(RÈ)HABILITER

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( ré )habiliter




MEMBRES DE JURY  : Directeur de diplôme  : Jacques Pochoy, architecte urbaniste, enseignant à L'ESA

Personnalités extérieur: Jean Pierre Garnier, docteur en sociologie urbaine en urbanisme et aménagement

Julien Donada, Enseignante ESA  : Marlène Ghorayeb,

architecte,urbaniste, docteur en urbanisme et en aménagement de l'espace

Professeur extérieur  : Claude Yacoub,

architecte, chercheur, enseignant

réalisateur et scénariste

Architecte DESA  : Guillaume Rousseau, architecte DESA


(ré) HABILITER La Miroiterie, le reflet d’un quartier populaire Alice de Guitarre — ESA — 2014

Mémoire — Directeur de diplôme — Jacques Pochoy


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à Simy

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I/ LE REFLET D’UNE VILLE EN EVOLUTION

Je suis à présent dans cette ville depuis un mois. Je n’ai pas vraiment eu le temps de voir le temps passer et voilà qu’il me rattrape. Ma troisième insomnie cette semaine. Elle a comme un goût amer, sûrement dû au lait chaud avarié que je viens d’avaler. Mais qu’est ce qui ne va pas avec moi. Pourquoi cette ville m’angoisse-t-elle  ? Je regarde mon réveil une énième fois 3h30 plus que 2h à tenir et je vais enfin pouvoir m’endormir, comme les nuits précédentes, ce n’est jamais avant le premier chant d’oiseau. Je pose le pied par terre, et je me dirige dans le salon, j’ouvre la fenêtre et inspire une bouffée d’air, puis le froid vient mais je me sens un peu mieux, moins enfermée. Je l’aime cette fenêtre  : c’est peut être la seule chose qui me manquera  : être à la fenêtre à 3 heures du matin et entendre passer le train, au loin, prés des lumières de ce qu’il me semble être une ville. C’est bien ça qui m’intrigue ici. Comment puis-je être au cœur de la ville sans en entendre les grouillements proches  ? Je ne pense pas avoir déjà vu une tête sortir d’une quelconque fenêtre, à tel point que cela me semble prohibé. Tout est mort ici la rue manque de vie  : les routes trop larges, les trottoirs exigus. Les épiceries sont des stations services et les pharmacies vendent du tabac. Et demain on va me demander de réfléchir à une route et comment là faire appartenir au quartier. Car la ville n’en est pas vraiment une et les quartiers qui se juxtaposes ne formes pas une entité. Cette ville me semble une aberration. Mais je sais que cette nuit là je me suis posé une question  : qu’est qu’une ville sans activité populaire quotidienne  ?

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(ré)HABILITER, la miroiterie reflet d'un quartier populaire

SOMMAIRE

Introduction Histoire Populaire 1- La ville L'origine de la ville Mixité reconnue La répartition d’un territoire

2- Le dépeuplement La gentrification Les acteurs de la ville Paris en changement

3- La réhabilitation Le renouvellement urbain (ré) Habiliter

Quartier populaire 1- Le populaire L’espace populaire La place des quartiers populaires À Paris

2- Géographie Belleviloise Un village à Paris Belleville Géographie belleviloise

3- Miroiterie La miroiterie, Lieu de vie L'existant Les squats 10


Miroir populaire 1- Le débats

Perte du débat citoyen Les réseaux sociaux Citoyenneté 2.0

2- Contribution

Coopérative Architecture participative Lieu participatif

3- La rue de la miroiterie

Conclusion Bibliographie LISTE DES FIGURES

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(ré)HABILITER, la miroiterie reflet d'un quartier populaire

INTRODUCTION

Ce mémoire portera sur l’évolution du type de population dans les quartiers populaires parisiens. Il se concentrera sur les facteurs de ces mutations qui sont visibles à plusieurs échelles. Ils peuvent être internes (rénovation, augmentation des loyers…) ou plus visibles avec une diminution des commerces de proximité ou encore une augmentation des activités culturelles. Ces changements amènent une évolution des quartiers, notamment due à un modification de population et le plus souvent à une augmentation du niveau de vie. Paris vit avec son époque, c’est pourquoi elle est en constante évolution qui, ces dernières années, a vu une augmentation de sa vie touristique au détriment de celle de ses habitants. L’embourgeoisement des quartiers populaires est de plus en plus visible, transformant ainsi des quartiers réputés pour leurs activités riches en des lieux «  aseptisés  ». Les investisseurs, en réhabilitant ces quartiers, amènent une nouvelle population qui les transforme peu à peu. Mais un quartier reste populaire dans Paris, Belleville, bien qu’il semble menacé par un changement radical. La vie y grouille, sa population multiculturelle y est visible et on observe une grande diversité de commerces. On devine le territoire de chacun au cœur même du quartier grâce aux enseignes commerciales caractéristiques à chaque communauté présente dans le quartier. En redéfinissant «  l’espace populaire  » nous verrons qu’il est possible de transmettre au sein même de la morphologie de la ville, un lieu populaire ayant un impact sur les habitants actuels et non seulement sur ceux à venir, comme le vise la plupart des projets de réhabilitations dans ce quartier. Notre société est aujourd’hui en transition et nous prônons de plus en plus l’échange et la réutilisation. L’écologie devient un idéal à différentes échelles et pas seulement dans la préservation de notre environnement mais également d'une manière sociale et économique. 12


Introduction

A travers cette observation il est important de ne pas négliger l’importance des moyens de communication, tels que les réseaux sociaux qui remettent au goût du jour le rôle du citoyen. C'est ainsi que le débat peut se retrouver dans la rue et avoir un réel impact non seulement sur le quartier mais également à travers la ville. Pour comprendre au mieux un tel lieu, La Miroiterie servira d’exemple. Cet ancien lieu alternatif semble aujourd’hui être à même d’être (ré) Habilité par le quartier et ses habitants. Ce lieu sera étudié comme une opportunité pour concevoir un lieu expérimental, dans et pour le quartier tel un prototype pour une nouvelle fabrique à Belleville.

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Une Histoire

populaire


(ré)HABILITER, la miroiterie reflet d'un quartier populaire

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Une ville en mouvement La ville est notre lieu de résidence, notre lieu de vie. Elle est à l'image de la modernité et de la force économique d'un pays. Mais sa complexité est sans cesse en évolution. Cet équilibre entre population et activité doit être conservé et pris en compte.

LA VILLE La ville tient son origine de deux légendes l’une grecque et l’autre mésopotamienne. La ville grecque (urbs) était originellement définie par le pomerium qui délimitait la ville et le territoire (ager). Dans les deux légendes la présence de la rivière aux abords de la ville était obligatoire. Pour l’origine mésopotamienne, «  Meso  » signifie «  entre deux  » et «  potamós  » «  rivière  ». L’origine du mot parle de lui même. Pour cette région la ville est délimitée par deux fleuves comme on peut le voir pour le cas de la ville d’Ur en actuel Irak. Cette disposition entre deux rivières n’est pas sans rappeler l’origine de Paris sur l’île St Louis. Nous pouvons observer que les légendes parlent de limites de lieux de navigation et de passage. La ville est également représentative d’une autre notion celle du commerce et de l’échange. La plupart des villes importantes sont des liens entre deux régions. On peut voir que ce qui a créé l’importance d’une ville comme Istanbul, (Constantinople, Byzance) fut son lieu stratégique de passage entre deux continents. Elle fut également appelée Urbs comme le fut Rome ou Ur. La définition de la cité romaine est à la base de notre définition de la ville et de l’état tels qu’on les connaît. La cité pour les romains implique la citoyenneté pour tous les habitants (homme non esclave) d’avoir un droit de décision sur la loi, la justice, l’administration et la défense de la ville. Cette citoyenneté s’exprime sur les forums. Notre citoyenneté est basée sur ce système et surtout sur la parole et l’échange, qui était accessible au centre de la ville «  carrée  »  : le forum. L’agora chez les grecs, au centre de la ville, était également un lieu d’échange d’idées. Ces lieux chargés de signification et de pouvoir ont disparu de nos villes denses sans réelle place principale. Ce lieu est remplacé par une communication télévisuel qui n’implique plus chaque citoyen. fig.1  Schéma de la reconstitution de la ville d’Ur, source https  : // sites.google.com/site/classe130/ fig.2  Schéma plan de la ville de Grand (France) et de son Pomerium, http : // www.romanaqueducts.info/

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Fig. 1

Fig. 2

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(ré)HABILITER, la miroiterie reflet d'un quartier populaire

Nous ne pouvons pas réellement dissocier la ville de la citoyenneté dans une république car elle fait partie de ses fondements et de son origine et, selon notre conception idéale, c'est un espace qui engendre l'échange et le débat. Nous considérons aujourd'hui la place publique comme l'héritage du forum. L’agrandissement des villes, a transformé le forum, en le disloquant, offrant à chaque place une fonction  : administration, commerce et divertissement. La ville d'Athènes a d'ailleurs été construite sur ce principe lors de sa reconstruction, au xixe siècle en offrant un rôle précis à chaque partie de la ville. Un plan triangulaire est utilisé pour répartir les trois fonctions. Nos villes sont organisées en arrondissements ou quartiers et ceci implique des espaces séparés. Chaque entité présente une place principale qui définit l’activité de celle-ci. À Paris la répartition des différents marchés, mairie... montre bien le dédoublement des lieux d’échanges caractéristiques à la ville. Lorsque l’on parle de l’origine des cités nous pensons également à Babylone et sa mixité. Les villes d’aujourd’hui ont cette même image mais elles ont perdu leur sens premier de lieu de citoyenneté. Elles s’étendent maintenant au delà des frontières naturelles qui la définissaient mais en contre partie les liens deviennent plus difficiles. La ville moderne est en fait une multitude de micro-sociétés à l’intérieur d’une même entité. Les villes ont toujours connu une mixité répartissant toutes les classes de populations en son sein mais, le phénomène de gentrification qui est observé dans la plupart des grandes villes amène celles-ci à être habitées par une même classe sociale lui retirant son caractère propre. Bien que les villes aient toujours eu des lieux définis par «  catégorie  » d'habitants, elles ont toujours vécu grâce à cette mixité. Ce phénomène tend à faire reculer les quartiers populaires à l’extérieur des villes. Si Paris perd son milieu populaire que deviendra t-elle  ? La ville est avant tout un lieu d’échange, qu’il soit commercial, social ou politique faisant d'elle une ville et non un village. La place est la représentation de ce lieu d’interaction qui n’est d’ailleurs pas seulement défini par sa surface mais par les activités que l’on y propose.

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Histoire populaire

Le caractère populaire de la ville est défini par le débat citoyen qui est un chassé-croisé pluridisciplinaire. Il doit à la fois permettre la discussion et le règlement des différents sur la place publique. Nous disposons aujourd’hui de plusieurs moyens d’interaction «  citoyenne  ». Bien que la manière la plus traditionnelle de l’exprimer soit une discussion au café des arts. Elle se déplace dans d'autre média comme internet et ses réseaux. Dans son ouvrage «  le Droit à la ville  » Henry Lefévre1 parle de la nécessité de changer la ville profondément mais elle ne peut changer seule. Son point de vue est que le phénomène peut changer seulement grâce à différents acteurs. Ni le peuple, ni l’architecture, ni la politique ne peuvent seuls changer la ville. L'émancipation de la ville passe par l'évolution et le travail de plusieurs. La notion même «  habitat  /  habité  » est indépendant de la ville car il implique une participation à la vie sociale2 urbaine. La ville depuis sa création a bien évolué en fonction de ses habitants, de la politique, de l'architecture et de l'urbanisme, car ces trois éléments en sont les acteurs et dépendent les uns des autres pour la changer profondément. Ils ont besoin d'évoluer dans le même sens. L'architecture dépend de choix politiques, les politiques dépendent des choix du peuple, qui lui même dépend de la politique et de son milieu. Pour conserver ces divers éléments qui constituent la ville, on se doit de comprendre ce qui est nécessaire à son évolution. Il faut que les différents acteurs de la ville partagent la même volonté, la même «  utopie  » pour lui redonner une réelle dimension. Qu’est ce que la ville sans l’interaction, les loisirs, l’entraide, les commerces et les rencontres  ? Si nous créons des villes stériles qu’en advient il de notre manière de vivre  ? Nous nous devons de repenser la ville sur différents plans pour permettre à tous les acteurs d'y rester car la mixité sociale tend à disparaître et depuis Haussman ce recul est de plus en plus visible. Ce discours semble en opposition avec une époque où tout est basé sur la communication et l’hyper-connexion et c’est pourquoi ces questions se posent aujourd’hui. Nous avons besoin de réelles interactions dans la ville, car si tous les lieux de vie disparaissaient, la ville n’aura qu’un rôle commercial et politique et aura perdu tout caractère social.

1  H.Lefebvre, Le droit à la ville, 3e ed, economica,2009 2  (1.) , chap 12.

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Une mixité reconnue Paris a toujours été le cœur d’une mixité, par ses multiples vagues de migration et ceci pour des raisons sociales et politiques (guerres, colonies…). Mais cette mixité n’est pas seulement ethnique elle est également urbaine, sociale ou due à différents secteurs d’activité. Paris est toujours représenté comme le berceau d’une activité culturelle riche mais elle est connue également pour ses conflits avec ses banlieues. Tel est là son problème, mais également sa force. La complexité de cette capitale qui est le cœur de l’activité et des décisions du pays, reste également une ville indépendante et internationale avec ses problèmes internes. De ce fait beaucoup de questions quant à son futur se posent. Elle tente de rivaliser avec les villes du monde, internationalement fortes, tout en devant garder son identité propre. Sa vie interne est dépendante de son évolution territoriale et foncière. La ville change pour rivaliser avec d’autres, mais ne doit pas oublier ses habitants et ses rats. La capitale ne se caractérise pas seulement par ses fonctions culturelles mais également par la forte présente du secteur tertiaire (sièges sociaux des grandes entreprises, banques, assurances...). Sa principale image est la richesse de ses musées et de ses monuments qui font d’elle la première destination touristique. Mais son activité est également représentée par le dynamisme des événements organisés dans la rue. Paris a une richesse culturelle aussi bien symbolisée par son histoire que par la diversité de ses usagers. Son réseau dense de transports fait de Paris une ville «  praticable  » et construite pour faciliter la vie d’une surpopulation visible. La complexité de son réseau et la diversité des modes de transport permettent de rendre plus facilement abordable les différentes activités qu’elle propose. Les halles, en son centre, sont le carrefour des transports parisiens, elles offrent par conséquent une mixité sociale, tant par le milieu que par les différentes interactions. Mais Paris ne perd-il pas ce type de lieu propice à l’imprévu  ? Si les liens sociaux sont «  l’âme  » de la ville, cette «  âme  » n’est-elle pas menacée par une politique qui referme les portes cochères et cloisonne les trottoirs à coup de croix de Saint-André  ?

fig.3  Entrée des Halles en musique — dessin personnel.

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fig.3

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La répartition Du territoire Paris et sa région représentent à eux seul 20% de la population française sur 2% du territoire. Ces chiffres montrent bien la densité de Paris et de ses alentours. La complexité de gérer le territoire de la ville en est que plus délicate. La Mixité est certes présente dans cette ville mais la répartition de ses différentes classes sociales n’est pas homogène et nous montre un territoire très réglementé en termes de catégorie d’habitat et d’activité (fig.5, page suivante). La diminution des classes populaires dans le centre de Paris est clairement visible ces dernières années bien que des quartiers dits «  populaires  » soient toujours présents dans son péri-centre et à sa périphérie. La répartition de ce territoire est certes inégale mais elle représente le Paris d’aujourd’hui qui correspond bien aux implantations caractéristiques des métropoles. Mais cette répartition du territoire est également liée à une politique qui tend à faire reculer les quartiers populaires. La densité de population dans Paris est visible aussi bien par sa démographie : avec environ 21 000 hab. /km2.3, mais également par son peu d’espaces vides. La plupart des «  espaces en creux  » de Paris sont surtout des places ou voiries. Mais notre manière de vivre implique une dédensification démographique. Nous exigeons une qualité de logement d’un point de vue sanitaire. Par conséquent les logements sont plus vastes que lors de la construction de la plupart des logements parisiens. En parallèle la densité de Paris ne cesse d’augmenter remplissant les dernières parcelles vides ou réhabilitant les vestiges du Paris industriel. Les enjeux de cette ville sont d’ailleurs en changement. Le Grand Paris a posé la question de sa durabilité et de son évolution future et actuelle. Sa densité et sa mixité en font une ville importante. Mais victime de son succès, la ville gagne du terrain et ne sait plus où sont réellement ses limites et jusqu’où les villes qu’elle a engendrées vont s’étaler. Alors que le centre de la ville devient de plus en plus inaccessible jusqu’où vont aller ces ramifications  ?

3  INSEE, 2011 fig 4.  Nicolas Moulin, Exposition "Vider Paris", source, http  : //www.galeriechezvalentin.com

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fig.4

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Il est d’ailleurs logique qu’un des points principaux des discussions autour du Grand Paris4 soit de densifier Paris et sa banlieue tout en définissant une stricte limite entre Ville et campagne. On veut accentuer les liens entre Paris et sa banlieue, créer une entité dense mais restreinte dans un territoire défini.

PRIX DE L’IMMOBILIER PARISIENS PAR ARRONDISSEMENT › à 11 000 €/m2 9 500 à 11 000 €/m2 7 500 à 9 500 €/m2 < à 7 500 €/m2

fig.5

4  Atelier International du grand Paris, Habiter le Grand Paris, ed. archibooks, 2013. fig.5  Carte de la répartition des prix au m2 à Paris, schéma personnel

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Histoire populaire

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DÉPEUPLEMENT La gentrification ‘One by one, many of the working class quarters of London have been invaded by the middle-classes—upper and lower. Shabby, modest mews and cottages—two rooms up and two down—have been taken over, when their leases have expired, and have become elegant, expensive residences [...]. Once this process of “gentrification” starts in a district it goes on rapidly until all or most of the original working-class occupiers are displaced and the whole social character of the district is changed .’5 R. Glass, London : aspects of change, éd London : Macgibbon & Kee, 1964

La gentrification, ce terme méconnu s’immisce dans le vocabulaire de la ville, en vue des changements de plus en plus visibles de nos milieux urbains. Lorsque j’ai commencé mes recherches sur le changement de la ville et de ses quartiers, j’ai rencontré ce terme de plus en plus souvent comprenant qu’un mot définissait les changements aux auxquels je prêtais attention. Ce terme fut inventé par un sociologue marxiste, Ruth Glass, en 1964. Il est composé du terme «  Gentry  » qui désigne la petite bourgeoise, ou gens «  bien-nés  ». Cette expression étant généralement utilisée de manière péjorative, la gentrification est une critique du processus d’embourgeoisement des quartiers populaires. Ce terme parle spécifiquement des quartiers populaires, dû à sa première utilisation pour ce phénomène observé par Ruth Glass dans un quartier de Londres. Il s'est observé avec le changement progressif du bâti et de l’espace public. La Gentrification ou l’embourgeoisement est avant tout une résultante de l’évolution des villes. L’évolution des quartiers populaires est due aux modes et à l’idéal des nouveaux arrivants plutôt qu’à une réelle volonté de changer les lieux. La montée en célébrité de ces quartiers engendre une augmentation du prix du foncier et donc le changement de la «classe» de ces habitants. Bien entendu cette nouvelle classe est plus aisée que la précédente et exige plus de sûreté et de propreté dans leur quartier. Ce qui est plus alarmant, c’est la vitesse à laquelle les changements immobiliers transforment les quartiers. Ce changement à grande échelle façonne les quartiers 5  R.- Glass, London  : aspects of change. ed. London  : Macgibbon & Kee, 1964

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et leur image. Chaque pays en fonction de sa politique lutte ou dialogue avec elle. Mais dans tous les cas, on observe un avantage surtout économique à ces changements. Le phénomène de Gentrification semble utiliser la ville et non dialoguer avec elle et surtout avec ses habitants. Les métropoles sont victimes de ces changements qui s’introduisent plus ou moins rapidement dans les quartiers populaires. Ceux-ci dérangent le politiquement correct des grandes villes. L’avancement de la gentrification se fait par les habitants aisés mais surtout par une politique qui va dans le même sens. L’addition entre rénovation privée et publique est au cœur des facteurs de l’évolution des villes. Bien que chaque ville et chaque pays aient un rapport différent avec ces changements, c’est dans tous les cas la même classe sociale qui souffre de ces changements. Le recul des classes populaires toujours plus loin aux limites de la ville est un fait, et la transformation des quartiers populaires en quartiers «  branchés  » et aseptisés en est une preuve mais est également le facteur de ce recul. La gentrification évoque la normalisation de la ville comme un phénomène amenant la ville a s’aseptisée, à devenir dépourvue de surprise, de vie. La restauration et la modernisation sont nécessaires à la ville mais c’est l’impression de ville figée, que donnent les quartiers désertés de leurs habitants d’origines. La gentrification derrière sa définition technique englobe une transformation de la ville plus profonde et plus inquiétante. La gentrification, selon Anne Clerval6, peut également avoir une autre vision, Jean-Pierre Garnier7 parle de dépeuplement pour ce même phénomène. Les deux points de vue sont intéressants, le premier parle de l’arrivée d’une nouvelle catégorie de population tandis que l’autre parle du départ de la population enracinée. Ce deuxième terme amène également à une autre perte, celle de la culture populaire. C'est pourquoi nous parlerons plus de dépeuplement au cours de cette étude. Ce second terme a une portée plus juste sur la définition du phénomène qui s'observe dans un quartier populaire parisien comme Belleville.

6  A. Clerval, Paris sans le peuple, la gentrification de la capitale, ed. la découverte, 2013. 7  J.-P. Garnier, (2010), «  Gentrification  » : une notion importée… et importune, Disponible : http://sociologias-com.blogspot.fr/2010/09/gentrification-une-notion-importee-et.html

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Histoire populaire

LES ACTEURS DE LA VILLE Le phénomène de dépeuplement s’immisce selon le même schéma dans la plupart des villes, impliquant ainsi les mêmes types d'acteurs. Ces quartiers en changement attirent d’abord des professions artistiques (plasticiens, graphistes, architectes…) qui cherchent des locaux à faible loyer et permettant une liberté d'expression. C’est cet attrait culturel qui finit par rendre le lieu à la mode, attirant ainsi les classes intellectuelles. Par l’achat de vieilles bâtisses ayant un certain charme ou encore d’anciennes usines, ils commencent à rénover le quartier, attirent de grandes opérations immobilières avec la possibilité de rentabiliser la rénovation. L’embourgeoisement de ces quartiers populaires semble être cependant la résultante de plusieurs critères. Contrairement aux grandes villes des Etats Unis l’engouement pour le petit pavillon, type maison phénix, ne convient pas à une certaine population aisée qui souhaite rester dans les centres villes. Un regain d’intérêt pour les vieilles constructions, ou pour les friches industrielles ces 20 dernières années rénovées type loft, ou encore pour l’habitat avec un certain cachet et une certaine histoire est visible. Car c’est bien le développement culturel des quartiers qui conduit une population plus «  aisée  » à s’y installer en le transformant ainsi en quartier a la mode, notamment avec le développement de bar d’ambiance, de lieux branchés ou simplement par l’apparition de lieux culturels plus vastes (comme le 104, en 2008). Le développement de cette vie nocturne permet de faire connaitre le quartier et donc d’y attirer une population en recherche d’un quartier qui bouge. Mais c’est une fois que la première vague de population dite culturelle que les choses changent vraiment. L’engouement soudain pour certains quartiers provoque des changements à plus grande échelle avec de grandes opérations immobilières, destinées à une population plus aisée. Cette deuxième vague, représentée par de jeunes familles demande au quartier une sureté et un calme amenant des changements plus visible (code, surveillance…) Aussi bien dans la rue que dans les habitations, le quartier change. On voit apparaître des commerces de plus grande «  qualité  » et une augmentation des prix des différents lieux devenus branchés. Cet attrait nouveau pour ces quartiers

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fig.6

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Histoire populaire

engendre une hausse des loyers en même temps que le changement du niveau de vie général. Cette revalorisation du quartier à une influence directe sur la classe populaire. Leurs moyens ne leur permettant plus d'y vivre, ils se voient obligés de le quitter par choix ou par contrainte économique. Le problème ici n’est pas réellement l’évolution de la ville car cela est nécessaire en fonction des mœurs et des époques mais bien le recul des classes populaires à la périphérie des villes qui implique alors une réelle question  : «  Que devient la ville si elle perd sont caractère populaire  ?  ». La diminution de ces quartiers entraîne une perte de la diversité de population. Sans cette mixité interne les villes se figent. Certains de ces quartiers subsistent, et il est nécessaire de les conserver. Les acteurs du dépeuplement, ne sont pas forcément responsables de tous les changements, mais ils participent à l’évolutionde celui-ci. Et bien plus qu’une poignée de personnes, ce sont les grands projets urbains et de logements, associés au parti pris politique qui engendre ces changements.

PARIS VILLE EN CHANGEMENT Paris en temps que capitale de la France à toujours évolué en fonction des différentes attentes de la ville moderne. Bien que réputée pour son centre historique, elle s'est toujours adaptée d'un point de vue commercial et technique. Elle a toujours été considérée comme un berceau de la modernité. On peut observer toutes les époques à travers ses rues, son architecture. Le recul des quartiers populaires, à Paris est dû à la diminution de l’activité ouvrière dans la deuxième partie du xxe siècle. La ville depuis le xixesiècle avait connu un développement industriel au Nord Est, créant des villages ouvriers à Belleville, La Villette, le 13e, et Javel entre autres. Ces anciens quartiers industriels se caractérisent par une urbanisation et un patrimoine architectural dus à cet héritage. La désindustrialisation de Paris, a débuté lors de l’agrandissement de la ville à vingt arrondissements. Les travaux de Haussmann pour la moderniser et l'assainir, ont repoussé l’activité industrielle en périphérie. Par conséquent les ouvriers fig. 6  Vito, la gentrification en trois étapes, 2014, sources  : http://sansdessein.canalblog.com

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qui habitaient autour des usines, pour faciliter leur transport, se sont éloignés. Les logements ouvriers et les usines ont déserté la ville offrant de nouveaux buts à ces quartiers comme l’artisanat et les activités du tertiaire. Ce nouveau visage donné à Paris est avant tout dans le dessein d’une revalorisation de la capitale et d’une image moderne de la ville. Bien que l’action d’Haussmann fut l’une des plus impressionnantes, le changement de la ville n’est pas terminé. La crise du logement qui suivra après les deux guerres amènera au développement de «  la couronne de logement sociaux  » dans la proche banlieue de Paris, suivie de la création de villes nouvelles un peu plus éloignées. Des changements s’opèrent également dans quelques quartiers intra-muros notamment avec les ZAC comme celle de Bas-belleville, Beaudricourt. Ces différentes évolutions de la capitale ont eu un réel impact sur la population et les habitudes parisiennes. Anne Clerval dans son livre, Paris sans le peuple 8 introduit bien le problème de cette «  aseptisation  » de la ville. Les différents déplacements du type de population dans la ville sont directement visibles en son sein, mais également par les chiffres. L’augmentation du niveau de vie de la capitale se voit dans le développement d’une population issue des classes aisées, avec un taux de cadres et professions intellectuelles deux fois plus élevées que la moyenne française (20% pour 9% en France).Si l’on veut observer plus précisément le déplacement des populations notamment le recul des quartiers populaires, cette carte (ci-joint) issus de la thèse de Anne Clerval9, nous montre les différentes étapes de la gentrification de la capitale. Le déplacement du type de population des quartiers permet de constater à quelle vitesse Paris sera dépourvu de quartiers populaires. La couronne de logements sociaux donne un aperçu des limites de la ville, comme une muraille populaire, elle donne une idée de l’objectif politique de la ville. Le grand Paris10, dans ses objectifs nous offre un discours enjolivé en présentant des solutions favorisant les transports

8  A. Clerval, Paris sans le peuple, la gentrification de la capitale, ed. la découverte, 2013. 9  A. Clerval. (2010, 24 février 2014). Les dynamiques spatiales de la gentrification à Paris. [article]. Disponible: http:// cybergeo.revues.org/23231 10  Atelier International du grand Paris, Habiter le Grand Paris, ed. archibooks, 2013, P32, Rogers Strick Harbour+Partners, Dix principes Stratégiques. fig. 7 Carte de la répartition par type de quartier de paris, Anne clerval, 2013, extrait de Paris sans le peuple, la gentrification de capitale

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fig. 7

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et des points attractifs situé après le périphérique. Ce discours semble aller de pair avec le recul des quartiers populaires. Les changements qui se dessinent pour l'avenir de Paris, semblent ne pas prendre en compte réellement le facteur humain, l'objectif étant la bonne répartition du territoire, plutôt que l'utilisation des forces actuelles des différents quartiers. La ville se doit de consolider une image de commerce et d’entraide crée par et pour ses habitants. La ville se doit de travailler avec ses habitants plutôt que de les repousser de plus en plus loin. Des études sur la gentrification, ont amené un champ de réponse pour résoudre ce problème. Certains prônent de laisser les quartiers populaires dans leur état insalubre et de ne pas rénover pour permettre de garder le même type de population. L'autre solution consiste au renouvellement urbain, pour favoriser ses habitants et non pas les chasser, bien que cela finisse par amener des classes plus aisées. Cette deuxième solution me paraît plus éthique. Cette solution implique également la revalorisation du secteur ouvrier de ces quartiers, en leur redonnant un but grâce à une nouvelle industrie.

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Histoire populaire

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(RÉ) HABILITATION La réhabilitation est aujourd'hui un moyen de moderniser nos ville, mais surtout de réintégrer des espaces délaisser. Où plutôt habilité un lieu qui était devenue obsolète à la ville. Lui redonnait un sens dans la ville contemporaine lors que le moment est venue. Renouvellement Urbain

Le renouvellement urbain fait partie d’un choix de la politique pour son amélioration et sa densification. Il a pour notion de rebâtir la ville sur elle même en vue du recyclage de ses ressources bâties et foncières. Ce renouvellement urbain a deux objectifs principaux, la densification et la requalification. Il s’inscrit cependant dans un concept assez simple  : l’utilisation des ressources déjà présentes. Le renouvellement urbain est également présenté comme un moyen de moderniser la ville et de résoudre l'insalubrité et la perte d'espace. Dans le cadre d'une étude sur le phénomène de la gentrification, le renouvellement urbain semble une des réponses pour les quartiers taudifiés où l'espace public se perd et les logements ne sont plus de bonne qualité. Cette rénovation amène souvent un changement de population, mais il semble important de souligner le fait que les autorités se doivent de résoudre les problèmes liés à l'habitat insalubre. Si un quartier ne permet pas l'épanouissement personnel, il peut en résulter une révolte à l'encontre de la ville (manifestations, émeutes...). La plupart des opérations considérées comme renouvellement urbain font suite à la désindustrialisation des villes qui ont laissé de grands espaces en friche. Ces interstices désertés dans les villes sont donc repensés, le plus souvent avec des ZAC, de manière à les réintégrer à la vie de la ville grâce à des programmes mixtes créant de nouveaux lieux ou même de nouveaux quartiers, comme celui de l’île Citroën (fig.7, 8, 9, page 35). Ces nouveaux aménagements ont deux échelles l’une du bâtiment et l’autre urbaine. Il inclut trois modes opératoires pour les bâtiments : La Réhabilitation (qui conserve seulement la structure du bâti existant), la Rénovation (qui implique une démolition reconstruction) et la Reconstruction (qui est l’action de rebâtir à l’identique un bâtiment insalubre). Pour l’urbain c’est une démarche de quartier.

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(ré)HABILITER, la miroiterie reflet d'un quartier populaire

Il implique une relance économique et la réintégration du site à la ville ou seulement une rénovation  /  réhabilitation des bâtiments insalubres existant. Cette politique d’aménagement impliquant un impact social dans le quartier, ce changement est contrôlé notamment par les OPAH11, ou le PLH12. La gentrification de ces quartiers en changement est aujourd’hui prise en considération bien que la politique ne favorise pas totalement la «  sauvegarde  » des quartiers populaires. Le résultat de cette politique récente ne pourra se vérifier que dans quelques années. Mais lorsque l’on voit les moyens mis en place pour redonner vie à un quartier inhabité ceci est plus de l’ordre de la création que de la rénovation. Donc nous ne pouvons pas réellement parler ici de disparition d'un quartier mais bien de renouvellement urbain pour la densification de la ville plutôt que son étalement. Lorsqu’il est appliqué à une plus petite échelle il peut avoir un réel impact sur la vie existante du quartier. C’est pourquoi ces rénovations urbaines doivent prendre en compte la vie de quartier, ses habitants et son histoire. Les villes qui ont un passé industriel ont toutes des usines désaffectées au centre de quelques îlots. En raison de la crise de l’espace libre ces friches sont la cible de grands projets culturels de réhabilitation ou de rénovation en logement sociaux ou non en fonction des propriétaires (publics ou privés). Mais ces lieux sont des opportunités pour la ville de demain et nous nous devons de prendre en compte leurs possibilités de changement en apportant aux quartiers une réelle opportunité de se renouveler. Les dents creuses des villes anciennes sont une des seules opportunités de changements, le bâti existant étant protégé par notre nostalgie de l’histoire. Une ville comme Paris à peu de manœuvre pour se moderniser en son cœur. C’est pourquoi la durabilité de Paris doit venir des lieux devenus obsolètes. On peut observer à Paris des renouvellements urbains de grande envergure mais il reste également des possibilités surprenantes dans les quartiers saturés. C’est ici que se portera mon attention pour un réel impact sur la durabilité de la ville et ses activités caractéristiques.

11  OPAH  : Opération Programmé de l’Amélioration de l’Habitat, il a pour objectif de favoriser la réhabilitation et la rénovation de bâtiment privé, tout en exigeant une mixité au cœur de la rénovation / réhabilitation. 12  PLH : Programme Local de l’habitat : document de définition et de programme des investissements et action en politique de logement à l’échelle territorial. fig. 8  Plan masse ZAC Seguin rives de Seine Boulogne- Billancourt fig. 9 à 10  Projet dans la ZAC de gauche à droite  : Logement, Marciano architecture et la tour Horizon, Jean Nouvel

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fig.8

fig. 9

fig. 10

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(ré)HABILITER, la miroiterie reflet d'un quartier populaire

Réhabilitation La réhabilitation est un acte particulier en architecture et en urbanisme, qui implique un réel dialogue avec une matière déjà en œuvre. Cette notion est liée à l’histoire d’un lieu qui a perdu son utilité première dans un site bien précis. Que ce soit un seul bâti ou un quartier tout entier l’intervention ne se fera pas sur une page blanche mais sur une mémoire collective. Nous pouvons poser la question de savoir s’il ne vaut mieux pas faire peau neuve plutôt que de réhabiliter l’existant. La réhabilitation implique autre chose. Si la notion de mémoire est importante pour les usagers, réhabiliter implique également de prendre en compte le tissu urbain déjà présent. Le nouveau projet en s’implantant au cœur et non en conflit avec son environnement permettra une réelle unité en liaison avec le site. La réhabilitation n’est pas seulement une réflexion architecturale, elle découle également d’une idéologie politique et culturelle comme une réponse en opposition à l’architecture du mouvement moderne. L’urbanisme de dalles et de villes nouvelles, qui fut exposé par les architectes du mouvement moderne, ne prenait pas en compte la ville dans son évolution mais construisait des lieux figés dans un idéologie. Cette conception demande le renouveau infini plutôt que le dialogue avec le passé et l’histoire de la ville. Cette architecture plus en lien avec elle même qu’avec son environnement ne semble plus d’actualité. Nous recherchons plus de nouvelles interactions variées plutôt qu’une répartition en zoning. Au delà de ces questions le «  geste  » architectural se pose. Le dialogue entre l’existant et le nouveau projet doit être réel. Le respect du bâti existant n’est pas forcément plus important que les espaces que l’on veut y apporter, mais sa structure doit être respectée. Retrouver l’ancien dans le nouveau c’est comme un dialogue entre l’immuable et la nouveauté. Ces questions sont bien entendu inséparables du programme du projet. Le rapport avec l’ancien bâti est au final seulement un repère sécurisant pour les utilisateurs. On n’a pas tout changé, on peut seulement y faire des choses différentes. «  Le projet résultera de la dialectique entre «  l’amitié  » que l’on aura avec le bâtiment support, l’intelligence de ce qu’il suggère et la compréhension de demande sociale qu’il porte.  » P. Simon, architecture transformées, Réhabilitation et reconstruction à Paris, 1997, éd. Pavillon de l’arsenal. fig.8  Projet de réhabilitation, Evergreen Brick Works, Torronto (Etats Unis), DTAH architect,2010. Le programme comprend un centre éducatif, un espace d'exposition (marché), et un centre social. De haut en bas  : photo du site, projet du marché, façade vivante et principe.

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fig.8

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Un quartier

populaire


(ré)HABILITER, la miroiterie reflet d'un quartier populaire

1

le populaire Le mot «   populaire   » définit un élément subjectif. Quelle est aujourd’hui la réelle signification du «  populaire  »  ? L'espace

Si nous suivons la définition du dictionnaire, «  populaire  » est un usage ou une chose connue du plus grand nombre13. On parle également de ce terme pour quelqu’un de célèbre. Mais nous ne pouvons pas dire que ce qui est célèbre est forcement populaire. Une personne peut être célèbre dans un domaine, mais connue uniquement par les gens appartenant à ce secteur. Mais «  populaire  » n’est pas seulement cela. Il est également un mode de vie amenant a une culture commune à une grande part de la population. Cela implique également que l’on peut parler de plusieurs populaires, en fonction de là où il se trouve. Le populaire est une notion souvent représentée par la couche ouvrière et pauvre de la population mais elle est également représentée par une vie quotidienne simple mais animée. Lorsque l'on parle d'espace Populaire, on voit une lieu d'échange souvent présent dans les quartiers qualifiers de Populaire mais que l'on retrouve au travers toute la ville. C'est surtout un espace qui définit sa popularité par activité qu'il représente. Un espace Populaire n'est pas seulement défini par son «  espace  » mais également par l'espace temps car il ne peut être défini indépendamment des usagers et de leurs interactions dans ce lieu. «  Populaire  » n'est point un terme péjoratif, il est la représentation d'une ville qui vit. Nous ne pouvons réellement dire qu'un espace public remplit complètement son rôle tant qu'il ne devient pas populaire, et qu'il reste inconnue. C'est pourquoi il semble important de dire que l'on ne peut pas dessiner un espace populaire mais seulement un espace public. Bien que l'on souhaite en tant qu'architecte ou urbaniste, le voir devenir populaire.

13  Larousse – 2013 fig. 1. à 5.-  Photo de Robert Doisneau

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fig.1

fig.2

fig.4

fig.3

fig.5

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(ré)HABILITER, la miroiterie reflet d'un quartier populaire

Le quartier La première image à laquelle nous pensons est celle d’un quartier habité par le peuple où l’entraide et la surpopulation sont visibles. Bien que cette image soit toujours présente dans les esprits, on associe également le quartier populaire à la mixité culturelle mais pas forcément sociale. Comme nous l’avons vu précédemment, la gentrification apporte une mixité sociale dans un premier temps. Ce sont bien les nouvelles activités apportées par ce phénomène qui changent les lieux. Le quartier populaire est aussi une concentration de personnes en précarité ou à faible revenu. Cette population développe des centres associatifs et une entraide visible. Car c’est bien ce qui caractérise les quartiers populaires  : une vie d’entraide. On connaît son voisin et cela nous permet de vivre plus facilement et mieux. Une exposition au Cent-quatre tenue récemment à interrogé sur la notion de quartier populaire14. Les réponses sont nuancées mais deux idées principales en ressortent  : entraide, mixité culturelle et associations. Si nous parlons de quartier populaire et si la question se pose de plus en plus c’est avant tout pour son rôle et sa créativité. L’un des intervenants de cette vidéo parle des quartiers populaires comme la source de ce qui est nouveau de ce qui sort de l’ordinaire15. L’autre notion caractérisant ces quartiers est celle de l’insertion. C’est dans ces quartiers que les immigrants viennent s’installer en premier. Cela se justifie à la fois par la présence de la mixité ethnique, permettant ainsi de ne pas être totalement isolé et de croiser quelqu’un de son pays, de sa région. Mais le coût du logement plus abordable que dans le reste de la ville y est pour beaucoup. On peut parler d’insertions mais cette notion est avant tout engendrée par la mixité présente dans ces quartiers. Le quartier populaire est difficile a réellement définir car sa particularité dépend du lieu et de ses habitants ce qui en fait un endroit particulier. La vie présente dans ces quartiers est caractéristique à chacun, elle peut être dangereuse, conviviale, festive, précaire et même cela tout à la fois. Un fait est cependant évident ce qui fait 14  Paris.fr, «  Pour vous c’est quoi un quartier populaire  ?  » ed  : Dailymotion, 2013, disponible: http://www.paris.fr/ accueil/actualites-municipales/c-est-quoi-un-quartier-populaire/rub_9656_actu_131794_port_23785 15  Dans la video2 — Mustapha — «  Pour moi, le quartier populaire c’est là où tous sort  : l’art , la musique, l’ambiance. Et puis après, ça se diffuse ailleurs. Comme que se soit le jazz, la soul, le Rap…tous vient de la rue quoi  !  »

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Un quartier populaire

de la ville ce qu’elle est c’est avant tout une histoire d’échange. Là où il y a échange, il y a populaire. C’est grâce à son grand nombre de lieux d’interaction accessibles qu’un quartier est populaire. Dans ce cas tous les quartiers le sont, mais ce qui donne à un quartier populaire ce titre c’est bien cette petite chose incontrôlable voire impalpable.

À PARIS

Les déplacements des différents quartiers populaires dans Paris sont encore dans les esprits. La gentrification a été si rapide que des personnes peuvent encore en parler et s’alarmer des changements qu’elles ont vus s’opérer dans les lieux de leur enfance, et seulement depuis quelques années. Le Marais ou Montmartre restent dans les mémoires comme des quartiers populaires mais l’on peut observer que les habitants ne sont plus les mêmes, bien qu’une certaine ambiance de quartier soit toujours présente. Ces lieux sont devenus des lieux branchés de sortie (à pas si bon prix   !). Montmartre quant à lui est devenu un village inaccessible et touristique, mais entouré de quartiers plus variés. Cet ancien quartier d’artiste vit aujourd’hui plus du tourisme que d’une réelle activité. La plupart des quartiers populaires parisiens ont un passé industriel. De ce fait leur architecture et leur urbanisme ont encore les stigmates de cette époque. On observe encore au fond de certaines cours des habitations ouvrières entassées. Des lieux un peu plus particuliers telle la butte Bergeyre sont littéralement des villages ouvriers au cœur de Paris. Dans les anciens faubourgs de Paris l’urbanisation du xve siècle est encore visible. Paris, qui continue de s’étendre, voit apparaître progressivement, et cela dès le xive siècle des manufactures aux portes de la ville. L’urbanisation se développe ensuite dans ses faubourgs. Elle est caractérisée par de grands ateliers et de grandes cours permettant aux artisans d’avoir leurs locaux au sein de la ville. Au 19e siècle, le développement de l’industrie, apporte à Paris des lieux industriels. Ils sont encore visibles dans la plupart des quartiers populaires actuels ou anciens. Ces grands espaces désertés engendrent une architecture diversifiée. L’arrivée de Haussmann ajoute une nouvelle forme d’urbanisme dans un Paris très dense. En créant les avenues et en élargissant les rues, il détruit une partie du Paris populaire, mais il apporte également de nouvelles constructions de différentes qualités.

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(ré)HABILITER, la miroiterie reflet d'un quartier populaire

Tout en assainissant la ville il introduit des bâtiments plus hauts que ceux du xve siècle. Plus récemment avec notamment les différentes ZAC des années 60 dans les quartiers populaires, la réhabilitation de ces quartiers par la construction de tours de logement a transformé également le paysage urbain. Ces changements de grande envergure sont concentrés dans les quartiers périphériques, le centre étant protégé historiquement. C’est dans les quartiers péri-centraux que l’on observe le plus un mélange des aménagements de la ville aux différentes époques. Cette particularité, en un sens, a protégé ces quartiers d’une entière gentrification, mais jusqu’à quand  ? Les parties de la ville n’ayant pas subi les changements urbains des années 60 sont aujourd’hui devenues des quartiers «  chic  ». À l'inverse, la construction de logement sociaux dans les quartiers périphérique les a «  protégé  » de l’embourgeoisement qui s’est infiltré dans le majorité des quartiers anciens. Le tissu urbain a donc une influence sur les habitants des quartiers. En fonction du prix de l’habitat on voit se dessiner naturellement les différents catégories de population (fig.5, p.24 ). Paris étant une ville caractérisée par ses constructions anciennes, ce type de logement est recherché. Cependant les grandes opérations immobilières de rénovation/réhabilitation de ces dernières années offrent un espace de sûreté dans des quartiers qui n’attiraient pas forcément des familles aisées cherchant calme et sérénité pour leurs enfants. Ce sont donc ces nouveaux projets immobiliers qui favorisent le changement de ces quartiers. Ils amènent ainsi une rénovation des alentours en changeant de plus en plus le caractère particulier de ces quartiers.

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Paris est une ville complexe par ses couches successives mais cette particularité est le plus visible dans les quartiers populaires qui se sont transformés au fur et à mesure de l’agrandissement de Paris et des changements de la conception de la ville. La ville s’est étalée au fil du temps plus qu’elle n’a changé en son cœur. Ce cœur représente le faste, la richesse et la culture. Mais en vue des besoins nouveaux et de son nombre d’habitants ce centre musée s’agrandit. On redéfinit les limites de la ville et donc les limites des quartiers populaires. On consolide ce centre historique pour agrandir la ville. Ce phénomène à pour conséquence de transformer des quartiers qui jusque là n’avaient aucun attrait et de changer la physionomie de ces anciens quartiers industriels et populaires.

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(ré)HABILITER, la miroiterie reflet d'un quartier populaire

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BELLEVILLE

UN VILLAGE À PARIS Un quartier, en particulier est encore considéré comme un quartier populaire dans l’enceinte de Paris, ou même comme un village dans la ville : Belleville. Ce quartier est particulier à la capitale mais peut on encore le protéger de la gentrification  ? Belleville a formé sa légende à travers les différents arts : littérature, peinture, photographie, film, musique… Elle est populaire dans Paris car on l’associe souvent à l’ancien Paris de Piaf. Ce quartier par sa typologie et son histoire est un quartier unique dans Paris. Dominant la ville, il en est détaché tout en y restant intégré. Les habitants de Belleville reste très attachés à leur quartier16 prouvant ainsi sa particularité. Le quartier asseoit son caractère populaire dans le Paris haussmannien. Au xx siècle, il devient un point de chute pour les immigrés des différentes vagues de migration qui se suivront (Espagnols, Algeriens, Tunisiens, Africains, Asiatiques…). Belleville est un quartier sans réelle limite entre quatre arrondissements. Il représente à Paris le quartier historique de la lutte urbaine. e

Ce quartier est la représentation d’un Paris qui bouge et qui change. Il n’est pas un quartier figé. Il oppose à la fois la créativité et la nostalgie d’antan. Ce lieu semble l’arrondissement qui accepte le mieux la discussion et l’ouverture d’esprit. Son histoire fait de lui un éternel village dans Paris avec sa butte Bergeyre, ses marchés, ses jardins et son éclectisme aussi bien en termes urbain architectural ou de population. On retrouve à Belleville multiples facettes de la culture parisienne que l’on aime et que l’on veut voir. Ce quartier qui réserve des surprises semble fragile malgré son passé d’éternel combattant. Il semble intéressant de s’attarder sur les possibilités d’évolution de ce quartier qui fascine aussi de bien des manières.

16  rechercher dans Belleville, quartier populaire la bonne page fig. 6  Photo prise à Belleville, Paris, source google image

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fig.20

fig. 6

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(ré)HABILITER, la miroiterie reflet d'un quartier populaire 18éme 19éme

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Belleville

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Pays  : France Ville  : Paris Arrondissement  : 20e Quartier  : Belleville M

Belleville

Démographie  : habitant  : 35 773 hab. (2005) densité  : 44 328 hab./km2 Superficie  : 80,7 ha = 0,807 km2 Nombres d'associations  : 347 dans le 20e arrondissement (nbr. le plus élevé de Paris). M

Coronnes

Population étrangère  : 19% de la population environs 60 nationalités

N fig. 8  Carte de Belleville, 20e ar., Paris, relever des lieux d'activité, carte personnelle

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fig. 6

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Ménilmimontant

lieux d’enseignements logements sociaux Zone d’activité / Culture

Espaces verts Places Lieux religieux

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géographie bellevilloise Belleville est un quartier qui se situe au Nord-Est de Paris. Il était au départ un village aux abords de la ville jusqu'à la création du 20e arrondissement, en 1860. Belleville est à cheval sur deux arrondissements de Paris le 20e et le 19e il est également limitrophe de quatre arrondissements. Sa particularité est aussi bien du fait de sa position dans Paris que de sa topographie. Il est sur une butte dominant Paris. La caractéristique de ces rues montantes avec notamment les rue de Ménilmontant et de Belleville qui délimitent le quartier, lui donnent une vue sur Paris tout en l'en détachant. Là est bien sa particularité. Avant d'appartenir à la capitale, Belleville était réputé comme un lieu de fête en raison de ses taxes moins élevées sur l'alcool. Le tissu urbain visible le plus ancien date du xixe siècle. Il fut créé après le développement des industries à Paris. Belleville était caractérisé par ses terres agricoles sur la butte de Belleville. C'est pourquoi lors de l'urbanisation du quartier les constructions se sont développées selon les anciennes parcelles des vignobles. Cette première expansion se caractérise par des constructions de mauvaise facture et a crée un quartier saturé et insalubre. C'est entre 1960 et 1970 que le quartier évolue avec les opérations de rénovation urbaine engendrées par la ville de Paris. Dans différentes parties du quartier, on redéfinit le parcellaire et se développent alors des immeubles de R+15, ainsi que des jardins publics comme celui du haut Belleville. Ces opérations transforment le quartier et sont visibles en suivant un petit ballon rouge17.

17  le ballon rouge, Albert Morisse, 1956.

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I/ LE REFLET D’UNE VILLE EN EVOLUTION

Une nouvelle opération de la mairie de Paris est instaurée en 1990 notamment à travers la création des ZAC comme sur le secteur Ramponneau-Belleville. Celle-ci rencontre une grande résistance de la part des habitants du quartier grâce à l'association la BELLEVILLIEUSE. À la suite de cette résistance les habitants du quartier ont réussi à faire modifier le projet en travaillant avec les autorités afin d'imposer leurs vues. Les rénovations successives, avec la construction d'immeubles de grande taille en béton dans certaines zones, ont créé de forts contrastes paysagers dans le quartier. Dans le bas-Belleville, ces immeubles côtoient en effet des maisons faubouriennes et des immeubles de rapport, ainsi que de nombreux ateliers, des ruelles et des passages qui conservent la mémoire du double passé de Belleville, rural et ouvrier.

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La miroiterie La miroiterie lieu de vie

La Miroiterie est un lieu situé au milieu de la côte menant au sommet de Belleville  : au 88 de la rue ménilmontant, dans le vingtième arrondissement. C'est un lieu de transition entre deux quartiers celui de Belleville et Menilmontant,( si on peut encore parler de deux quartiers). À la fois un entre deux géographique, territorial et historique qui semble attendre un programme durable pour le quartier. La Miroiterie est une ancienne usine Bosch, et depuis 1999, est devenue un squat d’artistes et une salle de concerts alternatifs. Juste derrière la Bellevilloise, il est l’un des plus vieux squat de Paris et vient de fermer ses portes. Ce lieu était réputé aussi bien pour sa musique que pour ses artistes. Les nombreux procès que le propriétaire a fait pour récupérer les lieux commençaient à peser sur le squat en attente de fermeture depuis l’été 2013. Le propriètaire est actuellement décidé à vendre au plus offrant. C’est donc bien aujourd’hui que se pose la question de son avenir. Plutôt que de laisser cette vieille fabrique à un promoteur immobilier n’y a t’il pas un moyen de garder la Miroiterie dans l’histoire populaire du quartier  ? La Miroiterie est adjacente à deux lieux «  gentrifieurs  ». En effet la Maroquinerie (un théâtre) et la Bellevilloise (un bar dansant) rue Boyer ont une clientèle plutôt «  BOBO  » et offrent des lieux de fête et d’événements destinés à une classe aisée et pas forcément accessibles aux habitants du quartier. La Bellevilloise offre d'ailleurs un point de vue sur la Miroiterie ainsi que sur les logements sociaux de la rue Juillet. Il serait opportun de faire de la Miroiterie une «  contre Belleviloise  » avec un programme porté par les habitants alentour et non pas seulement par la population intellectuelle du quartier. La Miroiterie ayant un passé d'usine et de lieux alternatifs il me semble important de prendre en compte ses deux anciennes activités pour sa transformation. Sa situation géographique implique également une prise de conscience du site et du passé de celui-ci.

fig. 8  plan de situation de la Miroiterie et photo prise sur le site 01 / 14

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PLAn R+1

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CouPe et élévAtioN élevation Coupe

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du 88 rue MéNilMoNtANt - lieu dit lA Miroiterie


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Plan d'implantation du projet et son impacte urbain  : 0

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20 sur le site  : Maquette de principe de la répartition 15 du projet N

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La Miroiterie Réhabilité

Accés direct à la rue Boyet

Création d’une rue et d’une place

La Maroquinerie

Ouverture du jardin

Création d’un passage La Belleviloise

Ratachement du projet au logement de la rue juillet

Accés direct à la rue juillet

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Les squats Squatter n.m. Résident illégal, dans un local vacant. Le Robert plus, 2007.

Les squats dans la ville se présentent sous différentes formes, avec un même principe  : un lieu vide est habité illégalement par des personnes. Le squat politique revendique un certain droit au logement ou même une autre manière de vivre. En France, le Jeudi Noir est un exemple d'association pour un squat politique. Mais le squat peut être également un appartement isolé et investi illégalement par un individu. Dans le cadre de la ville et surtout des quartiers populaires un type de squat est particulièrement intéressant, les squart. Le squart est la contraction de «  Squat  » et «  art  ». Ces squarts sont plus acceptés dans la ville car ils ont un impact culturel sur le quartier. Souvent installés dans des friches industrielles pour leurs qualités spaciales, ils finissent par être plus ou moins ancrés dans le quartier. Bien que certains ferment pour des raisons économiques ou de simple sécurité, certains finissent par se légaliser. La légalisation de ces squarts finit par les transformer. Le squart de la rue de Rivoli (fig.3 et 4) en est un bon exemple. Collectif d'artistes squatters à ses débuts, il est devenu un lieu culturel à la mode et bien propre. La légalisation des Squarts est une manière de les contrôler pour favoriser la culture dans le quartier. C'est bien là le problème. Lorsqu'un squart est en procédure d'expulsion ne vaut-il pas mieux imaginer l'avenir de ce lieu dans le quartier plutôt que de le légaliser. En admettant officiellement la légalité de ce lieu, les habitants changent car ils finissent par ne plus avoir les moyens de rester dans ces locaux rénovés. Ces projets ressemblent à une hypocrisie envers ces marginaux. On les oblige à se plier à des contraintes au nom de la politique. Bien que la culture soit importante surtout dans une ville comme Paris, la question se pose sur la nécessité de légaliser ces Squarts car à ce moment là il perd de sa force. C'est pourquoi je ne souhaite pas rénover la miroiterie mais la réhabiliter.

fig. 8  Squat électron libre, 59 rue de rivolie, photo 2002, fig. 9  Galerie 59, 59 rue de rivolie, photo 2014, s

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MIROIR

POPULAIRE


(ré)HABILITER, la miroiterie reflet d'un quartier populaire

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LE DÉBATS Perte du débat citoyen

Le caractère populaire de la ville est lié au débat citoyen. Un lieu populaire est un lieu de chassé-croisé pluridisciplinaire. Il doit à la fois permettre la discussion et le règlement des différents sur la place publique. Nous disposons aujourd’hui de plusieurs moyens d’interaction «  citoyenne  », bien que la manière la plus traditionnelle de l’exprimer soit une discussion au café des arts. Nous utilisons également des moyens modernes pour clamer notre liberté de penser et d’agir. Et si nous réunissions ces deux interactions pour redonner un sens au mot populaire  ? Le symbole de la ville est l’agora qui est définie comme le lieu dans la cité à la fois pour le commerce (marché), la politique (débat), le divertissement et éducation (théâtre, philosophie). Selon Aristote elle est la représentation même de la cité grecque, considérant comme barbares les cités qui n’avaient pas d’Agora. L’importance de la place publique au centre de la ville est due aux opportunités qu’elle engendre. Sans place d’interaction la ville n’est plus. On a peu à peu remplacer les interactions direct par des communications indirect amenée par le téléphone portable puis par l'apparition d’internet, qui a fini par atterrir dans nos poches. Créant une double interaction l'une dans la ville et l'autre dans un monde de communication «  virtuelle  ». Le parallèle entre vie interactive et vie réelle est riche, il nous permet de nous exprimer presque anonymement mais ne sommes nous pas anonymes dans la ville  ? La probabilité de croiser une personne que l’on connaît dans un lieu inhabituel est faible, nous n’avons donc pas peur d’exprimer notre opinion. Il faut redonner de l’importance aux places pour y exprimer nos idées. Que devient la ville sans l’expression de son peuple  ? Twitter serait t-il la nouvelle Agora  ?

fig.1  Twitter une nouvelle manière de communiquer, dessin de l'auteur. fig.2 Van Goth, terrasse de café la nuit sur la place du forum à Arles, huile sur toile, 1888

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fig.4

fig.1

fig.2

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réseaux Sociaux La nouvelle utilisation d’internet par le biais des réseaux sociaux Twitter18, Instagram19, Vine20, YouTube a créé de nouvelles manières de communiquer. Que ce soit pour se vendre ou seulement pour communiquer une envie, une idée, on utilise une information rapide et courte : image, video, tweet. Ces nouveaux moyens d’expression sont les seuls à réellement être libre. Dans les pays où l’information est restreinte et les médias sous contrôle, internet reste à peu près la seule manière de s’informer véritablement. On a vu que les récentes révolutions que ce soit le printemps arabe ou plus récemment l’Ukraine, faisaient passer les informations non officielles par ces nouveaux réseaux. Leur impact est également visible dans la tentative des autorités à interdire leur accès comme en Turquie le 20 mars 2014 avec Twitter puis Youtube. Ces interdictions montrent bien la force de ces médias lorsqu'ils sont libres de censure. Les informations interdites deviennent très recherchées, Twitter n’a jamais été autant utilisé en Turquie. Certes la liberté d’expression sur ces sites amène parfois à des excès. La liberté d’expression est garantie par la loi suivante «  La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi.  »21. Cela implique donc de ne pas nuire a autrui lors de l’expression de ses pensées et opinions. Les réseaux sociaux ne tenant pas forcément compte de cette loi, il est difficile de faire la part de chose sur internet. Ces réseaux ont d'abord été utilisés par les professionnels de la communication comme les artistes, les journalistes ou les politiques mais ils deviennent de plus

18.  Twitter : est un outil de microblogage. Il permet à un utilisateur d’envoyer gratuitement de brefs messages, appelés tweets, sur internet, par messagerie instantanée ou par SMS. https  : //twitter.com 19.  Instagram : réseau de partage de photo et vidéo. L’application propose un recadrage et des filtres photos caractéristiques du réseau. Il propose de partager en interne ou sur les autres réseaux tel que facebook ou twitter. http  : //instagram.com 20.  Vine est une application mobile de Twitter qui héberge de courtes vidéos de 6 secondes qui tournent en boucle et peuvent être partagées avec leurs abonnés. 21.  DDHC, 1989, Article 11, proposé par le duc Louis-Alexandre de La Rochefoucauld d’Enville. fig.3  Tesco, campagne de pub Tesco et Cheil Worldwide qui finira par être un concept de supermarché permanent fig.4  Vision Google Glass, source Google image

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fig.3

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en plus utilisés par tous. La vulgarisation de leur l’utilisation montre bien le besoin de s’exprimer et de se faire voir. Il semble impensable de vivre aujourd’hui sans adresse mail ou compte sur l’un de ces réseaux. Nous passons de plus en plus de temps a communiquer par le biais d’internet. Il devient presque plus facile d’exprimer son opinion sur internet, comme si l'impact y était supérieur à un débat public traditionnel. Un réseau comme YouTube a également permis à «  monsieur tout le monde  » d’atteindre son objectif : voir ses rêves se réaliser comme la publication d’un album ou même d’un travail par des CV vidéo. Ce nouvel outil permet de se faire connaître et d’exister autrement dans la société. Bien que la qualité de ces vidéos amateur ne soit pas forcément bonne, l’effort et la créativité sont parfois payantes. En parallèle de YouTube les sites d'autofinancement permettent de se développer grâce à la communauté et non plus grâce aux banque et aux labels. Ces médias offrent une rapidité de diffusion qui attire. Une information au bout du monde nous est transmise dans la minute où que nous soyions. Certains réseaux se sont créés grâce à cette rapidité tel que Snapchat22 qui ne garde l'information que quelques instants. Cette manière instantanée de communiquer efface les distances. Notre société en réaction à cette hyper-communication demande de plus en plus de lieux réels de rencontre. Nous voulons communiquer a distance mais cela ne remplace pas le contact physique et la discussion de personne à personne. Un lieu qui réunit échanges virtuels et réels semble de plus en plus indispensable dans notre société. Nous pouvons parler de sujets sur internet que nous n'abordons pas forcément au quotidien. Mais cela est il lié à notre rythme de vie ou seulement au un manque d’opportunités  ? Le musée de La Gaïté lyrique, sur l’art numérique, montre bien notre envie de concrétiser ce que nous voyons rapidement sur internet. Les lieux d’interaction ne manquent pas dans la ville mais ne cherchons nous pas une nouvelle manière de communiquer  ? Un lieu qui nous permettrait de réagir physiquement à ce qui est posté sur le net, pourrait permettre à tous d'utiliser ce nouveau mode de communication qui n'est pas toujours compris. Avons nous besoin d’avoir un smartphone pour interagir sur la toile  ? Ce lieu serait entre place publique et centre de formation permettant des échanges «  réels  » et «  irréels  ».

22.  Snapchat : Réseau de partage vidéo ou photo qui ne reste seulement quelque seconde sur le serveur cela permet de transmettre un information instantanée sans la garder. http  : //www.snapchat.com

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Citoyenneté 2.0 Il y a quelques années ne pas avoir de carte bleue nous mettait en marge de la société comme non habilité à faire partie de la ville et de ce qu'elle peut offrir. Mais ne sommes nous pas passés dans une nouvelle forme de citoyenneté  : celle d’internet, représentation de notre monde international. Nous parlons de lien entre des personnes. Internet est la représentation même de la connexion inter-pays, une connexion à la «  ville-monde  ». Aujourd’hui, nous ne pouvons pas vraiment exister sans adresse e-mail. Cela signifie que nous nous inscrivons dans une citoyenneté qui ne se restreint pas aux limites de notre pays mais bien à celle du monde. Cette perspective change totalement les possibilités d’un lieu d’interaction entre numérique et lien social. Là est aussi la difficulté de notre époque comment vivre dans notre ville reliée au monde. Nous voulons utiliser internet seulement à titre personnel mais nous allons toucher plus de monde que l’on peut imaginer. On peut donc penser que nous avons deux citoyennetés celle qui dépend de notre pays et l’autre 2.0 qui dépend du monde. En parallèle de cette nouvelle citoyenneté c'est toute notre manière de consommer qui change. Le développement des informations en «  Open source  » favorise l'échange à la manière d'une économie basée sur le troc plutôt que sur le modèle actuel. Le principe de «  l'Open source  » est en premier lieu caractéristique des logiciels dits «  code à source ouvert  ». Ce système permet de développer un projet par une communauté. Il évolue grâce à la participation de tous les utilisateurs qui peuvent selon leurs connaissances améliorer le logiciel. Suite au développement de «  l'Open source  » un nouveau type de licences de partage s'est créé «  les Créative Communs  » (CC). Cette licence basée sur le même principe que l'open source propose de partager tout type de support sous une licence contrôlée. On peut trouver plusieurs conditions à cette licence  : - BY  : obligation de nommer le premier créateur ( obligatoire en france) - NC  : Non commerciale - ND  : Non deritive works  : interdiction de ne pas utiliser l’œuvre en entier - SA  : Share alike  : réutilisation de l’œuvre dans une autre qui porte les mêmes conditions

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En lien direct avec «  l'Open source  », et «  les Créative Communs  » depuis quelques années le développement des imprimantes et logiciels 3D permet au plus grand nombre un accès à ces technologies. Le principe même de notre manière de consommer pourrait en être bouleversé. Cette technologie pourrait remettre en cause la délocalisation offrant à l'artisanat et à l'industrie de nouvelles opportunités. Elle permet de créer des projets personnalisés qui ne dépendent plus du nombre d'exemplaires mais seulement du coût de la matière première. Bien que l'open source alliée à l'imprimante 3D remette en question la notion de propriété intellectuelle, il nous offre la possibilité de repenser toute notre économie. Les premiers développeurs de cette technologie se répandent aux États-Unis et en Europe. Au État-Unis on a développé les machines de manière industrielle mais en Angleterre ils ont choisi de rester sur le principe de l'open source en mettant les plans d'une imprimante à disposition sur internet et proposant une machine capable de réaliser 60% de ces pièces. Bien que cette technologie soit aujourd'hui encore limitée elle offre de nouvelles possibilités chaque jour.

fig.5  FABLAB concept — Imprimante 3D, espace, schéma du concept, logo —

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fig.5

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Contribution L'activité associative de Belleville l'une des plus importante de Paris. Elle n'est pas indépendante d'une grande force coopérative entre les habitants de ce quartier. Les coopératives en France sont très développées dans différents secteurs. Dans le domaine de l’architecture il y a une différence entre une coopération dans un lieu (architecture participative) et une coopération pour un lieu (un lieu participatif).

COOPERATIVE «  Coopération  : n.f. Action de coopérer. // Méthode d'action par laquelle des individus ou des familles ayant un intérêt commun constituent une entreprise où les droits de tous sont égaux, et où le projet réalisé est entre les seuls associés au prorata de leur participation de l'activité sociétaire.»  Larousse trois volumes, ed. Larousse, 1976

Les coopératives se présentent sous différentes formes ou du moins dans différents secteurs d'activités. En France et en Angleterre, elles débutent sous la forme économique dans le cadre d'associations populaires. Elles se développent alors dans d'autres secteurs notamment l'agriculture (1884), commerce de détail (1883-1885), pèche (1913), et enfin dans la construction et le logement (1920). Elle est également appliquée en Géopolitique avec des accords entre pays (ex  : Europe). Le mouvement coopératif s'est développé au xixe siecle en Europe. Il est au départ un mouvement ouvrier qui permet d'accéder à une entraide et à des formations. Il débouche alors sur l'associationnisme en 1848, qui tend à créer des petites républiques communautaires indépendantes. Il ne se transforme en mouvement économique et social qu’après la première guerre mondiale. L'idée devient utopique à cette époque en prônant une république Coopérative. Bien que son développement ait pris de la force et que les coopératives se développent dans tous les pays, le mouvement perd de sa notion utopiste après la seconde guerre mondiale. Les coopératives se rationalisent et s'éloignent de l'idéologie de base devenant un statut plutôt qu'un concept.

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Bien que l'on observe un grand développement encore aujourd’hui des coopératives, il semble qu'elles n'ont pas conservé leur idéal de départ qui était de permettre un développement économique et social de leurs membres. Il semble aujourd'hui intéressant de repenser à l'idéologie de départ comme à un renouveau dans une société qui change. Les modes et les mœurs évoluent. Nous voyons des utopies revenir puis disparaitre mais si nous prenons en compte les conjonctures actuelles, nous nous devons de trouver une solution qui permette à la fois un redressement économique et une cohésion sociale et qui puisse servir la ville et ses habitants. C'est pourquoi il semble approprié de s'intéresser à ce type de fonctionnement. Une Coopérative au cœur d'un quartier peut permettre une union au sein de celui-ci et un développement économique dans des quartiers touchés par le chômage. Un projet permettant des échanges de service et d'apprentissage semble un bon moyen de dynamiser et favoriser un quartier. Car la question ici est bien une évolution et une modernisation d'un quartier populaire mais dans un sens social. Le but est de favoriser les personnes habitant le quartier, en leur offrant une opportunité de faire évoluer leur milieu de vie.

L'architecture participative L’architecture participative est en voie de développement dans plusieurs pays. De plus en plus de projets sont initiés pas les habitants ou les propriétaires plutôt que par des promoteurs immobiliers. Ce lien direct avec les futurs utilisateurs permet de créer des projets en accord avec leurs souhaits. Le principe de l'architecture coopérative est souvent relié à une volonté de projet écologique à tous les niveaux  : Social, Economique et Environnemental. On peut rapprocher ces projets de la notion d'écologie que décrit Félix Guattari23, Il décrit en effet une expérience alternative portée par une singularité, une production subjective associée à une autonomie tout en favorisant un lien avec la société. La plupart des projets coopératifs sont basés sur cette envie de favoriser le lien social tout en permettant une économie de coût et de matière en s'intégrant dans un environnement donné. 23  Félix Guattari, Les trois écologies, 1989, éd. Galilée

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Ce type de projet dans l'idéal tend à être en accord avec une politique de renouvellement urbain. Cet objectif est lié à la volonté de faire de ce lieu un centre de vie sociale qui puisse s'étendre au quartier. Le développement de ce type de construction, souvent associé au logement, a suscité une réglementation en ce qui les concerne et un encouragement politique. Le plus souvent ces projets, lorsqu’ils sont promus par les autorités, comme en Allemagne sont là pour lutter contre la gentrification. Mais comme on peut le constater la réhabilitation du quartier de Helmholtzplatz à Berlin montre que malgré les tentatives de préservation des habitants, la hausse du foncier due à cette rénovation n’a pas totalement permis la sauvegarde de ce quartier populaire

lieux participatif En parlant de la notion de «  participatif  », j'entends par là un lieu qui offre une participation des usagers et non pas un lieu engendré par une coopération comme c'est le cas dans l'habitat participatif. L'architecture est trop souvent considérée comme réservée à un seul et même programme pérenne dans la ville. Mais elle doit permettre une évolution, un changement de cap, car bien qu'elle fut élaborée dans certaines conditions les besoins d'une ville changent. L'architecture doit donc évoluer en fonction de ces besoins nouveaux. Elle doit dialoguer avec les usagers et leur permettre d’interagir. Ici le souhait est de créer un lieu de participation populaire pour impliquer les usagers dans son utilisation et l'évolution de cet espace, pour qu'il devienne un lieu de vie. Un espace entre mi-privé et place publique se doit de permettre l’interaction entre l’intérieur et l’extérieur mais également au sein même de chaque espace. Une possibilité d’interaction doit rester visible. Un lieu d’interaction est souvent associé à des programmes tel que les cafés ou les marchés mais également aux amphithéâtres, bien que ces derniers soit plus voué à des interactions entre orateurs et public. Réhabiliter un lieu inscrit dans un quartier est important, il permet de rassurer les usagers. Cela permet également de s’inscrire directement dans le tissu déjà présent dans le quartier.

fig.6, 7 et 8  Air tree commons, premier projets d'achitecture CC shangai, madrid pavillon, ecosistema urbano, 2010.

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fig.6

fig.7

fig.8

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Rue de la Miroiterie

Pour intégrer un lieu qui permette à la fois l'échange et l'opportunité de créer, il semble important que la Miroiterie soit traitée en partie comme un espace public. Le site permet l'ouverture sur la rue Boyer et la rue Ménilmontant. Mais en prenant en compte l'ancienne implantation de l'usine de la miroiterie, on peut retrouver un lien direct avec le jardin adjacent et la rue Juillet grâce à une connexion avec les logements sociaux. Cette implantation permettrait la création d'une rue. Les différentes parties de celle-ci devraient inclure un passage constant entre la rue Boyer et la rue de Menilmontant et protéger l’accès direct à des logements la nuit. Au delà d'un lieu public, la Miroiterie doit apporter un service à ce quartier. C'est pourquoi le projet ne doit pas être seulement limité à une rue mais également à un bâtiment permettant l’apprentissage et la création. L'échange se transmettra à l’intérieur d'une autre activité, sur le principe des «  FABLAB  ». Ce programme permettra de redonner une particularité économique au quartier  : l'artisanat moderne. Le bâtiment doit être traité de manière à conserver l'histoire du lieu mais également être en accord avec sa nouvelle fonction  : fabriquer et transmettre. Ce lieu doit attirer les habitants du quartier et des alentours, en plus d'un accès direct et ouvert, il doit être visible. Le Fab-Lab faisant partie des programmes de Créative communs, il me semble important d’inscrire ce programme dans ce type de licence. En effet pour faire de la miroiterie un prototype, quoi de mieux que d'inscrire son architecture et sa programmation dans un label Open source. La miroiterie ne tend pas seulement à être un lieu public mais bien un lieu populaire où l'opportunité de s’exprimer dans la rue sera possible, replaçant le lieu public comme lieu d’expression de la vie quotidienne. En mettant cette rue au cœur du quartier entre le haut et le Bas-Belleville cet interstice reprendra sa place dans la ville qui l'avait rejeté.

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UN QUARTIER

M

S

DES HABITANTS

DES COMPÉTENCES

UNE COOPÉRATION SOCIALE

R 77


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1 2 3 4 5

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Pour cela le projet conservera la caractèristique du lieu  : En proposant un bâtiment en rez-de-chaussée sur la façade coté rue de Menilmontant. La façade aujourd'hui servant de revendication pour le squat, il gardera cette particularité pour favoriser la participation à un tel projet. La façade sera donc traitée comme le miroir du lieu.

Il sera un lieu ouvert et propice à l'échange  : Il doit également offrir des espaces ouverts de travail et un visuel constant entre toutes les entités du projet.

Il sera une coopérative  : En parallèle de ces espaces, le projet sera basé sur un système de coopération pour permettre un libre échange et sur le système open source des Fab-Lab.

L'architecture intégrera le lieu à son histoire et son avenir: Dans l'objectif de faire de la miroiterie un prototype l'architecture sera basée sur une construction simple et en module permettant l'évolution et la copie du projet. Ce «  module  » s'inscrira au cœur de l'architecture déjà présente dialoguant entre espace ajouté et partie existante rénovée.

Offrir une nouvelle industrie  : Fablab. Pour que la miroiterie prenne sa place aussi bien dans le quartier que dans la ville, elle doit s'inscrire dans un projet en développement telle une «  usine  » de fabrication 3D. Grâce aux recherches de ses membres elle pourra enrichir le concept du Fablab tout en favorisant l'activité du quartier.


MIROITERIE

SQUAT

RUE - COOPERATIVE

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Conclusion

La ville de Paris est frappée par un phénomène que l’on peut observer dans la plupart des grandes villes, la gentrification ou plutôt le recul des quartiers populaires. Partant de cette constatation, je me suis concentrée sur l’apport de ces quartiers dans la ville. La particularité sociale de ces quartiers plutôt que leur économie (bien que cette part ne soit pas négligeable) n’est pas au cœur de mes recherches et réflexion. La vie dans les quartiers populaires est plus active que dans d'autres. Lorsque l’on veut définir cette « ambiance » de quartier, on se doit de définir «  l’espace populaire  ». Il est difficile à définir car il dépend à la fois de l’espace qu’il offre pour permettre de se rencontrer, de se regrouper. Il doit être de taille suffisante et disposer d’équipements offrant la possibilité d’y rester. On ne peut pas seulement dessiner un espace populaire puisqu'il dépend également du facteur temps. Il se définit lui même de cette manière grâce à l’utilisation que l’on en fait et de comment il est investi. Grâce à l’appropriation des usagers, un espace public devient un espace populaire. L’espace populaire ne garde pas ce titre indéfiniment, il peut le perdre dès lors qu’il se déserte où qu’il perd son activité quotidienne. Comment puis-je alors définir mon projet comme espace populaire  ? Cela ne se confirmera qu’à sa création mais plusieurs éléments peuvent permettre qu’il devienne le cœur du quartier et un lieu de regroupement. Ce lieu d’échange n’a plus le même rôle dans nos villes car nous nous sommes éloignés de cette communication populaire, notamment avec le développement des moyens de communication parallèles à ceux de la parole qui, bien qu’ils offrent des lieu populaires, ils n’ont pas de site à proprement parler. Mais ne serait-il pas possible de combiner à la foi un échange «  face to face  » avec des échanges virtuels  ? Un lieu qui permettrait d’enrichir les connaissances, et les discours dans la ville mais aussi par le biais de réseaux. L’innovation et l’entraide sont toujours issues des quartiers populaires. Si nous ne prenons pas en compte l’importance d’une telle dynamique dans une ville nous

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I/ LE REFLET D’UNE VILLE EN EVOLUTION

tendons à créer une ville musée qui devient un haut lieu touristique sans autres mouvements que celui des «  bancs  » de touristes. En les mettant en valeur pour leur cause mais aussi par leur innovation dans le domaine de la communication et de la diffusion, ils reprendront leurs places dans la ville moderne. De nouvelles manières de vivre se développent prônant une économie basée sur l’échange et l’entraide. Quel meilleur lieu qu’un quartier populaire comme Belleville pour l’expérimenter  ? On y voit fleurir des coopératives de toutes sortes tantôt prônant la réutilisation d’objets, tantôt celui du troc de service ou encore l’accès à une marchandise de bonne qualité à moindre coût. Toutes ces activités parallèles alliées au développement des réseaux dit «  sociaux  » montrent que nous pouvons commencer à croire en une nouvelle manière de vivre. L’individualité ferait partie de la masse pour accéder à des connaissances ou à un milieu de vie plus en accord avec ce que l’on veut réellement réaliser (un épanouissement personnel grâce à la collectivité en quelque sorte). Ce système peut nous amener à affronter les problèmes économiques et à envisager autrement une manière de vivre qui semble a bout de souffle. Une coopérative pourrait être au cœur d’un quartier tel un espace populaire permettant plus qu’une simple discussion entre amis, de développer ses connaissances et ses idées autours différents sujets. Elle pourrait aussi permettre d’obtenir un travail grâce à de nouvelles connaissances échangées avec notre voisin de palier ou tout autre personne rencontrée dans la ruelle au dessus de chez soi. La vie présente dans les quartiers populaires peut être une opportunité pour apporter de la modernité et une nouvelle manière d’anticiper la ville et les échanges. La miroiterie pourrait devenir un lieu d’expérimentation d’un nouveau modèle économique et social. Ce lieu qui vient de fermer ses portes était un lieu alternatif permettant d’offrir des locaux à des musiciens et à des artistes. Il rouvrira en un lieu alternatif pour le quartier, utile pour les habitants renforçant ainsi le quartier de Belleville et créant une rue entre Belleville et Ménilmontant pour affirmer leur force au cœur d’une des dernières poches populaires parisiennes.

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Bibliographie

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Média ouvrage  : Kurzweil Ray, Humanité 2.0  : la bible du changement,ed.- M21,«  essais document  », Paris, 2007, 643 pages film documentaire: MARK Achbar, PETER wintonick (réal.-), Noaw Chomsky, les médias et illusions nécessaires, 1993.

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Squat film documentaire: Cristophe COELLO, Squat la ville est à nous, 2011.

social ouvrage  : Gordon CULLEN, The concise of townscape, ed.- Reprint, 1994, 200 pages Di Méo Guy & Bulléon Pascal,L’espace social  : lecture géographique des sociétés, ed. Armand collin, Paris 2005, 204 pages

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Liste des Figures

UNE Histoire populaire P16 — fig.1  : schéma de la reconstruction de la ville d'Ur, source  : https  : // sites.googles.com/site/classe130; fig. 2  : schéma, plan de la ville de Grand (france) et son pomerium, source  : http  : // www.romanaqueducts.info/; P.21 — fig. 3  : extrait du plan de métro parisien, source  : RATP.fr  ; fig 4  : MOULIN Nicolas, exposition «  vider Paris  », source  : http  : //www.galeriechezvalentin.com  ; P26 — fig. 6 VITO, la gentrification en trois étapes, sources  : http  : //sansdessin. canalblog.com  ; P31 — fig. 7 Carte réalisée par Anne Clerval (Géographie — cités) à partir d'un fond de plan APUR  ; P35 — fig. 8 Plan masse de l'île Seguin rives de seines Boulogne — Billancourt, source AAUPC  ; fig. 9 Projet de logement de la ZAC Boulogne-Billancourt, Vue interieur des logement, image de concours, Marciano Architecture, livrer 2014  ; fig 10 Projet de logement de la ZAC boulogne-Billancourt, Perspective extérieur, atelier Jean nouvelle, livrer 2011; P37 — fig. 10 de haut en bas, Photo du site après rénovation, 2010, Toronto, canada projet de Eric Pelletier Architects, livrer 2010  ; Image de rendu de concours pour la partie garde d'enfant, idem; Principe de façade, idem, source http://www. holcimfoundation.org/. Un Quartier populaire P. 41 — fig1 détail le baiser de l'hotel de ville, Paris, 1950 ; détail Be bop à saint germain des prés, Paris, 1951 ; fig. 3 Détail la concierge aux lunettes,1945 ; fig. 4 détail File d'attente devant un magasin d'alimentation, Paris, 1945 ; fig. 5 détail les écoliers de rue Damesme, Paris, 1956 , Robert Doisneau (tous) P.47 — fig. 10 de gauche à droite et de bas en haut  : Ateliers rue de Belleville, Paris, 2010, Audrey, source  : http://www.flickr.com/photos/afelix/4318974235/; Escalier à belleville, Paris, 2010,Ferdalangur.net, source  : https://www.flickr.com/ photos/ferdalangur-net; Belleville, Paris 2009, Manjushri, source  : https://www. flickr.com/photos/zhaowang  ; Paris, Parc de Belleville in a rainy days, 2010, Zikiarts, source  : https://www.flickr.com/photos/zikiarts  ; Mur Edith Piaf,Paris, Piaf13, 2013, loulougrafiti, source  : http://talent.paperblog.fr/6773751/mur-edith-piaf-a-paris/; 86


Rue de Belleville, Paris, France., 2011 Maris-Laure Even, source  : https://www.flickr. com/photos/48489192@N06  ; Belleville, Paris, France, 2003, Chelsea 101, source  : https://www.flickr.com/photos/94741416@N08  ; Belleville, Paris, 1984, Rojo56, source  : https://www.flickr.com/photos/rojo58  ; Belleville, Paris,2010, Mehdi ait Hammou, source  :https://www.flickr.com/photos/mehdi_aithammou  ; Belleville, 2012, Vincenzo Pisani, source  : https://www.flickr.com/photos/vincenzopisani. P.61 — fig. 9 Façade de «Chez Robert. Electron libre», 59, rue de Rivoli, à Paris. 2002, photo: paris-art.com; fig.10 Fresque végétal de Ikebarart, 59 rue de rivolie, Paris, 2012, Alain Delavie Miroir populaire P. 65 — fig 2, Terrasse de café la nuit sur la place du forum à Arles, Huile sur toile, 1888, Van Goth; P.67 — fig. 3 de haut en bas, Schéma du principe de course par QR code de Tesco, 2011, Tesco; Un magasin virtuel à Séoul dans le métro, 2011, Marco Derksen/Flickr; fig.4 à quoi ressemblera le monde à travers le Google Glass, source  : Ajit Balkawade, Wisestep.com  ; P. 71 — fig. 5 de haut en bas, imprimante 3D, source  : http://blog.pass.be/monsfablab-cherche-logo/, Projet de Green Fab-Lab, 2013, source  : http://betterymagazine. com  ; Concepte et logo des Fablab. p75 — fig. 6 banner air tree commons, Shangai, 2010,ecosista urbano, photo  : Emilio P. Doiztúa  ; fig. 7 évolution du projet air tree communs, http://ecosistemaurbano. org/francais/shanghai-air-tree-le-premier-projet-d%E2%80%99architecture-creativecommons/, fig. 8 un projet open source, air tree commons, franscesco, 2012 source  : http://www.immaginoteca.com/opensource/.

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polices utilisĂŠes: Fontin SANS minion pro




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