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Urban space is one of our personality foundation and the space's experience plays an essential role in the construction of our identity. The body, whether mere a presence, a movement, a moving or a itinerary, reflects an infinity of expressions of identities which contribute to urban poetry's creation. As an urban memory, the city is a individual and collective experiences container, an urban languages container. These languages are very personal, proper to a particular situation, a culture, to places and they define the urban poetry. People are involved in the urban poetry because of their spaces affective uses. By creating a relationship with a picked place, they transform it in an urban habited space, an urban identifying space, a poetic space.
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La relation de l’homme à son environnement et plus précisément à la ville, est au centre des préoccupations contemporaines. Il n’est que de citer les ouvrages de Pierre Sansot1, Henri Lefebvre2 et Raymond Ledrut3 pour comprendre à quel point la ville, considérée comme une «poétique» ou comme l’expression d’une dialectique économique et (ou) imaginaire, pose question, suscite des réflexions toujours actuelles car elles mettent en jeu la vie de l’homme dans son ensemble.
Source image // Stépnie JUNG - Berlin
1 SANSO Pierre, La poétique de la ville, Petite bibliothèque Payot, 1973. 2 LEFREBVRE Henri, Le droit à la ville, Economica, 1968. 3 LEDRUT Raymond, L’espace social de la ville, Edition Anthropos Paris, 1968.
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Introduction Le cadre bâti est un système complexe, amené à se transformer suite aux mutations comportementales, sociétales et culturelles. Il est composé de bâtiments publics et privés, d’espaces extérieurs et intérieurs, d’installations pérennes et éphémères. Le cadre bâti est conçu et construit par l’Homme. La « mutation » se définit à travers différents termes tels que le changement, la croissance, la conversion, la métamorphose ou bien encore le passage d’un état à un autre et le mouvement permanent. La mégalopole, appelée « Ville générique » par Rem Koolhaas4 , est une ville multiculturelle, en constante évolution et qui ne cesse de se transformer, tel un aéroport relié avec le monde. Elle est la juste représentation d’une mutation du cadre bâti et est un sujet d’étude riche et foisonnant auquel je me suis intéressée pour la composition de ce mémoire. Cette ville, que je nommerai « ville dense » est un lieu d’expression individuelle et collective. Les rapports qu’entretiennent les individus avec le milieu urbain et plus particulièrement la rue n’ont de cesse d’évoluer. La rue est le reflet d’identités multiples et l’homme s’y exprime de multiples manières afin de transmettre un message, une idée ou bien plus encore. Ces expressions forment et racontent ce que j’appellerai le langage urbain, la poésie urbaine. Dans ce mémoire, j’analyserai de quelles manières l’homme participe t-il à la poésie urbaine.
Source image // Jasper James - City Silhouettes
4 KOOLHAAS Rem et MAU Bruce, S M L X L, The Monacelli Pres, 1997.
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9,7 m 2050
7m 2012
2030
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Mégalopoles 2012
30
Mégalopoles 1995
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Mégalopoles
Dans une ville dense, on peut observer de nombreuses mutations: elle se densifie, s’étale, prend de la hauteur, change d’architecture et d’identité.
LA VILLE MUTE
Source image // Darwinfish - Tokyo
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Qu’est-ce que l’identité ? Introduction
L’identité est le caractère permanent et fondamental de quelqu’un, d’un groupe, qui en fait son individualité et sa singularité. C’est un ensemble de données, de faits et de droits qui permettent d’individualiser une personne. Le principe d’identité affirme qu’une chose, une personne est entièrement et exclusivement égale à ellemême (« A = A »)6. Selon Renaud Sainsaulieu7, l’identité est issue d’un processus de production à la fois collectif et individuel. Ces deux typologies interviennent en même temps mais jouent des rôles différents dans cette même construction. Il me sera donc primordial d’étudier distinctement les identités individuelles et les identités collectives. En effet, nous avons tous une manière distincte et personnelle de définir et de construire notre identité. Pour certains, l’identité et le rapport à soi s’élaborent dans la logique collective de l’appartenance à un groupe ou un sous-groupe, où ils sont identifiés comme membres à part entière. Pour d’autres, ce processus de construction est issu de la dimension individuelle où le sentiment d’identité est basé sur la perception de la similitude avec soi-même et la certitude de la continuité de soi dans le temps. C’est être un et le même à travers le temps, l’être en soi, pour soi et pour autrui8. L’identité dépend de l’équilibre permanent entre le « je » (l’être privé) et le « nous » (l’être collectif). L’excès de socialisation (de « nous ») ou le repli sur la sphère privé (le « je ») menacerait cet équilibre identitaire. Il y a dans la conception identitaire une dualité entre l’identité personnelle et l’identité sociale, deux notions importantes qu’il me faudra analyser. S’identifier revient donc à se différencier des autres tout en affirmant son appartenance à des catégories, des groupes, mais aussi des espaces. Nous pouvons observer dans la ville et sous différentes formes, cette action d’identification (vêtements, art de la rue, manifestations, tags, etc.). Cela me donne à croire que la rue est un lieu de mise en scène où les individus s’expriment à travers des attitudes et des comportements choisis et exprimés telle une improvisation théâtrale ou bien encore une chorégraphie urbaine bien orchestrée. De ce point de vue la rue est donc plus qu’une voie de circulation routière aménagée à l’intérieur d’une agglomération, habituellement formée 12
de maisons, d’immeubles et de propriétés closes9. Au contraire la rue devient alors lieu de vie, d’action et d’improvisation, espace de représentation et de mise en scène, elle a une histoire, une poésie à nous conter. Afin d’aborder la poésie urbaine, il m’est primordial d’étudier la multitude d’identités qui habitent l’espace urbain. Pour cela j’ai choisi de travailler dans un ordre croissant et de commencer mon analyse par l’identité personnelle puis par l’identité sociale, culturelle et pour finir par l’identité dans la ville, l’identité urbaine. « Pour être confirmé dans mon identité, je dépends entièrement des autres. » Hannah Arendt
6 LE PETIT LAROUSSE ILLUSTRÉ 2012, Larousse, 2012. 7 SAINSAULIEU Renaud, L’identité au travail, Les effets culturels de l’organisation, Paris, Presses de Sciences Po, 1988. 8 DURKHEIM Émile, La division du travail social, Edition Puf, 1893. 9 LE PETIT LAROUSSE ILLUSTRÉ 2012, Larousse, 2012.
l’identité
Le caractère de ce qui demeure identique à soi-même
«Je est un autre.» Arthur Rimbaud
l’altérité
Le caractère de ce qui est autre.
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Identité personnelle, sociale et culturelle L’identité personnelle s’institue comme valeur et par des valeurs. Par l’action et l’œuvre, l’individu se valorise aux yeux de tous, tant il est vrai qu’il a besoin d’être reconnu, aimé, admiré et accepté par l’autre pour confirmer ses propres pouvoirs10. L’élaboration de l’identité individuelle résulte d’un besoin psychique d’existence et de reconnaissance en tant qu’être singulier mais identique, dans sa réalité physique, psychique et sociale. L’identité individuelle est donc indéniablement liée à l’identité sociale, qui est un processus d’attribution, d’intervention et de positionnement dans l’environnement. Elle s’exprime à travers la participation à un ou des groupes, à une ou des institutions. Les identités sociales sont de multiples appartenances ; politiques, religieuses, familiales, amicales… Elles se structurent par des références identificatoires liées aux expériences partagées avec d’autres acteurs et sont principalement observables dans des lieux publics tels que l’espace urbain. Selon Edward T.Hall, L’homme tend à identifier sa propre image avec celle de l’espace qu’il habite11. L’identité apparaît ainsi comme le résultat à la fois stable et provisoire, individuel et collectif, subjectif et objectif, biographique et structurel des divers processus de socialisation qui, conjointement, construisent les individus et définissent les institutions12. Sans processus et moyens identificatoires, l’individu ne se sentirait alors peut-être pas exister. Il y a ici un lien indissociable entre les notions d’identité et d’existence ; exister qui signifie être dans la réalité, se trouver quelque part, être dans le temps ou dans l’espace, avoir une réalité. Il apparaît donc que les individus ont un besoin presque vital de s’identifier aux autres afin de se sentir vivre, d’avoir un rôle, de l’importance dans la société à travers un espace, l’espace urbain. C’est pourquoi il m’a parut intéressant en tant que designer d’espace de réaliser une étude sur l’identité et la poésie urbaine qui en résulte.
10 TAP Pierre, L’individu, Le groupe, La société, 1998. 11 T.HALL Edward, La dimension cachée, p.219, 1978. 12 DUBAR Claude, La socialisation, Construction des identités sociales et professionnelles, Paris, Armand Colin, Collection U, 1991.
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Le besoin de s’identifier peut se retranscrire sous différentes formes et est facilement observable dans la rue. Patronyme, style vestimentaire, attitude et langage sont des exemples de formes d’identifications personnelles qui définissent chaque individu et qui différencient une personne d’une autre.
Source image // Ron Gessel - America today
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Source image // Jean Luc ArtigaudManifestations anti ACTA
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Source image //Manifestation Anti mariage Gay - 2012
Source image // D.Pezera - Manifestation FEMEN - 2011
L’espace urbain est la scène de la vie quotidienne qui définit la communauté des citadins, c’est un territoire de vie et d’identité. Lieu public par excellence, la rue me semble être l’espace idéal d’expression individuelle et collective. Les processus individuels et collectifs d’identification se combinent dans la production de significations et de signifiants associés à l’espace ici la ville, et plus précisément la rue. La rue est composée de plusieurs identités ; des identités individuelles, collectives et culturelles, qui, projetées en elle, donnent une signification aux lieux, créent une identité urbaine. Les identités personnelles, sociales et culturelles sont généralement retranscrites dans un contexte spatial spécifique. Je nommerai cette action de « processus identificatoire ». Ce processus participe à l’élaboration de l’identité urbaine et donc de la poésie urbaine, c’est pourquoi j’ai décidé d’en faire l’analyse.
La rue est également un espace d’expression identitaire sociale et culturelle, montrant à voir les appartenances parfois politiques, religieuses, familiales ou amicales des individus.
Processus d’identification à la ville Il existe deux formes identitaires majeures pouvant être dégagées des processus d’identification à la ville. Elles concernent un nombre illimité d’individus et de groupes qui la pratiquent13. Il y a dans un premier temps des formes d’identités définies par des groupes constitués à partir d’une appartenance de fait à la ville ou à une portion de la ville : associations de riverains, de voisins, associations de défense du patrimoine… Dans un second temps il y a des identités constituées par l’existence de collectifs regroupés autour d’autres éléments comme les communautés de valeurs, de pratiques et de provenances qui s’inscrivent dans la ville et sont susceptibles de s’approprier des éléments urbains dans lesquels ils se reconnaissent. Ces éléments sont des signifiants identitaires pouvant être des lieux, des emblèmes ou des pratiques spatiales spécifiques comme par exemple des rassemblements ou des manifestations. Ils peuvent également être une structuration symbolique de
13 VESCHAMBRE Vincent et Ripoll, Le processus de patrimonialisation : revalorisation, appropriation et marquage de l’espace, 2006
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l’espace physique qui conditionne les différentes pratiques urbaines et processus d’identification. La capacité d’appropriation de la ville à travers le processus identificatoire ne repose pas dans ces deux cas sur les lieux en tant que tels, tant varient les échelles d’identifications (rue, place, quartier, ou territoire). Cette appropriation est en effet bien plus déterminée par l’aptitude de ces structurations symboliques à rendre visibles les singularités identitaires personnelles et collectives. La ville peut donc être perçue comme un ensemble de pratiques territorialisées, promues volontairement au rang d’emblèmes signalant aux autres des singularités positives, sources de fierté pour les gens du lieu14. Elle peut également être envisagée comme un espace vécu, perçu et pratiqué, où les manifestations identitaires seraient comme un ensemble d’habitudes singulières, qui affleurent à peine à la conscience et ne faisant l’objet d’aucune revendication. C’est la manière d’être ce que l’on est là où on est, la manifestation d’une présence, de l’occupation d’un lieu. Il s’agit là de cultures vécues au quotidien, de codes sous-jacents, qui se déchiffrent plutôt qu’ils ne s’affichent. Ces codes sont une partie de la réponse à ma problématique ; c’est à travers eux et des habitudes singulières que l’homme participe à la poésie urbaine. En somme, l’identité dans la ville serait le processus sans cesse renouvelé de la construction d’un lien intime entre l’individu, le collectif et l’environnement urbain, par les usages et pratiques du quotidien, les perceptions et les jeux de projection dans l’espace. Cette approche rend compte des différentes échelles d’appropriation et d’identification aux espaces dans la ville, comme le définit Abraham Moles15 à travers les différentes « coquilles de l’homme », et s’intéresse à une identité en actes et en pratiques. Moles ouvre son énoncé par l’exposé de deux attitudes philosophiques distinctes, conduisant à formuler deux psychologies de l’espace différentes, apparemment contradictoires et pourtant toutes deux essentielles. La première attitude correspond à une philosophie cartésienne (Je pense, donc je suis16) de l’espace comme étendue ; Elle adopte le point de vue d’un observateur extérieur qui n’habite pas cet espace et qui examine de manière rationnelle un monde étendu et illimité dans lequel tous les points s’avèrent équivalents, car aucun n’est privilégié. L’espace se réduit alors à une configuration géométrique, caractérisée par un système de coordonnées purement arbitraire. Dans ce premier cas de figure, 18
l’individu ferait partie d’une chorégraphie urbaine parfaitement orchestrée, composée de gestes devenus rituels, presque mécaniques et faisant principalement référence à une utilisation pratique de l’espace - par opposition à un support d’expression. L’individu n’a pas ici conscience de participer à l’identité du lieu, ce n’est pas son intention première, mais il donne à travers ses actions une fonction aux lieux, donc une identité à l’espace pratiqué. Une seconde attitude qui est appelée philosophie de la centralité par Abraham Moles correspond au point de vue «Ici et Maintenant» de l’individu en situation, qui éprouve son propre rapport à l’environnement. Dans cette perspective, l’être s’éprouve comme le centre du monde et celui-ci s’étend autour de lui. Le rapport entre l’individu et l’espace, la rue, devient alors identitaire. Je retiens de cette présentation que l’individu est partagé entre deux systèmes de pensées contradictoires. D’un côté l’individu sait raisonner de façon rationnelle, il s’oriente, calcule des distances, élabore des trajets. De l’autre, il investit l’espace d’une affectivité égocentrique, lui conférant des propriétés anisotropiques*. Cela me laisse penser qu’il y a plusieurs identités urbaines racontant chacune une histoire et une poésie urbaine différente. Le processus identitaire urbain s’orchestre donc de diverses manières. Consciemment ou non, les actions opérées dans l’espace urbain participent à l’élaboration de l’identité urbaine.
« Une grande partie de la réussite architecturale de Franck Lloyd Wright tient au fait qu’il a reconnu la diversité qui caractérise les individus dans leur expérience de l’espace » Edward T.Hall, La dimension cachée. 14 BRONBERGER Christian et MEYER Mireille, Cultures régionales. Singularités et revendications, Ethnologie française, 2003. 15 MOLES Abraham, Les coquilles de l’homme, Revue SADG Architecture, n° 165, juin 1968. 16 LE PETIT LAROUSSE ILLUSTRÉ 2012, Larousse, 2012. * Anisotropique, se dit des substances dont les propriétés physique varient en fonction de la direction.
Le samedi 4 avril 2009, 1600 pandas ont investi la Place Royale de Nantes. Tout au long de la journée, les nantais ont pu admirer et s’interroger face à l’écrasante vérité que dénoncent ces vaillants et chaleureux petits pandas en papier mâché. En effet, il ne restait ce jour là que 1600 représentants de l’espèce. Inconsciemment ou non, l’association OWF à participé à l’identité Nataise durant une cette journée, changeant la vision habituelle de la Place Royal. Source image // Stephan J - Nantes
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Source image // Panos Pictures - Metropolis
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L’identité urbaine La mosaïque sociale et culturelle que constitue la ville d’hier et d’aujourd’hui est une juxtaposition ou association de la différence. La ville révèle et rend visible des formes inédites d’existences et ce faisant, donc d’expressions et de mises en valeur culturelle. Que ce soit pour se singulariser, être visible ou pour revendiquer son appartenance à un groupe politique ou autre, la ville est traversée par une grande diversité de formes d’expressions identitaires formant l’identité urbaine. Affichées et revendiquées, elles contribuent à marquer et à transformer les espaces urbains, la rue17. Ces expressions traduisent le jeu identitaire complexe auquel se prêtent les individus, utilisant la ville comme décor et comme ressource pour l’action, comme moyen de médiation, comme moyen d’exister. Bernard Lamizet18 parle de la médiation pratique de la ville comme ce qui « va scander l’espace urbain de la temporalité des usages et des parcours de ses habitants. Par elle, la ville cesse de n’être qu’un site pour devenir pleinement un espace de culture et de sociabilité : une médiation entre la dimension collective de cet espace et la dimension singulière de son appropriation par les habitants qui lui donnent, ainsi, sens et signification ». Cette citation me conforte dans l’idée que la rue donne à raconter une histoire que les individus vivent et construisent. La rue est donc un moyen de communication composé d’une multitude de supports d’expressions. La co-construction collective de l’identité de la ville s’élabore donc par l’ensemble des pratiques des lieux. Hétérogènes et multiples, ces pratiques intègrent les valeurs assignées à la mobilité et aux lieux géographiques, aux technologies d’habiter et d’habitat, à la représentation, la conception des espaces, à la qualité des lieux et aux agencements spatiaux. La ville est à la fois le cadre des actions quotidiennes et le produit des usages des habitants. Elle est un espace habité ; un espace qui est investi émotionnellement19. La thématique de l’habiter définie par Mathis Stock20 est un « ensemble de pratiques associées à des lieux ». Pratiquer les lieux c’est donc en faire l’expérience, c’est déployer, en actes, un faire qui a une certaine signification. L’identité urbaine est multiscalaire, contextuelle, et se matérialise dans l’interaction entre individus et sociétés, dans les rapports qu’ont ces individus à l’espace urbain.
La réception du message identitaire urbain se fait donc de différentes manières et il me faudra les étudier afin de définir les moyens que mettent en œuvre les individus dans l’élaboration de la poésie urbaine. J’analyserai d’abord la matérialisation de l’identité à travers le langage puis à travers la pratique que l’on fait des lieux, ce qui me permettra de déterminer par la suite la signification des espaces identitaires.
17 VAN DEN AVENNE Cécile, DORIER APPRILL Elisabeth, GERVAIS-LAMBONY Philippe, Parler, Vies citadines, Paris et Belin, 2007. 18 LAMIZET Bernard, Penser la médiation, L’Harmattan Communication, 2008 19 BOLLNOW Otto, Mensch und Raum, Alber-Broschur Philosophie, 1963. 20 STOCK Mathis, L’habiter comme pratique des lieux géographiques, www.espacestemps.net, 2004.
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LE LANGAGE HUMAIN, LE LANGAGE ARTICULÉ, LE LANGAGE
Matérialisation du message identitaire Le langage urbain
DE
LA
PA R O L E ,
LANGAGE
I N T É R I E U R,
LANGAGE
NATUREL,
L A N G A G E É C R I T, L A N G A G , PA R L É , L A N G A G E D O C U M E N T A I R E , LANGAGE FORMEL, LANGAGE LOGIQUE, LANGAGE FORMALISÉ,
L’identité urbaine se matérialise par l’expérience qu’entretiennent les individus avec les espaces qui constituent la ville, par exemple les places publiques, les avenues, les rues et ruelles, les jardins publics et autres. La ville est comme un réceptacle identitaire où les individus s’expriment et se mettent en scène grâce à ce que je nomme le « langage urbain ».
LANGAGE ARTIFICIEL, LANGAGE DE PROGRAMMATION, LANGAGE SYMBOLIQUE, LANGAGE MACHINE, LANGAGE CHIFFRÉ, LANGAGE CODÉ, LANGAGE GESTUEL, LANGAGE DE MIMIQUE, LANGAGE D E S F L E U R S, D E S PA R F U M S, L A N G A G E PA R S I G N A U X , L A N G A G E
Le langage est la capacité, observée chez l’humain, à exprimer ses pensées et à communiquer au moyen d’un système de signes vocaux et éventuellement graphique. C’est également un système structuré de signes non verbaux remplissant une fonction de communication21. Le langage urbain est donc l’ensemble des expressions urbaines qu’utilisent les individus afin de transmettre un message et de retranscrire, d’affirmer leur identité à travers l’espace urbain. Chaque expression raconte une histoire, une idée, un point de vue ou bien encore une action passée. C’est la poésie urbaine ; l’art d’évoquer et de suggérer les sensations, les impressions et les émotions les plus vives de la rue par l’union intense des sons, des rythmes, des harmonies, des couleurs et des odeurs.
A U D I T I F, L A N G A G E V I S U E L , L A N G A G E A N I M A L , L A N G A G E F A M I L I E R ,
Il y a plusieurs types de langages, correspondant à différentes cultures, lieux et moments ainsi qu’à diverses personnes et relations. À chaque individu son langage, à chaque situation et à chaque lieu son expression. La ville regorge d’innombrables signes, valsants et tournoyants à chaque angle de rues, tel un ballet de Pina Bausch22, formant ainsi la poétique urbaine. Chacun participe à cette poésie avec son propre langage et à travers une pratique du lieu d’expression qui lui est singulière.
LANGAGE DE LA CONVERSATION, LANGAGE DES MARCHANDS,
LANGAGE
ACADÉMIQUE,
LANGAGE
AMPOULÉ,
LANGAGE
A R C H A Ï Q U E , L A N G A G E C L A I R , L A N G A G E E X P R E S S I F, L A N G A G E FIGURÉ, LANGAGE MÉTAPHORIQUE, LANGAGE POMPEUX, LANGAGE SIMPLE,
LANGAGE
CHOISI,
LANGAGE
SOUTENU,
LE
C O U R A N T,
BEAU
LANGAGE,
LANGAGE
NOBLE,
LANGAGE LANGAGE
ORDINAIRE, LANGAGE VULGAIRE, LANGAGE ARGOTIQUE, LANGAGE POPULAIRE,
LANGAGE
P O I S S A R D,
LANGAGE
DIPLOMATIQUE
,
LANGAGE DU PEUPLE, LANGAGE DES COULISSES, LANGAGE DE L A R U E, L A N G A G E FA U B O U R I E N, L A N G A G E C O M M U N, L A N G A G E LITTÉRAIRE, LANGAGE
LANGAGE JURIDIQUE,
POÉTIQUE, LANGAGE
LANGAGE
A D M I N I S T R A T I F,
PHILOSOPHIQUE,
LANGAGE
T E C H N I Q U E , L A N G A G E D U D R O I T , L A N G A G E D E L’ É C O N O M I E , LANGAGE DES SCIENCES, LANGAGE CHROMATIQUE, LANGAGE 21 LE PETIT LAROUSSE ILLUSTRÉ 2012, Larousse, 2012. 22 BAUSCH Pina est une chorégraphe et danseuse allemande. Décédée en 2005, elle était la fondatrice de la compagnie Tanztheater Wuppertal et était considérée comme l’une des principales figures de la danse contemporaine et initiatrice du style danse-théâtre.
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MUSICAL, LANGAGE HARMONIQUE, LANGAGE AMBIGU, LANGAGE C R U , L A N G A G E C Y N I Q U E , L A N G A G E D I R E C T, L A N G A G E D R O I T, L A N G A G E F R A N C, L A N G A G E G R O S S I E R, L A N G A G E H Y P O C R I T E, LANGAGE
M E N S O N G E R,
LANGAGE
ORGUEILLEUX,
LANGAGE
Source image // Panos Pictures - Metropolis
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Source image // Alice Le Pottier - PĂŠniche Nantes Un homme a investi la rue avec des plantes.
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La pratique du lieu Nous pratiquons la rue à notre « langage » (manière) et à travers ceux des individus qui expérimentent, eux aussi, l’espace urbain. Selon le géographe Yi-Fu Tuan23, l’expérience spatiale comprend trois moments principaux : la sensation, la perception et la conception. Ces moments oscillent entre l’émotion et la pensée de l’individu et ont comme médiation le corps, l’objet, le mouvement et le temps. L’expérience de l’espace comprend les sensations (les odeurs, les textures et les sons), la perception visuelle par rapport aux objets et aux mouvements du corps dans l’espace (dedans, dehors, grand, petit, étroit, clair, obscur, proche et lointain) et la conception ; qui d’une certaine manière organise une représentation de l’espace par l’appréhension mentale24. Ces trois moments qui composent l’expérience spatiale participent à la poésie urbaine car liés à la pratique que nous faisons de l’espace. Le contexte de découverte de l’expression « pratiques des lieux » a émergé à partir de deux sources majeures. D’abord, Michel de Certeau25 en 1990 qui appelle « pratique du lieu » le fait de déployer les pratiques pour que le lieu devienne espace. La seconde source réside dans les questionnements de Bono Werlen26 en 1996 concernant une « pratique de l’ancrage dans le monde avec laquelle les sujets […] se mettent en rapport avec le monde ». Selon Michel de Certeau, le lieu devient espace lorsqu’on appréhende dans leurs dimensions temporelles et spatiales les pratiques qui s’y déroulent. J’appellerai cette pratique de l’espace, l’ « habiter ». Cela signifie qu’un espace identitaire est un espace habité par ses utilisateurs. Les termes « habiter » et « habitat » sont d’un usage commun en géographie. Par « habiter », on désigne le fait « d’avoir son domicile en un lieu »27. Par « habitat », on désigne le lieu où l’on s’est établi, où l’on vit et où l’on est habituellement. Plus classiquement encore, l’habitat se définit par l’ensemble des habitations, dans lequel on distingue l’habitat urbain et l’habitat rural. Dans les études contemporaines de géographie et de sociologie urbaine, habiter signifie « occuper un logement » ou « résider »28. Par conséquent, les « habitants » sont ceux qui résident dans un lieu donné. L’ensemble des pratiques qu’un individu associe à des lieux définit un mode d’habiter. Les êtres humains n’habitent pas seulement un lieu de domicile, ou plus précisément n’habitent pas seulement lorsqu’ils résident ; n’importe quelle pratique des
lieux contribue à les habiter29. Qu’il s’agisse des pratiques touristiques qui associent des lieux du hors quotidien, à des pratiques de recréation, des pratiques de loisir ou bien encore de travail, toutes impliquent pour les personnes « l’habiter » ; une forme d’appropriation de l’espace urbain. On peut ainsi penser que l’ensemble des pratiques, loin d’être liées à un lieu unique, s’associe simplement à plusieurs lieux : on peut l’interpréter comme le prolongement fonctionnel du ou des lieux de résidence. Les espaces identitaires urbains deviennent alors une extension de la sphère privée, représentante de l’identité individuelle. L’ensemble des pratiques des espaces participe donc à « l’habiter », ainsi, cette signification des lieux ne se réduit pas, pour un seul individu et à un seul endroit. Les individus pratiquent une multiplicité de lieux avec lesquels ils construisent une relation touchant parfois à l’affectivité. L’habiter, en tant qu’ensemble des expériences spatiales, implique que les espaces ainsi pratiqués aient un certain sens pour les hommes. Ici réside la différence fondamentale avec la définition pauvre du terme « pratique » en tant que simple « fréquentation » des lieux ainsi qu’avec les termes « comportement » et « action ».
23 TUAN Yi-Fu, La perspective de l’expérience, Editions Transcript Verlag, 1977. 24 LEITE Julieta, La ville incalculable, www.trapèze.com. 25 DE CERTEAU Michel, L’invention du quotidien, 1. Arts de faire et 2. Habiter, cuisiner, Gallimard, 1990. 26 WERLEN Benno, Geographie globalisierter Lebenswelten, Österreichische Zeitschrift für Soziologie, vol. 21, n°2, 1996. 27 THÉRY Hervé et BRUNET Roger, Habiter, p. 250, 1993. 28 LELIÈVRE Éva et LÉVY-VROELAND Claire, La ville en mouvement, habitat, habitants, Paris, 1992. 29 KANFOU Rémy, Atlas de France Touristique et Loisirs, Éditions Documentation Française, collection Atlas de France, 1997.
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Les pratiques d’appropriation révèlent combien l’espace urbain est investi physiquement et émotionnellement par les individus qui l’expérimentent. Dans le contexte spécifique de la ville, ces pratiques d’appropriation peuvent être matérialisées par des événements (grèves et manifestations, défilés, happenings), des usages et des expressions spécifiques dans l’espace urbain plus ou moins réguliers, éphémères, saisonniers ou quotidiens (militants, artistiques ou mêlant les registres d’action : squat, graffiti, skateboard, hiphop, etc.). Ils témoignent de différents modes et niveaux d’appropriation et de marquage, selon qu’ils soient réprimés, tolérés, ou élevés au rang de ce qui est souvent désigné comme des « cultures urbaines ». Dans ce cas, ils n’apparaissent plus comme de seules expressions d’identités en ville, mais tendent à être mobilisés pour participer à la production de l’identité urbaine par les institutions30. Pratiquer les lieux, c’est en faire l’expérience, c’est déployer, en actes, un faire qui a une certaine signification. C’est l’étude des manières de pratiquer les lieux géographiques qui semble être porteuse de l’intelligibilité de la spatialité des individus31. Il semblerait donc que plus l’intelligibilité spatiale d’un lieux est forte et plus il en devient un espace habité et donc identitaire. Les espaces urbains n’ont alors pas tous la même capacité d’appropriation et certain seront plus identitaire que d’autres. L’espace urbain, nous l’avons dit précédemment, est fondateur de la personnalité et l’expérience spatiale joue un rôle capital dans le fondement de notre identité. En effet, une appréhension positive de l’espace favorisera son intelligibilité tandis qu’un espace à l’orientation et l’appréhension difficile perdra sa capacité à être habité. L’expérience que nous vivons avec la rue joue un rôle capital car c’est à travers elle que se fonde la connaissance même que nous avons de notre subjectivité et de notre identité. Les individus participent au langage urbain, à la poésie urbaine, grâce à des pratiques spatiales affectives. En créant un lien affectif avec un lieu choisi, ils le transforment en un espace urbain habité, un espace identitaire. Source image // Alice Le Pottier - Pont des Arts, PAris Dans une ville dense et en pleine mutation, les espaces urbains habitables sont nombreux, différents et changeants. Les individus peuvent donc s’identifier en de nombreux endroits et lieux géographiques, pouvant chacun vivre une expérience spatiale très différente et donnant ainsi à la ville une grande pluralité d’identités et 30 VESCHAMBRE Vincent et Ripoll, Le processus de patrimonialisation : revalorisation, appropriation d’histoires urbaines. et marquage de l’espace, 2006. 31 STOCK Mathis, L’habiter comme pratique des lieux géographiques, 2004.
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Les lieux géographiques, différents selon leur qualité et/ou leur identité, constituent le focus de mon investigation, non pas en tant que milieu, mais en tant que contexte des pratiques et référent des symbolisations humaines. La « géographicité »32 est le rapport qu’ont les êtres humains avec les lieux et les espaces géographiques. La forte mobilité géographique des villes en mutations a pour conséquence la pratique d’un grand nombre de lieux, tous susceptibles de constituer un référent géographique et identitaire pour les individus. Cette mobilité accrue fait advenir une « société à individus mobiles »33 et procède à une recomposition des pratiques et des valeurs assignées aux lieux géographiques. Une recomposition qui touche notamment le rapport entre identité/altérité, familiarité/étrangeté exprimé par les lieux. Cette mobilité accrue permet aux individus d’appréhender de nombreuses zones urbaines et donc d’habiter plusieurs parties d’une ville, plusieurs espaces urbains. Le lien intime à la ville, tissé de sensible, d’émotions, d’expérience et de pratiques, se construit par les parcours des individus dans la ville et s’exprime par le corps et les symboles l’imprégnant. Qu’il soit simple présence, mouvement, déplacement ou itinéraire, le corps dans la ville reflète une infinité d’expressions identitaires. Les expressions individuelles et sociales contribuent à identifier la ville, qui est alors un support rendant possible et stimulant l’expression, une source d’inspiration et de création et, parfois, de conflit. L’espace public urbain est un lieu privilégié pour observer le mouvement des corps, qui expriment des rapports intimes entre l’individu et le lieu. Les pas des touristes, des passants et des flâneurs, tout comme les pratiques ludiques ou artistiques en ville, désignent comme des formes de l’expérience physique urbaine, « pratique quotidienne, esthétique ou artistique »34 rythment la ville et « donnent à voir l’espace public différemment, tant d’un point de vue matériel qu’idéel »35. La ville peut ainsi être comparée à une mémoire urbaine du corps, mode singulier d’enregistrement de son expérience. On peut trouver dans une même ville de nombreuses significations et symboles identitaires. D’une rue à l’autre, d’un quartier à un autre la rue ne donnera pas à voir les mêmes identités, ne donnant pas à voir la même histoire et enrichissant le langage urbain, la poésie urbaine.
Il résulte de cette analyse que les individus participent à la poésie urbaine
grâce à des pratiques spatiales affectives. En créant un lien avec un lieu choisi, ils le transforment en un espace urbain habité, un espace identitaire. Nous avons remarqué que suite à la forte mobilité des individus dans les villes, les espaces urbains ont des significations identitaires sensibles et parfois très différentes. Quelles sont ces significations et identités des lieux ainsi pratiqués ? Et quels sont les espaces choisis et investis comme référents identitaires ? Afin de répondre à ces questionnements, je m’intéresserai d’abord à la sémiotique de l’espace urbain et à la signification des lieux déterminés par des fonctions sociétales retranscrites en fonctions urbaines. Cela me permettra d’associer un type de pratique urbaine à un type d’espace urbain. Je pourrai ainsi définir les composants de la poésie urbaine.
Source image // PPAG architekten enzi
32 DARDEL Éric, L’Homme et la Terre : nature de la réalité géographique, Editions du CTHS, 1990 (édition originale de 1952). 33 STOCK Mathis, Les sociétés à individus mobiles : vers un nouveau mode d’habiter, 2001. 34 JEUDY Henri-Pierre et BERENSTEIN-JACQUES Paola, Corps et décors urbains, Edition l’Harmattan, Paris, 2006 35 MIAUX Sylvie, Le libre mouvement des corps, 2009
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Signification des espaces urbains Une approche sémiotique de l’espace de la ville pense un espace urbain structuré par des signes. Zone de la rencontre et de l’échange, la ville est composée de lieux de communication qui articulent l’identité qu’ils expriment et les langages qui y sont mis en œuvre par les acteurs de la communication et de la signification36. La rue communique, elle raconte une histoire passée, elle rappelle des anciens modes de vies, certains styles architecturaux et différents actes de la vie urbaine. Dans la ville, se mêlent des appartenances à des groupes, des sociabilités et des cultures ; des identités. Le langage urbain est semblable à une polyphonie ; une forme sémiotique de communication inscrivant les formes d’expression et les dynamiques de la signification et de l’interprétation dans des lieux de communication. Ces lieux articulent l’identité des acteurs et leurs langages dans la géographie politique de l’espace public. Pour reprendre les travaux de Mikhaïl Bakhtine37, un espace polyphonique est un espace qui met en scène ensemble plusieurs langages, plusieurs codes distincts et plusieurs systèmes symboliques d’expression et de représentation. La polyphonie met donc en œuvre des langages et des formes multiples d’expression et de signification. L’espace urbain met en scène des langues, des langages et des cultures très différentes qui se rencontrent au cours de l’histoire d’une ville. C’est ainsi par exemple, qu’une ville comme Marseille a vu se succéder et se rencontrer la culture grecque, la culture française, des cultures orientales, la culture italienne, et d’autres identités qui ont pu inscrire leurs traces, leurs représentations et leurs significations dans l’espace de la ville. Une telle succession de cultures s’exprime, en particulier, par les noms de lieux et de rues (le Pharo, emplacement d’une tour grecque, la Canebière, trace du travail du chanvre) et par les objets du patrimoine (le quartier de la Bourse révèle une partie des vestiges de la cité grecque). Enfin, la polyphonie urbaine désigne une sémiotique de la communication qui articule les formes de l’expression et les dynamiques de la signification et de l’interprétation. L’espace urbain est un lieu dans lequel se lisent et se déchiffrent les signes de la culture et de la sociabilité38. Les pratiques sociales ne se donnent pas seulement à voir, mais se donnent aussi à lire ; en effet, afin de découvrir comment les 28
individus participent à la poésie urbaine, je ne dois donc pas seulement m’intéresser aux pratiques que les habitants et visiteurs font de la ville. Il me faudra comprendre et interpréter ces expérimentations urbaines sociales porteuses de significations. L’espace public que les Grecs appelaient l’agora, représenté par le lieu du théâtre, est l’endroit où se produit la rencontre avec les autres. C’est pourquoi il est l’essentiel lieu de la sociabilité et de l’identité. Au delà d’être un espace de sociabilité, la ville est aussi un espace conflictuel. Elle laisse apparaître au grand jour les désaccords institutionnels et politiques, les conflits d’acteurs, de personnes, d’idées et de représentations. L’agora est le lieu où les conflits qui sont l’essence de la sociabilité parviennent à la connaissance de tous pour être mis en scène aux yeux de chacun. C’est parce qu’elle est un lieu de conflits que la ville est un lieu de langages et de représentations, un espace de pratiques identitaires et symboliques.39 Vivre la ville c’est vivre dans l’espace public, la rue, un espace qui est à la fois chez tout le monde et chez personne. Les appartenances et les pratiques y sont donc symboliques. Dans la ville, les liens entre les habitants, qui structurent la sociabilité et la citoyenneté, sont inscrits dans des relations symboliques et dans la mise en œuvre de langages et de représentations qui donnent naissance à une culture et à une dimension de la ville elle aussi symbolique. L’espace public est un lieu de visibilité, de communication, d’échange de signes, de circulation des identités et d’informations. Habiter et pratiquer la ville, c’est s’inscrire dans des relations de médiation et de représentation. C’est s’ouvrir aux autres individus et à la société grâce au langage urbain.
36 LAMIZET Bernard, Le sens de la ville, L’Harmattan Communication, 2002. 37 BAKHTINE Mikhaïl et KRISTEVA J, Le mot, le dialogue et le roman, p. 143-173, 1969. 38 PAQUOT Thierry, Homo urbanus, 1990. 39 BAUTÈS Nicolas et GUIU Clair, Cheminement autours de l’identité urbaine, La France en ville, Editions Atlande, 2010.
Source image // Panos Pictures - Metropolis
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L’espace de la ville est structuré par des repères et des aménagements, par des informations et des orientations, il est institué par des systèmes sociaux qui régulent et organisent la vie urbaine. Dans la ville, même les configurations liées à la nature sont socialisées par les institutions urbaines : les fleuves qui traversent les villes sont encadrés par des berges aménagées et enjambées par des ponts. Les mers qui bordent les espaces urbains sont aménagées par des ports et par des quais. Le rôle de la voirie est, ainsi, de socialiser, d’institutionnaliser, les usages de l’espace urbain.40 Tous ces aménagements sont autant de supports de signes et de codes. Dans la ville apparaissent cinq grands lieux de communication et d’expression, qui, ensemble, dessinent une géographie symbolique de l’espace urbain.41 Ils favorisent la polyphonie urbaine qui articule des systèmes collectifs d’information et de communication ainsi que des systèmes privés et singuliers d’expression de l’identité. Les cinq catégories d’espaces urbains correspondent à différents types d’appropriation de l’individu, différents types d’expressions et de langages urbains. Je commencerai l’analyse des catégories urbaines par les lieux de l’habitation, qui sont les lieux de l’ancrage identitaire personnel, ceux de la communication privée et de l’intersubjectivité. La différenciation entre espaces privés et espaces publics constitue une forme d’élaboration de l’espace urbain en un système de signes. C’est un type d’information que l’on peut lire dans la ville, en découvrant par les portes et les fenêtres et en observant jardins et cours d’entrées, les aménagements des espaces de vie privés. À Amsterdam par exemple, la taille et le grand nombre de fenêtres disposées sur les façades des maisons laissent aux marcheurs le loisirs d’observer des scènes de vies du quotidien ; une famille qui déjeune, un couple qui regarde la télévision devant un plateau repas, quelqu’un faisant le ménage… La sphère privée vient alors participer à la poésie urbaine. L’espace urbain met également en scène toute une sémiotique du singulier à travers, d’abord, les postures, attitudes et vêtements des individus qui le parcourent puis à Source image // Michael Wolf travers les pratiques de communication singulière ; un vieil homme lisant un journal, une femme au téléphone, un groupe de personnes parlant de vive voix au coin d’une rue, un homme qui marche en boitant, un autre en costume qui apparemment pressé court de rue en rue et un couple qui papillonne sur un banc public… Toutes ces 40 STOCK Mathis, Pour un traitement approfondi de l’apport d’Edward Relph à la question du rapport aux lieux, p. 173-185, 2000 et 2001 attitudes font partie de la communication singulière et viennent nourrir la polyphonie 41 THÉRY Hervé et BRUNET Roger, Habiter, p. 250, 1993. 30
de l’espace urbain et la poésie urbaine, en accentuant son imprévisibilité. Les lieux de l’échange et du commerce sont les lieux de la communication publicitaire et de la négociation. Il s’agit d’un autre espace de la polyphonie urbaine qui repose, lui, sur une polyphonie marchande. Le marché urbain a toujours été une polyphonie, faite de cris, de gestes, d’odeurs, de couleurs et également de vitrines et d’affiches publicitaires ; des informations communiquées dans les lieux institués de l’échange et du commerce comme les marchés, les foires, les fêtes foraines ou bien encore les grandes braderies. Le tout participant à l’identité commerçante du lieux. Les acteurs de ces espaces urbains participent à la poésie urbaine à travers leurs comportements et attitudes. Les agoras sont les lieux du débat politique et de la confrontation. La ville est l’espace du politique, car elle est l’espace du débat public, des pouvoirs et de la représentation. En ce sens, la polyphonie urbaine comporte une dimension proprement politique, qui est elle-même une polyphonie, car étant un système de communication dans lequel les différentes identités politiques s’opposent les unes aux autres dans la confrontation permanente du débat et des pratiques politiques. La polyphonie politique de l’espace urbain s’exprime en particulier dans les défilés et les manifestations de protestation, dans la confrontation des partis et des journaux engagés ainsi que dans la mise en scène du débat institutionnel. La rue devient un lieu polyphonique quand elle est parcourue par des manifestants qui font d’elle un espace de confrontation politique. Espaces identitaires, les agoras permettent aux individus d’affirmer leurs appartenances à des catégories sociales et des partis politiques. Ces derniers participent à la poésie urbaine à travers des mots, des slogans, des champs et des points de vues personnels montrés aux yeux de tous. L’espace urbain connaît également les lieux de la communication de crise, ou de la communication de souffrances, que sont les hôpitaux et les lieux de la relégation urbaine. La polyphonie urbaine est ici celle de la santé et de la maladie, celle du bien-être et de la misère, celle de l’ordre et de la souffrance. L’espace urbain connait une coexistence, une confrontation, souvent conflictuelle, entre deux façons d’habiter la ville et de vivre la rue : il y a ceux qui l’habitent en se l’appropriant et en y trouvant leurs marques et ceux qui l’habitent en s’en faisant rejeter, en vivant une véritable exclusion. La cour des miracles a souvent été une caractéristique de l’espace urbain au même titre que les lieux du pouvoir. Les ponts, entrées d’hôtels, lieux d’accueil
Source image // Diogo Salles - Times Square
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de la précarité sont, ainsi, des lieux caractéristiques de la sociabilité urbaine. Cette confrontation de milieux sociaux s’affiche dans la rue au travers d’espaces identitaires bien distincts qui racontent l’histoire d’individus et qui participent à la poésie urbaine. Enfin, les lieux de circulation et de déplacement font apparaître une communication urbaine mobile et nomade de ses utilisateurs. La communication urbaine est celle du déplacement et de la rencontre. Elle est faite de signes, de symboles, de panneaux de signalisation routière, d’affiches et d’enseignes publicitaires. Les zones de circulation portent également des signes exprimés par les acteurs qui parcourent l’espace urbain. Toutes ces traces, signes, empreintes et symboles rendent l’espace urbain lisible, nous donnent à lire et à observer la poésie urbaine. Ces cinq grands lieux de communication et d’expression sont chacun constitués d’innombrables « sous lieux » dont les symboliques varient selon les individus qui les pratiquent, les « habitent » et selon les fonctions qui leurs sont attribuées. Qu’il fasse jour ou nuit, que ce soit l’été, l’automne, l’hiver ou le printemps et selon les personnes qui expérimentent l’espace urbain, les fonctions et pratiques associées à un ou plusieurs lieux peuvent se modifier, évoluer ou bien encore disparaître. Cela donne à la poésie urbaine une once d’imprévisibilité, de surprenant et d’incroyable, montrant au lecteur de la ville un récit, une poésie haute en couleurs et en péripéties.
Source image // Darwinfich - Tokyo
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Identité urbaine
MÉMOIRE URBAINE
Contenant des expériences individuelle et collective.
COMMUNICATION langage urbain
PRATIQUES SPATIALES AFFECTIVES
Milieu urbain
Source image // Stépnie JUNG - Berlin
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Au loin, les bâillements de la ville se faisaient déjà entendre. Assise sur le rebord de ma fenêtre, J’observais les premiers rayons du soleil chercher leur chemin à travers les sombres ruelles d’Amsterdam. Mon thé encore fumant, je profitais de ces quelques minutes pour admirer le premier acte de cette merveilleuse danse urbaine où cyclistes, coureurs, patineurs, marcheurs et voitures se mêlaient et s’entremêlaient au fil de l’Amstel qui, en ce mois de janvier, est recouvert d’une épaisse couche de glace. Un carillon m’ôtait de mes pensées, le soleil était enfin parvenu à atteindre Tuinstraat et venait doucement s’engouffrer sous les combles de cette vieille maison Hollandaise où j’habite. La rue m’appelait ; bonnet, gants et grosse écharpe, j’étais prête. Sous mes pieds la neige crissait, je m’enfonçais en suivant les pas de cet homme qui était passé avant moi. Il avait pris à gauche, je continuais ma route à droite, vers Prinsengracht, où j’avais laissé mon vélo. La lumière était douce et orangée, les maisons flamboyantes et leurs vitres éblouissantes. Je croisais madame Vanderplas qui semblait être encore plus pressée que les matins précédents. Cheveux dans le vent, joues rougies par le froid, elle me souriait et disparaissait soudainement dans la brume, laissant derrière elle une fine ligne sur le sol où, à force de passages, la neige commençait déjà à se transformer en une boue sombre et visqueuse. Dans une maison, un gamin à la chevelure explosive tentait de me dessiner une grimace à travers une vitre embuée de sa maison. Je l’entendais rire et lui renvoya ma plus belle moue. Un vieil homme assis sur un banc, s’amusait de nous voir ainsi se chamailler. Emmitouflé dans une couverture aux couleurs de Noël, du givre recouvrait son bonnet et sa longue barbe cachait une partie de son visage abimé par le temps. En passant devant lui, une odeur acre et forte venait perturber mes pensées et je me rendais compte qu’il avait certainement passé la nuit ici, recouvert de cartons que je distinguais alors sous son sac. Quelle était son histoire ? Depuis quand était-il là ? Je continuais ma route, questions en tête. A l’angle de la rue, une tache rouge recouvrait une partie de la chaussée. Que s’était-il passé ? Une personne était-elle blessée, morte même ? Je restais là quelques instants en imaginant le scénario de la scène qui avait du se dérouler quelques minutes plus tôt. Un vélo passa soudainement à travers cette tache, le cycliste continua sa route, laissant derrière lui une trace rouge. Immobile, j’observais ce dessin rouge qui se formait à force de passages. Je pensais à l’œuvre de Painting reality qui avait versé des litres de peintures de différentes couleurs au carrefour de plusieurs rues. Donnant ainsi à voir le chassé croisé des centaines de véhicules qui l’empruntaient.
Source // Painting Réality
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Source // Haas & Hahn - Favelas painting
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Un bruit de klaxon retentissait au loin, me ramenant ainsi à la réalité. Je levais les yeux en place, je décidais d’aller m’offrir une viennoiserie. et décidais de poursuivre ma route. J’apercevais mon vélo au loin, parmi la centaine d’autres bécanes, rouges, roses, bleues, noires, à pois, à fleurs… chacun y avait mis de son imagination afin de se différencier des autres et d’amener un peu de vie et de couleur à cet hiver grisonnant qui n’était pas encore prêt à partir. Cela me rappelait le projet « Favela Painting » réalisé par les néerlandais Haas & Hahn qui ont eu l’idée de peindre les favelas de bossanova au Brésil en faisant participer les habitants afin de les transformer en œuvre d’art. J’atteignais mon vélo, sortais une clef de mon sac, clic, le cadenas était ouvert et je l’enroulais autour de la selle dans un bruit métallique, rangeais ma clef et tentais de dégivrer la selle avec la manche de mon manteau. Ces gestes deviennent rituels à force de répétitions. Ici, en Hollande, chaque personne se déplaçant à vélo les répète au moins quatre fois par jours. Ces répétitions sont comparables à l’apprentissage du « tour » en danse classique, où la danseuse, encore, encore et encore le répète inlassablement jusqu’à atteindre la perfection. Me voilà sur mon vélo, fesses gelées, presque douloureuses, je décidais de prendre Prinsenstraat pour rejoindre le centre ville. Un arôme de pain chaud vint s’engouffrer dans mes narines. Senteur exaltante, je me rappelais mes promenades matinales au marché des Lices, à Rennes, où les étalages de pains et de viennoiseries fraiches me faisaient perdre la tête. Je ralentissais et décidais d’assouvir ma gourmandise. Déviant rapidement sur le trottoir, je sentis ma roue avant glisser mais il est déjà trop tard. Je perdais l’équilibre et m’effondrais soudain sur une plaque de verglas que je n’avais vue, emportant avec moi quelques vélos garés sur le trottoir, le tout dans une cacophonie assourdissante. La rue entière s’arrêta, tel une photographie, conducteurs, cyclistes et piétons avaient stoppé leurs courses, attendant ma réaction. Cela me rappela le tournage d’une pub Tic-Tac sur la place de l’hôtel de ville de Rouen en mars 2012. La marque de bonbons avait piégé plusieurs personnes en caméra cachée avec un immense flash mob, intitulé «La Pire haleine du monde». Le principe était qu’un acteur demande son chemin à un anonyme et qu’il s’écroule si ce dernier lui répond, conséquence directe de la prétendue mauvaise haleine de son interlocuteur. Toutes les personnes présentes autour du passant s’effondraient alors en même temps et le temps semblait s’être soudainement arrêté. Une femme se rapprochait de moi, inquiète, Source // Tic Tac «La pire haleine du monde» m’aida à me démêler de ce pétrin et la vie reprit doucement son cours. J’entendais quelques rires moqueurs au loin mais n’y prêtais pas attention. Une fois les vélos remis 37
Après avoir cadenassé mon vélo, je traversais la rue pour rejoindre la fille d’attente, longue d’une dizaine de mètres et qui se finissait sur le trottoir. Le pain devait y être bon ! Croissants, pains au chocolat, stroopwafel, cookies, brioches, tartelettes à la fraise et les fameux petits cupcakes ornaient la vitrine qui portait toujours les décorations de Noël. Je ne savais que choisir et observais avec envie ces nombreuses mignardises. L’homme qui se tenait devant moi, certainement un habitué, me conseillait le croissant, disant qu’il n’en avait jamais mangé d’aussi bon. Je lui suggérais qu’il n’avait jamais dû goûter le croissant français, le « vrai ». Il souriait en entendant mon accent et décidait de m’en offrir un, afin de me prouver que le croissant hollandais pouvait être meilleur que le français. Installés sur un banc, nous parlions de cuisine et de nos spécialités culinaires nationales respectives. Je finissais par admettre que ce croissant était délicieux et nous repartîmes chacun de notre côté. J’aime ces moments où la rue nous offre des rencontres incongrues, nous ouvrant ainsi aux personnes que nous croisons habituellement sans y prêter attention. Avant de remonter sur mon vélo, je pris le temps d’admirer les quelques patineurs en herbe et parfois plus expérimentés, glisser, sauter et tournoyer sur le canal qui longeait la rue. De nombreuses traces se dessinaient sur leurs sillages me laissant imaginer une pirouette, un saut ou bien encore une chute. Deux enfants se chamaillaient, prononçant des mots qui n’étaient pas encore dans mon vocabulaire. La mère, qui semblait épuisée, haussait le ton et un des petits se mis à pigner. Je reprenais mon vélo en direction de Damsquare, le soleil se faisait timide mais la neige commençait déjà à fondre. Vent de face, je peinais à gravir les trois ponts qui me séparaient du vieux centre-ville. Devant moi, une femme se battait afin de préserver son parapluie contre les souffles violents en vain. Le vent prenait le dessus et cassait plusieurs baleines. De nombreux parapluies mouraient sur les trottoirs, abandonnés pour casse. À certains endroits on aurait cru un cimetière de tissus à pois, à fleurs et à rayures. Je me rapprochais et seules quelques ruelles me séparaient désormais de la place centrale. Je m’engouffrais dans Lijnbaanssteeg, ruelle sombre et étroite, il y régnait un puissant et saisissant parfum d’herbe. Je passais devant un coffeshop qui laissait émaner quelques bouffées de fumées depuis son d’entrée. En l’espace d’une ruelle, le printemps s’était installé dans la ville, la neige avait fondu, laissant apparaître les vieux pavés hollandais, usés, cabossés et disparates. J’empruntais désormais Nieuwezijds Voorburgwal, cette grande artère de la ville où 38
voitures et bus roulaient à cent à l’heure, m’obligeant à respirer leurs désagréables émanations de gaz. Le bruit de la ville se faisait bien entendre, les hollandais n’étaient pas avares en klaxon et les cyclistes sonnaient à tout va, signalant aux nombreux touristes qu’ils n’avaient rien à faire sur leurs chemins et allant parfois même jusqu’aux cris. Je me trouvais alors dans le deuxième acte de cette chorégraphie urbaine. J’étais dans la course, dépassant et me faisant dépasser, nous étions des centaines à danser sur nos vélos. Certains téléphonaient, d’autres lisaient, discutaient et se tenaient la main… C’est amusant de voir tout ce que l’on peut faire sur un vélo ! Je tournais à l’angle de Raadhuisstraat et voyais enfin apparaître le majestueux palais royal baigné dans une lumière blanche et vive. Un dernier pont à passer, je contournais le bâtiment et arrivais finalement à Damsquare. Stoppée, je ne pouvais plus avancer. Un flot interminable de passants rendait toute circulation impossible. J’entendais déjà quelques râleurs derrières moi et la femme qui me précédait tentait d’écraser le pied d’une passante tandis qu’une autre jouait des coudes. Les sonnettes se faisaient de plus en plus entendre, j’appuyais sur mon canard klaxon, un homme criait et les voitures faisaient ronronner leurs moteurs. L’animosité ambiante prenait le dessus, les piétons cédèrent place et tel un départ de formule 1, nous avions tous démarré. Je garais mon vélo un peu plus loin sur la place, parmi la centaine d’autres. À peine le temps de sortir mes clefs qu’une bourrasque de vent venait faire s’effondrer au sol la moitié des vélos qui y étaient garés. Les touristes riaient et prenaient des photos, certains propriétaires tentaient de se faufiler à travers ce labyrinthe désormais à terre. J’essayais de trouver un poteau pouvant servir de tuteur à mon vélo, en vain, je l’abandonnais donc parmi les autres, aux mains de la tempête qui arrivait. Sur la place, des hommes statues faisaient leur show, un homme jouait de la guitare et quelques personnes s’étaient arrêtées pour profiter de sa reprise de « The yellow submarine » des Beatles. On se croyait sur les Ramblas à Barcelone. Devant le centre commercial De Bijenkorf, je croisais cet homme qui, tous les jours, tentait de jouer du xylophone. Chacune de ses notes était parfaitement fausses et il était presque impossible de trouver une chanson correspondant aux sons qu’il produisait. Sa ténacité, qui me rendait admirative, l’a élevé au rang d’emblème et beaucoup le connaissent. L’entrée de ce centre commercial ne serait plus la même sans lui, il fait désormais partie des murs, partie de la rue.
Source image // Ramblas - Barcelone
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Source image // Moment factory - La vitrine numĂŠrique
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Une goutte venait de se poser sur mon nez, une seconde sur mes pieds, à peine le temps de me mettre à l’abri qu’une pluie torrentielle s’abattait sur la ville. La rue s’était vidée en quelques secondes et seuls quelques courageux avaient décidé de continuer leur routes. La plupart des cyclistes et piétons s’étaient réfugiés sous les hauvents et à l’intérieur des magasins. Nous étions tous là, immobiles, à regarder la pluie tomber sur cette place désormais vide de vie. Un homme qui avait déjà bien entamé un dessin à la craie à même le sol, comme le fameux dessinateur nantais, voyait son œuvre pleurer et s’écouler le long du caniveau. L’averse ne dura pas bien longtemps et je pus rapidement sortir de mon abri afin de me diriger vers Kalverstraat, la principale rue marchande de la ville. Le soleil faisait apparition et un puissant rayon éclaira la place, réchauffant les pigeons regroupés en son centre, immobiles, plumes relevées, attendant de sécher. Le flot de personnes qui s’engouffrait dans Kalverstraat m’emportait avec lui et je n’avais d’autre choix que de le suivre. Le moindre arrêt, la moindre déviation aurait provoqué un trouble de la circulation. La rue étant étroite et le flot piétonnier dense, je m’y sentais légèrement oppressée. Sans but précis, je me laissais guider parmi la foule. Une fillette apparemment distraite manqua de me rentrer dedans, un homme, petit et relativement corpulent mangeait un hamburger avec une telle fougue qu’il ne prenait pas la peine d’essuyer sa bouche ou bien encore la graisse qui tombait parfois sur le sol, sur ses pieds et qui recouvrait déjà une partie de sa manche droite. Un sentiment de dégout commençait à m’envahir et il s’amplifia lorsque je cette femme fort apprêtée me frôla, laissant derrière elle une forte odeur, âcre, de parfum à la rose. Je décidais de regarder ailleurs et vis une famille, certainement des touristes, qui tentaient d’avancer en vélo dans la rue, ce qui est formellement interdit dans cette rue. Un homme donna un coup d’épaule au père qui perdit l’équilibre et manqua de tomber. Français et quelque peu arrogant, le cycliste commença à faire des grands gestes, cria et rattrapa le passant. Des policiers qui passaient par là calmèrent rapidement le jeu et ils furent priés de repartir à pied. Bruyante, odorante et bondée d’une foule dense et mouvante, cette rue était semblable à un parc d’attraction. La circulation reprenait tranquillement son cours tandis que je m’approchais d’un attroupement de personnes qui gesticulait dans tous les sens. Intriguée, je les rejoignis et découvris une vitrine interactive, comme celle réalisée par Moment Factory à Montréal. Elle réagissait aux mouvements des passants et produisait de la lumière à différentes intensités. Le passant devenait ainsi acteur
Source // Alice Le Pottier
de la rue et de la vitrine. Amusée, je me prêtais au jeu pendant quelques secondes, accompagnée d’un ravissant Hollandais et notre chorégraphie fut remarquable ! Un peu plus loin, le fameux magasin Lunch laissait s’échapper de son entrée un doux parfum de lavande accompagné de vanille. Je me sentais transportée quelques années en arrière, pensant à mes étés passés en Ardèche. Attirée, je m’approchais de la vitrine et restais admirative face à cette diversité de formes et de couleurs et je n’étais pas la seule d’ailleurs ! Un groupe d’adolescentes, doigts posés sur la vitrine, montraient en s’extasiant la multitude de savons, à rayures, à poids, roses, à paillettes, en forme de cœurs, d’étoiles et de sucettes, gros, énormes et gigantesques. Tel des bijoux, les vitrines décoraient la rue, la sublimaient. À quelques pas de là, un magasin avait disposé de nombreuses boules à facettes, guirlandes et étoiles lumineuses dans sa vitrine et avait mis une musique à plein volume. Je me demandais si ce n’était pas une discothèque ! Je pris à gauche, sur Gapersteeg et passais devant Gartine, ce petit restaurant qui propose de fabuleux brunch que j’avais eu l’occasion de déguster la semaine passée. Je me remémorais quelques souvenirs et mon ventre ce mit soudainement à gargouiller, ce qui fit sourire une femme qui lisait la carte du restaurant à l’extérieur. 41
Bientôt midi, je décidais de reprendre mon vélo pour aller au marché d’Aldert Cuypst, le plus grand d’Amsterdam. Avant cela je du remonter la rue d’Oudezjids, une des plus anciennes de la ville où les maisons y sont superbes. Rouges, marron, ocres, jaunes et oranges, certaines ne font parfois que deux fenêtres de large tandis que d’autres presque cinq ! Un canal venait s’engouffrer dans cette rue et de nombreux ponts ornés d’une multitude de lumières le dominaient. Ce sublime spectacle était malheureusement perturbé par d’importants et assourdissants travaux de rénovation urbaine. De nouveau à Damsquare, je rejoignais mon vélo, à terre, l’enfourchais en direction du marché et décidais de passer par Reguliersgracht, la fameuse rue aux sept ponts alignés. La nuit, les ampoules qui recouvrent leurs voutes se reflètent dans l’eau et donnent à voir un magnifique spectacle. De nombreux touristes tentaient d’y obtenir la plus belle photo, se mettant en scène et n’hésitant pas à légèrement bousculer leur voisin pour avoir la meilleure place. C’est amusant de les observer. Cela me faisait penser à la merveilleuse fête des lumières de Lyon, où le temps d’un weekend, les rues se transforment et donnent à voir un spectacle époustouflant.
Source image // Fête des lumières - Lyon
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Source image // Fête des lumières - Lyon
Après le second pont, je passais devant une vieille cabine téléphonique qui me De nombreuses personnes et artistes les utilisent, telle une toile blanche, afin d’y exprimer rappelait l’œuvre de Kingyibu, « The phone booth aquariums ». Cet artiste avait rempli leurs arts ou bien encore des opinions personnelles, politiques et autres. d’eau et de poissons rouges une cabine téléphonique afin d’en faire un aquarium. Ce n’est pas une mauvaise idée de donner une seconde vie à ces édicules urbains qui n’ont presque plus aucune utilité, si ce n’est rappeler le temps passé. La rue regorgeait d’endroits et de mobilier urbain semblables à la cabine téléphonique ; inutilisés et délaissé par la population.
Source image // The phone booth aquarium - Kingyibu
Source // Banksy - Mis
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peut toucher, sentir et goûter, la rue donne faim ! Certains marchants crient, d’autres sont plus calmes, une jeune femme au loin chante ses légumes, j’entendais du hollandais, de l’anglais, du français, de l’espagnole et bien d‘autres langues encore. J’étais arrivée dans le troisième acte de cette chorégraphie urbaine. Que pouvaient bien raconter ces personnes aux langages que je ne comprenais pas ? Je m’arrêtais quelques instants sur un banc à l’angle d’une rue qui traversait le marché, le temps de déguster ma gauffre hollandaise, une stroopwafel, accompagnée d’un bon jus d’oranges frais. En cette fin de printemps, moufles, bottes et gros manteau avaient été mis au placard. La rue était plus colorée, plus bruyante et semblait également plus vivante qu’il y a quelques semaines. Les femmes avaient découvert leurs jambes, ne laissant pas les hommes indifférents. Je m’amusais à comparer cette scène à celle du film de Pina Bausch, « Les rêves dansants » où les hommes en costumes et les femmes en robes de soies colorées, cheveux détachés, dansaient, se regardaient, se cherchaient et se trouvaient grâce à une chorégraphie romantique Source image // Fête des lumières - Lyon et à une gestuelle bien précise. Je retrouvais dans la rue ces mêmes attitudes et regards, qu’hommes et femmes mettaient en scène inconsciemment. Le sol était en Je m’engageais dans la rue Lijnbaansgracht où de nombreux oiseaux m’accueillirent partie recouvert par des détritus, des cornets de frites vides, des serviettes en papier dans un concerto en La mineur et de nouveau, je me souvenais d’une œuvre, celle-ci et des fruits trop mûrs. Un homme se faisant bousculer renversait son jus d’orange par réalisée à Sydney, pour le Vivid festival. La ville avait disposé dans le ciel d’Angel place terre et plusieurs personnes se mirent à sauter en arrière, sauts de biche improvisés, une centaine de cages accompagnées de hauts parleurs qui diffusaient des champs essayant d’éviter d’éventuelles éclaboussures. d’oiseaux, afin de se remémorer ceux se trouvant anciennement dans les environs et qui avaient été forcé de se réfugier dans les terres lorsque les colons avaient débarqué. Bercée par mes pensées, j’arrivais déjà sur le marché et cherchais à trouver une place pour mon vélo. Après une longue recherche et à cause du manque flagrant de places dites légales, je décidais de le poser contre tous les autres déjà en tas sur une petite place. Le marché d’Aldert Cuypstraat représente à la perfection la culture hollandaise. Il est au cœur du Pijp, un quartier d’Amsterdam vivant et très agréable. On peut y trouver de nombreux stands qui proposent de manger sur le pouce du hareng fumé accompagné d’un cornichon géant et d’oignons crus, le tout dans un pain brioché (typique et original !). On peut également y manger les fameux cornets Source image // Pina Bausch - Les rêves dansants de frites accompagnés de mayonnaise, des jus de fruits frais et pressés à la demande. Les odeurs affluent de tous côtés, fromages, poissons, chocolats, fruits frais et fleurs, on 44
Source image // Pina Bausch - Les rĂŞves dansants
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À l’écart de la foule, dans la rue perpendiculaire au marché, quelques enfants dessinaient sur le trottoir marelles et autres dessins enfantins à l’aide de craies. C’était comme cet été dans le quartier latin de Montréal, pendant le festival de rue Oumf, où enfants, adolescent, adultes, parents et grands parents dessinaient ensemble à même la route avec de la peinture mise à disposition par la ville. Chacun y allait de son imagination, de sa couleur et de son histoire, donnant un autre sens à la rue, participant ensemble au langage urbain, à la poésie urbaine. Ce même jour, après qu’habitants et touristes eurent fini de recouvrir le sol de messages divers et variés, plusieurs troupes de théâtre vinrent faire leur show. Tout au long de la rue que je descendais, j’avais pu écouter et admirer de surprenantes performances théâtrales qui se déroulaient au même moment et à seulement quelques dizaines de mètres d’écart. Certains jouaient dans une baignoire pleine d’eau, d’autres dans une voiture, parfois nus ou bien habillés comme dans les années 60, seul ou à plusieurs, toute la poésie de la rue était là, libre d’expressions, spectaculaire et singulière. Acteurs et spectateurs jouaient ensemble délibérément et inconsciemment. Ils écrivaient, chantaient, parlaient, dessinaient et vivaient la poésie urbaine. La sonnette d’un vélo m’extirpa de mes pensées, j’étais toujours assise sur mon banc et la chaleur de l’été qui avait pris place devenait insupportable.
Source image // Alice Le Pottier Festival Oumf - Montréal
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peut toucher, sentir et goûter, la rue donne faim ! Je retournais à mon vélo et mon envie de fraicheur me guida jusqu’à Vondelparc. Long de presque trois kilomètres, il était recouvert d’une végétation luxuriante aux couleurs de l’automne qui avait déjà pris place. Je me retrouvais projeté dans le quatrième et dernier acte de ma chorégraphie urbaine. De magnifiques maisons bordaient les côtés du parc et les promeneurs affluaient de toutes parts. Les pelouses étaient recouvertes de personnes, assises à jouer à des jeux de cartes, allongées, parfois en maillots de bain, profitant des dernières chaleurs de l’année. La vie semblait
Source image //Olivier P - Paris plage
être au ralenti. Fini l’agitation du marché, ici le calme régnait, les oiseaux se faisaient entendre et seul le bruit des enfants qui pataugeaient et jouaient dans les étendues d’eau venait perturber ce paisible moment. La chaleur y était pesante, c’est pourquoi je décidais de m’abriter du soleil sous les branches d’un gigantesque et magnifique saule pleureur. J’entendais au loin le jazz d’un clarinettiste venant faire profiter à tous ses talents de musicien. Un couple de personnes âgées venait de se lever, l’homme avait amoureusement pris la main de sa femme, en avait pausé une autre sur ses hanches et ils commencèrent à danser à l’ombre d’un arbre. Attendrie, j’observais la scène avec envie. Un autre couple, puis un second et encore plusieurs autres les rejoignirent et le musicien se mit à jouer de plus belle. Nous nous serions cru sur les bords de Seine, lors de l’évènement Paris plage, où de nombreux touristes et parisiens s’adonnent à la danse de salon en plein air, transformant un habituellement lieu silencieux et inanimé en un espace joyeux et convivial, de rencontre et d’amusement. Seule, je n’avais pas osé me lever pour danser. J’étais restée là jusqu’à ce que le soleil décide d’aller disparaître au loin, donnant à voir un magnifique spectacle de lumière aux couleurs ocre. Je reprenais mon vélo pour finir ma balade le long des canaux où de nombreux bateaux voguaient au fil de l’eau. Les Hollandais, très friands des « After works » ont pour habitude de se retrouver sur les fameuses vedettes hollandaises après le travail et d’y boire quelques verres accompagnés de musique, de champs et de bonne humeur. La rue avait changé de couleur. Une fois la nuit tombée, lumières et vitrines animaient la rue et se reflétaient dans l’Amstel, donnant ainsi une nouvelle dimension à la ville. Les nombreuses et grandes fenêtres donnaient à voir les intérieurs de maisons Amstellodamoises souvent décorées et aménagées avec goût. Je passais au hasard dans la rue Nieuwezijds Voorburgwal où la ville a donné libre cours à l’imagination de certains artistes qui avaient peints et tagués sur les façades des personnages et bêtes imaginaires, apportant une touche d’imaginaire à la rue. Je me laissais guider par les canaux et me retrouvais finalement au point de départ de ma chorégraphie urbaine. Fatiguée, je quittais la rue et rentrais chez moi, de la poésie plein les yeux.
Source // Nieuwezijds Voorburgwal - Amsterdam
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Source image /Navid Barathy-Intersection
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Bibliographie // LIVRES
Bibliographie // ARTICLES
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Bibliographie // SITES INTERNET www.x-environnement.org Réunion débat sur une question touchant à l’environnement. www.arbreapalabre.com Lieu d’échange d’articles et de citations. www.cnrs.fr Principal organisme de recherche à caractère pluridisciplinaire en France, le CNRS (Centre national de la recherche scientifique) mène des recherches dans l’ensemble des domaines scientifiques, technologiques et sociétaux. www.revues.org Revues.org est une plateforme de revues et collections de livres en sciences humaines et sociales, ouverte aux collections désireuses de publier en ligne du texte intégral. www.lesechos.fr Quotidien économique. www.collabcubed.com Tendance, arts de la rue, design. http://www.notcot.org/ Réseau de tendance design et graphic.
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Remerciements Pour conclure ce mémoire je tiens à remercier toutes les personnes qui m’ont permis d’avancer sur ce mémoire et mon projet de fin d’études. Les enseignants de Mutation du Cadre Bâti de L’Ecole de Design Nantes Atlantique, pour leurs conseils et leur encadrement lors de la conception et la réalisation de ce projet. Je remercie Juliette Maitre, tutrice de ce projet, Yohan Dumortier pour avoir su me guider, me conseiller et m’aider tout au long de ce projet de fin d’études ainsi que Félix Le Pottier, Heidi Guernati et plus particulièrement Hervé Le Pottier, qui a rendu ce projet possible. Je remercie tous ceux qui m’ont donné des idées pour concrétiser ce projet, ou qui ont pris le temps de m’écouter et de me comprendre. Des personnes qui ont pu m’aider de près ou de loin à la réalisation de ce projet, des personnes qui ont contribué à son élaboration, à son développement.
Alice Le Pottier Mémoire de fin d’études 53