Détroit / 30 Americans - One Nation. Thirty Experiences. Avant de pouvoir parler de l’exposition 30 Americans - One Nation. Thirty Experiences qui se déroule en ce moment même au Detroit Institute of Arts (DIA), il est primordial de recontextualiser l’exposition. Nous sommes à l’automne 2015 et la ville de Détroit est officiellement sortie de la situation de mise en faillite dans laquelle elle s’était retrouvée après une accumulation de dettes atteignant 18,5 milliards de dollars US en juillet 2013. À ce moment, la ville est dévastée par le manque d’emplois et de fonds ; plus d’un tiers des habitants fuient la ville qui devient son propre fantôme. En 2014, dans l’espoir faire remonter ses comptes, la mairie en place pense vendre des oeuvres phares de la collection du DIA (une collection riche et variée dans laquelle sont notamment présentes des oeuvres de Brueghel le Jeune, Carl Andre, Armand Guillaumin, Andy Warhol…). Après une lutte de l’institution, des habitants et un soutien international, aucune vente n’est faite et le DIA garde sa collection. La déclaration de mise en faillite de la ville a également eu pour conséquence la saisie de près de 65000 maisons considérées trop vétustes pour y accueillir des occupants. La pauvreté faisant des ravages dans la ville, un grand nombre de bâtiments sont fermés, barricadés et surveillés afin d’éviter les intrusions illégales et une dégradation accrue de ces derniers. Bien que cette période de déclin s’étende sur une cinquantaine d’années, en 2013 elle atteint son point le plus bas, le visage de Détroit est amoché et marqué à jamais, touché directement par des crises à répétitions et des pertes de fonds massives. Pour autant, en 2015, la ville est en pleine renaissance, appliquant le principe du « Do It Ourselves » (ou « faisons le nous-mêmes ») et par la mise en place de projets divers (ouvertures de magasins en tous genres, structures culturelles, ateliers, festivals…) les espaces anciennement désertés sont petit à petit réinvestis par toute une génération de jeunes actifs souhaitant participer au renouveau de la ville. Dans ce paysage en travaux, il semblerait que les politiques détroitiens misent sur le développement culturel de la ville afin de trouver un nouveau souffle. Si pendant un certain nombre d’années Détroit à souffert de son image de ville fantôme et violente, en 2015, la situation a évolué ; de nombreux bâtiments abandonnés sont achetés et investis par des personnes provenant des quatre coins des États-Unis qui ont le désir de développer des projets majoritairement sociaux et artistiques. Dans ce décors, le street art prend une place considérable ; de nombreuses fresques colorent les espaces de la ville et assez régulièrement de nouvelles peintures murales apparaissent (un passage, « The Belt », dans Downtown, ou encore le Lincoln Street Art Park, rassemblent des oeuvres de street artists du monde entier). Un véritable vivier culturel dans lequel, très régulièrement, des évènements de tous genres se déroulent, dans, mais aussi hors du centre de Détroit (projections, rencontres, performances, happenings, expositions…). Des évènements qui font suite à la multiplication de projets, d’espaces d’art, de résidences, de collectifs ou encore d’ateliers d’apprentissage de l’art qui deviennent autant d’opportunités pour les artistes de la ville de développer leurs pratiques et de les exposer au regard des autres. La culture, une échappatoire grâce à laquelle les détroitien(ne)s pourraient se projeter et imaginer de meilleurs jours - « tous les détroitiens sont des artistes, tous te le diront « (Scheherazade Washington Parrish, conversation avec l’auteur). 30 Americans - One Nation. Thirty Experiences prend place dans ce contexte du renouveau d’une ville par la culture et les projets à vocation sociale. L’exposition, rendue possible grâce à la Rubell Family Collection and Contemporary Arts Foundation, existe depuis fin 2008 et voyage dans différentes institutions américaines depuis cette date (Miami - 2009, Milwaukee - 2012, New Orleans 2014…). Revue, ré-actualisée et modifiée selon les lieux où elle est montrée, le principe reste pour autant le même : une sélection de 30 artistes afro-américains contemporains provenant des collections de la Rubell Family Collection. Aussi, il est possible de retrouver des figures emblématiques et populaires de l’art afro-américains comme Jean-Michel Basquiat ou