Alice Mortamet Licence 3
Rapport d’Etude Comment réactualiser la terre crue
dans l’architecture contemporaine?
Mur en pisé de la Rauch Residence / Martin Rauch Source: Architecture et Matériaux Editions Place des Victoires / LOFT Publication
UE06 - Parcours Personnel - Enseignant : Hervé Lequay Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Lyon - Année 2012-2013
Sommaire Préambule
p3
Introduction
p4
1. Pourquoi le matériau terre n’est-il plus utilisé et dans quelles mesures la terre n’a pas su répondre aux enjeux de l’architecture contemporaine ? 1.1. La terre face à l’industrialisation des techniques.
p 5-6
1.2. Une standardisation difficile.
p6
1.3. Une image faussée de la terre.
p7
1.4. Le retour progressif de la terre dans l’architecture.
p8
2. Comment peut-on adapter la terre aux méthodes de constructions contemporaines et faciliter sa mise en œuvre? 2.1. La normalisation du matériau terre.
p 9-10
2.2. Des techniques traditionnelles vouées à évoluer.
p 10-11
2.3. Le développement de techniques visant à adapter le matériau terre à la construction industrielle.
p 12-13
2.4. Une industrialisation controversée de la terre.
p 14
3. Comment exploiter les qualités matérielles de la terre afin de l’intégrer dans une architecture contemporaine ? 3.1. La terre : un matériau moderne.
p 15-17
3.2. Etude de cas : L’école de Veyrins-Thuellin.
p 17-19
Conlusion
p 20
Bibliographie
p 21
Annexes
p 22-32 2
Préambule Cet été, j’ai réalisé un stage en Argentine, où j’ai pu étudier des architectures en adobe et bois traditionnelles de la région de Salta. Cette expérience m’a permis de découvrir un matériau très peu utilisé en France, avec une multitude de variantes de mise en œuvre, et d’appréhender différents types de charpentes associées à ce matériau, ses qualités, ses défauts. A travers mes recherches, je me suis rendue compte que c’était un matériau très performant et capable de répondre aux performances actuelles en termes de développement durable. Je me suis donc demandée si les techniques traditionnelles étaient une solution ou du moins un axe de recherche intéressant pour les constructions futures. Devons nous retourner à l’utilisation de matériaux naturels et locaux, plutôt qu’à des matériaux industriels nécessitant une transformation très polluante, pour une architecture contemporaine et respectueuse de l’environnement ? J’ai choisi de me concentrer sur la terre crue en particulier, car c’est un matériau que j’avais déjà eu l’occasion d’expérimenter. De plus en étudiant cette filière, mon objectif était de comprendre comment peut-on réactualiser un matériau d’un point de vue technique et législatif, notamment à travers un travail de normalisation, mais aussi d’un point de vue esthétique et social, avec la volonté de concevoir des projets innovants en terre. Lorsque j’ai expérimenté la terre pour la première fois, je l’ai perçue comme une solution miracle, grâce à cette analyse je souhaite comprendre toute la complexité qui se cache derrière ce matériau. Mon objectif est d’abord d’explorer la matière terre, mais plus globalement de comprendre l’étendue du système de développement d’un matériau, et les problématiques que cela soulève. Ce sujet est également l’occasion d’approfondir un des grands enjeux de l’architecture actuelle : la recherche de matériaux éco-responsables, notamment par le retour à une logique de matériaux locaux. En effet, l’usage de la terre ou d’autres matériaux disponibles localement tel que la pierre est une des réponses majeures aux préoccupations environnementales de notre époque.
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Introduction La terre, par définition est simplement de l’argile, des graviers, du sable, de la vase ou d’autres sols friables dans lesquels des matières organiques peuvent exister. A cause de l’omniprésente disponibilité de sols appropriés, les bâtiments en terre peuvent être construits à peu près partout. Ce matériau comporte de nombreux atouts et peut être aussi performant que des matériaux contemporains, ce n’est pas seulement une technique traditionnelle comme on pourrait le penser, mais il comporte de réels avantages en terme de développement durable. En effet, la terre crue a de grandes qualités thermiques, par sa forte inertie, elle régule la température intérieure en retransmettant la nuit la chaleur accumulée le jour. La terre est un isolant naturel, qui ne nécessite pas d’ajout d’isolation, de plus il est très résistant aux écarts de températures. Outre ses qualités thermiques, la terre crue permet la régulation de l’humidité ambiante en captant et en restituant l’humidité de l’air en fonction de l’humidité ambiante. Par sa porosité, la terre est aussi un très bon isolant acoustique, elle a donc toutes les qualités requises pour assurer un confort de vie optimale naturellement. Au delà de ses qualités physiques, la terre est une ressource naturelle, abondante, omniprésente et renouvelable à l’infinie. C’est un matériau peu couteux, qui n’implique pas de transport important et donc peu d’émission de gaz à effet de serre. Enfin, la terre crue requiert peu d’énergie grise lors de sa mise en œuvre, car elle ne nécessite pratiquement aucune transformation. C’est donc un matériau local, économique, avec une grande performance thermique, et une empreinte écologique réduite. Malgré toutes ces qualités, la terre est un matériau qui a peu a peu disparu de l’architecture, particulièrement dans les pays industrialisés comme la France. Dans un premier temps mes interrogations se sont portées sur les raisons du déclin de l’architecture en terre, à travers l’analyse de l’évolution de la société et des méthodes de constructions, puis sur l’intérêt d’un retour de la terre dans l’architecture face aux préocupations actuelles. Ce travail étudiera ensuite comment adapter un savoir-faire traditionnel aux méthodes de constructions contemporaines en recherchant quel travail est effectué au niveau des normes et des techniques afin de faciliter la mise en œuvre de la terre et apporter une garantie aux maîtres d’ouvrage. Et s’interrogera sur les éventuelles dérives provoquées par les tentatives d’industrialisation de la terre. Enfin, cette recherche portera sur la manière dont les architectes vont exploiter les potentialités de la terre dans des projets contemporains par l’analyse de différentes réalisations et l’étude approfondie d’un projet réalisé dans la région Rhône-Alpes.
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1. Pourquoi le matériau terre n’est-il plus utilisé et dans quelles mesures la terre n’a pas su répondre aux enjeux de l’architecture contemporaine ? La terre crue est l’un des premiers matériaux de construction de l’humanité, elle est présente dans le monde entier et 30 pourcent de la population mondiale vit dans une habitation en terre. En France, plus d’un million d’habitions sont construites en terre. Cependant, à partir du 21ème siècle ce matériau tend à disparaître des constructions, ne semblant plus convenir aux normes architecturales contemporaines. Qu’est ce qui contextuellement explique que la terre ne soit plus appropriée à l’architecture actuelle? Quels changements dans notre manière de construire ont engendré ce phénomène ? Pourquoi après des années d’absence la terre tend à revenir dans les préoccupations architecturales actuelles ? Architecture de terre dans le monde :
Source : www.craterre.org
1.1. La terre face à l’industrialisation des techniques. Avec la révolution industrielle, nous sommes entrés dans une société visant la rentabilité, la performance et l’innovation. On cherche alors à développer des produits de masse dans la volonté d’une transformation économique et sociale. L’arrivée de la modernité, marque une rupture en s’opposant radicalement aux traditions. Lors des Guerres Mondiales, de nombreuses habitations ont été détruites, il faut donc reconstruire vite et peu cher. On va alors développer des matériaux modernes et efficaces tel que le béton ou l’acier, et mettre en place de nouvelles techniques de construction telle que la préfabrication, afin de répondre au besoin en logement. L’usage du béton, dont les techniques de mise en œuvre sont directement inspirées du pisé, devient un systématisme en opposition absolue avec les principes de l’architecture vernaculaire. On favorise alors une universalisation des techniques plutôt qu’une culture constructive locale. Enfin, à partir de 1918, l’architecture moderne est liée à l’idéologie d’un travail international et va tendre vers une certaine uniformité de l’architecture. On va donc peu à peu cesser d’utiliser la terre, qui ne répond plus aux demandes de la société. En effet, la terre, dans sa logique s’oppose radicalement aux principes de l’architecture moderne et internationale. La terre est un matériau largement utilisé dans l’architecture traditionnelle, pour sa disponibilité immédiate et le peu de moyens que nécessite sa mise en œuvre. Cependant dans les constructions traditionnelles ou l’auto-construction, la notion de rentabilité et de rapidité est absente. La terre ne correspond pas à cette demande, c’est un matériau très long à mettre en œuvre, qui nécessite un savoir-faire spécifique selon le type de terre utilisé, elle est donc difficile à exploiter, et coûte plus cher. Aujourd’hui, construire en terre est très couteux, environ quatre fois plus qu’avec du béton. 1 Par exemple, traditionnellement la technique du pisé consiste à coffrer la terre par couche d’environ dix centimètres d’épaisseur. Lorsque l’on sait qu’ un mur en béton peut être coulé d’une seule traite, pourquoi s’embêter à construire en terre ?
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Cf Annexes : Techniques de construction en terre.
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La terre dans le rapport étroit qu’elle entretient avec le site, entre en contradiction avec l’uniformisation des techniques et au systématisme que cela engendre. Depuis la modernité, on utilise principalement du béton, dans n’importe quelle situation. L’idée de matériaux locaux ou de construire avec ce que l’on a sur place n’existe plus, dans le sens ou tous les matériaux sont accessibles, on peut donc très bien construire une maison en Sibérie avec du bois venant d’Equateur. L’idée de ressource locale n’est plus d’actualité. Enfin, chaque terre étant différente, il est difficile de tendre vers une universalisation des techniques avec ce matériau. Chaque terre a sa propre logique, avec une esthétique propre à chaque région, dans ce sens elle est en totale contradiction avec les dogmes de l’architecture moderne.
1.2. Une standardisation difficile. Le processus de la terre crue commence par la sélection du sol. Le sol utilisé pour créer de la terre crue doit avoir les bonnes proportions de sables, graviers, et d’argile pour garantir la cohésion, la stabilité et la force du mur. Traditionnellement, la terre dans la construction était directement prélevée sur le site, humidifiée, et compactée avec peu de considération pour sa composition précise. Les constructeurs traditionnels avaient trouvé de nombreuses manières d’adapter la matière terre aux conditions locales en y ajoutant des branches, de la paille, ou de l’eau pour éviter les fissures et améliorer la cohésion et la durabilité de la matière. Aujourd’hui les techniques traditionnelles de mise en œuvre ont été perdues et les pays soumettent les matériaux à des normes de constructions exigeant d’atteindre des performances toujours plus hautes. Les experts cherchent alors à déterminer les quantités requises de chaque élément du mélange afin de construire des structures en adéquation avec les normes actuelles. Cependant, la composition variable des sols rend difficile la standardisation du matériau terre et les opinions diffèrent concernant la formule la plus adaptée à la création d’une structure en terre. Diversité des terres :
Toutes les terres sont différentes, et comportent des caractéristiques spécifiques, une étude préalable est donc nécessaire avant chaque projet pour évaluer la matière afin de choisir quelle technique de mise en œuvre adopter. L’adaptabilité du matériau, lui a permis de répondre à une large variété de contextes, cultures et époques différentes. Durant des milliers d’années, les constructeurs partout dans le monde ont compacté le sol afin de créer des structures solides avec de simples outils et la force de l’homme, donnant lieu à quelques-unes des plus belles merveilles du patrimoine architectural mondial. Cette diversité permet à la terre une grande capacité d’adaptation et de types de mise en œuvre donnant lieu à une étonnante variété d’architectures, néanmoins elle rend la standardisation de la matière pratiquement impossible. Chaque construction en terre a sa logique, les techniques sont toujours différentes selon les projets, ce n’est pas comme le béton. « Selon les régions, la terre est adaptée à une technique spécifique, aujourd’hui on ne construit presque que en pisé, alors que ce n’est pas toujours la technique la plus adaptée. En Bretagne par exemple, la 2 technique de la bauges fonctionne beaucoup mieux avec la terre du 3 site. » Juliette Goudy, chercheuse CRATerre . Cette variété de composition bloque l’usage de la terre dans l’architecture contemporaine, il faut donc faire reconnaître la terre au niveau des normes, à travers un processus très complexe qui vise à établir un savoir scientifique sur le matériau afin d’édicter un protocole. La terre crue est utilisée depuis la nuit des temps et ce n’est pas tant la technique qui manque, mais réellement sa normalisation.
Source : Bâtir en terre Auteur : Laetitia Fontaine et Romain Anger 2
Cf Annexes : Techniques de construction en terre. Cf Annexes : Interview CRATerre.
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1.3. Une image faussée de la terre. La terre, par son caractère omniprésent est un matériau accessible à tous, abondant et gratuit. Etant généralement les seuls matériaux disponibles sur place, les matériaux locaux, tels que la terre, sont propices à la construction d’habitats d’urgences ou à l’auto-construction. C’est pourquoi une grande partie de la population mondiale vit dans des habitats en terre, tout particulièrement dans les pays en voie de développement. Le caractère banal et abondant de la terre est l’une de ses qualités principales et permet une grande diversité technique et culturelle dans les constructions. Cet atout est à double tranchant, car il engendre une vision négative de la terre de la part des acteurs du bâtiment, percevant la terre comme un matériau pauvre et sans valeur. C’est un matériau simple qui nécessite très peu de transformations et que l’on trouve beaucoup dans les constructions vernaculaires. De ce fait, la terre est associée à la pauvreté, à une matière première peu évoluée et sans esthétique contemporaine. Pourtant la terre ne sert pas qu’à construire des habitats individuels primitifs. Quelquesunes des plus grandes prouesses architecturales au monde sont construites en terre et elle constitue environ 20 pourcents du patrimoine architectural et urbain inscrit au patrimoine de l’Unesco. Ville de Shibam au yemen :
Les bâtiments en terre sont généralement perçus comme utilisés par des populations pauvres, se trouvant uniquement dans des pays en voie de développement ou en milieu rural. Pourtant on peut trouver des constructions en terre de divers types architecturaux, utilisées par toutes sortes de classes économiques et sociales, partout dans le monde. Il existe aussi bien des infrastructures de transport, telles que l’aéroport de Seyoun au 4 Yemen , que des bâtiments scolaires, tels que le campus de l’université Charles Sturt de Marci 5 Webster Mannison en Australie , que des édifices culturels ou religieux, tels que l’église protestante de la réconciliation de Reitermann et Sassenroth en 6 Allemagne ou le centre culturel du désert NK’MIP 7 au Canada de Bakker Boniface Haden Architects . Enfin, la terre peut donner l’impression d’être un matériau fragile et éphémère, cependant certains des plus vieux bâtiments au monde sont construits en terre. Notamment une partie de la grande muraille de Chine datant de plusieurs millénaires 8 ou la ville de Shibam au Yemen , datant du 16ème siècle et construite dans un environnement hostile, avec que très peu de moyens, elle constitue l’un des plus anciens exemple d’urbanité verticale au monde.
Source : Magazine Ecologik n°12 / Décembre 2009 - Janvier 2010
« Pour le DSA, j’ai travaillé sur un projet en Chine, où les habitants ne veulent plus utiliser la terre parce que cela fait pauvre. Le but était de leur montrer de nouvelles techniques d’utilisation de la terre, notamment par l’utilisation de banches à béton, pour leur montrer l’aspect moderne de la terre et 9 qu’elle peut être utilisée comme du béton. » Hugo Gasnier, chercheur CRATerre . La terre est donc communément assimilée à un matériau traditionnel ne pouvant être utilisé de manière contemporaine. C’est le défi que les architectes vont devoir relever en exploitant la matérialité de la terre de manière innovante afin de lui redonner l’image d’un matériau contemporain au même titre que le béton, le bois ou l’acier. 4-8
Cf Annexes : Bâtiments et projets cités. Cf Annexes : Interview CRATerre.
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1.4. Le retour progressif de la terre dans l’architecture. Actuellement, bien que la production architecturale tende à s’internationaliser sans se préoccuper des qualités spécifiques de chaque lieu. On assiste à une prise de conscience liée aux préoccupations environnementales, notamment dans le secteur du bâtiment, l’un des principaux émetteurs de gaz à effet de serre. On redécouvre des matériaux tels que la terre, qui par ses performances énergétiques, sa disponibilité, et sa faible empreinte écologique, aussi bien lors de la phase de transport que durant la mise en œuvre, remplit toutes les attentes en matière de développement durable. En ce sens, la terre pourrait représenter une réponse aux enjeux de l’architecture actuelle. Par l’intérêt qu’elle suscite d’un point de vue environnemental, et le travail de différents acteurs, la terre tend à réapparaitre dans des projets de construction contemporains. Affiche et livre de l’exposition «Ma terre première»
Ce regain d’intérêt connaît une avancée significative à partir des années 1980, au moment où la terre est pratiquement oubliée des constructions. Cela commence en 1979, par 10 la création du groupe CRATerre , constitué d’une équipe multidisciplinaire luttant pour l’intégration de la terre dans la construction contemporaine. L’action de CRATerre est primordiale pour la reconnaissance du matériau et la transmission d’un savoir faire technique, notamment par la publication d’ouvrages tels que « Construire en Terre » en 1979, puis du « Traité de construction en terre » de Hugo Houben et Hubert Guillaud, en 1989. De plus, une série d’expositions sont mises en place, une première organisée par Jean Dethier, architecte urbaniste, en 1981, au Centre Pompidou, intitulée « Des architectures de terre ». La seconde, à la Cité des Sciences en 2009, nommée « Ma terre première : pour construire demain » et accompagnée du livre « Bâtir en terre » de Laetitia Fontaine et Romain Anger. Enfin, le laboratoire CRATerre crée une formation spécialisée sur 11 la terre, le DSA « Architecture de terre » qui fait aujourd’hui parti de la chaire UNESCO« Architecture de terre, cultures constructives et développement durable ». De nombreux groupes se sont ensuite crées, afin d’agir pour la propagation du matériau terre dans l’architecture. Malgré les démarches entreprises et les nombreux atouts de la terre, le processus de développement de la filière est complexe et le travail de réactualisation de la terre va se jouer à différentes échelles. D’abord par le développement de nouvelles techniques de mise en œuvre afin de l’adapter aux méthodes de construction industrielles. Puis dans la mise en place d’un protocole scientifique visant à faire entrer la terre dans les normes actuelles et lui donner une garantie. Enfin par la conception de projets architecturaux contemporains et pensés de manière intelligente dans le but de faire entrer la terre dans les mœurs. Face à un tel cahier des charges, on peut se demander qu’est-ce qui est mis en œuvre afin de développer des techniques modernes de construction en terre crue ?
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Cf Annexes : Acteurs de la filière terre. Cf Annexes : DSA Architecture de terre.
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2. Comment peut-on adapter le matériau terre aux méthodes de constructions contemporaines et faciliter sa mise en œuvre? Afin de comprendre le processus de réactualisation du matériau terre, mes interrogations se sont d’abord portées sur l’aspect technique et scientifique du développement de la filière. Quel travail est effectué pour rassurer les maîtres d’ouvrage et les bureaux de contrôle ? Quelles sont les techniques traditionnelles existantes et quelles possibilités d’innovations offrent elles? Comment la terre peut-elle être utilisée de manière industrielle ? Enfin à quelles dérives la filière terre est exposée par cette recherche de propagation et d’optimisation du matériau? Pour répondre à ces questions, la lecture d’ouvrages portant sur les techniques de construction en terre n’était pas suffisante. J’ai donc rencontré quatre 12 architectes, chercheurs du groupe CRATerre travaillant sur l’amélioration de la filière terre au travers des normes et les techniques, pour me renseigner concrètement sur les avancées actuelles. J’ai choisi le groupe CRATerre, car c’est l’un des acteurs les plus important du développement de la terre, de plus leurs recherches portent autant sur l’optimisation des techniques que sur l’aspect législatif.
2.1. La normalisation du matériau terre. Laboratoire CRATerre : Analyse de la terre
Photographies : A.Mortamet
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Cf Annexes : Interview CRATerre.
Le développement de la terre passe avant tout par la mise en place d’une législation, car tant que la terre ne bénéficiera pas d’un cadre règlementaire garantissant son utilisation, elle n’aura aucune crédibilité au niveau du marché de la construction. Actuellement le laboratoire CRATerre travaille sur l’élaboration d’un protocole, afin de demander une Appréciation Technique d’Expérimentation (ATEX) auprès du Centre Scientifique et Technique du Bâtiment (CSTB). Dans un premier temps, la démarche vise un ATEX de type A, et concerne exclusivement la validation de la technique du pisé, traditionnelle ou mécanisée. Ce document décrit en détail les différentes caractéristiques de la terre et les règles de mise en œuvre du matériau, notamment en terme de sécurité et de durabilité du bâtiment. Les éléments techniques sont renforcés par des exemples d’architecture en terre. La réponse du CSTB sera connue courant 2013, si le dossier est validé, il permettrait d’apporter une réelle garantie auprès des maîtres d’ouvrage et des assureurs et constituerait une nette avancée pour la filière. « Ce texte fera référence au niveau international puisque nous formalisons cette technique pour la première fois » Patrice Doat, co-fondateur du groupe CRATerre. Cette démarche ne serait qu’une première étape à l’acceptation du matériau terre par les marchés publics. En effet, il faudrait ensuite établir des règles professionnelles pour tous types de construction en terre crue, afin d’éviter une étude préalable avant chaque projet.
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Parallèlement, l’Asterre , Association Nationale des Professionnels de la Terre crue, et le Ministère de l’Ecologie, du Développement Durable, des Transports et du Logement (MEDDTL) ont entrepris la mise en place de règles professionnelles. Cette démarche s’effectue par la réalisation d’une étude nationale visant à répertorier l’ensemble des techniques de construction en terre crue. Cette enquête permettrait d’instaurer un cadre règlementaire et de valoriser les compétences techniques des professionnels de la terre, afin de légitimer son usage dans la construction. Bien que la situation évolue, la structuration de la filière et des procédés de mise en œuvre pour faire entrer la construction en terre dans la législation est d’une grande complexité. Cette difficulté est renforcée par la multiplicité des techniques et le besoin de faire évoluer un savoir faire traditionnel basé sur l’expérimentation.
2.2. Des techniques traditionnelles vouées à évoluer. Il existe une multitude de techniques de construction en terre, ces différentes méthodes de mise en œuvre dépendent du type de terre utilisé et de la teneur en eau qu’elle contient. Chaques techniques ayant sa propre logique, il est nécessaire de comprendre comment elles fonctionnent traditionnellement avant d’étudier les innovations actuelles. Outil traditionnel du pisé : Le Pisoir
Outils modernes : Fouloir pneumatiques
Source : Bâtir en terre Auteur : Laetitia Fontaine et Romain Anger
Le pisé consiste à couler de la terre humide dans un coffrage, et l’étaler
à l’aide d’un « pisoir » pour former de fines couches successives. La terre utilisée peut être granuleuse et relativement fine, à condition de ne pas contenir trop d’argile afin de ne pas se fissurer lors du séchage. Cette méthode donne lieu à des murs épais, monolithiques, généralement rectilignes. Les strates apparentes dessinées lors du compactage offrent une texture et une finesse esthétique très recherchée par les architectes. Le pisé étant assez long à mettre en œuvre, il ne correspond pas à la demande de rapidité et d’efficacité de la construction industrielle. A cause de la poussée horizontale de la terre lors du compactage, il est nécessaire d’appliquer des couches de 10 à 20 cm d’épaisseur, elle ne peut donc pas être coulée aussi rapidement que du béton. La mise en œuvre du pisé a beaucoup évoluée, notamment grâce à l’utilisation d’outils issus de l’industrie du béton. La terre est aujourd’hui compactée avec des fouloirs pneumatiques, les coffrages se sont diversifiés, et grâce à de nouvelles machines telles que le godet malaxeur, on peut homogénéiser la terre en réglant sa teneur en eau et en la malaxant. L’utilisation des outils de mise en œuvre du béton, permet de rapprocher le pisé des techniques industrielles et de rendre sa production plus rapide et efficace. Le pisé est très répandu dans les projets contemporains, car c’est la méthode la plus adaptée à la production industrielle.
La bauge est un empilement de boules constituées d’un mélange de terre à l’état plastique et de fibres
végétales afin d’édifier des murs massifs, monolithiques, proches des murs en pisé. La mise en œuvre se fait généralement à la main, elle nécessite donc très peu d’outils. La terre à bauge doit être relativement fine et argileuse, sans cailloux ni graviers afin d’être malléable. Les mur sont constitués d’une succession de couches, la terre étant à l’état plastique lors de son édification, il faut attendre qu’elle sèche, sinon la terre risque de s’affaisser sous un poids trop important. Le temps d’attente entre deux strates peut parfois durer plusieurs semaines, la mise en œuvre est donc très longue. La technique de la Bauge a assez peu évolué malgré quelques essais de préfabrication en Bretagne.
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Cf Annexes : Acteurs de la filière terre.
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Préparation traditionnelle des adobes
Mise en oeuvre mécanisée
Source : Bâtir en terre Auteur : Laetitia Fontaine et Romain Anger
Technique du torchis
Source : http://www.architerre.fr
Photographies : A.Mortamet
Les
adobes sont des briques de terre crue constituées d’un mélange d’argile et de paille, moulé puis séché à l’air ambiant. Contrairement au pisé, l’adobe nécessite une terre relativement fine, sans grains, afin de pouvoir être malaxée et moulée aisément. La composition de la terre est primordiale, car si elle est trop argileuse, elle risque de se fissurer lors du séchage. Ce phénomène peut être évité par l’ajout de sable ou de fibres végétales qui vont renforcer sa résistance à la traction. Traditionnellement, les briques sont conçues à l’aide de moules en bois. Cette technique est très utilisée dans les pays démunis, du fait de sa simplicité d’exécution et son économie de matière. Les briques de terre crue permettent d’édifier aussi bien des murs, que des sols, que des éléments courbes, on peut donc construire un bâtiment quasiment dans son intégralité, sans l’aide d’autres matériaux. L’adobe pourrait répondre aux demandes actuelles par sa possibilité de standardisation, de préfabrication et par ses faibles dépenses en énergie grise. Afin d’augmenter le rythme de mise en œuvre, sa production tend à s’industrialiser à l’aide de machines. Au 20ème siècle l’ingénieur Hans Sumpf créé un engin à déplacement hydraulique permettant de produire des milliers briques par jour. Cette machine permet de diminuer le coût de la main d’œuvre et d’augmenter la rapidité de production. Le temps de séchage assez long reste une contrainte, car les briques doivent être stockées pendant environ une semaine après élaboration.
Le torchis est un mélange de terre plastique et de fibres végétales, étalé
sur une structure porteuse en bois constituée de poteaux et de lattis. Une fois la terre sèche on rajoute un enduit en terre pour obtenir une paroi lisse. Le torchis nécessite une terre argileuse et adhérente afin de s’accrocher à la structure. La terre utilisée est fine et ne contient que très peu de cailloux ou graviers, elle fissure donc facilement lors du séchage. On la mélange à des fibres végétales pour éviter ce phénomène. L’association de la terre et du bois permet d’obtenir une structure rapide et facile à mettre en oeuvre, qui se retrouve dans de nombreux systèmes constructifs contemporains. Aujourd’hui, la technique du torchis reste la même dans son système d’ossature garnie de terre, cependant les structures porteuses en bois vont gagner en légereté et performance afin de facilité le montage. Si la structure tend à s’affiner, le remplissage est plus conséquent, la terre utilisée pour le mélange est liquide, voir boueuse et agrémentée d’une plus grande quantité de paille, cet alliage est appelé terre allégée. Depuis quelques années le torchis tend à se pré-fabriquer afin de gagner en rapidité de montage et diminuer le coût de fabrication. Dans ce cas, les panneaux sont assemblés en usine, puis montés sur le chantier pour être remplis de terre.
Ce référentiel non exhaustif permet d’appréhender les principales méthodes de mise en œuvre traditionnelles de la terre crue qui vont être développées actuellement. Le but n’est pas tant d’élaborer de nouvelles techniques, mais de les optimiser afin qu’elles puissent correspondre aux modes de construction industriels. Les recherches d’innovations vont donc porter sur l’élaboration de nouveaux outils ou le recours à la préfabrication afin de diminuer le coût et le temps de mise en œuvre. Mais aussi à l’association avec des matériaux industriels ou des stabilisants afin d’augmenter les performances structurelles de la terre.
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2.3. Le développement de techniques visant à adapter le matériau terre à la construction industrielle. En France, de nombreuses entreprises, associations ou laboratoires travaillent sur les évolutions contemporaines de la matière terre. Pour améliorer la rentabilité et la rapidité des techniques de mise en oeuvre traditionnelles de la terre, les recherches vont passer par des tentatives de préfabrication et de mécanisation de la terre afin de correspondre aux exigences de productivité de l’industrie.
Préfabrication de la terre Pisé préfabrique
Source : Revue Le Moniteur des TPB n° 5695 18 janvier 2013 - Photographies : CARACOL
Brique de terre comprimée
Source : Bâtir en terre Auteur : Laetitia Fontaine et Romain Anger
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Martin Rauch , précurseur de l’arhictecture en terre contemporaine va développer la préfabrication du pisé dans ses réalisations architecturales. Préfabriquer du pisé consiste à concevoir des éléments modulaires en usine prêts à être assemblés directement sur le chantier. Cette technique permettrait d’adapter le pisé aux méthodes de construction industrielles et de rendre sa mise en œuvre efficace et moins couteuse. 15 En France, l’entreprise Akterre en collaboration avec 16 CARACOL prolongent ses recherches en développant de nouveaux outils et types de coffrages, pour permettre le stockage et le transport du pisé. Parallèlement, l’Akterre a mis au point des panneaux en terre WEM constitués d’un mortier d’argile armé de fibres végétales. Ce panneau modulaire est directement vissé sur des structures en bois ou en métal. Sa mise en œuvre est simple, économique, et conserve toutes les qualités thermiques et acoustiques de la terre. Il a notamment été 17 proposé dans le projet « Armadillo Box » de l’équipe de Grenoble du concours « Solar Décathlon » de 2010. Il existe par ailleurs des briques de terre comprimée (BTC), technique mise au point récemment qui consiste à comprimer la terre dans une presse afin de créer de petites briques de pisé préfabriqué. La terre utilisée est humide et généralement mélangée à de la chaux ou du ciment pour la stabiliser et augmenter ses performances mécaniques. La brique de terre comprimée est une évolution de la technique de l’adobe. L’utilisation d’une presse implique un investissement plus important qu’avec l’adobe, néanmoins les BTC n’ont pas besoin de séchage, elles peuvent donc être directement stockées et sont mises en oeuvre beaucoup plus rapidement.
La préfabrication permet de transposer la terre dans la construction industrielle et d’optimiser sa production, cependant cela pause la question de la localité de la terre. En effet, si elle est préfabriquée, elle ne sera pas forcément prélevée ou mise en œuvre sur le site, de plus la préfabrication en usine implique la notion de transport. La terre en étant préfabriquée ne s’inscrit donc plus dans une démarche de matériaux locaux. La phrase slogan du groupe CRATerre étant « construire avec ce que l’on a sous les pieds », on peut se demander si ces tentatives d’industrialisation de la terre sont en cohérence avec la logique du matériau? 14 - 16
Cf Annexes : Acteurs de la filière terre. Cf Annexes : Bâtiments et projets cités.
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Mecanisation de la terre Terre projetée
Source : Blog de S. Soto - http://assistancetravaux.over-blog.com
Terre coulée
Source : http://www.eco-caracol.com/ecoconstruction.php
Outre la préfabrication, l’évolution des techniques passe par le développement de nouveaux outils et l’utilisation de machine pour la mise en œuvre de la terre. Actuellement la technique du torchis évolue vers une méthode de production mécanisée appelée terre projetée. Tout comme le torchis, cette technique consiste à remplir une ossature en bois ou métallique. L’innovation réside dans l’utilisation d’une machine qui va projeter la terre directement sur l’ossature au lieu d’appliquer la terre à la main, permettant une grande rapidité d’exécution. En France, cette technique est développée par les entreprises 18 19 JolieTerre et P+Soto qui vont expérimenter cette méthode sur plusieurs chantiers et mettre en place un procédé de mise en œuvre. Sylvain Soto conçoit notamment une machine de projection de terre séchée, et effectue tout un travail de recherche afin d’identifier le type de terre adéquat, la machine appropriée et la composition optimale pour cette technique. Bien que la terre projetée ait fait ses preuves sur une série de projets, elle nécessite d’être développée et ne permet pas encore la construction de murs porteurs. Le laboratoire CRATerre en partenariat avec CARACOL, s’est inspiré des principes de mise en œuvre du béton afin de développer la technique de la terre coulée, aussi appelée béton d’argile. Cette technique consiste à verser de la terre liquide constituée de granulats et de liants mélangés dans une bétonnière. Les liants permettent de solidifier la terre après coulage pour décoffrer plus rapidement. La terre coulée pourrait faire évoluer l’industrialisation de la terre rapidement, car elle permet d’utiliser les outils généralement associés au béton et de s’inspirer de ce modèle. Cette technique se développe de plus en plus, cependant elle fait l’objet de débats en ce qui concerne les liants. En effet, bien que CRATerre s’inscrive dans une démarche durable à travers ses recherche sur la création d’un béton d’argile environnemental (BAE) utilisant l’argile comme liant naturel, la technique de la terre coulée est reprise par des entreprises qui vont chercher une plus grande rentabilité et la mélanger à de la chaux ou du ciment afin de la stabiliser. Le fait de mélanger la terre pour faciliter sa mise en œuvre provoque l’émission de gaz à effets de serre dus à la fabrication du ciment, de plus en stabilisant la terre, même avec un pourcentage réduit en ciment, on lui enlève son caractère recyclable.
En ce sens, est-ce que l’adaptation de la terre à la construction industrielle ne risque pas de lui enlever ses principaux atouts? Bien que certains acteurs cherchent à rester dans une démarche durable et à respecter les caractéristiques de la terre, est il possible d’arriver aux demandes de compétitivité du système actuel sans la modifier ? Le développement de la terre dans l’architecture doit-il forcément passer par son industrialisation ? Quelles sont les limites et les dérives au développement de la terre ?
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Cf Annexes : Acteurs de la filière terre.
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2.4. Une industrialisation controversée de la terre. Œuvrer pour la revalorisation de la terre dans l’architecture contemporaine implique de l’adapter aux méthodes de construction industrielles. La terre, pour être utilisée par les maîtres d’ouvrages doit correspondre aux demandes de compétitivité et de rentabilité de la société actuelle. Cette contrainte est fondamentale pour l’avenir du matériau et suppose un positionnement de la part des acteurs de la terre sur la manière de développer cette filière. L’exemple de la stabilisation caractérise bien ce phénomène en montrant deux grandes manières de développer la terre crue dans la construction. Certains acteurs luttent pour garder le caractère naturel de la terre en exploitant pleinement la matière et vont fortement critiquer la stabilisation car elle enlève son caractère recyclable et non polluant. Cependant, actuellement la terre crue ne peut atteindre les performances techniques du béton sans être stabilisée, certains acteurs vont donc développer son usage et augmenter sa productivité au maximum en s’éloignant d’une démarche durable. Certes la terre stabilisée avec du ciment perd certains atouts de la matière, mais en facilitant sa mise en œuvre, elle développe son utilisation dans des projets contemporains. De plus elle conserve les qualités thermiques de la terre et permet de réduire l’emploi du ciment ou du béton dans la construction. La manière de développer la terre va donc être différente selon le point de vue adopté et nous interroge sur la pertinence des méthodes employées. Mur en terre associé à une ossature en béton
Source : Mémoire de DSA - Marc Auzet et Juliette Goudy
C’est un juste milieu qu’il faudrait trouver afin de propager la terre sans perdre de vue les qualités et les limites du matériau. 20 Selon Marc Auzet, chercheur CRATerre « Aujourd’hui si la terre est stabilisée, elle n’atteint pas les caractéristiques du béton, cependant elle est largement assez résistante pour de petits projets. C’est le systématisme du béton qui pose problème, car même si la terre n’est pas aussi résistante, elle peut convenir à la plupart des projets ». Ce point de vue est intéressant car il montre le problème de l’omniprésence du béton dans la construction actuelle, mais aussi qu’il ne faut pas chercher à tout résoudre par la terre, que chaque projet a sa logique et qu’il y a un matériau adapté à chaque situation. De plus, la terre plutôt que d’être transformée pourrait être associée à d’autres matériaux. 21 Par exemple dans le projet « Tiles hill » de Wang Shu, la terre n’est pas assez résistante pour pouvoir porter, elle est donc combinée à une charpente en béton. Dans ce cas, la terre sera utilisée pour ses qualités thermiques et décoratives plutôt que structurelles, mais elle permet de limiter l’usage du béton.
A travers ces exemples on peut appréhender toute la complexité du système de développement d’un matériau et l’étendue des critères à prendre en compte, aussi bien économiques, politiques, constructifs, que législatifs. Face à ces contraintes, de quelle manière développer la filière terre de manière intelligente ? Comment industrialiser un matériau tout en gardant son intégrité ? Est-ce que une architecture industrielle et rentable peut réellement être considérée comme écologique ? On pourrait s’étendre longtemps sur la question de l’industrialisation d’un matériau traditionnel et plus largement sur la manière de le réactualiser, car cela confronte à énormément de problématiques.
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Cf Annexes : Interview CRATerre. Cf Annexes : Bâtiments et projets cités.
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3. Comment exploiter les qualités matérielles de la terre afin de l’intégrer dans une architecture contemporaine ? La terre, outre le besoin d‘être adaptée aux normes et techniques de la société actuelle, pâtit d’une image de matériau traditionnel sans grande qualité. Dans la région Rhône-Alpes, il existe un large patrimoine d’architecture en pisé, cependant on ne pense pas à l’utiliser de manière contemporaine. La revalorisation du matériau va donc passer par le travail d’architectes novateurs afin de lui donner un nouveau visage. Actuellement avec les préoccupations environnementales et le retour aux matériaux locaux, de plus en plus d’architectes vont expérimenter la terre comme un matériau moderne. Cette étude va d’abord s’interroger sur les différentes manières d’utiliser la terre dans des projets contemporains en explorant ses potentialités et ses faiblesses. Puis, à travers l’analyse détaillée d’un projet de la région Rhône-Alpes, tenter de comprendre comment utiliser la terre de manière intelligente lors de la conception d’une architecture.
3.1. La terre : un matériau moderne. La terre est propre à chaque site, il existe une immense variété de terres donnant lieu à une large gamme de textures et de couleurs. Chaque terre est adaptée à une technique de mise en œuvre et un rendu graphique particulier. Cette diversité plastique, malgré les difficultés techniques qu’elle engendre, va donner un aspect unique à chaque bâtiment et offrir une grande qualité architecturale. Cette sensibilité est très appréciée des architectes, « L’architecture en terre c’est simple, esthétique, on vit avec son temps. Il y a différentes terres et une multitude de techniques, c’est un matériau sensible, 22 séduisant, on dirait de la poterie », Hugo Gasnier , chercheur CRATerre. Rendus graphiques du pisé
Mur en pisé stabilisé et teinté Source : http://www.sirewall.com
Mur en pisé de la Rauch Residence / Martin Rauch Source: Architecture et Matériaux Editions Place des Victoires / LOFT Publication
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Cf Annexes : Interview CRATerre.
Actuellement, bien qu’il existe une multiplicité de techniques, les architectes utilisent principalement le pisé, car c’est la technique qui s’apparente le plus au mode de construction industriel par sa similarité avec le béton. De plus le pisé laisse apparaître des lignes horizontales dessinées par les coffrages, marquant l’aspect minéral de la terre et apportant une esthétique naturelle et rythmée. Enfin, le pisé peut être mis en œuvre de différentes manières et va permettre de faire varier les apparences. La terre compactée progressivement donnera un aspect stratifié au mur. La juxtaposition de différentes couches de terre peut être accentuée par le mélange de terres de couleurs différentes ou en faisant varier l’épaisseur des couches. Une surface plus régulière et homogène peut être obtenue par l’ajout de terre sans interruption lorsqu’elle est compactée.
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Centre culturel NK’MIP de Hotson Bakker Boniface Haden Architects
Source : Earth Architecture Auteur : Ronald Rael
Les qualités esthétiques du pisé sont bien exploitées dans le projet de centre culturel NK’MIP de Hotson Bakker Boniface Haden Architects au Canada. Dans ce bâtiment construit dans le désert, les architectes ont voulu accentuer les couches linéaires dessinées par le pisé en incorporant différentes terres de la région, mélangées à des pigments, variant ainsi la couleur des strates du mur monolithique. L’édifice apparaît comme une prolongation du sol, rappelant les strates sédimentaires de la roche. Ici la terre n’est utilisée qu’à des fins esthétiques, c’est un projet façade où la terre est adjointe à un taux très élevé de ciment et perd ses qualités écologiques. Bien que l’on puisse questionner l’intégrité de la construction, la terre est montrée de manière innovante avec un rendu graphique unique et participe à la revalorisation de la terre en tant que matériau contemporain. « Phénomène récent, les architectes et constructeurs associent dorénavant des terres de textures et de couleurs différentes dans les murs en pisé. Dans ce sens, la terre apparaît comme un matériau nouveau dont les potentialités sont encore à explorer. » Romain Anger et Laetitia Fontaine, Bâtir en Terre.
D’autre part, la terre, en tant que matériau local et naturel, peut être directement prélevée sur le site afin de construire le bâtiment. Cette particularité lui permet de garder les couleurs du paysage environnant et d’inscrire le projet en continuité du lieu où il est construit. « C’est un matériau monolithique, esthétique 23 avec un intérêt écologique, qui permet une réelle harmonie avec le site. » Arnaud Misse, architecte . Rauch residence de Martin Rauch
Source : http://www.lehmtonerde.at / Photographe : Beat Bühler
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Cf Annexes : Interview CRATerre.
Cette capacité d’intégration au site se retrouve dans les projets de Martin Rauch, notamment dans la maison en pisé qu’il conçoit à Schlins , en Autriche, avec le cabinet Boltshauser Architekten, en 2008. Cette maison est construite sur un terrain en pente, en partie enterrée afin de réutiliser la terre du site pour la construction. La terre locale permet d’adapter le bâtiment au contexte afin qu’il fasse partie intégrante du paysage. Les teintes du pisé laissé à l’état brut répondent au décor naturel qui l’entoure comme si il en faisait partie. Bien que d’une taille imposante, la maison se fond dans le paysage par sa forme simple et son aspect minéral. La terre par ses qualités d’intégration au site peut apporter une grande sensibilité au projet architectural, cependant cette qualité peut-elle être exploitée dans un contexte urbain ou le paysage naturel est généralement absent ?
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La terre peut rebuter certains architectes qui la perçoivent comme un matériau contraignant pour l’esthétique du bâtiment. En effet, c’est un matériau peu résistant à l’eau qui nécessite des toitures de longues portées afin de protéger les parois. De plus, les murs en terre crue sont généralement massifs et limitent la réalisation de grandes ouvertures en façade. La terre impose des contraintes lors de la conception, cependant certains architectes mettent en œuvre la terre de manière innovante afin de bénéficier d’une plus grande liberté architecturale. Casa Penalolen de Marcelo Cortés
Source : Bâtir en terre Auteur : Laetitia Fontaine et Romain Anger
Source : http://www.marcelocortes.cl/2012/
Marcelo Cortés, architecte chilien, construit des habitats contemporains en alliant la terre à l’acier. Cette association pourrait poser question, car contrairement à la terre, l’acier est l’un des matériaux qui consomme le plus d’énergie lors de sa fabrication, cependant c’est une réelle innovation constructive et architecturale. En effet, la structure en acier garnie de terre constitue une nouvelle forme de torchis qui a su s’associer aux matériaux industriels. L’acier qui travaille en traction permet de contrer les faiblesses de la terre, la terre en tant que remplissage permet de rigidifier la structure en acier. Ces deux matériaux fonctionnent de manière complémentaire et apportent une grande résistance structurelle au bâtiment. Ce procédé offre de nombreuses possibilités, notamment la création de grandes baies ou de parois inclinées. Marcelo Cortés, en exploitant le potentiel de ces deux matériaux, réussit à concevoir des espaces diversifiés, plus ouverts et pouvant atteindre une hauteur importante, adaptant la terre à l’architecture contemporaine.
Ces différentes réalisations architecturales participent à la démocratisation de la terre en la faisant connaître au grand public. La mise en œuvre innovante du matériau contribue à lui donner une nouvelle image et montrer ses potentialités. Maitres d’ouvrage et architectes, généralement peu informés sur le sujet, peuvent ainsi voir des réalisations concrètes d’architectures en terre et comment elle peut être utilisée.
3.2. Etude de cas : L’école de Veyrins-Thuellin. De plus en plus d’architectes utilisent la terre crue comme un matériau moderne, adaptable et pouvant répondre aux préoccupations environnementales grandissantes. Pour comprendre concrètement comment la terre peut entrer dans la conception d’un projet actuel, il était nécessaire d’étudier une réalisation en France, afin de pouvoir visiter le projet et de rencontrer ses concepteurs. Ce fut assez complexe, car contrairement à d’autres pays d’Europe tels que l’Allemagne ou l’Autriche, l’architecture contemporaine en terre est encore peu développée en France. La plupart des projets ne pouvant être réalisés du fait de l’absence de règlementation et de la crainte des maîtres 24 d’ouvrage. Le projet de l’école élémentaire de Veyrin-Thuellin , de Milena Stefanova et Bruno Marielle fut l’occasion d’appréhender une exploitation stratégique de la terre dans un bâtiment, aussi bien en terme d’intégration au site, que dans la mise en œuvre du matériau et des ambiances crées à l’intérieur du bâtiment. 24
Cf Annexes : Dossier de presse - Ecole de Veyrins-Thuellin
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Le projet se situe dans la commune de Veyrins-Thuellin, en Nord Isère. Le pisé faisant partie intégrante du patrimoine architectural, la commune souhaitait inscrire le bâtiment de la future école dans la culture constructive de la région. C’était un défi pour les architectes de l’agence « Design & Architecture», Bruno Marielle et Milena Stefanova de concevoir un bâtiment entre culture traditionnelle et architecture contemporaine. Milena Stefanova montre tout son enthousiasme à la participation d’un tel projet : « Une école en pisé au 21e siècle... Quelle merveilleuse opportunité pour contribuer à la mission éducative de l’architecte et montrer que la culture du lieu est le référent pour se forger son identité, pour montrer la continuité entre les générations tout en s’adaptant aux données contextuelles ». Ecole de Veyrins-Thuellin
Source : Milena Stefanova
La superficie du projet global est de 1080 m2, l’école regroupe quatre salles de classe, une bibliothèque une salle périscolaire, un local informatique, des espaces pour la direction et les enseignants, une salle de repos et une cafeteria. Afin d’adapter les attentes fonctionnelles de l’école à la forme particulière de la parcelle, le bâtiment se développe en L, autour de la cour et d’un vaste jardin. Cette disposition permet d’orienter les salles de classes au sud, en les ouvrant sur la cour, et d’apporter confort thermique et qualité d’usage à l’école. Les distributions sont éclairées naturellement grâce à un travail de décroché de toiture qui permet de capter une lumière zénithale. Coupe de l’école : apports en lumière
Ambiance intérieure
Source : Milena Stefanova
Le parti pris concernant le choix des matériaux était de rester dans la continuité de l’architecture traditionnelle de la région. Placé sur les façades sud et ouest, le pisé est mis en œuvre de manière stratégique dans la conception du bâtiment. Cette position lui permet de jouer le rôle de régulateur thermique en stockant la chaleur solaire. Au nord le pisé n’était pas judicieux, car il aurait nécessité l’ajout d’une isolation pour atteindre des performances thermiques similaires. Les architectes ont donc opté pour de la brique « monomur » afin de rester dans la logique du matériau terre, sans l’utiliser de manière systématique. La toiture constituée d’une charpente en bois dépasse de manière à protéger les murs en pisé de la pluie. Les espaces intérieurs sont animés par un travail au niveau des ambiances, notamment à travers la confrontation entre des parois lisses aux couleurs vives associées à des murs en bois ou en pisé laissés à l’état brut dans les salles de classes. La texture des matériaux naturels est pleinement exploitée et procure une grande qualité plastique au bâtiment.
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En ce qui concerne la mise en œuvre de la terre dans le projets, les architectes ont choisis de reprendre le principe des constructions traditionnelles de la région en coulant la terre crue dans des banches. Le choix de la terre pour ce projet était osé de la part des maîtres d’ouvrage et nécessitait le savoir faire 25 d’une société spécialisée dans la construction en terre, ils ont donc fait appel à Heliopsis SARL . Murs trumeaux en chantier
Murs trumeaux finalisés
Source : Milena Stefanova
L’entreprise a réalisé vingt-quatre murs trumeaux pour la façade de l’école et deux murs massifs de six mètres de long atteignant plus de cinq mètres de hauteur. Les travaux ont nécessité le travail de sept personnes sur le chantier pendant quarante jours. Comme dans de nombreux projets en terre crue, la mise en œuvre des murs trumeaux a exigé la création de banches sur mesure. Les murs trumeaux reposent sur un léger soubassement en béton et sont constitués de terre stabilisée avec de la chaux dans leurs premiers mètres afin de ne pas fissurer à cause de l’humidité remontant du sol. Le reste du mur est intégralement composé de terre locale. La terre ne pouvant être extraite sur le site, car il aurait fallu faire un trou dans la cour, la volonté de s’inscrire dans une logique de matériaux locaux était délicate. La terre a donc été procurée par l’entreprise VRD, qui stocke la terre extraite des chantiers de la région pour la réutiliser. Le bâtiment situé dans une zone à sismicité modérée, a nécessité le travail d’un bureau d’étude pour permettre l’utilisation du pisé. La stabilité du projet a été garantie par la faible hauteur du bâtiment qui se développe sur un seul niveau, permettant de mettre en œuvre le pisé sous forme de trumeaux. De plus des éléments rigidifiant sont intégrés dans les menuiseries afin de reprendre les efforts dus à une secousse sismique éventuelle.
Vues de l’école
Source : Milena Stefanova
Ce projet exprime très bien comment la terre peut être réactualisée dans l’architecture contemporaine, il utilise la matière de manière intelligente, la terre est placée là où elle a un sens, sans systématisme. De plus, le bâtiment joue avec la matérialité et la texture de la terre dans la conception des ambiances. Enfin, le projet a été accompagné d’une démarche participative et éducative, à travers des visites, des ateliers, des manipulations autour de la terre, pour la faire découvrir aux enfants de l’école. C’est un projet qui œuvre concrètement au développement de la terre crue, tant dans l’effort en matière de qualité d’espace et d’usage qui est mis en place, que dans la collaboration entre les différents acteurs du bâtiment et l’utilisation locale de la matière.
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Cf Annexes : Acteurs de la filière terre.
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Conclusion Au début de mes recherches sur la réactualisation du matériau terre dans l’architecture, je ne m’étais focalisée que sur le développement de nouvelles techniques et des recherches scientifiques sur la question de la mise en œuvre. Au fur et à mesure de cette étude, je me suis rendue compte que ce sujet englobait un système beaucoup plus complexe et que le développement d’un matériau dépendait de nombreux facteurs. Cela m’a permis d’appréhender les liens entre matériaux, architecture, politique, économie et législation, un simple matériau est porteur de nombreux enjeux. J’ai aussi découvert qu’il y avait différentes manières de développer un matériau selon le positionnement des acteurs. D’un coté on pourrait utiliser la terre comme le bois, simplement pour donner une image «écologique» au bâtiment, c’est un peu ce qui se passe avec les éco-quartiers. De nombreux projets jouent sur l’image de matériau naturel, local pour se prétendre durable, notamment les bâtiments façades, ou les projets utilisant la terre stabilisée. En ce sens, le matériau perd toute sa pertinence, mais tout est lié à l’aspect marketing de la construction et le poids de la communication, cela devient plus une question de société que du matériau même. Dans une société où la rentabilité et la productivité dominent on peut se demander comment garder l’intégrité d’un matériau? Si la terre revient aujourd’hui, comme d’autres matériaux locaux, c’est en partie parce que les préoccupations actuelles poussent à donner une image durable au bâtiment. De la même manière, les villes pour montrer leur implication dans le développement durable vont construire des bâtiments performants et étanches, généralement en bois. Cependant qu’en est-il de la santé des ouvriers, de la pollution créée par le chantier, notamment lorsqu’on fait un projet avec du bois exotique, certes le bâtiment est performant, mais le bois n’est plus un matériau à faible énergie grise. Enfin qu’en est-il de la recyclabilité du bâtiment ? C’est là où la terre pourrait présenter un intérêt, mais son développement va-t-il faire comme celui du bois ? Avec l’industrialisation de la terre va-t-on systématiquement la stabiliser comme en Australie ? Va-t-on aller chercher des terres à des milliers de kilomètres simplement parce qu’elles auront une belle teinte ? Découvrir l’étendue des enjeux qui se pose et la complexité du développement de la terre m’a peutêtre enlevé une part d’optimisme, néanmoins, cette étude m’a permis de rencontrer des personnes réellement passionnées par ce matériau, par la logique qu’il implique, ses faiblesses, sa sensibilité. Ces personnes œuvrent tous les jours au développement de la filière, pour faire connaître la terre, tout en préservant la cohérence du matériau, sans se soucier de construire au plus rentable ou au plus rapide. Cette approche, certes optimiste, donne de l’espoir et laisse entrevoir une autre manière de concevoir l’architecture, bien qu’à travers leurs recherches ils soient contraints de s’adapter au système. Le développement de la terre en est encore à un stade expérimental, bien qu’il y ait une forte évolution depuis une vingtaine d’années, mais il exprime une réelle volonté de faire évoluer l’architecture. Enfin, étudier la terre m’a permis d’avoir une autre approche des matériaux, en découvrant la logique du site, chaque matériau convient à un projet, il n’y a pas un matériau parfait. Cela m’aide dans le cadre de mes études et pour mon futur travail d’architecte, je ne me pose plus les mêmes questions lorsque je choisis un matériau pour mon projet. Je n’ai pas seulement découvert la terre, mais une multitude de matériaux offrant de nombreuses possibilités de conception. Ce sujet est passionnant à étudier et il était difficile de rester focalisée sur ma problématique, mes recherches ouvrant sans cesse sur de nouvelles interrogations. Cela m’a donné envie développer cette étude, notamment par la volonté de suivre la formation post-master de l’ENSAG, le Diplôme de Spécialisation en Architecture de terre.
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Bibliographie Ouvrages Laetitia Fontaine et Romain Anger, 2009. Bâtir en terre, éditions Belin / Cité des Sciences et de l’industrie, 213 p.
Hugo Houben et Hubert Guillaud, 1989. Traité de construction en terre, CRATerre, Marseille, éditions Parenthèses, 3ème édition, 2006, 350 p.
Ronald Rael, 2009. Earth Architecture, éditions Princeton Architectural Press, New-York, 203 p.
Architecture et matériaux, 2011, édition originale : LOFT publications, Barcelone, traduction et édition Place des Victoires, 2011, Paris , 597 p.
Revues et articles Ecologik, décembre 2009 / janvier 2010, n° 12, Spécial Architecture en terre, éditions Architecture à vivre, p 57 à p 90.
Julie Nicolas, 18 janvier 2013, La terre crue rentre dans le moule, Le Moniteur des TPB, n°5695, Technique et chantier, p 38 à p 42.
Mémoires Marc Auzet et Juliette Goudy, 2010- 2012, Faciliter l’emploi du pisé dans l’architecture contemporaine en Chine, Mémoire du Diplôme de Spécialisation et d’Approfondissement - Architecture de Terre. Directeurs d’études, Sébastien Moriset, Alba Rivero, ENSAG, 306 p.
Quentin Chansavang et Hugo Gasnier, 2010- 2012, Une approche prospective du pisé, Mémoire du Diplôme de Spécialisation et d’Approfondissement Architecture de Terre. Directeur d’études, Patrice Doat, ENSAG, 150 p.
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Annexes Techniques de construction en terre Le Moniteur des TPB, n째5695, Technique et chantier,18 janvier 2013, Tableau des
principales techniques de mise en oeuvre de la terre crue.
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Acteurs de la filière terre CRATerre Contact: 60 avenue de Constantine - BP 2636 38036 Grenoble Cedex 2 France Tél. : +33 (0)4 76 69 83 35 http://craterre.org « Equipe pluridisciplinaire et internationale, CRAterre est une Association et un Laboratoire de recherche de l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble, qui rassemble chercheurs, professionnels et enseignants, et travaille avec de nombreux partenaires, ce qui permet d’établir des liens créatifs entre recherche, actions de terrain, formation et diffusion des connaissances. » Depuis 1979, CRAterre, Centre international de la construction en terre, œuvre à la reconnaissance du matériau terre afin de répondre aux défis liés à l’environnement, à la diversité culturelle et à la lutte contre la pauvreté.
ASTerre Contact: 67 rue Pierre Tal Coat 2700 EVREUX http://www.asterre.org/ info@asterre.org Association nationale des professionnels de la terre :« Fondée en décembre 2006, elle est née du désir de collaboration et du besoin de communication entre des partenaires qui, pour certains, œuvrent depuis plus de vingt ans à la reconnaissance de l’architecture de terre. L’Association nationale des professionnels de la Terre crue fédère les acteurs et actrices de la construction en terre crue en France et en Europe. »
AKTerre Contact: ZI des Monts du Matin - 100 rue des Lauriers 26730 EYMEUX Tel: 04 75 48 57 23 http://www.akterre.com « Andreas Krewet crée l’entreprise AKTerre en 1998, afin de contribuer au développement du matériau terre en France. L’AKTerre a pour vocation la mise à disposition d’une gamme de produits pour la décoration et d’une gamme de matériaux pour la construction saines et écologiques en terre crue fiables et prêts à l’emploi pour les architectes, les artisans et les particuliers. La recherche, le développement et la production de matériaux pour la construction en terre plus largement produit en France et en région, compléter par les matériaux CLAYTEC® »
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CARACOL Contact: 54 Bis Rue Abbé Grégoire 38000 GRENOBLE T : +33 (0)4 76 48 33 47 http://www.eco-caracol.com/ « La SCOP CARACOL éco-construction est une entreprise coopérative spécialisée dans la maçonnerie de terre crue. Créée en septembre 2005, la structure CARACOL éco-construction compte 7 salariés dont 3 allient les compétences d’architectes et d’artisans. Les activités de l’entreprise regroupent la rénovation de bâtiments en pisé en Isère et la construction neuve bioclimatique, l’étude sur le matériau terre, le conseil auprès des particuliers et la formation sur les techniques de construction en terre crue.»
Jolie Terre Contact: Impasse des Chênes 30360 Martignargues Tel : 06 75 52 96 58 contact@jolieterre.fr Jolie terre est une entreprise qui a mis en place un procédé de projection de terre crue. « La terre crue, utilisée dans la construction depuis des millénaires, a fait ses preuves de fiabilité. Nous en avons fait un matériau écologique résolument contemporain. Le mélange terre crue JT à projeter est un produit de construction comme de décoration adapté au neuf et à la rénovation. »
P+SOTO Mr sylvain Soto a mis au point un procédé pour projeter la terre crue appelé P+Terre. « Je suis celui qui a imaginé et qui souhaite développer le procédé de projection de terre crue. Ce procédé facilite l’utilisation de la Terre crue pour améliorer l’inertie et l’isolation de constructions neuves mais également de maçonneries classiques. En effet, idéal pour apporter de l’inertie à une ossature en bois, ce procédé permet d’améliorer également l’isolation des maçonneries plus classiques en parpaings, béton ou autre. La sauvegarde et la rénovation de notre patrimoine en Terre est aussi le domaine de prédilection de ce procédé. »
Martin Rauch « Martin Rauch, né en 1958 à Schlins dans le Vorarlberg, est considéré en Europe comme l’un des pionniers des applications de techniques modernes et créatives issues de la construction traditionnelle en pisé. Il intervient dans de nombreux domaines, habitations, hôtels, bâtiments ecclésiastique et industriel, aménagements intérieurs ou de paysage. Deux décennies de recherche fondamentale et pratique ont permis à Martin Rauch d’actualiser des techniques traditionnelles de construction en terre glaise et ont fait de lui un expert renommé dans sa profession, recherché sur le plan international, ainsi que le partenaire d’architectes et d’artistes célèbres. » Source: http://www.grenoble.archi.fr/servideo/spip.php?article58
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Bâtiments et projets cités Thurgoona Campus of Charles Sturt University - Marci Webster-Mannison
Eglise protestante de la réconciliation - Reitermann et Sassenroth
Centre culturelNk’mip - Hotson Bakker Boniface Haden
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Tiles Hill- Wang Shu
Armadillo Box
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DSA‐ Architecture de terre Novembre 2012 – Juin 2014 Le DSA "Architecture de terre" est une formation post‐master valorisée par un diplôme national de spécialisation et d’approfondissement, délivré par le ministère de la Culture et de la Communication. La formation s'inscrit dans les activités de la Chaire UNESCO "Architecture de terre", visant la mise en place de programmes d'enseignement avec des organismes de formation existants, afin d'accélérer la diffusion des savoirs scientifiques et techniques sur l'architecture de terre. Contexte Le matériau terre est toujours utilisé dans l’habitat du plus grand nombre, et présente un potentiel de réponse aux grands enjeux actuels en matière d’habitat économique, d'aménagement et de développement du territoire, de « soutenabilité » environnementale et énergétique, et de diversité culturelle. Objectifs Le DSA‐Architecture de Terre a pour but de répondre à la demande sociale internationale dans les domaines relatifs aux métiers de l’architecture de terre et plus particulièrement dans les domaines suivants : les fondements scientifiques et techniques de l'architecture de terre et de ce savoir‐faire millénaire : matière première, matériaux, éléments, structure, systèmes constructifs, architecture ; la recherche scientifique fondamentale sur le matériau, la R&D en innovation constructive ; l’approche contemporaine de l'architecture et l'équilibre environnemental social et économique ; l’habitat économique dans une perspective de développement local durable ; la conservation et gestion durable des patrimoines architecturaux et archéologiques ; la formation, en priorité universitaire, mais aussi au niveau professionnel. Le DSA‐Terre bénéficie de la longue expérience du laboratoire CRAterre‐ ENSAG, qui a accumulé un savoir scientifique et technique dans le domaine de l’architecture de terre et a déjà formé près de trois cents spécialistes, issus de 54 pays ; et est aujourd’hui reconnu LABEX‐ laboratoire d’excellence.
Organisation des études Le DSA "Architecture de terre" est structuré en 9 unités d’enseignement, pour un total de 890 heures encadrées, 800 heures de travail personnel et 710 heures de mise en situation professionnelle (120 crédits ECTS) : 1. Architecture de terre et cultures constructives 2. Bases scientifiques, techniques et méthodologiques 3. Les métiers de l'architecture de terre : habitat 4. Les métiers de l’architecture de terre : patrimoine 5. Pratique et mise en application : expérimentation 6. Mise en situation professionnelle : stage 7. Pratique et mise en application : expérimentation 8. Approfondissement : séminaire thématique Matière, Habitat, Patrimoine 9. Mémoire de fin d’études Les cours théoriques et pratiques sont assurés par les enseignants et les chercheurs du laboratoire CRAterre‐ENSAG, ainsi que par des experts reconnus d'origine internationale. Les séminaires réunissent étudiants, chercheurs, professeurs et diplômés autour de différents travaux en cours, permettant un meilleur positionnement des étudiants vis‐à‐vis des pratiques professionnelles. Les stages, qui peuvent prendre différentes formes, fournissent un complément de formation irremplaçable. Le mémoire est un travail personnel de recherche fondamentale ou appliquée. Conditions d'admission Le DSA‐Terre est ouvert aux titulaires d'un diplôme donnant accès à un troisième cycle universitaire (niveau Master 2). Les candidats sont sélectionnés sur dossier par un jury d'enseignants, de chercheurs et de membres du Conseil scientifique de l'ENSAG. Le dossier de candidature comprend : une fiche de renseignements (à télécharger sur le site internet) ; une lettre de candidature précisant les centres d’intérêt et motivations, et les intentions de travail ; un exemplaire du travail de fin de master (si en rapport avec un des thèmes de la formation) ou tout autre document utile à la sélection ; un travail personnel ayant trait à l'architecture de terre dans un pays ou une région spécifique, présenté sous forme d'un petit dossier ou de portfolio (max. 20 pages) ; une copie du diplôme de niveau Master 2 (Bac+5) ; une attestation de l'Alliance française ou de tout autre organisme habilité, certifiant une pratique courante du français (uniquement les candidats non francophones). Les droits d'inscription s'élèvent à 808 €/an (hors sécurité sociale – montant à confirmer). La capacité d'accueil est de 20 étudiants. La date limite de dépôt de candidature est fixée au 30 avril 2012. Les résultats de la sélection seront communiqués par courrier avant le 30 juin 2012. Déroulement La formation se déroule à l'Ecole Nationale Supérieure d'Architecture de Grenoble et bénéficie d'une infrastructure adaptée : salle de cours, laboratoire, atelier de construction avec équipements de production. Les cours sont donnés en français ; une maîtrise certifiée de la langue est exigée pour les candidats non francophones. La connaissance de l'anglais est recommandée. Contact Mme Colette IOAN – Bureau du DSA‐Terre Ecole nationale supérieure d’architecture de Grenoble 60 avenue de Constantine / BP 2636 38036 Grenoble Cedex 2 ‐ France Téléphone : +33 (0)4 76 69 83 13 ; Fax : +33 (0)4 76 69 83 69 Courriel : colette.ioan@grenoble.archi.fr ; http : //www.grenoble.archi.fr
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Rapport d’Interview CRATerre Interview
et visite du laboratoire avec Hugo Gasnier, Architecte D.E, DSA Architecture de Terre chercheur chez CRATerre-ENSAG. Intervention de Quentin Chansavang, Juliette Goudy, Marc Auzet. CRATerre : 3 secteurs de recherche : Patrimoine, matériaux, habitat. « Quentin, Marc, Juliette et moi essayerons de répondre à tes questions, nous sommes tous les 4 des architectes issus de l’école de Grenoble titulaire du DSA Terre et aujourd’hui nous travaillons sur le développement de la construction terre contemporaine (au travers des normes et de la techniques). Nous avons travaillés sur plusieurs projets un peu de partout (chine, Belgique, Autriche, France, USA...).»
Toutes les terres sont différentes, on est donc obligé de faire une étude préalable. Pour chaque projet, il faut réévaluer la matière, car chaque terre a des caractéristiques différentes au niveau de ses performances. L’idée est de passer d’un savoir faire traditionnel à un savoir scientifique et d’utiliser les qualités thermiques de la terre pour répondre aux exigences actuelles. Leurs recherches portent sur l’amélioration de la matière terre et ses méthodes de mise en œuvre. Il faut caractériser le matériau pour donner une garantie aux entreprises ( sa résistance, la terre marche en compression) Les limites actuelles : si on mélange la terre à de la chaux ou du ciment pour faciliter sa mise en œuvre et la stabiliser, on lui enlève un intérêt majeur, elle ne peut plus être recyclée. Le but de leur recherches est donc d’utiliser de la terre crue, prise sur le site, sans ajouts de matière, afin de garder toutes ses qualités écologiques. Dans la région Rhône-Alpes, il y a un fort patrimoine, notamment d’architecture en pisé, mais on ne pense pas à l’utiliser de manière contemporaine. Actuellement Hugo Gasnier travaille avec les architectes Letiec et Misse, projet à Orléans, conservatoire des salles, afin de leur donner une étude technique. Pour l’équipe de CRATerre, le gros avantage de la terre crue est que ce soit un matériau recyclable et réutilisable. On peut construire avec la terre du site et lorsque le bâtiment n’a plus d’utilité, redonner la terre au site. CEMATerre, pour leur technique de la terre coulée ajoute de la chaux ou du ciment pour stabiliser la terre, cela arrête le processus et la terre n’est plus recyclable, elle perd donc son intérêt écologique. Ce que développe CEMATerre ou les projets qui utilisent la terre stabilisée permettent de développer la terre, car ça montre ce matériau dans des projets contemporains, cependant c’est à double tranchant car si ça se développe trop, les entreprises n’utilisent plus que de la terre stabilisée, et cela enlève l’intérêt écologique du matériau, il n’est plus que utilisé pour ses qualités esthétiques et thermiques. De plus lorsque l’on stabilise la terre cela pollue, si la terre crue n’est pas stabilisée, il n’y a aucune émission de gaz à effet de serre. En Australie, on utilise beaucoup de terre dans les projets contemporains, au départ à des fins écologique, mais finalement la terre est toujours stabilisée. La stabilisation fait connaître la terre, mais on ne pense plus à utiliser la terre sans ajout de ciment. C’est une technique entre le pisé et le béton, utilise les outils du béton. Pourquoi avez vous choisis de travailler chez CRATerre ? Hugo Gasnier : j’ai participé au Solar Decathlon, mais je n’avais pas envie de pratiquer une architecture purement technique. L’architecture en terre c’est simple, esthétique, on vit avec son temps. Il y a différentes terres et une multitude de techniques, c’est un matériau sensible, séduisant, on dirait de la poterie. Marc Auzet : Si on ne stabilise pas la terre, elle est moins performante, mais cela permet de concevoir une architecture à échelle humaine. Les recherches vise à optimiser ce matériau, car aujourd’hui c’est très cher de construire en terre ( 4 fois plus que du béton), à cause de la mise en œuvre, du manques d’outils et du temps.
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Il y a certes un aspect technique dans les recherches, mais aussi un travail sur la production. Besoin de développer des outils spécifique au matériau, aujourd’hui pour les projets en terre, on utilise des banches à béton. On est parfois obliger de créer des outils spécialement pour un projet. Il est nécessaire d’inventer de nouveaux systèmes et d’adapter les outils à chaque projet. C’est un processus long, car c’est difficile de standardiser le pisé, on utilise la terre crue du site, elle est donc toujours différente. Technique du pisé : coffrage au fur et à mesure, tous les 10cm, ce n’est pas comme du béton ou l’on peut tout couler d’un coup, la mise en œuvre est donc nettement plus longue. Dans les projets contemporains, il y a beaucoup de projets façade ( ex Bakker Boniface Architects au Canada). Le pisé est beaucoup utilisé pour son aspect esthétique. La terre est un matériau peu résistant à l’eau, il nécessite donc un entretien régulier, une bonne étanchéité et un toit de longue portée, afin d’éloigner les rejets d’eau. Les murs en terre crue sont souvent d’une grande épaisseur, ce qui peut poser problème au niveau des percements et de l’esthétique du bâtiment. Ces caractéristiques peuvent donc être percues comme contraignantes pour l’esthétique du batiment. Juliette Goudy : Selon les régions, la terre est adaptée à une technique spécifique, aujourd’hui on ne construit presque que en pisé, alors que ce n’est pas toujours la technique la plus adaptée. En Bretagne par exemple, la technique de la Bauges fonctionne beaucoup mieux avec la terre du site. Laboratoire CRATerre : recherche à améliorer la filière terre dans l’architecture. Expertise, optimisation des techniques, législatif. On peut comparer la filière terre à la filière bois d’il y a 20 ans, avec les préoccupations durables, le matériau bois s’est beaucoup développé dans la construction ces dernières années. Pensez vous que la Terre soit le matériau le plus écologique ? Oui, si on le compare avec le bois par exemple. Le bois vient souvent de loin. Le bilan du matériau bois est moins bon, difficile à exploiter. Si on utilisait du bois local, il serait très bon. La terre est le matériau le plus vertueux si elle est prise sur le site et pas stabilisée. Les constructions en pisé sont les plus faciles et nécessitent peu d’eau. Chaque construction en terre a sa logique. La technique de la Bauge, par exemple est monolithique, nécessite moins d’équipement que le pisé et est plus résistante. Les enduits en terre n’utilisent que les propriétés esthétiques de la terre pour donner une identité au bâtiment. Cela garde aussi les propriétés de régulation de confort thermique du matériau terre. Avec la terre, les techniques sont toujours différentes selon les projets, ce n’est pas comme le béton. Idée d’une centrale à pisé, comme le béton, technique similaire. L’architecte Marcelo Contes, revisite les techniques traditionnelles de la terre. Projection de terre. Reprend la technique du torchis. Projete de la terre sur des montants métalliques. Formé au DSA Terre de l’ENSAG, développe ce système au Chili. Hugo Gasnier : pour le DSA, j’ai travaillé sur un projet en Chine avec Quentin. Les habitants ne veulent plus utiliser la terre parce que cela fait pauvre. Le but était de leur montrer de nouvelles techniques d’utilisation de la terre, notamment par l’utilisation de banches à béton, pour leur montrer l’aspect moderne de la terre et qu’elle peut être utilisée comme du béton. Certains villages aux USA ou au Chili ( San Pedro de Atacama, dans le désert) continuent de construire en terre pour attirer les touristes, par son côté authentique et traditionnel. Seulement aux Etats Unis, on va simplement donner l’apparence aux bâtiment, il n’utilisent que des enduits en terre. 6/ Pourquoi pensez vous que la terre a disparu des constructions actuelles ? Juliette Goudy : à cause de l’image de la terre comme un matériau pauvre. (cf projet en Chine) Hugo Gasnier : On a construit en terre encore jusqu’à la période d’après guerre, avec l’industrialisation. On commence à utiliser le béton pour la construction de bunkers armés. Puis pour la reconstruction d’après guerre, le béton est une solution moderne, efficace, qui permet de reconstruire vite.
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7/Pourquoi cherchons nous à la réutiliser actuellement ? Actuellement, on redécouvre ses qualités esthétiques, thermiques, d’usage et confort (inertie). Elle se re-développe grâce aux préoccupations écologiques actuelles (bilan d’énergie grise très bon). Qualités esthétiques : Rendu graphique à travers son grain, sa couleur, son rythme linéaire des différentes couches qui la compose (technique du pisé). 10/ La terre peut-elle atteindre les performances et la résistances structurelle des matériaux industriels ? _ Juliette Goudy : Pisé aussi résistant que du béton cellulaire. _ Hugo : Oui, la terre coulée arrive à des caractéristiques très proche du béton. _ Marc Auzet : Aujourd’hui si la terre n’est pas stabilisée elle n’atteint pas les caractéristiques techniques du béton. Cependant elle est largement assez résistante pour de petits projets. Le problème est que aujourd’hui on utilise le béton pour tout, comme si on prenait un hélicoptère pour aller à l’école. Le pisé va la où il a sa place. C’est le systématisme du béton qui pose problème, car même si la terre n’est pas aussi résistante, elle peut convenir à la plupart des projets. La terre n’a pas forcément besoin d’être utilisée toute seule. Travaille avec Wang Shu. Mur de 8m de haut. Sur cette épaisseur, la terre ne peut pas porter. Dans le projet on utilise donc une charpente, le béton aide à soutenir, il a un rôle porteur. On est pas forcément anti béton. Le pisé ici a un rôle décoratif et de confort thermique. Cela permet aussi d’utiliser moins de béton, seuls des poteaux porteurs sont en béton. Les constructions en Chine ont recours au bois comme élément porteur, la terre est un remplissage. Cela dépend de la terre, des ressources, de la logique d’utilisation du matériau. Aujourd’hui tout les matériaux sont accessible, on ne construit plus avec ce que l’on a sur place. La terre est un matériau local, abondant. Hugo Gasnier : La terre en Europe garde une image « baba-cool », ce n’est pas chic. CONLUSION : Je retiens de cette interview, qu’il y a deux grandes familles dans le développement de la terre dans la construction, l’équipe CRATerre se bat pour utiliser de la terre crue non stabilisée, afin d’exploiter tout les bienfaits de la matière, notamment sa recyclabilité et sa faible empreinte écologique. D’autres vont utiliser la terre dans des projets contemporains mais vont simplement l’utiliser pour son aspect esthétique, authentique et sa performance en tant que régulateur thermique. La terre stabilisée est facile à utiliser avec nos techniques industrielles, mais perd de grande qualités de la matière. La terre crue non stabilisée est celle qui nécessite toutes ses recherches scientifiques, et pour laquelle CRATerre œuvre. La grosse difficulté avec la terre crue, est que étant prise sur le site et toujours différente, elle peut difficilement être standardisée, c’est aussi cela qui fait son charme. Chaque terre est différente, et fera un bâtiment nouveau, ce n’est pas comme du béton ou de l’acier. Cependant sa mise en œuvre est très complexe, car chaque terre comporte des propriétés spécifiques, la résistance change, les techniques et outils utilisés varient. La majeur partie du travaille scientifique sur la réactualisation de la terre dans l’architecture, est de rechercher à édicter un protocole afin d’amener une garantie sur ce matériau au maitre d’ouvrage, et le faire reconnaître au niveau des normes. La terre crue est utilisée depuis la nuit des temps et ce n’est pas tant la technique qui manque, mais réellement sa normalisation. Les acteurs qui développent des nouvelles techniques d’utilisation de la terre crue, afin de l’adapter aux techniques industrielles vont généralement la stabiliser, elle perd donc son intérêt en tant que matière, mais cela permet de faciliter considérablement sa mise en œuvre et d’être plus facilement utilisée par les maîtres d’ouvrage. Malgré la grande diversité de techniques de mise en œuvre de la terre crue, la majorité des projets contemporains se font en pisé, car c’est la technique qui correspond le mieu aux méthodes de productions industrielles et qui s’apparente le plus au béton.
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Entretien avec l’architecte Misse, du projet de Orléans : Pourquoi utilisez vous de la terre dans votre projet ? C’est une demande de la maitrise d’ouvrage. Je recherche à utiliser la terre dans mes projets, mais c’est souvent difficile. J’utilise la terre pour l’intelligence du matériau, dans une logique d’utilisation de matériaux locaux. C’est un matériau monolithique, esthétique avec un intérêt écologique et qui permet une réelle harmonie avec le site. J’essaye beaucoup de concours avec des projets en terre, mais il y une certaine peur chez la maitrise d’ouvrage.
Dossier de Presse Ecole Veyrins-Thuellin Une école… en Dauphiné… en pisé… et au XXIème siècle … Quelle merveilleuse opportunité pour contribuer à la mission éducative de l’architecte et de montrer que la culture du lieu est le référent pour se forger son identité, pour montrer la continuité entre les générations tout en s’adaptant aux données contextuelles ! Identité, culture et savoir-faire : Par sa situation dans le Nord Isère, région riche d’un patrimoine en pisé, la construction du groupe scolaire de Veyrins-Thuellin vient redonner du lien et de la fierté pour ces techniques qui paraissaient disparues face aux contraintes de la rentabilité et qui finalement aujourd’hui font de plus en plus la preuve que non seulement elles «nourrissent son homme», mais surtout qu’elles redonnent du sens, de la culture et de la fierté à l’activité manuelle et aux savoirs-faire de l’artisan. Comment ne pas saisir l’occasion de relever le défi de tous ces enjeux, surtout s’ils sont partagés et souhaités dès l’origine du projet par la maîtrise d’ouvrage et par la collectivité ! De tels enjeux deviennent, du coup, bien plus réalistes lorsque l’entente et la concertation sont possibles parce que la demande est le fruit d’une volonté, d’un projet, qui dépasse la seule construction d’une infrastructure ! Les enjeux spatiaux : Le projet rassemble quatre salles de classe, une salle périscolaire, une bibliothèque, un local informatique, les locaux des enseignants et de la direction, un espace de repos et les locaux de la restauration scolaire. Pour chercher la lumière naturelle et les apports thermiques passifs en hiver, le bâtiment se développe en « L », orientant les salles de classe au sud et la cantine à l’ouest, le tout largement ouvert sur la cour de récréation paysagée. Souhaitées par les utilisateurs dès la programmation, les salles de classe sont très grandes, de 75 m², et permettent l’aménagement de vastes plans de travail pour les activités connexes à l’enseignement. Pour assurer leur éclairement naturel, l’aménagement d’un « double jour » est apparu comme une évidence. Travaillée en coupe, l’aile de l’enseignement se développe en hauteur pour amener la lumière naturelle au fond des salles de classe et dans la circulation principale grâce à une succession de sheds extérieurs et intérieurs. Une cloison composée de « baobabs polychromes » anime cette circulation et transforme les rayons du soleil en reflets multicolores. Lumière et couleur, textures brutes et matériaux naturels composent les espaces créant des ambiances singulières.
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Systèmes constructifs et conception thermique : La mise au point des systèmes constructifs prend en compte et optimise les caractéristiques du pisé : sollicitation du pisé en compression, dimensionnement et calepinage selon le mode de mise en œuvre par banchage de trumeaux indépendants, orientation prioritaire des murs en pisé au sud et à l’ouest pour favoriser les propriétés hygrothermiques et l’inertie de la terre. Aux éléments construits en pisé, sont associés les matériaux bois pour la charpente, les dalles massives collaborantes bois/béton en plafond des salles de classe et sous face du préau, les briques isolantes en terre cuite de type « monomur » pour les murs nord et mitoyens, le métal pour les menuiseries et les pare-soleil. Réalisé avec de la terre locale extraite à 5 km du chantier, au bout du village, le pisé est travaillé en trumeaux indépendants à coffrage arrondi. Une succession aléatoire de trois largeurs différentes de trumeaux en pisé et d’ensembles vitrés composent les façades sud et ouest. Livrée et stockée sur le chantier, la terre est malaxée au fur et à mesure, déposée en couches de 40cm dans le coffrage et damée. Des lits successifs, teintés avec des colorants naturels, composent les murs en créant une matière à chaque fois particulière et inimitable qui garde en son sein l’empreinte de la main de l’homme qui la bâtie. Démarche participative : Par sa nature à faire dialoguer la culture constructive traditionnelle et l’architecturale contemporaine, ce bâtiment éducatif qui « sort de sa terre » est le fruit d’une démarche participative, qui a commencé dès sa conception par la concertation avec les futurs usagers, puis qui s’est poursuivi au cours du chantier. Des visites, des ateliers, des manipulations autour du matériau terre ont constitué autant de stimulations et permis l’éveil de la curiosité de la nouvelle génération et donné aux aînés un prétexte pour venir raconter aux bambins comment le pisé ça se faisait quand eux-mêmes n’étaient pas plus haut que trois noix…
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Matériaux Terre Crue Eco-construction Développement durable
Résumé Cette étude porte sur le développement de la terre dans l’architecture contemporaine. Dans un premier temps en s’interrogeant sur les raisons du déclin de l’architecture en terre, à travers l’analyse de l’évolution de la société et des méthodes de constructions. Puis en tentant de comprendre pourquoi un retour de la terre dans l’architecture pourrait avoir un intérêt face aux préoccupations actuelles. Dans une seconde partie, ce travail porte sur les différentes manières d’adapter un savoir-faire traditionnel aux méthodes de constructions contemporaines en recherchant quel travail est effectué au niveau des normes et des techniques afin de faciliter la mise en œuvre de la terre et apporter une garantie aux maitres d’ouvrage. Pour ensuite s’interroger sur les éventuelles dérives provoquées par les tentatives d’industrialisation de la terre. Enfin, cette recherche porte sur la manière dont les architectes vont exploiter les potentialités de la terre dans des projets contemporains par l’analyse de différentes réalisations et l’étude approfondie d’un projet réalisé dans la région Rhône-Alpes. This work is about the development of rammed earth in contemporary architecture. In a first part by questioning the reasons of earth’s decline in construction, through the study of society and construction technic’s evolution. Then by trying to understand why a return of earth in architecture would have an interest looking at actual concerns about global warming. In a second part, this work tries to understand the different ways of adapting traditionnal technics to industrial methods of construction by studying the work made to standardize earth to the norms and technics in order to help earth construction and bring a warranty to the clients. Finally this research is about the way how the architects are going to use earth’s potentialities in contemporary projects by the study of different realizations and a case study of a building of the Rhône-Alpes region.
Mur en pisé de la Rauch Residence / Martin Rauch Source: Architecture et Matériaux Editions Place des Victoires / LOFT Publication