Ne paraît pas aux mois de juillet-août. 9, rue Berckmans 1060 Bruxelles
DÉPOT À BRUXELLES X
Libertes!
BELGIQUEBELGIE PP 1/2345 BXL X
DÉCEMBRE 2009 – N°459 – LE MENSUEL D’AMNESTY INTERNATIONAL
FAIRE LE BILAN DE 2009
HAÏTI ENFANCE BAFOUÉE
AMÉRIQUE CENTRALE EL MACHISMO MATA
É D ITO R I A L
JUSTICE POUR LES LIBANAIS V
oici vingt ans, en novembre 1989, les différentes milices et factions libanaises signaient en Arabie saoudite les Accords de Taëf. Conclus sous le haut patronage d’une Syrie dont l’armée contrôlait 80% du territoire libanais, ces accords étaient censés mettre un point final à un entrelacs de guerres civiles et d’interventions syriennes et israéliennes qui, depuis 1975, saignaient à blanc ce pays trois fois plus petit que la Belgique. Qu’on en juge : les bilans les plus raisonnables de la déferlante de feu qui s’est abattue sur le Liban font état de 150 000 morts, un million de blessés et 17 000 disparus. Or, les autorités libanaises n’ont pris quasiment aucune mesure réelle pour que la vérité soit établie et pour que justice soit rendue aux victimes. Au contraire, les gouvernements libanais qui se sont succédé depuis vingt ans n’ont fait que renforcer l’impunité en adoptant des lois d’amnistie en faveur des auteurs d’atteintes aux droits humains commises par le passé. La Loi d’Amnistie générale n°84/91 du 26 août 1991 accorde… l’amnistie générale, à quelques exceptions près, pour les crimes
commis avant le 28 mars 1991. Ce climat d’impunité est aggravé par le fait que ni l’État d’Israël ni la République syrienne n’ont jamais mené d’enquêtes sérieuses sur les crimes imputés à leurs forces armées, tandis que la «communauté internationale» n’a jamais manifesté le moindre intérêt pour l’ouverture d’enquêtes au niveau international. En 2009, de trop nombreux citoyens libanais et réfugiés palestiniens en sont encore à se morfondre en interrogations morbides quant au sort de ces milliers de proches enlevés pendant la guerre civile. Le 25 novembre, après que des tests ADN eurent identifié dans la plaine de la Bekaa la dépouille d’un journaliste britannique, Alec Collett, enlevé à Beyrouth en 1985, Amnesty International a lancé un appel aux autorités libanaises pour qu’elles prennent enfin les mesures nécessaires pour élucider les disparitions. Or, le Liban n’a toujours pas établi de banque de données contenant des échantillons ADN de proches des personnes disparues, banque de données que réclament depuis plus de dix ans les associations de familles de victimes de la guerre civile. De même, les autorités libanaises n’ont jamais procédé à des exhumations systématiques sur les sites utilisés comme fosses communes pendant le conflit, même lorsqu’elles en ont officiellement reconnu l’existence. Fragile et constamment menacé de paralysie par l’opposition entre ses composantes «prosyriennes» et «antisyriennes», le gouvernement formé le 9 novembre dernier par le Premier ministre Saad Hariri ne devrait sans doute pas changer la donne. e Pascal Fenaux
Libertés ! • Rue Berckmans, 9 – 1060 Bruxelles • Tél : 02 538 81 77 Fax : 02 537 37 29 • libertes@aibf.be • www.libertes.be • Éditrice responsable : Christine Bika • Rédacteur en chef : Pascal Fenaux • Comité de rédaction : Bruno Brioni, Thandiwe Cattier, Véronique Druant, Samuel Grumiau, Anne Lowyck, Brian May, Suzanne Welles • Ont collaboré à ce numéro : Gilles Bechet, Françoise Guillitte, Céline Remy (st.) et Cédric Vallet • Iconographie : Brian May • Maquette: RIF • Mise en page: Gherthrude Schiffon • Impression (sur papier recyclé non blanchi) : Remy Roto • Couverture: Bruxelles, un 10 décembre. © Bruno Brioni
CHANGEMENT D’ADRESSE – ATTESTATION FISCALE – MODIFICATION, ANNULATION OU NOUVELLE COTISATION DE MEMBRE/DONATEUR(TRICE) Madame Michele Ligot : mligot@aibf.be je change d’adresse (inscrire uniquement la nouvelle adresse) Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Prénom: . . . . . . . . . . N° de membre: . . . . . . . Adresse: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . N° . . . . . bte . . . . . . . . . . Code postal: . . . . . Localité: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Tél (obligatoire): . . . . . . . . . . . . . . . E-mail: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Oui, j'adhère aux objectifs d'Amnesty et souhaite devenir membre Je répartis le montant de : ma cotisation de mon abonnement sur toute l’année en complétant ce coupon et en le renvoyant à Amnesty International, 9 rue Berckmans à 1060 Bruxelles. Tout montant qui dépassera 14,87 e (prix de la cotisation ou de l'abonnement), sera considéré comme un «don», et par là-même jouira de la déductibilité fiscale pour autant que ce supplément soit de 30 e ou plus. Je verse tous les mois, au départ de mon compte n° . . . . . . . . . . – . . . . . . . . . . . . . . la somme de : 6e 10 e 20 e . . . . . . . . e (ou tout autre montant de mon choix) au profit du compte 001-2000070-06 de Amnesty International à partir du . . . . . . . . . . et jusqu’à nouvel ordre. Je conserve le droit d’annuler ou de modifier cet ordre à tout moment. ou je verse en une fois le mandat de . . . . . . . . . . . . . . au compte 001-2000070-06 Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prénom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Date de naissance: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . N° . . . . . . . . bte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Code postal: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Localité: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Tél (obligatoire): . . . . . . . . . . . . . . . . E-mail: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Profession: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Date: . . . . . . . . Signature:
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SOMMAIRE ACTUEL
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DOSSIER
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■ Haïti : Droits piétinés, jeunesse violée ■ Égypte : Sous les remblais, la rage ■ Insolites-Brèves
FAIRE LE BILAN DE 2009 ■ 2009, année contrastée ■ Asile : Des droits toujours bafoués ■ Dignes citoyens du monde ■ Clics de survie ■ Les membres se ramassent à l’appel ■ Les bons comptes font les bons amis
MOUVEMENT
■ Féminicides : El machismo mata ■ Violences contre les femmes : Plans d’action
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ou pans d’action ? ■ 10 décembre : Tous à Flagey !
ISAVELIVES.BE
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CULTURE/AGENDA
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■ Lettres du mois : Mexique, Maroc et Tchétchénie ■ Bonnes nouvelles
■ Amour interdit ■ Paroles sur quatre roues ■ Comment on fabrique un assassin
ACTU EL SAHARA OCCIDENTAL DÉFENSEUSE EXPULSÉE Aminatou Haidar, présidente du Collectif des Défenseurs sahraouis des Droits de l’Homme, a été interpellée à son arrivée à l’aéroport de Laâyoune le 13 novembre 2009. Elle revenait d’un séjour d’un mois à l’étranger, au cours duquel un prestigieux prix des droits humains lui avait été décerné aux États-Unis. Les fonctionnaires se sont montrés irrités qu’elle inscrive sur sa carte de débarquement «Sahara occidental» comme lieu de résidence au lieu de «Sahara marocain». Le lendemain, après l’avoir dépouillée de ses papiers d’identité, les autorités ont déclaré qu’elle serait libérée si elle acceptait de reconnaître publiquement la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental. Elle a refusé et, quelques heures plus tard, les responsables de la sécurité l’ont fait monter dans un vol à destination de Lanzarote, dans les Îles Canaries et l’ont expulsée du Sahara occidental. e
SINGAPOUR LIBERTÉ DE PRESSE MENACÉE Le 18 novembre 2009, la Far Eastern Economic Review (FEER), rattachée au groupe Dow Jones, et son rédacteur en chef Hugo Restall ont accepté de payer l’amende de 195 600 euros à laquelle les a condamnés la Cour d’Appel de Singapour pour diffamation présumée. Ce magazine réputé avait publié un article accusant de corruption le Premier ministre, Lee Hsien Loong, et son père, Lee Kuan Yew, ancien Premier ministre. La Cour d’Appel estime que «la liberté d’expression garantie par la Constitution à Singapour est conférée aux seuls citoyens singapouriens» et que Singapour ne reconnaît pas à la presse de fonction particulière de «gendarme». Amnesty International a demandé au Parlement singapourien d’adopter une nouvelle loi pour protéger la liberté d’expression. e
AUSTRALIE DISCRIMINATION RACIALE En 2007, le gouvernement australien avait lancé une action dans les communautés aborigènes du Territoire du Nord. Afin de promulguer les dispositions relatives à l’action d’urgence dans ce territoire, il y avait suspendu la Loi sur la discrimination raciale et la législation contre la discrimination. Amnesty vient de s’insurger officiellement du fait que, deux ans après l’arrivée du nouveau gouvernement, plus de 45000 Aborigènes font toujours l’objet de mesures de discrimination raciale (notamment la mise en quarantaine obligatoire et générale des prestations de sécurité sociale dans 73 communautés). e
SUISSE DISCRIMINATION RELIGIEUSE Lors d’une votation (consultation populaire) organisée le 29 novembre, les électeurs de la Confédération suisse ont décidé d’intégrer dans la Constitution fédérale l’interdiction d’ériger des minarets. Pour Amnesty, cette interdiction, dont l’entrée en vigueur est immédiate, viole la liberté de religion des musulmans qui vivent dans le pays et l’obligation d’interdire toute forme de discrimination religieuse, obligation énoncée dans plusieurs pactes internationaux dont la Suisse est signataire. e
Une fillette, près de Cayes Jacmel, dans le sud-est d’Haïti. © AI
HAÏTI
DROITS PIÉTINÉS, JEUNESSE VIOLÉE Près de 100000 filles âgées de 6 à 17 ans travailleraient comme employées de maison en Haïti. Coupées du monde extérieur, loin de leurs proches et de leur familles, ces jeunes domestiques sont soumises à des violences physiques et sexuelles. En regard d’une vulnérabilité évidente, les demandes de protection relatives aux droits de l’enfant restent hélas lettre morte.
E
nlisé en plein marasme politique et économique, Haïti reste par ailleurs le théâtre d’actes de violence particulièrement sanglants à l’encontre des populations civiles. Face aux révoltes et aux émeutes sévèrement réprimées par les forces de l’ordre, le sort réservé aux employées de maison est tout aussi préoccupant. Selon les estimations de l’Unicef, cette petite république des Antilles compterait plus de 100 000 filles employées comme domestiques. Mineures pour la plupart d’entre elles et issues de milieux défavorisés, ces jeunes filles n’ont d’autre choix que de travailler comme employées de maison. En Haïti, ces mineures domestiques sont généralement appelées restaveks (terme créole qui vient du français «reste avec»), une appellation négative et méprisante car elle sous-entend un rejet pur et simple de leur propre famille. Ces enfants vivent avec leur employeur ou leur famille d’accueil – parfois des proches – et effectuent des tâches domestiques en échange de l’hébergement et du repas. La grande majorité de ces employées de maison sont privées de leurs droits, notamment leurs droits à l’éducation, à des soins de santé adaptés et à une alimentation suffisante.
S’ajoute à cela un véritable fléau : les violences sexuelles infligées aux femmes et aux jeunes filles, une calamité malheureusement omniprésente en Haïti et qui vise tout particulièrement les mineures. Dans plus de la moitié des viols signalés, les victimes n’ont pas plus de 18 ans.
ESCLAVAGE MODERNE ET ABUS SEXUELS Des «recruteurs» à la recherche d’enfants issus de familles nombreuses et vivant dans la pauvreté persuadent les chefs de famille de leur confier les enfants en leur promettant un avenir meilleur pour leur progéniture. Ces enfants sont donc victimes de la traite dans leur propre pays et sont exposées à toutes les formes possibles d’exploitation, y compris les abus sexuels. Cité dans un rapport de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur l’exploitation des mineures à des fins mercantiles, le témoignage de Loransya est exemplaire et édifiant. Agée de huit ans, Loransya vivait dans le village de Kenscoff, à une vingtaine de kilomètres de la capitale, Port-au-Prince. Ses parents étant trop pauvres pour assurer les besoins de la famille, Loransya été obligée d’aller travailler en tant que domestique à Carrefour, un quartier de la capitale.
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ACTU EL «Il y avait un gros bonhomme, le frère du premier mari de la dame. Il dormait dans une pièce dans la cour, à côté de la cuisine où, moimême, je dormais avec le charbon, les fatras et les rats. Un soir, il a frappé à la porte de la cuisine et m’a demandé de lui chauffer de la nourriture. J’ai dû me lever et allumer le feu. C’est à ce moment qu’il m’a demandé de lui sucer le pénis, en me disant qu’il me donnerait une belle poupée. Mon cœur a battu fort car j’avais très envie de cette poupée que je voyais parfois en allant au marché. Je l’ai fait mais la poupée n’est jamais venue. J’avais tellement envie de cette poupée que je l’ai fait avec d’autres [...], mais la poupée n’est jamais venue.» Les données recueillies par des ONG donnent une certaine idée de l’étendue du problème. Par exemple, l’association Solidarité des femmes haïtiennes ou Solidarité Fanm Ayisyèn (SOFA) a recueilli des informations sur 238 viols commis entre janvier 2007 et juin 2008, dont 140 contre des filles âgées de 19 mois à 18 ans.
FLOU JURIDIQUE ET PLAN D’ACTION BANCAL Si les violences sexuelles et physiques à l’encontre des employées de maison sont une évidence, la garantie d’une protection efficace par les autorités publiques est pourtant des plus aléatoires. Au cours de l’année 2007, Haïti a certes ratifié la Convention n°182 de l’OIT, un texte d’une grande importance car il souligne la nécessité de lutter contre les pires formes de travail des enfants. L’interdiction visait notamment le travail domestique et le risque d’exposition des filles à des violences physiques, au harcèlement sexuel et à d’autres formes d’exploitation. Pourtant, cette ratification n’a donné lieu a aucune assistance pour les mineurs employés de
maison et en particulier les filles, contre les atteintes physiques et sexuelles. Il y a de quoi être préoccupé par l’absence d’une justice compétente pour faire respecter les droits de l’enfant. Malgré la mise sur pied, en 2007, d’un Plan national pour la Protection des enfants vulnérables, les institutions haïtiennes semblent avoir égaré leur feuille de route car aucune action véritable n’a été posée pour y remédier. Effectuant de longues journées de travail, les mineures domestiques accomplissent essentiellement des tâches ménagères : elles font notamment le ménage et la cuisine, vont chercher de l’eau pour toute la famille et s’occupent des autres enfants de la maison. Certaines travaillent également sur les marchés. En contrepartie de leur travail, elles sont logées, nourries et habillées. Seule une minorité bénéficie de quelques rudiments d’éducation. À la suite de sa visite en Haïti en juin 2009, Gulnara Shahinian, la Rapporteuse spéciale des Nations unies sur les formes contemporaines d’esclavage, a qualifié les conditions dans lesquelles vivent les mineures employées de maison en Haïti de «forme moderne d’esclavage». Aujourd’hui, ce sont plus de 80% de la population qui vivent en dessous du seuil de pauvreté. Après une succession de coups d’État et de guerres civiles d’une extrême violence, Haïti a connu cinq gouvernements différents sur les seules cinq dernières années. Si la Journée mondiale des Droits de l’Enfant a été célébrée le 20 novembre dernier, des résultats concrets et convaincants se font toujours attendre au cœur d’une île que l’on surnommait jadis la «Perle des Antilles». e Thandiwe Cattier
L’INSOLITE EAU DE POLOGNE Miracle ! Une hostie consacrée s’est transformée en un morceau de cœur en Pologne. Tombé à terre au cours de la communion, le pain azyme avait été placé dans un récipient avec de l’eau bénite. Le lendemain, l’eau était devenue rouge et renfermait un fragment de tissu humain, rapporte le site de Polskie Radio. Deux professeurs de la faculté de médecine de Białystok, au nord-ouest du pays, ont confirmé l’étonnant phénomène, survenu voilà près d’un an dans l’église du village de Sokółka. Le biologiste Pawel Grzesiowski, lui, ne mange pas de ce pain-là : à ses dires, il ne s’agit là que de l’œuvre d’une bactérie, Serratia marcescens, qui se nourrit d’amidon et de glucose, et forme une substance rose et gluante. La Société rationaliste de Pologne, qui avait quant à elle demandé une enquête pour suspicion de meurtre, a été déboutée. e (D’après Courrier international)
FOCUS ÉGYPTE
SOUS LES REMBLAIS, LA RAGE À la suite des éboulements mortels qui ont endeuillé le bidonville cairote de Duwayqa en septembre 2008, les autorités égyptiennes ont recensé dans la capitale 26 «secteurs dangereux». À Duwayqa, les habitants vivent dans la crainte de nouveaux éboulements et n’ont pas les moyens d’emménager dans un endroit moins dangereux, tandis que les autorités ne leur proposent aucune solution viable de relogement et que, dans certains cas, elles ont en outre procédé à l’expulsion forcée d’habitants sans les en avoir avertis suffisamment tôt et sans les avoir consultés au sujet de leur réinstallation. Amnesty vient de publier un rapport à ce sujet et a lancé un appel à l’action.
L
e 17 novembre, Amnesty International rendait public un rapport sur les atteintes aux droits économiques, sociaux et culturels des habitants du bidonville de Duwayqa, dans le quartier cairote de Manshiyet Nasser. Intitulé Egypt : Buried Alive. Trapped by Poverty and Neglect in Cairo’s Informal Settlements (Index AI : MDE 12/009/2009), ce rapport critique les autorités égyptiennes pour n’avoir pas pris de mesures efficaces pour protéger les habitants de Duwayqa contre les éboulements mortels du 6 septembre 2008. Alors que les risques d’éboulements étaient bien connus avant la catastrophe de 2008, le gouvernement n’avait pas évacué la population des zones dangereuses. Selon les pouvoirs publics, l’éboulement qui a touché Duwayqa l’année dernière a fait 107 morts et 58 blessés, mais des survivants ont indiqué que le nombre de victimes était beaucoup plus élevé et que des membres de leur famille n’avaient toujours pas été retrouvés. Une enquête a été ouverte par les autorités sur ce drame, mais on n’en connaît toujours pas les résultats. Pendant ce temps, de nombreux habitants de Duwayqa et d’autres «secteurs dangereux» vivant sur des flancs de colline peu sûrs ou sous des lignes à haute tension vivent toujours dans la peur car ils n’ont nulle part où aller. Ils sont privés de la possibilité de faire entendre leur voix et ceux qui sont au pouvoir ne
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Des habitants cherchent des survivants dans les décombres du bidonville de Duwayqa. Le Caire, 6 septembre 2008. © AP/PA Photo/Ben Curtis se préoccupent pas de leur situation.», Pour Amnesty International, les autorités égyptiennes doivent enquêter sérieusement sur les causes de la catastrophe de Duwayqa et prendre les mesures nécessaires pour que cette tragédie ne se reproduise pas. Or, on est loin du compte. Après le terrible éboulement de septembre 2008, les autorités égyptiennes ont certes rapidement pris des mesures pour repérer les autres zones dangereuses dans les environs, mais elles ont démoli plus d’un millier d’habitations menacées et, en l’espace d’un mois, relogé plus de 1750 familles sans leur reconnaître aucun droit sur leur nouveau logement, ce qui les expose au risque d’une future expulsion. D’autres familles se sont retrouvées à la rue et des femmes divorcées ou vivant séparées de leur mari ont subi une discrimination en ce qui concerne l’attribution d’un logement. Enfin, certaines familles ont été expulsées de force de Duwayqa et d’autres d’Establ Antar, un quartier informel du sud du Caire. Ces expulsions ont pour la plupart été menées sans que soient respectées les garanties de procédure prévues par le droit international relatif aux droits humains, et souvent avec un court préavis et avec l’appui des forces de sécurité. Cette situation est d’autant plus intolérable qu’elle prévaut dans d’autres quartiers informels et paupérisés de la mégapole du Caire. e P.F. POUR AGIR : http://www.amnesty.org/fr/appeals-for-action/call-governor-cairo-protectresidents-unsafe-areas
DOSSIER
FAIRE LE BILAN DE 2009 Dans les pages qui suivent, vous découvrirez les «bonnes feuilles» du Bilan 2009 d’Amnesty International Belgique francophone (AIBF), c’est-à-dire de ses permanents, de ses militants, de ses groupes locaux et de ses coordinations. L’année 2009 a été riche en évènements, bonnes nouvelles, déceptions, découragements mais aussi colères salvatrices. Si les nouvelles sont relativement bonnes sur le terrain de la lutte contre la peine de mort, avec un nombre toujours croissant de pays abolissant de facto ou de jure la peine capitale, des États comme l’Arabie saoudite, la Chine, l’Irak et l’Iran persistent et signent dans leur politique répressive en s’en prenant en outre particulièrement aux mineurs d’âge. Mauvaises nouvelles également, les «reprises en main» particulièrement musclées opérées par les autorités d’États liberticides comme l’Iran (scrutin douteux de juin 2009) ou la vente inconsidérée d’armes wallonnes à la Libye. Mais, heureusement, d’excellentes nouvelles sont venues apporter une éclaircie dans un ciel plombé. Au premier rang desquelles la protection accordée par les autorités brésiliennes aux défenseurs Vinícius George et Marcelo Freixo, pour lesquels Amnesty avait sonné le branle-bas de combat et qui ont pu venir défendre leur cause à Bruxelles. Pour celles et ceux qui voudraient découvrir le Bilan dans son intégralité, ce document est téléchargeable sur le site d’AIBF (voir ci-après).
À la Maison-Blanche, deux jours après son investiture, le président américain Barack Obama pose son premier acte politique d’envergure en signant le décret qui ordonne la fermeture du complexe pénitentiaire de Guantánamo. Washington, 22 janvier 2009. © AP/Charles Dharapak
2009, ANNÉE CONTRASTÉE Répression en Iran, régressions en Russie, Obama président, l’année 2009 a été marquée par des évènements majeurs qui ont nécessité une vigilance de tous les instants de la part d’Amnesty International. Petit retour en arrière, avec Philippe Hensmans, sur cette année en demi-teinte où la violence n’a pas empêché à l’espoir de se faire une place.
P
our Amnesty International, 2009 n’a pas été une année anodine. La vie du mouvement a été marquée par le lancement de la campagne «Exigeons la Dignité». Cette campagne, qui rappelle avec force que les droits humains sont indivisibles, sera au coeur du dispositif d’Amnesty au moins jusqu’en 2015. Comme chaque année, les motifs de mobilisation ont été nombreux, mais les raisons d’espérer existent, donnant du sens à notre action. Justice internationale, campagne «Exigeons la Dignité», sont quelques exemples du rapide tour d’horizon, forcément non exhaustif, que nous offre Philippe Hensmans - directeur de la section belge francophone d’Amnesty International - sur ces moments clés où les droits humains ont toujours été au coeur des préoccupations du mouvement.
OBAMA, GARE AUX ESPOIRS DÉÇUS Après la torture et les violations des droits humains massives perpétrées pendant les années Bush, le monde soufflait un peu en apprenant l’élection de Barack Obama, même si Philippe Hensmans tient à relativiser cet engouement : «une organisation comme Amnesty existe depuis assez longtemps pour éviter de croire qu’avec un homme tout va soudainement changer». Si cette attitude évite bien des désillusions, Amnesty International a tout de même suivi de près et encouragé les changements d’orientation menés par l’administration Obama : des actions ont été menées dès janvier 2009 pour la fermeture de Guantanamo. Le directeur d’AIBF dresse pour nous l’inventaire des mesures annoncées ou prises au cours de l’année, insistant sur la distinction entre l’effet d’annonce et la réalité : «certes, nous avons accueilli avec
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DOSSIER k Pour aller remplir d’eau son bidon, un enfant marche sur l’énorme aqueduc qui traverse Dharavi, le plus grand bidonville d’Inde (600000 habitants sur 1,75 km2). Mumbai (Bombay), novembre 2008. © PANOS/Mark Henley
enthousiasme le fait qu’une des premières annonces du Président Obama concernait la fermeture de Guantanamo, mais dans les faits, cette fermeture prend beaucoup de temps. Nous avons aussi apprécié le fait que la nouvelle administration fasse des efforts pour reconnaître les actes de torture, mais nous pensons qu’il faut aller plus loin, pour l’instant, seuls des “sous-fifres” sont accusés.» Autre point négatif, Bagram, prison américaine en Afghanistan : «nous essayons d’agir pour que ce lieu de détention ne devienne pas un nouveau Guantanamo. Le problème de Bagram cache par ailleurs un enjeu plus vaste, celui des centres de détention secrets des États-Unis. On estime qu’il y en aurait 150 à travers le monde, mais le silence règne sur cette question. Enfin, le fameux Patriot Act qu’avait fait adopter la précédente administration et qui
empiète largement sur les libertés individuelles, a été reconduit discrètement, sans discussion, par le nouveau président.» Certes, le directeur d’AIBF l’admet, Barack Obama a hérité d’une situation difficile et, même armé de la meilleure volonté du monde, changer de cap sera long et complexe, car la «guerre contre le terrorisme» a laissé des traces vives dans de nombreuses régions du monde.
LES PROGRÈS HÉSITANTS DE LA JUSTICE INTERNATIONALE Les États-Unis ne sont pas signataires du Traité de Rome qui a institué la Cour pénale internationale (CPI). Mais, malgré ce lourd handicap, l’année 2009 a vu progresser, bon gré mal gré, la justice internationale. Pour Philippe Hensmans, lorsqu’on décide de prendre un peu de recul, on réalise l’étendue des progrès en la matière «Il y a seulement vingt ans, on aurait eu du mal à imaginer qu’une cour comme la CPI existerait ou qu’un criminel de guerre comme Radovan Karadzic pourrait être jugé par un tribunal international. La justice internationale a donc fait un bout de chemin». La perspective d’être un jour rattrapé par la justice n’est plus fantaisiste pour des dirigeants d’États qui violent le droit international humanitaire ou les droits humains. Ce sont ainsi 110 États qui ont signé le Traité et la lutte contre l’impunité avance sur tous les continents. «Il y a des procès contre d’anciens dirigeants des dictatures militaires en Argentine ou au Chili». D’autres progrès sont plus mitigés. Hissène Habré, ancien dictateur tchadien, est assigné à résidence au Sénégal. Si cette assignation à résidence est en soi une évolution positive, «on se demande s’il sera jugé un jour». Ce type d’avancée mi-figue mi-raisin de la justice internationale peut aussi définir la situation au Cambodge où les Chambres extraordinaires des tribunaux du Cambodge chargées de juger les génocidaires ont un statut hybride, national et international. Pour que l’on parle de justice, deux conditions doivent être réunies : la condamnation et la réparation pour les victimes. Pour Philippe Hensmans, les tribunaux cambodgiens ne remplissent aucune de ces deux conditions. «Il y a eu au moins un million de victimes au Cambodge et on ne pense pas beaucoup à elles dans ces tribunaux. Malgré tout, les condamnations ne sont pas à négliger: chacune de celles-ci est un avertissement aux dirigeants du monde entier». Malheureusement, le conflit israélo-palestinien met à rude épreuve ces avancées. Lorsqu’on pense à la bande de Gaza, «on réalise l’absence de légitimité d’une communauté internationale incapable d’imposer un minimum de justice sur un si petit territoire». Autre point noir dans cette lutte pour la justice internationale, la Russie, «un pays imperméable où s’installe un sentiment d’impunité encouragé par le discours des autorités russes, avec les passages à tabac, la situation des défenseurs des droits humains, les journalistes muselés, etc.»
EXIGEONS LA DIGNITÉ Pour Amnesty, défendre les droits humains c’est aussi défendre leur indivisibilité. La campagne «Exigeons la Dignité» (1) prend toute son importance dans l’ambiance sociale moribonde générée par la crise économique car ceux qui paient les pots cassés des mesures prises par les gouvernements sont souvent ceux qui vivent dans la pauvreté. C’est notamment le sens de The Unheard Truth, le livre d’Irene Khan, la secrétaire générale d’Amnesty International, qui vient appuyer la campagne «Exigeons la Dignité». Pour Philippe Hensmans, «pendant longtemps, nous nous sommes demandé quelle pourrait être notre plus-value dans la bataille pour les droits économiques et sociaux, dans la lutte contre la pauvreté. La campagne “Exigeons la Dignité”, par les angles originaux qu’elle adopte, est une réponse». Les trois grandes orientations de la campagne concernent l’accès aux droits, l’obligation de rendre des comptes et la participation active des personnes démunies. En septembre, Philippe Hensmans a participé avec Irene Khan à une mission d’Amnesty International en Sierra Leone. À cette occasion, une caravane contre la mortalité maternelle a été lancée dans le pays afin de sensibiliser la population (2). Il faut dire qu’en Sierra Leone, une femme sur huit meurt en couche ou au cours de la grossesse, un chiffre édifiant qui justifie la mobilisation du mouvement. La mortalité maternelle est symptomatique des erreurs qui sont parfois faites quand on évoque la pauvreté. De l’argent a été investi par les pays riches pour essayer de remplir une partie de leurs engagements, notamment en investissant dans le domaine de la santé, sans pour autant atteindre les buts énoncés. «L’analyse de départ est mauvaise. Pour s’attaquer à ce type de problème, il est essentiel de s’appuyer sur les droits humains et de prendre en compte les trois axes de la campagne “Exigeons la Dignité”. Certes, c’est un problème d’accès aux soins, mais
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DOSSIER
l Manifestation devant l’ambassade d’Iran, dans le cadre de l’Iran Global Day of Action. Bruxelles, 25 juillet 2009. © AI
qui doit s’assortir d’une obligation de rendre des comptes lorsque les pouvoirs publics ne s’acquittent pas correctement de leur mission et, bien sûr, de l’obligation d’associer les femmes à la prise de décision, de faire entendre leur voix».
DÉNONCER LES VIOLATIONS DES DROITS HUMAINS Si la campagne «Exigeons la Dignité» a mobilisé beaucoup d’énergie cette année, Amnesty International a poursuivi son marquage à la culotte des responsables de violations des droits humains dans le monde, souvent en alertant l’opinion sur des cas individuels représentatifs de dérives généralisées dans ces pays. Malheureusement, les «clients habituels» d’Amnesty n’ont pas beaucoup changé. En Iran, la situation s’est aggravée avec la réélection contestée de Mahmoud Ahmadinejad à la présidence de la République islamique et le débat sur le nucléaire. Philippe Hensmans estime que les Iraniens avaient le choix entre «la peste et le choléra, mais à la suite de ces élections, l a vu le régime se refermer sur lui-même et utiliser une politique répressive digne de l’époque du Shah». Pour Amnesty International, la mobilisation pour le respect des droits humains en Iran porte difficilement ses fruits car le régime est très difficile à faire évoluer. Cette année, Amnesty a manifesté à deux reprises devant l’ambassade d’Iran. «Il y a bien eu quelques succès sur des cas individuels, des exécutions annulées ou l’obtention d’une protection pour certaines personnes, voire une légère diminution du nombre d’exécutions de mineurs, mais les progrès restent maigres». Autre pays dont les dirigeants sont difficiles à sensibiliser: le Myanmar (Birmanie) (3). Les différentes sections d’Amnesty, dont le Secrétariat national (SN) d’AIBF, essayent de faire pression pour qu’on n’oublie pas le Myanmar. Il règne beaucoup d’incertitudes sur l’avenir dans ce pays, sur la succession du chef de la junte lorsque celui-ci partira, sur la structuration de l’opposition. L’autre problème d’envergure est celui de la minorité karen dont la situation est très difficile et dont les membres fuient souvent vers la Thaïlande, un État qui n’a pas signé la Convention de Genève et les refoule en masse. Malgré tout, ces derniers
mois, 15 prisonniers politiques de la Ligue nationale pour la Démocratie (NLD, le parti d’Aung San Suu Kyi) ont été libérés des prisons birmanes. Enfin, parmi les pays qui ont défrayé la chronique, le Zimbabwe occupe une place de choix. «Dans ce pays où les moyens de s’alimenter existent, c’est une action politique qui a créé des famines». La situation a tout de même un peu évolué, notamment grâce à la pression internationale et malgré le «rôle détestable qu’a joué l’Afrique du Sud dans ce dossier en soutenant le régime». Certains pays, suivis de près par Amnesty International, sont traversés par des vents contraires. C’est le cas de la Chine. Amnesty a poursuivi son action suite aux nombreuses campagnes de l’année précédente liées aux Jeux olympiques. C’est en 2009 qu’a eu lieu la toute première mission d’Amnesty International en Chine. Ce qui est intéressant, pour Philippe Hensmans, «c’est que le régime n’est pas monolithique, il y a des tendances qui cohabitent, le parti est agité par des mouvements internes et le pays est traversé en permanence par des pics de mécontentement, voire de colère.». S’il ne faut pas oublier les 500 à 600 000 personnes qui croupissent encore dans les camps de travail forcé, il faut garder en tête que ce pays immense est plus complexe qu’on ne le croit et qu’il faut y soutenir les forces de changement. C’est dans cette dynamique qu’une manifestation a été organisée par Amnesty en Belgique pour se souvenir du massacre de Tian’anmen. Enfin, l’évolution de la situation en Colombie interpelle car, suite à la libération d’Ingrid Betancourt, l’attention internationale est retombée «alors que des communautés de paix ou des syndicalistes sont en danger». Face à ces raisons nombreuses de se mobiliser pour les droits humains et face à une actualité qui impose son agenda, l’Assemblée générale d’AIBF fut l’occasion de prendre un peu de recul et de réfléchir aux orientations des prochaines années. C’est lors de cette Assemblée générale qu’Irene Khan et Olivier De Schutter, Rapporteur spécial des Nations unies sur le Droit à l’alimentation, ont animé un débat ayant pour thème «Amnesty International va-t-elle mettre un terme à la faim dans le monde ?» La journée, très ancrée dans les perspectives d’action liées à la campagne «Exigeons la Dignité», a été l’occasion d’interpeller les militants sur l’action d’Amnesty. Philippe Hensmans avoue qu’il a été impressionné par cette Assemblée générale: «avec le thème de la dignité, on est loin de ce qui se faisait il y a trente ans et la présence d’Irene Khan et d’Olivier De Schutter a permis de recadrer l’action d’Amnesty, de donner envie et de requinquer de vieux militants dont certains s’avouaient un peu blasés». La voix des militants étant essentielle, la section belge francophone a décidé depuis deux ans d’aller à leur rencontre. Cette Assemblée générale a été précédée des «rencontres de printemps» entre les membres du Secrétariat national et les militants de groupes locaux afin de discuter des grandes orientations du mouvement. Des orientations qui font la part belle à la dignité, une campagne qui occupera les esprits de militants requinqués pour, au moins, les six prochaines années. e Cédric Vallet (1) Voir le dossier «La misère est moderne» dans Libertés ! n°455 de juin 2009. (2) Voir le dossier «Exigeons la Dignité – Parties de campagne» dans Libertés ! n°458 de novembre 2009. (3) Voir le dossier «L’impasse birmane» dans Libertés ! n°457 d’octobre 2009.
LES BONS COMPTES FONT LES BONS AMIS
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ous pouvez consulter les comptes 2008 d’Amnesty International Belgique francophone, approuvés lors de l’Assemblée générale d’AIBF du 25 avril 2009, en allant à l’adresse URL : http://www.amnestyinternational.be/pdf/aibf_comptes2008.pdf Vous pouvez également télécharger la version intégrale du Bilan 2009 à l’adresse URL : http://www.amnestyinternational.be/pdf/aibf_bilan2009.pdf Merci à vous membres, donateurs, militants, groupes locaux, régionales et coordinations. Vous êtes les chaînons essentiels des actions urgentes et des campagnes menées par Amnesty International. e
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DOSSIER ASILE
DES DROITS TOUJOURS BAFOUÉS En Europe comme en Belgique, les droits des migrants sont souvent bafoués. Réinstallation des réfugiés et détentions en centres fermés ont figuré parmi les priorités d’AIBF cette année.
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e nombreux migrants traversent les continents, avec parmi eux, des personnes en quête d’asile, particulièrement vulnérables au vu de leur parcours et pour qui l’arrivée sur le sol européen est synonyme de nouvelles difficultés (1). Amnesty International défend corps et âme le droit d’asile, mais aussi, plus largement, les droits des migrants au regard du droit international. Les refoulements massifs de migrants vers l’Italie, les arrestations d’étrangers en Mauritanie, les expulsions d’Afghans ou encore le démantèlement médiatique de la «Jungle» de Calais sont autant de drames que de droits foulés aux pieds. Sur tous ces sujets, Amnesty agit et réagit. En Libye par exemple, Amnesty a mené une mission en mai 2009 suivie de nombreuses interpellations à propos de centaines voire de milliers de migrants qui subissent toutes formes de mauvais traitements sur le chemin vers l’Europe. Ces exemples internationaux sont généralement répercutés en Belgique par le Programme Réfugiés à travers sa Newsletter. Celle-ci est un important support de mobilisation par rapport à des cas ou des problématiques partout dans le monde. La Belgique est évidemment une terre de destination pour les migrants et les demandeurs d’asile. Et, ici comme ailleurs en Europe, ils peuvent voir leurs droits ignorés, ce qui nécessite un engagement local d’Amnesty. Parmi les sujets ayant requis toute l’attention d’AIBF, on notera la réinstallation de 47 réfugiés irakiens en Belgique. La réinstallation est un principe vieux comme la Convention de Genève (1951) qui vise à répartir les réfugiés entre États, dans une dynamique de solidarité. Amnesty demande donc que la Belgique fasse un pas supplémentaire dans cette direction en accueillant davantage de réfugiés irakiens en provenance des camps de réfugiés de Syrie et de Jordanie, tout en faisant très attention à ce que ces projets de réinstallation ne finissent par servir de prétextes pour empêcher l’accès à la protection à d’autres réfugiés, ceux qui viennent en Europe directement et par leurs propres moyens. Autre point important pour Amnesty International : la détention des étrangers. Depuis des années, Amnesty œuvre pour la mise en place d’alternatives, mais le combat contre la détention systématique des migrants s’est intensifié et devient peu à peu une priorité pour notre mouvement. Ainsi, en 2009, AIBF s’est associée au réseau belge des ONG de visiteurs en centres fermés, en co-signant un rapport rendu public au mois de juin : «Douze mois en centres fermés, douze vies bouleversées». Bien d’autres actions ont été menées cette année, à l’image d’interpellations écrites sur des sujets variés : alternatives à la détention des familles avec enfants, accord de réadmission conclu entre la Belgique et le Kosovo
(autoproclamé indépendant en février 2008), renvois de demandeurs d’asile vers la Grèce, etc. Enfin, l’année 2009 a été marquée en Belgique par la décision du gouvernement fédéral de mettre en place une opération de régularisation des sans-papiers en fonction de critères clairs. Le mandat d’Amnesty ne concerne plus uniquement les réfugiés, mais aussi les migrants, le thème de la régularisation des étrangers en séjour irrégulier est progressivement abordé par l’organisation. En l’occurrence, la section belge d’Amnesty n’a cessé de suivre au plus près l’évolution du mouvement en faveur de la régularisation, relayant les informations sur les différents évènements ou manifestations et réclamant, malgré tout, que des critères clairs soient mis en place, par souci de transparence. e Cédric Vallet 1. Voir le dossier «Asiles», dans Libertés ! n°450 de janvier 2009.
l Des sanspapiers algériens qui occupent une grue négocient avec des policiers. Bruxelles, 24 avril 2008. © AFP/ Dominique Faget
DIGNES CITOYENS DU MONDE Alors que le projet «Citoyens du monde» entame une seconde vie, l’année 2009 a été l’occasion d’impliquer les jeunes dans le combat pour la «dignité».
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duquer les jeunes aux droits humains, leur offrir des clés de compréhension du monde et des pistes d’action, sont des missions primordiales pour Amnesty International. Cette mission passe en partie par les «Groupes Écoles» constitués dans l’enseignement secondaire. Ils étaient 95 cette année dans les établissements du secondaire. L’objectif de cette année était de consolider cette base en poussant les groupes existants à l’action plutôt que de chercher une augmentation spectaculaire du nombre de groupes dans les écoles.
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Un gros travail de pédagogie a été effectué autour de la campagne «Exigeons la Dignité» par la production d’un cahier pédagogique rédigé spécialement pour les élèves du secondaire et mettant l’accent sur la problématique des bidonvilles. Ce cahier a été envoyé, via la cellule pédagogique «Démocratie ou Barbarie» (Communauté française) à environ 1 900 professeurs pour qu’ils se saisissent de la matière. Pendant ce temps, le projet «Citoyens du Monde» poursuit son bonhomme de chemin. Ce projet avait permis de créer des liens entre jeunes et ONG de terrain. Les meilleurs projets proposés (film, expo, pièce de théâtre) avaient été récompensés par un voyage auprès d’une des ONG partenaires afin de réaliser des reportages sur les défenseurs des droits humains. Ces reportages ont été diffusés sur Plug-RTL en décembre 2008 et, grâce à la Communauté française, ils sont désormais disponibles à tous les professeurs désireux de les utiliser dans leurs cours. e Cédric Vallet
DOSSIER i Vinícius George (g) et Marcelo Freixo (d) lors de leur passage à Amnesty International Belgique francophone. Bruxelles, 25 septembre 2009. © Bruno Brioni
CLICS DE SURVIE Isavelives.be est un site Internet qui centralise toutes les actions d’Amnesty International. Après deux ans d’existence, son succès ne s’est pas démenti. L’année 2009 a été en outre l’occasion d’une restructuration du site et de changements dans les modalités d’action.
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e site Internet Isavelives.be (pour «I Save Lives» ou «Je sauve des vies») s’est imposé comme une évidence. Cette plate-forme au service des droits humains n’existe que depuis deux ans et pourtant elle est déjà incontournable. Son but est toujours de favoriser l’activisme en centralisant les différents moyens d’action d’Amnesty sur un site Web. À l’image de la toile, Isavelives.be est en perpétuelle évolution. Cette année a été marquée par des changements de forme et d’approche du militantisme en ligne, afin de rendre cet outil plus performant et plus souple, dans le but de sauver des individus dont les droits fondamentaux sont menacés. La structure du site a été repensée pour le rendre plus clair, les différentes modalités d’action sont désormais classées en sous-rubriques accessibles en un clic. Les Actions urgentes, outil de prédilection dans la défense des droits humains, sont mises en évidence. Deux à trois nouvelles actions urgentes sont proposées chaque jour sur le site et sont transférées immédiatement par e-mail à 3 800 militants du réseau. Le site Isavelives.be tient à jour le suivi des actions. Ces mobilisations essentielles de court terme sont complétées sur le site par les dossiers «Individus en danger» qui proposent une approche davantage dans le long terme. Ces individus ou groupes d’individus sont suivis par les chercheurs londoniens d’Amnesty. Si le Secrétariat national (SN) «adopte» un individu en danger, le suivi peut perdurer tant que le Secrétariat international (SI) se mobilise sur la question, ce qui peut conduire à des mobilisations variées (manifestations, lettres, pétitions) pendant plusieurs années. Les «Actions Courage» qui consistent à envoyer un courrier de soutien directement à la personne concernée, détenue ou soumise à une violation flagrante de ses droits, existent toujours mais sont désormais connues sous le nom d’«Actions de Solidarité». Les Lettres du Mois, proposées dans le mensuel Libertés ! sont aussi mises en évidence sur le site Internet ainsi que les annonces de futures manifestations. Enfin, les gestionnaires du site ont décidé de mettre en avant certaines actions, qui répondent au nom d’«Actions Focus». Il peut s’agir d’une Action urgente ou d’un Individu en danger qu’on décide de mettre en évidence pour attirer l’attention d’un plus grand public. L’année 2009 a aussi été l’occasion d’une réflexion sur les modalités d’action : comment mieux encourager les militants et sympathisants à agir ? La réponse se nomme «Annonce Nouvelles Actions» qui accompagne désormais les Actions Focus et vise un public large. Il s’agit d’une démarche proactive du
SN qui décide de contacter, via e-mail, des personnes qui, dans le passé, ont déjà agi pour Amnesty, afin de leur annoncer de nouvelles actions en fonction de leurs centres d’intérêt. Si un sympathisant occasionnel d’Amnesty a participé à l’une ou l’autre action sur la peine de mort, il sera informé directement de toute action sur le sujet. Cette nouvelle démarche, en place depuis le mois d’août, porte déjà ses fruits avec un triplement du nombre de participants aux actions. Enfin, les militants et sympathisants d’Amnesty peuvent toujours s’abonner au Service d’Action par SMS. Différentes actions sont proposées par SMS aux 819 membres du réseau, moyennant paiement. L’atout des actions SMS est qu’elles permettent une mobilisation rapide, mais il s’agit aussi d’un moyen novateur de récolter des fonds. En 2010, une plus grande importance sera donnée à ce mode d’action, la priorité étant les individus en danger. e C.V.
LES MEMBRES SE RAMASSENT À L’APPEL Amnesty tire sa force du nombre de ses militants, membres et donateurs qui soutiennent son action dans le monde et en Belgique francophone en particulier.
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ecruter de nouveaux membres est important pour notre mouvement car ils élargissent l’audience et garantissent un impact toujours plus grand du travail d’Amnesty. Depuis quelques années, Amnesty International va chercher activement ses membres en allant à leur rencontre, dans divers lieux publics. En 2009, les recrutements de membres ont été réalisés grâce à deux programmes de récolte de fonds. Au revoir les «Kysés» qui allaient trouver de nouveaux supporters en faisant du porte-àporte et bienvenue aux démarcheurs des «Rallyes-Cafés». Le «Rallye-Café» a été expérimenté en 2008 avec un certain succès et reconduit cette année. Pendant cinq mois, ce sont plus de 700 personnes qui ont été recrutées dans leurs bistrots favoris. Bien sûr, les désormais célèbres «Yékés» ont aussi été très actifs. À eux seuls, ils ont attiré quelque 3 600 nouveaux membres et donateurs, ce qui porte le nombre total à 4 300 membres et donateurs frais émoulus qui, dès le premier jour, ont reçu des informations sur le fond de l’action d’Amnesty avec un éclairage plus particulier sur la violence domestique. e C.V.
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MOUVEMENT FORMATIONS 2010 C’est avec plaisir que nous vous annonçons la sortie du programme 2010 ! Vous y retrouverez les modules sur la peine de mort, les réfugiés, les droits des femmes, la torture, la mission et le fonctionnement d’Amnesty, etc. Vous y découvrirez deux nouveaux ateliers de courte durée (01h30) : l’un portera sur les différentes façons de lutter contre l’injustice avec Amnesty et l’autre sera consacré à des échanges sur la manière de parler de ses positions en faveur du respect des droits humains. De plus, pour la première fois, nous vous inviterons à suivre un cycle complet sur la campagne «Exigeons la dignité». Notre catalogue est disponible en format pdf. Nous vous l’enverrons par e-mail ou par courrier sur simple demande. Vous pouvez également l’obtenir sur notre site Internet à l’adresse suivante : http://www.amnestyinternational.be/doc/IMG/pdf/ formations2010.pdf e Pour tout renseignement complémentaire, contactez-nous par e-mail à formations@aibf.be ou par téléphone au 02/538 81 77, de préférence les mardi, jeudi et vendredi.
FESTIVAL PAROLES D’HOMMES NOUS NE NOUS ÉTIONS JAMAIS RENCONTRÉS… À HERVE DU 30 JANVIER AU 13 FÉVRIER 2010 Pour sa 9e édition, ce festival prêtera une attention particulière aux paroles des jeunes. Toujours dans l’esprit du travail d’éducation à la démocratie que poursuivent ses organisateurs depuis les premières éditions, il s’agit encore et toujours de rassembler les jeunes générations pour les éveiller aux différentes valeurs que sont la fraternité, l’altérité, la solidarité, la tolérance, la différence, la liberté… L’édition 2010 du festival s’intitule : «Nous ne nous étions jamais rencontrés…», en rapport à un spectacle tout à fait spécifique et original qui sera le cœur de cette thema jeunesse. Cinéma, théâtre, concerts et conférences seront au rendez-vous. «Les paroles d’hommes ne peuvent circuler que là où il y a la démocratie et la démocratie n’existe pas s’il n’y a pas de conscientisation.» Ce festival est censé nous aider à être moins passifs et moins indifférents. À l’heure où la citoyenneté et les valeurs démocratiques perdent leur signification, où la culture de consommation et l’individualisme semblent prendre le pas sur l’esprit de résistance et de solidarité, ce festival est là pour nous rappeler d’être vigilants. La passivité et l’indifférence favorisent les dictatures et les atteintes aux droits et aux libertés. Participer à ce festival, c’est être un maillon de cette chaîne universelle de résistance démocratique. C’est pourquoi, dans un souci d’éducation à plus de solidarité, le Festival aura à cœur de travailler au sein d’ateliers théâtre et musicaux avec les plus jeunes, avec comme objectif de leur apprendre à être acteur et non pas seulement spectateur du monde. e Infos : Réservations au 087 66 09 07 Coordinatrice : Clara Beelen – 087 78 62 09 – 0498 03 09 66 clara.beelen@parolesdhommes.be
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C O O R D I N AT I O N S AMÉRIQUE CENTRALE
EL MACHISMO MATA (1) Alors qu’un jugement sans précédent de la Cour interaméricaine des Droits de l’Homme venait de condamner l’État mexicain pour ne pas avoir prévenu et enquêté sur trois meurtres de femmes dans l’affaire Campo Agodonero, le Parlement européen accueillait, ce 19 novembre, la deuxième conférence sur les féminicides (2) organisée par le Groupe des Verts. Il s’agissait de faire le point, à quelques jours du 25 novembre, Journée internationale pour l’Élimination de la Violence à l’égard des Femmes, sur les suites données à la «Résolution sur les assassinats des femmes (féminicides) en Amérique centrale et au Mexique et le rôle de l’Union européenne dans la lutte contre ce phénomène» (3), qui pressait les pays d’Amérique centrale de prendre toutes les mesures nécessaires.
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errie Howard, directrice adjointe du Programme Amériques d’Amnesty International, représentait l’organisation à cette conférence : «Nous avons commencé notre travail sur les meurtres de femmes et de filles en Amérique centrale en 2004, quand nous avons lancé deux grandes enquêtes, l’une à Ciudad Juarez, au Mexique, et l’autre au Guatemala. Depuis ce moment, notre organisation milite à travers le monde pour l’amélioration de la situation dans ces deux pays et suit la situation de près». Si les meurtres de femmes en Amérique centrale en général ont connu une forte augmentation, ce sont le Mexique et le Guatemala qui occupent les premières places dans les taux de féminicides de la région. Ce sont aussi deux pays où les témoignages font état d’un degré de violence particulièrement inquiétant : souvent, les corps retrouvés portent des marques de violences sexuelles et de tortures. Ils sont abandonnés dans les champs, dans des décharges, sur le bord des routes, dans la rue. La grande majorité des victimes sont âgées de 16 à 30 ans ; plusieurs d’entre elles étaient employées dans les maquiladoras, des usines de sous-traitance, et sont souvent d’origine pauvre, voire indigène. En bref, toutes sont des jeunes femmes sans aucun pouvoir dans la société, dont la mort ne représente aucun coût politique pour les autorités locales et dont les corps sont considérés comme des objets jetables. Car ces meurtres, commis autant dans le cadre domestique que par des inconnus, s’enracinent profondément dans un contexte, non seulement de violence endémique, mais surtout de rapports de pouvoir déséquilibrés entre les hommes et les femmes, impliquant la violation généralisée des droits des femmes. Et, en Amérique latine, c’est précisément le Guatemala qui occupe la dernière position en termes d’égalité de genre. Walda Barrios, avocate et présidente de l’Union nationale des Femmes guatémaltèques, une des intervenantes de la conférence, confirme ce constat : «dans les pays d’Amérique centrale, comme le Guatemala, le Salvador et le Nicaragua, qui ont vécu des conflits armés internes, le sentiment qui prévaut dans le tissu social est que “la vida no vale nada” (“la vie ne vaut rien”), puisque la supprimer est devenu un acte quasi quotidien. Mais dans le cas des femmes, cela se traduit par une violence sexuelle et une brutalité démesurée. Au Guatemala, durant le conflit armé, les corps des femmes ont fait partie d’une stratégie génocidaire et y porter atteinte était une manière d’humilier la population en résistance. Aujourd’hui, les corps parallèles de l’État n’ont pas été démantelés avec les accords de paix (4) ; il y a toujours des militaires dans nos rues et la violence repart dans une spirale infernale.» Au Guatemala, rien
qu’entre 2001 et 2005, près de 2200 femmes ont été assassinées. Quant au Mexique, selon des chiffres officiels et que l’on ne peut dès lors soupçonner d’être maquillés à la hausse, 6 000 femmes et fillettes ont été assassinées dans le pays entre 1999 et 2006.
PAS D’ÉVOLUTION TANGIBLE Kerrie Howard ne ménage pas les eurodéputés au sujet de l’impact de la résolution du Parlement européen : «Pour Amnesty, le meurtre de femmes et de filles au Mexique et en Amérique centrale est toujours un problème pressant, autant aujourd’hui qu’au moment où on a soulevé la question pour la première fois». À ce jour, à Ciudad Juarez, la ville mexicaine carrefour du narcotrafic à la frontière américaine où ont été assassinées les jeunes femmes de l’affaire Campo Algodonero, qui a médiatisé le phénomène, plus de 450 femmes ont été assassinées depuis 1993. Pourtant, des initiatives ont été prises en Amérique centrale, ne fût-ce qu’en commençant à utiliser le terme «féminicide» et en en faisant une catégorie pour les chiffres de la criminalité. Abondant dans le sens des autres intervenants venus d’Amérique centrale pour la conférence, Kerrie Howard tempère fortement ces évolutions : «Amnesty salue la ratification de traités internationaux et régionaux sur la protection des droits des femmes (5), de même que diverses initiatives nationales pour améliorer le cadre légal normatif (6). Cependant, nous ne serions pas ici aujourd’hui, s’il n’était pas clair que beaucoup devait encore être fait pour voir évoluer la situation. Les indicateurs sont on ne peut plus clairs : ces nouveaux textes de lois ne mènent pas à des améliorations substantielles de la situation. En particulier, le niveau d’impunité reste largement intact. La justice n’est pas rendue. Le déni de l’ampleur du problème est toujours affreusement courant, tant au niveau local que national. La déformation des faits et l’incapacité à collecter des preuves fiables est un problème très parlant.» Conséquence de ce mépris d’État, «l’accès à la justice pour les victimes et leurs proches est fréquemment entravé par des pratiques discriminatoires largement répandues et tenaces» : insultes, humiliations, refus d’enregistrer la plainte... C’est la culture du «elle l’a probablement mérité». «Les mesures légales ne sont pas à elles seules suffisantes, c’est leur interprétation qui compte». Dans le même esprit, les organisations de femmes ou de défense des droits des femmes sont l’objet de harcèlement et de menaces de mort. «Et pour aggraver le tout, dans les cas qui donnent suite à des enquêtes, les autorités torturent les suspects afin de leur arracher des preuves. Certes, la gravité de la crise de sécurité publique en Amérique centrale ne doit pas être
MOUVEMENT
CERCLE PETER BENENSON
© Irving Teitelbaum
WEEK-END CINÉMA IRANIEN EN COLLABORATION AVEC BOZAR LES 9 ET 10 JANVIER 2010 De gauche à droite : Andrea Medina Rosas, Walda Barrios et Mirta Kennedy. Bruxelles, Parlement européen, 19 novembre 2009. © AIBF/Brian May
sous-estimée et il est normal que les ressources et efforts des gouvernements y soient largement consacrés, mais le phénomène des féminicides est aussi un problème de sécurité publique, qui doit être traité avec le même niveau d’urgence.»
DES GESTES FORTS À POSER La coopération internationale s’est surtout focalisée sur le renforcement des institutions censées défendre les droits des femmes et prévenir leur mise à mort. Andrea Medina Rosas, avocate mexicaine et membre du Comité latino-américain et caribéen pour la Défense des Droits des Femmes, clame devant la petite assemblée réunie au Parlement européen : «L’État mexicain déclare manquer de ressources financières pour lutter contre les violations des droits humains, et ce malgré les aides accordées, notamment par l’Union Européenne. En réalité celles-ci ne font que renforcer l’État central, qui crée des “institutions-parasols” et adopte un discours sur les droits humains taillé pour plaire à la communauté internationale. Il s’agit de simulation. En matière de répression, nous pouvons constater toute l’efficacité et les effectifs de la police et de l’armée.» Une comparaison reprise par une autre représentante d’Amérique centrale : pour écraser les manifestations, les gouvernements centraméricains savent se montrer efficaces et trouver des fonds. Ce sont donc des positions fermes que les femmes centraméricaines attendent de ladite communauté internationale : «Il faut un réel suivi. Il faut exiger que les gouvernements rendent des comptes et respectent leurs engagements». Kerrie Howard va dans
le même sens : «Insister pour une réforme immédiate pour éliminer toutes les discriminations existant dans la législation, les politiques et les pratiques, ainsi que des sanctions contre les fonctionnaires qui n’agissent pas diligemment face aux plaintes, c’est une chose tangible et concrète, sur laquelle on peut réellement travailler. Au-delà de ces propositions, Amnesty insiste sur le fait que nous attendons aussi des résultats, des actions et un impact des programmes et initiatives au nom de l’UE au Mexique et en Amérique centrale.» e Céline Remy (st.) (1) «Le machisme tue», slogan de l’UNIFEM dans le cadre de la campagne du Secrétaire général des Nations Unies Ban Kimoon, Tous unis pour mettre fin à la violence à l’égard des femmes, lancée ce 25 novembre depuis le Guatemala. (2) La première a eu lieu en avril 2006. (3) Passée en septembre 2007 à l’initiative de l’eurodéputé espagnol Raül Romeva (Green/ALE) et la Commission des Droits de la Femme et de l’Égalité des Genres, en collaboration avec Amnesty. (4) Signés en 1996, ils avaient pourtant reconnu de nouveaux droits aux femmes. (5) Notamment la Convention de l’ONU sur l’Élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW, ratifiée en 1981 par le Mexique et en 1982 par le Guatemala) et la Convention interaméricaine sur la prévention, la sanction et l’élimination de la violence contre la femme (Convention Belém do Pará, ratifiée par le Guatemala en 1995 et par le Mexique en 1998). (6) En mai 2008, le Guatemala a ainsi promulgué la première loi d’Amérique latine sur les féminicides, la Loi contre le féminicide et autres formes de violence envers la femme. Le Mexique, outre les créations, en 1998 du Bureau du Procureur spécial chargé d’enquêter sur les meurtres de femmes, puis en 2006 du Bureau du Procureur spécial pour les crimes violents contre les femmes, a passé en 2007 la Loi Générale pour l’Accès des femmes à une vie sans violence.
Commençons bien l’année et plongeons nous dans la diversité du cinéma iranien et sa complexité. En effet, le paradoxe du cinéma iranien est qu’il bénéficie d’un soutien officiel mais qu’en contrepartie, il est soumis à une très forte censure. Enfin, ce week-end sera l’occasion d’accueillir une table ronde autour de la situation des femmes, de la jeunesse et de l’art en Iran le dimanche 10 janvier dans l’après-midi.
DOCUMENTAIRES Le 9 janvier à 19h00 : Avant-première du documentaire Safar (52’) de Talheh Daryanavard (VO persane avec sous-titres français). Le 10 janvier à 20h00 : Avant-première du documentaire Téhéran sans autorisation / Teheran without permission de Sepideh Farsi (83’, VO persane avec sous-titres français).
FICTIONS Le 9 janvier à 20h30 : Avant-première de No one knows about the Persian cats / Les chats persans de Bahman Ghobadi (VO persane avec sous-titres bilingues). Débat/rencontre IRAN : Femmes, jeunesse et art : trente ans après la révolution. Avec Azadeh Kian-Thiébaut et les réalisateurs ; animé par Pascale Bourgeaux Le 10 janvier à 17h00 : Avant-première du film About Elly / À propos d’Elly de Asghar Farhadi (VO persane avec sous-titres bilingues). Organisé en partenariat avec Amazone et Amnesty international e
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MOUVEMENT VIOLENCES CONTRE LES FEMMES
PLANS D’ACTION OU PANS D’ACTION ? Alors qu’en 2009, on commémore le 30e anniversaire de la Convention sur l’Élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW), Amnesty International continue à réagir à un phénomène qui est la matérialisation par excellence de cette discrimination : les violences contre les femmes.
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’après les Nations unies, deux femmes sur trois en sont victimes en Afrique. De 66 à 70 % des femmes subissent, dans le monde et à un moment donné de leur vie, des agressions commises par une connaissance, un proche, un mari ou un frère. Deux millions de femmes et de filles sont mutilées sexuellement chaque année ; 80 % des Afghanes subissent des violences domestiques, etc. Ces chiffres accablants ne sont que des estimations et ne représentent sans doute que la partie visible de l’iceberg. Dans les violences entre partenaires, les femmes sont les souffre-douleur, les exutoires du malheur des hommes. L’alcool, le chômage ou les difficultés de la vie sont invoqués pour justifier ce fléau, mais la vraie raison trouve ses sources dans la discrimination et la volonté de prise de pouvoir de l’un sur l’autre. Il s’agit d’un phénomène universel présent au-delà de toute culture et de tout niveau social, qui nous concerne toutes et tous. En effet, il appartient à la société de protéger sa population et les femmes en particulier car une société dans laquelle les droits des femmes sont bafoués et où les violences sont tolérées est une société en déclin et donc en péril. La section belge d’Amnesty, en coordination avec les associations spécialisées et de terrain, suit de très près l’évolution de la prise en compte de ce problème par les pouvoirs publics belges. Après l’élaboration et l’adoption de plusieurs Plans d’action nationaux (PAN), des procédures ont été mises en place. Ainsi, par exemple, les circulaires de la ministre de la Justice de 2006, dites de «Tolérance zéro» et en vertu desquelles toute plainte devra être spécifiquement traitée par du personnel judiciaire et de police spécifique. Or, un magistrat de référence spécialisé n’est pas encore désigné dans tous les arrondissements judiciaires. Ainsi également, tous les commissariats ne disposent pas de locaux appropriés pour trois quarts des dossiers classés sans suite pour des raisons diverses et variées, et parfois «techniques» ! Or, pour lutter efficacement contre un phénomène, il faut pouvoir le quantifier. Le Conseil de l’Europe estime que, dans les différents pays, entre un cinquième et un quart des femmes ont subi des violences physiques au moins une fois dans leur vie d’adulte et que plus d’un dixième des femmes ont subi des violences sexuelles avec usage de la force. Toutes formes de violence confondues, y compris la persécution, ce chiffre s’élève à
45 %. En Belgique, dans un sondage mené en 2005 par Amnesty, une personne interrogée sur trois disait connaître dans son entourage proche un couple dans lequel la violence était présente. Mais combien de femmes sont mortes l’an dernier, en Belgique, sous les coups de leur conjoint? La question a été posée récemment aux différents services publics concernés… Aucune réponse ! Dans un document d’évaluation de la politique belge de lutte contre les violences entre partenaires, Amnesty se montre vigilante. Ainsi, notre mouvement se réjouit de la récente mise en place d’un Numéro Vert d’urgence gratuit dans la partie francophone du pays. Mais, si on a pu libérer les budgets nécessaires pour que cette ligne soit disponible du lundi au samedi de neuf à vingt heures, que fait-on des personnes qui ont besoin d’aide à d’autres moments ? Elles sont dirigées vers un site Internet ! On se trouve face à un exemple flagrant de la limite des moyens humains et financiers accordés à une décision politique. Une réelle volonté politique de lutte contre les violences entre partenaires s’évalue à la mesure des moyens qu’on lui accorde. Ces moyens devraient être affectés aux mesures d’accueil des victimes et de soutien aux centres d’accueil spécialisés, aux mesures de protection des victimes et d’accompagnement des auteurs, et enfin (et surtout) à l’évaluation et au suivi. Mais il faut également agir en amont : la prévention passe par un changement des comportements, des attitudes et des réactions. Comme nous le disions plus haut, beaucoup a été fait (plus ou moins efficacement) et pourtant, trop de femmes sont encore victimes et en danger. Si l’on estime que la violence entre partenaires est à jamais intolérable, il faut en être convaincu et agir en conséquence au quotidien. Nous pouvons tous et toutes agir à notre niveau, mais des campagnes de sensibilisation à long terme et régulières doivent être menées. Quelques-unes l’ont effectivement été. Mais il ne s’agit que de «one shot», alors que le travail devrait être permanent et dirigé vers un public plus large. Dans les écoles, ce sujet doit être rappelé chaque année. Combien d’établissements d’enseignement osent aborder ces questions ? Nous en avons approché plusieurs, aucun n’avait une charte ou un règlement d’ordre intérieur stipulant que la violence à l’égard des filles ne serait pas tolérée et que l’établissement s’inscrivait dans une approche d’éducation égalitaire et respectueuse. Dans les entreprises aussi, Amnesty recommande de sensibiliser le personnel et de former les délégués syndicaux et les personnes en charge des ressources humaines afin de prévenir et gérer tout comportement lié à ce phénomène. C’est clair, le combat contre ce fléau doit être global, tant au niveau politico-institutionnel qu’au niveau individuel. La vie de trop de femmes en dépend. e Françoise Guillitte
LE 10 DÉCEMBRE À BRUXELLES : JOURNÉE INTERNATIONALE DES DROITS DE L’HOMME
BOUGIES DE LA LIBERTÉ
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omme chaque année, le jeudi 10 décembre 2009 à 17h00, Amnesty International organisera sa désormais traditionnelle «Nuit des bougies de la liberté». Militants, bénévoles et sympathisants participeront à l’illumination d’un bon millier de bougies. À cette occasion, l’accent sera mis sur une pétition internationale lancée par Amnesty et qui demande que le nouvel
12 Libertés ! Décembre 2009
organisme de l’ONU chargé des femmes (créé suite à une résolution de l’Assemblée générale votée en septembre dernier) bénéficie de toute urgence du soutien politique durable de tous les États et surtout de fonds substantiels. e Où ? À la Place Sainte-Croix, sur le piétonnier qui relie le Flagey à l’Église Sainte-Croix, face aux Étangs d’Ixelles. Quand ? À 17h00. Transports : Bus 38-59-60-71 — Tram 81
Ce sont aussi 80 groupes locaux qui, sur le terrain, font un travail d’action et de sensibilisation aux droits humains. Pour vous y joindre, contactez votre régionale. SECRÉTARIAT NATIONAL AIBF Rue Berckmans 9, 1060 Bruxelles 02 538 81 77 Fax : 02 537 37 29 www.amnesty.be SECRÉTARIAT INTERNATIONAL Easton Street 1, London WC1X ODW United Kingdom 00 44 207 413 5500 AMNESTY INTERNATIONAL VLAANDEREN Kerkstraat 156, 2060 Antwerpen 6 03 271 16 16 RESPONSABLES RÉGIONAUX D’AMNESTY BRABANT WALLON Jean-Philippe CHENU chemin de la Terre Franche 13 1470 Genappe 010 61 37 73 – jpchenu@aibf.be BRUXELLES Luis SCHOEBERL Avenue du Loriot 22 1150 Bruxelles (Woluwe-Saint-Pierre) 02 660 08 78 lschoeberl@aibf.be HAINAUT ORIENTAL Nicole GROLET av. Elisabeth 6, 6001 Marcinelle 071 43 78 40 ngrolet@aibf.be LIÈGE Poste à pourvoir Christine BIKA Responsable de la gestion de la permanence – C/O Bureau régional d’AI – rue Souverain Pont 11 – 4000 Liège – du lundi au vendredi de 13h30 à 17h30 04 223 05 15 bureaudeliege@aibf.be LUXEMBOURG Daniel LIBIOULLE Avenue de la Toison d’Or 26 6900 Marche en Famenne 084 31 51 31 dlibioulle@aibf.be NAMUR Romilly VAN GULCK Rue Vivier Anon 8, 5140 Sombreffe 071 88 66 69 rvangulck@aibf.be WALLONIE PICARDE Marie NOËL Rue Cheny 1, 7536 Vaulx 069 77 66 13 – 0499 13 57 25 mnoel@aibf.be
IS AV ELIV ES . B E B O N N ES N O UV EL L ES Dans tous les pays du monde, des gens sont libérés grâce au travail des membres d’Amnesty. Des témoignages émouvants nous parviennent des prisonniers libérés ou de leur famille. Ils montrent qu’une action de masse peut avoir des résultats pour un meilleur respect des droits humains.
TURKMÉNISTAN MILITANT ÉCOLOGISTE RELÂCHÉ Le 6 novembre, le militant écologiste et prisonnier d’opinion Andreï Zatoka a été libéré après avoir payé une amende de 1 000 manats turkmènes (environ 230 euros). Huit jours auparavant, le 29 octobre, il avait été condamné à cinq ans d’emprisonnement à l’issue d’un procès inéquitable. Selon certaines sources au Turkménistan, il a été remis en liberté à condition de renoncer à sa citoyenneté turkmène et de quitter le pays. Ce militant écologiste âgé de 53 de nationalité turkmène et russe avait été arrêté le 20 octobre par des policiers dans la ville où il habitait, Dachogouz (nord du Turkménistan), pour «hooliganisme» et blessures «de gravité moyenne». Le 6 novembre, le tribunal régional de Dachogouz a statué que, lors de son procès, le tribunal de la ville de Dachogouz n’avait pas tenu suffisamment compte des circonstances atténuantes telles que son activité de défense de l’environnement, sa réputation en tant que chercheur et sa coopération avec les forces de l’ordre sur les questions relatives à l’environnement. Sa peine de prison a été commuée en une amende. Après l’avoir payée, Andreï Zatoka et son épouse ont quitté le Turkménistan pour la Russie le 7 novembre. Amnesty International continuera de suivre la situation de cet homme. e
SRI LANKA JOURNALISTES LIBÉRÉS Le journaliste Vettivel Jasikaran et son épouse Valarmathi Jasikaran ont été libérés le 26 octobre. Ils étaient détenus arbitrairement depuis mars 2008 en vertu de la législation antiterroriste (voir Libertés ! n°447 d’octobre 2008). Le Service d’Enquête sur le Terrorisme (TID) avait arrêté Vettivel Jasikaran pour «activités liées au terrorisme» et son épouse Valarmathi Jasikaran pour complicité, au titre des règlements d’exception, le 6 mars 2008. Vettivel Jasikaran est écrivain, éditeur et responsable du site Internet d’information Outreach Sri Lanka. Près d’un an après le début de leur procès, le 26 octobre, la Cour suprême a autorisé le retrait du recours formé par les Jasikaran pour violation de leurs droits fondamentaux et les a acquittés de tous les chefs d’accusation retenus contre eux. e
IRAN LAPIDATION ANNULÉE Un homme et une femme ont été libérés de prison à Ispahan (centre de l’Iran) le 4 octobre, après avoir été acquittés dans le cadre d’un nouveau procès après que leurs condamnations pour «adultère en étant marié» aient été annulées par le responsable du pouvoir judiciaire. Gilan Mohammadi et Gholamali Eskandari étaient détenus à la prison centrale d’Ispahan depuis 2003. Ils avaient été condamnés à la mort par lapidation probablement en 2005 ou 2006. Leurs peines avaient été confirmées par la Cour suprême en 2008. À l’issue d’un réexamen de leur dossier, le responsable du pouvoir judiciaire a ordonné qu’ils fassent l’objet d’un nouveau procès, lors duquel ils ont été défendus par un avocat d’Ispahan, Ruhollah Mohammadi. Gilan Mohammadi et Gholamali Eskandari ont tous deux été acquittés et libérés le 4 octobre. e
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© Privé
MEXIQUE
DÉNI DE JUSTICE L
e 27 octobre 2006, le vidéojournaliste mais ils ont été remis en liberté sans avoir été américain Brad Will a été atteint par interrogés de manière approfondie. En deux coups de feu à Oaxaca, alors qu’il mars 2008, l’ONG Physicians for Human Rights filmait un affrontement opposant des membres (Médecins pour les droits humains) s’est rendue d’une organisation locale, l’Assemblée popu- au Mexique et a recueilli des informations sur laire des peuples d’Oaxaca (APPO), à des l’enquête menée après la mort de Brad Will. sympathisants et représentants du parti du Les membres de la délégation ont fait part de gouvernement local. Il est mort pendant son leurs critiques quant à ces investigations et transfert à l’hôpital. En octobre 2008, un sympa- publié une déclaration affirmant qu’aucun thisant de l’APPO, Juan Manuel Martínez, a été élément n’indiquait que Brad Will avait été arrêté pour le meurtre de Brad Will. Il nie toute touché par des balles tirées à faible distance. Ils implication dans les faits, mais doit répondre du ont mis en évidence le fait que les autorités meurtre devant la justice. Aucune démarche n’avaient pas mené d’enquête exhaustive et systématique en vue d’interroger tous les approfondie dans cette affaire. La Commission suspects et tous les témoins n’a été mise en nationale des droits humains est parvenue à œuvre. Deux policiers ont certes été arrêtés, des conclusions similaires. e Lire aussi sur isavelives.be : http://www.isavelives.be/fr/node/4501
MODÈLE DE LETTRE Monsieur le Procureur général fédéral, Le 27 octobre 2006, le vidéojournaliste américain Brad Will a été atteint par deux coups de feu à Oaxaca, alors qu’il filmait un affrontement opposant des membres d’une organisation locale, l’Assemblée populaire des peuples d’Oaxaca (APPO), à des sympathisants et représentants du parti du gouvernement local. Il est mort pendant son transfert à l’hôpital. En octobre 2008, un sympathisant de l’APPO, Juan Manuel Martínez, a été arrêté pour le meurtre de Brad Will, en dépit de ses dénégations et de l’absence d’indices. En tant que membre/sympathisant(e) d’Amnesty International, je vous demande, Monsieur le Procureur fédéral, de procéder à un réexamen approfondi et impartial de l’enquête, et de faire en sorte que Juan Manuel Martínez soit jugé dans le cadre d’une procédure équitable. Je vous prie, Monsieur le Procureur, d’agréer l’expression de ma considération distinguée. Signature : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Nom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
LETTRE À ADRESSER À : Lic. Arturo Chávez Chávez, Procurador General de la República Procuraduría General de la República, Av. Paseo de la Reforma nº 211-213, Col. Cuauhtémoc, Del. Cuauhtémoc, México D.F., C.P. 06500, Mexique Fax : +52 55 53 46 09 08 – E-mail : ofproc@pgr.gob.mx
COPIE À ENVOYER À : Ambassade des États-Unis du Mexique, Av. Franklin D. Roosevelt, 94, 1050 Bruxelles (Ixelles) E-mail : embamex@embamex.eu – Fax : 02 644 08 19
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IS AV ELIV ES . B E MAROC
MODÈLE DE LETTRE
PRISONNIER D’OPINION L
e défenseur des droits humains Chekib El Khiari purge actuellement une peine de trois ans de détention dans la prison d’Oukacha, à © Privé Casablanca. Il a été accusé d’atteinte ou outrage aux autorités publiques et d’avoir fait des dépôts non autorisés sur un l’État dans la région du Rif d’être implicompte bancaire ouvert à l’étranger. qués dans des affaires de trafic de drogue Amnesty International le considère et de corruption. Le lendemain, il a été comme un prisonnier d’opinion détenu conduit chez lui par des policiers qui ont uniquement pour avoir critiqué ouverteprocédé à une perquisition et saisi un ment les autorités marocaines. Chekib El certain nombre d’objets, dont son ordiKhiari est le fondateur de l’Association Rif nateur et des documents, puis l’ont des Droits de l’Homme (ARDH), qui milite emmené. Le 24 juin 2009, Chekib El notamment contre le trafic de stupéfiants Khiari a été condamné à trois années dans la région du Rif (nord du Maroc). Le d’emprisonnement et à une lourde 17 février 2009, il a été convoqué à la amende par le tribunal de première police de Casablanca. Selon l’agence offiinstance de Casablanca. Il attend d’être cielle Maghreb Arabe Presse, le Procureur jugé en appel. Le volet bancaire des faits du Roi auprès de la Cour d’Appel de Casareprochés à Chekib El Khiari renvoie à blanca avait ordonné cette convocation 2006 : il avait alors ouvert un compte en en raison de déclarations de Chekib El Espagne afin de pouvoir encaisser un Khiari, notamment à la télévision natio- chèque de 250 euros versé par le quotidien nale, accusant de hauts fonctionnaires de El País en règlement d’un article. e Lire aussi sur isavelives.be : http://www.isavelives.be/fr/node/4502
Sire, Le défenseur des droits humains Chekib El Khiari purge actuellement une peine de trois ans de détention dans la prison d’Oukacha, à Casablanca. Il a été accusé d’atteinte ou outrage aux autorités publiques et d’avoir fait des dépôts non autorisés sur un compte bancaire ouvert à l’étranger : il avait tout simplement ouvert un compte en Espagne afin de pouvoir encaisser un chèque de 250 euros versé par le quotidien El País en règlement d’un article. En tant que membre/sympathisant(e) d’Amnesty International qui le considère comme un prisonnier d’opinion détenu uniquement pour avoir critiqué ouvertement les autorités marocaines, je demande, Votre Majesté, la libération immédiate et sans condition de Chekib El Khiari. En espérant une réponse favorable, je vous prie, Votre Majesté, d’agréer l’expression de mes sentiments les plus respectueux. Signature : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Nom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
LETTRE À ADRESSER À : Sa Majesté le Roi Mohammed VI Bureau de Sa Majesté le Roi Palais Royal Rabat, Maroc Fax : +212 53 776 8515
COPIE À ENVOYER À : Ambassade du Royaume du Maroc Boulevard Saint-Michel, 29 1040 Bruxelles (Etterbeek) E-mail : sifamabruxe@skynet.be – Fax : 02 734 64 68
COMMENT AGIR EFFICACEMENT ?
TARIFS POSTAUX
Les cas exposés concernent des victimes de violations des droits humains dont s’occupe Amnesty International. Chaque appel compte. Un texte (à écrire ou à photocopier) vous est proposé pour chaque cas. Dans l’intérêt des victimes, écrivez en termes mesurés et courtois aux adresses indiquées. Ces lignes sont lues partout dans le monde par les quelque 1800000 membres d'Amnesty International. Elles sont reproduites dans de nombreux pays par des dizaines de journaux et constituent la clé de voûte de l'action du mouvement.
Lettres (jusqu’à 50 grammes) Belgique: 0,59e; Europe: 0,90e; reste du monde: 1,05e. La surtaxe aérienne est incluse (étiquette requise).
RUSSIE (TCHÉTCHÉNIE)
MODÈLE DE LETTRE
ENLÈVEMENT ET DISPARITION © Privé
L
une oreille arrachée ; il a souffert d’une a famille de Zelimkhan Mourcommotion cérébrale. Selon des témoins, dalov ne l’a pas revu depuis son il pouvait à peine se tenir debout lorsarrestation par des policiers du qu’on l’a reconduit en cellule. Le quartier Oktiabrski à Grozny (Tchétlendemain, des policiers l’auraient emchénie), le 2 janvier 2001. mené en voiture. Il était soupçonné de détention illégale de En mars 2005, Sergueï Lapine a été stupéfiants. La police affirme que Zelimcondamné à onze années d’emprisonnekhan Mourdalov a été remis en liberté le ment, peine ramenée à dix ans et demi en 5 janvier 2001, trois jours après son arresappel. Personne n’a toutefois été pourtation. Le policier Sergueï Lapine a été suivi pour l’enlèvement et la disparition déféré à la justice en octobre 2003 pour forcée de Zelimkhan Mourdalov. En abus de pouvoir et violences corporelles novembre 2005, un officier supérieur et graves à l’encontre de Zelimkhan Mourun gradé de rang inférieur ont été mis dalov. Le tribunal du quartier Oktiabrski en cause pour leur implication présumée de Grozny a confirmé lors du procès que dans les actes de torture perpétrés contre Zelimkhan Mourdalov avait été torturé Zelimkhan Mourdalov et dans la disparipendant sa détention par la police : tion forcée de celui-ci. Placés sur la liste des durant plusieurs heures, il a été soumis à personnes recherchées au niveau fédéral, des décharges électriques et il a reçu des ces deux hommes n’ont toujours pas été coups de poing, de pied et de matraque en arrêtés. e caoutchouc. Il a eu un bras fracturé et Lire aussi sur isavelives.be : http://www.isavelives.be/fr/node/4503
14 Libertés ! Décembre 2009
Monsieur le Président, La famille de Zelimkhan Mourdalov ne l’a pas revu depuis son arrestation par des policiers du quartier Oktiabrski à Grozny (Tchétchénie), le 2 janvier 2001. Il était soupçonné de détention illégale de stupéfiants. Le tribunal du quartier Oktiabrski de Grozny a confirmé lors du procès que Zelimkhan Mourdalov avait été torturé pendant sa détention par la police. En novembre 2005, un officier supérieur et un gradé de rang inférieur ont été mis en cause. Placés sur la liste des personnes recherchées au niveau fédéral, ces deux hommes n’ont toujours pas été arrêtés. En tant que membre/sympathsisant(e) d’Amnesty International, je vous demande, Monsieur le Président, de faire toute la lumière sur le sort de Zelimkhan Mourdalov et de faire en sorte que les policiers responsables de sa disparition forcée soient jugés immédiatement et équitablement. Je vous prie, Monsieur le Président, d’agréer l’expression de ma considération distinguée. Signature : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Nom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
LETTRE À ADRESSER À : President of the Russian Federation, Dmitry Anatolevich Medvedev ul. Ilyinka, No 23, 103132 Moscou, Russie Fax : +7 495 9102134
COPIE À ENVOYER À : Ambassade de la Fédération de Russie, Avenue de Fré, 66 1180 Bruxelles (Uccle) E-mail : amrusbel@skynet.be – Fax : 02 374 26 13
C U LT U R E AGENDA THÉÂTRE AU POCHE AGAMEMNON À MON RETOUR DU SUPERMARCHÉ, J’AI FLANQUÉ UNE RACLÉE À MON FILS
AMOUR INTERDIT
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ne petite boucherie d’un quartier ultra-orthodoxe de Jérusalem. Par une journée grise et pluvieuse, Aaron voit débarquer un jeune étudiant sans le sou qu’il finit par engager. Entre les carcasses va naître un amour interdit. Dans cette communauté religieuse qui renvoie chaque geste de la vie quotidienne aux préceptes de la Torah, l’homosexualité n’existe pas et n’est même pas reconnue comme une possibilité. Lentement, dans une atmosphère cotonneuse, le film déroule son histoire en suivant les événements avec distance. Ce qui fait la force d’une communauté, c’est la solidarité et le partage qui lie les uns aux autres, mais cet effacement de l’individu en faveur de la collectivité se traduit aussi par une surveillance permanente du respect des règles. La distance que le réalisateur Haim Tabakman maintient vis-à-vis de ses personnages, laisse de côté toute tentative d’explication psychologique. De l’extérieur, on ne comprend pas vraiment ce qui pousse cet homme religieux, marié et père de deux enfants, à se laisser séduire par son jeune employé. Dans la pureté de l’amour qu’Aaron éprouve pour Ezri, on peut sans doute y voir une analogie avec l’amour pour Dieu. Baigné dans un univers un peu claustrophobique, le film manque d’intensité charnelle, et les belles séquences de baignade rituelle dans ce lac en pleine nature apparaissent d’autant plus comme un chaste espace de liberté. Bien plus que dans la chronique d’une passion interdite, l’intérêt du film réside dans la description d’un milieu très fermé et dans la manière dont il réagit à ce qui perturbe ses règles de vie. e Gilles Bechet Eyes Wide Open / Tu n’aimeras point de Haim Tabakman, sortie le 2 décembre
À mon retour du supermarché, j’ai flanqué une raclée à mon fils, le sous-titre d’Agamemnon, vaut tous les résumés de la pièce que l’on pourrait tenter. Dans un style absurde et plein d’humour, Rodrigo Garcia signe une tragédie moderne sous forme de réquisitoire contre notre société de consommation. Un père de famille part faire des courses pour le mois au supermarché. Happé par la mécanique bien huilée d’une consommation toute puissante qui prend le pas sur l’humain, il remplit des caddies à outrance. De retour chez lui, devant l’amoncellement des produits achetés, tous inutiles, il se transforme en tyran et se défoule avec violence sur sa femme et son fils. Réalisant qu’il n’est qu’un pantin dans ce système rôdé qu’est la consommation de masse, il fuit avec femme et enfant vers un «quelque part», là sous les étoiles, dans ce no man’s land dégagé du consumérisme, il prend conscience de sa propre responsabilité face au système dans lequel il vivait. Rodrigo Garcia propose un théâtre qui alerte les spectateurs sur les dangers de la consommation, contestant la mondialisation et dénonçant la concentration des pouvoirs. Son théâtre nous éclaire sur la réalité sociale de l’Occident actuel, où la notion de valeur n’est plus que marchande. Il met en scène un homme en révolte et aussitôt le tourne en dérision, offrant le spectacle à la fois dégradant et ridicule d’un humain soumis à des stimuli, qui, remplissant son caddy au supermarché, achète inévitablement les produits par lot car l’inscription «2 pour le prix d’1» est un argument, comme chacun sait, irréfutable. En traitant les événements de l’actualité avec humour, Rodrigo Garcia évite la reproduction d’un théâtre qui pourrait ressembler à un journal télévisé. L’auteur attaque l’ennemi par le grotesque. Ce qui n’affaiblit nullement le caractère clairement politique de ses créations. e Du 9 au 26 décembre 2009 à 20h30 (relâche les dimanches et lundis). Bois de la Cambre, 1A Chemin du Gymnase - 1000 Bruxelles Réservations : 02 649 17 27 ou reservation@poche.be
PAROLES SUR QUATRE ROUES
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lus de 80000 taxis circulent dans les rues et avenues encombrées du Caire. Dans ces cafés du commerce sur quatre roues, on peut parler de tout, de la politique, de la religion et des femmes. De ses nombreuses courses à travers la ville, le journaliste, producteur et réalisateur Khaled Al Khamissi rapporte ces monologues et conversations avec un chauffeur de taxi mises en scène telles qu’il les a vécues ou romancées. Il s’en dégage un portrait vivant et plein de drôlerie de la société égyptienne. Dans tous les pays, le langage de la rue se partage entre les indignations, les jugements excessifs et l’intuition la plus fine. Ainsi, les parfait inconnus qui se présentent aux élections présidentielles face à Hosni Moubarak pour donner l’illusion d’une démocratie ne devraient pas s’étonner d’être comparés à des abrutis dont même leur mère n’a jamais entendu parler. Sans illusion, ces philosophes du bitume ont conscience qu’ils vivent dans une société où l’ordre et la loi sont élastiques et où les interdictions ne valent que pour ceux qui ont décidé de les appliquer. Et c’est avec une mauvaise foi et un humour omniprésents qu’ils tentent de lutter contre un sentiment d’impuissance. Mais ce qui se décante de manière inexorable de toutes ces tranches de vie, c’est le fossé de plus en plus infranchissable entre les pauvres et les nantis, les élites et le reste, alimentant une frustration qui ne pourra que déborder d’un jour à l’autre. e G.B. Taxi, Khaled Al Khamissi, Actes Sud, 192 pages, 18,80 e
COMMENT ON FABRIQUE UN ASSASSIN
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utoproclamée plus grande démocratie du monde, l’Inde est dans les faits un pays profondément inégalitaire. C’est aussi un vivier littéraire apparemment inépuisable de jeunes auteurs qui inscrivent leurs récits dans ce chaudron social bouillonnant. Histoire de mes assassins met en scène un journaliste d’investigation qui apprend un matin qu’il vient d’échapper à une tentative d’assassinat dans laquelle seraient impliqués cinq criminels venus des entrailles de l’Inde rurale. Le roman alterne les doutes et questionnements de la supposée victime avec l’exploration du passé de ces hors-la-loi. C’est une plongée hallucinante dans un environnement qui produit des assassins aussi sûrement qu’une poule pond un œuf. Propriétaires terriens et paysans sans terre, musulmans et hindous, élite anglophone et campagnards incultes, chaque différence et chaque division instituée deviennent une source de frustration, d’humiliation et de mépris. Marqués dès leur enfance par leur origine, ils trouvent dans la violence une échappatoire à leur cruelle condition. L’un apprend à manier le couteau comme un instrument de précision, un autre découvre les infinies possibilités du marteau, outil idéal pour fracasser les crânes comme pour briser les os. Pour d’autres, faute de mieux, la prison ou les toits de la gare de Delhi feront office d’école de la vie. En suivant le parcours de ces assassins et miséreux anonymes Tarun Tejpal leur rend l’humanité que la société leur dénie. Seul petit bémol au roman, c’est qu’en contraste avec ces portraits saisissants, les relations conflictuelles du journaliste avec sa maîtresse et celles, pourtant assez drôles avec son maître à penser, paraissent bien insignifiantes. e G.B. Histoire de mes assassins, Tarun J. Tejpal, Buchet-Chastel, 592 pages, 25 e
Libertés ! Décembre 2009 15
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Bougie rustik bleue 7€
Bougie fleurie bleu gris 8€
Bougie fleurie rose 8€
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Bougie parfumé à l’orange F 3 1 6 Bougie parfumée à la pomme F 3 1 5 Bougie parfumée à la vanille F 3 1 7 Bougie parfumée aux épices F 3 1 8 Bougie rustik bleue F 1 3 1 Bougie rustik fleurie bleu gris F 0 6 6 Bougie rustik fleurie rose F 1 4 2 Participation aux frais postaux et administratifs Pour soutenir Amnesty, je fais un don complémentaire de MONTANT TOTAL en euros
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