTAN ?


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LE DESIGN EN AUTISTAN ?

1. Apprendre l’Autistan 1.1. La vision d’une altérité culturelle Comme il a été dit précédemment, il n’est pas facile de définir un individu avec autisme en observant simplement ses caractéristiques apparentes. On ne peut coller l’étiquette « autiste » sur quelques traits autistiques. Alors toute la difficulté du designer qui voudrait dégager des personaes typiques à partir de certains aspects symptomatiques de l’autisme réside dans le fait qu’il n’y ait pas à proprement parler « quelques caractéristiques » représentatives ou stéréotypées de l’autisme, mais que ces caractéristiques, pouvant émerger ou non d’un individu à l’autre au gré des personnalités et des expériences traversées, se situent le long d’un continuum entre autisme et neurotypisme. On parle d’ailleurs, je le rappelle, de « spectre autistique » pour évoquer ces différentes formes. Il me semble nécessaire de faire ce point préalable afin d’éviter de « figer » ces caractéristiques à l’ensemble d’une population et de, encore une fois, risquer de coller une étiquette à un tiroir de caractéristiques. L’Autistan est évidemment un terme fictif, inventé avec décalage par Josef Schovanec94, sous-tendant l’existence d’une peuplade avec autisme vivant sur un territoire éloigné. Pays où Josef Schovanec nous invite au travers de témoignages issus de rencontres réelles. Comprendre l’autisme comme on comprendrait une culture à part entière, voilà la nature de cette invitation. Je me suis permis d’emprunter ce drôle de nom, que je trouve, à cet égard donc, empli de justesse et de poésie. Je me demande si l’Autistan ne serait pas un pays où l’on verrait se côtoyer une infinité de dialectes autistes ? 94

SCHOVANEC J., De l’amour en Autistan, France, Plon, 2015, 223 pages.

PARTIE 1 | CET IDÉATEUR HORS-NORMES


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“ L’Autistan c’est le pays des gens

autistes avec un petit parfum de rêve et d’Asie Centrale.” Joseph Schovanec interviewé par Élise Lucet sur le plateau du « Journal de 13h » le 8 décembre 2015 (France2)


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LE DESIGN EN AUTISTAN ?

1.2. Observer ou la question des caractéristiques propres et générales Comme précisé par J. Schovanec, l’autisme est souvent vu et entendu au travers du prisme infantile. Ainsi, lorsque l’on recherche des « caractéristiques » propres à l’autisme, il est « normal » de voir majoritairement dans les réponses à ces recherches, des réponses concernant les caractéristiques d’un enfant autiste. À cet égard, je ne crois pas qu’ « une résistance au fait d’être câliné »95 soit une caractéristique comportementale pertinente pour un adulte. En effet, vous conviendrez que malgré les qualités bienfaisantes d’un tel acte soient aujourd’hui avérées, beaucoup d’adultes, dont vous faite surement partie, résisteront ou rechigneront à faire un câlin comme ça, sans raison apparente. De plus, je ne suis pas sûr non plus de la validité scientifique de l’observance d’un trait autistique lorsque l’individu ne semble pas répondre lorsqu’on lui parle. Il me semble qu’à cet égard – et notamment dans la capitale – beaucoup d’adultes pourraient être taxés (pardonnez l’emploi délibérément malheureux du terme) d’autisme, ne pensez-vous pas ? Le fait de ne pas réagir aux émotions d’autrui ou de ne faire montre d’émotions, le besoin de rituels et de stabilité rassurante, le comportement répétitif ne me semble pas, pour les mêmes raisons, être des observations pertinentes pour définir un adulte avec autisme tant beaucoup de neurotypiques pourraient satisfaire ce tableau de « caractéristiques symptomatiques ».

95

VAINCRELAUTISME (Assoc.), Principales caractéristiques d’un enfant atteint d’autisme [en ligne], rubrique thématique, Site association Vaincre l’autisme, consulté en décembre 2015. Consultable sur : http://www.vaincrelautisme.org/content/caracteristiques

PARTIE 1 | CET IDÉATEUR HORS-NORMES


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Alors la question est la suivante : Comment « observer » en tant que designer des caractéristiques pertinentes pour l’étude du sujet sans tomber dans l’amalgame ?

En partant de principes formants ce qui peut être vu comme une charte, la réponse la plus saine et pertinente à laquelle je suis parvenu :

- Tout individu peut faire preuve de caractéristiques situées sur le spectre de l’autisme, mais ceux-ci se manifesteront à des degrés différents suivant les personnalités.

- Ces caractéristiques devront, pour l’illustration, être volontairement exagérées sans pour autant tomber dans la caricature. (Ex. Sheldon dans la série The Big Bang Theory)

- Ces caractéristiques, propres à tout individu et exacerbés ou inhibés par un syndrome autistique pourront et devront permettre d’identifier des besoins communs à tout individu.

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LE DESIGN EN AUTISTAN ?

1.3. Entrer en contact ou la question de « faire connaissance » “ Vous pouvez avoir le prix Nobel et ne pas savoir dire bonjour de manière socialement adaptée, ce sont deux facultés complètement distinctes. ” 96 Exemple d’une approche empirique : Dire « bonjour » “ Apprendre à prononcer le mot est facile, mais vous ne dites pas bonjour de la même façon à un chef ou à un vieil ami, en Suisse ou au Japon. Les non-autistes ne s’en rendent pas compte parce qu’ils intègrent ce genre de notions tout naturellement, mais il existe des millions de règles, qui vous imposent jusqu’à une certaine façon de marcher dans la rue. Et les règles ont des exceptions. Si vous enseignez à un jeune autiste à aller chercher du pain à la boulangerie, vous devez aussi lui apprendre comment il doit réagir s’il n’y a plus de pain. L’apprentissage n’est jamais total. Comme adulte, on continue à faire des gaffes. J’en fais moi-même des dizaines par jour. C’est la vie… Il y a par ailleurs un débat sur les limites d’une telle normalisation. Un autiste doit-il savoir faire tout ce qu’un non-autiste fait ? ” 97 L’apprentissage des règles sociales est un prérequis incompressible pour tout individu avec autisme. Les neurotypiques connaissent spontanément les règles contrairement aux personnes SA98 ou ayant un TSA qui ont besoin de les apprendre. Par exemple, 96

SCHOVANEC J., in. Le cerveau d’Hugo, REVIL S., France, FRANCE TÉLÉVISIONS, 2012, documentaire-fiction, 91 mn., 5’05’’.

97

SCHOVANEC J., Comprendre l’autisme – Apprivoiser la différence, conférence publique, Suisse, 2015, Rolex Learning Center de l’EPFL à Ecublens. Transcrit consultable sur : http://autisme. info31.free.fr/?p=1814

98

SA, acronyme pour Syndrôme d’Asperger.

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il n’est pas évident pour un individu SA – appelons-le Jérôme, manière d’humaniser un personnage fictif qui reviendra plus tard et à différentes occasions dans le développement – de saisir instinctivement qu’il ne doit pas tutoyer son directeur de projet surtout lorsque Jérôme a remarqué que ses collègues se tutoyaient entre eux. Comment peut-il savoir quand tutoyer ou vouvoyer ? Alors la question est la suivante : Comment, en tant que designer, entrer en communication efficace avec un individu avec autisme ? Une réponse :

© «Le chat» de Phillipe Gelluck

- Pas de « chichi », rester précis, clair, concret et aller droit au but.

Réflexion du Chat de Phillipe Gelluck sur l’implicite.

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LE DESIGN EN AUTISTAN ?

1.4. S’entendre ou la question de l’honnêteté et de l’intégrité Les personnes ayant un TSA peuvent généralement avoir beaucoup de difficulté à comprendre et à user des concepts de sous-entendus ou de second degré ou simplement à prêter une intention ou une pensée à autrui comme les neurotypiques. Les individus avec autisme ne prêtent généralement pas d’intentions, qu’elles soient bonnes ou mauvaises, aux autres. Ce n’est pas de la naïveté, c’est une compétence sociale qui n’aura pas été acquise spontanément. Aussi, certains peuvent paraitre manquer de, ce que l’on appelle dans le jargon de la bienséance sociale, « retenue ». A contrario, dans le milieu professionnel, si un collègue « particulier » reste silencieux lors d’une réunion agitée, ce n’est pas nécessairement qu’il n’a rien à dire, mais que cette spontanéité de « donner son avis » n’est pas une évidence acquise et qu’il faut par conséquent lui demander de s’exprimer. On peut très généralement se fier à une personne ayant un TSA, à condition que l’on apprécie la franchise et que, nous-mêmes, respections les règles qui lui sont chères. Étymologiquement, vous ne trouvez pas étrange que des personnes pourtant si « intègres » soient si peu intégrées socialement ? Il est possible qu’une personne intègre, qui respecte les règles donc, finisse par préférer respecter ces dernières et à s’y fier – après tout elles ont un caractère plutôt immuable - plutôt qu’autrui qui aura tendance à vouloir les enfreindre ? Quoi qu’il en soit, le franc-parler, qui est traditionnellement l’habit que chaussent quelques Alpha communicants, s’il est intégré à une mécanique de co-création, ne peut-il pas propulser la dynamique de groupe au-delà des lieux communs qui font consensus et parallèlement désamorcer certaines guerres intestines qui auraient couvé et mené, à terme, au pourrissement de cette même dynamique ?

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Issu du Guide Simon, Guide Ă destination des employeurs afin de mieux cerner le travailleur avec autisme lĂŠger, HANDISUP, France, 2014, 20 pages, p. 16.


© Frederic Philibert

[ 92 ]

Issu de Mon petit frere de la lune, Court-Métrage d’animation de Frederic Philibert, France, 2013

O

n pense que les autistes sont exempts de toute capacité créative. Pourquoi ? Il est vrai que le cerveau d’un individu

avec autisme, bien souvent, ne sera pas capable, avant d’y être formellement exercé, de lier un concept abstrait à une image mentale ou cependant il arrivera à lier à une ou plusieurs images, mais elles représenteront littéralement le sens premier du concept. Par exemple, un portefeuille pour un enfant autiste c’est avant tout un arbre. Pour qu’un individu trouve sa place dans la société, peut-on faire le pari fou que son mode de pensée singulier trouve sa place dans des logiques créatives ? Si on part du principe que dans la recette de l’innovation, il y a une épice qui se nomme « prise de risques », est-ce qu’un individu autiste, par sa vision singulière, peut-il représenter ce pari fou d’innover ? Et par extension, pourrait-il faire son entrée dans l’interaction créative, dans le bouillon, si on peut dire ?


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2. Est-il raisonnable de ne pas éradiquer l’autisme du secteur créatif ? 2.1.  Un syndrome handicapant et capacitant à la fois La plupart des informations sur l’autisme que l’on peut trouver se concentrent sur les difficultés et les écueils liés aux handicap de l’autisme. Ainsi dans ce même mémoire, et afin de prendre connaissance de l’ampleur des difficultés d’aborder un tel usager, il est question à mainte reprise de décrire les difficultés d’une telle condition. Une autre part et but de ce mémoire et de s’interroger sur comment certaines particularités ou traits autistiques peuvent être des atouts à la créativité. Ces atouts ne sont pas tant liés à des talents que ces personnes hors-normes peuvent présenter par le biais de leurs obsessions que l’on qualifie « d’intérêts restreints » ou de leur capacité mémorielle qu’à la forme que prennent les idées chez ces personnes. Certaines caractéristiques ne devraientelles pas représenter un potentiel ou une plus-value plutôt qu’un frein ou un handicap ? Parmi les talents souvent occultés chez les individus avec autisme, on peut trouver le dessin, le langage, le calcul ou la musique. Ces talents sont occultés, car l’entourage d’une personne avec autisme comprendra difficilement que cette dernière développe à ce point de tels talents alors que, par ailleurs, elle ne sera pas capable, par exemple, d’effectuer une tâche quotidienne jugée banale ou alors que ces compétences spéciales seront camouflées par des troubles du comportement et des stéréotypies.

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2.2.  Talents et éclats de compétences Stanley Greenspan, pédopsychiatre américain appelait « splinter skill »99 ce qui en français est traduit par « compétence dissociée » ou plus littéralement « éclat de compétences » et qui se caractérise par une capacité à effectuer une tâche spécifique qui ne peut se généraliser à d’autres tâches de natures diamétralement opposées100. Et cette capacité est très nettement supérieure aux autres compétences. Mais ces compétences sont aussi caractéristiques du fait qu’elles ne collent généralement pas aux traits autistiques relevés, elles sont en quelque sorte dissonantes vis-à-vis des lacunes liées aux défauts développementaux adjacents et ces compétences ont été appelées « îlots de compétences »101. Paul Tréhin, auteur et conférencier français et parent d’un adulte avec autisme, suggère que ces éclats de compétences soient mis à profit positivement. Que les approches éducatives s’appuient sur ces îlots de compétences pour asseoir la réussite future de l’apprentissage chez l’enfant et de l’intégration professionnelle de l’adulte. Des entreprises commencent à tirer parti de ces îlots de compétences des individus avec autisme. Les secteurs requérants une certaine méticulosité et un « acharnement » répétitif des tâches (telle que celles rencontrées dans le développement informatique par exemple) se montrent d’ores et déjà intéressés par de tels individus extraordinaires. Mais qu’en est-il des secteurs liés à la production intellectuelle ? Ou encore des secteurs de la créativité si l’en est ? 99

GREENSPAN S., L’esprit qui apprend : affectivité et intelligence, France, Odile Jacob, 1998, 375 p.

100

RADOMSKI MV, TROMBLY L., Occupational Therapy for Physical Dysfunction, États-Unis, Lippincott Williams & Wilkins, 2008, 1536p.

101

ROGÉ B., Autisme, comprendre et agir- Deuxième édition, France, Dunod, 2008, 225p., p.142

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Dans l’architecture par exemple, il serait plus qu’envisageable d’y voir prospérer un esprit aussi méticuleux et attaché aux détails que l’esprit d’un individu avec Asperger. En effet, la conception architecturale demande tant de technicité et de respect des aspects normatifs. 2.3.  La pensée en image, un atout dans l’association d’idées ? Temple Grandin est la première personne avec autisme à tenir compte de cette faculté exceptionnelle qui concernerait d’après elle beaucoup de cas d’autisme102, mais ne serait pas l’apanage de l’autisme. La pensée visuelle concernerait au moins trois pour cent de l’humanité103. La théorie de la pensée visuelle a été pour la première fois formulée par le théoricien de l’art américain Rudolph Arnheim en 1920104. Il avance que la pensée et l’intelligence qu’elle dénote ne sont pas uniquement représentées et représentables sous le seul angle du langage, mais que sous l’angle perceptif pouvait se développer une pensée et une intelligence visuelles. Il attribue à la perception un processus de raisonnement, en ce que l’observation fait intervenir une analyse visuelle par correspondances, autrement dit « percevoir c’est aussi résoudre des problèmes »105. Par cette théorie, Arnheim affirme que l’esprit d’un individu ayant une pensée visuelle serait en réalité un esprit conceptuellement fécond. Mais le penseur visuel autiste ne pourra pas abstraire les objets de sa perception si ces derniers ne concordent pas au contexte, il verra une sorte de « google images » défiler dans son esprit correspondant à l’ensemble des modalités de détails de ce qui est

102 103

GRANDIN T., Penser en images, Thinking in Pictures (1996), Paris, Odile Jacob, 1997, 264p.   DONVILLE B., Pensée visuelle et sentiment de soi [en ligne], article thématique, France, 2010. Consulté en décembre 2015. http://autisme.aveyron.free.fr/spip.php?article7#nb4

104 105

ARNHEIM R., La pensée visuelle, Champs Flammarion, 1976, réédition « poche » 1999, 350p.   ARNHEIM R., Ibid, p.78

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Source : http://www.carolemaurage.com/ Š Carole Maurage

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perçu. Temple Grandin se dit ainsi prisonnière d’une vue d’ensemble. Bernard Darras, sémioticien et esthéticien français, directeur du Centre de Recherche Images et Cognitions (CRIC), s’interroge sur les processus cognitifs intervenants dans la génération d’images mentales106 et avance qu’il y aurait des disparités entre les Hommes dans les traitements cognitifs liés à la formation d’images et par extension à la formation d’une pensée créative. Certains penseurs visuels ont aussi une pensée figurative107, comme Temple Grandin, Nikola Tesla ou Albert Einstein, qui leur permet d’avoir une représentation mentale en trois dimensions. Nikola Tesla était par exemple capable d’élaborer une expérience scientifique autour d’un prototype réalisé mentalement simplement en fermant les yeux108 et A. Einstein a théorisé les concepts de relativité générale et restreinte à partir d’images mentales : « Les mots ou le langage, écrit ou parlé, ne semblent jouer aucun rôle dans mon mécanisme de pensée. (…) Les éléments de pensée sont, dans mon cas, de type visuel »109, écrit Einstein. Il ajoute que les mots conventionnels destinés à exposer sa pensée viennent après, « laborieusement ». Le mécanisme opérant de la pensée visuelle est aujourd’hui inclus comme méthode dans le processus d’émergence d’idées ou processus d’idéation. Ainsi, des cartes mentales ou schémas heuristiques envahissent les réunions créatives sur lesquels vont pouvoir s’agripper de nouveaux concepts. Ces représentations sont d’une efficacité qui n’est plus à prouver. 106

DARRAS B. (dir.), L’image une vue de l’esprit. Étude comparative de la pensée figurative et de la pensée visuelle in. Recherche en communication, France, 1998, pp. 77-99

107

GRANDIN T. PANEK R., Dans le cerveau des autistes, The Autistic Brain (2013), Paris, Odile Jacob, 2014, 256 pages, p.157.

108

ZIEGLER A. (dir), Gifted Education as a Lifelong Challenge: Essays in Honour of Franz J. Mönks, Berlin, Editions LIT, 2012, 384 pages, p.50.

109

EINSTEIN A., in. Essai sur la Psychologie de l’invention dans le domaine mathématique de J. Hadamard, Paris, Blanchard, 1959, p.75

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3. Raisonnement autistique et idéation 3.1.  La créativité La créativité de même que l’innovation ne sont pas synonymes de nouveauté. Pour concevoir de la nouveauté, deux approches sont possibles 110. Une approche rationnelle qui s’enchaine par associations logiques souvent causalistes (x problèmes = x solutions) et s’épanouissant par l’empirisme causal des sciences et parfois par analogie qui fait intervenir l’imagination et l’observation de similarités entre systèmes réels (analogie directe) ou entre systèmes issus du réel et de l’intangible (analogie symbolique) qui est une source intarissable de créativité. Cette approche rationnelle peut être jugée responsable des évolutions techniques de l’humanité. Une approche par la pensée créative qui s’épanouit dans et par l’innovation et qui complète l’approche rationnelle. Il s’agit d’une approche intuitive également par association, mais possédant la liberté subjective que manifeste l’artiste par exemple. C’est une pensée de l’inattendu ou la preuve que la somme de 1 et 1 est égale ou non à 1 n’a que peu d’importance au regard des bouleversements que ce postulat impliquerait. C’est une approche par « et si ? », une invitation à laisser les dogmes derrière soi pour envisager l’innovation hors des repères rationnels. Sur le papier, en lisant ces définitions, on est en droit de se demander si une personne avec autisme serait « apte » à adopter une pensée créative ? En effet, un individu avec autisme a une grande difficulté à raisonner de manière irrationnelle. Ses raisonnements répondent à des règles immuables et l’abstraction est un exercice qui apparait souvent comme contre-nature pour lui. Il excellera en revanche dans l’approche rationnelle causaliste et on sait désormais que certains sont capables de se référer à l’analogie symbolique ou à la métaphore pour imager son raisonnement (Josef Schovanec est l’exemple le plus contemporain à ce mémoire). 110

AZNAR G., La créativité : définitions [en ligne], France, Autoédition, 2014, 32 pages, p.7-9. Consultable sur : http://crea-france.fr/wp-content/uploads/2014/04/La-créativité-Définitions-19-03-Guy-Aznar.pdf

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Iris Grace, une petite anglaise avec autisme de 5 ans en train de peindre. G-B, 2014. Crédit : © Thinkstock

Iris ne parle pas. Elle s’exprime par le biais de la peinture. Elle arrange les couleurs méticuleusement à sa convenance. Elle fait preuve d’une remarquable créativité artistique pour une enfant avec autisme. Ci-dessous, deux de ces oeuvres.


[ 100 ]

Issu du Guide Simon, Guide Ă destination des employeurs afin de mieux cerner le travailleur avec autisme lĂŠger, HANDISUP, France, 2014, 20 pages, p. 16.


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[ 101 ]

3.2.  La réunion créative Lors de réunions créatives, les fers se croisent bien souvent, mais les esprits s’accordent, s’entendent, se répondent, rétorques, il y a, somme toute, de l’interaction et de l’itération autour du processus créatif. Pour Isabelle Jacob, consultante formatrice et praticienne en créativité, haut delà des techniques, méthodes et savoir-faire il y a le savoir-être créatif 111. Dans son ouvrage Lumière sur la créativité, elle donne quelques pistes de bonnes pratiques et de savoir-être lors notamment d’une réunion créative : Savoir différer, suspendre son jugement - il s’agit d’être d’une disponibilité entière, vierge d’a priori et à cet égard, un individu avec autisme, comme développé précédemment, devrait être en bonne posture. Faire preuve de curiosité - Un individu avec autisme aura une grande difficulté à montrer de l’intérêt pour des sujets qui surviennent d’autrui. En revanche, cette curiosité et stature de veille peut se révéler poussée à l’extrême lorsque le sujet de cette curiosité « s’accroche » à ses intérêts. Trouver l’inspiration - Comment éviter la panne ? La page blanche ? Comment sublimer cette absence de muse en défi créatif lorsque, par nature, cette énergie émulatrice n’est mise à profit que pour un nombre restreint de domaines d’intérêt ? Peut-on alors parler d’inspiration chez un individu avec autisme ? Cela ne veut pas pour autant dire qu’il n’incarnera pas l’inspiration pour autrui, qu’il sera inspirateur par son décalage ? Faire preuve de créativité existentielle - « Choisir le confort du chemin tracé et des habitudes » est une nécessité chez beaucoup d’individus avec autisme qui ont un besoin de stabilité et peuvent même faire appel à des rituels. Ils n’en sont pas pour autant frustrés. Ce besoin de suivre ses propres désirs « autopersonnels » et centrer son existence sur soi n’est absolument pas inclus dans la condition d’un esprit avec autisme. Ils ont l’air replié sur eux même et ne pas être ouvert au monde, seulement il ne ressent pas l’intérêt de s’ouvrir. Et s’il doit absolument le faire, ce sera selon un processus antagoniste et frustratif si le résultat attendu n’est pas atteint, ce qui est malheureusement trop souvent le cas (socialement). 111

JACOB I., Lumière sur la créativité, Paris, Édition IRIS sur la créativité, 2011, 310 pages, p.53

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Source : http://www.carolemaurage.com/ Š Carole Maurage


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3.3.  Les théories créatives, la théorie CK et la place d’un « knowledger » avec autisme ? Afin de trouver une nouvelle voie innovante à la créativité, des théoriciens tels Armand Hatchuel ou Bernard Weil ont amené, par leurs constats d’une conception confinée à l’optimisation et à une modélisation rigide, la théorie C-K (pour Concept-Knowledge) à émerger. Cette théorie, formulée par une équipe du centre Mines Paritech en 1996 et co-développée jusqu’en 2007 par Armand Hatchuel, ingénieur français de la conception et directeur adjoint du centre et Benoît Weil, montre qu’il est possible d’innover et de développer la créativité en se conformant à une méthodologie rationnelle.112 Cette théorie de conception repose sur le postulat que l’innovation peut se construire à partir d’une dynamique entre espace de concepts aux propositions qui ne sont encore décidées comme « faisables » et un espace de connaissances qui est détenteur du savoir. La dynamique d’idéation devra constamment, au-delà de trouver un consensus, faire émerger des propositions inconnues et innovantes qui se placeront sur le fil mis en tension entre l’espace de concepts et l’espace de connaissances. Dans cette dynamique, comment ne pas envisager qu’une personne ayant un S.A. puisse incarner un « knowledger » de l’espace de connaissances ? Il est aisé d’imaginer qu’un aspie puisse être consulté pour son expertise dans un domaine très spécifique. En plus, la pudeur sociale ne le retiendrait pas à confronter ses connaissances à des concepts qui répondent à des modalités abstraites ou qui ne répondent à rien de ce qu’il aurait pu rencontrer par ailleurs. Une voie d’ouverture à la créativité d’une certaine façon, par la dynamique créative s’appuyant sur la théorie C-K.

112

MINES PARISTECH, Présentation : Théorie et méthodes de la conception innovante [en ligne], rubrique thématique, Site Mines Paristech, consulté en décembre 2015. Consultable sur : http:// cgs-mines-paristech.fr/tmci/presentation/

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3.4.  Ne pas pratiquer ni saisir le second degré, un atout à la communication de projet ? La communication est indispensable à la réussite d’un projet. Cette communication souvent complexe peut avoir recours à de la transmission d’informations implicites. C’est-à-dire que la direction de projet n’a pas jugé nécessaire de détailler des éléments pensant qu’ils seront implicitement pris en compte. C’est un inconvénient important pour une personne avec autisme, car pour ce dernier ce qui n’a pas été dit et demandé, n’est pas à faire. C’est le cas d’une communication implicite fortuite qui n’a pas de volonté de nuire ou de porter atteinte à la dynamique du groupe. Il y a en effet, une communication implicite qui joue sur le double niveau de langage à des fins de jeux de pouvoir. S’il est nécessaire de transmettre de manière détaillée toute information c’est aussi une assurance dans la communication projet d’une communication intégrale pour tous. Aussi, la communication ne sera pas entravée par des conflits liés à des non-dits ou des manipulations d’opinions.

© Bill Watterson «Calvin et Hobbes»

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[ 105 ]

E

ISM T U A

© Mondelez International

« Ouvrir le champ des possibles » avant de devenir la punchline d’une marque de biscuits Nantais désigne bien une des qualités du designer qui tend à élargir autant que faire se peut son angle de vue afin d’offrir une multitude de possibilités dont certaines seront réellement porteuse, in-fine, d’une valeur innovante. Alors pourquoi émuler la « pensée visuelle » comme l’a fait la méthodologie heuristique qui inonde les réunions créatives alors que l’on peut stimuler cette même réunion spontanément en invitant un esprit atypique à affirmer ses capacités créatives propres ? Oser est un risque qui a été mesuré et présenté sans réel danger, oser c’est prendre un risque raisonnable en sommes. Alors osons, malgré les différences et au-delà des a priori, faire le pari de l’autisme dans le processus de création !


[ 106 ]

APPENDICE 2 ‘‘ Usages, us et usure ’’

© Pierre O. Deschamps ARTCURIAL

Note sur cet usager et son objet


APPENDICE 2 | “Usages, us et usure”

[ 107 ]

Il serait incomplet de parler de l’usager sans parler de «l’objet». Parce qu’à l’instar de la logique mathématique incluant des facteurs, des entiers et des coefficients, de la logique grammaticale qui est régie par des règles de subordination entre sujet, objet, verbe et compléments et de la théorie musicale qui introduit les notions de notes, de hauteur de notes, de portée et de rythme, le designer doit composer, formuler et articuler donc, les usagers, leurs usages, leurs besoins avec un objet, un service qui lui sera subordonné.

« Il faut du courage et de la force, de la foi même certains jours, pour avancer contre vents et marées vers cet abandon qui ne se délivre que dans l’usure : quand l’homme, ayant été défait et s’étant défait de tout, n’a plus d’usage. par Lorette NOBÉCOURT écrivain française, est l’auteure d’une dizaine de livres. Elle a rencontré le designer céramiste Guillaume BARDET à la Villa Médicis en 2002. Il est l’auteur de L’usage des jours (ci-contre) aux éditions Bernard Chauveau, ouvrage présentant le projet ambitieux de concevoir 365 céramiques dessinées par Bardet et façonnées par des artisans de la Drôme.


[ 108 ]

L’usager n’est-il pas, à cet égard, aussi concepteur ? En effet, l’usager va pouvoir agir de manière itérative sur l’objet ou sur le service afin d’en améliorer les traits et les valeurs afin qu’il réponde au mieux à son usage propre, sa préhension. L’usager produirait donc de la valeur d’usage. C’est pour cela que, selon moi, on ne peut scinder l’usage de l’usure. Car ne seraitce pas cette usure, par l’utilisation de l’usager, qui affinerait les traits de l’objet ? Cette usure pourrait être qualifiée sous différents termes : appropriation, adaptation, réglages, bricolage, bidouillage, détournement, etc.

L’ USAG E R , CET AUTRE CONCEPTEUR DES SERVICES PUBLICS

Ci-contre, 1ère de couverture du mémoire de fin d’études (2014) de Caroline Kermarrec, designer issu également de l’option Management du Design et de l’Innovation du CFA de l’École de Design, promo 2014.

Caroline Kermarrec Avril 2014 Management du design et de l’innovation

Dans ce mémoire d’excellente qualité, Caroline tend à légitimer la place d’une approche de designer dans les réflexions publiques. Ce constat de nécessité que dresse Caroline est une des conséquences de l’éloignement des institutions vis-à-vis des “petites réalités” citoyennes.


APPENDICE 2 | “Usages, us et usure”

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Est-ce que cette usure ne répondrait pas à un besoin fondamental, intuitif et créatif de l’usager de faire correspondre son environnement à lui-même ? De subjectiver encore plus son environnement voire de le soumettre à ces velléités ? Parfois ces usures sont liées à des caractères physiologiques ou de posture comme le pommeau de vitesse d’une voiture qui va voir ses inscriptions de vitesses disparaitre parce que le matériau plastique qui le compose se sera, par usure, soumis à l’usage du conducteur et à la forme de la paume de sa main. À noter que dans le cas du levier de vitesse, les chiffres disparaissent dès lors qu’ils n’ont plus raison d’être puisque l’usager a enregistré, acquis ces informations dans sa mémoire d’usage. L’objet ne devient-il pas extension de l’usager à partir du moment où celui-ci l’assimile au point de l’user, de le corroder ? C’est sur ce point notamment que, selon moi, se séparent design et artisanat. En ce que la conception devient, lors de la production, extension de l’usager. Ce qui reviendrait à dire qu’à un usager correspond un objet. Le designer ne répondrait donc pas, mais proposerait. Ce qui reviendrait à dire qu’à un usager correspondraient des propositions de modalités d’usage qui pourra être représenté par un objet multimodal 113.

113

Le terme multimodal est sciemment employé par refus du terme modulaire. Terme galvaudé qui a été saigné de toute son essence tant il a été sur-employé en design.



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PARTIE 2 | CET USAGER HORS-NORMES COMMENT LE DESIGN PEUT-IL CATALYSER SON AUTONOMIE ?


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LE DESIGN, CATALYSEUR D’AUTONOMIE ?

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1. Catalyseur d’autonomie ou de confort ? Sur les questions des situations de handicap, la question de l’autonomie est récurrente et est, depuis maintenant quelques années, au centre des préoccupations et débats des hautes instances et du gouvernement. Des programmes ou plans sont ainsi déployés à grand renfort de publications, de communiqués et campagnes médiatico-politiques. Afin de bien comprendre la notion d’autonomie, il convient, au préalable, d’en donner une définition. Il s’agit de la capacité de quelqu’un à ne pas être dépendant d’autrui et c’est ce qui caractérise ce qui fonctionne ou évolue indépendamment d’autre chose.114 Dans le design industriel, la notion de confort est liée à l’ergonomie d’un objet (une des conditions de confort), d’un service ou d’un espace dans ce qu’il préserve l’usager de l’effort dans son acception négative (détérioration qualitative du sujet par l’objet ou perte d’efficacité entravant l’expérience de l’usager) et est liée aux notions de bien-être, de quiétude et de tranquillité.115 À ce titre, il convient de s’interroger sur ce que le design peut et a pu proposer à cet usager qu’est l’individu avec autisme sur différents domaines ou ce qui pourrait, dans une première approche, définir des pistes de propositions. L’autonomie d’un individu s’exprime sur une sphère de besoins à la base de sa vie quotidienne. Aussi, les domaines concernés sont l’habitat personnel, le besoin de se reposer, de se retirer, le besoin de repères et d’orientation, se concentrer pour étudier ou travailler, le développement cognitif, le développement de l’estime, de la reconnaissance. Autant de domaines qui apportent leur lot de propositions de la part du design et d’autres approches de conception. 114

Dictionnaire LAROUSSE en ligne, définition d’autonomie [en ligne], France, consulté en octobre 2015. http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/autonomie/6779

115

FALZON P., MAS L., Les objectifs de l’ergonomie et les objectifs des ergonomes, communiqué, France, CNAM, 2007, 9p.

PARTIE 2 | CET USAGER HORS-NORMES


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LE DESIGN, CATALYSEUR D’AUTONOMIE ?

1.1. L’habitat personnel ou la question de s’abriter, se reposer, résider « “Habiter” (wohnen) signifie “être présent au monde et à autrui”. […] Loger n’est pas “habiter”. L’action d’“habiter” possède une dimension existentielle. […] “Habiter” c’est […] construire votre personnalité, déployer votre être dans le monde qui vous environne et auquel vous apportez votre marque et qui devient vôtre. […] C’est parce qu’habiter est le propre des humains […] qu’inhabiter ressemble à un manque, une absence, une contrainte, une souffrance, une impossibilité à être pleinement soi, dans la disponibilité que requiert l’ouverture »116 Thierry Paquot, Extrait de Demeure terrestre (2005) Habiter donc, c’est bien autre chose que se loger. La plupart des conceptions d’habitations sont pensées comme des logements qui « accueillent ». Beaucoup d’adultes avec autisme qualifié de modéré à lourd sont ainsi accueillis dans des structures spécifiques d’où souvent sont empreint des normes de conception hospitalière pour des raisons législatives. Concernant les personnes avec autisme, on ne peut plus parler d’internement, mais si le terme et les prises en charge ont bien évolué, ces « lieux de vie » comme défini par Deligny, sont-ils si différents, dans leur conception, d’établissements cliniques ou de résidences du type EHPAD ? Ne s’agissant pourtant pas du même type d’usagers, on ne devrait pas retrouver autant de similitudes, du moins sans adaptations du côté de l’usager « résident ». Ne serait-ce pas parce que l’encadrement, la structure sont similaires que les lieux sont similaires ? Ce qui voudrait dire que la conception a pris en compte l’usage des lieux par les pratiques des praticiens encadrants, des professionnels sans prise en compte des besoins, sinon individuels, au moins de cette « catégorie » hors-norme d’usagers. 116

PAQUOT T., Demeure terrestre : Enquête vagabonde sur l’habiter, Paris, Europan, 2005, 187 pages, pp. 13 et 15.

PARTIE 2 | CET USAGER HORS-NORMES


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La seule exception trouvée lors de recherches et qui est très récente : L’Éveil du Scarabée à Champcevrais dans l’Yonne (89) construit en 2014.117 C’est un projet qui a mis 10 ans à sortir de terre, mais qui est un réel exemple de prise en compte de TOUS les usagers et des spécificités lié à l’autisme. La prise en compte de la sensibilité sensorielle accrue chez de nombreux individus avec autisme, les choix de couleurs, de matières, jusqu’à la possibilité de personnalisation des chambres des habitants (on peut les appeler ainsi dorénavant) sont autant de paramètres scrupuleusement suivis pour un coût de conception et de construction équivalent à une construction HLM (2000€ le m²) 118.

L’éveil du Scarabée, France, 2014. Foyer d’accueil médicalisé (FAM) pour adultes avec autisme.Yonne (89) Crédit : © Négroni Archivision

Ci-dessus, Photographie de la maquette du projet et ci-contre photographie de la réalisation.

117

ENTREPATIENTS, Autisme : l’Éveil du Scarabée, un nouveau centre unique en France ! [en ligne], France, Article, 2015. Consultable sur : http://www.entrepatients.net/fr/sante/actualites/1052389autisme-autisme-l%E2%80%99eveil-scarabee-un-nouveau-centre-unique-france

118

NEGRONI E., Centre HQE pour adultes autistes, France, page thématique sur site. Consulté en nov. 2015. Consultable sur : http://www.negroni-archivision.com/fr/Vitrine/dossier/centre-autistes-negroni-archivision.html


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LE DESIGN, CATALYSEUR D’AUTONOMIE ?

1.2. Les repères spatiaux ou la question de se repérer, s’orienter Les personnes ayant un TSA seraient habiles dans le traitement visuospatial dû à leur pensée figurative qui leur permettrait d’avoir des facilités à résoudre des casse-têtes ou encore de dessiner en trois dimensions et ont une excellente orientation spatiale.119 Cependant, l’attention spatiale semble être orientée localement. C’est-à-dire que ce n’est pas par un ensemble observé d’un espace que l’individu avec autisme sait se repérer, mais c’est par l’agglomération de tous les composants de l’espace perçu en détail, mémorisés et traités par analogies. C’est pour ça que dans un environnement trop rapide, l’individu avec autisme n’aura généralement pas le temps de traiter complètement et suffisamment les informations. Ce serait comme si, 119

CARON M-J., Dissociation entre le traitement spatial et visuo-perceptif dans l’autisme de haut niveau, thèse de doctorat en psychologie, Québec, 2008. Consultable sur : http://www.archipel.uqam. ca/860/1/D1627.pdf

Pictogrammes destinés au catalogue produits de SAECO, Russie, 2011. Crédit : © Znids - real yo-boy

Les pictogrammes, associés, permettent la lecture des fonctions et usages des différents appareils.

PARTIE 2 | CET USAGER HORS-NORMES


LE DESIGN, CATALYSEUR D’AUTONOMIE ?

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sur une autoroute, les panneaux signalétiques, leurs codes couleur et leurs idéogrammes utilisés pour l’efficacité dans leur traitement, étaient retransformés en informations textuelles signifiant ces codes et formes. Focalisés sur la lecture, nous n’aurions tout bonnement pas le temps de traiter les informations. Les pictogrammes sont des représentations figuratives ou symboliques, exprimant des mots ou des idées dans le cas des idéogrammes, sans référence au langage parlé120. Ils sont prioritairement destinés aux personnes ne pouvant s’exprimer par la parole ou l’écrit. La méthode PECS précédemment décrite utilise un code pictographique dont les objectifs sont d’apprendre à entamer spontanément une démarche de communication. Le PECS propose des séries de pictogrammes pouvant être complétées par des images personnalisées et permet de développer un intérêt pour la désignation et le désir d’échanger. Cette méthode, réservée à l’apprentissage des interactions et en introduction du langage chez les enfants inspire de nombreux jeux et applications sur tablettes. Cette approche pictographique est intéressante pour l’adulte, car il demeure une facilité de compréhension visuelle grâce à la « pensée visuelle ». Malgré la facilité que manifestent les personnes avec autisme, cette aptitude pourrait être une piste afin de développer ou d’améliorer un concept signalétique de repérage au bénéfice de tous les usagers.

120

CNRTL, Définition de pictogramme. Consultable sur : http://www.cnrtl.fr/lexicographie/pictogramme

PARTIE 2 | CET USAGER HORS-NORMES


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LE DESIGN, CATALYSEUR D’AUTONOMIE ?

1.3. Travailler et réfléchir ou la question de se concentrer, d’étudier Les personnes avec autisme ont de grandes difficultés d’attention. Le problème est double : une attention focalisée et une attention fragile par les stimuli de l’environnement. Il y a donc une nécessité d’un environnement propice à la concentration. Comment le design peut-il proposer des «solutions» pour favoriser la concentration ? Les facteurs exogènes et paramètres environnementaux Afin de favoriser la concentration, on pense classiquement à réduire les stimuli par leur nombre et variétés dans un lieu et contexte donné. En conception, on s’attache à analyser leur répercussion dans un espace donné. Pour cela, des techniques de mesure et des calculs de coefficient d’absorption acoustique α et des principes d’éclairagismes couplés aux normes en vigueur permettent de cadrer la conception. Mais peut-on mesurer la concentration ? De quoi dépend-elle vraiment ? Les facteurs endogènes et paramètres d’attention Comprendre dans quelles conditions se développe la concentration, c’est comprendre comment fonctionne le mécanisme d’attention. Ainsi pour William James, psychologue et philosophe américain de la fin du XIXe siècle, « L’attention est la prise de possession par l’esprit, sous une forme claire et vive, d’un objet ou d’une suite de pensées parmi plusieurs qui semblent possibles [...] Elle implique le retrait de certains objets afin de traiter plus efficacement les autres. » La dimension perceptive d’un contexte ou d’un lieu donné peut alors perturber l’attention sur le sujet que l’on travaille ou que l’on étudie, mais l’absence de stimuli sensoriels et de maintien de la sphère perceptive empêche toute assise de l’attention qui se doit d’être ancrée dans le réel donc dans un contexte donné. Les stimuli maintiennent un niveau de vigilance dans le réel et c’est cet aller-retour entre perception et attention qui conditionne une bonne concentration.

PARTIE 2 | CET USAGER HORS-NORMES


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Mobilier de bureau «Rewrite» par Gamfrasi Crédit : © Gamfrasi

Ce bureau a été conçu en prenant en compte le besoin des usagers d’être isolé du bruit


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Portrait de Victor Papanek. Circa 1970. Crédit inconnu.

Victor PAPANEK à propos des responsabilités du designer :

“ Son discernement social et moral doit

s’exercer bien avant qu’il ne commence à créer, car il doit porter un jugement, un jugement a priori, pour décider si le produit qu’il doit concevoir, ou reconcevoir, mérite réellement son attention. En d’autres termes, est-ce que sa création contribue ou non au bien être social?” Victor PAPANEK in. Design pour un monde réel, Éditions Mercure de France, France, 1972, 358p.


LE DESIGN, CATALYSEUR D’AUTONOMIE ?

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2. Le design comme levier de transition douce Que signifie transition ? D’après le CNRTL, la transition définit le passage d’un état à un autre. Une notion de gradualité s’est ajoutée au fil du temps dans la définition. La réponse par le design inclusif et le design «for all» L’Inclusive Design Institute définie le design inclusif comme: « La conception (le design) qui est inclusive de l’ensemble de la diversité humaine par rapport à la capacité, la langue, la culture, le sexe, l’âge et d’autres formes de l’homme inclusivement différence. La conception est considérée comme le fait d’améliorer l’expérience pour tout le monde. »121 Le design inclusif consiste donc à penser un environnement centré sur les besoins des usagers et son autonomie en éliminant ainsi les obstacles et les barrières aux usages, assurant des conditions optimales d’utilisation (minimum de manoeuvres et d’efforts physiques) prenant en compte : le handicap, l’âge, la santé, la mobilité, le travail. Apparu au milieu du XXe siècle, répondant à la nécessité du designer de contribuer au bien-être social comme interrogeait Victor Papanek122, peut aujourd’hui se nommer design universel ou design pour tous. Porté par la «silver économie», qui qualifie une économie détenue par une majorité de personnes âgées dans un contexte sociétal de vieillissement croissant de la population, l’intérêt du design inclusif se soumet à une logique de marché, bien loin de la volonté bienveillante initiale.

Inclusive Design Institute, Catégorie «Overview» (site), Canada, Consulté en février 2016.

121

Consultable sur : http://inclusivedesign.ca/about/#Clusters

PAPANEC V., Design pour un monde réel, traduction pour les Éditions Mercure de France,

122

France, 1972, 358 pages.

PARTIE 2 | CET USAGER HORS-NORMES



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PARTIE 3 | CET INSPIRATEUR HORS-NORMES L’AUTISME PEUT-IL ÊTRE FACTEUR D’INNOVATIONS POUR TOUS ?


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Si des normes sociales implicites définissent la manière dont une communauté, une société civile se doit d’agir ou de se comporter, ce qu’elle peut faire ou non, des normes explicites définissent ce que l’on peut faire ou non en matière de conception. Concernant le design industriel, de manière large, la conception se doit de prendre en compte toutes les contraintes et les normes liées à la sécurité et à l’environnement. Ces exigences sont ainsi citées et répertoriées avec ses paramètres mesurables lors de validations dans le cahier des charges fonctionnel et technique. Qu’en est-il du respect de ces normes ? Amènent-elles à un réel avantage vécu par les usagers concernés ? Permettent-elles une amélioration au bénéfice de tous ? Dans le cas de l’autisme, un handicap maintenant bien identifié, ces normes sont-elles adaptées sinon prévoient-elles simplement ce type de handicap ? Autant de questions que le concepteur et le designer se doivent de soulever afin de porter un éclairage sur les possibilités éventuelles à envisager.


L’AUTISME, FACTEUR D’INNOVATIONS POUR TOUS ?

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1. Les normes actuelles et leur prise en compte des usagers 1.1. Le contexte normatif général En matière de conception architecturale notamment – et parce que c’est le secteur qui concerne le plus le design d’espaces – le contexte normatif est omniprésent. Des directives nationales et supranationales (directives européennes par exemple), la législation et la réglementation en vigueur influencent de manière forte ce contexte de normes. En matière de santé au travail, des normes sont appliquées en termes de niveau d’éclairement, de position des postes en premier ou second jour, d’acoustique, de niveau de protection au feu des matériaux employés. Des normes environnementales, puisqu’il s’agit d’une préoccupation omniprésente à de nombreux niveaux dans les sociétés occidentales, régissent et cadrent la construction et la conception d’une manière plus large. Ainsi, il coexiste un ensemble de normes environnementales telles : la norme HQE pour Haute Qualité Environnementale, normes NF pour les habitats individuels encadrées et définies par l’AFNOR l’autorité garante des normes à différentes échelles en France, la norme BBC pour Bâtiment Basse Consommation qui était jusqu’alors plus en label comme il en existe tant d’autres (HPE, HTE, FSC, Qualisol, etc.) qui s’attarde sur les aspects et qualités énergétiques du bâtiment. Un autre pan normatif important, et qui est le plus pertinent pour la présente réflexion, concerne directement les personnes en situation de handicap.

PARTIE 3 | CET INSPIRATEUR HORS-NORMES


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L’AUTISME, FACTEUR D’INNOVATIONS POUR TOUS ?

1.2. Contexte normatif lié aux handicaps La loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées du 11 février 2005 123 apporte des évolutions fondamentales pour répondre aux attentes des personnes handicapées. c. Le droit à compensation La loi handicap met en œuvre le principe du droit à compensation du handicap, en établissement comme à domicile. La prestation de compensation couvre les besoins en aide humaine, technique ou animalière, aménagement du logement ou du véhicule, en fonction du projet de vie formulé par la personne handicapée.

d. La scolarité La loi handicap reconnaît à tout enfant porteur d’un handicap le droit d’être inscrit en milieu ordinaire, dans l’école la plus proche de son domicile.

e. L’emploi La loi handicap réaffirme l’obligation d’emploi d’au moins 6 % de travailleurs handicapés pour les entreprises de plus de 20 salariés, renforce les sanctions, crée des incitations et les étend aux employeurs publics.

f. L’accessibilité La loi handicap définit les moyens de la participation des personnes handicapées à la vie de la cité. Elle crée l’obligation de mise en accessibilité des bâtiments et des transports dans un délai maximum de 10 ans.

L’accessibilité est une condition primordiale pour permettre à tous d’exercer les actes de la vie quotidienne et de participer à la vie sociale. Aussi la loi prévoit-elle le principe d’accessibilité généralisée, quel que soit le handicap (physique, sensoriel, mental, psychique, cognitif, polyhandicap). La loi handicap rend obligatoire l’accessibilité des locaux d’habitation neufs, privés ou publics et 123

LEGIFRANCE, Article L.114 de la Loi du 11 février 2005 du Code l’Action sociale et des familles. Consultable sur : http://www.legifrance.gouv.fr

PARTIE 3 | CET INSPIRATEUR HORS-NORMES


L’AUTISME, FACTEUR D’INNOVATIONS POUR TOUS ?

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dans certains cas, des locaux d’habitation existants lorsqu’ils sont l’objet de travaux. La loi étend l’obligation d’accessibilité à toute la chaîne du déplacement : la personne handicapée doit pouvoir accéder à tous les bâtiments recevant du public et évoluer de manière continue, sans rupture (aménagement de voiries, accès aux gares, transports en commun…). 1.3. Dans les faits En France, il y a près de 10 millions de personnes en situation de handicap.124 Le gouvernement avait fixé l’objectif en 2005, aujourd’hui non atteint et prorogé pour 3 à 9 ans, la mise en application du décret de mise aux normes d’accessibilité de tous les établissements recevant du public (ERP). Cela concerne les personnes à mobilité réduite (PMR), les non et malvoyants, les personnes avec un handicap moteur ou mental, les personnes âgées, etc. La question de l’accessibilité concerne les bâtiments et logements, la voirie, les véhicules et transports, les équipements tels que les rampes d’accès et escalier, équipements ménagers (cuisine, salle de bain, sanitaire), les portes et poignées, les circulations et dégagements, la signalétique, les interrupteurs et autres équipements électriques, etc. Autrement dit, tous les aspects de notre cadre de vie. En juillet 2015, cette prorogation du décret d’application est qualifiée de « déception inadmissible » par les associations françaises, dont l’association des Paralysés de France 125. Dans un tel contexte, on est en droit de se poser de sérieuses questions quant à la priorité qui est donnée aux pouvoirs publics en faveur des personnes en situation de handicap.

124

L’ADAPT L’association pour l’insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées, Chiffres Clé [en ligne], rubrique thématique, Site de l’association, consulté le 2 décembre 2015. Consultable sur : http://www.ladapt.net/chiffres-cles.html

125

LEPARISIEN, Handicap: le gouvernement repousse de 3 à 9 ans les délais de mise aux normes, Article [en ligne], France, publié le 21 juillet 2015. Consulté le 2 décembre 2015. Consultable

sur : http://www.leparisien.fr/societe/handicap-le-parlement-repousse-de-3-a-9-ans-les-delais-de-mise-auxnormes-21-07-2015-4961471.php#xtref=https%3A%2F%2Fwww.google.fr%2F

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L’AUTISME, FACTEUR D’INNOVATIONS POUR TOUS ?

Les handicaps liés à des déficiences motrices et visuelles sont les plus représentés dans les textes. Partant du principe d’égalités des droits et des chances de chacun, qu’en est-il de la prise en compte des handicaps notamment sensoriels que peuvent subir les personnes avec autisme ? Il est vrai que des normes d’éclairage et acoustiques existent dans le cadre des normes santé et sécurité au travail. Ce sont des normes qui peuvent être jugées de « norme de confort » ce qui pourrait paraître normal en ce sens qu’elles sont aussi garantes de l’ergonomie d’un produit ou d’un lieu. Qu’en est-il de la prise en compte du besoin d’informations explicites et de la pensée visuelle des usagers avec autisme ? La notion de signalétique, dans l’idéal, est abordée par une double approche : optique et cognitive. C’est-à-dire par une approche de ce qui peut et doit être vu par tout usager, de ce qui doit être vu de l’usager non ou malvoyant et l’approche de ce qui peut et doit être compris par tout usager, de ce doit être compris de l’usager analphabète ou dyslexique par exemple. La prise de conscience d’une efficacité des pictogrammes et idéogrammes est bien présente et un guide de bonnes pratiques (particulièrement bien illustré) en matière de signalétique et de handicaps126 a été réalisé par l’association Tourisme et Handicaps en 2014 et un autre guide pour la signalétique accessible à tous a été édité la même année par un partenariat entre villes, métropole et l’Établissement Public d’Aménagement de Saint-Étienne127.

TOURISME HANDICAP (Asso.), http://www.tourisme-handicaps.org/site/assets/ files/1041/guidesignaletiquepictogrammes.pdf

http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/GUIDE_METHODOLOGIQUE_SAINT_ ETIENNE_Pour%20une%20signal%C3%A9tique%20accessible%20%C3%A0%20tous.pdf

126

127

PARTIE 3 | CET INSPIRATEUR HORS-NORMES


L’AUTISME, FACTEUR D’INNOVATIONS POUR TOUS ?

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1.4. Contexte normatif concernant des éléments sensoriels : éclairage et acoustique

“ Les personnes déficientes visuelles ont besoin d’un éclairage de base homogène, suffisant et non éblouissant. En effet, ces dernières sont très sensibles à l’éblouissement et aux changements brusques de luminosité qui provoquent des ruptures d’orientation et gênent la compréhension de l’espace. La puissance et la qualité de l’éclairage, ainsi que les choix d’orientation et de positionnement des sources lumineuses sont des points de vigilance à prendre en compte lors de l’implantation de l’éclairage. ” 128

Handinorme.com Selon l’article 14 de l’arrêté du 1er aout 2006 fixant les dispositions prise pour l’application des articles R111-19 à R111-193 et R111-19-6 du code de la construction et l’habitation relative à l’accessibilité aux personnes handicapées des ERP et des installations ouvertes au public129, le renforcement de la qualité de l’éclairage ne se traduit pas nécessairement par une augmentation de la valeur d’éclairement, mais peut par exemple passer par une attention particulière portée au choix et à la disposition des luminaires, ou à la température de couleur de la lumière.

128 HANDINORME, L’éclairage, soyez prêt pour 2015 ! [en ligne], France, Article thématique de site, consulté en décembre 2015. Consultable sur : http://www.handinorme.com/accessibilitehandicap/23-leclairage-soyez-pret-pour-2015-

129 LEGIFRANCE.GOUV, Affichage des textes relatifs à la loi Handicap [en ligne] Consultable sur : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte. do?cidTexte=JORFTEXT000000821682&categorieLien=id

PARTIE 3 | CET INSPIRATEUR HORS-NORMES


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L’AUTISME, FACTEUR D’INNOVATIONS POUR TOUS ?

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2. Aspects normatifs et innovation de rupture 2.1.  L’innovation de rupture à l’écoute des usagers Définie par l’Américain, professeur à Harvard et auteur sur le thème de l’innovation, Clayton Christensen, dans son livre The Innovator’s dillemma 130 ou Le dilemme de l’innovateur en français, l’innovation de rupture fait, selon lui, montre d’une différence fondamentale au regard de ce que le marché propose. L’innovation de rupture peut être portée par une technologie, un produit ou un service qui finira par remplacer le ou les modèles existants ou s’y approchants alors qu’au départ cette innovation se trouve être moins performante. Selon Benoit Weil, collègue d’Armand Hatchuel précédemment cité et professeur à l’école des Mines Paritech en théorie du Design, l’innovation de rupture ne consiste pas uniquement à élaborer de nouvelles normes qui supplanteraient les autres, mais elle doit consister à explorer les voies techniques les plus audacieuses dans un contexte de coopérativité des acteurs131. Pour résumer, le designer, par la voie de l’innovation de rupture, peut donner avec la collaboration créative de tous les acteurs toute force à des propositions dépassant tout intérêt de concourir avec l’existant.Il ne s’agit pas de refaire les normes, ni d’y ajouter un aspect, mais bien de développer des propositions hors-normes qui auront une valeur de prescription et parleront pour et par l’usager. Et en ce sens, l’innovation de rupture est à l’écoute de l’usager, s’adresse à lui et est médium du dialogue des usagers qui deviennent acteurs de l’innovation. Cette appropriation de l’innovation est très présente actuellement dans les modèles économiques de partages et de mutualisation. Les économistes utilisent le terme « Uberisation » de la société pour qualifier (en partie) ce phénomène, le designer que je suis n’adhère que très moyennement à cette étiquette sorte d’appropriation cynique de l’Économie.

130

CHRISTENSEN C., The Innovator’s Dilemma: The Revolutionary Book That Will Change the Way You Do Business, États-Unis, HarperBusiness, 1997, réédition 2011, 336 pages.

131

COGEZ P., LE MASSON P., WEIL B., The management of new common goods for collective growth in ecosystems : roadmapping for disruptive innovation in the semiconductor industry, Transcript de la Conférence IPDM, Murcie, Espagne, 2010.

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L’AUTISME, FACTEUR D’INNOVATIONS POUR TOUS ?

2.2.  L’innovation de rupture par la marginalité Le design se doit d’oser et en ce sens, de proposer un partipris à la hauteur des enjeux qui ont été relevés. Dans cette optique, peut-on envisager qu’un type d’usager marginal dans le sens atypique comme un individu ayant un autisme, un aspie par exemple, puisse permettre l’évolution de paramètres pris en compte dans une conception ? Le caractère innovant pourrait être double : dans son approche et dans ce en quoi il répondrait à un besoin formellement identifié et peu (ou pas) pris en compte. Dans le cas de l’autisme, si on partait du principe que les traits d’hyper et d’hyposensibilité sensorielle qui caractérisent beaucoup d’individus avec autisme étaient un « révélateur » d’améliorations probables d’aspects de conception liés aux stimuli sensoriels. L’éventualité complémentaire serait que si ces stimuli se répercutent tout aussi négativement sur les autres usagers « neurotypiques », ne seraitce pas un postulat de départ qui pourrait déboucher sur une réelle innovation de rupture ? Si ce postulat se vérifiait, que des concepts innovants naissent, impactant tout type d’usager, ne serait-ce pas une preuve que l’autisme peut être facteur d’innovation et de créativité ? Un représentant d’une diversité, d’une multiplicité cérébrale et non plus marginalisée qui deviendrait, à ce titre, un inspirateur de changements innovants et de créativité.

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L’AUTISME, FACTEUR D’INNOVATIONS POUR TOUS ?

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3. L’autisme, une faculté de détections des signaux faibles? Ce terme est issu du monde dl’organisation et est un terme d’intelligence économique. Ils sont définis généralement comme des éléments perçus de l’environnement qui revêtent des valeurs de risque ou d’opportunité. La prise en compte de ces signaux est primordiale dans toute démarche de veille créative en design. D’après Philippe Cahen, conférencier français en intelligence économique, la prise en compte des signaux faibles est une absolue nécessité dans un monde qui va très (trop) vite132, mais il permet également de comprendre le passé afin de mieux anticiper l’avenir.133 C’est le nerf d’une démarche prospective qui mène vers l’innovation. Dans une démarche de veille, se focalisant sur les détails d’un sujet de veille, une personne avec autisme peut s’avérer particulièrement efficace pour déceler ces signaux faibles. En tant qu’usager, son retour d’expérience s’avère être une source d’éléments qui auraient échappé aux usagers plus communs.

CAHEN P., Signaux faibles, mode d’emploi, Eyrolles, France, 2011, 164 pages, p.35. Ibid., p.150

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PARTIE 3 | CET INSPIRATEUR HORS-NORMES


CONC

LUSION

La prise de conscience collective croissante à propos de l’autisme apporte une note plutôt optimiste quant au devenir de cette population à part entière. Il règne cependant une certaine indifférence en ce qui concerne la population adulte. Les usagers avec autisme principalement au centre des réflexions, que ce soit au niveau politique, qu’au niveau du design, ne se focalise que sur la catégorie d’usagers nécessitant l’action la plus urgente : les enfants. On ne peut nier l’absolue nécessité de se focaliser sur les enfants tant leur besoin de développement est condensé dans un temps très court de leur vie, on ne doit cependant pas oublier ces personnes avec autisme. Ces adultes qui errent dans l’indifférence d’un système qui catégorise et met au ban la différence.


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En premier lieu, la responsabilité du design et du designer n’est pas d’apporter une solution au sens premier de résoudre qui a la même racine que dissoudre. Elle est de proposer des éventualités, des opportunités en prenant en compte les différences et l’originalité de l’usage ou de la démarche d’utilisation d’un objet ou d’un espace. En outre, il a été montré qu’apprendre le “dialecte” autistan pour le design est une occasion d’ouverture à un monde de modalités et de créativité hors des sentiers battus.

L’hypersensibilité de certains des usagers avec autisme est un détecteur de signaux qui échappent et pourtant affectent tous les usagers. Son écoute est l’opportunité d’améliorer la qualité , en matière de bienêtre, de conception.

Dans un second temps, réfléchir sur le caractère horsnorme de l’autisme permet d’interroger la “normalité” et les normes. Interroger leur utilité et leur interopératibilité voire compatibilité. La prise en compte des handicaps accompagnant l’autisme ne doit cependant pas s’accompagner de la création de nouvelles normes complexifiant encore plus une réglementation freinant déjà la conception.

Ces recherches et analyses m’ont permis d’articuler la problématique de mon projet de fin d’études : Dans quelles mesures un lieu normé peut-il être catalysé par l’expérience d’individus hors-normes ?

Enfin, parce qu’innovation de rupture n’est pas synonyme de “faire autrement” ou “faire l’inverse de”, mais signifie bien faire un pari risqué, mais mesuré axé sur la différenciation, le design peut faire le pari de la marginalité créative pour innover.

J’ai choisi de me pencher sur les médiathèques sur les lieux d’études et notamment la médiathèque Philéas Fogg du Campus du Tertres à Nantes (Audencia).


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 OUVRAGES BLEULER E., Dementia Praecox ou Groupe des schizophrénies, Dementia praecox oder Gruppe der Schizophrenien (1911), Paris, Coédition GREC/ EPEL, 1993, 671 p. «En 1911 paraît l’ouvrage majeur d’Eugen Bleuler Dementia præcox oder Gruppe der Schizophrenien. Sa traduction intégrale, dont Henri Ey disait qu’elle ne verrait jamais le jour, nous parvient enfin. Elle nous éclaire sur les concepts fondamentaux de la schizophrénie : Spaltung, autisme, ambivalence, défaut de modulation affective.» (source : EdenLivres)

KANNER L., EISENBERG L., Early infantile autism 1943–1955, The American Journal of Orthopsychiatry, États-Unis, 1956. Une publication qui a connu une grande diffusion et qui est la référence incontournable dans les années 1960. Sur la base de dix années d’observations supplémentaires, les auteurs reprennent les cinq conclusions exposées dans la publication de 1943 et posent deux caractéristiques pathognomoniques : un isolement extrême (« extreme self-isolation ») et un désir obsédant de préserver l’immuabilité (« the obsessive insistence on the preservation of sameness »). BETTELHEIM B., La forteresse du vide : l’autisme infantile et la naissance du soi, France, Gallimard, Éditions Connaissance de l’inconscient, 1969, 592 p. « Laurie, Marcia et Joey, le petit garçon « mécanique» : trois enfants autistiques enfermés dans leur forteresse vide, figés dans leur mutisme et leur monde fantasmatique. Trois enfants parmi d’autres qui sont tenus pour incurables, avec lesquels Bruno Bettelheim et son équipe ont tenté d’entrer en communication - on verra au prix de quels efforts et de quels aléas. C’est donc moins l’histoire de cas qui nous est ici rapportée que celle d’une aventure méthodique : la recherche patiente et passionnée d’une rencontre, là où l’importance de ce que l’on appelle trop vite la régression paraît l’interdire à jamais. On trouvera, encadrant ces trois bouleversantes observations illustrées de dessins et de photographies, une analyse critique de la littérature psychiatrique sur l’autisme infantile, l’exposé des vues théoriques de l’auteur sur la constitution du « Soi « et une discussion du mythe des enfants sauvages. » (Editions FolioEssais) BERSIHAND G., Bettelheim, Recueil de citations et analyse, Paris, Édité par Robert Jauze, 1977, 199 p. Un recueil de citations pertinent dans l’analyse que porte Geneviève Bersihand. AMY M-D., Faire face à l’autisme, France, Éditions Retz, 1995, 175 p. Malgré le fait que ce livre soit aujourd’hui obsolète, il contient cependant un

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instantané de nos connaissances en la matière il y a tous justes vingt ans. CHAPIREAU F., CONSTANT J., DURAND B., Le handicap mental chez l’enfant. Une synthèse neuve pour comprendre, agir, décider, Paris, Éditions ESF, 1997, 211 pages, p.112. « Depuis plusieurs dizaines d’années, le handicap mental chez l’enfant est un sujet de débats, de polémiques et d’affrontements. Il allait faire le point et présenter l’état actuel de la question : un livre complet, clair, facile à consulter. » (Quatrième de couverture) ELLENBERGER H-F., Essai sur le syndrome psychologique de la catatonie, Paris, L’Harmattan, 2004, 129 p. « Chez le catatonique, ce qui frappe le plus au premier abord est l’allure paradoxale de tout le comportement. On a l’impression que le malade, ayant perdu sa propre personnalité, subit passivement l’influence des excitations externes et des impulsions internes, et qu’envers elles il ne possède qu’un seul type de réaction : le négativisme. » (Quatrième de couverture) TAMMET D., Je suis né un jour bleu (2006), France, Éditions des Arènes, 2007, 285 p. Daniel Tammet est un « autiste savant ». Il est synesthète et a une mémoire des nombres incroyables. Dans ce livre, une biographie généreuse, il écrit et décrit – donc communique, ce qui est unique de la part d’un individu autiste – son parcours depuis son enfance en Grande-Bretagne à ses voyages et rencontres à l’âge adulte. MARIE JC., L’ére du surmental arrive…, Paris, BOD, 2008, 366 p. Un ouvrage extrêmement mal écrit par un auteur aussi mystique qu’inconnu. Un amoncellement d’idées sans cohérence poussée entre elles. HOCHMANN J., Histoire de l’autisme, Paris, Odile Jacob, 2009, 528 p. « Selon Jacques Hochmann, pour favoriser une meilleure prise en charge, le moment est venu non pas d’oublier ces querelles, mais de passer à l’ère du dialogue. Un document psychiatrique exceptionnel : un grand spécialiste relit toute l’histoire de son domaine, alliant l’érudition du savant à l’empathie du thérapeute. » (Mots de l’éditeur) TAMMET D., Embrasser le ciel immense, France, Éditions des Arènes, 2009, 318 p. «Tous les cerveaux ont du génie, dit-il. Les surdoués comme les gens ordinaires. À chacun d’apprendre à s’en servir, pour améliorer sa mémoire, son potentiel intellectuel et sa créativité.» Daniel Tammet a vaincu son autisme. Dans ce livre, il expose différentes théories sur le cerveau et ses possibilités.

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ATTWOOD T., Le syndrome d’Asperger : guide complet, Paris, Éditions De Boeck, 2010, première édition 2009, 487 p. Tony Attwood, l’un des meilleurs spécialistes du Syndrome d’Asperger et de l’autisme de haut niveau, fait ici un état des lieux complet de ce syndrome encore mal connu. Le présent ouvrage constitue la synthèse exhaustive et actuelle des nombreux travaux de recherche issus d’une expérience clinique de plusieurs décennies. Conçu comme un véritable guide, ce livre passe en revue tous les aspects de ce syndrome et les complications qu’il engendre au quotidien » (mots de l’éditeur) CAHEN P., Signaux faibles, mode d’emploi, Paris, Éditions Eyrolles, 2011. « Depuis 1995, Philippe Cahen intervient en prospective auprès d’entreprises ou d’entités pour imaginer leurs futurs, et a développé pour elles une méthode de prospective par scénarios dynamiques dont les signaux faibles sont la première étape. Depuis 2003, il envoie tous les mois La Lettre des signaux faibles à plus de 5 000 contacts. Enseignant dans différentes écoles de commerce, d’ingénieurs, de design, il est régulièrement sollicité dans les médias. » (éditeur) TAMMET D., L’éternité dans une heure, France, Éditions des Arènes, 2012, 283 p. « Les mathématiques sont une science, certes, mais une science de l’imagination qui nous permet de répondre aux questions universelles que pose la littérature : le temps, la vie, la mort, l’amour. Des flocons de neige à Pi en passant par les moutons d’Islande ou Shakespeare, on se demande pourquoi à l’école, on ne nous a pas appris les mathématiques de cette façon. […] Autiste Asperger, doué de synesthésie, il [Daniel Tammet] voit les nombres comme des formes et des couleurs et parle plusieurs langues. » SCHOVANEC J., Je suis à l’Est !, France, PLON, 2012, 285 p. « Je vis avec l’autisme », écrit Josef Schovanec, soulignant ainsi ce qu’il considère plus comme une qualité que comme un handicap. Ce voyageur passionné des civilisations anciennes maîtrise plusieurs langues étrangères, est diplômé de Sciences Po et possède un doctorat en philosophie. Il récuse pourtant les attributs qu’on lui prête ceux d’un autiste « génial » aux capacités intellectuelles extraordinaires pour évoquer plutôt, avec beaucoup d’humour et de sensibilité, ces « petits » problèmes qui font le quotidien d’un autiste Asperger : les longues préparations nécessaires avant de prendre le métro ou de se rendre à un rendez-vous, l’angoisse qui l’étreint lorsque le téléphone sonne, la panique face au moindre imprévu, la difficulté à comprendre les codes sociaux et à nouer des relations amicales classiques, sa passion obsessionnelle pour les bibliothèques et les livres... Il revient aussi sur son parcours psychiatrique. » (Éditions Plon)

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ALLIONE M. et C., Autisme : Donner la parole aux parents, France, Éditions Les Liens qui Libèrent, 2013, 260 p. « Le débat est vif aujourd’hui autour des soins apportés aux personnes autistes, et se traduit par des attaques violentes que subissent tous les acteurs de la santé publique. Au-delà des idées toutes faites, ce livre donne la parole aux parents de ces enfants autistes. Témoignages passionnants et émouvants sur les thèmes les plus importants ; l’annonce du diagnostic et sa précocité, la culpabilisation des mères, la scolarisation des enfants, les méthodes thérapeutiques et éducatives, la validité des structures de soins, les problèmes qui se posent lorsque l’enfant devient adulte. » FERRY A-S., Le royaume de Tristan, France, Éditions MICHALON, 2015, 243 p. « Le récit d’une maman, qui raconte pas à pas comment elle a lutté seule contre les institutions, le handicap et les comportements de crises extrêmes, et nous invite à partager ses doutes, ses émotions et ses stratégies éducatives. Un message d’espoir et de révolte qui s’adresse à des milliers de parents, familles ou professionnels dont on ignore le calvaire quotidien. »

 DICTIONNAIRES et ENCYCLOPÉDIES GAFFIOT F., Définition de « Sinister » in. Dictionnaire latin français, France, Hachette, 1934, p. 1446. HOCHMANN J., « AUTISME », Encyclopædia Universalis [en ligne] Consultable sur : http://www.universalis.fr/encyclopedie/autisme/ CNRTL Portal lexical, Définition de « schizophrénie » [en ligne] Consultable sur : http://www.cnrtl.fr/definition/schizophrénie POSTEL J., « BLEULER EUGEN - (1857-1939) », Encyclopædia Universalis Consultable sur : http://www.universalis.fr/encyclopedie/eugen-bleuler/

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 FILMS / DOCUMENTAIRES LEVINSON B., Rain Man, États-Unis, 1988, long-métrage, 133 mn. « À la mort de son père, Charlie Babbitt, homme d’affaires pressé, hérite d’une vieille Buick qu’il convoitait depuis longtemps, mais se voit spolié de quelque trois millions de francs versés à l’Institution psychiatrique Wallbrook au profit d’un bénéficiaire anonyme. Charlie se rend à Wallbrook et découvre l’heureux bénéficiaire. Il s’agit de Raymond, savant autiste, celui qu’il appelait dans son enfance Rain Man, qui représente ses seuls souvenirs heureux et qui n’est autre que son frère. » (Allocine) EVANS M., Snow Cake, Canada/Grande-Bretagne, 2006, long-métrage, 112 mn. « En plein hiver, à Wawa dans l’Ontario, Alex, un quinquagénaire britannique plutôt introverti, frappe à la porte de Linda, une femme autiste. Dans un accident de voiture, Alex a tué Vivienne, fille unique de Linda, qu’il avait prise en stop. Tourmenté par un terrible sentiment de culpabilité, Alex accepte de s’installer chez Linda et de partager quatre jours de son univers étrange et fantasque. Il en sortira transformé. » (Allocine) MAYER M., Adam, États-Unis, 2009, long-métrage, 100 mn. « Adam, jeune homme brillant, passionné d’astronomie, mais atteint d’une forme légère d’autisme, mène une existence réglée dans les moindres détails, jusqu’à la mort de son père avec qui il vivait. Alors qu’il essaye de s’adapter à sa nouvelle existence, Adam fait la connaissance de la jolie Beth qui vient d’emménager dans l’appartement voisin. C’est le premier d’une série de bouleversements qui vont changer son monde... » (Allocine.fr) ÖHMANN A., Simple Simon (I Rymden Finns Inga Kanslor), Suède, 2010, long-métrage, 85 mn. Simon, dix-huit ans, partage un appartement avec son frère Sam et sa copine Frida. Simon souffre du syndrome d’Asperger et doit vivre selon un programme bien déterminé chaque jour pour se sentir bien. Lorsque la relation entre Sam et sa copine prend fin, Simon se décide à partir en quête d’une nouvelle petite-amie pour son frère, non sans surprises. JACKSON M., Temple Grandin, États-Unis, 2010, long-métrage, 107 mn. « Biopic sur Temple Gradin, autiste de haut niveau, professeur d’université, spécialiste en structures de stockage animalier et mondialement connue pour ses différents articles parus dans la presse sur les questions d’autisme. »

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MATTHEWS M., Le Monde de Nathan (X plus Y), Grande-Bretagne, 2015, long-métrage, 93 mn. « Nathan est un adolescent souffrant de troubles autistiques et prodige en mathématiques. Brillant, mais asocial, il fuit toute manifestation d’affection, même venant de sa mère. Il tisse pourtant une amitié étonnante avec son professeur anticonformiste Mr. Humphreys, qui le pousse à intégrer l’équipe britannique et participer aux prochaines Olympiades Internationales de Mathématiques. De la banlieue anglaise à Cambridge en passant par Taipei, la vie de Nathan pourrait bien prendre un tour nouveau… » (Allocine.fr) DALAISE M., L’autisme d’aujourd’hui à demain, France, CNRS, 2007, documentaire, 28 mn. « Depuis que l’autisme a été décrit pour la première fois par Kanner en 1943, les critères définissant les symptômes ont considérablement évolué. Une étude de l’Inserm estime le taux d’autistes dans la population à 27 pour 10 000. La piste génétique, sans tout expliquer, se confirme de jour en jour. Par ailleurs, les outils modernes d’imagerie cérébrale commencent à donner des éléments de réponse sur certains dysfonctionnements dans la perception des émotions. D’autres chercheurs proposent des techniques innovantes pour activer certains réseaux neuronaux à l’origine de la communication. Car les autistes peuvent faire des progrès à tout âge. Une note d’espoir. » (CNRS) Consultable en ligne : http://videotheque.cnrs.fr/doc=1874 ROBERT S., Le Mur ou la psychanalyse à l’épreuve de l’autisme, France, 2011, documentaire, 52 mn. Ce documentaire expose le point de vue de 11 psychanalystes sur l’autisme. Ceux-ci ont accepté de confier à la réalisatrice leurs convictions intimes sur les causes de l’autisme et les perspectives offertes par la prise en charge psychanalytique et institutionnelle de ce trouble. Pour la première fois, des psychanalystes livrent aux profanes un discours qu’ils réservent habituellement aux seuls initiés. Le MUR permet de comprendre pourquoi la France, la Suisse romande et la Belgique francophone ont 40 ans de retard dans la prise en charge de l’autisme, par rapport aux autres pays développés. REVIL S., Le cerveau d’Hugo, France, FRANCE TÉLÉVISIONS, 2012, documentaire-fiction, 100 mn. « Comment nos sociétés peuvent-elles accompagner les personnes atteintes d’autisme, dont le nombre ne cesse d’augmenter ? De la France, en retard, à la Suède, en pointe, une passionnante enquête dans cinq pays auprès de tous les acteurs de ce trouble qui demeure une énigme. » (France2.fr)

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JIRON M., Sensory Overload, Mexique, 2012, court-métrage animé, 2 mn 25s. Miguel Jiron a réalisé Sensory Overload, une animation destinée à montrer au grand public ce que peuvent ressentir les autistes : certains d’entre eux ont d’immenses difficultés à gérer des stimulations sensorielles multiples. Un problème qui transforme le quotidien en expérience difficile. Consultable en ligne : https://vimeo.com/52193530 BERNARD A., FERNANDEZ M., Listen, États-Unis, 2014, court-métrage animé, 2 mn 40s. Un projet de fin d’études d’école d’arts visuels Consultable en ligne : https://vimeo.com/103697707 GALLARDO M., L’académie des spécialistes (Academia de especialistas), Espagne, 2014, court-métrage animé, 28 mn. Académie des spécialistes montre de façon agréable et amusante les habiletés spéciales des personnes avec autisme souvent méconnues de l´extérieur. Afin de poursuivre ses efforts pour une meilleure connaissance de l´autisme dans la société, la Fondation Orange Espagne a produit ce court-métrage d´animation réalisé par le dessinateur espagnol Miguel Gallardo, père de Maria, une fille avec autisme. Consultable en ligne : http://fundacionorange.es/fundacionorange/videos/ Academia_especialistas.html JULIENNE M. et BLANCHARD M., Autisme : une place parmi les autres ?, France, ARTE, 2015, documentaire, 91 mn. « Comment nos sociétés peuvent-elles accompagner les personnes atteintes d’autisme, dont le nombre ne cesse d’augmenter ? De la France, en retard, à la Suède, en pointe, une passionnante enquête dans cinq pays auprès de tous les acteurs de ce trouble qui demeure une énigme. » (ARTE) GRUNER M. et SUMPTON C., L’énigme de l’autisme : la piste bactérienne, France, CBC ARTE, 2015, documentaire, 52 mn. « Comment expliquer l’augmentation foudroyante des cas d’autisme diagnostiqués depuis vingt ans ? Et si l’environnement jouait un rôle ? » (ARTE)

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 VIDÉOS BROOMHEAD L., Savoir plus santé – Autisme : la fin d’un scandale ?, France, 2006, France Télévisions, 63 mn. Plusieurs sujets, interventions, témoignages dans cette vidéo qui est une copie de l’émission. En 2006 déjà (9 ans maintenant), le visage de l’autisme a été bouleversé par la découverte de dysfonctionnements dans le cerveau, devenus clairement visibles grâce à l’imagerie médicale. L’origine génétique de la maladie ne fait plus guère de doute, grâce, entre autres, aux découvertes d’équipes françaises. Témoignage également de Francis Perrin et de sa compagne, parents d’un enfant avec autisme. Consultable sur : https://www.youtube.com/watch?v=e37TOxXv-QE GRANDIN T., The world needs all kinds of minds, États-Unis, 2010, Intervention TED2010, 20 mn. Temple Grandin, une Américaine asperger de haut niveau, raconte son parcours et explique sa vision du monde en images. Consultable sur : https://www.ted.com/talks/temple_grandin_the_world_needs_all_kinds_of_minds KLIN A., A new way to diagnose autism, États-Unis, 2011, Intervention TEDXPeachtree, 20 mn. Le diagnostic précoce du trouble du spectre de l’autisme peut améliorer la vie de toutes les personnes concernées, mais la complexité des causes probables rend incroyablement difficile ce diagnostic. Au TEDxPeachtree, Ami Klin décrit une nouvelle méthode de détection précoce qui utilise des technologies de suivi des yeux ou Eyetracking pour mesurer l’engagement social des bébés et mesurer de façon fiable leurs risques de développer un autisme. Consultable en ligne : https://www.ted.com/talks/ami_klin_a_new_way_to_ diagnose_autism DUQUESNE B., La soirée continue… - Autisme : le scandale français, France, 2012, France Télévisions, 62 mn. Présentée par Benoît Duquesne, journaliste et présentateur de France2, l’émission-débat La soirée continue… fait suite au docu-fiction Le cerveau d’Hugo de Sophie Revil diffusé en prime-time le 27 novembre 2012 sur France2. Ce débat replace le contexte de retard dans lequel la France est enchâssée et revient sur les origines de ce scandale en France. Consultable en ligne : https://www.youtube.com/watch?v=QzM7z7BpbVI JEGEDE F., What I’ve learned from my autistic brothers, États-Unis, 2012, Intervention TED@London, 5 mn. Un témoignage poignant d’une sœur sur ses frères tous deux vivants avec un autisme. Consultable en ligne : https://www.ted.com/talks/faith_jegede_what_i_ve_ learned_from_my_autistic_brothers

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SCHOVANEC J., La comédie de la normalité, France, 2013, TEDXAlsace, 19 mn. Sous la forme d’une sorte de One Man Show Josef Schovanec revient avec un humour corrosif sur sa définition de l’autisme. Consultable en ligne : https://www.youtube.com/watch?v=wu5EILxuaeU SCHOVANEC J., Que dire de l’autisme?, France, 2013, Faculté de Médecine Paris Descartes, 140 mn. Les « Rencontres d’Hippocrate » sont des conférences mensuelles ouvertes au grand public, organisées par le Doyen Patrick Berche et Christian Hervé (Société Française et Francophone d’Ethique Médicale). Lors d’une de ces soirées, Josef Schovanec est intervenu afin de faire une mise au point avec l’auditoire de la faculté. Consultable en ligne : https:// www.youtube.com/watch?v=eRmII8CYU4Y GEPNER B., Perceptions atypiques, France, 2014, TV5 Monde, Interview Vidéo, 74sec. Dans cette interview le Professeur Gepner nous explique sa théorie d’un monde qui serait trop rapide pour un individu avec autisme. Consultable sur : http://autisme.tv5monde.com/?portfolio=ralentir-pour-percevoir CABUT S., Les diurétiques : nouveau traitement ?, Interview vidéo, France, Le Monde, février 2014, 9 mn. 51s. Interview de la Journaliste Sophie Cabut du Docteur Yehezkel Ben-Ari à propos de « l’hyperchlorie » cérébrale. Consultable sur : http://www.dailymotion.com/video/x1bd21f_peut-onsoigner-l-autisme-avec-des-diuretiques_news GENEROUS A., How I learned to communicate my inner life with Asperger’s, États-Unis, 2015, Intervention TEDX, 10 mn. Alix témoigne de sa vie en tant que qu’individu avec autisme asperger et nous parle de son expérience de rêves lucides, de sa vie intérieure de manière attachante. Avec humour elle dit : « je peux faire des choses comme lire ou écrire de la musique. Une anecdote : j’ai écrit ma candidature à la fac dans un rêve. Et j’ai été acceptée. Alors, youpi. » Consultable : https://www.ted.com/talks/alix_generous_how_i_learned_to_ communicate_my_inner_life_with_asperger_s SILBERMAN S., The forgotten history of autism, États-Unis, 2015, Intervention TED2015, 13 mn. Steve Silberman, un écrivain et éditeur américain rappelle, durant cette intervention au TED Talk 2015, les origines de l’autisme et des stéréotypes liés à l’autisme. Consultable en ligne : http://www.ted.com/talks/steve_silberman_the_ forgotten_history_of_autism

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SCHOVANEC J., L’autisme ne vous prédestine pas à la déchéance, France, 2015, Arte.tv, 4 mn 54 s. Josef Schovanec revient sur sa définition de « gens avec autisme » et critique la posture actuelle à propos de l’autisme. « Si vous avez une commission de médecins, comment voulez-vous aborder la question du logement ? » Consultable en ligne : http://tinyurl.com/mqccsxz (url réduit)

 ARTICLES INTERNET ET BILLETS DE BLOG DUBUC B., L’ocytocine : l’hormone qui crée des liens [en ligne], Canada, IRSC, consulté en décembre 2015. Explication du fonctionnement et de l’implication de l’ocytocine dans la création des rapports sociaux Consultable sur : http://lecerveau.mcgill.ca/flash/i/i_04/i_04_m/i_04_m_des/i_04_m_des.html

COURTEIX S., « Troubles envahissants du développement et rapports à l’espace », Laboratoire d’Analyse des Formes (LAF-ENSAL) [Extrait en ligne de l’étude complète], France, publié en septembre 2009. « L’objet de ce document est d’ouvrir quelques pistes de réflexion, à partir d’un état des connaissances sur la spécificité du rapport à l’espace chez les personnes atteintes de troubles envahissants du développement, pouvant contribuer à la mise en place d’un référentiel en vue de promouvoir un aménagement adapté à leur prise en charge. » (Note de l’auteur) Consultable sur : http://www.laf.archi.fr/index.php?option=com_content&view=article &id=47%3Ated&catid=22%3A-fhum-sg-&Itemid=41&lang=fr (consulté le 01/09/2015)

CNRS, « Autisme : l’administration d’ocytocine améliore le comportement social des patients » [en ligne], France, communiqué, 2010. Communiqué de presse à propos des avancés dans les tests d’administration d’ocytocine à des enfants avec autisme. Consultable sur : http://www2.cnrs.fr/presse/communique/1793.htm

PSYCHOMÉDIA, « Les points forts des autistes devraient être valorisés », PSYCHOMEDIA.QC.CA [Billet], Québec, publié le 16 décembre 2011. Cet article, écrit en réaction d’un article du Monde publié le même jour, refait le point sur les capacités des individus avec autisme rappelant que l’association de ce handicap à une déficience mentale et intellectuelle est désormais bien dépassée. Cet article soulève également le fait que des gouvernements soulèvent des fonds pour des thérapies voire une en particulier (ex : méthode ABA) pour « traiter » l’autisme et qu’une piste d’utilisation de ces fonds afin de stimuler des fonctions de l’autonomie que devraient acquérir toute individu avec autisme (travail, trouver une fonction, une place dans la société, garanties de droits, aides pour la qualité de vie et développement de services éclectiques aux approches multiples et riches). Consultable sur : http://www.psychomedia.qc.ca/autisme/2011-12-16/points-forts-desautistes-et-traitements-mottron-dawson (consulté le 01/09/2015)

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SAGET E., « Autisme : la psychanalyse désavouée par la Haute Autorité de santé », LEXPRESS.FR [Article en ligne], France, publié le 13 février 2012. Fait d’actualité à l’annonce du communiqué officiel de l’HAS concernant la remise en cause de l’efficacité de l’approche psychanalytique de l’autisme. Consultable sur : http://www.lexpress.fr/actualite/societe/sante/autisme-la-psychanalysedesavouee-par-la-haute-autorite-de-sante_1081840.html (consulté le 01/09/2015)

PAUL, « L’origine des souffrances de la planète identifiée : les humains normaux ! » , Billet, Blog L’Échelle de Jacob, publié le 28 mai 2012. Un court billet néanmoins intéressant sur une pathologie mentale peu connue : la « normopathie » Consultable sur : http://echelledejacob.blogspot.fr/2012/05/lorigine-des-souffrances-dela-planete.html

WEBREDACTIE M&C, « How do you design for children with autism? », TUDELFT.NL [Billet], Pays-Bas, publié le 18 décembre 2012. Billet introduisant le rapport « Meaningful Encounters: Explorative studies about designers learning from children with autism. » Consultable sur : http://www.tudelft.nl/en/current/latest-news/article/detail/hoeontwerp-je-voor-kinderen-met-autisme/ (consulté le 28/08/2015)

SADOUN P., « Pour en finir avec une architecture anxiogène dans les établissements accueillant des personnes autistes », BLOG MEDIAPART. FR [Billet], France, publié le 3 janvier 2013. Consultable sur : http://blogs.mediapart.fr/blog/patrick-sadoun/030113/pour-en-finiravec-une-architecture-anxiogene (consulté le 20/10/2015)

PÉLOUAS A., « Autisme : changer le regard », LEMONDE.FR [Article en ligne], Québec, publié le 16 décembre 2011 et mis à jour le 2 avril 2013. Cet article fait le point sur l’approche thérapeutique uniquement comportementaliste (behavioriste) du gouvernement canadien à l’égard des individus avec autisme. Laurent MOTTRON, psychiatre, professeur titulaire au département de psychiatrie de l’Université de Montréal et chercheur, n’est pas de l’avis d’une approche unique. Il est un fervent critique de l’intervention précoce intensive de type ABA comme approche thérapeutique de l’autisme, il estime que cette approche est sans fondement scientifique au même titre que la psychanalyse. Consultable sur : http://www.lemonde.fr/planete/article/2011/12/16/autisme-changerle-regard_1619381_3244.html (consulté le 01/09/2015)

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ROVIRA TORRES F., « Informatique : ils recrutent des autistes pour être plus compétitifs », NOUVELOBS.COM [Article en ligne], France, publié le 7 juin 2013. SAP, société de softwares leader en Europe et basée en Allemagne avait fait parlé d’elle en engageant des autistes. Une autre entreprise allemande a fait ce choix stratégique : Auticon. « Si vous venez nous rendre visite, vous verrez que nos bureaux sont tout à fait ordinaires. Nous avons fait quelques adaptations au niveau de la lumière et de l’acoustique, pour pallier l’hypersensibilité de nos salariés. » (Steen Thygesen, PDG de Auticon) Consultable sur : http://rue89.nouvelobs.com/2013/06/07/informatique-ilsrecrutent-autistes-etre-plus-competitifs-242863 (Consulté le 01/09/2015) PSYCHOMÉDIA, « Une chercheuse, autiste et autodidacte, reçoit un doctorat honoris causa », PSYCHOMEDIA.QC.CA [Billet], Québec, publié le 18 juin 2013. Article portrait autour d’une personnalité scientifique canadienne récompensée par un prix de renom, Michelle Dawson chercheuse canadienne et docteure en neuroscience cognitive. Consultable sur : http://www.psychomedia.qc.ca/autisme/2013-06-18/ michelle-dawson-doctorat-honoris-causa (Consulté le 01/09/2015) AUTISME EUROPE, « De la recherche en design pour améliorer la vie des adultes avec autisme », AUTISMEUROPE.ORG [Bulletin newsletter], France, 2014. « Un vaste projet de recherche en design a été mené au Royaume-Uni en vue d’aider les adultes avec autisme à mener une vie plus indépendante et satisfaisante. » (Autisme Europe 2014) Consultable sur : http://www.autismeurope.org/fr/publications-d-autismeeurope/newsletter-2/bulletin-55-2014-2/de-la-recherche-en-design-pourameliorer-la-vie-des-adultes-avec-autisme.html (Consulté le 28/08/2015) INSERM, « Autisme : l’hormone de l’accouchement contrôlerait l’expression du syndrome chez l’animal. », Article, CNRS, 2014. Un article sur les découvertes au sujet de l’ocytocine, dite hormone de l’accouchement ou hormone de l’amour elle serait en carence avérée chez les individus avec autisme. Consultable sur : http://www.inserm.fr/espace-journalistes/autisme-l-hormonede-l-accouchement-controlerait-l-expression-du-syndrome-chez-l-animal GARDIER S., « Son et image coïncident mal dans le cerveau des autistes », Paris, Article, LeFigaro.fr, Janvier 2014. Article expliquant la théorie d’un monde trop rapide émise par le professeur Gepner. Consultable sur : http://sante.lefigaro.fr/actualite/2014/01/27/21903-sonimage-coincident-mal-dans-cerveau-autistes

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ASPERGIRL (pseudonyme), « Syndrome d’Asperger ou autisme de haut niveau ? Maladie ou trouble ? », LES-TRIBULATIONS-DUNE-ASPERGIRL. COM [Billet], France, publié le 17 mai 2014. Chroniqueuse de blog anonyme, Aspergirl, une jeune trentenaire française, traite et témoigne, au travers de ses différents billets de différents aspects de la condition des individus avec autisme dont elle fait partie après un diagnostic tardif. Dans cet article, elle tend à préciser la définition d’autisme de haut niveau ou autisme Asperger et pointe du doigt la définition encore erronée véhiculée par les médias définissant l’autisme comme une maladie. Consultable sur : http://les-tribulations-dune-aspergirl.com/2014/05/17/syndromedasperger-ou-autisme-de-haut-niveau-maladie-ou-trouble/ (Consulté le 01/09/2015) BONIFAY J-M., « Être un adulte asperger, un mari, et un papa, dont l’un des enfants est aussi Asperger », HANDIPLANET-ECHANGES.INFO [Article en ligne], France, publié le 20 mai 2014. « Témoignage d’un adulte avec Syndrome d’Asperger, qui est également père d’un adolescent Asperger et d’un enfant « typique» et un mari. Adulte qui est aussi le fondateur de l’association Autisme PACA. » Consultable sur : http://www.handiplanet-echanges.info/Members/autismepaca_939/ etre-un-adulte-asperger-un-mari-et-un-papa-dont-lun-des-enfants-est-aussiasperger (Consulté le 01/09/2015) PSYCHOMÉDIA, « Autisme : un nouveau modèle de compréhension globale proposé », PSYCHOMEDIA.QC.CA [Billet], Québec, publié le 13 août 2014. Cet article fait un focus sur l’état actuel (en 2014 tout du moins) des recherches sur les causes des troubles du spectre autistique mettant en cause les vecteurs suivants : mutation génétique, plasticité cérébrale. Mais ces études appartenant aux domaines des neurosciences vont plus loin dans leur postulat et leurs observations. En effet, des chercheurs se sont aperçus qu’en « greffant » des gènes mutés identifiés comme vecteur de l’autisme chez des animaux, la plasticité cérébrale, c’est-à-dire l’habilité cérébrale à créer et recréer des connexions synaptiques lorsque les neurones sont stimulés, était augmentée. Enfin cet article, présente le postulat du Dr. MOTTRON présentant certaines habiletés des individus avec autisme comme une compensation ou un glissement de capacité cérébrale liée à la plasticité entre la sociabilité et la capacité d’expression verbale par exemple chez les autistes Asperger. Consultable sur : http://www.psychomedia.qc.ca/autisme/2014-08-13/modeleglobal-developpement (Consulté le 01/09/2015)

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LE RENARD S., « L’architecture au service des enfants autistes », URBISLEMAG.FR [Billet], France, publié en septembre 2014 « Un institut médico-éducatif a ouvert depuis quelques mois à Boulogne Billancourt, dans les Hauts de Seine. Toute sa conception architecturale a été pensée en fonctions des troubles que rencontrent les enfants atteints d’autisme. » (Urbislemag.fr) Consultable sur : http://www.urbislemag.fr/l-architecture-au-service-desenfants-autistes-billet-81-urbis-le-mag.html (Consulté le 20/10/2015) METRONEWS, « La belle histoire du jour : père d’un autiste, il lance une appli pour répertorier les lieux respectueux des autistes », METRONEWS. FR [Article en ligne], France, publié le 27 mars 2015. « Bouleversé par le handicap de son fils Kirby, 13 ans, Topher Wurts, un entrepreneur de 48 ans a choisi de créer «Autism Village» pour remédier aux obstacles rencontrés par les autistes et leur famille en société. L’application doit voir le jour cet été après une campagne de financement participatif sur Kickstarter qui prendra fin courant avril. » Article de blog reprenant les grandes lignes abordées par Patrick Sadoun, père d’un jeune autiste de 24 ans, lors d’une conférence qu’il a animée au colloque « Regards croisés sur l’autisme » qui s’est tenu à Grenoble le 29 septembre 2012 et qui était à l’initiative de l’École de la Cause Freudienne Rhône Alpes. Avec plusieurs mois de reculs, il fait alors le point et « remet les pendules à l’heure » dans ce billet. Consultable sur : http://www.metronews.fr/info/la-belle-histoire-du-jourpere-d-un-fils-autiste-il-developpe-une-application-pour-repertorierles-lieux-respectueux-des-autistes/mocA!1GadxGFt0wBgc/ (Consulté le 20/10/2015) BERNANOSE P., « Journée mondiale de l’AUTISME: Le droit à une prise en charge adaptée », SANTÉBLOG [Billet], France, publié le 2 avril 2015. A l’occasion de la journée mondiale de l’autisme, un rappel de l’évolution de la prévalence et des moyens de diagnostic mis en place et à mettre en place à l’avenir. Consultable sur : http://blog.santelog.com/2015/04/02/journee-mondiale-de-lautismele-droit-a-une-prise-en-charge-adaptee-autism-speaks/ (Consulté le 01/09/2015) LEVALLOIS J., « Autisme : pourquoi les prématurés sont plus à risque » ,France, article en ligne, Pourquoidocteur.fr, publié le 5 mai 2015. Article présentant une étude mettant en corrélation les accouchements prématurés et les syndromes autistiques. Consultable sur : http://www.pourquoidocteur.fr/Articles/Question-dactu/10609-Autisme-pourquoi-les-prematures-sont-plus-a-risque

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WARTNER V., « Autisme: L’Etat condamné à indemniser sept familles à hauteur de 240.000 euros », 20minutes [Article en ligne], France, publié le 23 juillet 2015 Pour la première fois l’État est reconnu responsable d’un préjudice moral subi par sept familles qui ont toutes été contraintes de mettre de côté leurs vies professionnelles et personnelles afin de faire prendre en charge leurs enfants par les seuls organismes qui proposaient alors des places disponibles pour des thérapies jugées efficaces et les suivre, mais ces établissements sont en Belgique et les familles ont dû supporter le coût conséquent des déplacements et du logement. Consultable sur : http://www.20minutes.fr/societe/1656075-20150723autisme-etat-condamne-indemniser-sept-familles-hauteur-240000-euros (Consulté le 05/09/2015) HOUDE V., « Notre petite route vers le diagnostic du trouble du spectre de l’autisme : le déni », TPLMOMS.COM [Billet], France, publié le 22 août 2015. Au travers de plusieurs billets, une jeune maman décrit le parcours de diagnostic de William son petit garçon. Elle illustre alors ce que beaucoup de mamans peuvent et pourraient traverser comme épreuve. Ces types de témoignages sont autant importants pour celle qui en témoigne que pour celles qui les lisent, car l’engrenage de la solitude est un phénomène très récurrent dans le vécu de ces mamans. Consultable sur : http://www.tplmoms.com/2015/08/22/notre-petite-routevers-le-diagnostic-du-trouble-du-spectre-de-lautisme-le-deni-premierepartie (Consulté le 01/09/2015) FONDATION ORANGE, «En Espagne, une plateforme en ligne pour rassurer les patients avec autisme», FONDATIONORANGE.COM [Billet], France, publié en août 2015. « La Fondation Orange en Espagne a mis au point le projet Docteur TEA, un site destiné aux patients avec autisme. » (Fondation Orange) Consultable sur : http://www.fondationorange.com/En-Espagne-une-plateformeen-ligne (Consulté le 20/10/2015) POULLAIN C., « Metz : la première classe pour élèves autistes en Moselle », Le Républicain Lorrain [Article en ligne], France, publié le 3 septembre 2015 Article à propos de l’ouverture d’une classe de maternelle dédiée intégralement à des enfants autistes. Sept enfants ont ainsi été accueillis et seront suivis par une approche pédagogique pluridisciplinaire. Consultable sur : http://www.republicain-lorrain.fr/edition-de-metz-ville/2015/09/03/ la-premiere-classe-pour-eleves-autistes-en-moselle (Consulté le 05/09/2015)

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HOUDE V., « Notre petite route vers le diagnostic du trouble du spectre de l’autisme : l’incertitude », TPLMOMS.COM [Billet], France, publié le 6 septembre 2015. Suite du billet précédent Notre petite route vers le diagnostic du trouble du spectre de l’autisme : le déni du 22 août 2015. Consultable sur : http://www.tplmoms.com/2015/09/06/notre-petiteroute-vers-le-diagnostic-du-trouble-du-spectre-de-lautisme-lincertitudedeuxieme (Consulté le 01/09/2015) FONDATION ORANGE, « Éducation et autisme : une classe dédiée au Vésinet », FONDATIONORANGE.COM [Billet], France, publié en septembre 2015. « Le jeudi 17 septembre a été inaugurée au Vésinet une classe différente. Conçue pour l’accueil de six enfants avec autisme, elle veut leur permettre d’accéder à l’école avec un projet éducatif adapté. » (Fondation Orange) Consultable sur : http://www.fondationorange.com/Education-et-autismeune-classe-dediee-au-Vesinet (Consulté le 20/10/2015) JALINIÈRE H., Autisme : l’ocytocine testée en spray nasal [en ligne], France, Sciences et Avenir, Octobre 2015. Consultable sur : http://www.sciencesetavenir.fr/sante/20150729.OBS3366/ decouverte-d-une-piece-manquante-dans-le-puzzle[...].html VAINCRELAUTISME (Assoc.), Principales caractéristiques d’un enfant atteint d’autisme [en ligne], rubrique thématique, Site association Vaincre l’autisme, consulté en décembre 2015. Consultable sur : http://www.vaincrelautisme.org/content/caracteristiques ASPERANSA (Assoc.), Le syndrome d’Asperger et l’autisme de haut niveau [en ligne], page internet, consultée le 4 septembre 2015. Consultable sur : http://www.asperansa.org/asperger_ahn.html

 ÉTUDES, THÈSES, MÉMOIRES ET PUBLICATIONS WING L., “Asperger’s syndrome: a clinical account” in. Psychological medicine, vol. 11, n°1,‎ Grande-Bretagne, 1981. C’est dans cette étude que Lorna Wings dépoussiérera, en 1981, les travaux de Hans Asperger et fera connaitre ses observations qui seront une révolution dans la définition des Troubles autistiques.

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CHARLOP-CHRISTY MH, « Using the picture exchange communication system (PECS) with children with autism: assessment of PECS acquisition, speech, social-communicative behaviour, and problem behavior », ÉtatsUnis, publication en Analyse appliquée du comportement, NIH, 2002. Étude validant la méthode PECS comme approche éducative cognitiviste complémentaire à une stréatégie éducative de développement de l’individu. Consultable sur : http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/12365736?dopt=Abstract GEPNER B., Le monde va trop vite pour les personnes autistes ! Hypothèses neurophysio-psychopathogéniques et implications rééducatives, Publication en Neuropsychiatrie de l’Enfance et de l’Adolescence, France, 2006. BOOMKENS C., Spaces for persons with autism, Pays-Bas, PERK Interior Studies Eindhoven, 2008, 70 p. Ensemble de projets d’étudiants regroupés par Carla Boomkens, architecte d’intérieur et tutrice d’une section de Design d’espace à l’école Perk d’Eindhoven. Les propositions présentées représentent un florilège d’hypothèses sensibles et une réflexion globale sur le sujet de l’architecture pour personnes avec autisme. HUNTER L. (dir.), The Autism Toolbox, Écosse, CROWN, mars 2009, 200 p. The Autism Toolbox est un rapport d’étude sous la forme d’un guide des bonnes pratiques en matière d’autisme commissionné par le Gouvernement Écossais. RUIZ M. et HUPÉ J-M. (dir.), Perceptions des couleurs chez les synesthètes graphèmes couleurs, France, Master recherche en sciences cognitives, ENS-EHESS-Paris Descartes, 2009-2010, 79 p. Mémoire de fin d’études sur la perception des couleurs et la synesthésie. La synesthésie touchant un grand nombre d’individus avec autisme, ce mémoire permet de comprendre les mécanismes perceptifs mis en œuvre. Les synesthésies sont des expériences particulières vécues par certaines personnes, chez lesquelles des activations dans une modalité sensorielle entrainent automatiquement et involontairement une activation spécifique dans une modalité sensorielle identique ou différente. BRAND A., Living in the community – Housing design for adults with autism, Grande-Bretagne, Helen Hamlyn Centre for Design, Royal College of Art, 2010, 29 p. Une étude du Centre pour le Design Helen Hamlin du Royal College of Art en Grande-Bretagne qui s’est penché sur la problématique de l’habitat de l’individu avec Autisme et de son autonomie. L’approche de designer est très familière de l’approche théorique proposée comme modèle à L’École de Design.

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TREHIN P., Autisme et créativité : Envisager l’Autisme de manière différente, France, 2010, 18 p. Paul Tréhin est économiste de formation, ancien prévisionniste chez IBM, parent d’un adulte atteint d’autisme, membre fondateur d’Autisme France et vice-président d’Autisme Europe de 2002 à 2007. Il écrit de nombreuses publications et articles au sujet des handicaps en général. Il signe ici un document portant la réflexion sur un aspect de l’autisme très rarement soulevé : la créativité chez l’individu avec autisme. THIERY N., (dir.), Recommandations de bonnes pratiques professionnelles – Pour un accompagnement de qualité des personnes avec autisme et autres troubles envahissants du développement, Paris, Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux, Saint-Denis, janvier 2010, 64 p. Ce document se présente comme une recommandation de bonnes pratiques professionnelles qui s’inscrit dans le cadre de la mesure 30-2 du plan Autisme 2008-2010 du Gouvernement. « la première partie développe les aspects primordiaux de l’accompagnement, au regard du respect de la dignité et des droits de la personne. Elle présente les modalités pratiques de mise en œuvre, communes à tous les types d’accompagnement dans le médico-social, quels que soient l’âge et la situation des personnes. […] la deuxième partie précise le soutien à apporter aux professionnels dans leur démarche de bientraitance. » (ANESM2010) ANDRÉ-VERT J. (dir.), Autisme et autres troubles envahissants du développement - État des connaissances hors mécanismes physiopathologiques, psychopathologiques et recherche fondamentale, France, H.A.S., mars 2010, 186p. Rapport de synthèse d’étude élaborée par consensus formalisé au sein d’un collège de la Haute Autorité de la Santé. Ce document est à destination première des professionnels de santé ayant un contact direct avec des personnes avec TED. Dr. AZÉMA B. (dir.), L’habitat des personnes avec TED : du chez soi au vivre ensemble, France, ANCREAI, 2011, 169 p. Cette étude a été réalisée pour la Direction Générale de la Cohésion Sociale. Elle « s’inscrit dans le cadre des travaux du plan autisme 20082010. Elle s’attache à recueillir l’état des connaissances ainsi que les attentes et besoins des personnes présentant un Trouble Envahissant du Développement (TED) en matière d’habitat et d’offres d’hébergement. Il s’agit d’explorer les caractéristiques et problématiques spécifiques rencontrées par ces personnes dans leur habitat pour celles capables de vivre en autonomie, ou dans leur hébergement pour celles qui vivent en institutions. […] Il s’agit de proposer aux personnes une palette de solutions et un continuum d’offres qui intègrent pleinement les spécificités des TED. Dans la construction d’un « chez soi » aucune solution classique ou innovante ne doit être écartée. Au cœur de la problématique autistique se situe la difficulté « d’être ensemble ». » (ANCREAI2011)

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IRWIN J., MACSWEEN J., KERNS K., History and Evolution of the Autism Spectrum Disorders in. International Handbook of Autism and Pervasive Developmental Disorders, États-Unis, Springer-Verlag New York, 2011, 555p. Publication scientifique américaine récente sur l’autisme et l’évolution des spectres de déficiences au cour de l’âge. ROULLEAU C., Troubles psychiatriques et espace architectural, France, Mémoire de fin d’études ENSAPVS, 2011-2012, 49 p. (Voir pour validité du document avant description, car aucunes sources) Dr. STAPPERS P.J. (dir.), Meaningful encounters – Explorative studies about designers learning from children with autism, Pays-Bas, 18 décembre 2012, 197 p. Cette étude néerlandaise porte sur la méthodologie mise en place par un groupe de designer réunis autour du sujet « Apprendre des enfants avec autisme en tant que designer ». Méthodologie prônant une approche itérative, prônant la rencontre, l’observation, la réflexion et l’élaboration du cahier des charges, les propositions ou expérimentations et l’analyse des résultats. Ce document se boucle sur une « guideline » ou un guide des bonnes pratiques à l’attention des designers pour leur approche concernant l’enfant avec autisme. NOUVEL T., Guide pratique de la signalétique et des pictogrammes – Pour vous accompagner dans vos démarches d’accessibilité en faveur des personnes handicapées mentales, France, UNAPEI, 2012, 60 p. « Ce guide a été réalisé en réponse aux besoins exprimés par les associations locales et leurs établissements, ainsi que par les sites accueillant du public désirant une mise en accessibilité réelle en faveur des personnes handicapées. » (UNAPEI2012) GAUDION K. et MCGINLEY C., Green Spaces - Outdoor environments for adults with autism, Grande-Bretagne, Helen Hamlyn Centre for Design, Royal College of Art, 2012, 31 p. Une étude du Centre pour le Design Helen Hamlin du Royal College of Art en Grande-Bretagne qui s’intéresse aux bénéfices de conjuguer la botanique à l’autisme afin de stimuler ces personnes avec autisme. Une prise de conscience douce, par une approche de designer, de leur environnement en somme. BRAND A. et GAUDION K., Exploring Sensory Preferences – Living environments for adults with autism, Grande-Bretagne, Helen Hamlyn Centre for Design, Royal College of Art, 2012, 48 p. Une étude du Centre pour le Design Helen Hamlin du Royal College of Art en Grande-Bretagne qui pose la problématique suivante : Comment connaitre les préférences en terme de sensations de personnes n’ayant pas la possibilité de communiquer ces notions abstraites ? Par une approche de designer, cette étude va permettre de proposer des outils transitionnels qui permettront de communiquer ces concepts abstraits.

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ANDRÉ-VERT J. (dir.), Autisme et autres troubles envahissants du développement : interventions éducatives et thérapeutiques coordonnées chez l’enfant et l’adolescent, France, H.A.S., mars 2012, 60 p. Rapport de synthèse d’étude élaborée par consensus formalisé au sein d’un collège de la Haute Autorité de la Santé. Ce document est à destination des « professionnels de santé et professionnels des établissements et services médico-sociaux ayant un contact direct avec des enfants et adolescents avec TED, et prenant des décisions concernant leur suivi et leur accompagnement. Les principaux professionnels concernés sont les médecins, particulièrement médecins psychiatres, médecins de l’Éducation nationale et de la protection maternelle et infantile, médecins généralistes et pédiatres, psychologues, éducateurs spécialisés, orthophonistes, psychomotriciens, ergothérapeutes, infirmiers, professionnels coordonnateurs (ex. cadre de santé, enseignant référent, coordonnateur d’équipe pluridisciplinaire de MDPH, directeur d’établissement médicosocial, etc.) ». L’objectif premier de ce rapport est de permettre de « mieux évaluer les besoins et ressources individuels de l’enfant et de sa famille, dans chacun des domaines de fonctionnement et de participation habituellement touchés par les conséquences du TED en vue de proposer un projet personnalisé d’interventions considérées pertinentes pour répondre à ses besoins. » (HAS2012) BROUCHOUD V. (dir.), L’autisme en France - Diagnostic et parcours de soins, France, Doctissimo-FondaMental, 28 mars 2013, 29 p. Rapport de résultats d’une enquête réalisée conjointement entre la Société Doctissimo et la Fondation FondaMental. Les résultats de cette enquête mettent en lumière une relative amélioration de la situation, notamment au regard de l’âge de détection des premiers signes et de l’âge du diagnostic. Si cette enquête utilise le terme aujourd’hui erroné « pathologie » pour décrire l’autisme, elle révèle malgré tout la situation préoccupante des adultes autistes, surtout ceux présentant un autisme de haut niveau, qui se retrouvent exclus du système de soin. Le constat est que l’autisme est encore considéré comme un handicap de l’enfant alors que c’est un handicap qui persiste chez l’adulte. MASSON B., Autisme(s) et désinstitutionalisation – Des critères pour penser la “ville intense”, France, Master 2 ENSAP Lille, mai 2013, 125 p. Un regard d’architecte diplômant porté sur le rapport sociologique entre espace architectural et individu défini comme une singularité vers une société de sens communs. Où est alors la place de l’individu avec autisme, avec toute sa singularité, mais sans compréhension du sens commun dans cette société ? Une analyse socio-architecturale appuyé et en équilibre sur un fil culturel mince faisant référence au cinéma.

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CARLOTTI M-A, Troisième plan autisme (2013-2017), France, Ministère des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes, 2 mai 2013, 121 p. Publication officielle sous la forme d’une feuille de route ministérielle présentée le 2 mai 2013 par la ministre déléguée chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion d’alors : Marie-Arlette Carlotti (depuis Mme Ségolène Neuville) qui « a rappelé les choix faits après un long travail collectif réunissant associations, chercheurs, professionnels et parlementaires. Les recommandations de l’agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ANESM) et de la haute autorité de santé (HAS) feront référence pour l’ensemble des professionnels. Le Gouvernement a fait dégagé 205 millions d’euros pour financer cinq axes d’intervention : le diagnostic précoce, l’accompagnement tout au long de la vie depuis l’enfance, le soutien aux familles, la recherche, la formation de l’ensemble des acteurs de l’autisme. » (social-sante.gouv.fr) Consultable sur : http://www.social-sante.gouv.fr/IMG/ pdf/plan-autisme2013-2.pdf (Consulté le 05/08/2015) TAQUET M. et PETERS J., Le réseau cérébral fonctionnel des enfants atteints d’autisme : redondance et déconnexion, Publication scientifique, Belgique, ICTEAM institute, université catholique de Louvain, Juillet 2013. Dans cette publication scientifique, il est question de montrer les résultats d’une étude pointant le fait que chez un individu autiste les petits réseaux neuronaux, en ce qu’ils relient des zones peu éloignées du cerveau, sont beaucoup plus nombreux et privilégiés au détriment des plus grands réseaux de connexion, amoindris. En outre, l’hyper-connexion neuronale au niveau des zones adjacentes du même lobe cérébral chez les autistes permettraient ainsi le développement hors-norme de facultés dans des domaines bien spécifiques. Ce que nous dit cette étude c’est que cette lacune de connections entre deux régions cérébrales éloignées serait à l’origine notamment des difficultés pour l’autiste de décoder les expressions faciales en les associant à des émotions. DAL BELLO E., Mémoire de fin d’études, France, Mastère Stratégie de Communication par l’Image - École de Condé, 2013, 100 p. Mémoire de fin d’études d’une étudiante en communication sur le sujet de l’autisme. Elle explore les possibilités de sensibilisation au sujet de l’autisme. SAJIDI M., (dir.), Rapport 2013 : Situation de l’autisme en France, Paris, Association Vaincre l’autisme, 2013, 124 p. Ce rapport annuel de l’association Vaincre l’autisme reprend toutes les grandes lignes du sujet avec des statistiques et analyses sourcées. Ce rapport a été porté à l’attention de nombreux décideurs publiques et en premier lieux au cabinet de la Présidence de la République et François Hollande en personne. Ce rapport montre en outre une volonté forte à faire prendre conscience des enjeux, mais également aborde avec une grande velléité l’autisme comme une pathologie voire une épidémie, ce qui pourrait gêner certaines personnes (comme Josef Schovanec) qui souhaiteraient que l’on accepte d’aider à s’adapter au lieu d’aider à « guérir » les personnes avec autisme.

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FÉRON F. (dir.), Olfactory stem cells reveal MOCOS as a new player in autism spectrum disorders, Publication, 4 août 2015. Étude mettant en lumière des origines génétique des troubles autistiques Consultable sur : http://www.nature.com/mp/journal/vaop/ncurrent/full/mp2015106a.html

ATIH Agence Technique de l’Information sur l’Hospitalisation, Classification statistique internationale des maladies et des problèmes de santé connexes CIM-10 FR à usage PMSI, France, ATIH, 2015, Bulletin Officiel n°2015/9bis, 888 pages, pp.222-223. Document de synthèse en français des classifications de l’OMS http://www.atih.sante.fr/sites/default/files/public/content/2665/cim10_2015_final_0.pdf

 ARTICLES DE PÉRIODIQUES ET DE MAGAZINES MORISSON J., « Syndrome savant : un défi à la science », France, Nexus, n°76, sept-oct. 2011, pp. 74-82. Article faisant un point sur le syndrome savant souvent confondu à tort et à raison avec Asperger ou l’autisme de haut niveau. CHABANE N. « État des connaissances dans l’autisme » in. Tribunes Parlementaires Européennes, Numéro Spécial, France, Avril 2012, p. 20. N. Chabane donne un complément de définition clair des troubles autistiques. MARMION J-F., «De la synesthésie à la poésie », France, Le Cercle Psy, n°9, juin-août 2013, pp. 14-18. Article à propos de Daniel Tammet et apportant des précisions et points de vue sur les Asperger. MENDEL J., «Autisme, la France dans le mur», France, Métronews, 5 fév 2014, pp. 4-6. Cet article rappel le scandale français lié à l’autisme GAUDREAU M-C., « Le mystère autiste », Québec, L’Itinéraire, n°7, avril 2014, pp. 14-17. Cet article rappel le flou dans lequel parfois les parents et les scientifiques euxmêmes peuvent baigner. BOURGEOIS V., « Dans la tête de l’autiste », Québec, L’Itinéraire, n°7, avril 2014, pp. 18. Article à propos de Hugo Horiot, comédien français et qui est autiste asperger. COUBRAY C., « Première pierre pour la fondation autisme Luxembourg », Luxembourg, ARCHIDUC-Magazine d’architecture, n°9, automne/hiver 2014, pp. 38. Le 20 octobre 2015 s’est déroulé la pose symbolique de la première pierre du nouveau bâtiment conçu par Architecture & Environnement pour la Fondation Autisme Luxembourg. MARSEILLE S., « Brest croise les regards professionnels », France, Gazette Santé-Social, n°114, janvier 2015, pp. 41. Article à propos d’un nouveau protocole de diagnostic précoce mis en place à Brest et basé sur le croisement des regards professionnels sur l’enfant.

BIBLIOGRAPHIE


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Le personnage de Snoopy, silencieux, atypique, dormant sur le toit de sa niche. Un personnage hors-normes et non-moins intelligeant, crĂŠatif, attachant, un ami honnĂŞte et indĂŠfectible.


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