Libertés ! Mars 2009 n° 452

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Ne paraît pas aux mois de juillet-août. 9, rue Berckmans 1060 Bruxelles

MARS 2009 – N°452 – LE MENSUEL D’AMNESTY INTERNATIONAL

LES FEMMES CHANGENT

THAÏLANDE LE CALVAIRE DES ROHINGYAS

25 AVRIL 2009 ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

DÉPOT À BRUXELLES X

Libertes!

BELGIQUEBELGIE PP 1/2345 BXL X


É D ITO R I A L

LOIN DES YEUX, LOIN DU CŒUR ? H

uit mois après la libération aux forceps de la sénatrice Ingrid Betancourt de la jungle dans laquelle elle était détenue par les FARC depuis février 2002, la Colombie peine à tenir sa place sur la scène médiatique. Pourtant, à moins de se bercer d’illusions, la Colombie ne se résume pas à la destinée toute personnelle de la sénatrice et ancienne candidate du parti Oxígeno Verde à l’élection présidentielle. Cet État latino-américain est encore très loin d’avoir surmonté ses vieux démons que sont les inégalités économiques, le narcotrafic, la guérilla des FARC et l’impunité dont de trop nombreux groupes paramilitaires continuent de jouir. Si Betancourt a quitté la scène politique, les groupes armés, eux, donnent toujours le ton dans un pays qui n’en a pas fini de manger son pain noir. Ainsi, les forces de sécurité colombiennes, les groupes paramilitaires et les mouvements de guérilla n’ont toujours pas renoncé à une politique qui vise à «punir» toute personne qui refuse de s’impliquer dans le conflit qui sévit en Colombie. Les communautés afro-colombiennes des bassins du

Jiguamiandó et du Curvaradó, dans le département du Chocó, qui se sont proclamées «zones humanitaires», et la «communauté de paix» de petits paysans de San José de Apartadó, dans le département d’Antioquia, comptent parmi ces «communautés en résistance» qui subissent depuis des années les attaques des deux camps, simplement parce qu’elles défendent leur droit en tant qu’entités civiles de rester en dehors du conflit. Avec les communautés afro-colombiennes, les collectivités indigènes et paysannes sont particulièrement ciblées par des attaques destinées à décourager toute tentative de mettre sur pied d’autres communautés ou à sanctionner celles qui ont déjà pris position. D’autres attaques ont pour objectif de contraindre les communautés à quitter des terres riches en ressources naturelles ou revêtant une importance stratégique pour l’un ou l’autre camp. Résultat : ces violences ont entraîné le déplacement forcé de 3 à 4 millions de personnes. Seul le Soudan bat ce triste record. Ce 24 février, au nom de plusieurs «communautés en résistance», Amnesty International a lancé une campagne de pétitionnement demandant aux autorités colombiennes de juger les auteurs présumés d’atteintes aux droits humains visant les membres de ces communautés et de garantir la sécurité de ces dernières. e Pascal Fenaux Lire aussi : Les zones humanitaires de Curvaradó et Jiguamiandó Des communautés résistent en Colombie (Index AI : AMR 23/001/2009)

Libertés ! • Rue Berckmans, 9 – 1060 Bruxelles • Tél : 02 538 81 77 Fax : 02 537 37 29 • libertes@aibf.be • www.libertes.be • Éditrice responsable : Christine Bika • Rédacteur en chef: Pascal Fenaux • Comité de rédaction: Bruno Brioni, Thandiwe Cattier, Véronique Druant, Samuel Grumiau, Anne Lowyck, Brian May, Suzanne Welles • Ont collaboré à ce numéro : Gilles Bechet, Constance de Bonnaventure, Jonathan Equeter, Louis Mbazoa (st.) • Iconographie : Brian May • Maquette : RIF • Mise en page : Gherthrude Schiffon • Impression (sur papier recyclé non blanchi) : Remy Roto • Couverture : Des ouvrières de l’industrie textile défilent à Rokeya Sarani, un quartier de la capitale du Bangladesh. Dacca, 3 janvier 2008 © Munir uz Zaman / DrikNEWS / Majority World/ Still Pictures

CHANGEMENT D’ADRESSE – ATTESTATION FISCALE – MODIFICATION, ANNULATION OU NOUVELLE COTISATION DE MEMBRE/DONATEUR(TRICE) Madame Michele Ligot : mligot@aibf.be je change d’adresse (inscrire uniquement la nouvelle adresse) Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Prénom: . . . . . . . . . . N° de membre: . . . . . . . Adresse: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . N° . . . . . bte . . . . . . . . . . Code postal: . . . . . Localité: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Tél (obligatoire): . . . . . . . . . . . . . . . E-mail: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Oui, j'adhère aux objectifs d'Amnesty et souhaite devenir membre Je répartis le montant de : ma cotisation de mon abonnement sur toute l’année en complétant ce coupon et en le renvoyant à Amnesty International, 9 rue Berckmans à 1060 Bruxelles. Tout montant qui dépassera 14,87 e (prix de la cotisation ou de l'abonnement), sera considéré comme un «don», et par là-même jouira de la déductibilité fiscale pour autant que ce supplément soit de 30 e ou plus. Je verse tous les mois, au départ de mon compte n° . . . . . . . . . . – . . . . . . . . . . . . . . la somme de : 6e 10 e 20 e . . . . . . . . e (ou tout autre montant de mon choix) au profit du compte 001-2000070-06 de Amnesty International à partir du . . . . . . . . . . et jusqu’à nouvel ordre. Je conserve le droit d’annuler ou de modifier cet ordre à tout moment. ou je verse en une fois le mandat de . . . . . . . . . . . . . . au compte 001-2000070-06 Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prénom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Date de naissance: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . N° . . . . . . . . bte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Code postal: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Localité: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Tél (obligatoire): . . . . . . . . . . . . . . . . E-mail: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Profession: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Date: . . . . . . . . Signature:

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SOMMAIRE ACTUEL

■ Thaïlande : Des hommes à la mer ■ Gaza : «Comme je n’étais pas là, ils

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ont pris mon fils» ■ Insolites-Brèves

DOSSIER LES FEMMES CHANGENT ■ Afghanistan : Ministère amer ■ Afghanistan : Protéger les défenseuses ■ Liberia : Un combat pour la paix ■ Népal : Une Constitution impuissante ? ■ Irak : Des cibles si faciles ■ 100 ans de luttes

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MOUVEMENT

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ISAVELIVES.BE

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CULTURE/AGENDA

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■ Belgique : Journée de la Femme ■ 25 avril 2009 : Assemblée générale d’AIBF

■ Lettres du mois : Venezuela, Arménie et Haïti ■ Bonnes nouvelles

■ Revers de Manche ■ Souvenirs de fabrique ■ Le chemin de la réussite


ACTU EL KENYA NON À L’IMPUNITÉ Le 16 février 2009, le Parlement kenyan rejetait le projet de loi de 2009 portant amendement de la constitution ainsi que celui concernant le Tribunal spécial pour le Kenya. Ce faisant, il est à craindre que les crimes commis lors des violences post-électorales de 2007-2008 ne restent impunis. Amnesty a rappelé aux autorités kenyanes l’obligation internationale qui leur incombe d’enquêter sur les violences et de traduire devant la justice toutes les personnes soupçonnées d’avoir commis ces crimes. En sanctionnant les crimes commis pendant cet épisode dramatique, la justice kenyane permettrait en outre aux victimes d’obtenir des réparations, ce qui éviterait l’aggravation des problèmes politiques et économiques du pays. e

ÉTATS-UNIS NOUVELLE EXÉCUTION Le 20 février, l’État de Virginie procédait à sa 103e exécution depuis 1976. Condamné à mort en 2001, Edward Nathaniel Bell, un Jamaïcain de 44 ans, était accusé du meurtre un soir d’octobre 1999 de Ricky Brooke, un policier de la ville de Winchester. La Virginie est l’État qui pratique le plus grand nombre d’exécutions après le Texas. Edward Bell est le premier exécuté de cette année 2009. e

ROYAUME-UNI ASILE POUR UN PRISONNIER DE GUANTÁNAMO Le 22 février, la Grande-Bretagne acceptait d’accueillir sur son sol un futur ex-prisonnier de Guantánamo. Selon Jacqui Smith, la ministre britannique de l’Intérieur, un accord est intervenu vendredi dernier entre les ÉtatsUnis et la Grande-Bretagne pour organiser le transfert de cet homme soupçonné de terrorisme et détenu depuis 2004 sur l’île cubaine de Guantánamo. La libération de ce Britannique d’origine éthiopienne est une première depuis l’arrivée à la Maison Blanche de Barack Obama, qui a annoncé la fermeture à terme du camp controversé. e

MYANMAR (BIRMANIE) L’ÉTAU SE DESSERRE ? Le 20 février, la télévision officielle annonçait que la junte militaire au pouvoir avait décidé de libérer plus de 6 300 prisonniers afin de leur permettre de participer aux élections de l’an prochain. Cette annonce survenait le lendemain de la visite de Tomas Ojea Quintana, rapporteur spécial des Nations unies sur les droits de l’Homme, lequel avait appelé à la libération progressive des prisonniers politiques, dont Aung San Suu Kyi, Prix Nobel de la paix, assignée à résidence depuis 2003. e

RUSSIE DÉNI DE JUSTICE ? Le 20 février, la justice moscovite, après délibération des jurés, acquittait toutes les personnes accusées de l’assassinat de la journaliste Anna Politkovskaïa, le 7 octobre 2006. Pour Amnesty International, les enquêtes sur le meurtre de cette journaliste spécialisée dans les droits humains doivent être reprises à zéro. e

Des réfugiés rohingyas échoués sur une île thaïlandaise sont regroupés par le colonel Manat Khongpan, accusé d’avoir détenu au secret puis rejeté à la mer plusieurs centaines de boat people birmans musulmans. Koh Sai Baed, décembre 2008. © AFP / South China Morning Post

THAÏLANDE

DES HOMMES À LA MER En décembre 2008 et janvier 2009, au moins 1200 boat people originaires du Myanmar (Birmanie) et du Bangladesh ont été interceptés alors qu’ils tentaient de rejoindre les côtes de la Thaïlande. L’armée thaïlandaise les a déportés très loin en haute mer sur des embarcations sans moteur et quasi sans vivres. Certains ont été torturés avant d’être abandonnés au large.

L

es Rohingyas sont l’une des ethnies les plus persécutées au Myanmar (1). Ils vivent principalement dans l’État d’Arakan, proche du Bangladesh, et sont musulmans. Ces derniers mois, des milliers d’entre eux ont fui par la mer en direction de la Thaïlande, d’où ils espèrent passer en Malaisie. Leur but est d’échapper aux persécutions et à la misère, mais la plupart de ceux qui ont été interceptés par la marine thaïlandaise en décembre 2008 et janvier 2009 ont vécu l’enfer. Amenés de force sur Koh Sai Daeng, une île déserte contrôlée par l’armée thaïe, ils y ont été maltraités et humiliés avant d’être contraints de monter à bord de barges sans moteur que la marine a remorqués loin des côtes, en pleine mer d’Andaman, où ils ont été abandonnés. Au moins 1 195 Rohingyas et Bangladeshis ont subi ce sort, dont quelques enfants, l’un d’eux âgé d’à peine onze ans. Seuls 859 d’entre eux ont été retrouvés aux alentours d’îles indiennes (Nicobar, Andaman) ou indonésiennes, après de nombreux jours de dérive sans vivres. L’un des rescapés en détention en Inde a livré son témoignage au groupe de défense des droits humains Arakan Project, spécialisé dans les questions rohingyas: «Nous avons navigué douze jours avant d’être interceptés par la marine thaïe. Elle nous a amenés sur une île déserte

[Koh Sai Daeng] où nous sommes restés deux jours, puis les soldats nous ont embarqués sur une barge tirée par un navire. Après environ deux jours de remorquage, nous avons croisé la route de deux autres embarcations de boat people. Le navire de la marine thaïe les a arrêtés et nous avons tous été contraints de retourner sur la même île. Nous étions 412 prisonniers sur l’île, mais l’armée ne nous donnait que de 8 à 10 kg de riz par repas. Nous dormions sous les arbres, mains liées, et nous étions souvent battus. Huit jours plus tard, l’armée nous a contraints à embarquer sur un navire qui remorquait une barge. Après un jour et demi de navigation, ils nous ont ordonné de passer dans la barge. Nous avions les mains liées, mais nous avons tous refusé, même lorsqu’ils nous ont menacés avec leurs armes. Ils ont alors lié les jambes de quatre d’entre nous et les ont jetés par-dessus bord sans leur avoir délié les mains. Nous avons alors accepté d’aller dans la barge. Ils nous ont libéré les mains, puis nous ont encore remorqué un peu avant de couper le câble et de repartir». Selon ce rescapé, la marine n’a laissé que quatre sacs de riz et un peu d’eau potable à ces centaines de personnes. «Nous avons dérivé durant environ dix jours. Nous ne pouvions quasiment plus bouger tellement nous étions affaiblis. Un soir, nous avons aperçu une lumière à l’horizon. Craignant que le courant ne nous éloigne de cette terre, beaucoup ont sauté à l’eau pour nager vers la lumière, mais ils

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ACTU EL n’avaient plus suffisamment d’énergie et nous en avons vu certains qui coulaient. Un peu plus tard, un navire de gardes-côtes indiens est arrivé et nous a secourus. Nous n’étions plus que 98 sur la barge alors que nous étions 412 au départ. Les gardes-côtes ont recherché les autres, mais n’ont pu en retrouver que neuf en vie. Je ne sais pas si tous les autres ont coulé ou ont été dévorés par les requins». Face au scandale suscité par la révélation dans la presse de ces pratiques abominables, le gouvernement thaïlandais a reconnu que la marine avait procédé à des déportations en mer. Le Premier ministre, Abhisit Vejjajiva, a expliqué aux médias qu’il ne s’agissait pas de la politique voulue par le gouvernement et s’est engagé à sanctionner les responsables s’ils sont découverts (il y a cependant peu de chances que ce soit le cas, notamment parce qu’aux dernières nouvelles, l’enquête sur ces faits a été confiée à… l’armée). Le gouvernement nie par contre que certains ont été torturés avant leur déportation. «Tous les rescapés qui ont témoigné ont pourtant mentionné qu’ils avaient été battus, révèle Chris Lewa, directrice de l’Arakan Project. Des photos montrent les marques de ces tortures sur des rescapés dans un hôpital de la province d’Aceh, en Indonésie. L’armée nie, mais il devient de plus en plus clair que les militaires utilisent des groupes paramilitaires sous son contrôle. Les tortures avaient parfois pour but de leur faire comprendre qu’ils ne devaient plus jamais revenir, dans d’autres cas, il s’agissait de les mater, parfois aussi ceux qui les ont battus étaient saouls et frappaient pour s’amuser».

Il ne semble plus y avoir eu de boat people repoussés en mer en février. Le problème de cette minorité demeure cependant entier : au Myanmar, elle est visée par des mesures spécifiques très discriminatoires, comme l’absence de droit à la nationalité, qui les rend apatrides de fait. Ils ne sont pas non plus bienvenus au Bangladesh, tandis que l’Inde et l’Indonésie sont embarrassées par leur présence. La Thaïlande, qui adopte souvent une attitude relativement conciliante quant à la présence sur son territoire de Birmans en situation irrégulière, est agressive vis-à-vis des Rohingyas, qu’elle a parfois accusés (sans preuve) de se joindre aux mouvements rebelles du sud du pays (2). Les Rohingyas renvoyés au Myanmar courent un grand risque de subir de graves violations des droits humains (travail forcé, expulsions forcées, confiscations de terres, etc). Amnesty demande qu’une initiative régionale regroupant le Bangladesh, l’Inde, l’Indonésie, la Malaisie, le Myanmar et la Thaïlande (avec la participation du HCR) soit mise en place pour trouver une solution durable à cette tragédie rohingya. e Jonathan Equeter (1) Voir le rapport d’Amnesty, La minorité Rohingya : déni des droits fondamentaux, disponible sur http://www.amnesty.org/fr/library/asset/ ASA16/005/2004/fr/dom-ASA160052004fr.html (2) À noter la publication par Amnesty en janvier d’un rapport sur le recours à la torture par les forces de sécurité thaïlandaises en campagne anti-insurrectionnelle dans le sud de la Thaïlande.

L’INSOLITE TOUCHER LE FOND L’Atlantide, la célèbre île engloutie décrite par Platon, aurait été retrouvée grâce à Google Ocean, cet outil qui permet aux internautes d’explorer les fonds sous-marins. Un ingénieur en aéronautique a repéré un rectangle parfait de lignes se coupant à angle droit, évoquant selon lui la «carte aérienne» d’une ville. Cette grille de quelque 20 000 km2 se trouve au large des côtes africaines, près des Canaries (31° 15’ 15’’ 53’’’ de latitude nord et 24° 15’ 30’’ 53’’’ de longitude ouest). S’agit-il de ce mythique et richissime empire à la civilisation brillante, détruit par un raz-de-marée et des tremblements de terre 9 000 ans avant le récit du philosophe ? Pour l’archéologue américain Charles Orser, cette découverte «est fascinante et mérite plus ample examen». Google ne partage pas cet enthousiasme. Pour la société américaine, citée par la BBC, les lignes détectées ne sont que des traces bathymétriques dues au passage des bateaux utilisant des sonars pour déterminer la topographie des fonds sous-marins. e (D’après The Daily Telegraph)

PAROLES GAZA

«COMME JE N’ÉTAIS PAS LÀ, ILS ONT PRIS MON FILS» Le 10 février dernier, 3 semaines après la fin d’une offensive israélienne particulièrement sanglante contre la bande de Gaza et l’administration de facto du Hamas, Amnesty International publiait un rapport sur les exactions et autres règlements de comptes commis par les forces du Hamas et les milices.

L

a mission d’enquête envoyée par le Secrétariat international d’AI a accumulé les preuves et les témoignages d’enlèvements, d’homicides délibérés et illégaux, d’actes de torture et de menaces de mort contre les Palestiniens accusés de «collaborer» avec Israël et contre les opposants au Hamas. Ainsi, plus de 20 hommes ont été abattus par les miliciens du Hamas, tandis que beaucoup d’autres ont été grièvement blessés par balles, passés à tabac ou torturés. La plupart ont été enlevés chez eux avant d’être abandonnés – morts ou blessés – dans des endroits isolés, ou retrouvés à la morgue de l’un des hôpitaux de Gaza. Certains ont été abattus alors qu’ils se trouvaient à l’hôpital pour y faire soigner leurs blessures. Les témoignages recueillis par AI l’ont tous été sous couvert de l’anonymat. A. : «Le 20 janvier au matin [2 jours après l’entrée en vigueur de la trêve], des miliciens du Hamas masqués ont pénétré chez moi et m’ont bandé les yeux avant de me jeter dans une voiture. Ils m’ont emmené dans un terrain vague, m’ont tabassé et m’ont enfin tiré dans le genou droit.» Le père d’A a quant à lui été blessé par balles dans le ventre pour avoir voulu s’interposer. S. : «Quatre hommes masqués sont entrés dans ma maison le 31 décembre [au plus fort de l’opération israélienne] vers 4 heures du matin. Sans dire un mot, ils m’ont tiré une balle à l’arrière du genou droit et ont visé ma jambe à trois reprises. Un ami a essayé d’intervenir, mais ils l’ont menacé. Finalement, quand les gens ont commencé à affluer pour voir ce qui se

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Une victime palestinienne d’une attaque de miliciens du Hamas. Gaza, 28 janvier 2009. © AI passait, les tireurs se sont enfuis. Fin janvier, des miliciens sont revenus chez moi, mais ne m’ont pas trouvé.» W.: «Le soir du 9 janvier, des agents de la Sécurité intérieure du Hamas m’ont forcé à les accompagner. À vingt mètres de chez moi, ils m’ont déchiqueté une jambe par balles et j’ai dû être amputé au-dessus du genou.» N. : «Le 20 janvier, des membres de la Sécurité intérieure sont venus chez moi. Il devait être 13 heures. Comme je n’étais pas là, ils ont pris mon fils. Quand je suis revenu, je me suis rendu au commissariat pour leur demander ce qu’ils me voulaient et faire libérer mon enfant. Un autre membre de ma famille était également détenu. Ils nous ont emmené tous les trois dans une ferme abandonnée et nous ont passés à tabac. Ils m’ont accusé d’avoir distribué des bonbons pour fêter l’assassinat de Saïd Siyam [ministre Hamas de l’Intérieur] par l’armée israélienne. Quand je leur ai dit que ce n’était pas vrai, ils m’ont dit qu’ils nous libéreraient si je leur trouvais trois autres Palestiniens qui s’étaient réjouis de cet assassinat. Je leur ai répondu que, comme tout le monde, je m’étais cloîtré chez moi durant les bombardements israéliens et que je ne savais donc pas ce qui se passait dehors. Ils m’ont aussi accusé d’avoir transmis des informations à l’Égypte et à l’Autorité palestinienne de Cisjordanie. Finalement, ils nous ont demandé de ne pas quitter notre domicile pendant un mois et de ne pas parler, sinon ils nous tueraient.» e Pour en savoir plus : http://www.amnesty.org/en/gaza-crisis


DOSSIER

LES FEMMES CHANGENT Chaque 8 mars, la Journée internationale de la Femme célèbre les progrès effectués sur le terrain de la réalisation des droits des femmes au fil des années dans les domaines économique, politique et social. Au cours du siècle écoulé, des accords internationaux, légalement contraignants, visant à protéger et à faire progresser les droits des femmes ont été adoptés et mis en œuvre. Dans de nombreux pays, les femmes participent activement au processus politique et avancent à grands pas vers l’égalité sur le plan des études et des salaires. Il reste cependant beaucoup à faire. Des femmes et des jeunes filles continuent d’être victimes de discriminations et de violences, situation les empêchant d’accéder à l’indépendance et d’exercer certains droits fondamentaux; elles sont particulièrement touchées par la pauvreté, la dégradation de l’environnement et la maladie, et font souvent l’objet d’attaques les visant spécifiquement lors de conflits armés ou au nom de traditions culturelles ou religieuses. Malgré les difficultés auxquelles elles sont confrontées, les femmes s’efforcent de changer leur quotidien. Qu’elles agissent en défendant les droits humains ou simplement au sein de leur famille et de la société, les femmes ont souvent donné l’impulsion à des changements sociaux positifs et à des avancées sur le plan des droits humains bénéficiant à l’ensemble de la population. Dans le même temps, elles sont souvent prises pour cible précisément pour avoir défendu ces droits.

l Palwasha Kakar, vice-ministre afghane des Affaires féminines et présidente de la Commission indépendante des Droits de l’Homme. Paris, novembre 2008. © Christian Courrèges/AI

AFGHANISTAN

MINISTÈRE AMER En 2009, malgré la reconstruction amorcée en 2001, l’Afghanistan est toujours en proie à de violents combats. Si les civils sont de plus en plus nombreux à souffrir des bombardements, des opérations de guérilla et de l’insécurité en général, les femmes sont quant à elles victimes à double titre, car au conflit, s’ajoute le poids de la tradition. Malgré l’engagement de la vice-ministre des Affaires féminines, Palwasha Kakar, leurs droits sont loin d’être prioritaires. Rencontre

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n plein centre-ville de Kaboul, on passe un barrage surveillé par la police, direction la fouille, avant de pénétrer au sein du ministère afghan des Affaires féminines. C’est ici que Palwasha Kakar, 40 ans, vice-ministre des Affaires féminines, occupe à elle seule un grand bureau. Comme la plupart des bâtiments publics de Kaboul, ce ministère est une cible potentielle pour les attentats. Ses trois téléphones portables sonnent en permanence, sa secrétaire lui annonce plusieurs

rendez-vous. Active et déterminée, Palwasha Kakar a multiplié les expériences de terrain, avant d’arriver à ce poste : pendant près de vingt ans, elle a combattu les injustices envers les femmes. Aujourd’hui, Palwasha Kakar fait partie du gouvernement de Hamid Karzai. Un poste officiel qu’elle juge contraignant, elle qui fut militante pendant des années. Pourtant, elle est un des rares exemples parmi les Afghanes à avoir su et pu contourner presque tous les obstacles à sa réussite.

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DOSSIER FAITES ENTENDRE LA VOIX DES FEMMES

L

Gil Won Ok, 78 ans, et d’autres anciennes «femmes de réconfort» coréennes manifestent devant l’ambassade du Japon. Séoul, 15 mars 2005. © Paula Allen Désabusée, Palwasha Kakar n’a plus la foi d’antan. «Moi je suis une militante, donc aujourd’hui je suis malheureuse dans ce bureau. Je me trouve en prison, je ne peux même pas sortir de la maison!». Pourtant, elle explique qu’elle n’a pas le choix. C’est entre autres par mesure de sécurité qu’on lui a proposé ce poste. Depuis quelque temps, elle est l’objet de menaces récurrentes, non seulement de la part des talibans mais aussi d’anciens chefs de guerre qui contestent son pouvoir. «J’ai reçu plusieurs menaces de mort m’accusant d’aimer les États-Unis. Je suis nerveuse maintenant, j’ai peur de tout, c’est trop dangereux. C’est aussi pour ça que je suis revenue à Kaboul. C’est plus sûr de travailler au ministère». Comme beaucoup d’autres femmes afghanes, Palwasha risque sa vie, simplement en travaillant. En septembre dernier, Malalai Kakar, la policière la plus connue d’Afghanistan, a été assassinée à la porte de son domicile. Assassinat revendiqué par les talibans, mais dont les circonstances sont encore troubles. Des journalistes célèbres, ont été tuées en 2008. Malgré l’instauration d’une république en Afghanistan, Palwasha Kakar se plaint de la très faible liberté d’expression : «Je n’ai pas le droit d’ouvrir ma bouche. Je ne sais même pas qui me soutient. Avec la position que j’ai, je ne peux pas parler honnêtement». Pour la vice-ministre, le pays vit en guerre, toute une partie de la population est oubliée de l’aide internationale. Elle déplore que le ministère des Affaires féminines ne travaille que dans la capitale et que beaucoup d’officiels ne connaissent pas la province. «Les ONG ne vont pas dans les endroits où ça va mal. Elles restent à Kaboul où règne la sécurité ! Actuellement, personne ne travaille dans le sud, où pourtant on aurait besoin de nous. Mais notre ministère n’a aucun budget et aucune idée… Les Afghanes savent que ce ministère existe mais elles se demandent à quoi il sert ! Ce ministère est simplement politique.» Dans cette période de reconstruction amorcée en 2001 par l’afflux de l’aide internationale, le droit des femmes est loin d’être une priorité. Pourtant, il était prévu de les intégrer aux programmes de reconstruction. Notamment en politique: le Parlement comprend 25 % de femmes ; Hamid Karzai a nommé à Bamyan une gouverneure et on compte de nombreuses policières. En matière d’éducation, le gouvernement a multiplié la construction d’écoles pour filles et appuyé la formation de professeurs féminins. Beaucoup de problèmes subsistent : les femmes ne sont pas encore suffisamment formées pour endosser des rôles à responsabilité. Il faudra encore des années pour qu’elles prennent leur place. Et comme le souligne Palwasha Kakar, les mentalités doivent changer. «On ne peut imposer une libéralisation des mœurs! Les femmes ne vont pas dans les restaurants, ne choisissent pas leurs maris, ne travaillent pas. On est loin de l’égalité des sexes !». Palwasha a grandi à Jalalabad, grande ville de l’est, à proximité de la frontière avec le Pakistan. Elle évolue dans une famille aisée proche du roi Zaher Shah, de l’ethnie pachtoune, bercée dans un univers moderne et cultivé. Fille aînée d’une fratrie de huit sœurs, elle garde comme modèle sa grand-mère, poétesse et femme libérale. En 1979, au moment de l’invasion soviétique, la famille de Palwasha souffre du régime communiste. Le père est emprisonné. C’est le temps des déménagements et la fin de la vie douce à Jalalabad. À 18 ans, au lieu de se marier comme la majorité des jeunes filles de son âge, Palwasha privilégie sa carrière et entre en tant que stagiaire dans la grande station radio de Kaboul. Une fois par jour, elle

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orsqu’elles tentent d’exercer leurs droits, des femmes se trouvent en butte à des obstacles spécifiques que les États doivent s’efforcer de supprimer, tandis que des mécanismes de protection adaptés doivent être mis en place ; il faut que les femmes participent activement aux processus d’élaboration des politiques qui ont des répercussions sur leur vie. C’est pourquoi Amnesty International vous propose, dans les pages ci-contre, une série d’actions ciblées sur des pays où les discriminations et la lutte des femmes contre ces discriminations sont les plus aiguës : l’Afghanistan, le Liberia, le Népal et l’Irak. Sur le sites d’Amnesty International Belgique francophone (www.amnestyinternational.be/doc), vous trouverez également des propositions d’action sur l’Iran, l’Afrique du Sud, le Venezuela et la Grèce. Enfin, dans nos pages Isavelives.be (p.14), vous trouverez également un modèle de lettre concernant Haïti. e

présente le journal de l’économie, devient une animatrice réputée. Mais son refus de rejoindre le Parti communiste lui coûte sa carrière de journaliste. Palwasha reprend ses études à l’université de Kaboul en 1984 et devient professeure. Elle s’intéresse particulièrement aux cas de jeunes filles qui, mariées, ne peuvent plus suivre les cours. Aujourd’hui, Palwasha Kakar est mère de 4 garçons. Son mari a toujours soutenu ses ambitions professionnelles. «Il accepte beaucoup de choses pour moi. Il prend des risques.» En 1992, l’Afghanistan est en proie à une guerre civile sanglante. Palwasha quitte Kaboul pour Jalalabad où, pendant près de deux ans, elle travaille comme professeure principale dans un collège. Elle trouve ensuite un poste à l’Unicef qui l’amène à découvrir les conditions de vie des femmes en zones rurales : pas d’éducation, beaucoup d’enfants et pas grand-chose pour les nourrir. Elle commence alors à organiser des réunions de femmes avec l’accord des mollahs. Lorsque les talibans arrivent au pouvoir en 1996, Palwasha espère qu’ils apporteront la sécurité. Mais pendant quelques mois, elle est obligée de rester chez elle et doit cesser ses activités professionnelles. «Sous les talibans, on n’a pas pu travailler pendant six mois», témoigne Palwasha. Sitôt qu’elle sort de chez elle, toute femme doit porter la burka et être accompagnée par un membre de sa famille. Complètement isolée, interdite de travail, Palwasha commence à désespérer. Quelques mois plus tard, après des négociations avec les talibans, l’Unicef la rappelle. Palwasha est chargée des programmes de vaccination des enfants. Elle en profite pour reprendre discrètement les discussions avec les femmes des villages et monte des écoles clandestines. «Sous les moudjahiddines, les principaux problèmes étaient l’insécurité et la corruption. Sous les talibans, c’était le port de la burka et les femmes qui ne peuvent pas travailler», analyse Palwasha. Mutée à Hérât en 1998, après un bref passage au Pakistan, Palwasha s’occupe des femmes qui s’immolent par le feu, pour protester contre le mariage forcé. En 2001, après la chute du régime taliban, Palwasha est pleine d’espoir. La Commission afghane indépendante des Droits de l’Homme la recrute. Elle y passe trois ans comme responsable des droits de la femme, puis devient en 2006 la responsable régionale de cette institution. Ses domaines : les enfants, la justice ou encore les droits de l’Homme. «Je comprends bien la situation car je parle beaucoup de dialectes et je me suis promenée dans beaucoup de districts», précise-t-elle. Pour nombre d’Afghans, l’espoir de 2001 s’est évaporé pour faire place à un découragement général. Sept ans après, l’insécurité est palpable et les conditions de vie ne s’améliorent pas. «Les femmes ne se sentent pas en sécurité, même dans Kaboul. Regardez, pas une seule ne marche seule dans les rues après 17 heures La sécurité était meilleure sous les talibans», déplore Palwasha, qui poursuit : «Aujourd’hui la situation des droits de la femme progresse, du moins à Kaboul… Mais les Afghanes sont loin d’être indépendantes. Elles ne reçoivent quasiment aucune éducation, souffrent toujours des mariages forcés et de violences conjugales». Aujourd’hui, Palwasha souhaite quitter l’Afghanistan. «Parcourir le monde entier pour que chacun sache ce qu’il se passe ici !». Elle rêve de changer la mentalité des hommes, mais aussi celle des femmes afin que celles-ci prennent leur destin en main. e Constance de Bonnaventure


DOSSIER

j Jeunes filles suivant un cours d’anglais dans un établissement privé de Kaboul. © UNHCR/N.BEHRING

AFGHANISTAN

PROTÉGER LES DÉFENSEUSES L

’intervention militaire internationale ayant débuté en octobre 2001 sous le commandement des États-Unis dans le but de renverser le régime taliban a été suivie d’un engagement, pris par le gouvernement afghan, en faveur de la protection des droits des femmes et de la progression de l’égalité entre hommes et femmes ; cependant, huit ans plus tard, la condition des Afghanes reste affligeante. Des progrès ont été accomplis en matière de respect des droits des femmes depuis la chute du régime taliban, notamment avec la création du ministère de la Condition féminine, une Constitution prévoyant l’égalité entre hommes et femmes, un meilleur accès à l’éducation et une meilleure représentation des femmes au Parlement. Toutefois, les femmes, les jeunes filles et les fillettes afghanes continuent à être en butte à une violence généralisée ; elles sont ainsi victimes d’actes de violence domestique, d’enlèvements et de viols imputables à des hommes armés, de la traite d’être humains, de mariages forcés – notamment de fillettes de plus en plus jeunes – et d’échanges permettant de régler des litiges et des dettes. Un petit nombre de défenseuses des droits humains pleines de courage ose remettre en question le statut de la femme et agir en faveur des droits humains par le biais de diverses activités, notamment en faisant état des violations commises par des seigneurs de la guerre locaux, en dirigeant des centres d’accueil, en menant une action de sensibilisation concernant les mariages d’enfants et les mariages forcés et en proposant des programmes d’éducation et des services de planning familial. Ces courageuses femmes sont fréquemment la cible d’actes d’intimidation et d’agressions, souvent imputés à des éléments puissants de la société, certains d’entre eux membres du gouvernement, d’autres alliés aux tali-

bans et à d’autres forces hostiles au gouvernement. Dans certains cas, ces femmes sont même agressées par des membres de leur famille pouvant avoir des opinions politiques opposées aux leurs ou étant gênés par leur franc-parler. Les défenseuses des droits humains et leur famille font souvent l’objet de menaces de mort ou de tentatives d’enlèvement, ainsi que d’agressions physiques, à l’acide par exemple. Certaines ont fui le pays tandis que d’autres ont été tuées pour s’être exprimées haut et fort. En 2007, Zakia Zaki, propriétaire de Radio Peace, dans la province de Parwan, et connue pour sa critique vigoureuse des seigneurs de la guerre, a été tuée par balle alors qu’elle dormait aux côtés de ses deux jeunes fils. Elle avait auparavant reçu à plusieurs reprises des menaces de mort après avoir critiqué les seigneurs de la guerre locaux et les talibans. À ce jour, personne n’a été déféré à la justice pour ce crime odieux. Laila, une défenseuse des droits humains s’efforçant d’obtenir justice pour les victimes de crimes de guerre, a déclaré à Amnesty International : «Depuis 2007, je fais systématiquement l’objet de pressions exercées par des inconnus qui m’appelaient, m’envoyaient des courriers électroniques, me suivraient et menaçaient de me tuer. Au cours des six premiers mois de l’année 2008, il y a eu au moins deux tentatives d’enlèvement visant mes enfants sur le chemin allant de la maison à l’école.» Shahla, défenseuse des droits humains dirigeant un centre accueillant les femmes exposées au danger de la violence domestique et sexuelle, et des mariages forcés : «Je reçois des menaces de mort et mon fils de neuf ans a été victime d’une tentative d’enlèvement […] Les personnes qui me menaçaient me faisaient clairement comprendre que je devais fermer le centre d’accueil pour femmes en danger, faute de quoi je subirais les conséquences.» L’absence de volonté politique ainsi que les discriminations dont les femmes font l’objet au sein des

systèmes judiciaires, tant officiel que non officiel, renforcent le climat d’impunité et consacrent les attitudes culturelles et les pratiques abusives mettant à mal les droits des femmes. La police, les tribunaux et les jirgas locales (assemblées tribales) ne se préoccupent pas souvent des plaintes déposées par les femmes et les auteurs de violences sont rarement déférés à la justice pour avoir agressé des femmes ou porté atteinte à leurs droits. Bien que l’Afghanistan ait signé la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et que sa Constitution garantisse l’égalité entre hommes et femmes, le gouvernement – au même titre que la communauté internationale, qui verse à l’Afghanistan 90 % de ses revenus destinés aux dépenses publiques – n’est pas parvenu à faire en sorte que les droits fondamentaux de toutes les femmes, jeunes filles et fillettes afghanes soient respectés, protégés et réalisés. Pour véritablement faire progresser le statut des Afghanes, le gouvernement doit prendre des mesures immédiates et efficaces afin de veiller à ce que les défenseurs des droits humains puissent jouer le rôle vital qui est le leur en matière de promotion et de protection des droits fondamentaux en Afghanistan, sans avoir à craindre la violence ni les actes d’intimidation. e

APPEL À L’ACTION : Amnesty International vous propose d’envoyer une lettre demandant au gouvernement afghan de faire bénéficier les femmes défenseuses des droits humains d’une véritable protection en Afghanistan et de veiller à ce qu’elles puissent mener cette action vitale sans avoir à craindre de violences ni d’actes d’intimidation. Voir http://www.amnestyinternational.be

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DOSSIER LIBERIA

j Florence Ballah et Jackie Redd, deux anciennes mineures enrôlées de force pendant la guerre civile. Elles sont aujourd’hui des défenseuses. Freetown, décembre 2008. © AI

UN COMBAT POUR LA PAIX L

e Liberia a connu deux guerres, de 1989 à 1997, puis de 1999 à 2003, qui ont débouché sur la signature d’un accord de paix à Accra en août 2003. L’Accord de paix global prévoyait un processus de désarmement, démobilisation, réadaptation et réinsertion (DDRR) dont le coup d’envoi a été donné en décembre 2003, avec l’aide de la Mission des Nations unies au Liberia (MINUL) et d’autres partenaires, comme le Programme des Nations unies pour le développement et la Commission nationale pour le désarmement, la démobilisation, la réadaptation et la réinsertion (CNDDRR). La phase de désarmement et de démobilisation de ce processus a pris fin en décembre 2004, et les programmes de réadaptation et de réinsertion ont débuté en juin 2004 et se sont achevés en octobre 2007, quand la CNDDRR a repris les rênes du programme de réinsertion. En janvier 2008, la CNDDR a lancé la phase finale du programme. D’après les Nations unies, les piliers de la réadaptation et de la réinsertion sont l’enseignement scolaire, la formation professionnelle et la réinsertion sociale. Reconnaissant le rôle considérable que les femmes et les filles ont joué durant le second conflit, les responsables du processus de DDRR visaient à adopter une démarche prenant en compte les questions de genre dans le cadre de leur action. Au cours du second conflit, entre 25 000 et 30 000 femmes et filles ont été liées aux forces combattantes,

un grand nombre d’entre elles participant activement aux combats. Elles ont choisi de prendre les armes afin de se prémunir contre les violences sexuelles, de venger la mort de membres de leur famille, de profiter de gains matériels et de survivre. Ces femmes et ces filles ont servi de commandantes, de porteuses, d’espionnes, d’esclaves sexuelles, de cuisinières et de mères. Le gouvernement libérien et la communauté internationale se sont efforcés de faire en sorte que le programme de DDRR réponde aux besoins des femmes et des filles ayant été liées aux forces combattantes, et ont adopté une démarche tenant compte du genre, en particulier lors de la phase de réadaptation et de réinsertion. Cependant, les femmes et les filles concernées continuent à rencontrer des obstacles sur la voie de la réinsertion au sein de la société. De nombreuses femmes auxquelles Amnesty International a parlé continuent à souffrir de séquelles – symptômes et douleurs – des violences sexuelles et des viols qu’elles ont subis, et leur état nécessite des soins médicaux. Le climat de violence a persisté et le

nombre de cas de violence sexuelle contre les femmes et les filles au sein de la famille, des écoles, des villages et des quartiers a continué à augmenter même une fois la guerre finie. Les femmes ne bénéficient toujours pas suffisamment des soins médicaux requis et beaucoup d’entre elles ont peu d’instruction, guère de formation et sont sans emploi. Amnesty International a constaté que nombre des recommandations présentées dans son rapport intitulé Liberia : A flawed process discriminates against women and girls (AFR 34/004/2008) n’ont pas encore été suivies. e

APPEL À L’ACTION : Amnesty International vous propose d’envoyer une lettre demandant au gouvernement libérien de veiller à ce que les besoins spécifiques des femmes ayant été liées aux forces combattantes au Liberia pendant les deux guerres soient pris en compte. Voir http://www.amnestyinternational.be

NÉPAL

UNE CONSTITUTION IMPUISSANTE ? A u Népal, le mouvement populaire de masse d’avril 2006 (connu sous le nom de Jana Andolan en népali) a soulevé de grandes attentes en faveur d’un respect renouvelé des droits humains au Népal – des attentes relatives à la création d’un «nouveau Népal» et à l’occasion offerte à la nouvelle Assemblée constituante népalaise, élue en avril 2008, de placer la protection des droits humains au cœur de son travail. Les pratiques discriminatoires anciennes se fondant sur la caste, le genre ou l’origine ethnique sont une des questions sensibles ayant fait leur apparition dans le cadre du processus de paix. L’Accord de paix global signé en novembre 2006 engage toutes les parties au conflit interne à respecter un ensemble de droits civils, politiques et économiques, et notamment à mettre fin à la discrimination. Cet engagement a incité divers mouvements identitaires à réclamer une meilleure intégration dans les structures étatiques, en particulier dans la région du Teraï, dans le sud du pays. Le soulèvement madhesi de janvier et février 2007 est sans doute celui qui a le plus contribué à mettre en évidence le problème de la persistance de l’exclusion politique et sociale. Plus de deux ans après le mouvement populaire de 2006 et l’Accord de paix global (novembre 2006), et 8 Libertés ! Mars 2009

malgré le soulèvement de groupes marginalisés du Teraï tout au long de l’année 2007, rares sont les promesses d’amélioration ayant été traduites en actes dans le domaine de la protection des droits humains. L’État n’est pas suffisamment présent dans un grand nombre de zones rurales et la police n’est pas tenue de rendre de comptes à l’échelon des districts, en particulier dans celui du Teraï, en ce qui concerne les enquêtes portant sur des violations des droits humains. En résulte un vide sécuritaire qui a permis la prolifération de groupes armés commettant diverses atteintes aux droits humains telles que des enlèvements et des homicides illégaux. Les crimes perpétrés contre les femmes ne sont ni contestés ni sanctionnés. Nombre de femmes et de jeunes filles craignent de signaler viols et autres formes de violence, non seulement en raison de l’hostilité et de la réprobation de leur communauté, mais aussi à cause de l’inaction des autorités quand il s’agit de mener l’enquête, de lancer des poursuites et de sanctionner les auteurs par le biais du système judiciaire. Les militantes œuvrant à la protection des droits des femmes se trouvent aux prises avec la violence car elles remettent en question des pratiques féodales et sont exposées aux risques les plus directs : les coups, les menaces, voire la mort.

Alors que les défenseuses se font de plus en plus entendre, tirant parti du nouvel espace politique pour aborder la question de la discrimination, elles craignent de faire l’objet de réactions violentes, aucun mécanisme de protection n’étant en place pour soutenir leur travail. e

APPEL À L’ACTION : Amnesty International vous propose d’envoyer une lettre demandant à Pushpa Kamal Dahal, Premier ministre népalais, de faire en sorte que son gouvernement adopte une politique de «tolérance zéro» concernant la violence à l’égard des femmes et prenne toutes les mesures envisageables afin de garantir la sécurité des défenseuses des droits humains, en particulier dans les zones rurales. Voir http://www.amnestyinternational.be

i Rikma Biswakarna, une défenseuse des droits des femmes, lors d’une manifestation demandant la création d’une instance de lutte contre les violences faites aux femmes. Katmandou, 29 novembre 2008. © Private


DOSSIER IRAK

DES CIBLES SI FACILES E

n Irak, les femmes et les filles sont confrontées à des discriminations et des violences généralisées. Comme le reste de la population civile, elles sont au quotidien les victimes de violences motivées par l’intolérance religieuse ou autres continuant à faire rage dans une grande partie du pays. Cependant, les femmes et les filles sont spécifiquement prises pour cibles en raison de leur genre. Des femmes sont agressées dans la rue par des extrémistes religieux déterminés à imposer une ségrégation et des discriminations fondées sur le genre. Il arrive également que leur époux, leur père, leur frère ou d’autres hommes de leur famille soumettent à la violence les femmes et les filles osant mener leur vie comme elles l’entendent. La législation irakienne interdit les mariages forcés, et le droit de choisir son époux est reconnu par le droit international, qui est applicable partout en Irak. Les femmes et les filles courent cependant de graves risques lorsqu’elles refusent d’être mariées de force ou sont vues en compagnie d’hommes contre la volonté de leur famille. Les femmes et les filles sont les principales victimes d’une grande partie de la violence. Des crimes visant spécifiquement les femmes et les filles, le viol notamment, ont été perpétrés par des membres de groupes politiques armés, par les forces gouvernementales irakiennes, par des soldats étrangers de la force multinationale placée sous le commandement des États-Unis et par des membres du personnel de

l Des Irakiennes célèbrent la Journée de la Femme par un concours de dessin. Bagdad, 8 mars 2008. © United Nations Assistance Mission for Iraq / Sarmad Al-Safy

sociétés de sécurité et de sociétés militaires privées étrangères. Dans de nombreux cas, ces crimes restent impunis. Des femmes ont également signalé avoir fait l’objet, à des postes de contrôle, de manœuvres d’intimidation et de harcèlement, qu’elles attribuent à des membres de milices ou d’autres groupes armés, qui leur reprochaient par exemple de ne pas avoir respecté un code vestimentaire strict ou de conduire un véhicule sans être accompagnée. Des dirigeantes politiques et des défenseuses des droits des femmes, qu’il s’agisse de militantes administrant des centres accueillant les femmes fuyant la violence intrafamiliale ou autre, des avocates aidant des femmes à défendre leurs droits ou des personnes réclamant la fin des discriminations et l’égalité des genres, ont été menacées, voire tuées. e

APPEL À L’ACTION : Amnesty International vous propose d’écrire par lettre au gouvernement irakien et aux autorités du Kurdistan irakien pour leur demander de réformer ou d’abolir les textes de loi introduisant des discriminations à l’égard des femmes, de veiller à ce que tous les cas de violence contre les femmes donnent lieu à une enquête et que les auteurs présumés soient déférés à la justice, de renforcer les mesures de protection et d’augmenter le nombre d’établissements accueillant les femmes en danger, de mettre en place des mécanismes de soutien destinés aux défenseuses des droits humains, en consultation avec celles-ci. Voir http://www.amnestyinternational.be

100 ANS DE LUTTES M

ondiale, la Journée internationale de la Femme est avant tout le fruit de l’action des mouvements ouvriers du début du 20e siècle en Amérique du Nord et en Europe, à l’époque de l’industrie lourde. De 1909 à 1913, les Américaines célébrèrent la Journée nationale de la Femme chaque dernier dimanche de février. En 1910, l’Internationale socialiste instaura une Journée de la Femme, de caractère international, entre autres pour obtenir l’extension du suffrage universel aux femmes. Cette Journée fut célébrée pour la première fois le 19 mars 1911. Outre le droit de voter et d’exercer une fonction publique, les femmes exigeaient le droit au travail, à la formation professionnelle et la cessation de la discrimination sur le lieu de travail. Deux ans plus tard, le dernier dimanche de février 1913, dans le cadre du mouvement pacifiste qui se développait à la veille de la Première Guerre mondiale, les femmes russes célébrèrent leur première Journée internationale de la Femme. En 1917, alors que 2 millions de soldats russes avaient été tués, les femmes russes choisirent de nouveau le dernier dimanche de février pour faire grève et revendiquer «du pain et la paix». Quatre jours plus tard, c’était la «Révolution de Février» : le Tsar Nicolas II abdiqua et le Gouvernement provisoire de Gueorgui Lvov et Alexandre Kerenski accorda le droit de vote aux femmes. Ce dimanche historique, célébré le 23 février selon le calendrier julien en usage en Russie, tombait le… 8 mars selon le calendrier grégorien utilisé ailleurs en Europe. Finalement, en décembre 1977, l’Assemblée générale de l’ONU adopta une résolution portant création d’une Journée des Nations unies pour les Droits de la Femme et la Paix internationale, dont la date était laissée à l’appréciation des États membres. e

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MOUVEMENT JOURNÉE DE LA FEMME

AMNESTY AGIT, EN BELGIQUE ET DE BELGIQUE En Belgique et dans le monde, les femmes se battent contre les injustices dont elles sont victimes, elles sont actrices de changement.

P

artout dans le monde, des femmes se sont organisées pour démasquer et affronter la violence dont elles sont victimes. Elles ont fait évoluer de façon spectaculaire les lois, les politiques et les pratiques en usage. Elles ont mis les sévices dont elles étaient victimes sur la place publique alors qu’ils sont en général cachés des regards. Elles ont montré que la violence contre les femmes obligeait les autorités, les sociétés et les citoyens à réagir. Elles ont, avant toute chose, récusé l’image courante de la femme victime passive de la violence. Malgré les obstacles auxquels elles se heurtent dans de nombreux pays, des militantes sont aux avant-postes de la lutte contre la violence dont les femmes sont les victimes. Pour autant, ceux et celles qui œuvrent en faveur des droits des femmes ont souvent fait face à la réaction brutale de forces qui pensent que l’égalité entre hommes et femmes met en danger la stabilité sociale et certains intérêts économiques bien établis.

Enfin, une nouvelle version du dépliant «Violences conjugales : Que faire ?» d’Amnesty International est désormais disponible. Il s’adresse aux victimes, aux auteurs, mais aussi aux personnes susceptibles d’être confrontées à ce phénomène. Il s’agit d’un outil de sensibilisation, mais il peut aussi aider à s’en sortir grâce aux signaux d’alarme et aux contacts utiles qui y sont repris.

Ce sont aussi 80 groupes locaux qui, sur le terrain, font un travail d’action et de sensibilisation aux droits humains. Pour vous y joindre, contactez votre régionale. SECRÉTARIAT NATIONAL AIBF Rue Berckmans 9, 1060 Bruxelles 02 538 81 77 Fax : 02 537 37 29 www.amnesty.be SECRÉTARIAT INTERNATIONAL Easton Street 1, London WC1X ODW United Kingdom 00 44 207 413 5500

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À l’occasion de la Journée internationale de la Femme, Bel RTL s’est associée à Amnesty International. Des dazibaos ont été distribués dans les principales gares de Belgique par les militantes et les militants d’Amnesty. Outre Geneviève Descamps, responsable du centre l’Églantier de Braine-l’Alleud, ces dazibaos mettent à l’honneur et proposent de soutenir 4 défenseuses des droits humains et des droits des femmes en particulier : - Justine Masika – République démocratique du Congo - Directrice de Synergie http://www.isavelives.be/justine - Jestina Mukoko – Zimbabwe - Directrice du Projet de paix pour le Zimbabwe (ZPP) http://www.isavelives.be/jestina - Ronak Safarzadeh – Iran – Militante de la Campagne pour l’égalité http://www.isavelives.be/ronak - Marisela Ortiz Rivera – Mexique - Présidente de Nuestras Hijas le Regreso a Casa http://www.isavelives.be/marisela e

Ce guide pratique est à votre disposition gratuitement sur simple demande au 02 538 81 77 ou aibf@aibf.be. Aidez-nous à poursuivre notre travail et nos actions de lutte contre les violences faites aux femmes en diffusant le dépliant et/ou en participant financièrement au coût de réalisation de cet outil imprimé en 300000 exemplaires. e

AMNESTY INTERNATIONAL VLAANDEREN Kerkstraat 156, 2060 Antwerpen 6 03 271 16 16 RESPONSABLES RÉGIONAUX D’AMNESTY BRABANT WALLON Jean-Philippe CHENU chemin de la Terre Franche 13 1470 Genappe 010 61 37 73 – jpchenu@aibf.be BRUXELLES Le poste de coordinateur est vacant ! Pour des renseignements sur le profil requis avant d’envoyer un CV, écrire à Antoine CAUDRON – Amnesty International, rue

Berckmans 9, 1060 Bruxelles ou envoyer un e-mail à acaudron@aibf.be HAINAUT ORIENTAL Nicole GROLET av. Elisabeth 6, 6001 Marcinelle 071 43 78 40 – ngrolet@aibf.be LIÈGE Jean-Pierre ANDRÉ 04 387 51 07 – jpablegny@yahoo.fr Christine BIKA Responsable de la gestion de la permanence – C/O Bureau régional d’AI – rue Souverain Pont 11 – 4000 Liège – du lundi au vendredi de 13h30 à 17h30 – 04 223 05 15 bureaudeliege@aibf.be

LUXEMBOURG Daniel LIBIOULLE Avenue de la Toison d’Or 26 6900 Marche en Famenne 084 31 51 31 – dlibioulle@aibf.be NAMUR Romilly VAN GULCK Rue Vivier Anon 8, 5140 Sombreffe 071 88 66 69 rvangulck@aibf.be WALLONIE PICARDE Marie NOËL Rue Cheny 1, 7536 Vaulx 069 77 66 13 – 0499 13 57 25 mnoel@aibf.be


MOUVEMENT

RENCONTRES DU PRINTEMPS LE DÉBAT TOUT PRÈS DE CHEZ VOUS Amnesty International se doit d’être en phase avec l’évolution d’un monde qui a besoin d’elle, qui a besoin de personnes qui replacent l’humain au centre du débat. Parce que le combat pour le respect des droits fondamentaux s’ancre dans une réalité sans cesse renouvelée, Amnesty International a le souci de se remettre en question, de se remodeler pour mieux s’adapter et agir plus efficacement. Cette année 2009 sera pour le mouvement une année déterminante car elle orientera notre action de 2010 à 2016 par l’adoption du nouveau Plan stratégique intégré (PSI). Il s’agira de l’aboutissement d’un long processus démocratique auquel participent les membres des quatre coins de la planète. Les rencontres du printemps seront l’occasion pour chacun de donner son avis sur une première version du PSI, non définitive et soumise à la consultation des membres du mouvement. Cinq rencontres sont prévues dans autant de villes différentes afin de permettre à chacun de prendre part à ce débat important et de contribuer à la démocratie et aux orientations futures d’Amnesty International. Rejoignez-nous à l’une des rencontres suivantes… et parlons de l’avenir ! e 14 MARS Liège : de 10h00 à 13h00 À l’Espace Beeckman, Rue Beeckman, 26 - 4000 Liège Namur : de 14h00 à 17h00 Sur les hauteurs de la citadelle, Espace Lioba, Avenue Vauban 28 – 5000 Namur 25 MARS Hainaut : de 19h00 à 22h00 A l’École normale, Boulevard Albert-Elisabeth, 2 – 7000 Mons 28 MARS Bruxelles : de 09h30 à 12h30 Au secrétariat d’Amnesty International Belgique francophone, Rue Berckmans 9 – 1060 St-Gilles Luxembourg : de 15h00 à 18h00 À l’Institut St-Michel, Place du Château, 3 - 6840 Neufchâteau INSCRIPTIONS En ligne : http://www.amnestyinternational.be/doc/article14283.html Par e-mail : acaudron@aibf.be Par téléphone : 02 543 79 88

CHARLEROI THÉÂTRE Le groupe 113 de Charleroi et le Théâtre du Vaudeville présentent : «On choisit pas sa famille» de Jean-Christophe Barc. Une soirée au profit d’Amnesty International e Espace Marignan, Bvd Tirou 53, Charleroi, le lundi 30 mars. Adultes 16 e, étudiants 9 e Renseignements : F. Demoilin- 071/413074 (le soir).

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MOUVEMENT

CERCLE PETER BENENSON 16 MARS 2009 – BRUXELLES QU’EST-CE QU’UNE POLITIQUE JUSTE DANS LA MONDIALISATION ? Avec Sami Naïr. Conseiller d’État, député européen et écrivain il enseigne à l’Université de Paris VIII et à l’Université Carlos III de Madrid en tant que professeur invité. Il a notamment publié Un détournement - Nicolas Sarkozy et la «politique de civilisation» (Gallimard, 2008). Conférence organisée dans le cadre du Colloque «Démocraties et violences à l’heure de la globalisation» de l’Université catholique de Louvain. À 18h00 aux auditoires Meysen – UCL / Site universitaire de Woluwe e Entrée : 5 e (prix plein) 2 e (étudiants et demandeurs d’emploi) - réservation souhaitée auprès d’Ingrid Plancqueel au 02/538.81.77 ou cerclebenenson@aibf.be

2 AVRIL 2009 – LIÈGE «EVERY STEP YOU TAKE» PROJECTION DE FILM ET INTERVENTIONS Depuis les attentats du 11 septembre 2001, une frénésie sécuritaire s’abat aux États-Unis et en Europe Occidentale. Au Royaume-Uni, plus de 4 millions de caméras filment quotidiennement les faits et gestes des citoyens anglais. La société de surveillance rend-elle nos vies plus sûres ? Fait-elle baisser le taux de criminalité ou fait-elle, au contraire, de chacun d’entre nous des délinquants potentiels ? Le film a obtenu le Prix du public des Rencontres internationales du documentaire de Montréal en 2007. Débat avec Jean-Louis Berwart (Avocat au Barreau de Liège) et Stefan Verschuere (vice-président de la Commission de la Protection pour la vie privée). e À 20h00 au Cinéma Le Parc – 22, Rue Paul-Joseph Carpay 4020 Liège Entrée : 5,50 e (prix plein) 4,70 e (membre Cercle Peter Benenson si réservation)- réservation souhaitée auprès d’Ingrid Plancqueel au 02 538 81 77 ou cerclebenenson@aibf.be

LES FORMATIONS EN 2009 14 mars de 10h00 à 16h30 Combattre la torture 21 avril de 19h00 à 22h00 Découvrir et s’orienter au sein d’Amnesty 9 mai de 10h00 à 15h00 La responsabilité sociale des entreprises 14 mai de 19h00 à 22h00 Découvrir et s’orienter au sein d’Amnesty 16 mai de 10h00 à 15h00 USA et droits humains 23 mai de 09h30 à 16h30 Mission et fonctionnement d’Amnesty 23 mai de 09h00 à 14h00 Lutte contre l’impunité Pour vous inscrire dès maintenant et/ou obtenir des détails concernant le contenu des modules, rendez-vous sur notre site Internet : http://www.amnesty.be/formations e Pour tout renseignement, n’hésitez pas à nous contacter par e-mail à formations@aibf.be ou par téléphone au 02 538 81 77, de préférence les mardi, jeudi et vendredi.

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IS AV ELIV ES . B E B O N N ES N O UV EL L ES Dans tous les pays du monde, des gens sont libérés grâce au travail des membres d’Amnesty. Des témoignages émouvants nous parviennent des prisonniers libérés ou de leur famille. Ils montrent qu’une action de masse peut avoir des résultats pour un meilleur respect des droits humains.

GUATEMALA MENACES LEVÉES L’anthropologue judiciaire et d’identification Fredy Peccerelli, ses proches et ses collègues ne sont plus face à un danger immédiat lié à de nouvelles menaces de mort reçues le 8 janvier. Ils faisaient l’objet de menaces de mort et d’actes de harcèlement à cause de leur action en faveur des droits humains. Fredy Peccerelli dirige la Fundación de Antropología Forense de Guatemala (FAFG), qui mène des enquêtes basées sur l’exhumation de fosses communes datant de la guerre civile de 1960-1996. Amnesty International continue de suivre l’évolution de leur situation et interviendra de nouveau si nécessaire. e

ÉGYPTE LIBÉRATION D’UN GERMANO-ÉGYPTIEN Le 11 février 2009, Philip Rizk, un ressortissant germano-égyptien, était libéré sans inculpation, après avoir été détenu au secret pendant 4 jours par le Service de renseignement de la Sûreté de l’État (SSI), sans doute à Nasr City, au nord-est du Caire. Menacé à plusieurs reprises de torture, ses yeux étaient bandés et ses poignets menottés en permanence. Il fut interrogé sur sa participation à une manifestation pacifique de solidarité envers la population de Gaza le 6 février, sur son séjour de 2 ans à Gaza entre 2006 et 2008 et sur ses déplacements au Soudan et dans d’autres pays. Une délégation d’Amnesty International qui effectuait une visite au Caire a rencontré Philip Rizk le lendemain de sa libération. e

COLOMBIE OTAGES RELÂCHÉS Le 5 février, le député Sigifredo López était par les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC), était relâché après 7 ans de captivité. Cette libération survenait quelques jours après celle de l’ancien gouverneur Alan Jara. Fin janvier, les FARC avaient également libéré trois policiers et un soldat. Ces dernières libérations ont été facilitées par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), le gouvernement brésilien et la sénatrice colombienne Piedad Córdoba. Ce sont les dernières en date d’une série de libérations qui a débuté l’année dernière. Amnesty International a rappelé à cette occasion que la prise d’otages est une grave violation du droit international humanitaire et peut constituer un crime de guerre. e

INDONÉSIE DÉFENSEUR DISCULPÉ En Indonésie, un éminent avocat défenseur des droits humains a été reconnu non coupable des faits qui lui étaient reprochés, en lien avec un SMS qu’il était accusé d’avoir envoyé à des amis et à des membres de sa famille. Iwanggin Sabar Olif est membre de l’Institut pour la Protection des Droits humains (ELSHAM), une organisation papoue. Il risquait jusqu’à 6 ans d’emprisonnement. Le SMS annonçait que le président indonésien Susilo Bambang Yudhoyono avait ordonné la mise en œuvre, avec l’armée, d’un programme meurtrier visant à «éradiquer» la population papoue par le biais d’empoisonnements et d’autres actions violentes. Iwanggin Sabar Olif a toujours nié avoir écrit, envoyé et même reçu ce message. e

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VENEZUELA

PAS DE JUSTICE POUR LA RESCAPÉE D’UN VIOL

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L

menacé de la tuer elle et ses enfants si elle e 21 mai 2004, Alexandra Hidalgo parlait. Malgré cela, Alexandra Hidalgo est était arrachée de sa voiture par des parvenue à accumuler suffisamment de individus armés dans la capitale vénépreuves sur le téléphone mobile d’Ivan Sosa zuélienne Caracas. Jetée dans une Rivero pour obtenir son arrestation. Accusé fourgonnette, les yeux bandés et emmenée d’enlèvement, de viol et de complicité de vol dans un endroit isolé, elle était violée et de véhicule, il a été placé en détention torturée pendant 7 heures par un groupe pendant plus de 4 mois. Toutefois, il n’a d’hommes, dont l’un fut identifié comme son jamais été traduit devant un tribunal et 14 ancien mari. Vers 11h30, elle fut ensuite audiences ont été reportées par ses avocats. Il ramenée dans le centre de Caracas et abana été libéré sous condition en avril 2005 et a donnée, toujours les yeux bandés, en face de depuis lors disparu sans laisser de traces. Deux l’école de sa fille. Moins de deux mois avant autres assaillants ont été condamnés à 8 ans l’attaque, Alexandra Hidalgo avait divorcé de prison, deux autres hommes ont été d’Ivan Sosa Rivero après 14 ans de mariage, déclarés non coupables et un dernier est pour cause d’abus sexuels, physiques et toujours introuvable. Alexandra Hidalgo vit psychologiques. Ivan Sosa Rivero, un lieutedans la crainte qu’Ivan Sosa Rivero ne s’en nant-colonel de l’armée vénézuélienne, a nié prenne à elle et elle affirme qu’il a été vu à toute implication dans l’enlèvement. Lorsqu’il proximité de son appartement en avril 2008. e a appris qu’Alexandra l’avait reconnu, il aurait Lire aussi sur isavelives.be : http://www.isavelives.be/fr/node/3186

MODÈLE DE LETTRE Monsieur le Ministre, Le 21 mai 2004, Alexandra Hidalgo était violée dans un endroit isolé et torturée pendant 7 heures par un groupe d’hommes. Reconnu, son ancien mari, Ivan Sosa Rivero, un lieutenant-colonel de l’armée vénézuélienne, aurait menacé de la tuer elle et ses enfants. Placé en détention pendant plus de 4 mois et libéré sous condition en avril 2005, il a depuis lors disparu sans laisser de traces. En tant que membre/sympathisant(e) d’Amnesty International, je vous demande, Monsieur le Ministre, de veiller à ce que les auteurs présumés du viol soient traduits en justice, d’assurer la sécurité d’Alexandra Hidalgo et de ses enfants. Je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de ma considération distinguée. Signature : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Nom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

LETTRE À ADRESSER À : Tareck El Aissami, Ministerio del Poder Popular para Relaciones Interiores y Justicia Av. Urdaneta, Esquina Platanal, Edif. Sede MIJ, Piso 1 Carmelitas Caracas Apartado postal 1010 a, Venezuela Fax : +58 (212) 5061685

COPIE À ENVOYER À : Ambassade de la République bolivarienne du Venezuela, Avenue Franklin Roosevelt,10 1050 Bruxelles (Ixelles) Fax : 02 647 88 20 – E-mail : embajada@venezuela-eu.gob.ve

Libertés ! Mars 2009 13


IS AV ELIV ES . B E ARMÉNIE

MODÈLE DE LETTRE

VIOLENCE CONJUGALE ET DISCRIMINATION E

n 1989, alors qu’elle était encore adolescente, Greta Baghdasaryan était violée par un homme qu’elle connaissait depuis trois ans. Découvrant qu’elle était enceinte, l’auteur du viol emmena la jeune fille chez ses parents, dans un village éloigné, afin de garder la grossesse secrète. Ils se marièrent ensuite. Greta Baghdasaryan a fait une faussecouche après que son mari l’ait obligée à marcher longuement sans eau et en la frappant. Les 11 années qui ont suivi, elle a enduré viols, coups et autres mauvais traitements. En 2001, après un dernier violent passage à tabac et une commotion © AI cérébrale, elle a finalement quitté son mari. «Jamais je n’avais imaginé que je pouvais retiré les noms de leurs enfants du registre aller me plaindre à la police.» Gravement de population, ce qui les prive de certains handicapée après 11 ans de sévices, Greta droits civiques. Son avocat actuel estime Baghdasaryan ne peut plus subvenir aux qu’elle ne sera pas en mesure de déposer besoins de ses enfants. Elle et ses enfants une plainte au pénal étant donné que ses n’ont plus accès au domicile conjugal et, dossiers médicaux ne sont pas reconnus depuis son divorce en 2002, son ex-mari a comme preuves valables. e Lire aussi sur isavelives.be : http://www.isavelives.be/fr/node/3187

Monsieur le Premier ministre, De 1989 à 2001, Greta Baghdasaryan a été mariée à un homme qui l’a sans cesse battue et violée. En 2001, après un dernier violent passage à tabac et une commotion cérébrale, elle a finalement quitté son mari. Gravement handicapée après 11 ans de sévices, Greta Baghdasaryan ne peut plus subvenir aux besoins de ses enfants. Elle et ses enfants n’ont plus accès au domicile conjugal et, depuis son divorce en 2002, son ex-mari a retiré les noms de leurs enfants du registre de population, ce qui les prive de certains droits civiques. En tant que membre/sympathisant(e) d’Amnesty International, je vous exhorte, Monsieur le Premier ministre, de veiller à ce que Greta Baghdasaryan obtienne réparation via une indemnisation financière, un accompagnement psychosocial et une rééducation. Je vous demande également qu’elle obtienne un logement adéquat et que son fils soit rétabli dans ses droits. Je vous prie d’agréer, Monsieur le Premier ministre, l’expression de ma plus haute considération. Signature : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Nom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

LETTRE À ADRESSER À : Monsieur le Premier ministre Tigran Sargsyan Siège du gouvernement 1 Place de la République, Erevan 0010, Arménie Salutation

COPIE À ENVOYER À : Ambassade de la République d’Arménie, Rue Montoyer,28 1000 Bruxelles Fax : 02 348 44 01 – E-mail : armembel@skynet.be

COMMENT AGIR EFFICACEMENT ?

TARIFS POSTAUX

Les cas exposés concernent des victimes de violations des droits humains dont s’occupe Amnesty International. Chaque appel compte. Un texte (à écrire ou à photocopier) vous est proposé pour chaque cas. Dans l’intérêt des victimes, écrivez en termes mesurés et courtois aux adresses indiquées. Ces lignes sont lues partout dans le monde par les quelque 1800000 membres d'Amnesty International. Elles sont reproduites dans de nombreux pays par des dizaines de journaux et constituent la clé de voûte de l'action du mouvement.

Lettres (jusqu’à 50 grammes) Belgique: 0,59e; Europe: 0,90e; reste du monde: 1,05e. La surtaxe aérienne est incluse (étiquette requise).

HAÏTI

CARNAVAL ET VIOLENCES SEXUELLES L

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et l’unité de police en charge de la proteca violence sexuelle est largement tion des mineurs est en sous-effectifs : en répandue en Haïti. Plus de la moitié mars 2008, l’unité ne disposait que de des plaintes pour viol au cours des 12 officiers pour couvrir l’ensemble du quatre dernières années concernent des pays. Les conséquences sanitaires de la jeunes filles de 18 ans ou moins et l’on violence sexuelle sont profondes et duraobserve un «pic» lors de la période du bles : blessures physiques, grossesses non carnaval. En février 2007, par exemple, désirées, maladies sexuellement transmis50 cas de viol de femmes et de jeunes filles sibles (dont le VIH) et problèmes de santé ont été signalés en seulement 3 jours à mentale. Tout cela peut avoir des conséPort-au-Prince. Selon un schéma éprouvé, quences sociales graves sur les filles, des bandes armées isolent les femmes et les l’exclusion permanente de l’école, la discrifilles hors de la foule et les violent ensuite mination, etc. Cela peut ancrer davantage sous la menace. Les autorités ont certes discrimination fondée sur le sexe et la adopté en 2005 un «Plan national de lutte pauvreté parmi les femmes et les filles. contre la violence contre les femmes 2006Certes Haïti tente de répondre au défi de 2011». Si les mesures qu’il prévoit étaient l’insécurité. Mais, il ne peut y avoir de sécuréellement appliquées, elles pourraient rité si une grande partie de la population apporter des améliorations significatives en est exclue et si les violences sexuelles matière de prévention et de répression. contre les filles restent ignorées. e Or, le système judiciaire reste défaillant Lire aussi sur isavelives.be : http://www.isavelives.be/fr/node/3188

14 Libertés ! Mars 2009

MODÈLE DE LETTRE Madame le Premier ministre, Je vous écris pour vous faire part de mes plus vives préoccupations quant au niveau atteint par les violences sexuelles dont sont victimes les filles en Haïti, en particulier durant la période du carnaval. Chaque année, rien que dans la capitale Port-au-Prince, des dizaines de jeunes filles sont violées par des groupes de jeunes gens armés. En tant que membre/sympathisant(e) d’Amnesty International, je vous demande qu’avec le soutien de votre gouvernement et celui de la communauté internationale, toutes les mesures nécessaires soient prises pour prévenir ces viols et garantir le droit de ces jeunes filles à échapper à la violence. J’exhorte également les autres membres du gouvernement haïtien à s’assurer que les auteurs de ces viols soient traduits en justice et que les victimes reçoivent soutien et réparation. Je vous prie d’agréer, Madame le Premier ministre, l’expression de ma considération distinguée. Signature : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Nom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

LETTRE À ADRESSER À : Son Excellence Madame Michèle Pierre-Louis La Primature Route de Bourdon, Impasse Prosper, 1, (Villa d’Accueil) Port-au-Prince, Haïti (W.I.)

COPIE À ENVOYER À : Ambassade de la République d’Haïti, Chaussée de Charleroi, 139 1060 – Bruxelles (Saint-Gilles) Fax : 02 640 60 80 – E-mail : ambassade@amb-haiti.be


C U LT U R E AGENDA THÉÂTRE AU POCHE FEBAR Ils viennent de tous les coins d’Afrique. Ils ont tout sacrifié pour partir, ont parcouru très souvent des distances énormes dans des conditions extrêmes pour rejoindre Elinkine, le point d’embarquement. Certains n’ont jamais vu la mer et la découvrent avec stupeur voire effroi... Ils ont tous la fièvre, cette fièvre du voyage vers un ailleurs où tout semble possible. Cette fièvre les transforme totalement. Ils deviennent méconnaissables. Le clandestin est un homme transformé. Il est dans un état second. Il a «la fièvre». Febar, basé sur des faits réels, est un long voyage du désir qui débute comme un rêve pour se terminer en cauchemar... Avec Febar, Younous Diallo, Michael De Cock, Michel Bernard se plongent dans l’univers du désir de partir. Fruit de rencontres et d’interviews, ce spectacle explore la question de l’émigration clandestine du point de vue sénégalais... Michel Bernard, le metteur en scène, explique quel a été le point de départ de l’aventure Febar. «Notre point de départ a été de laisser le désir de partir s’entendre. Un désir légitime à écouter. Ne pas le prendre de notre point de vue d’Européen mais faire exister l’incroyable espoir du lendemain. Non pas une loterie hasardeuse, mais une conviction de réaliser un devenir. C’est cela le désir, faire en sorte que cela puisse se concrétiser. L’Europe n’est certes pas le paradis et son rêve peut être un cauchemar, mais de sentir la pulsion, cette «chose» incroyable qui pousse l’être humain à affronter la mort au nom de son désir, de son espoir, de son espérance, de son devenir... Il faut oser écouter à nos oreilles sourdes le chant de ce désir. Il nous confronte également à notre indifférence, à notre compassion servile, humanitaire, ou à un racisme primaire... Le spectacle se passe juste là, dans le voyage. Estil arrivé ? Arrivera-t-il ? Qu’importe. Écoutons simplement la température de ses désirs, de ses craintes, de ses peurs, de son imaginaire.» Une production ‘t Arsenaal (Malines) en collaboration avec le Théâtre de Poche (Bruxelles) et Fotti (Sénégal). Avec le soutien de ccBE, du Festival Moussem, des Francophonies de Limoges, du CGRI et d’Africalia. e Du 11 au 28 mars 2009 à 20h30 (relâche les dimanches et lundis). Bois de la Cambre, 1A Chemin du Gymnase 1000 Bruxelles – Réservations : 02 649 17 27 ou reservation@poche.be

REVERS DE MANCHE

L

’errance des sans-papiers hante les consciences et le cinéma européens. Ce qui se passe à Calais est difficilement acceptable. Des hommes, jeunes, sont prêts à tout pour traverser la Manche vers l’Eldorado britannique. Les autorités font tout pour éviter les contacts entre la population locale et les clandestins. Toute aide individuelle à ces hommes privés de tout est assimilée à un délit. Et aucune solution politique ne semble être en vue. Comme si on attendait que le problème se résolve de lui-même. Autour de beaux personnages, Philippe Lioret tisse la trame d’une fiction crédible, sans effets appuyés. Simon, un maître-nageur en pleine déroute sentimentale, décide d’aider un jeune clandestin irakien qui cherche à traverser la Manche à la nage pour rejoindre sa petite amie. Et voilà ce citoyen ordinaire pris dans l’engrenage de ses propres actes. Lui qui regardait à peine ces furtives silhouettes agglutinées près du port prend soudainement conscience des sacrifices qu’ils ont endurés pour accomplir un périple de plus de 4 000 km et goûte au sort que les autorités françaises réservent aux illégaux et à tous ceux qui leur tendent la main. Jamais parasité par les sentiments, les bavardages et les actions inutiles, le film se révèle prenant sans jamais se poser en donneur de leçons. Vincent Lindon campe un Simon, physique, rugueux et généreux, au diapason d’une distribution tout entière au service du récit. e Gilles Bechet Welcome, Philippe Lioret, sortie nationale le 25 mars

20 X 2 places sont offertes aux membres d’Amnesty et lecteurs de Libertés! Ces places sont valables dans tous les cinémas de Wallonie et de Bruxelles projetant Welcome, sur simple présentation d’un carton d’invitation. Pour obtenir ce dernier, il suffit d’envoyer un courriel à libertes@aibf.be avec la mention «Places Welcome Lioret».

SOUVENIRS DE FABRIQUE

à

Chengdu, l’Usine 420, autrefois fleuron de l’industrie militaire chinoise, a fermé après un lent déclin. Rachetés par un promoteur immobilier, les terrains vont faire place à un complexe d’appartements de luxe. La Chine évolue et son socialisme avec. Le cinéaste Jia Zhang Ke dresse un bilan nuancé de cette évolution au travers des témoignages de trois générations. Les anciens ouvriers, même pas amers, ont tiré un trait sur un passé magnifié par la fierté patriotique, l’esprit de camaraderie et l’amour du travail. Quand l’usine a dû faire face à ses premières pertes de commande, les licenciements ont suivi sans états d’âme. Et sans indemnités, bien sûr. Un boulot de vendeuse de rue à la sauvette ne remplace pas un salaire d’ouvrier. Glissant d’une génération à l’autre, le cinéaste passe subtilement du documentaire à la fiction avec quatre beaux personnages féminins qui prolongent dans le présent les premiers témoignages. La meilleure manière, selon lui, de faire l’écho à une histoire simultanément construite par les faits et par l’imagination. Fleur de printemps, jadis la plus jolie fille de l’usine, avait tous les hommes à ses pieds. À 35 ans, elle est toujours célibataire et ne s’en porte pas plus mal. Su Na, fille d’ouvriers est une self made woman qui gagne bien sa vie. Elle ne rêve que d’une chose : fournir à ses parents lessivés par une vie consacrée au travail un appartement dans la Cité 24. Un rêve succède à un autre, avec presque le même aveuglement. Ce qui ne veut pas dire que rien n’a changé. e G.B. Cité 24, de Jia Zhang Ke, sortie Nationale le 25 mars

LE CHEMIN DE LA RÉUSSITE

E

n Inde, plus qu’ailleurs, coexistent la richesse la plus insolente et la misère la plus crasse. C’est aussi un pays qui aime se présenter comme la plus grande démocratie du monde. Le jeune auteur Aravind Adiga joue plutôt de la comparaison avec la cage à poules, qui, assure-t-il, n’a pu être inventée que dans son pays où une poignée d’hommes a entraîné les 99,9 % restants à vivre dans une servitude perpétuelle. Avec son premier roman, couronné par le prestigieux Booker Price britannique, il se glisse dans les pas d’un jeune garçon quittant les Ténèbres pour la Lumière, c’est-à-dire son Bihar natal miséreux et corrompu pour le Delhi, tout aussi corrompu, des villas sécurisées et des gratte-ciels. Intelligent et débrouillard, le jeune homme tourne le dos à la fatalité pour devenir chef d’entreprise. Un succès qu’il veut faire partager à Wen Jiabao, Premier ministre chinois en visite dans son pays. Dans une longue lettre qu’il écrit à ce haut dirigeant d’une nation éprise de liberté, le jeune entrepreneur se propose de révéler la vérité sur la miracle indien. Dans cette fable amorale à l’ironie mordante, l’auteur égratigne joyeusement les tabous qui minent le sous-continent. Aussi volontaire qu’une mauvaise herbe, le succès pousse sur le terreau de la corruption, du clientélisme politique et de la ségrégation sociale. Belle leçon de botanique. e G.B. Le Tigre blanc, Aravind Adiga, Buchet Castel, 320 p, 22 e

Libertés ! Mars 2009 15



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