L’acropole de Roquebrune Cap-Martin
Alexis ZANOTTA
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Un séjour pour l’architecture L’acropole de Roquebrune Cap-Martin
Alexis ZANOTTA Rapport de projet de fin d’études Sous la direction de monsieur Laurent BEAUDOUIN DE 1 - A-lto Architecture - laboratoire des territoires ouverts Ecole Nationale Supérieure d’Architecture Paris Val de Seine 2020 3-
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Fig 1 MONET Claude, Menton vu du Cap Martin, 1884
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Remerciements
J’aimerais
avant
toute
chose
remercier
particulièrement monsieur Laurent Beaudouin pour son encadrement tout au long de ce semestre de PFE. Je tiens à remercier madame Emmanuelle Sarrazin et monsieur Cyrille Faivre-Aublin de m’avoir fourni un enseignement riche durant ces deux années de master. Evidemment, j’aimerais remercier monsieur Marc Barani pour ces précieux conseils lors de nos corrections de projets et monsieur Paolo Amaldi pour avoir guidé mes réflexions oscillant entre le projet et le mémoire. Les contacts avec monsieur Jean-Michel Bossu ont permis de faire germer le fondement des travaux présentés ci-après. Qu’il trouve ici toute notre gratitude. Enfin, je remercie l’ensemble des enseignants et étudiants m’ayant accompagné durant ces 5 années à l’école.
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Fig 2 Peinture du château, 2020, Roquebrune ©Atelier Giovanna
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Avant-propos
Le projet de fin d’étude est une synthèse du parcours entrepris au sein de l’ENSAPVS. Il fait le lien entre les recherches théoriques et projectuelles des deux années de Master dans le domaine d’étude ALTO. Cela a été l’occasion pour nous, groupe de 4 étudiants de s’allier le temps d’un semestre et de proposer une démarche d’installation territoriale et architecturale qui soit la plus qualitative et hétérogène possible. Ainsi, la recherche étant un élément constitutif de nos processus de conceptions, nous avons décidé de lier nos travaux effectués dans le cadre du mémoire à nos PFE respectifs en participant à la mention recherche.
N.B. Sauf indication contraire, les documents iconographiques sont personnels.
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* Relatif au discours de Philip Johnson en 1965 « Architecture is surely not the design of space, certainly not the massing or organizing of volumes. These are ancilllary to the main point which is the organization of procession. Architecture exists only in time » que l’on peut traduire par « l’architecture n’est sûrement pas le design de l’espace et ce n’est certainement pas l’organisation de volumes. Ceuxci sont auxiliaires à son objet principal : l’organisation de la procession». L’architecture n’existe que dans le temps ». - 10
Table des matières
- Remerciements
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- Avant-propos
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- Retour sur un semestre de recherche
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Trait d’union : au-delà des bains
- Introduction
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- I. Approche territoriale
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Récit d’une démarche sensible
- II. Implantation dans un contexte pittoresque
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Caractériser le distant et le proche
a. Paysages distants
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b. Paysages proches
57
- III. « Organization of procession » *
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Caractériser «son distant» et «son proche»
a. Paysage distant
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b. Paysage proche
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- Conclusion
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- Bibliographie
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- Enseignement
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- Annexes
83 11 -
Fig 3 Plan de l’expÊrimentation par la promenade
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Trait d’union - au-delà des bains
Les pages qui vont suivre s’inscrivent dans la lignée du travail entrepris au sein du mémoire “Trait d’union : Au-delà des bains, le projet comme passerelle entre architecture et territoire” encadré par monsieur Cyrille Faivre-Aublin soutenu en février 2020. Je me souviens d’un échange avec monsieur Xavier Dousson datant de 2017 nous suggérant évidemment d’apprendre des architectes les plus célèbres, mais d’attiser une curiosité plus importante à l’étude d’un(e) architecte moins connu qui nous en apprendrait tout autant. Cette démarche de recherche à l’initiative personnel noue un lien étroit et personnel entre le chercheur et l’architecte malgré lui. Fasciné par les travaux d’Aurelio Galfetti dans le Tessin, il m’a semblé évident de m’orienter vers l’étude de ses œuvres dans la ville de Bellinzona où l’architecte a pu réaliser un bon nombre d’ouvrages dans une seule et même ville. Plutôt que de comparer certaines réalisations entre elles, j’ai développé une promenade piétonne qui relie plusieurs de ces travaux, notamment de la passerelle des bains publics (construite en 1972 par Aurelio Galfetti, Flora Ruchat et Ivo Trumpy) jusqu’à la rénovation du 13 -
château de la ville moyenâgeuse CastelGrande (en 1982 par Aurelio Galfetti). A travers ce parcours, j’ai mis en exergue le travail sur la ligne et le lien étroit qu’il possède avec la surface dans ces travaux et dans leur contexte de manière générale. En effet, dans l’intégralité du travail d’Aurelio Galfetti à Bellinzona, on peut observer à toutes les échelles de projet la présence de la notion de la ligne comme outil principal du processus de conception. Aujourd’hui, au-delà des bains, ce que je retiens c’est la promenade (le point en mouvement) et le sentiment de cohérence dans le territoire entre les projets. La rénovation du château en est un exemple parfait. Il domine la ville de 60 mètres en offrant un grand espace public et un panorama inédit notamment sur ses propres réalisations. La différence d’un parc classique c’est le “paysage architectural” qu’il met en place qui m’a intéressé, et tout le travail sur les différentes séquences qui le compose. Ce lieu, c’est Aurelio Galfetti qui a pris la responsabilité de lui donner un nouveau statut en 1982. Un statut dont j’ignorais l’existence. Cela va constituer une base solide dans le développement du projet de fin d’étude. - 14
Trait d’union - au-delà des bains
Il s’agissait donc de consacrer un travail de l’ordre territorial, qui s’inscrive dans un lien étroit entre le paysage du lieu et une promenade pittoresque qui le traverse. Pour résumé, c’est la recherche par et au service du projet du rapport paysage/ promenade. Comment peut-on par le mouvement, offrir un paysage en créant son propre paysage ? Comment obtenir le juste équilibre entre les deux ? Pour mettre en pratique ces questions, il était important de pouvoir s’inscrire dans une démarche de processus qui vise à intervenir dans un lieu aux patrimoines naturels et artificiels importants.
15 -
Fig 4 Roquebrune CapMartin, Plan du territoire déclivité
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Introduction
Roquebrune Cap-Martin est un rocher géant qui a les pieds dans la mer. Dans le sud de la France, la ville comprise entre Menton et Monaco constitue le point de rencontre de 4 étudiants en quête de révélation du patrimoine. En effet, aujourd’hui plus que jamais, la nécessité de réaménager certains tissus de la ville se fait sentir. Ainsi, plutôt que de faire chacun une proposition différente d’intervention, il nous a semblé judicieux d’habiter le paysage ensemble et de développer un travail personnel tout aussi important que d’établir une relation évidente entre tous dans le territoire.
Chacun dans un site différent, j’avais une volonté personnelle de travailler en haut de la ville, au nord du centre moyenâgeux afin de suivre les recherches du mémoire qui datait du S9. Sur un site qui surplombe le territoire, le projet s’installe donc en tant que place la plus haute de la ville. En plus d’avoir cette responsabilité, il constitue le point d’aboutissement d’une longue promenade piétonne qui démarre à Menton. Toujours dans une logique de vision 17 -
Fig 5 Roquebrune CapMartin, Plan du territoire masses bâties
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Introduction
péripatéticienne de l’architecture (pour reprendre le terme de Jacques Lucan), la problématique qui émerge de la fusion entre les enjeux du projet et mes interrogations est la suivante : comment capter le paysage proche et distant d’un site dans la conception d’édifice(s) au service du territoire ?
Dans une démarche de recherche, je développe le processus entamé 6 mois plus tôt qui vise à créer une promenade s’ouvrant sur un espace public ouvert sur le paysage, en accord également avec le récit commandé par mes camarades et moi-même. Ce dernier constitue d’ailleurs la première partie du rapport qui est organisé chronologiquement. La seconde partie met en lumière les caractéristiques propres
du
site
en
lien
avec
la
stratégie
d’implantation, pour terminer avec la méthode entreprise de manière concrète dans l’élaboration du projet. Ce rapport dédie alors la majeure partie de son contenu au développement d’un processus de travail plutôt qu’à la mise en valeur d’un objet fini.
19 -
- 20
I. Approche territoriale Récit d’une démarche sensible
Fig 6 Photographie du littoral et des différents flux Routiers Maritimes Automobiles Piéton -
21 -
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Via Julia Augusta -13 Via Julia Augusta
970
Construction du château 970 Construction du château 1082 Rassemblement des terres qui formeront la commune de Roquebrune 1082 Rassemblement des terres qui formeront la commune de Roquebrune 1355
Roquebrune et Menton passe sous la tutelle des Grimaldi, famille princière monégasque. 1355 Roquebrune et Menton passe sous la tutelle des Grimaldi, famille princière monégasque.
1793 - 1848 En quelques décennies, Roquebrune devient successivement francaise, 1793 - 1848 avant de redevenir monégasque puis sous tutelle du roi de Sardaigne. En quelques décennies, Roquebrune devient successivement francaise, 1861 avant de redevenir monégasque puis sous tutelle du roi de Sardaigne. Roquebrune et Menton reviennent à la France 1861 1869 Roquebrune et Menton reviennent à la France Le chemin de fer arrive à Roquebrune. 1869 1890de fer arrive à Roquebrune. Le chemin Villégature méditerranéenne : 1890Aménagement du Cap Martin par Hans Georg Tersling Villégature méditerranéenne : Aménagement du Cap Martin par Hans Georg Tersling 1926-1957 Le Cap Moderne: 1926-1957 Construction de la villa E-1027, de l’étoile de mer, Lecabanon, Cap Moderne: QUELQUES DATES CLES DE L’HISTOIRE DE ROQUEBRUNE CAP-MARTIN du des unités de camping. Construction de la villa E-1027, de l’étoile de mer, QUELQUES DATES CLES DE L’HISTOIRE DE ROQUEBRUNE CAP-MARTIN du cabanon, des unités de camping.
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1890Via Julia Augusta Villégature méditerranéenne : Aménagement du Cap Martin par Hans Georg Tersling 1904 Construction des Villas Cypris et Torre Clementina 970 1920 -1927 Construction du château Ferdinand Bac construit les Colombières à Menton
1926 -1929 Eileen Gray et Jean Badovici construisent la villa E-1027 Rassemblement des terres qui formeront la commune de Roquebrune 1932 -1934 Eileen Gray construit la villa Tempe a Païa à Menton
1082
1355
Roquebrune et Menton passe sous la tutelle des Grimaldi, famille princière monégasque.
1948-1950 Projet de Le Corbusier Roq 1952 Le Corbusier construit le Cabanon 1952-1955
1793 - 1848 Projet de Le Corbusier Rob En quelques décennies, Roquebrune devient successivement francaise, 1957 avant de redevenir monégasque puis sous tutelle du roi de Sardaigne. 1861
Construction des 5 unités de camping
1954 -1958 Roquebrune et Menton reviennent à la France 1869
Eileen Gray réhabilite et agrandit de Villa Lou Pérou à Saint-Tropez
Le chemin de fer arrive à Roquebrune. 1890
Villégature méditerranéenne : 1997 Aménagement du Cap Martin par Hans Georg Tersling Extension du cimetière St. Pancrace par Marc Barani
CAP MODERNE
« Roquebrune, cette oasis artistique » André Gide, 1947
QUELQUES DATES CLES DE L’HISTOIRE DE ROQUEBRUNE CAP-MARTIN
1926-1957
2015 Le Cap Moderne: Restauration la Villa de E-1027 Construction de la villa E-1027, de de l’étoile mer, du cabanon, des unités de camping.
Fig 7 Quelques dates clés de Roquebrune Cap-Martin
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I. Approche territoriale Récit d’une démarche sensible
Les premiers mois d’analyse et de recherche sont le fruit d’un travail commun effectué par 4 étudiants en amont du développement personnel du projet de fin d’étude. C’est pour cela que nous avons choisi de rendre cette 1ère partie commune pour restituer au mieux les faits de ce travail de groupe.
Les premiers éléments fondateurs quant aux choix des sites résultent d’une proposition des encadrants visant à engager une réflexion sur la ville de Roquebrune-Cap-Martin, en côte d’Azur. Ville fétiche de nombreux grands artistes et personnalités des XIXe et XXe siècle (Monet, Chanel, Churchill...), elle est pour nous, étudiants en 2020, le lieu rêvé pour un projet de fin d’études. Le relief très marqué, le riche patrimoine architectural, ainsi que la beauté et la variété des paysages présentèrent tout de suite un intérêt projectuel, en accord avec le thème même de l’enseignement : “Habiter le paysage”. En effet, en moins de 6km, le relief culminant à 1000m plonge vers la mer. En conséquence, les vues proposées y sont très riches. De plus, le développement de ville s’est étendu sur plusieurs périodes offrant en conséquence un large héritage architectural sur 23 -
Fig 8 Roquebrune CapMartin, Cap moderne Š internet
Fig 9 Fresque de Le Corbusier, Cap moderne Š internet
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I. Approche territoriale Récit d’une démarche sensible
lequel s’appuyer. A contrario, cette urbanisation saccadée eut pour conséquence de scinder la ville en deux bords, le relief du cap n’arrangeant pas les tentatives de liaison. C’est ainsi que notre groupe de 4 étudiants s’est formé, pour tenter d’amener une proposition forte à la hauteur des problématiques urbaines et paysagères identifiées. D’un point de vue purement programmatique, la “commande” prévue pour les 4 architectes en devenir impliqués concernait à l’origine la valorisation du site du Cap Moderne, qui regroupe les interventions successives d’Eileen Gray puis de Le Corbusier à Roquebrune. Il s’agissait notamment de penser une petite salle consacrée à l’exposition des meubles de la villa d’Eileen Gray, au bénéfice de l’association gérant le Cap Moderne. De plus, il était question de repenser l’accès au site depuis le chemin des douaniers, serpentant jusqu’à la gare, qui reliait jadis Monaco. En ce lieu précis, il était entendu d’aménager un espace d’accueil et de conférence pour les visiteurs, aujourd’hui inexistant. Bien que très fréquenté, le sentier des douaniers souffre aujourd’hui des divers aménagements qu’il fut amené à subir. Il reliait à l’origine Monaco à Menton, en suivant strictement 25 -
Fig. 10. Plan de Hans Georg Tersling pour le Cap Martin
Gare de CabbĂŠ 1 Cap Moderne 2 Pointe du cap 3 Fig. 11 Roquebrune CapMartin, Plan du sentier des douaniers
1
-- 26 26
2
3
I. Approche territoriale Récit d’une démarche sensible
la côte, et servait aux douaniers pour lutter face à la contrebande de marchandises. Aujourd’hui, il fait office de promenade côtière. Entre les deux, de nombreux remaniements ont contribué à altérer son tracé d’origine : interruptions, déviations,
privatisations,
manque
d’entretien.
L’exemple le plus notable est visible dès l’arrivée à Roquebrune, par le train. Jadis longeant le chemin de fer sur cette section, le sentier est aujourd’hui interrompu pour répondre aux besoins de stationnement aux abords de la gare. Pire, sa trace a totalement disparu, rendant l’accès difficile, discret, et peu qualitatif au vu du potentiel. Le sentier se retrouve fortement enclavé entre d’un côté la voie ferrée, et de l’autre la présence de nombreuses propriétés privées en bordure du sentier qui rompent toute relation entre l’usager et la côte. Plus généralement entre l’Homme et le paysage.
Ce lieu étant la première image de Roquebrune affichée depuis le chemin de fer, nous avons de suite eu l’intuition qu’il était capital de repenser totalement cette séquence. Au fond, il s’agissait 27 -
Fig 12 Sentier des douaniers
- 28
I. Approche territoriale Récit d’une démarche sensible
de fabriquer un réel point de départ du sentier vers le Cap Moderne, mettant en exergue les qualités de la promenade. Les faibles pentes du sentier, la nature qui se mêle à l’artifice du béton coulé au sol, l’ouverture sur la mer, les compressions d’espaces, les perspectives sur Menton et Monaco, la vue sur le Mont Agel... Autant de caractéristiques qui rendent ce lieu si particulier. Son potentiel n’avait d’ailleurs pas échappé à Claude Monet, qui a capté quelques instants de ses promenades côtières en 1884. La vue depuis la pointe du cap, dégagée à 360°, présente également un potentiel unique. En quittant la gare direction du Cap moderne, le parcours du sentier se libère progressivement de ses entraves énoncées plus tôt. L’usager est amené progressivement à traverser une multitude de situations intéressantes découlant du rapport voie ferrée/sentier/côte. Il devient alors acteur du paysage. Intervient alors une véritable promenade qui est enrichie par ces variations découlant du rapport tumultueux entre infrastructures et relief qui fabrique le paysage. Il nous a dès lors paru envisageable d’intervenir en lien avec ce sentier en définissant plusieurs interventions dont le rôle serait d’accompagner ce sentier jusqu’au Cap Moderne, 29 -
voire davantage. L’idée d’un travail d’acupuncture enrichissant le paysage a ainsi fait son apparition.
En parallèle, il fut très vite nécessaire de travailler en volume pour se rendre compte concrètement de l’importance du relief. De plus, il était capital d’appréhender au mieux le tracé de la ligne de côte, pour pouvoir ensuite choisir de façon stratégique et méthodique les lieux d’intervention : espacements, vues... Nous avons alors pris l’initiative de réaliser une maquette de site à grande échelle dès la première semaine de réflexion, pour étudier chaque possibilité. Travaillant au 1:10 000, nous avons choisi de représenter les courbes de niveaux tous les 10m pour rendre compte de la forte déclivité que nous serions amenés par la suite à maîtriser. Dans l’optique de développer un réel projet de PFE, il nous a rapidement paru plus opportun de mettre en place un programme plus conséquent, d’échelle territoriale, basé autour d’un récit mettant en scène plusieurs interventions implantées sur le littoral. La question fondamentale qui nous a semblé évidente et d’actualité était de savoir comment révéler - 30
I. Approche territoriale Récit d’une démarche sensible
le(s)
patrimoine(s)
de
Roquebrune-CapMartin
en participant à son développement ? En effet, il s’agit ici, par ces interventions de s’inscrire dans une démarche de valorisation du patrimoine en s’appuyant en premier lieu sur un cheminement piéton à travers le(s) paysage(s) du chemin des douaniers. Le partage et l’échange de nos premières impressions avec monsieur Jean Michel Bossu nous a permis d’ouvrir les yeux sur de nombreux points. En effet, il nous a été soumis l’idée d’aller encore plus loin dans cette démarche en étendant finalement la zone d’intervention à la ville entière, et donc plus uniquement au littoral. Le fait de s’adresser dès lors également au flanc ouest du Cap induit de fait une tentative d’établir davantage de connexion entre vieux village au nord-est, et urbanisation nouvelle, côté Carnolès. C’est à cet instant que le projet change de statut. Ainsi, les différentes villas, les jardins, le vieux village, le cap moderne, le chemin de fer, la falaise, les chemins qui serpentent, le relief et son traitement artificiel... nous offraient un large panel d’un patrimoine à exposer aux yeux de tous. Toutes ces données furent explorées et synthétisées en une série de coupes mettant l’accent sur la déclivité de la ville.
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2 3
1
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L
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G
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E
C
B
A
H I
Fig. 13. Localisation des coupes
33 -
Une ville dans la pente... En témoigne ces cartes postales de Le Corbusier qu’il envoyait à ses proches lors de l’élaboration de ses projets dans la ville.
Fig 14 Carte postale de Le Corbusier
Fig 15 Carte postale de Le Corbusier
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I. Approche territoriale Récit d’une démarche sensible
Fig 16 Coupe 1
Fig 17 Coupe 2
Fig 18 Coupe 3
35 -
REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
Fig 19 Coupe AA
REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
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Fig 20 Coupe BB REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
Fig 21 Coupe CC
- 36 REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
I. Approche territoriale REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
Récit Récit d’une d’une démarche démarche sensible sensible
REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
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Fig 22 Coupe DD
REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
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Fig 23 Coupe EE
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Fig 24 Coupe FF
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REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
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Fig 25 Coupe GG REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
Fig 26 Coupe HH
REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
Fig 27 Coupe II
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I. Approche territoriale Récit d’une démarche sensible REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
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Fig 28 Coupe JJ
REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
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REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT
Fig 29 Coupe KK
REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT m5
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Fig 30 Coupe LL © COSTA Valério, «Gravité(s)», 2020
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Si ce travail de valorisation touche évidement à la dimension touristique, il s’adresse premièrement aux habitants permanents de Roquebrune, qui souffrent notamment du manque d’accessibilité et subissent les difficultés de stationnement. Ainsi, les interventions sont alors déployées à échelle territoriale et sont, autant que faire se peut, d’intérêt public. Nous avons donc été amenés à questionner l’échelle des projets, leur nature et leur statut véritable au sein de la ville de RoquebruneCap-Martin. Une question capitale consistait à établir une hiérarchie entre les différentes interventions, tout en visant cohérence et complémentarité. Chacunes d’elles sont alors pensées pour intervenir à un moment précis de la promenade. D’abord, quatre projets principaux, qui prendront place en des lieux marquants, aux problématiques manifestes. Puis, des interventions ponctuelles, plus discrètes, amenées de façon à rythmer les promenades, et apporter du liant entre les projets principaux. Enfin, un travail plus fin encore, résidant dans la signalétique, déjà initié de manière plus ou moins volontaire et habile à Roquebrune, qui permettra alors d’obtenir la cohérence totale souhaitée.
- 40
I. Approche territoriale Récit d’une démarche sensible
Pour se faire nous avons instinctivement commencé à travailler à partir de l’existant. Le sentier des douaniers restait notre point de départ, il nous a donc paru opportun et stratégique d’installer deux de nos projets de part et d’autre de la promenade. Le parti pris fondamental des projets allait au plus “simple” et résidait dans le développement d’une promenade piétonne débutant à la gare de Roquebrune avec une requalification de celle-ci et la création d’un restaurant attenant (1 - fig 25). Cette promenade se poursuit avec comme point d’aboutissement la pointe du Cap et la création d’un lieu qui constitue la sortie de la ville (côté terre) mais également l’entrée (côté mer). D’un point de vue programmatique il s’agit d’un lieu de détente comprenant une piscine et un restaurant (2 - fig 26 et 27). Toujours dans la recherche d’une continuité d’un projet à l’autre, le chemin de Menton lui plus en retrait, joue le même rôle que le chemin des douaniers. Historiquement il s’agit d’un chemin emprunté lors des processions religieuses entre les nombreuses chapelles et églises. Il permet une ascension directe depuis Menton jusqu’au centre historique de Roquebrune. Ainsi, c’est naturellement que nous avons choix d’installer les deux autres projets principaux le long du sentier, avec pour 41 -
chacun un rôle particulier répondant aux besoins identifiés : Le premier, comme moment de pause dans l’ascension, aux abords de la Villa de plaisance de Coco Chanel (3 - fig 28 et 29). Le second comme lieu d’arrivée qui surmonte le village historique (4 - fig 24). Le rôle de relais dans l’ascension est assuré par un musée, au cœur d’un jardin méditerranéen qui reprend les caractéristiques évoquées en amont. La séquence d’arrivée développe elle des espaces publics ouverts sur la ville et un centre de maisons d’hôtes qui donne une cohérence au récit initial. De manière logique, le récit de la promenade débute à la gare et abouti en haut de la ville en favorisant le parcours piéton dans une ville où le flux automobile prend une place bien trop conséquente. Chacun des projets répond à sa manière aux problèmes de stationnement, de manière crédible et en accord avec le récit initial.
En parallèle, un parcours nautique autour du Cap propose une alternative à la visite piétonne. Ainsi, le positionnement de deux débarcadères de part et d’autre du chemin côtier intervient également dans la démarche territoriale. Ces endroits stratégiques - 42
I. Approche territoriale Récit d’une démarche sensible
d’interventions s’accrochent ainsi à chaque fois à un contexte environnant très fort. La présence de la gare, l’inflexion du cap, la villa de Chanel et son jardin et le centre historique justifient nos présences et placent le cap moderne en plein centre de gravité des projets.
4
3
Fig 31 Roquebrune CapMartin, Plan des zones d’interventions Chemin de Menton Sentier des douaniers
1
Cap Moderne
2
43 -
- 44
II. Implantation dans un contexte pittoresque CaractĂŠriser le distant et le proche
Fig 32 Photographie dans la rue du Rataou
45 -
+
+
+
255m
265m
300m
Fig 33 Coupe longitudinale
Fig 34 Vue satellite Š Google Earth
Englobe (de haut en bas) la montagne, le site, le centre historique
3000 m² -
- 46
+250.00 ngf Diff. 0 - 10m -
II. Implantation dans un contexte pittoresque Caractériser le distant et le proche
Situé au nord de la ville moyenâgeuse de Roquebrune, le site accueille depuis quelques mois un parking sur deux niveaux à usage privé et public. Le problème de stationnement se faisant sentir en plein cœur de ville, il reste ici très peu utilisé de par son emplacement éloigné des flux routiers principaux et son manque d’activité environnante qui en font un parking sur-dimensionné. Nombres d’habitants roquebrunois se sont opposés à la construction récente de ce projet, en vain. Dans le cadre du diplôme de fin d’étude, l’idée est d’imaginer un contre-projet à ce parking récent tant pour offrir une solution alternative que pour permettre une requalification de ce lieu idyllique qui est resté pendant longtemps un endroit orphelin d’activité. La volonté est de proposer aux habitants et aux nombreux touristes un nouveau pôle. Un point de repère public au pied de la grande végétation de la montagne, composé d’une petite bibliothèque, d’espaces
publics
ouverts
sur
le
paysage
comprenant un théâtre en plein air et de maisons d’hôtes, le tout 250m au-dessus du niveau de la mer.
47 -
Le site considéré englobe les 3000m² de terrain longeant
la
route
mais
aussi
son
contexte
environnant. Les logements existants au nord-est ainsi que le départ des pentes de la montagne ont été à mes yeux à prendre tout autant en considération, surtout dans la démarche qui fut celle de penser le projet au service de son territoire. Il constitue alors un point final en haut de la ville, mais également un point de départ aux grandes randonnées des montagnes ; en somme, un lieu de rencontre et de partage. a. Paysages distants Le projet n’est pas uniquement la partie construite. Si je me réfère aux recherches entreprises au sein du mémoire au semestre précédent et à l’arpentage du site, les limites du Projet sont floues et appartiennent à la perception que l’on se fait de celui-ci par le parcours que l’on emprunte pour y accéder. Le site est desservi au sud par le sentier du Rataou et celui-ci participe au développement du parcours piéton évoqué précédemment. En réalité c’est le chemin de Menton qui amorce l’ascension au - 48
II. Implantation dans un contexte pittoresque a. Paysages distants
site côté ouest du cap, notamment ponctué par le projet du musée La Pausa de Camille Benoit qui fonctionne comme un relais visuel dans le paysage. Le chemin traverse le centre historique et sa densité extrêmement élevée où l’on passe d’une vue tantôt ouverte sur le paysage tantôt refermée sur elle-même à une vue exclusivement intimiste, caractéristique d’un pittoresque que l’on connait des cités anciennes.
Fig 35 Plan de sol du parcours dans le centre historique, qui précède l’arrivée au site
5
1 Place de la fontaine, chemin de Menton 2 Parvis de l’église Ste Marguerite
4
3 Place des deux frères
3
2
1
4 Parvis du château 5 Arrivée au site par le sentier du Rataou
49 -
NB : 1-2 ne sont pas compris dans le cadre de la vue satellite car se situant 100m avant l’entrée du centre 1 L’olivier millénaire, sur le chemin de Menton 2 Place de l’olivier millénaire, point relais visuel entre les lieux forts de la ville 3 Place de la fontaine, entrée dans le cœur de la ville moyenâgeuse 4 Eglise SainteMarguerite, lieu de procession avec les chapelles plus au sud de la ville
6
5
4
3
5 Place des deux frères 6 Parvis du château de la ville
- 50
Fig 36 Vue satellite et identification des lieux marquants dans la promenade © Google Earth
1-2
II. Implantation dans un contexte pittoresque a. Paysages distants
1
2
3
4
5
6
51 -
1 Rue de la Fontaine 2 Croisement entre la rue Montcollet et la rue du Château 3 Rue du Château 4 Croisement entre la rue du Château et la rue Rataou 5 Rue du Rataou
6
6 Sentier du Rataou
5 4 3 2 1
Fig 37 Vue satellite et identification des escaliers qui mènent au point haut de la ville © Google Earth
- 52
II. Implantation dans un contexte pittoresque a. Paysages distants
1
2
3
4
5
6
53 -
Les flux piétons et routiers ont la particularité de s’intégrer respectivement de manière transversales et longitudinales et rompent encore plus le dialogue entre eux. L’ascension s’effectue donc en grande partie de manière transversale à la montagne, c’est à dire que l’on se découvre une sensation de prise de hauteur rapide et évidente qui amène à la découverte d’un but final et qui s’accentue au sein du centre-ville.
- 54
Chemin de Menton
Sentier des douaniers
Fig 38 RelevĂŠ des escaliers dans la ville
Routes principales
Ligne de train
Escaliers
55 -
4 + 10.00 + 260.00ngf
+ 00.00 + 250.00ngf
Fig 39 Plan masse avant l’intervention
Chemin piĂŠton
- 56
2 3
1
II. Implantation dans un contexte pittoresque a. Paysages proches
b. Paysages proches Cette notion d’escalier palliant à la forte topographie de la ville se retrouve jusque dans l’arrivée sur le site mais également dans le site lui-même ou il sera nécessaire de relier un niveau bas à un niveau haut suivant une pente bi-directionnelle. Les alentours sud du site composés de quelques maisons, de l’école primaire du Rataou et de sa cantine ont un lien fort dans leurs proportions avec le tissu existant qui le borde. Ce dernier s’évase ensuite pour laisser place à un tissu vierge au nord où l’on observe des logements HLM existants qui suivent les lignes topographiques. Ces derniers, malgré leur manque de qualité architecturale évidente m’ont semblé intéressants dans leur positionnement quant à l’avenir du projet.
On ne peut naturellement passer sous silence la présence de 4 points fondamentaux paysagers qui entourent le site :
1- La falaise, à l’ouest qui culmine au-delà 57 -
de 320m et intimise les cimetières qui se cachent derrière. Elle nous rappelle que Rocabruna (premier nom de Roquebrune Cap-Martin) n’est au final qu’un gigantesque rocher de couleur brune.
2- Les montagnes, omniprésentes dans le
paysage de la ville, elles sont ici plus près que jamais et imposent la végétation comme matérialité dominante
3- Le château du centre moyenâgeux, qui
sort de terre pour signifier sa présence, et constitue d’ailleurs un point de vue magnifique depuis lequel nous pouvons voir le site
4- La mer et sa ligne d’horizon infinie, ainsi
qu’un panorama sur le littoral monégasque
Le site se veut, par le paysage qui l’entoure, être un balcon sur le territoire en identifiant chaque point comme un paysage à cadrer, chaque point comme un emmarchement à créer. Sa forme en V induit ainsi une montée progressive jusqu’à un point d’aboutissement, le point final du parcours qui s’ouvre sur le paysage, l’Acropole. - 58
II. Implantation dans un contexte pittoresque a. Paysages proches
1
2
3
4
59 -
- 60
III. « Organization of procession » Caractériser « son distant » et « son proche »
Fig 40 Photographie du site depuis le château
61 -
Fig 41 Le Corbusier, Croquis de l’Acropole et du parthénon, 1923, «Vers une architecture»
Fig 40 Croquis le long de l’avenue Raymond Poincaré
- 62
III. « Organization of procession » a. Paysage distant
Une acropole désigne de manière générale la partie la plus élevée des citadelles anciennes. C’est le lieu qui récompense d’une plénitude tout le parcours entrepris pour y accéder. Un lieu de paix qui se fige dans le paysage. Généralement édifiées dans l’Antiquité, la construction des acropoles suit une géométrie angulaire dans l’espace typique de l’architecture grecque, qui s’adapte aux aléas du site. En somme, les bâtiments sont orthogonaux mais leurs placements dans le site ne suivent pas cette même règle. a. Paysage distant Ce projet de fin d’étude affirme un changement de statut évident au site. Ceci étant dit dès la première semaine, la réflexion menée était de savoir quelle nouvelle image allait renvoyer cet endroit aux yeux de la ville. L’idée étant d’offrir aux habitants un réel endroit capable d’assumer un rôle de partage, d’échange, de savoir et de calme. Au-delà d’un “simple équipement”, c’est une réelle place publique qui doit ici être offerte aux habitants. Elle ne s’affichera pas comme un concurrent aux petites places du centre-ville. Il s’agit plutôt d’être 63 -
Fig 41 Croquis au croisement de l’av. Poincaré à celle des Genets
Fig 42 Croquis depuis le château
- 64
III. « Organization of procession » a. Paysage distant
complémentaire. En acceptant de laisser de côté quelques temps les traditionnels plans et coupes, c’est la main et le croquis qui pris le pas sur le reste. Le projet étant un point d’aboutissement, le fait de l’imaginer par des points de vus au sein d’un parcours dans la ville concordait avec les démarches entreprises à 4. Ainsi, chaque emmarchement créé dans le projet amène à la plus haute place de Roquebrune qui s’installe au cœur du site et se signale aux yeux de tous.
« Prise de distance, multiplicité des points de vue, liberté de l’étendue, pluralité dans la composition d’un ensemble, telles seraient les quatre conditions constitutives d’un paysage architectural. »
Jacques Lucan, 1998, «L’invention du paysage architectural», Matières (2), pp21-31
Ce grand balcon sur la ville engendre une réciprocité évidente liée à l’enseignement : on habite le paysage en participant à celui-ci, et on l’habite car on le met en valeur, comme une mise en scène théâtrale. Cette métaphore du théâtre va jouer un rôle clé dans la nature et la position de la place dans le site. 65 -
Fig 43 Schéma d’implantation, La grande place s’inscrit dans un amphithéâtre territorial
Fig 44 Francesco Venezia, Roberto Collova, Marcella Aprile, 1986, théâtre en plein air, Salemi (Italie) ©Image prise d’internet
- 66
III. « Organization of procession » a. Paysage distant
En effet, j’accorde une importance particulière au terme théâtral car il évoque indirectement la notion de gradins. Et le premier gradin que l’on observe est à l’échelle du territoire. En prolongeant les logements existants d‘est en ouest par les maisons d’hôtes qui s’inscrivent dans la pente, la place se retrouve immédiatement en plein cœur du centre de gravité du site et de son contexte (fig 43). Elle comporte un théâtre en plein air qui suit la topographie, permettant de jouer des spectacles, ou simplement être une place ouverte à tous le long de l’année. Cette place surélevée 8 mètres au-dessus de la route (la route est le point 00.00 du projet, +250.00ngf) est donc un aboutissement d’un parcours piéton entamé depuis le chemin de Menton. Comme le disait Nietzche, « ce qui manque aux grandes villes sont des lieux de silence, spacieux et fort (…) où ne pénètre nulle rumeurs de voitures ni de crieurs”. Ce lieu que j’ai pu observer et étudier dans le cadre du mémoire à Bellinzona et le parc de son château se lient de ressemblance avec le
Friedrich Nietzsche, 1998, «L’architecture des contemplatifs», Le Gai Savoir, § 280. trad. Pierre Klossowski.
projet où le flux automobile est isolé pour prioriser le confort de l’Homme.
67 -
Fig 45 Richard Serra, 1970-1972, «Shift», King City ©Image prise d’internet Le paysage, ou l’ouvrage, ou la symbiose des deux ne peut ici être appréhender de manière centrale (occidentale peut-on dire). Ce centre devient un «moving center», et la perception du tout devient celle du «temps péripatéticien de la marche»*.
Fig 46 Photographies de maquettes d’études
Fig 47 Croquis perspective
- 68
III. « Organization of procession » a. Paysage proche
b. Paysage proche Pour relier le niveau bas au niveau haut du projet, une succession d’emmarchement prend place comme
évoqué
précédemment
et
offre
un
parcours ponctué de volumes aux géométries simples : une procession. Terme d’ailleurs que Philip Johnson emploiera en 1965 pour expliquer que la conception d’un espace et même la composition de la mise en place des volumes « sont auxiliaires à son objet principal : l’organisation de la procession» en prenant comme exemple phare la Glass House
Jacques Lucan, 1998, «L’invention du paysage architectural», Matières (2), pp21-31
réalisé en 1949. « Cette pluralité confirme la nécessité de la multiplicité des points de vue : toutes les entités architecturales ne peuvent pas être découvertes à un premier coup d’œil, mais bien plutôt successivement, à mesure du
*ibid
parcours ou de la marche, certaines apparaissant d’autres disparaissant, ce processus faisant ainsi intervenir un facteur temporel. » Cette idée de promenade pittoresque suit l’analyse précédente du centre moyenâgeux et permet de créer un véritable lien entre ce dernier et le projet.
69 -
Fig 48 Le socle Axonométrie
Fig 49 L’emmarchement Axonométrie
Fig 50 Les volumes Axonométrie
- 70
III. « Organization of procession » a. Paysage proche
Fig 49. L’emmarchement Le
premier
emmarchement
(+04.00
projet
+
254.00ngf) est contenu dans un espace restreint et devient le parvis de la bibliothèque qui s’intègre dans l’épaisseur de l’école primaire existante à l’est. La place s’ouvre sur la falaise. Le
second
emmarchement
(+06.00
projet
+
256.00ngf) est un jardin de transition composé d’un arbre évènement autour duquel on tourne et qui joue à travers le feuillage à cacher son arrière-plan constitué du théâtre et des montagnes. Le
troisième
emmarchement
(+08.00
projet
+258.00ngf) est la grande place du théâtre, en lien avec un bar/restaurant depuis lesquels on aperçoit le château qui émerge du centre-ville plus au sud. Le
quatrième
emmarchement
(+10.70
projet
+260.70ngf) constitue la place en haut des marches, qui filtre la relation avec la route et permet d’accéder au toit-terrasse de la bibliothèque.
71 -
Fig 51 Auguste Choisy, 1899, Histoire de l’architecture
Fig 52 2020, Trait d’union : Audelà des bains
Fig 53 Perspective
- 72
III. « Organization of procession » a. Paysage proche
La notion de mouvement entre chaque séquence rappelle le travail entamé durant le mémoire sur la promenade et fait également apparaitre la notion de géométrie angulaire. Géométrie qui s’adapte donc aux caractéristiques topographiques du site et renvoi aux travaux d’Auguste Choisy sur l’acropole d’Athènes et le pittoresque grec. Ce dernier a notamment suscité mon intérêt sur la perception du projet comme une suite de tableau. Ainsi, de la multiplicité des tableaux découle une multiplicité des points de vue, incluant la notion de mouvements et de déplacements dans l’espace.
Fig 54 Adolphe Appia Le plongeur ©Image prise d’internet
73 -
Roquebrune Cap-Martin est un rocher géant qui a les pieds dans la mer. Un rocher qui nous aura permis de proposer à chacun un projet de fin d’études en accord avec nos travaux respectifs entrepris plusieurs mois en amont. Ce territoire très riche a offert une possibilité d’un travail à plusieurs échelles qui nous étaient cher depuis le début. Il a fallu prendre de fortes décisions intimes et personnelles dès le départ dans le processus de conception afin de développer une pensée théorique solide en accord avec une pratique juste dans le but de faire sortir une réelle personnalité dans la démarche générale. La notion du parcours dans la ville a été un moteur global, et spécifiquement dans l’évolution de ce projet. Etant persuadé qu’il est aujourd’hui nécessaire de ré-apprendre les bienfaits des promenades et de leur cohérence dans la ville à l’heure où la «vitesse» prend le pas sur la plupart de nos actions, cette méthode s’est avérée vitale dans la conquête d’une plénitude au sein du projet. La (re)découverte des qualités des croquis fait main à également participé à rendre la démarche plus personnelle. - 74
Conclusion
Cette expérience du travail a 4 dans l’inscription territoriale a soulevé l’importance d’un site et de ses liens avec la ville (Géologie, Géographie, Géométrie). «L’aménagement de chaque lieu doit (...) être instruit par une connaissance large du site qui l’accueille et son projet doit travailler l’ensemble des données induites par tous les espaces mitoyens qui, par
Michel Corajoud, 2010, le paysage c’est l’endroit où le ciel et la terre se touchent
enchaînement, composent les divers horizons d’un site.» Je suis évidemment conscient des multitudes de notions susceptibles de faire leurs apparitions sur ce thème dans les divers étapes du projet jusqu’à sa finalité et des limites du travail dû aux aléas de ces temps étranges et au semestre qui ne contient qu’une demi-année de pratique. J’aspire ainsi à développer une pratique de l’architecture qui soit en lien avec la culture amassée ces 5 dernières années et celle que je serais tenu d’apprendre chaque jour au fur et à mesure du temps qui passera.
75 -
La bibliographie ici présente est une addition aux différents ouvrages cités au sein du mémoire «Trait d’union : au-delà des bains». Ouvrages et revues BLAIN Catherine, 2008, L’atelier de Montrouge, éditions Acte Sud, 310p CORAJOUD Michel, 2010, Le paysage c’est l’endroit où le ciel et la terre se touchent, éditions Acte Sud, 210p IGIER-PASSET Ines, PASSET Claude, 2005, Roquebrune Cap-Martin, édition le cherche-midi, 495p LUCAN Jacques, 1998, «L’invention du paysage architectural, ou la vision péripatéticienne de l’architecture», Matières (2), pp21-31 NIETZSCHE
Friedrich,
sd,
Architecture
des
contemplatifs, Le Gai Savoir, § 280. trad. Pierre Klossowski.
- 76
Bibliographie
Site internet Bibliothèque d’enseignement http://www.beaudouin-architectes.fr/category/ enseignement/ Conférence La villa E1027, restaurer en conservation. Avec François Goven, Élise Koering, Claudia Devaux. https://www.youtube.com/watch?v=2NU1SvCeuxI E1027, Eileen Gray’s House, Roquebrune-Cap-Martin 1926-1929 – TIM BENTON https://www.youtube.com/watch?v=KbLZZCyS2Xs
77 -
A-LTO / Architecture - Laboratoire des Territoires Ouverts - Domaine d’étude 1 - ENSAPVS a-lto, attaché à PALO, berceau de la Silicon Valley et partie prenante de la conte-culture qui aura été, sans nul doute, l’un des épicentres de l’onde de choc qui aujourd’hui encore marue notre quotidien a-lto, s’est écrit avec deux A et a engagé la modernité vers de nouvelles voies avec une attention accrue à la place de l’Homme, à la matérialité de l’architecture et de sa relation au paysage. a-lto, c’est vouloir, tout simplement se dépasser, aller plus haut. a-lto peut aussi être lu avec :
- A comme Architecture : il y a plusieurs façons
de penser et de mettre en œuvre l’architecture
- L comme Laboratoire : pour questionner -
expérimenter - classer - rendre compte
- T comme Territoires : pour convoquer tous
les champs concernés par l’acte architectural, transdisciplinarité
- O comme Ouvert : pour porter notre regard
toujours plus loin - 78
Enseignement
Orientations principales La nécessité du projet Le projet d’architecture est l’acte majeur par lequel l’architecte concourt à la civilisation. C’est une action de pensée de transformation du paysage et de sus usages, à partir d’un état du monde que le projet dresse et contribue à clarifier. Nous proposons d’aborder le projet architectural par la «progettazione» (mot italien sans réelle traduction française) comme mode opératoire et de pensée. C’est une pratique productrice de connaissance, s’appuyant à la fois sur des positions théoriques et des données empiriques qui, à leur tour, peuvent déboucher sur de nouvelles questions théoriques. La forme architecturale est ce par quoi l’architecte pense et agit. Le projet comme boîte à outils conceptuels Le «projet» dans la réalité et le «projet» dans une école d’architecture ne participent pas du même objectif : le premier vise notamment à construire un bâtiment, le second a pour finalité de permettre à l’étudiant de se construire. Ainsi, l’apprentissage du 79 -
projet se fonde dans un cadre fictif qui procède à des réductions du cadre réel (les contingences) pour faire émerger des notions essentielles. Ces notions son théoriques en ce qu’elles sont de l’ordre du général et ne procèdent pas de l’accumulation de singularités (un client, un budget, les réglementations, etc). Il s’agit de faire naître par l’abstraction conceptuelle et plastique une approche critique de «résistance» seule capable de fonder in fine le projet dans un contexte réel évoluant sans cesse. Résistance à l’aplatissement d’une culture devant la seule part marchande et médiatique de celle-ci, résistance au gaspillage énergétique des procédures normatives et à la gadgetisation de l’objet architectural. Ce processus d’affranchissement suppose le projet comme une totalité annonciatrice supérieure aux éléments qui le composent (le programme etc) et s’apparente ainsi à une démarche expérimentale où rien n’est connu a priori et où toute hypothèse doit en retour être validée. «Rien n’est à inventer, tout est à réinventer» (Luigi Snozzi). Cet enseignement prend acte du caractère indissociable devant unir la recherche et les pratiques professionnelles en direction desquelles il ouvre.
- 80
Enseignement
Les 5 Points du domaine d’étude :
1 - Cohérence et clarté
2 - Transformer
3 - Pratique théorique du projet
4 - Problématiques
5 - Recherche par le projet
81 -
Fig 55 Détail de la signalétique 1
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Annexes
Fig 56 Détail de la signalétique 2
83 -
Vittorio Gregotti, 1966, Le territoire de l’architecture
- 84
«Si l’architecture vit, nos paroles seront probablement toujours en retard par rapport à l’objet dont nous parlons.»
85 -