Libertés - Septembre 2008

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Ne paraît pas aux mois de juillet-août. 9, rue Berckmans 1060 Bruxelles

DÉPOT À BRUXELLES X

Libertes!

BELGIQUEBELGIE PP 1/2345 BXL X

SEPTEMBRE 2008 – N°446 – LE MENSUEL D’AMNESTY INTERNATIONAL

IRAN

FEMMES ENTRE CHIEN ET LOUP

IMMIGRATION CLANDESTINE MER COURAGE

PEINE DE MORT MANIF 10 OCTOBRE AMBASSADE DU JAPON


É D ITO R I A L

MISSIONS ET DÉMISSIONS L

e 11 juillet 1995, la «zone de sécurité» de Srebrenica tombait aux mains de l’armée des Serbes de Bosnie, après des mois de pilonnage par des forces «bosno-serbes» qui avaient dans le même temps immobilisé la plupart des convois d’aide des Nations unies vers la ville, visant en particulier les livraisons de vivres, de médicaments et même de chaussures. Les derniers miliciens «bosno-musulmans» et 8 000 civils (essentiellement des hommes, mais aussi des femmes et des enfants) furent exécutés méthodiquement pendant quatre journées de carnage. Ce fut le pire massacre sur le sol européen depuis la fin du Troisième Reich, perpétré, qui plus est, sans opposition réelle des Casques bleus néerlandais, alors que le Conseil de Sécurité de l’ONU (résolution 819) avait décidé, en avril 1993, de créer une zone de sécurité autour de la ville. Pire, une autre résolution, la 836, «garantissait» la protection de Srebrenica par «tous les moyens nécessaires, y compris l’usage de la force», stipulant que «toutes les unités militaires ou paramilitaires devraient soit se retirer de la zone démilitarisée, soit déposer toutes leurs armes». L’ONU avait donc démissionné.

Après la chute de Srebrenica, rares furent les personnalités impliquées dans la «gestion» du conflit bosniaque à prendre la mesure du massacre qui allait s’ensuivre. Une exception fut Tadeusz Mazowiecki, ancien Premier ministre polonais et alors rapporteur spécial de la Commission des droits de l’Homme de l’ONU en exYougoslavie. C’était lui qui avait recommandé l’établissement de «zones de sécurité». Écoeuré et choqué, il démissionna. Ce 21 juillet, 13 années après le carnage, Radovan Karadzic a enfin été arrêté à Belgrade. L’ancien président de la Republika Srpska, ancien chef du Parti démocratique serbe et ancien commandant en chef de l’Armée serbe de Bosnie, était inculpé de crimes commis en Bosnie-Herzégovine, dont des crimes de génocide, des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre à Srebrenica. Si l’on est en droit de se réjouir, il n’en reste pas moins que de nombreuses inquiétudes se font entendre. En 2010, le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) devra théoriquement cesser ses travaux et les transférer à des justices nationales ex-yougoslaves déficientes. Le TPIY risque donc de ne disposer ni du temps ni des ressources nécessaires pour établir la vérité et rendre justice aux victimes des crimes de guerre et contre l’humanité commis en Bosnie-Herzégovine. Les poursuites engagées contre 115 des 161 personnes inculpées par le Tribunal ont abouti mais celles contre les 46 inculpés restants sont encore en cours, tandis que deux des inculpés, Ratko Mladic et Goran Hadzic, sont toujours en fuite. La justice internationale démissionnera-t-elle ? e Pascal Fenaux

Libertés ! • Rue Berckmans, 9 – 1060 Bruxelles • Tél : 02 538 81 77 Fax : 02 537 37 29 • libertes@aibf.be • www.libertes.be • Éditrice responsable : Christine Bika • Rédacteur en chef: Pascal Fenaux • Comité de rédaction: Bruno Brioni, Thandiwe Cattier, Véronique Druant, Samuel Grumiau, Anne Lowyck, Brian May, Suzanne Welles • Ont collaboré à ce numéro : Yasmina Hamlaoui et Céline Remy (st.) • Iconographie : Brian May • Maquette : RIF • Mise en page: Gherthrude Schiffon • Impression : Remy Roto • Couverture: À la sortie de la prière du vendredi, des islamistes iraniennes manifestent contre le relâchement du port du voile. Téhéran, 28 avril 2006. © AFP / Atta Kenare

CHANGEMENT D’ADRESSE – ATTESTATION FISCALE – MODIFICATION, ANNULATION OU NOUVELLE COTISATION DE MEMBRE/DONATEUR(TRICE) Madame Michele Ligot : mligot@aibf.be je change d’adresse (inscrire uniquement la nouvelle adresse) Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Prénom: . . . . . . . . . . N° de membre: . . . . . . . Adresse: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . N° . . . . . bte . . . . . . . . . . Code postal: . . . . . Localité: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Tél (obligatoire): . . . . . . . . . . . . . . . E-mail: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Oui, j'adhère aux objectifs d'Amnesty et souhaite devenir membre Je répartis le montant de : ma cotisation de mon abonnement sur toute l’année en complétant ce coupon et en le renvoyant à Amnesty International, 9 rue Berckmans à 1060 Bruxelles. Tout montant qui dépassera 14,87 e (prix de la cotisation ou de l'abonnement), sera considéré comme un «don», et par là-même jouira de la déductibilité fiscale pour autant que ce supplément soit de 30 e ou plus. Je verse tous les mois, au départ de mon compte n° . . . . . . . . . . – . . . . . . . . . . . . . . la somme de : 2,5 e 5e . . . . . . . . e (toute autre somme de mon choix) au profit du compte 001-2000070-06 de Amnesty International à partir du . . . . . . . . . . et jusqu’à nouvel ordre. Je conserve le droit d’annuler ou de modifier cet ordre à tout moment. ou je verse en une fois le mandat de . . . . . . . . . . . . . . au compte 001-2000070-06 Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prénom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Date de naissance: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . N° . . . . . . . . bte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Code postal: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Localité: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Tél (obligatoire): . . . . . . . . . . . . . . . . E-mail: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Profession: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Date: . . . . . . . . Signature:

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SOMMAIRE ACTUEL

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DOSSIER

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■ Géorgie-Ossétie-Russie : Caucasus belli ■ Pakistan : Chroniques de disparitions ■ Insolites-Brèves

IRAN : FEMMES ENTRE CHIEN ET LOUP ■ Quand les Iraniennes croyaient en la révolution islamique ■ Transition démographique et bouleversements sociaux ■ À quand la fin de la lapidation ? ■ Massacre des prisons : 20 ans d’impunité ■ Des signatures pour lutter contre la ségrégation

MOUVEMENT

■ Immigration clandestine : Mer courage ■ 10 octobre : Journée internationale

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contre la peine de mort ■ ISAVELIVES.BE

ISAVELIVES.BE

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CULTURE/AGENDA

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■ Lettres du mois ■ Bonnes nouvelles

■ Du sang sur la mémoire ■ Dommages collatéraux ■ Il n’y a plus âme qui vive


ACTU EL CHINE DÉBLOCAGE DU SITE AMNESTY Le 1er août dernier, Pékin débloquait enfin l’accès des internautes chinois à toute une série de sites «sensibles», donc celui du Secrétariat international (SI) d’Amnesty International. Cette décision mettait un terme à une polémique survenue après que les journalistes étrangers ont découvert que des sites comme Wikipedia ou BBC Chinese étaient inaccessibles. À peine débloqué, le site d’Amnesty a été visité les quatre premiers jours par 14 000 internautes chinois, soit trente fois le nombre de visites enregistrées en juillet. e

ITALIE TOUS LES CHEMINS MÈNENT AUX ROMS La discrimination à l’encontre des Roms a culminé cet été avec la décision d’imposer un relevé des empreintes digitales de tous les Roms, y compris les enfants. Amnesty condamne cette nouvelle mesure discriminatoire, disproportionnée et injustifiée. On assiste depuis 2007 à un accroissement du nombre d’expulsions forcées, parfois de quartiers entiers comme à Rome, et d’attaques xénophobes violentes comme à Naples où des logements roms ont été incendiés par une milice d’une centaine de personnes. e

LIBÉRIA DEUX PAS EN ARRIÈRE La présidente du Libéria Ellen Johnson-Sirleaf vient de promulguer une loi qui rétablit la peine de mort, cette dernière pouvant désormais être prononcée contre toute personne reconnue coupable de vol à main armée, de terrorisme ou de détournement de véhicule si ces crimes ont entraîné la mort. Cette décision revient sur la signature du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) qui prévoit l’abolition de cette peine, protocole que le Libéria avait ratifié en 2005. Amnesty demande l’abrogation de la loi. e

AFRIQUE DU SUD RÉFUGIÉS EXPULSÉS Dans la province de Gauteng (Johannesburg), les autorités ont décrété la fermeture, le 15 août 2008, de camps de personnes déplacées érigés suite aux violences xénophobes qui avaient éclaté en mai (principalement contre des Zimbabwéens) alors qu’aucune disposition n’a été prise pour leur réinsertion. En les privant d’abri et d’autres services élémentaires, les autorités sud-africaines exposent les réfugiés à des persécutions qu’ils tentaient de fuir, notamment en raison du climat xénophobe du pays. e

INDE «TIRER POUR TUER» Le 13 août, le gouvernement de l’État indien de Jammu et Cachemire a donné l’ordre aux forces de sécurité de «tirer pour tuer», en réponse aux affrontements intercommunautaires de Kishtwar, une ville actuellement sous couvrefeu après une vague de protestations qui a fait au moins 28 morts. Kishtwar a été la scène de violents heurts entre hindous et musulmans les 12 et 15 août; au moins deux personnes auraient été tuées par des tirs de la police. Des élections doivent avoir lieu prochainement dans cet État, ainsi qu’au niveau national. e

Des Sud-Ossètes découvrent leurs maisons détruites par les bombardements des forces loyalistes géorgiennes. Tskhinvali, 28 août 2008. © AFP / Viktor Drachev

GÉORGIE-OSSÉTIE-RUSSIE

CAUCASUS BELLI Après de longs mois de tensions, les combats ont repris le 8 août entre la Géorgie et la république indépendantiste d’Ossétie du Sud. Cette crise est la plus grave survenue depuis la trêve de 1992 qui avait alors mis fin à la guerre civile déclenchée pendant la lente désagrégation de l’Union soviétique et l’implosion de ses régions caucasiennes. Et, comme toujours, les civils trinquent et les observateurs en sont réduits à dresser la liste des violations du droit par les belligérants.

L

e 8 août dernier, les troupes géorgiennes lançaient une offensive militaire contre Tskhinvali, la capitale de l’Ossétie du Sud, tandis que le président géorgien Mikheil Saakachvili insistait sur la nécessité de «restaurer l’ordre constitutionnel» dans la région. S’engageant à «respecter la vie et la dignité des citoyens russes, où qu’ils se trouvent», le président russe Dmitri Medvedev réagissait en envoyant des troupes en renfort de celles qui étaient déjà stationnées en Ossétie du Sud dans le cadre du cessez-le-feu instauré en 1992. L’armée géorgienne a battu en retraite, la Fédération de Russie a accentué son processus de rapprochement avec l’Ossétie du Sud et une crise sans précédent s’est ouverte entre l’Union européenne (et particulièrement les anciens États du Pacte de Varsovie) et les États-Unis d’une part, et la Russie d’autre part. Les Ossètes sont un groupe ethnique distinct des Géorgiens. Majoritairement chrétiens (avec une forte minorité musulmane) ils parlent une langue persane. L’Ossétie du Sud est une ancienne région autonome de Géorgie. L’Ossétie du Nord est quant à elle une République autonome de Russie. Les deux entités sont séparées par une frontière qui court sur les sommets du Caucase. À l’époque de l’URSS, la Géorgie était l’une des 15 républiques constitutives de l’Union soviétique, tandis que l’Ossétie du Sud était une région (oblast) autonome de la Géorgie. En

1990, après la dissolution de la région autonome d’Ossétie du Sud par le gouvernement géorgien postsoviétique, l’Ossétie du Sud avait proclamé son indépendance, déclenchant une offensive militaire géorgienne qui allait faire 3 000 morts et 40 000 déplacés parmi les Ossètes. Le conflit avait pris fin en 1992 avec la signature d’un accord de cessez-le-feu et la mise en place d’une force tripartite de maintien de la paix composée de troupes russes, ossètes et géorgiennes. L’Ossétie du Sud jouissait d’une indépendance de facto depuis 1992, même si, jusqu’au 26 août dernier (voir cidessous), elle n’était reconnue par aucun État. Une bonne partie de sa population possède un passeport russe et un tiers des habitants serait d’origine «ethnique» géorgienne. Les tensions se sont accrues après l’élection du président Saakachvili en 2004 sur un programme de restauration de l’intégrité territoriale et de rétablissement de la souveraineté de la Géorgie sur l’Ossétie du Sud, ainsi que sur l’Abkhazie, une autre région non reconnue, située dans le nord-ouest de la Géorgie. Durant les opérations militaires, les principes du droit international humanitaire n’ont été que peu respectés, même s’ils s’imposent aussi bien aux États (Russie et Géorgie) qu’aux groupes armés nongouvernementaux (indépendantistes ossètes). Or, la guerre-éclair qui a éclaté début août a jeté sur les

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ACTU EL routes de nombreux civils, tant géorgiens qu’ossètes. Ainsi, le 19 août, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) estimait à plus de 160 000 le nombre de personnes déplacées, dont 98 000 personnes déplacées vers l’intérieur de la Géorgie même. Parmi ces personnes se trouve la majorité de la population de la ville de Gori et des villages voisins dans l’ouest de la Géorgie. Le 20 août, des délégués d’Amnesty International se sont rendus à Tbilissi dans les anciens locaux du ministère géorgien de la Défense qui abritent désormais 1 600 personnes déplacées en provenance d’Ossétie du Sud. Ces bâtiments n’ont ni eau courante, ni électricité, ni égout. Mais les organisations humanitaires ont eu beaucoup de mal à atteindre les civils restés dans les zones de combats, le premier convoi humanitaire des Nations unies ne pouvant entrer dans la ville de Gori que le 17 août. Des officiels russes indiquaient de leur côté que 30 000 personnes ayant fui l’Ossétie du Sud se trouvaient toujours en Russie, principalement en Ossétie du Nord. Certains des bombardements qui ont eu lieu en Ossétie du Sud et ailleurs en Géorgie ont frappé aveuglément des civils, ce qui constitue des crimes de guerre. On ne connaît pas encore avec précision le nombre de civils tués pendant le conflit. Le 20 août, les autorités russes indiquaient que 133 civils d’Ossétie du Sud avaient été tués, tandis que le 21 août, les autorités géorgiennes signalaient que 69 Géorgiens, des civils, avaient été tués pendant le

conflit. Les sources ossètes parlent quant à elles de quelque 1 300 civils tués. En Géorgie et en Russie, les civils demeurent vulnérables aux attaques fondées sur des critères ethniques. Des groupes armés irréguliers, dont la présence a été signalée en Ossétie du Sud et aux environs, se sont rendus coupables d’atteintes aux droits humains. Dans des villages d’Ossétie du Sud, des maisons habitées par des personnes d’origine géorgienne ont été pillées et incendiées et, selon certaines informations, des civils auraient été tués. Des maisons ont également été pillées et incendiées dans la région de Gori, dans l’ouest de la Géorgie. Finalement, la Géorgie et la Russie ont conclu un accord de cessez-le-feu négocié par la France (qui préside l’Union européenne), accord signé par la Géorgie le 15 août et la Russie le 16 août, même si cette dernière n’a commencé à retirer ses troupes de Géorgie qu’à partir du 20 août. Par ailleurs, l’accord du 12 août ne contenait pas de clause explicite relative à l’intégrité territoriale de la Géorgie. Et, le 26 août, la Russie a, semble-t-il, rendu la monnaie de leur pièce aux capitales occidentales qui avaient reconnu l’indépendance du Kosovo. Moscou a officiellement reconnu l’indépendance de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie, déclenchant une rare tempête diplomatique. e Pascal Fenaux À LIRE Notre dossier «L’emprise russe», dans Libertés! n°441, février 2008.

L’INSOLITE IL CASSE LE BARACK Badges et autocollants, mais aussi sauce piquante et vêtements pour chiens, les «produits dérivés» du candidat Barack Obama se sont arrachés à Denver (Colorado), où la convention du Parti démocrate a battu son plein du 26 au 28 août. Dans son magasin de produits pour chiens, Dog Savvy, Dana Hood explique que les produits les plus populaires auprès des 4 200 délégués et des dizaines de milliers de militants démocrates sont les T-shirts «Bark Obama», que l’on peut traduire par «Barack Obam’ouahouah». «Si nos chiffres de vente étaient des bulletins de vote», poursuit-elle, «Obama gagnerait à une majorité écrasante. Tous les jours, nous devons réassortir ses étalages, mais nous n’avons pas besoin de nous occuper de la section McCain parce que personne n’y va.» Son magasin propose pourtant un T-shirt pour chiens subtilement orné d’un John McCanine. D’autres magasins ont en rayon des objets encore plus insolites, comme le Democratic Donkey Dung ou «Crottin d’âne démocrate» (l’âne est l’emblème du parti) en chocolat bleu couvert de graines de tournesol… Bon appétit si vous passez à table. e (D’après AFP)

PAKISTAN

CHRONIQUES DE DISPARITIONS Dans un rapport rendu public le 23 juillet, Amnesty International demandait au gouvernement pakistanais de donner des explications sur le sort de plusieurs centaines de personnes portées disparues ou victimes de disparitions forcées organisées par les organes chargés de la sécurité nationale et les services de renseignement. Les témoignages recueillis par l’organisation sont à cet égard accablants. Hélas, la crise politique déclenchée par la démission du président Musharraf le 18 août et l’explosion de la coalition gouvernementale anti-Musharraf une semaine plus tard ne vont pas dans le sens de la transparence.

S

ur foi des témoignages accumulés, Amnesty International demandait au gouvernement issu des élections générales du 18 février de rétablir dans leurs fonctions les juges destitués qui avaient instruit des affaires de «disparition» par le passé. Lorsque le président Pervez Musharraf avait décrété l’état d’urgence, en novembre 2007, il s’était empressé de limoger des juges de premier plan qui avaient réclamé des réponses de l’État sur plusieurs disparitions forcées. Dans son rapport Denying the undeniable, enforced disappearances in Pakistan, Amnesty International s’appuie sur des registres judiciaires officiels et sur les déclarations sous serment de victimes et de témoins de disparitions forcées. Plusieurs «disparus réapparus»

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suite aux pressions de la justice civile sont en outre des enfants, comme Asad Usman, un garçon de neuf ans, qui avait été appréhendé par les garde-frontières du Baloutchistan, lesquels avaient déclaré publiquement qu’il serait libéré une fois que son frère aîné, recherché par les autorités, se serait rendu. Un autre cas est celui d’Imran Munir, un ressortissant malaisien d’origine pakistanaise, qui avait été arrêté en juillet 2006. On ignorait où il se trouvait jusqu’à ce que la Cour suprême soit informée en mai 2007 qu’il était accusé d’«espionnage contre le Pakistan» par un tribunal militaire. Dans une note écrite de la main d’Imran Munir, authentifiée et ensuite remise au Président de la Cour, on peut lire le témoignage suivant : «Les gardes qui surveillaient les 12 cellules d’isolement m’ont expliqué que la seule façon d’échapper aux griffes de l’ISI [les services de renseignements militaires] était de collaborer et de leur avouer ce qu’ils voulaient entendre, sinon je serai remis aux Américains, envoyé à Guantanamo, torturé, voire exécuté. En parvenant à communiquer avec trois autres détenus mis au secret, j’ai compris qu’eux aussi étaient

j Ayesha Janjua tient une photo de son père Masood Janjua, «disparu» depuis le 30 juillet 2006. Imran Munir est l’un des derniers à l’avoir rencontré, détenu comme lui par l’ISI. Rawalpindi, septembre 2006. © AI détenus pour des raisons qui ne leur avaient pas été communiquées.» Un mois plus tard, la Cour apprenait qu’Imran Munir avait été condamné à huit ans d’emprisonnement. La Cour suprême avait alors exigé qu’il soit présenté devant elle et, constatant que son état de santé se détériorait, avait ordonné son hospitalisation. Imran Munir devait faire une déposition concernant sa disparition forcée lorsque son audience a été interrompue par l’instauration de l’état d’urgence en novembre 2007. Les autorités militaires ont finalement annulé sa condamnation après que la Cour suprême eut remis ce jugement en question. Amnesty International a appris qu’Imran Munir n’a pas encore fait l’objet d’un nouveau procès pour espionnage, charge toujours retenue contre lui, et que son internement à l’hôpital se poursuit. e P.F. Denying the undeniable, enforced disappearances in Pakistan (ASA 33/018/2008). Lire aussi le dossier «L’équation pakistanaise», Libertés!, n° 439, décembre 2007.


DOSSIER

IRAN

FEMMES ENTRE CHIEN ET LOUP Il y aura bientôt trente ans, le régime impérial iranien était renversé par un vaste mouvement populaire et une coalition assez inattendue entre communistes, nationalistes républicains, islamistes et clercs religieux. Rapidement dominée et ensuite violemment recadrée par les islamistes, la révolution de 1979 allait donner naissance à un régime politique dictatorial et dont l’hostilité aux Occidentaux allait devenir l’unique clé de lecture et de compréhension pour de nombreux de nos concitoyens. En juin 2005, l’élection de Mahmoud Ahmadinejad – un président ultraconservateur et populiste – a généré de nouvelles tensions internationales, essentiellement autour du programme nucléaire iranien, tandis que de nouvelles crispations se sont fait sentir sur le front intérieur, mettant gravement en danger les quelques libértés civiles glânées çà et là sous les huit années de présidence réformatrice de Mohammad Khatami. Parmi ces libertés, celles conquises à tâtons par les femmes tiennent évidemment une place de choix. Qu’en est-il désormais dans l’Iran de 2008? C’est ce que nous allons tenter de voir dans une série de reportages réalisés cet été.

Rue Enqelab («Révolution») à Sanandaj, capitale du Kurdistan iranien. Le Kurdistan est considéré comme une province «délicate» par les autorités iraniennes en raison de certains mouvements indépendantistes. Sanandaj, juin 2008. © Yasmina Hamlaoui

QUAND LES IRANIENNES CROYAIENT EN LA RÉVOLUTION ISLAMIQUE L’un des grands paradoxes de l’histoire mouvementée de l’Iran réside dans la part active que les femmes ont prise dans la Révolution islamique de 1979. Mais, l’euphorie révolutionnaire a vite cédé la place à de tristes lendemains, les lois discriminant les femmes tombant les unes après les autres, comme des couperets. L’islam, une fois politisé, s’est en effet empressé de supprimer la Loi de la protection familiale dictée par le Shah d’Iran, et de ramener les Iraniennes à l’état de «semi citoyens».

L

e réveil a été brutal pour de nombreuses femmes qui avaient soutenu la Révolution de 1979. «Nous n’avons pas compris ce qui s’était passé, c’est comme si nous étions sorties d’un petit puit pour tomber dans un plus grand», c’est par ces mots que Ziba, artiste à Téhéran, décrit le passage de l’Iran répressif et autoritaire de Mohammad Reza Shah Pahlavi à l’Iran tyrannique et ségrégationniste de Khomeiny. Le 8 mars 1979, seulement un mois après l’instauration de la République islamique, les femmes

manifestaient dans les rues de Téhéran contre l’application de la Charia (loi islamique). La réplique, sans équivoque, ne se fit pas attendre. «Une campagne massive de purification»(1), dans les secteurs privés comme publics, fut lancée à l’encontre des femmes considérées comme trop modernistes ou laïques : licenciements, préretraites et migrations, jusqu’aux comités de purification – paksâzi – créés pour poursuivre cet écrémage. L’ayatollah Khomeiny renvoya les Iraniennes dans leurs foyers, afin qu’elles y reprennent une

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DOSSIER condition de femme «conforme» aux valeurs de l’Islam, du moins telles que revendiquées par le clergé iranien. Non sans les avoir préalablement remerciées de leur soutien : «Nous fûmes témoins de la révolte de nos femmes musulmanes lors de notre Révolution (…). Ces femmes sont descendues dans la rue, se sont révoltées, ont versé leur sang et certaines sont mortes pour que notre révolution soit victorieuse»(2).

RETOUR SUR UNE RÉVOLUTION DÉTOURNÉE Par leur présence au sein de la Révolution de 1979, les Iraniennes revendiquaient un rôle dans l’espace sociopolitique, qui ne soit plus soumis aux distinctions de genre et de générations.Leurs rassemblements dénonçaient haut et fort un féminisme que Reza Shah s’était approprié, un féminisme qui n’avait bénéficié qu’à quelques poignées de femmes et n’avait pas réussi à mettre fin aux traditions patriarcales. Dans le cadre de ce que l’on désigne comme la Révolution blanche, le Shah opéra pourtant, en 1962-63, un vaste programme de modernisation et de laïcisation forcée, au sein duquel un ensemble de réformes était destiné aux femmes, comme le droit de vote. Dès 1963, les «réformes venues d’en haut», telles que les définit l’iranologue Bernard Hourcade, furent marquées par des manifestations de masse. Pour le monarque, la laïcisation se définissait comme le pendant de la modernisation et, sur cette considération, il obligea les femmes à se dévoiler dans les lieux publics. Cette contrainte fut vécue comme une violence psychologique et un affront aux croyances de tout un pan de la population. Reza Shah poursuivit néanmoins la libéralisation forcée des femmes par la Loi de la protection de la famille adoptée en 1967 révisée en 1975 : service militaire obligatoire pour les femmes célibataires, restriction de la polygamie (nécessité de l’accord préalable de l’épouse), élévation de l’âge de la majorité de 15 à 18 ans pour les femmes, droit de demander le divorce pour les épouses, droit à l’avortement, droit d’accès à des fonctions traditionnellement dévolues aux hommes dans le domaine juridique, dans les forces armées et de police… Les motivations profondes de Reza Shah trouvaient leurs racines dans sa volonté de gagner la sympathie des pays occidentaux en intégrant la promotion de la femme dans le processus de développement du pays. Azadeh Kian-Thiébaut, chargée de recherches au CNRS, évoque un «féminisme d’État» qui hésitait entre conservatisme et émancipation, et dont les causes profondes d’échec reposaient sur l’absence de campagne de conscientisation de la population. Les réformes statutaires furent lancées sans véritable volonté de changement des mentalités traditionalistes et patriarcales. Dans une interview accordée en 1979 à la journaliste italienne Oriana Fallaci, le Shah exposa sans complexe sa conception de la femme et, intrin-

sèquement, les limites de sa politique forcée de modernisation : «Vous (les femmes) êtes l’égale de l’homme aux yeux de la loi mais; excusez-moi de vous le dire ainsi, certes pas en capacité». Pour preuve, à la veille de la Révolution, de nombreuses femmes ne connaissaient pas leur droit à l’avortement et 60 % des Iraniens étaient encore analphabètes malgré les armées du Savoir(3) qui sillonnaient les campagnes. La dégradation de la spécificité culturelle iranienne a été l’un des thèmes récurrents utilisé afin de fédérer la population autour de la destitution de Mohammad Reza Shah Pahlavi. L’islam chiite fut dès lors désigné comme porte-drapeau de la singularité iranienne et, par son truchement, celui de la Révolution de 1979. Shoreh, sociologue installée à Téhéran, le résume en ces mots : «Depuis l’époque Qadjar, les Iraniens ont subi “une acculturation forcée” accompagnée d’une “déculturation iranienne”. C’est ce que beaucoup dénoncèrent en descendant dans la rue, et les femmes, malgré la Loi sur la protection familiale, en faisaient partie». L’ayatollah Khomeiny a su capter le sentiment d’infériorité du peuple qui rejetait en bloc la domination culturelle et politique de l’Occident sur l’Iran, alors assimilée à de l’impérialisme.

TRENTE ANNÉES D’ISLAM POLITIQUE Si, en 1963, l’ayatollah Khomeiny dénonce le droit de vote des femmes en tant qu’hérésie, il se ravise très vite afin d’obtenir le soutien des Iraniennes, et leur fit miroiter la liberté attendue: «Les femmes sont libres dans la République islamique de choisir leurs métiers, leur avenir, et leurs vêtements»(4). Mais ce que la Constitution de la République islamique de novembre 1979 concède en garantissant les droits de la femme «dans tous les domaines», elle le reprend aussitôt en soumettant l’ensemble des droits accordés à «l’observance des préceptes islamiques», terminologie donnant libre cours aux interprétations restrictives et discriminatoires des autorités conservatrices. La République islamique s’empresse d’ailleurs de combler ce flou juridique en légiférant sur le droit des familles et celui des femmes perçues comme garante de la cohésion familiale et sociale. Les Iraniennes sont dès lors soumises à une conception rétrograde de la structure de la société, conception qui s’organise autour du corps familial sacralisé. Certes, la population féminine n’est pas totalement écartée de l’organisation sociale et économique du pays, elle n’est pas non plus interdite de travail et les écoles lui sont ouvertes. Toutefois, le gouvernement adopte de nombreuses mesures à double tranchant afin d’inciter les femmes à rester dans leurs foyers après un accouchement, de les orienter vers des études plus «féminines», ou encore de les diriger vers des emplois à mi-temps. La jeune République ne cache pas qu’elle préfère cantonner les femmes à la sphère privée, en tant que mère ou épouse. Ce rôle se présente comme une coquille vide puisque n’y sont attachées que des obligations, tandis que les droits tombent dans l’escarcelle du père ou de l’époux. Ainsi l’époux dispose d’un droit unilatéral au divorce en même temps qu’une pleine autorité parentale, il réacquiert le droit à la polygamie sans nécessité de l’accord préalable de l’épouse, les femmes héritent de la moitié de la part cédée aux hommes. Que ce soit pour le prix du sang(5), les questions d’héritage ou en matière de témoignage juridique – affaires financières et familiales-, une femme vaut la moitié d’un homme. De plus, une épouse ne peut quitter le pays ou même son foyer sans l’autorisation de son mari. Trente années se sont écoulées, trente années d’un régime dont le modèle d’organisation sociale accordant aux hommes l’autorité dominante, ne peut paradoxalement être maintenu qu’avec le soutien des femmes. Pour autant, la situation n’est pas restée figée, et peu à peu les Iraniennes se sont évertuées à remplir cette coquille vide par un niveau d’instruction plus élevé que celui des hommes. Ce récent déséquilibre éducationnel en faveur des femmes inquiète d’ailleurs le clergé iranien qui craint que la population féminine ne continue sa révolution là où elle l’avait abandonnée. e Yasmina Hamlaoui (1) Azadeh Kian-Thiébaut, Les femmes iraniennes entre Islam, État et famille, Maisonneuve et Larose, 2002. (2) Marie Ladier-Fouladi, «Démographie, société et changements politiques en Iran», dans Esprit, août 2001. (3) Hommes et femmes conscrits, qui sous le régime du Shah, se rendaient dans les différentes provinces iraniennes dans le cadre de missions éducatives auprès de la population. (4) Une interview parue dans The Guardian, 1978. (5) Indemnité qui doit être versée à la famille de la victime en cas de meurtre.

j Une militante de la Campaign for Equality manifeste dans le Parc Daneshjoo contre le maintien en détention de Maryam Hosseinkhah et Jelveh Javaheri. Téhéran, 13 décembre 2007. © Arash Ashoorinia, www.kosoof.com

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DOSSIER j Lors d’un défilé de mode organisé au Sadabad Palace de Téhéran, une Iranienne exhibe une robe répondant aux critères d’«authenticité historique» et de résistance à la mode occidentale. Téhéran, 5 mars 2007. © AFP / Behrouz Mehri

TRANSITION DÉMOGRAPHIQUE ET BOULEVERSEMENTS SOCIAUX L’ensemble des pays du Sud est aujourd’hui engagé dans une transition démographique. L’Iran, pour sa part, achève sa phase transitionnelle pour amorcer un régime démographique dit moderne. Les nouvelles caractéristiques de la population iranienne ont des conséquences indéniables sur la structure de la société qui, peu à peu, abandonne ses oripeaux traditionalistes pour revêtir un certain «modernisme oriental», malgré les résistances du clergé chiite.

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lusieurs phases caractérisent l’histoire démographique iranienne. De 1950 à 1986, la très forte croissance démographique de l’Iran, découlant d’une baisse de la mortalité conjuguée au maintien d’un taux de natalité élevé, a multiplié par trois sa population. À partir de 1986, le taux d’accroissement naturel commence à diminuer. L’année 1989 représente une véritable fracture dans l’évolution démographique de l’Iran, qui décide de rationaliser dans sa politique des naissances. Si dans un premier temps, l’Ayatollah Khomeiny a incité à la procréation afin de donner des enfants à la Révolution, la guerre contre l’Irak, les difficultés économiques et la crise pétrolière ont finalement poussé la jeune République islamique à renoncer aux premiers principes. Après avoir été interdite, la contraception fut à nouveau légalisée, donnant à l’Iran un rôle de locomotive pour les autres pays de la région en matière de contrôle de fécondité.

LES NOUVELLES FONDATIONS DE LA SOCIÉTÉ IRANIENNE Aujourd’hui, l’Iran compte 70 millions d’habitants, pourtant l’explosion démographique du pays n’est plus d’actualité. La République islamique est parvenue à une remarquable maîtrise du taux de natalité : une Iranienne met deux enfants au monde en 2005, contre sept en 1986. À peine une génération aura suffi pour modifier la conception traditionnelle de la cellule familiale, cela tient au taux élevé d’alphabétisation des femmes(1) et à la prise de conscience inhérente, le niveau d’instruction des mères étant le requis préalable à un comportement démographique moderne. Marie LadierFouladi, démographe et spécialiste du monde iranien l’explique : «L’amorce de la transition de la fécondité apparaît pour l’essentiel, comme l’œuvre de ces jeunes femmes plus instruites que leurs aînées (…) dans un contexte social favorable»(2). En effet, un tel bilan démographique ne peut être le seul fruit d’une politique gouvernementale, aussi incitative soit-elle, mais présuppose que les valeurs de la société iranienne se refondent sur une approche plus moderne. L’urbanisation galopante, le taux d’alphabétisation élevé tant chez les hommes que chez les femmes, l’accès à des moyens d’information variés, la poursuite d’études supérieures (25 % de ceux en âge de suivre des études universitaires), le recul de l’âge du mariage, mais aussi une population majoritairement jeune sont autant de facteurs allant vers une remise en cause des structures traditionnelles familiales et sociales. Cependant, la société évolue plus vite que ces lois.

QUAND UN GOUVERNEMENT DÉNIGRE LA MOITIÉ DE SA POPULATION Ce sont les femmes qui en premier subissent le décalage entre le nouvel Iran qu’elles contribuent largement à redéfinir et le système ancien patriarcal qui les enferme dans le carcan juridique de mineures. Elles se retrouvent confrontées à un statut juridique rétrograde qui continue à nier ces évolutions. Cette situation est aggravée par leur marginalisation dans un système économique qui ne reconnaît pas leur valeur et ne leur permet pas de trouver des emplois à la mesure de leur niveau d’études. Nombreuses sont les Iraniennes qui acceptent mal ces décalages et paradoxes, et qui tombent dans une crise d’identité, étirées entre tradition et modernité. Fragilisées, celles qui, en plus de tout cela, vivent dans des situations précaires, deviennent des victimes de choix devant des fléaux de société comme la prostitution, la drogue, l’HIV. Le phénomène peut surprendre, mais il est connu du gouvernement qui se refuse à divulguer des chiffres. Sur ce triste registre, on observe une recrudescence du taux de suicide chez les jeunes femmes qui cèdent devant l’impasse. «Les femmes se droguent plus que les hommes, car la pression sociale et économique pèse plus lourd sur elles. Peu de débouchés économiques leur sont proposés et elles sont les premières écartées des emplois en raison de la récession économique», explique Zohren, gynécologiste à Téhéran. Selon un représentant des Nations unies, souhaitant garder l’anonymat, 6 % de la population utilise des drogues, symptôme d’une fracture importante d’une partie de la population en recherche de repères. Si l’on s’en tient aux indicateurs de développement humain habituels, l’Iran fait office d’excellent élève et se démarque en tant que société moderne dans la région. Mais une lecture en filigrane nous donne un autre regard sur les changements de la société iranienne : la population réclame une transition démocratique comme conséquence naturelle de la transition démographique, au risque de dériver. e Y. H. (1) En 1966, le taux d’alphabétisation de la population féminine âgée de plus de 7 ans atteignait difficilement les 20 %, alors qu’elle dépasse les 95 % en 2008, selon les statistiques iraniennes et de l’UNESCO. (2) Marie Ladier-Fouladi, «Démographie, société et changements politiques en Iran», dans Esprit, août 2001.

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DOSSIER MASSACRE DES PRISONS

20 ANS D’IMPUNITÉ En septembre 1988, les autorités iraniennes lançaient une vague d’exécutions sommaires, massives et le plus souvent secrètes de prisonniers politiques : au total, entre 4500 et 5000 prisonniers, parmi lesquels des femmes, ont ainsi perdu la vie.

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Des Iraniennes se rendent chez un membre de leur famille pour y commémorer l’anniversaire de la mort de Fatemeh, la fille du prophète Mohammed. Village de l’Azerbaïdjan, juin 2008. © Yasmina Hamlaoui

e «massacre des prisons» a eu lieu dans plusieurs établissements pénitentiaires à travers le pays, de manière systématique et pendant près de six mois, sans que les familles des personnes mises à mort soient informées. La grande majorité de ces prisonniers d’opinion politique ou religieuse avaient été condamnés à mort au terme de procès expéditifs et leur exécution était censée enrayer la menace présumée que représentait l’Organisation iranienne des Moudjahidin du Peuple (OIMP, laïque et nationaliste) et d’autres organisations politiques opposées au gouvernement iranien. Il s’agissait de la plus importante vague d’homicides depuis celles qui avaient eu lieu lors des deux premières années ayant suivi la Révolution islamique en 1979(1). Les quelque 5000 morts ont été enterrés anonymement dans des fosses communes, principalement dans le cimetière de Khavaran, au sud de Téhéran. A partir d’octobre 1988, les autorités iraniennes ont même fait signer aux familles des exécutés des documents les engageant à ne pas organiser de funérailles ni ériger de pierres tombales, ajoutant à leur désespoir. Cependant, pour les 20 ans de l’événement, les proches des victimes ont tenté, le 28 août dernier, de se rendre dans le cimetière de Khavaran pour y protester et se recueillir. En vain. Amnesty a d’ailleurs rappelé à cette occasion au gouvernement iranien «qu’il est tenu, aux termes du droit international, d’autoriser les personnes qui se

À QUAND LA FIN DE LA LAPIDATION ? Chaque année, des centaines d’hommes et de femmes sont exécutés en Iran. Amnesty international a enregistré plus de 250 exécutions pour la seule année 2007. Parallèlement, pour la deuxième fois en deux ans, le chef du pouvoir judiciaire iranien vient de suspendre la pratique cruelle de la lapidation. Est-ce un signe d’humanisation de la justice iranienne ?

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e 6 août 2008, les autorités iraniennes ont annoncé la suspension des exécutions par lapidation, sans pour autant modifier le code pénal. Celuici prévoit la mort par lapidation, une peine destinée à causer un maximum de souffrances, jusqu’à ce que mort s’ensuive. Pour y parvenir, de nombreuses précautions sont prises. L’article 102 établit que les hommes doivent être enterrés jusqu’à la taille et les femmes jusqu’à la poitrine, tandis que l’article 104 pousse la perversité jusqu’à décrire la taille des pierres nécessaires pour faire durer le supplice. En décembre 2002, l’ayatollah Mahmoud Hashemi Shahroudi, le chef du pouvoir judiciaire, avait déjà déposé un moratoire sur les exécutions par lapidation. «Le moratoire fut respecté jusqu’en 2006, date à partir de laquelle la situation lui a échappé», explique Asieh Amini, journaliste et militante de la campagne Stop Stoning Forever. «Mahmoud Shahroudi tente de faire évoluer les mentalités, notamment en suscitant des débats sur la lapidation au sein du Majlis, le Parlement iranien. Mais il rencontre des résistances». De fait, certains juges locaux considèrent que la lapidation est une tradition de l’islam et qu’on ne peut y déroger. L’incurie du système judiciaire a donc fait échouer ce premier moratoire.

UNE CAMPAGNE CONTRE LA MORT Stop Stoning Forever a été lancé au printemps 2006. Cette campagne est le résultat du travail d’une poignée de personnes qui, malgré le harcèlement et les tentatives d’intimidation des autorités, tentent de porter à la lumière les affaires dans lesquelles des personnes risquent la lapidation. Les militants jouent alors contre la montre pour suspendre les sentences, en divulguant l’information auprès des organisations internationales de protection des droits humains, en contactant la presse iranienne et en sollicitant des parlementaires. Leurs démarches consistent 8 Libertés ! Septembre 2008

également à soutenir les détenus par une défense appropriée. Toutes les actions entreprises ont permis de sauver cinq vies depuis le lancement de la campagne. Le dernier moratoire du chef du pouvoir judiciaire donne de nouveaux espoirs. Déjà, plusieurs femmes incarcérées ont vu leur peine commuée. Pourtant, Stop Stoning Forever s’interroge sur le mode de commutation des peines : une personne destinée à la lapidation ne sera-t-elle pas poussée vers la potence ? La peine de mort restant applicable, les raisons de se réjouir sont donc bien limitées.

UNE JUSTICE PENSÉE POUR LES HOMMES La volonté des bénévoles de Stop Stoning Forever est d’aller plus loin pour arriver à la suppression totale de la peine de mort. Beaucoup considèrent également qu’en intervenant en amont, il est possible d’empêcher les faits délictuels ou criminels de se produire et donc d’échapper à la peine capitale. Pour y parvenir, la campagne défend une réforme du statut des femmes. Asieh Amini constate en effet que la plupart des faits reprochés aux Iraniennes inculpées sont les conséquences d’un système patriarcal qui les a acculées à la violence : «C’est finalement contre tout le système que Stop Stoning Forever se bat. Bien sûr, il ne s’agit pas de défendre le meurtre qu’une femme a commis ou de juger ses moeurs, mais de soutenir que ce genre de cas aurait pu être évité si l’on avait accordé des droits aux femmes : le droit de divorcer librement, repousser l’âge légal du mariage – aujourd’hui fixé à 13 ans – pour permettre aux femmes de choisir en toute conscience leur époux…» Par ailleurs, les Iraniennes sont davantage fragilisées face à un système judiciaire qui reste ancré dans la reproduction de valeurs patriarcales et les soustrait à un jugement équitable. Ainsi, le poids du témoignage d’un homme devant la justice représente deux fois celui d’une femme. Dans les zones rurales, les femmes sont d’autant plus victimes de ces lois discriminatoires qu’elles sont moins éduquées et moins informées de leurs droits(1). Pour l’heure, les autorités iraniennes n’envisagent aucune réforme du Code pénal. Asieh Amini en a déjà conclu que seule la pression exercée par la population iranienne pourra faire évoluer les lois discriminatoires. e Y.H. (1) Voir à ce propos le rapport publié par AI en janvier 2008, Iran – End executions by stoning (MDE 13/001/2008).


DOSSIER j Une Iranienne passe devant une affiche de la campagne Un Million de Signatures, lors d’une conférence de presse. Téhéran, 27 août 2007. © AFP / Behrouz Mehri

DES SIGNATURES POUR LUTTER CONTRE LA SÉGRÉGATION rassemblent pacifiquement à exprimer leur point de vue [et leur chagrin] sans craindre d’être arrêtées». Face au manque de détermination des autorités à obliger les responsables à rendre compte de leurs actes, des ONG ont mis sur pied des «tribunaux civils» qui, en plus d’être un acte de protestation en soi, permettent aux individus directement touchés, aux proches des victimes principalement, d’exprimer leur traumatisme, dans une atmosphère de réconfort et de sécurité. Plus, ces «faux» procès pourraient faire émerger de nouvelles informations qui pourraient servir de base à une enquête en vue d’éventuelles procédures pénales. Toutefois rien ne saurait se substituer à une véritable enquête et à une procédure légale : les personnes qui ont ordonné, organisé ou effectué ces milliers d’exécutions doivent être poursuivies et jugées dans le respect des normes internationales d’équité des procès. Au nom du droit international, Amnesty International demande au gouvernement iranien de conduire une enquête indépendante et impartiale afin de faire la lumière sur ces massacres et de traduire en justice les responsables. Amnesty International continue de faire campagne contre les atteintes aux droits humains en Iran, notamment en ce qui concerne l’exécution de mineurs délinquants, les droits des femmes, la répression des dissidents, la torture et le recours très fréquent à la peine capitale(2). e Céline Remy (st.) (1) Voir le rapport publié par AI en décembre 1990 : Iran. Violations des droits de l’homme 1987-1990 (MDE 13/21/90). (2) Voir notre dossier «Iran. La société atomisée», Libertés! n°427, octobre 2006.

À la mi-mai, le maire de Téhéran, Mohammad Baqir Ghalibaf, a inauguré en grandes pompes un nouveau parc de sports et loisirs de Téhéran. Celui-ci a pour particularité d’être exclusivement réservé aux femmes.

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Le Paradis des Mères», tel qu’il a été nommé, constitue le troisième parc en son genre. Ces parcs «ségrégationnistes» avaient été initiés dans les villes très conservatrices et religieuses de Meshed et de Qom, il y a déjà trois ans. À l’exception des gardiens postés à l’entrée, le personnel y est entièrement féminin. Dès qu’elles y pénètrent les femmes peuvent ainsi se délester de leurs foulards et déambuler dans des tenues légères plus appropriées à la pratique du sport, une barrière colorée de quatre mètres de haut les préservant des regards des hommes. Ce parc n’est pas la première initiative du genre : taxis réservés à l’usage des femmes, ascenseurs pour femmes, piscines pour femmes, stade de football pour équipes et public féminins, hôpitaux avec personnel féminin, jusqu’à récemment une île réservée aux femmes au milieu du lac d’Oroumiyeh. Certains considèrent ce genre d’initiatives comme une bulle d’oxygène au milieu de l’atmosphère étouffante imposée aux femmes par toute une kyrielle de restrictions dans les lieux publics. D’autres l’envisagent comme une ségrégation de genre supplémentaire, de nombreux militants des droits humains s’inquiètent d’ailleurs de la dégradation du statut des femmes durant ces dernières années. De fait, depuis son arrivée au pouvoir, en 2005, le Président Mahmoud Ahmadinejad poursuit sans relâche une politique discriminatoire et ségrégationniste à l’encontre des Iraniennes. N’a-t-il pas lancé «le Plan pour la sécurité publique» permettant de poursuivre dans les rues celles qui sont «mal voilées». En créant des lieux réservés aux femmes, le gouvernement de Mahmoud Ahmadinejad tente d’apaiser le flot de revendications des Iraniennes, tout en détournant leur attention de mouvements comme la campagne Un Million de signatures. Cette campagne apporte la preuve qu’un réseau national de solidarité pour une réforme des lois discriminatoires se densifie. Depuis deux ans, le mouvement s’est engagé à récolter des signatures pour une pétition qui demande la révision de toutes les lois discriminatoires et qui devrait être présentée à terme au Parlement Iranien. La campagne s’étend aujourd’hui sur 15 provinces et réunit des milliers de militants bénévoles. Les autorités iraniennes réagissent violemment à l’encontre des différentes initiatives prises par des défenseurs des droits humains: arrestations, interdictions de tenir des réunions ou toutes formes de manifestation, restrictions dans les déplacements à l’étranger, condamnations à des amendes et à des peines d’emprisonnement … Le nom du nouveau parc, «Le Paradis des Mères» enferme les Iraniennes dans la seule identité que les autorités veulent bien leur reconnaître : celui de mère. Toutefois, parmi les promeneuses du parc, certaines accostent les mères pour leur faire signer la pétition. e Y.H.

j Une Iranienne se dispute avec un policier qui participe à une opération coup de poing pour faire respecter le code vestimentaire et le «Plan pour la sécurité publique». © AFP / Atta Kenare

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MOUVEMENT NOS FORMATIONS DE LA RENTRÉE Si l’envie d’en savoir plus sur notre mouvement et les droits humains vous démange, inscrivez-vous à l’une de nos formations ! Voici le programme : 18 septembre de 19h00 à 22h00 Découvrir Amnesty 27 septembre de 10h00 à 15h00 La peine de mort 27 septembre de 10h00 à 16h00 Protection internationale des droits fondamentaux (Namur) 4 octobre de 10h00 à 16h00 Dignité humaine et droits fondamentaux (Liège) 4 octobre de 09h30 à 12h30 Découvrir Amnesty 11 octobre de 10h00 à 16h30 Homosexualités et droits humains 18 octobre de 10h00 à 15h00 Une bougie se vend d’elle à même 25 octobre de 10h00 à 16h30 Combattre la torture 6 novembre de 19h00 à 22h00 Découvrir Amnesty 8 novembre de 10h00 à 15h00 Parler de la peine de mort 15 novembre de 09h30 à 16h30 Mission et fonctionnement d’Amnesty Attention : le module «Dignité humaine et droits fondamentaux» du 13 septembre est reporté à 2009. Si vous le souhaitez, vous pourrez assister à cette même formation à Liège le 4 octobre. Quant au module «Combattre la torture» du 20 septembre est reporté au 25 octobre. e Pour vous inscrire dès maintenant et/ou obtenir des détails concernant le contenu de tous les modules, rendez-vous sur notre site Internet : http://www.amnesty.be/formations Pour tout renseignement, n’hésitez pas à nous contacter par e-mail à formations@aibf.be ou par téléphone au 02/538 81 77, de préférence les mardi, jeudi et vendredi.

DEVENEZ FORMATEUR/TRICE BÉNÉVOLE POUR AMNESTY ! Vous êtes motivé(e) par les campagnes que nous menons en faveur des droits humains ? Vous avez des aptitudes pédagogiques et une expérience en formation d’adultes ? Vous avez des compétences en prise de parole en public et en gestion de groupes ? Vous bénéficiez de capacités d’écoute et d’analyse ? Vous communiquez avec aisance par écrit et oralement ? Vous êtes familiarisé(e) avec les outils informatiques (e-mail, Internet, PowerPoint,…) ? Vous aimez travailler en équipe et de manière autonome ? Dans ce cas, votre profil correspond à celui que nous recherchons pour étoffer notre équipe de formateurs bénévoles ! Un atout supplémentaire : avoir un intérêt et/ou des compétences pour la réalisation de cours en ligne. Disponibilités : en soirée et le week-end (surtout le samedi). Fréquence à définir. Premières dates où votre présence serait requise : les 23, 24 et 25 janvier 2009 pour un week-end de formation et de rencontre avec le reste de l’équipe. e CV et lettre de motivation à adresser pour le 15 octobre au plus tard à l’att. de Sophie Ypersiel, par e-mail (formations@aibf.be) ou par lettre à Amnesty International Belgique francophone, Service formations, Rue Berckmans à 1060 Bruxelles.

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IMMIGRATION CLANDESTINE

MER COURAGE Fin juin, avant de rejoindre le Festival Couleur Café, Bayam Diouf, la fondatrice du Collectif des Femmes contre l’Immigration clandestine, nous a accordé un entretien dans lequel elle nous a rappelé la dure réalité des mères qui ont perdu un enfant qui rêvait de joindre l’«eldorado» européen. Invitée par le Festival, la sensibilisation et la dissuasion passe également chez nous en Europe…

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omment est née votre association, le Collectif des Femmes contre l’Immigration clandestine ? Cette association est née au Sénégal en mars 2006, dans une banlieue de Dakar, à Thiaroye-sur-Mer. Ce lieu est vite devenu l’un des principaux points de départ pour des milliers de jeunes d’Afrique de l’Ouest qui tentent de se rendre en Europe à bord de petits bateaux de pêche. Cette initiative est née après la mort de 80 de nos enfants qui ont tenté de rejoindre l’Europe via les Iles Canaries en Espagne. J’ai perdu mon unique fils de 26 ans lors d’une tentative pour rejoindre le continent européen. Il était un pilier central dans la famille. Il était pêcheur et grâce à lui la famille se portait bien. Aujourd’hui, toute la communauté est touchée, moralement et économiquement, par ces pertes. Imaginez-vous ce que représentent 80 jeunes morts dans notre village ! Avant, lorsqu’ils revenaient de la pêche, le poisson était vendu et on en gardait une partie pour les besoins de la famille. Nous n’avons jamais acheté de poisson. Maintenant, c’est le contraire. Nous essayons de créer d’autres activités qui puissent générer des revenus pour subvenir aux besoins de la famille. Nous sommes 375 femmes actives dans l’association. Ce sont principalement les hommes entre 25 et 40 ans qui décident de quitter le continent africain. Ce sont véritablement les forces vives qui prennent cette décision. Pourquoi La première motivation est le chômage qui est très élevé. La sècheresse est également une source de motivation pour quitter le pays. La terre n’est plus ce qu’elle était. Ces jeunes quittent les zones rurales pour chercher du travail dans les villes. Il faut savoir également que les accords de pêche entre le Sénégal et l’Europe ont pour conséquence un pillage de nos eaux par les chalutiers européens. Dernier espoir donc pour ces jeunes, prendre une pirogue et trouver du travail en Europe. Cette pêche industrielle tue à petit feu une pratique millénaire, un équilibre et, par la même occasion, nos jeunes. Ces jeunes sont nés au bord de la mer, ils sont pêcheurs dès la naissance. Ils ne sont pas scolarisés, ils connaissent la tradition et ne sont pas prêts pour la pêche industrielle. Ils n’ont pas les moyens pour les concurrencer. Il est décourageant aussi de partir trois à quatre jours en mer pour ramener peu de poisson. Avant il y en avait beaucoup plus. Quel est le rôle du Collectif des Femmes contre l’Immigration clandestine ? Dans un premier temps, nous nous concentrons sur la sensibilisation auprès des femmes, parce que la plupart des jeunes qui partent ont été encouragés par leurs mères. Il ne faut plus qu’elles financent ce type de voyage ! Deuxièmement, nous aidons

les jeunes qui sont de retour au pays avec les maigres fonds de l’association. Troisièmement, on aide les passeurs. Au début, on les dénonçait auprès de la police. Mais ces gens sont des membres de nos familles et ce sont également les seuls qui sont capables de manœuvrer une pirogue. Après réflexion, on s’est demandé pourquoi les enfermer. Maintenant, l’association parle avec eux et nous les appuyons auprès des structures de microcrédit pour qu’ils puissent créer une structure génératrice de revenus afin qu’ils ne soient plus tentés de reprendre leurs activités de passeurs. On leur fait comprendre qu’il n’est pas nécessaire de pêcher uniquement des gros poissons pour gagner sa vie. La pêche des plus petits comme les moules ou les céphalopodes peut être aussi rentable. Quel est le prix à payer au passeur ? Au départ c’est 500 000 francs CFA (760 euros). Après négociation, on peut payer entre 200 000 et 300 000 francs CFA (entre 300 et 450 euros). Avez-vous subi des menaces des passeurs à l’époque ou vous les dénonciez ? Non, je n’ai pas eu de menaces. Cependant, je ne me sentais pas en sécurité. Je ne pensais pas qu’on les mettrait en prison. Quand je me suis rendu compte de ça, je me suis dit qu’il valait mieux leur parler que de les dénoncer. Les résultats sont là : de nombreux passeurs aujourd’hui ont abandonné leur rôle de passeur… Cette aide qui passe par le microcrédit est destinée uniquement aux passeurs ? Non. Comme je l’ai dit, la perte de ces forces vives ne permet plus à certaine famille de subvenir à leur besoin. Il y a aussi des femmes qui ne veulent plus voir la mer après la perte de leurs maris ou de leurs enfants. Alors nous les aidons à travers des activités comme la transformation des céréales locales ou la fabrication de produits artisanaux comme des poupées qui seront entre autres présentées au Festival Couleur Café. Que faites vous lorsque vous voyez qu’une pirogue est prête a prendre la mer direction l’Europe ? Nous avons des brigades de surveillance et de dissuasion constituées de jeunes expulsés revenus au pays. Nous allons vers ces jeunes rapatriés directement. Ils arrivent à Saint-Louis, à environ 300 km de Dakar. Lorsqu’ils reviennent, ils sont découragés et n’osent pas toujours revenir dans la famille. Certains m’ont même dit qu’ils voulaient se suicider. Nous prenons soin d’eux tout de suite. Nous les intégrons dans ces brigades et aujourd’hui, lorsqu’ils voient qu’un départ se prépare, ils tentent de dissuader les futurs clandestins de prendre le large. Quand on m’informe des prépa-


MOUVEMENT ARTISTES POUR AMNESTY POUR AMNESTY, LES ARTISTES S’ENGAGENT…

Revoici notre traditionnelle biennale d’art contemporain ! Cette exposition-vente présentera cette année un beau choix d’œuvres proposées par une soixantaine d’artistes, dont certains noms célèbres, participant ainsi à leur façon à la défense des droits humains. Venez voir leur travail : peintures, gravures, sculptures, photographies et même bijoux d’art. Le bénéfice de la vente sera consacré à deux projets. Le premier, basé en Turquie, financera une aide légale aux femmes victimes d’abus. Le second soutiendra une initiative en faveur des défenseurs des droits humains au Zimbabwe. L’exposition aura lieu du jeudi 2 au samedi 4 octobre, à la Galerie Brenart International, Avenue Louise 221 à 1050 Bruxelles. Elle sera accessible chaque jour de 11h00 à 18h00. (Entrée libre) Plus de renseignements : 02 344 99 16 – détails sur le site : www.amnestyinternational.be

CERCLE BENENSON 22 SEPTEMBRE – DÉBAT À LIÈGE

l Bayam Diouf devant le Secrétariat national d’Amnesty. Bruxelles, juin 2008. © Bruno Brioni

ratifs d’un départ, nous allons vers eux avec un petit comité pour les dissuader de partir. Depuis un an, au niveau de notre communauté, nous constatons qu’il n’y a quasiment plus de départ. Nous avons créé 34 autres cellules de sensibilisation sur des zones de départ dans la région. Bénéficiez vous de l’aide des autorités sénégalaises ? Nous recevons plus d’aide du gouvernement et des associations espagnols. L’année dernière, je suis allée en Espagne pour mener une campagne de sensibilisation. Il existe des associations là-bas qui nous aident beaucoup. L’union européenne et le Sénégal se sont unis pour organiser une surveillance de nos côtes et empêcher les jeunes de rejoindre l’Europe. Moi, je ne suis pas d’accord avec cette attitude parce que ces jeunes ne sont pas des bandits à traquer. Ce budget alloué par l’Union Européenne pour cette surveillance serait plus utile à la sensibilisation et à la création d’emplois pour les jeunes. Le gouvernement sénégalais doit aller à la rencontre des communautés afin de se rendre compte des besoins réels. Avez-vous toujours le soutien de Mandione Fall, lutteur très connu au Sénégal ? Oui, bien sur ! Et en plus, il vient de notre village. La lutte au Sénégal est un sport très populaire et particulièrement dans le milieu de la pêche où c’est une tradition. C’est une activité sportive qui peut être rentable aussi. Il y a une époque où l’on

organisait après la saison de la pêche des combats de lutte au bord de la mer. Avec le Collectif, nous organisons des séances de lutte dans le cadre des rencontres de sensibilisation. Quand Mandione est là, tout le monde vient. Il prend la parole et dit : «Moi, je suis lutteur et je n’ai aucune chance si je pars en Europe où il n’y pas la lutte comme chez nous. On peut également gagner sa vie ici en pratiquant la lutte. Et plus que tout, il faut rester auprès de sa famille. On peut s’en sortir ici au Sénégal !» Son aide est donc très précieuse, ses paroles sont très écoutées par les jeunes. Avez-vous eu des contacts avec les autorités européennes au Sénégal ? Le représentant de l’Union Européenne est venu me voir au village. On lui a montré nos projets. Mais depuis, plus de nouvelles et aucune aide n’est arrivée. Même Madame Royal qui était venue nous voir pour nous aider n’a plus donné de signe… Je pense qu’elle est trop occupée par la politique… Comment avez-vous vécu votre séjour en Belgique ? Très bien! Mais j’ai très envie de rentrer au Sénégal. Je ne suis pas comme ces jeunes africains qui veulent venir en Europe ! L’Afrique doit être construite par sa jeunesse. S’ils partent, que va devenir cette Afrique ? Les politiciens doivent mieux adapter leurs décisions à la réalité… La vie est difficile là-bas, mais il y a aussi beaucoup de solidarité. e Propos recueillis par Bruno Brioni

Des déportations à l’homoparentalité, un siècle de luttes LGBT Entamé dans les années 20 et 30, étouffé et gravement réprimé pendant la seconde guerre mondiale, le combat des homosexuel(le)s a repris au tournant des contestations de 1968… réclamant d’abord la fin de la répression et l’abolition de la pénalisation, se battant ensuite pour obtenir l’égalité juridique et sociale. Le chemin parcouru depuis les années 20 est considérable, pourtant les homosexuel(le)s souffrent encore, à travers le monde entier, de discriminations inquiétantes. En présence de Florence Tamagne (historienne française spécialiste de l’histoire culturelle du genre, de l’homosexualité et de ses représentations) et Stephen Barris (chargé de projet et de communication à l’ILGA, International Lesbian and Gay Association). e Lieu : Salle des conférences - Hôtel de ville de Bruxelles Grand Place - 1000 Bruxelles Entrée : 5 e (adultes) 2 e (étudiants et demandeurs d’emploi) réservation souhaitée auprès d’Ingrid Plancqueel au 02 538 81 77 ou cerclebenenson@aibf.be

WATERMAEL-BOITSFORT EXPO PHOTOS SUR LE BRÉSIL Le Groupe 33, en collaboration avec la Coordination Brésil d’AIBF et le Centre Culturel de La Vénerie, propose une exposition photos de Genna Nacache : «Nous vivons dans la peur». Du 16 au 28 septembre aux Galeries Verhaeren, à côté de l’Espace Delvaux, rue Gratès 3 à 1170 Bruxelles. e Les mercredi, jeudi et vendredi : de 18h00 à 20h00 ; les samedi et dimanche : de 11h00 à 15h00. Vernissage le 16 septembre à 18h00. Infos sur http://www.amnestygr33.be

Libertés ! Septembre 2008 11


MOUVEMENT LE 10 OCTOBRE, DEVANT L’AMBASSADE DU JAPON

JOURNÉE INTERNATIONALE CONTRE LA PEINE DE MORT Qui sait que le Japon continue d’appliquer la peine de mort ? Après un moratoire de 40 mois en 1989, les exécutions ont repris et elles n’ont plus cessé depuis. Bien sûr, le nombre d’exécutions y est moins effrayant que celui de pays comme l’Iran, la Chine ou les États-Unis. Cependant, entre décembre 2007 et juin 2008, ce ne sont pas moins de 13 personnes qui ont été pendues au Japon. Dans les «couloirs de la mort» japonais, 100 prisonniers attendent la date fatidique.

SECRÉTARIAT NATIONAL AIBF Rue Berckmans 9, 1060 Bruxelles 02 538 81 77 Fax : 02 537 37 29 www.amnesty.be SECRÉTARIAT INTERNATIONAL Easton Street 1, London WC1X ODW United Kingdom 00 44 207 413 5500 AMNESTY INTERNATIONAL VLAANDEREN Kerkstraat 156, 2060 Antwerpen 6 03 271 16 16

Un policier devant le portail de la Prison centrale de Tokyo où un groupe d’élus japonais de la Commission Justice de la Chambre vient d’inspecter une des chambre d’exécution. Tokyo, 23 juillet 2003. © AP / Chiaki Tsukumo

C

ependant, la société civile japonaise se mobilise de plus en plus contre la peine de mort. Des parlementaires nippons sont publiquement et clairement abolitionnistes. Ils sont soutenus dans leurs démarches par un réseau très actif d’ONG, dont Amnesty International, ainsi que par près de 4 000 avocats, journalistes et militants… La possibilité de voir le Japon renoncer au châtiment suprême existe et notre action peut donc avoir une influence déterminante. Manifester devant l’ambassade du Japon, c’est également rappeler que, outre les grands pays exécuteurs connus, une série d’États moins «célèbres» continuent d’avoir recours à ce traitement cruel, inhumain et dégradant. Le but de l’action est donc aussi d’éduquer et de sensibiliser le public belge. Enfin, certaines particularités du système d’incarcération des condamnés à mort japonais rendent cette condamnation particulièrement cruelle. Notamment, le condamné n’apprend que le matin même que son exécution aura lieu. Cette particularité réduit significativement les possibilités de recours et est de nature à renforcer le dommage psychologique qui lui est causé.

ACTION EN FAVEUR DE 2 CONDAMNÉS À MORT À l’occasion de la Journée internationale contre la peine de mort, nous vous invitons à agir en faveur de 2 cas : celui du Nigérian Patrick Obinna Okoroafor (pour plus de renseignements : www.isavelives.be) et celui du Japonais Hakamada Iwao. Hakamada Iwao est dans le couloir de la mort depuis 1968. Il a été déclaré coupable, à la suite d’un procès inéquitable, du meurtre en 1966 du patron de l’entreprise où il travaillait ainsi que de l’épouse et des deux enfants de cet homme. Les membres de cette famille ont été poignardés et leur maison incendiée. Hakamada est passé aux aveux après avoir été interrogé durant 20 jours par la police en l’absence d’un avocat. Dans le cadre du système des prisons de substitution (daiyo kangoku), les suspects peuvent être maintenus en détention jusqu’à 23 jours d’affilée aux fins d’interrogatoire. Il n’y a pas de limite de durée pour les séances d’interrogatoire durant lesquelles les avocats ne disposent que d’un accès limités à leurs clients. Hakamada Iwao s’est rétracté par la suite et a affirmé lors de

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Ce sont aussi 80 groupes locaux qui, sur le terrain, font un travail d’action et de sensibilisation aux droits humains. Pour vous y joindre, contactez votre régionale.

son procès que les policiers l’avaient passé à tabac et menacé pour le contraindre de signer des aveux. Il a néanmoins été reconnu coupable et condamné à mort en 1968. Ses appels ont été rejetés par la Haute Cour de Tokyo en 1976 et par la Cour suprême en 1980. Hakamada Iwao a introduit un recours pour obtenir un nouveau procès, mais il a été débouté de sa requête par le Tribunal de district de Shizuoka en 1994, puis par la Haute Cour de Tokyo en 2004. La Cour suprême a rejeté un troisième recours le 24 mars 2008 ; le mois suivant, ses avocats ont interjeté appel pour la deuxième fois devant le tribunal de district de Shizuoka. Un des juges siégeant au sein du tribunal qui a condamné Hakamada, Kumamoto Norimichi, a publiquement déclaré en 2007 qu’il pensait que Hakamada était innocent. Le juge a dit que, durant le procès, il avait tenté de convaincre les deux autres juges d’innocenter Hakamada, mais que durant le vote, il avait été mis en minorité. Hakamada semble avoir principalement été condamné à mort sur la base d’aveux extorqués sous la contrainte. Parmi les preuves à charge figuraient essentiellement des vêtements tachés du sang de la victime, découverts dans un réservoir de l’usine. Ces vêtements, trop petits, n’étaient pas à la taille de Hakamada, mais le Parquet a affirmé qu’ils avaient rétréci alors qu’ils se trouvaient dans le réservoir. Selon son avocat, le couteau que Hakamada était censé avoir utilisé était trop petit pour causer une blessure mortelle et la porte par laquelle il était supposé être entré et sorti de la maison de la victime avait été fermée à clé. Hakamada compte parmi les prisonniers restés le plus longtemps dans le quartier des condamnés à mort au Japon. Les condamnés à mort ne sont pas autorisés à parler aux autres prisonniers ni à regarder la télévision ou à s’adonner à des activités qui les intéressent ou des hobbies. Hakamada souffre de troubles mentaux après avoir passé 28 ans à l’isolement. Il risque à tout moment d’être exécuté à moins qu’il ne soit gracié par le ministre de la Justice ou qu’il lui soit accordé le droit d’être rejugé. e

MANIFESTATION & PERFORMANCE QUAND ? Le vendredi 10 octobre à 11h00 OÙ ? Avenue des Arts 58 (Métro Trône) à 1000 BRUXELLES

RESPONSABLES RÉGIONAUX D’AMNESTY BRABANT WALLON Jean-Philippe CHENU chemin de la Terre Franche 13 1470 Genappe 010 61 37 73 – jpchenu@aibf.be BRUXELLES Tanguy PINXTEREN Rue de la Flèche 16 A, 1000 Bruxelles 02 513 77 10 – tpinxteren@aibf.be HAINAUT OCCIDENTAL Myriam DELLACHERIE rue Basse Couture 20, 7500 Tournai 069 22 76 18 – mdellacherie@aibf.be HAINAUT ORIENTAL Nicole GROLET av. Elisabeth 6, 6001 Marcinelle 071 43 78 40 – ngrolet@aibf.be LIÈGE Jean-Pierre ANDRÉ jpablegny@yahoo.fr 04 387 51 07 Christine BIKA Responsable de la gestion de la permanence – C/O Bureau régional d’AI – rue Souverain Pont 11 – 4000 Liège – du lundi au vendredi de 13h30 à 17h30 04 223 05 15 bureaudeliege@aibf.be LUXEMBOURG Daniel LIBIOULLE Avenue de la Toison d’Or 26 6900 Marche en Famenne 084 31 51 31 dlibioulle@aibf.be NAMUR Romilly VAN GULCK Rue Vivier Anon 8, 5140 Sombreffe 071 88 92 51 rvangulck@aibf.be


IS AV ELIV ES . B E B O N N ES N O UV EL L ES Dans tous les pays du monde, des gens sont libérés grâce au travail des membres d’Amnesty. Des témoignages émouvants nous parviennent des prisonniers libérés ou de leur famille. Ils montrent qu’une action de masse peut avoir des résultats pour un meilleur respect des droits humains.

BOSNIE-HERZÉGOVINE RADOVAN KARADZIC DEVANT LE TPI L’ancien chef politique de la Republika Srpska (entité serbe de Bosnie-Herzégovine), Radovan Karadzic, a été arrêté le 21 juillet et transféré devant le Tribunal pénal international pour l’exYougoslavie (TPIY) après plus de 12 ans de fuite. Il est inculpé de crimes de génocide, contre l’humanité et de guerre. L’absence de volonté politique et dans certains cas des actes délibérés d’obstruction ont longtemps bloqué les enquêtes et les poursuites pour les crimes de guerre dans les pays de l’ex-Yougoslavie. L’arrestation d’une des principales figures recherchées par le TPI constitue donc une victoire importante ; il reste encore deux grands auteurs de crimes recherchés par le TPI : Ratko Mladic et Goran Hadzic. e

CHILI RÉALISATRICE LIBÉRÉE La réalisatrice de documentaires Elena Varela López a été libérée le 13 août, après plus de trois mois de détention. Lors de son arrestation, elle tournait un documentaire sur le conflit qui oppose des compagnies d’exploitation forestière au peuple indigène mapuche au sujet de l’utilisation des terres. Le matériel confisqué par les forces de police lors de son arrestation risquent de leur permettre d’obtenir des renseignements sur des militants mapuches. Elena Varela reste inculpée de plusieurs crimes dont un «vol avec homicide» que rien ne prouve qu’elle ait commis. Elle est aujourd’hui assignée à résidence de nuit et soumise à une interdiction de quitter le pays. Amnesty International continue de surveiller sa situation. e

SYRIE UN DÉFENSEUR AMNISTIÉ Âgé de 68 ans et ancien doyen de la faculté d’Économie de l’Université de Damas, Aref Dalilah a été libéré le 7 août par une amnistie présidentielle. Il avait été condamné pour «tentative de modification de la constitution par des moyens illégaux» en juillet 2002 et pour avoir participé au «Printemps de Damas», la brève période de relative tolérance consécutive à l’accession au pouvoir du président Bachar el-Assad en 2000. Il est resté sept ans derrière les barreaux, la plupart du temps maintenu à l’isolement, et son état de santé s’est gravement détérioré. A sa sortie de prison, Aref Dalilah a affirmé qu’il continuait le combat : «Nous nous battons ensemble pour la justice et la démocratie. Cette lutte se poursuit.» e

BANDE DE GAZA 150 MILITANTS ET CADRES RELÂCHÉS Le 7 août, le ministère de l’Intérieur de l’administration de facto du Hamas à Gaza a annoncé que les forces de sécurité avaient libéré 150 Palestiniens, dont des leaders du Fatah, arrêtés en représaille à une série d’attentats à la bombe visant des membres du Hamas dans la bande de Gaza. Les querelles entre factions palestiniennes rivales en Cisjordanie et dans la bande de Gaza encourage une politique de violation des droits humains (dont celui à l’expression), de détentions arbitraires, de torture et mauvais traitements infligés aux détenus. Amnesty International continuera de suivre la situation des personnes qui restent détenues sans avoir été l’objet d’un jugement ou d’une inculpation. e

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ALGÉRIE

UN DÉFENSEUR HARCELÉ L

’avocat et défenseur algérien des droits humains Amine Sidhoum, célèbre pour son combat contre la torture et les procès inéquitables à l’encontre des personnes accusées de terrorisme, travaille également pour les familles des «disparus», ce qui lui vaut le harcèlement des autorités algériennes. En avril 2008, Amine Sidhoum a été condamné à six mois de prison avec sursis et une amende de 20 000 dinars (223 e) pour «avoir jeté le déshonneur sur la justice». Cette condamnation fait suite à un article publié en 2004 et affirmant que les 30 mois de prison infligés à un de ses clients étaient une condamnation «démesurée». Ce jugement survient quelques mois à peine après que le Comité des Nations unies pour les Droits de l’Homme se soit inquiété du harcèlement dont les défenseurs sont victimes en Algérie et ait demandé que le crime de diffamation soit retiré du Code pénal. Tant Amine Sidhoum que le Procureur ont interjeté appel contre le jugement, pour des raisons évidemment opposées. L’accusation espère une requalification des faits en «diffamation», ce qui risquerait de valoir à Amine Sidhoum une condamnation de 2 ans

© AI de prison ferme et une amende de 2 540 e. Amnesty considère que les poursuites contre Amine Sidhoum sont d’ordre politique et visent à l’intimider. e

MODÈLE DE LETTRE Monsieur le Président, L’avocat et défenseur algérien des droits humains Amine Sidhoum a été condamné en avril 2008 à six mois de prison avec sursis et une amende de 20 000 dinars (223 e) pour «avoir jeté le déshonneur sur la justice». Cette condamnation fait suite à un article publié en 2004 et affirmant que les 30 mois de prison infligés à un de ses clients étaient une condamnation «démesurée». L’accusation ayant interjeté appel, Amine Sidhoum risque 2 ans de prison ferme et une amende de 2 540 e. En tant que membre/sympathisant(e) d’Amnesty International qui considère que les poursuites contre Amine Sidhoum sont d’ordre politique et visent à l’intimider, je vous demande que soient levées sans condition les charges retenues contre lui et de veiller à ce que la justice algérienne respecte la Déclaration des Nations unies de mars 1999 sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et protéger les droits de l’homme. Espérant que vous ferez droit à ma requête, je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de ma considération distinguée. Signature : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Nom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

LETTRE À ADRESSER À : Monsieur Abdelaziz Bouteflika, Président de la République, Présidence de la République, El Mouradia, Alger, Algérie Fax : + 213 21 609 618 E-mail : president@el-mouradia.dz

COPIE À ENVOYER À : Ambassade d’Algérie, Avenue Molière 207 – 1050 Bruxelles (Ixelles) Fax : 02 343 51 68 E-mail : info@algerian-embassy.be

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IS AV ELIV ES . B E GUATEMALA

MODÈLE DE LETTRE

EXPERT MENACÉ DE MORT L

’anthropologue judiciaire et d’identification Fredy Peccerelli, sa famille et ses collègues font l’objet de menaces de mort et d’actes de harcèlement à cause de leur action en faveur des droits humains. Fredy Peccerelli dirige la Fundación de Antropología Forense de Guatemala (FAFG), qui mène des enquêtes basées sur l’exhumation de fosses communes datant de la guerre civile de 1960-1996. Le travail abattu par la FAFG a permis d’ouvrir des procédures judiciaires contre des membres de l’ancienne junte militaire accusés de graves violations des droits humains. Parmi de nombreux incident, un e-mail est parvenu à Fredy Peccerelli, sa sœur et quatre responsables de la FAFG et dans lequel ils sont tous menacés de ne

Monsieur le Ministre, L’anthropologue judiciaire et d’identification Fredy Peccerelli, sa famille et ses collègues font l’objet de menaces de mort à cause de leur rôle dans la Fundación de Antropología Forense de Guatemala (FAFG), qui mène des enquêtes basées sur l’exhumation de fosses communes datant de la guerre civile de 1960-1996. Une protection policière a été assurée, mais elle est inadaptée. En tant que membre/sympathisant(e) d’Amnesty International, je vous demande d’assurer à Fredy Peccerelli, sa famille et ses collègues une réelle protection policière, conformément aux demandes de la Cour interaméricaine des Droits de l’Homme de 2006. Je vous demande également de veiller à ce qu’une enquête soit rapidement menée sur les responsables de ces menaces de mort et qu’ils soient traduits en justice. Espérant que vous ferez droit à ma requête, je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de ma considération distinguée. © Privé «jamais pouvoir venir témoigner à la barre». Une protection policière a été assurée, mais elle est inadaptée. Le 9 décembre 2008, les ONG de droits humains célébreront le 10e anniversaire de la Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales. Et, le lendemain 10 décembre, l’ONU fêtera le 60e anniversaire de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme. À cette occasion, Amnesty mettra en exergue le cas de Fredy Peccerelli. e

Signature : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Nom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

LETTRE À ADRESSER À : Sr Francisco Jose Jimenez Irungaray, Ministro de Gobernación, 6a. Avenida 13-71, Zona 1 (Palacio PNC), Ciudad de Guatemala, Guatemala Fax : +502 2413 8658

COPIE À ENVOYER À : Ambassade du Guatemala, Avenue Winston Churchill 185 – 1180 Bruxelles (Uccle) Fax : 02 344 64 99 E-mail : francis.clotuche@skynet.be

COMMENT AGIR EFFICACEMENT ?

TARIFS POSTAUX

Les cas exposés concernent des victimes de violations des droits humains dont s’occupe Amnesty International. Chaque appel compte. Un texte (à écrire ou à photocopier) vous est proposé pour chaque cas. Dans l’intérêt des victimes, écrivez en termes mesurés et courtois aux adresses indiquées. Ces lignes sont lues partout dans le monde par les quelque 1800000 membres d'Amnesty International. Elles sont reproduites dans de nombreux pays par des dizaines de journaux et constituent la clé de voûte de l'action du mouvement.

Lettres (jusqu’à 50 grammes) Belgique: 0,54e; Europe: 0,80e; reste du monde: 0,90e. La surtaxe aérienne est incluse (étiquette requise).

TURKMÉNISTAN

3 DÉFENSEURS EMPRISONNÉS O

gulsapar Muradova, Annakurban Amanklychev et Sapardurdy Khadzhiev ont été incarcérés à la mi-juin 2006, de toute évidence à cause de leurs liens avec la Fondation Helsinki du Turkménistan (THF), une ONG de défense des droits humains. Le 19 juin 2006, la télévision officielle annonçait que le ministère de la Sécurité nationale accusait Annakurban Amanklychev d’«activités subversives» et de complot révolutionnaire. Ce dernier avait en fait participé à des formations aux droits humains en Pologne et en Ukraine, ainsi qu’à une réunion internationale en Bulgarie. Le président turkmène de l’époque (et décédé en décembre 2006) Saparmurad Niyazov avait alors déclaré : «Le peuple condamnera les traîtres, parce qu’il est fier de sa patrie, alors que ceux-là veulent lui nuire».

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Le 25 août 2006, au terme d’un procès ayant duré moins de 2 heures, Ogulsapar Muradova, Annakurban Amanklychev et Sapardurdy Khadzhiev ont été condamnés à des peines allant de 6 à 7 ans de prison ferme pour «acquisition, possession et vente de munitions et d’armes à feu». Ces condamnations ont manifestement pour but de les punir pour leur militantisme en faveur des droits humains. Le 14 septembre 2006, la famille d’Ogulsapar Muradova a finalement appris qu’il était mort en détention. Tadzhigul Begmedova, directeur de la Fondation Helsinki, a déclaré à Amnesty International que les proches du défunt avaient relevé une blessure profonde sur son front, ainsi que des ecchymoses à la gorge. Enfin, Amnesty International craint que les trois détenus n’aient été torturés et battus. e

MODÈLE DE LETTRE Monsieur le Président Berdymukhammedov, Ogulsapar Muradova, Annakurban Amanklychev et Sapardurdy Khadzhiev ont été incarcérés à la mi-juin 2006 à cause de leurs liens avec la Fondation Helsinki du Turkménistan (THF), une ONG de défense des droits humains. Le 25 août 2006, ils ont été condamnés à des peines de 6 à 7 ans de prison pour «acquisition, possession et vente de munitions et d’armes à feu». Le 14 septembre 2006, la famille d’Ogulsapar Muradova a appris sa mort en détention. En tant que membre/sympathisant(e) d’Amnesty International, je vous demande d’ouvrir sans délai une enquête sur les circonstances de la mort en détention d’Ogulsapar Muradova et de libérer immédiatement et sans condition d’Annakurban Amanklychev et Sapardurdy Khadzhiev. Espérant que vous ferez droit à ma requête, je vous prie d’agréer, Monsieur le Président Berdymukhammedov, l’expression de ma considération distinguée. Signature : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Nom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

LETTRE À ADRESSER À : Monsieur le Président Berdymukhammedov, Presidential Palace, 744000 Ashgabat, Turkmenistan Fax : + 993 1235 5112

COPIE À ENVOYER À : Ambassade du Turkmenistan, Boulevard Reyers 106 – 1030 Bruxelles (Schaerbeek) Fax : 02 648 19 06 E-mail : turkmenistan@skynet.be


C U LT U R E AGENDA THÉÂTRE AU POCHE LES MONOLOGUES VOILÉS – REPRISE À l’instar des Monologues du Vagin dans lesquels elle a elle-même joué aux Pays-Bas, Adelheid Roosen a pendant de longs mois interviewé plus de 70 femmes originaires de pays islamiques mais vivant aux Pays-Bas. Elle nous propose 12 monologues d’une intensité exceptionnelle , drôles, poétiques, émouvants, qui nous offrent le rare privilège d’entrer dans l’intimité de femmes musulmanes, sans fausse pudibonderie ni voyeurisme. Entre oppression et émancipation, entre silence et révolte, entre indépendance et emprise culturelle, mais surtout avec humour, ces monologues nous proposent un regard neuf sur la «femme musulmane» un regard désencombré de clichés poussiéreux, de préjugés ignorants. Les Monologues voilés ont rencontré un énorme succès en Hollande, à Berlin, à New York et à Boston. Ils ont été créés pour la première fois en français au Théâtre de Poche avec le succès que l’on sait. e Au Théâtre de Poche, Bois de la Cambre, Chemin du Gymnase 1A, 1000 Bruxelles, du 16 septembre au 2 novembre 2008 à 20h30. Relâche les dimanches et lundis. En tournée en Wallonie en octobre, novembre et décembre 2008 (renseignements : www.poche.be) Réservations : 02 649 17 27 – reservation@poche.be

MUSIQUE ALFRED BRENDEL JOUE POUR AMNESTY Le virtuose autrichien, qui souhaite prendre sa retraite musicale à la fin de cette année, offre un concert à Amnesty International. Nous l’en remercions chaleureusement.

DU SANG SUR LA MÉMOIRE

E

n 82 Ari Folman était un jeune soldat qui rêvait de cinéma. Avec des milliers de camarades, il a participé à l’invasion du Liban et au siège de Beyrouth. Une épopée qui était tout sauf glorieuse. «Juste des hommes très jeunes, n’allant nulle part, tirant sur des inconnus, se faisant tirer dessus par inconnus, qui rentrent chez eux et tentent d’oublier.» De ces événements, sa mémoire ne conservait que des souvenirs fragmentaires, d’où étaient notamment occultés les moments traumatiques du massacre des réfugiés palestiniens par les milices phalangistes dans les camps de Sabra et Shatila. La rencontre d’un ancien camarade hanté par une vision lancinante pousse le réalisateur à sonder sa mémoire et celles de ses compagnons d’armes pour réaliser un film sur ce passé douloureux. Plutôt qu’un documentaire forcément austère en l’absence d’images d’archive, il prend le pari radical d’en faire un film d’animation. Magnifiés par un dessin sobre et puissant, et par des décors réalistes, les récits de ces anciens antihéros en armes perdent en réalisme ce qu’ils gagnent en force d’évocation. Comme une écume remontant à la surface, des images de jeunes soldats surgissant de la mer pour traverser, le regard vide, la ville dévastée, scandent le film jusqu’à son implacable résolution. Témoignage sur ce que la guerre peut avoir de primitif, d’animal et d’instinctif, La Valse avec Béchir est aussi un fascinant travail sur la mémoire, sur ses trous et ses faux-semblants, car comme le rappelle une spécialiste interviewée, «la mémoire nous emmène là où l’on a besoin d’aller.» Postés aux premières loges, l’ex-soldat Folman ne pouvait faire l’impasse sur la coupable indifférence du commandement de l’armée Israélienne au moment du massacre. Juste avant de refermer l’obturateur, le cinéaste conclut par quelques images d’archive sur la découverte du camp après les massacres. La vie n’est pas un dessin animé. e Gilles Bechet Waltz with Bashir, de Ari Folman, sortie nationale le 10 septembre

DOMMAGES COLLATÉRAUX

R

eporter de guerre, Adam Kellas est envoyé en Afghanistan en octobre 2001 sur les lignes de front tenues par l’Alliance du Nord. À Londres, on attend de lui du vécu et des éclats d’armes, mais il n’a que des échos lointains de la guerre à se mettre sous la plume. Ce sont les traces de craie laissées par le passage des B52 dans le ciel, le grondement des F18 ou encore l’interview bateau du paysan dont la maison a été bombardée par erreur et à qui l’on demande, ce qu’il pense des Américains. Pour tromper l’ennui, et la déception, Kellas se lance dans la rédaction d’un thriller à gros effets où il raconte ce qu’il aurait peut-être voulu voir. La rencontre avec Astrid, journaliste américaine encore plus indomptable que lui se mue insidieusement en une histoire d’amour. Une relation tendue et rude qui va s’effondrer dans le gouffre entre la personne imaginée et celle avec qui il partage une paillasse. Comme sur la piste d’une insaisissable étoile, il va poursuivre Astrid jusqu’au fin fond de la Virginie. Grand reporter lui-même, l’Écossais James Meek puise dans son expérience pour signer un roman attachant, désabusé, souvent drôle sur la force des illusions. Dans les conflits internationaux comme dans l’amour. e G.B. Nous commençons notre descente, James Meek, Metailié, 335 p, 20 e

IL N’Y A PLUS ÂME QUI VIVE

C

QUAND ? Le 17 novembre à 20h00. OÙ ? Palais des Beaux-Arts (Salle Henri Le Bœuf), rue Ravenstein 23 – 1000 Bruxelles. Entrée : 75 e cat I – 60 e cat II -35 e cat III -17 e cat IV – Réservations : billetterie du Palais des Beaux-Arts : +32 (0)2 507 82 00 ou par Internet : http://www.bozar.be/

e sont les derniers mots du roman Palestine. Le départ de l’histoire est tristement banal. Quelque part en Cisjordanie, un jeune soldat israélien, Cham, est attaqué par un petit commando palestinien, le jour même où il part en permission. Gravement blessé, il est recueilli par une famille de Palestiniens dont le fils Nessim a disparu. Lorsqu’il reprend connaissance, il a oublié, jusqu’à son nom. Mais tout bascule lorsqu’apparaît à ses yeux la lumineuse image d’une jeune femme, Falastin, celle qui l’a soigné, guéri. Il va dès lors s’identifier soudain à son frère et se mettre à vivre le quotidien des Palestiniens. Découvrir et subir les souffrances et les tensions d’un pays occupé. C’est pour lui une véritable traversée du miroir. Hubert Haddad, l’auteur de Palestine, est né à Tunis, d’un père tunisien, tailleur de pierres, et d’une mère algérienne. Il vit à Paris, mais il n’a rien oublié de ses origines judéo-berbères. «Au départ, dira-t-il, il n’y a pas d’identité, ce sont les représentations qui la créent plus tard.» Dans ce livre admirable de simplicité sur un sujet aussi complexe et admirable de courage aussi, il a l’audace de mettre en avant la douleur de deux peuples tout en stigmatisant l’aliénation que cause depuis si longtemps cette opposition fratricide. Hubert Haddad est un poète. Dans son écriture habitée, il cherche le mot juste et cultive cette nuance qui, trop souvent, est absente des débats sur ce conflit sans fin. e Suzanne Welles

En collaboration avec Bozar Music e

Palestine, Hubert Haddad, Éditions Zulma, 160 p, 16,50 e

Au programme : Joseph Haydn, Variations en fa mineur, Hob. XVII:6 Wolfgang Amadeus Mozart, Sonate pour piano, KV 533 Ludwig van Beethoven, Sonate pour piano n° 13, op. 27/1, quasi una fantasia Franz Schubert, Sonate pour piano, D 960

Libertés ! Septembre 2008 15



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