Les réseaux sociaux

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Les réseaux sociaux Anaïs Lacombe



Les réseaux sociaux Anaïs Lacombe École supérieure d’art des Pyrénées, site de Pau, DNAP design graphique et multimédia 2012.



Sommaire Introduction

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I / DU RÉSEAU AU RÉSEAU SOCIAL Qu’est-ce qu’un réseau ? 9 Origine et évolution d’un réseau social

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II / REPRÉSENTATION DES RÉSEAUX SOCIAUX Arbre généalogique

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Premiers essais de représentation d’un réseau social Les réseaux en photographie Design d’information Conclusion

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Bibliographie

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Repères

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Introduction [1] J’inclue dans le design graphique la photographie et le multimédia.

Depuis plusieurs années, je me questionne sur la façon dont se crée un réseau social. Le fait d’avoir dans un cercle d’amis des groupes de personnes aux personnalités variées, différentes les unes des autres m’intrigue. Ce mélange complexe de relations me fascine. Un réseau social est en perpétuel mouvement, il change, se transforme, s’agrandit ou bien se réduit selon nos rencontres, nos expériences, notre vécu. Au cours de mes études artistiques, cette question du réseau social est apparue dans plusieurs de mes réalisations. J’ai essayé par le biais de différents médias (photographie, édition) de représenter cette arborescence de relations qui entoure chacun d’entre nous. Ainsi, il me semblait évident de poursuivre et de développer mon projet personnel autour des réseaux sociaux. De nos jours, la notion de réseaux sociaux est très souvent associée aux réseaux en ligne comme Facebook, Twitter, MySpace, Msn…, mais elle ne se réduit pas seulement à cela. Je considère que l’origine de tout réseau social, le premier, est le cercle familial qui après se scinde en plusieurs sphères sociales. En tant qu’étudiante en design graphique, je voudrais aborder les réseaux sociaux d’un point de vue graphique [1]. Mon intention est de présenter ici en quoi et comment le design graphique peut permettre d’appréhender les réseaux sociaux. Nous explorerons l’histoire du mot réseau jusqu’à son extension en réseau social. Nous parlerons de la représentation des réseaux sociaux à travers le temps.

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I / DU RÉSEAU AU RÉSEAU SOCIAL Qu’est-ce qu’un réseau ? [2] Jean Nicot, Le Thresor de la langue françoyse, tant anicenne que moderne, Paris, chez David Douceur, libraire juré, 1606. [3] Dictionnaire de l’Académie française, Paris, chez la Veuve de Jean-Baptiste Coignard, 1694.

Avant d’aborder les réseaux sociaux, il nous faut d’abord définir ce qu’est un réseau. La notion de réseau est apparue au XVIIe siècle, dans la langue française, avec le mot réseul qui est défini en tant que « tisseure de fil faite à mailles, dont les filets, rets, poches, bourses et tirasses à prendre poissons, connils, cailles et autres oyseaux sont faits » dans Le Thresor de la langue françoyse [2] de Jean Nicot. Ce terme vient du latin retis qui signifie entrelacs de lignes. Il désigne un tissu dont les chasseurs se servaient comme d’un piège (rets) ou les femmes pour retenir leurs cheveux (résille). Dès la fin du XVIIe siècle, le mot français réseul se transforme et devient rézeau, et enfin réseau. Dans la première édition du Dictionnaire de l’Académie française [3] un réseau est un « ouvrage de fil ou de soye, fait par petites mailles en forme de rets  ». Puis au XVIIe siècle toujours, le mot réseau se généralise dans le langage du textile pour nommer l’entrecroisement des fibres. Au XVIIIe siècle, la notion de réseau va être utilisée dans un autre registre que celui du textile, le registre médical. Celui-ci va s’approprier cette notion pour désigner l’appareil sanguin, et par extension le système nerveux. Dans le même temps, au milieu du XVIIIe siècle, une nouvelle signification vient s’ajouter à la notion de réseau : la topographie. L’abbé La Caille utilise ce terme pour expliquer le dispositif qui lui a permis de réaliser la carte du ciel austral dans les années 1750. Au XIXe siècle le mot réseau est utilisé pour qualifier l’ensemble des chemins, des routes, puis des voies ferrées. Un sens nouveau vient enrichir ce mot, celui de la circulation. Ainsi, le mot réseau n’a cessé de s’étendre à différents registres depuis celui du textile, il s’est étoffé, s’est développé avec son temps. Il ne se restreint plus à définir un seul objet. Il signifie plusieurs notions, selon son usage : l’entrelacement, la circulation, 9


la connaissance, la représentation topologique… Le langage courant s’empare aussi du mot réseau et lui donne une nouvelle définition. Ainsi un réseau désigne des ensembles complexes de relations entre des personnes. Cette nouvelle définition est utilisée à partir du milieu du XIXe siècle. Cependant, on l’emploie de manière péjorative : le réseau en tant que société secrète, organisation clandestine. Il faudra attendre que les sciences sociales s’approprient la notion de réseau pour modifier sa connotation. Aujourd’hui, le mot réseau a conquis de nombreux autres champs d’application et il s’est enrichi de nouvelles significations, notamment avec le développement de l’informatique et des nouveaux moyens de télécommunication. On l’utilise en économie et en gestion, pour les relations publiques, en sciences, en informatique, en médecine et sciences naturelles, en géographie et urbanisme, en logistique et transport, en télécommunication et en sciences sociales, en sciences humaines. Ainsi, on parle d’entreprise en réseau, d’organisation en réseaux, de réseau urbain, routier, ferroviaire, aérien, fluvial, réseau d’égout, réseau électrique, réseau informatique, jeux en réseaux, téléphonique ou encore de réseaux sociaux. Origine et évolution d’un réseau social Le philosophe et sociologue allemand Georg Simmel (1858 – 1918) est considéré comme le précurseur de l’analyse des réseaux sociaux. Au début du XXe siècle, il aborde de nombreux travaux par la sociologie. Selon Simmel, l’objet élémentaire de la sociologie est l’étude des « formes sociales » qui découlent des relations entre les individus, et pas les individus eux-mêmes. Pour lui, la sociologie est « la science des formes de l’action réciproque » [4]. Michel Forsé, en 2002, reformulera cette définition par « la science des structures des relations sociales » [5]. À travers ses diverses études, Simmel tente de saisir les formes sociales à l’échelle des relations entre les individus. 10

[4] Georg Simmel, Sociologie. Essai sur les formes de socialisation, Paris, PUF, 1908. [5] Michel Forsé, « Les réseaux sociaux chez Simmel : les fondements d’un modèle individualiste et structural » in L. Deroche Gurcel et P. Watier (dir), La Sociologie de Georg Simmel, Paris, PUF, 2002.


[6] Georg Simmel, Les Pauvres, Paris, PUF, 1908 (allemand), 1998 (français).

Ses travaux traitent de nombreuses expressions de structures sociales: l’art, la religion, l’amour, le mensonge, l’étranger, l’argent… Par exemple, dans son étude intitulée Les Pauvres (1908), il ne considère pas la pauvreté comme étant un attribut de la personne. Pour Simmel, c’est une caractéristique relationnelle entre ceux que l’on qualifie de pauvres et l’assistance sociale qu’ils reçoivent. Simmel en parle en ces termes : « Les pauvres, en tant que catégorie sociale, ne sont pas ceux qui souffrent de manques et de privations spécifiques, mais ceux qui reçoivent assistance ou devraient la recevoir selon les normes sociales. » [6]. Il affirme que c’est la forme spécifique des relations sociales qui engendre les différentes catégorisations des individus. Une idée en totale contradiction avec la conception traditionnelle des relations à cette époque. Ainsi se définit la théorie relationnelle de Simmel. Pour résumer, Simmel étudie les formes sociales des relations, et pas le contenu de ces relations. Ces formes sociales naissent des interactions entre les individus. Cependant, il affirme aussi que ces formes sociales obtiennent une certaine autonomie, et que par conséquent, elles forment le cadre de ces interactions et participent à les façonner en retour. Bien que Simmel n’ait jamais employé le terme de réseau dans ses études, il peut être considéré comme le fondateur de la sociologie des réseaux, et le précurseur de l’analyse des réseaux sociaux.   La notion de réseau social est apparue pour la première fois dans un article de l’anthropologue britannique John A. Barnes (1918 – 2010), paru en 1954. Il est membre du département d’anthropologie sociale de l’Université de Manchester. Il est le premier à introduire cette notion dans les sciences sociales, qui étudient, entre autre, comment les relations construisent, façonnent les comportements individuels, et comment ces comportements agissent sur la création des structures sociales. Son article, publié dans Human Relations, porte 11


sur une étude sociale d’une petite ville de 4600 habitants, Bremnes, située sur une île de la côte Ouest de la Norvège. Son objectif est de mettre en évidence l’organisation sociale d’une petite communauté, en étudiant l’ensemble des relations que ses membres entretiennent entre eux. Pour son analyse, il différencie en trois champs sociaux la communauté : le premier correspond à l’organisation politique et territoriale, le second au système industriel, et enfin le dernier englobe l’ensemble des relations informelles entre chaque individus, connaissances, parents, amis ou voisins. Ce troisième champ est sans frontière, c’est pourquoi John Barnes utilise la notion de réseau social pour le définir. De cette étude vont se dégager certaines propriétés propres au réseau social. Il remarque que dans cette population étudiée, chaque membre peut être indirectement relié à un autre par une chaîne de quatre relations d’interconnaissance maximum. Une propriété que Stanley Milgram va corroborer avec son expérience du petit monde dont on parlera un peu plus loin. John Barnes constate que le réseau des relations informelles ne se limite pas à la population étudiée. Il en conclut que « l’ensemble de la population est pris dans un filet serré de parenté et d’amitié qui non seulement lie les uns aux autres tous les habitants de l’île, mais qui les relie aussi à leurs parents et amis dispersés dans toute la Norvège, et effectivement à travers toute la planète » [7]. Il établie donc l’hypothèse que nous sommes tous reliés les uns aux autres. Un réseau social désigne donc des ensembles d’individus et les relations qu’ils entretiennent les uns avec les autres. Si on en croit John Barnes, on peut considérer que l’étendue des réseaux sociaux est sans limite. En théorie, ils sont donc infinis, ils ne connaissent pas de barrière. Cependant son expérience ne le prouve pas, elle le suppose. C’est ce que le psychologue social américain Stanley Milgram (1933 – 1984) va tenter de démontrer avec son expérience du petit monde. Pour cette expérience, un agent de change de Boston 12

[7] John Barnes, « Class and Committees in a norwegian Island Parish », Human Relations, 7, 1954.


[8] A. Rapoport et Y. Yuan, « Some experimental aspects of epidemics et social nets », in M. Kochen (dir), The Small World, Norwood, Ablex Publishing Company, 1989.

a été choisi comme individu-cible et trois groupes ont été créés, chacun composé d’une centaine de personnes, et constitué aléatoirement : un par des habitants de Boston, les deux autres par des habitants du Nebraska, l’un ayant la spécificité de réunir des personnes ayant des actions. Le protocole est simple, chaque participant reçoit un dossier qui décrit l’expérience et donne l’adresse, la profession et le nom de l’individu-cible. La mission de chacun est de réussir à transmettre ce dossier par la poste, soit directement s’ils connaissent personnellement l’individu-cible, soit à des connaissances personnelles qu’ils pensent susceptibles d’atteindre l’objectif, directement ou par le biais de connaissances. 217 personnes ont accepté de participer sur les 296 sélectionnées, et ont envoyé le dossier à une connaissance. Au final, seuls 64 dossiers sont arrivés à destination chez l’agent de change de Boston, à l’aide de chaîne de relations sociales de différentes longueurs. La longueur moyenne était de 5,2 intermédiaires. Stanley Milgram arrive presque au même chiffre que John Barnes. Le concept du « petit monde » va donner naissance à un autre concept, celui des « 6 degrés de séparation », dont la théorie fut établie en 1929 par le hongrois Frigyes Karinthy, qui ne l’expérimenta pas. Il suppose que deux individus, choisis au hasard parmi les citoyens américains, sont reliés en moyenne par une chaîne composées de six relations. Cependant, ces études ont été menées aux États-Unis, pas à l’échelle mondiale. Ainsi, on peut considérer les États-Unis comme un gigantesque réseau social, mais qui exclut les autres pays. Certaines simulations, à l’échelle planétaire, mentionnent qu’il suffit de « 10 ou 12 liens de connaissances pour mettre en relation n’importe quel individu avec n’importe quel autre (le terme connaissance signifiant ici : connaître et être connu de vue et de nom) » [8]. Des expériences contemporaines via Internet ont corroboré ces résultats. Celles-ci concluent qu’il suffit de très peu d’intermédiaires pour connecter n’importe quel individu à un autre par le biais du web. 13


Une étude traitant, entre autre du sujet du petit monde, a été publiée par Facebook en novembre 2011, en partenariat avec l’Université de Milan. Elle se base sur un échantillon de 721 millions de personnes (soit la totalité des utilisateurs du réseau social à ce moment-là). Chaque individu est relié en moyenne par une chaîne de 4,74 relations. La création des réseaux en ligne a joué un rôle dans la diminution du nombre d’intermédiaires, mais qu’entend-on exactement par réseau en ligne ? De nos jours, nombre d’entre nous ne pourrait plus se passer des réseaux en ligne. En tête de liste, nous trouvons Facebook et MySpace. De nombreux autres sites de réseaux en ligne existent, chacun ayant sa spécificité propre et son public visé : Twitter, Qzone (Chine), Habbo, Bebo, Skyrock, Copainsdavant, Meetic, MSN, LinkedIn ou encore World of Warcraft (jeux en réseau)… Nous sommes envahis par les réseaux en ligne et nous les avons adoptés. Ils mettent à notre disposition un espace personnel de présentation de soi, dans lequel nous pouvons mettre ce que nous voulons : informations personnelles, photos… C’est ce que l’on appelle un profil. On peut accéder aux profils des autres utilisateurs, selon certaines conditions, et ainsi échanger, partager, établir de nouvelles relations avec les autres membres… Je vais prendre comme exemple Facebook, car c’est le réseau en ligne que j’utilise au quotidien. Pour moi, ce réseau en ligne est un moyen de garder contact avec des amis qui vivent loin et que je ne vois pas souvent. Il m’a permis de reprendre contact avec d’anciens camarades de classe. Sans pour autant leur parler, je peux suivre leur parcours par le biais de leurs posts sur leur mur (page personnelle accessible par tous). Je m’en sers aussi pour remplacer les sms ou les e-mails. Je n’ai qu’une utilisation très limitée de Facebook, contrairement à certains de mes amis qui étalent leurs vies sur leurs murs. Chacun l’utilise comme il l’entend. Après avoir analysé ma liste d’amis Facebook, à l’aide d’un questionnaire que j’ai établi, j’ai remarqué que la totalité de mes amis sont des 14


personnes que je connais personnellement. Je n’ai aucun amis dont la relation aurait commencé sur Facebook. Ce site permet d’entretenir des relations à distance, de garder contact. Je ne considère pas ce site comme créateur d’amitié, ni de relations. De plus, certaines personnes ont plus de mille amis, mais que représente ce chiffre ? Je ne pense pas que ces personnes les connaissent tous personnellement, cependant ce chiffre représente l’ensemble de leurs relations personnelles ou informelles. Pour moi, Facebook est un nouveau moyen de communication, comme le téléphone, qui a l’avantage d’être gratuit. Grâce à ma liste d’amis Facebook, je peux visualiser mon réseau social. Cependant, tous mes amis ne l’utilisent pas, donc cette liste d’amis ne peut représenter la totalité de mon réseau social. Par conséquent, je ne limiterai pas mes recherches graphiques aux réseaux sociaux en ligne. Comme je l’ai introduit précédemment, j’estime que le cercle familial est notre premier réseau social. Celui-ci va s’étendre, se diversifier, se diviser en plusieurs groupes en fonction de notre vécu, de nos rencontres. On peut citer plusieurs cadres sociaux parmi lesquels chaque individu passe normalement et qui lui permettent de se socialiser, le plus important de tous étant l’école. On y passe au moins 12 ou 15 années de sa vie, plus si on fait des études supérieures. C’est le premier endroit où l’on noue des relations avec les autres. Il y a aussi le cadre sportif, ou les associations, les repas de famille, les soirées, puis plus tard le cadre professionnel. La vie est création de relations, positives ou négatives, qui enrichissent notre réseau social. C’est ce perpétuel mouvement des réseaux sociaux que je veux tenter de représenter graphiquement.

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II / REPRÉSENTATION DES RÉSEAUX SOCIAUX Arbre généalogique Puisque je prends le cercle familial comme origine de tout réseau social, il semble évident de commencer par la première représentation graphique existante de celui-ci : l’arbre généalogique. Cette métaphore végétale, pour désigner les relations filiales entre les membres d’une même famille, prend racine à l’Antiquité. Les romains ornaient leurs murs des portraits de leurs ancêtres, ceux-ci étaient reliés entre eux par des stemmata (sortes de guirlande) ou des rubans. On peut considérer ces rubans comme les précurseurs des rameaux ou branches qui symboliseront plus tard les liens de parentés dans les arbres généalogiques. On retrouve cette métaphore végétale dans les textes romains dans lesquels on parle des racines, des branches de la famille. Pour évoquer l’évolution de la famille, on compare le corps de l’homme à un arbre : son sang représente la sève, ses membres les branches de l’arbre. À l’origine, la généalogie est réservée aux clercs de l’église, aux moines. Cette discipline sert tout d’abord la religion, puis la politique. En tout premier lieu, elle permet de transmettre les généalogies bibliques et l’enseignement religieux. C’est aussi un moyen d’éviter les mariages consanguins (XIIIe siècle), d’affirmer sa légitimité au pouvoir politique ainsi que de prouver son noble lignage pour revendiquer des droits privilégiés grâce à la représentation de son ascendance. Les graphiques ou schémas illustrant les liens familiaux et datant de l’antiquité, sont appelés au IXe siècle arbre de droit même si leurs formes sont géométriques et non végétales. C’est entre le Xe et le XIIe siècle qu’on voit apparaître les premières représentations graphiques de généalogies bibliques (et quelques généalogies impériales). Elles sont assez schématiques et ne précisent pas les liens de parentés ou d’unions : le sens de lecture est descendant et en colonnes (Fig. 1 et Fig. 2). Entre 1061 et 1068, vont naître les généalogies non bibliques, entre autre 16

Fig. 1. Arbre généalogique datant du Moyen-Âge.

Fig. 2. Arbre généalogique datant du Moyen-Âge.


Fig. 3. Une représentation de l’Arbre de Jessé.

Fig. 4. Arbre moral, extrait de l’Arbor scientiae de Raymond Lulle, 1515.

celles des Mérovingiens, des Carolingiens et des Capétiens, qui seront dessinées à l’abbaye Saint-Aubin d’Angers. Il y aura peu de représentations visuelles de généalogies jusqu’au XIVe siècle. Le précurseur de l’arbre généalogique date du Xe siècle et s’intitule l’arbre de Jessé, dont il y a eu de multiples illustrations (Fig. 3). C’est une représentation de la généalogie du Christ partant du corps de Jessé. Elle s’inspire des prophéties d’Isaïe extraites de l’Ancien Testament. L’utilisation d’un décor végétal et le sens de lecture ascendant, jusque là descendant, font de lui « l’ancêtre » des arbres généalogiques. C’est vers 1300 que la notion d’arbre généalogique que l’on utilise aujourd’hui est adoptée, mais cette représentation végétale ne s’imposera qu’à partir du XVIe siècle, avec l’imprimerie qui facilitera sa reproduction et sa diffusion. Avant sa domination, plusieurs autres représentations ont vu le jour, inspirées par les métaphores et coutumes de l’Antiquité : le corps humain, la maison de famille ou encore les chaînes, rappelant les rubans reliant les portraits. Il existe d’autres types d’arbres comme les arbres d’affinité, de consanguinité ou de connaissances (Fig. 4). Les premiers montrent les relations nouées par des alliances, des mariages, les seconds détaillent les relations familiales de sang, et les derniers classent diverses connaissances comme les vices et les vertus, les sciences… Du XVIIe au XIXe siècle, la généalogie est de plus en plus utilisée par les nobles, pour prouver leur ascendance, et cette discipline devient un métier à part entière. Elle se codifie, et un système de numérotation des ancêtres pour les généalogies ascendantes est créé en 1590 par l’autrichien Michel Eyzinger (1530 – 1598). Cette méthode est reprise par le généalogiste Jérôme de Sosa en 1676, et va se propager en 1898 grâce au généalogiste allemand Stephan Kekulé von Stradonitz (1863 – 1933). Aujourd’hui universellement reconnue, cette méthode s’appelle la numérotation de SosaStradonitz. L’héraldique va avoir ses propres représentations, cela complète et enrichit la restitution graphique généalogique. 17


C’est au XIXe siècle que la généalogie s’émancipe de la noblesse et devient accessible à tous. À partir de ce moment-là, les arbres généalogiques vont se développer en de multiples formes, comme les schémas, les diagrammes, les tableaux, les graphes ou encore sous forme de liste. Il n’existe pas de normes mais des conventions à respecter afin que tout le monde puisse comprendre un arbre généalogique. De nos jours, c’est un outil de communication qui se doit d’être clair et lisible. Ainsi, les arbres généalogiques sont devenus plus graphique et moins végétal. Beaucoup de logiciels, comme Hérédis, nous permettent de faire de la généalogie et nous proposent diverses représentations d’arbre généalogique, comme les roues généalogiques (Fig. 5 et Fig. 6). On peut aussi réaliser des généalogies « imaginaires » de nos idoles ou héros de romans, ou encore s’en servir pour expliquer l’histoire d’un produit. Cette méthode est souvent pratiquée en médecine avec la généalogie en génétique. L’arbre généalogique est donc la première représentation du réseau social familial. Il se décline sous plusieurs formes et sur plusieurs sujets. Rien ne nous empêche de l’utiliser pour visualiser l’ensemble de notre réseau social par exemple. De multiples usages de l’arbre généalogique sont encore à explorer et de nouvelles représentations de celui-ci restent à imaginer, à inventer. Premiers essais de représentation d’un réseau social En dehors de l’arbre généalogique, d’autres systèmes de représentation des réseaux sociaux se sont développés, notamment avec Jacob Moreno (1889 – 1974) philosophe et médecin psychiatre d’origine roumaine. En 1934, il publie dans Who Shall Survive les principes, les méthodes, les enjeux et les résultats de ce qui nomme la sociométrie, dont il est le fondateur. Son article sera traduit en français en 1954 et s’intitulera Les fondements de la sociométrie. La sociométrie de Moreno découle d’une expérience qu’il a menée 18

Fig. 5. Modèle roue ascendante, logiciel Hérédis.

Fig. 6. Roue généalogique 11 générations, logiciel Hérédis.


[9] Jacob Moreno, Who Sall Survive ?, 1934, traduit en français sous le titre Les fondements de la sociométrie, Paris, PUF, 1954.

Fig. 7. Sociogramme d’une classe d’élèves de 11 à 12 ans.

à l’institut de rééducation de Huston, où il était directeur de recherche. Cette expérience vise à étudier les affinités existantes entre les 506 pensionnaires, répartis dans 16 pavillons, séparant les jeunes filles noires des jeunes filles blanches. « Le critère proposé aux jeunes femmes fut celui de leurs sympathies et de leurs antipathies à l’égard des autres membres de la collectivité : on leur demandait de dire avec lesquels elles aimeraient ou n’aimeraient pas vivre en commun dans la même maison », ce choix étant limité à cinq. Ce test a révélé un réseau social relationnel invisible en apparence, et très différent de l’organisation des jeunes filles dans leurs pavillons d’habitations : certaines se sont choisies exclusivement entre elles, mais beaucoup se dispersent dans les autres pavillons. C’est avec ce test que Moreno invente la sociométrie. Le test sociométrique classique fonctionne sur le même principe que l’expérience avec les jeunes pensionnaires de Huston. Moreno définit la sociométrie comme étant un « instrument qui étudie les structures sociales à la lumière des attractions et répulsions qui se sont manifestées au sein d’un groupe » [9]. C’est un des premiers systèmes mis en place pour analyser des réseaux sociaux et la psychologie sociale. C’est une méthode de mesure des relations affectives à l’intérieur d’un groupe de gens. Moreno élabore un système lui permettant de visualiser les données recueillies par les tests sociométriques : le sociogramme (Fig. 7). Celui-ci est une représentation graphique qui tente d’organiser les données relationnelles collectées afin de visualiser la position de chaque individu et ses choix, pour mettre en évidence et observer la structure des « courants sociaux » étudiés. Un sociogramme suit quelques règles simples : les individus sont symbolisés par des points dans un plan, et les relations de choix ou de rejet par des flèches dirigées vers celui qui est choisi ou rejeté. Moreno évoquera la notion de réseau à la fin des Fondements de la sociométrie : « Nous avons découvert que les courants ne franchissent pas au hasard les lignes du groupe et parfois même celle de la collectivité, ils dépendent de structures plus 19


ou moins permanentes qui réunissent les individus en de larges réseaux. » [10]. Il est le premier à proposer une étude empirique de la notion de réseau. Ces sociogrammes, pas toujours très lisibles avec toutes leurs flèches, vont inspirer de nouvelles tentatives de représentation des réseaux sociaux.   Je vais aborder trois développements de représentation graphique des réseaux sociaux. Deux d’entre eux vont être fondamentaux pour l’avancement de la méthodologie de l’analyse des réseaux : la théorie des graphes et l’application de l’algèbre linéaire aux données relationnelles. La théorie des graphes ne date pas d’hier, elle remonte au XVIIIe siècle avec les travaux du mathématicien Euler (1707 – 1783), et notamment les jeux mathématiques se basant sur des problèmes de chemins, de déplacements qu’il faut résoudre avec des graphes. On doit au mathématicien König (1884 – 1944) le premier ouvrage sur la théorie des graphes. De nombreux mathématiciens vont l’utiliser pour leurs propres études, recherches traitant des relations entre les individus. Ces graphes nous permettent de visualiser graphiquement les réseaux de relations. De plus, on peut mesurer et classer dans ces graphes des propriétés de structures relationnelles, dont je n’aborderai pas les différents concepts, théorèmes d’algorithmes dont je n’ai pas la maîtrise. Voici ci-contre (Fig. 8) trois sociogrammes d’un même graphe, illustrant un exemple simple de relations : le sociologue A cite les sociologues B et C, le sociologue B cite les sociologues A, D et E, le sociologue C ne cite personne, D cite E, et E cite C. Chaque sociologue est symbolisé par un sommet, et chaque citation par un arc orienté (flèche) de celui qui cite vers celui qui est cité. Les graphes peuvent être orientés ou non et signés par un + ou un – notant la nature des relations, ou encore valués. La disposition des sommets, les distances et la longueur des arcs n’ont pas de signification particulière. C’est une méthode plus élaborée et plus claire du sociogramme révélant les réseaux de relations, et leur nature. 20

[10] op. cit. p. 17.

Fig. 8. Trois sociogrammes alternatifs d’un même graphe d’ordre 5.


[11] Pierre Mercklé, Sociologie des réseaux sociaux, Paris, Éditions La Découverte et Syros, 2004.

Fig. 9. Matrice d’adjacence d’un graphe orienté non valué d’ordre 5

Cet exemple est tiré de Sociologie des réseaux sociaux [11] de Pierre Mercklé. Un autre domaine des mathématiques va venir compléter et améliorer la théorie des graphes, il s’agit de l’algèbre linéaire et du calcul matriciel, qui vont d’une certaine manière échanger la représentation par l’information. Moreno, dans les années 1930, s’est essayé à la représentation de ces tests sous formes de matrices, pour finalement adopter les sociogrammes. Leo Katz (1914 – 1976) soutient l’utilisation des matrices plutôt que celle des sociogrammes. Le principe consiste à représenter un graphe (ensemble de sommets et de relations entre ces sommets), par une matrice carré, appelée « matrice d’adjacence ». Cette matrice est un tableau de chiffres, comportant autant de colonnes que de lignes, et chaque ligne correspond à un sommet du graphe (Fig. 9). Cette matrice est de terme général mij. Par convention, mij = 1 si il y a une relation de i vers j, dans le cas contraire mij = 0. Il existe plusieurs façons de représenter cet exemple avec les matrices. Les matrices permettent de calculer plus facilement qu’avec la théorie des graphes la densité d’un graphe ou le degré d’un sommet. Avec le développement de l’informatique dans les années 1950 – 1960, les matrices prirent le pas sur les sociogrammes, permettant de réaliser des graphes plus complexes que notre exemple. Ce sont les années 1970 qui voient le couronnement de cette technique. Ainsi, les graphiques mathématiques sont une autre façon de représenter les réseaux sociaux. Enfin, évoquons brièvement les graphiques de Lévi-Strauss représentant les différents systèmes de parenté recensés dans les sociétés dites « primitives » au XIXe et début du XXe siècle par les ethnographes. Toutes ces recherches, études, articles sont publiés dans un livre intitulé Anthropologie structurale, publié en 1958. Dans un de ces chapitres, Lévi-Strauss explique que la structure de parenté la plus simple repose sur quatre termes : frère, sœur, père, fils, 21


« unis entre eux par deux couples d’oppositions corrélatives et tels que, dans chacune des deux générations en cause, il existe toujours une relation (affective) positive et une relation négative ». Lévi-Strauss illustre ses recherches par des schémas (Fig. 10). Ceux-ci symbolisent les relations existantes entre un frère, son beau-frère, son neveu (les triangles) et sa sœur (le cercle) dans différentes sociétés. « Le signe + représente les relations libres et familières, le signe – les relations marquées par l’hostilité, l’antagonisme ou la réserve » [12]. Le signe = désigne une relation mutuelle, et le signe ± la réciprocité. Ce sont des graphiques spécifiques aux recherches de Lévi-Strauss, recherches que je ne détaillerais pas.

[12] C. Lévi-Strauss, Anthropologie structurale, Paris, Plon, 1958.

Lac Kutubu. - patrilin

Les réseaux en photographie L’outil photographique nous permet de visualiser un réseau social autrement qu’avec des graphiques ou des chiffres. Il personnifie d’une certaine manière le réseau social, met des visages dessus. Je vais présenter ici, quelques travaux photographiques qui sont des références pour mes propositions autour du réseau social. Lors d’une exposition intitulée Portraits de famille à l’Espace Écureuil à Toulouse (2010), j’ai découvert le travail d’Emmanuelle Murbach. C’est une artiste photographe française née en 1969. Son travail s’articule autour des thèmes de la rencontre, de l’identité, de la famille et du temps qui passe. Lors de cette exposition elle présentait sa série Familles modèles (Fig. 11). Tous les trois ans, elle prend en photo les sept mêmes familles. Ces photographies jouent sur le recto / verso : famille de face, famille de dos. Elle nous dévoile la structure et l’évolution de ces sept familles dans le temps. Elle joue avec les codes familiaux et nous plonge dans l’univers de ces personnes. Je trouve que c’est une façon originale d’illustrer différents cercles familiaux, et leur évolution.

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Fig. 10. Formes d’avunculat, formes de filiation et systèmes d’attitudes, LéviStrauss.

Fig. 11. Familles modèles, Emmanuelle Murbach.


Suite à cette rencontre avec le travail d’Emmanuelle Murbach, j’ai recherché d’autres références possibles pour mon projet. Ainsi, j’ai déniché les mises en scène familiales de Véronique Ellena, photographe française née en 1966. C’est aux gens ordinaires et à leur quotidien que s’intéresse Véronique Ellena dans ses séries de photographies, telles que Les Dimanches ou Les Grands Moments de la Vie (1997). Elle cherche à révéler et sublimer les détails de notre quotidien, à conférer une force poétique à ces petits riens de la vie. Elle construit ses images à partir de mises en scène soignées où les figurants, qui sont le plus souvent des amis ou de la famille, jouent des fragments de la vie quotidienne (Fig. 12). Fig. 12. Les Grands Moments de la Vie, Véronique Ellena, 1997.

Fig. 13. Patrick and Teri on their wedding night, Nan Goldin, 1987.

Dans un autre genre de représentation du réseau social par la photographie, le travail de Nan Goldin m’a interpelé. Nan Goldin est une photographe américaine née en 1953. Son travail photographique est indissociable de sa vie, elle entame son œuvre en photographiant sa famille, très proche de l’album de famille par sa technique et ses sujets (Fig. 13). Elle considère ce médium comme un moyen de garder les traces de la vie, de se constituer une seconde mémoire. Elle n’a aucun tabou, ces photos évoquent des sujets comme les fêtes, la drogue, le sexe, la violence… bien que son travail ait évolué depuis les années 1980 pour se diriger vers des ambiances moins destructrices. On est assez loin des photographies de Véronique Ellena ou d’Emmanuelle Murbach. Cependant, c’est le concept que je tiens à retenir ici : se servir de la photographie pour garder une trace de sa vie. Ainsi, on peut voir l’évolution de son réseau social, de ses rencontres, de ses pertes, de son vécu. Actuellement, dans le cadre de sa saison de printemps, intitulée De vous à moi, Le Village (site d’expérimentation artistique), situé à Bazouges-laPérouse, propose différentes expositions autour de notre manière d’habiter. Trois membres du collectif BIP (Antoine Chaudet, Bruno Elisabeth et Richard Louvet) réalisent une de ces expositions, intitulée 23


La Ronde. À travers trois projets photographiques, ils vont explorer le lien social. Les protocoles photographiques d’Antoine Chaudet et de Richard Louvet m’intéressent particulièrement. Le premier rencontre les habitants de Bazouges-la-Pérouse, Rimou et Saint Rémy-du-Plain en suivant l’itinéraire effectué par le boulanger lors de sa tournée de livraison. Il a ainsi réalisé neuf photographies, entre portraits et mises en scène du quotidien, avec les habitants qui ont bien voulu participer à son projet (Fig. 14). Le second présente 11 portraits de Bazougeais qu’il a réalisés en suivant un protocole simple. Celui-ci consistait à demander à chaque participant de lui présenter la personne suivante à photographier à la seule condition que celle-ci ne fasse pas partie de la même famille, ni qu’elle exerce le même métier. Son portrait de départ est celui du maire du village. Grâce à ce procédé, il a mis en évidence le réseau social de ce village, ou tout au moins une partie de ce réseau social (Fig. 15). Toutes ces références ont inspiré mon propre processus photographique. Je vais tenter de réaliser une arborescence photographique de mon réseau social, avec comme point de départ une photographie, mise en scène, de ma famille. Chaque personne sera re-photographiée avec son cercle social, qui lui-même sera repris en photo avec son propre cercle social, et ainsi de suite. Je pense que la photographie est un médium propice à représenter les réseaux sociaux.

Fig. 14. La Ronde, Antoine Chaudet, 2012

Design d’information Pour finir, je me suis intéressée à la sémiologie graphique de Jacques Bertin (1918 – 2010), cartographe français, et au design d’information, discipline créée dans les années 1970 par Edward Tufte, né en 1942, professeur américain à l’Université de Yale. La sémiologie graphique est une discipline qui sert à transcrire graphiquement un ensemble de données. Il s’agit de traiter ces données afin de révéler l’information d’ensemble recherchée, et de la communiquer 24

Fig. 15. Portrait du maire de Bazouges-la-Pérouse, La Ronde, Richard Louvet, 2012.


[13] Robert Klanten Data Flow : Design graphique et visualisation d’information, Paris, Thames & Hudson, 2009. [14] David Mccandless, Datavision, Paris, Robert Laffont, 2011. [15] Sandra Rendgen, Julius Wiedemann, Information Graphics, Paris, TASCHEN France, 2012.

Fig. 16. Flocking Diplomats 04, Catalogtree, sept. 2008.

par une image graphique construite de manière à mieux comprendre cette information. La sémiologie graphique s’est imposée comme un outil de traitement graphique de données, notamment en géographie pour réaliser les cartes. Le design d’information n’est pas en reste. Ces deux disciplines puisent l’une dans l’autre. Le design d’information permet de structurer, de mettre en forme graphiquement des données, cependant c’est l’information qui doit donner vie au graphique. Cette discipline est utilisée dans divers champs d’application comme la cartographie, l’identité visuelle, la signalétique. Les représentations les plus basiques de l’information sont les camemberts et les graphiques à bâtons, créés par l’écossais William Plyfair, né en 1942. Le design d’information a évolué depuis ces fameux camemberts, il s’est diversifié. Grâce aux différents champs du design graphique, le design d’information a connu de nombreuses innovations graphiques, plus ou moins fonctionnels. Les livres Data Flow [13], Datavision [14] et Information Graphics  [15], entre autre, répertorient de nombreux exemples. Les informations peuvent être organisées de façon chronologique, spatiale, par catégorie, ou encore hiérarchisées. Parmi tous ceux qui pratiquent le design d’information, je souhaite présenter quelques réalisations du studio de design hollandais Catalogtree, fondé par Joris Maltha et Daniel Gross en 1999. Ce studio crée des images originales et inventives à partir de données statistiques. Par exemple, ils ont réalisé une série d’affiches révélant les violations de parking des diplomates entre 1998 et 2005. Pour chaque affiche, ils utilisent un procédé de représentation différente. Dans l’image ci-contre (Fig. 16), chaque photographie représente une violation de parking d’un diplomate. Plus la photo est grande, plus le diplomate a commis d’infraction. J’ai aussi recherché des représentations existantes des réseaux sociaux ou des réseaux en ligne qui pourraient m’inspirer. Par exemple, Vincenzo Cosenza et Nick Sigler de Mashable traitent, chacun 25


à leur manière, de l’utilisation mondiale des réseaux sociaux. Le premier se sert de la cartographie et des codes couleurs pour légender sa carte. Chaque couleur représente un réseau social. Cette carte nous indique lesquels sont les plus utilisés de par le monde. Cependant, Vincenzo Cosenza ne nous donne aucune donnée, aucun chiffre (Fig. 17). Alors que le second, en utilisant aussi la carte, nous transmet des informations chiffrées. La carte sert de repère, de support mais ne représente pas le graphique. Nick Sigler cible dix pays, dont il a recueilli les données. De chaque pays part un trait relié à un graphique en forme de cercle. Chaque graphique classe les différents réseaux sociaux utilisés dans le pays, du plus populaire au moins visité, à l’aide de pourcentages. Le réseau social en ligne Facebook arrive en tête de ces graphiques dans 8 des 10 pays étudiés (Fig. 18). David Vincent illustre la démographie des réseaux sociaux en ligne de façon plus classique, avec des diagrammes en cercle, en barres ou encore en bâton. Pierre di Sciullo s’essaye à la représentation des arbres généalogiques des habitants de la cité Pierre Sémard au Blanc-Mesnil sous forme de table généalogique. Lui aussi se sert d’une carte sur laquelle il dispose ses informations généalogiques, avec des traits se reliant les uns aux autres selon les données. Toutes ces représentations sont de possibles sources d’inspiration pour créer des représentations graphiques.

Fig. 17. World map of social networks, Vincenzo Cosenza, juin 2011.

Fig. 18. How the World Uses Social Networks, Nick Sigler de Mashable.

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Conclusion Cela fait de nombreuses années que l’on étudie les réseaux sociaux. Ils fascinent et des recherches sont toujours menées pour les analyser, les comprendre. Ces réseaux complexes aux multiples embranchements sont disséqués afin d’essayer de définir leurs limites, leurs contours, d’explorer leur fonctionnement. Des expériences sont réalisées pour tâcher de vérifier si cette impression que les réseaux sociaux sont sans frontières est vraie. En parallèle à ces diverses études, la question de la représentation des réseaux sociaux est posée. Ainsi se sont développées différentes recherches graphiques pour les analyser avec une vision nouvelle, les aborder d’un autre point de vue. Les différents outils du design graphique ouvrent de nombreuses possibilités de visualisation. Ils permettent d’appréhender les réseaux sous différentes formes. Ces formes peuvent être médiatisées de différentes manières, en recourant à l’édition aussi bien qu’à l’animation, par exemple. Le design graphique nous permet de réinventer continuellement les représentations déjà existantes. À l’instar des réseaux sociaux, les possibilités de représentation que nous propose le design graphique semblent sans limites.

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Bibliographie MERCKLÉ Pierre, Sociologie des réseaux sociaux, Paris, Editions La Découverte, Collection Repères : Sociologie, 2011 (réédition). MERCKLÉ Pierre, Les réseaux sociaux, les origines de l’analyse des réseaux sociaux, CNED, ens-lsh, 2004. LAZEGA Emmanuel, Réseaux sociaux et structures relationnelles, Paris, Que sais-je ?, n° 3399, PUF, 1998. DURYE Pierre, La généalogie, Paris, Que sais-je ?, n° 917, PUF, 1979 (réédition) CLEMENT Marie, Le guide Marabout de la généalogie, Verviers, Marabout, 1984. Dossier « Pour ou contre Facebook », Courrier International n° 1022 du 3 au 9 juin 2010, p. 34 – 39. DUCOURTIEUX Cécile, « Facebook lance sa propre messagerie pour affermir son emprise sur le Net », Le Monde, 17 novembre 2010, p. 15. DUCOURTIEUX Cécile, Contre-enquête Économie : « Les smartphones et les tablettes dénaturent-ils le Web ? »…, Le Monde, 17 novembre 2010, p. 16 – 17.

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Repères

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Arbor pro agnatis pros cognatis, Fernand Berenger, 1552.

Représentation par le corps humain.

La carte des sciences, e Raymond Lulle, fin XIII siècle

Représentation de la généalogie du Christ.


Schéma explicatif de la numérotation Sosa-Stradonitz.

Les XXXII Quartiers paternels et maternels de Monseigneur le Dauphin, e Robert Bénard, XVIII siècle.


Différentes représentations d’un arbre d’ascendance avec le logiciel Hérédis.


Sociogramme d’une classe d’élèves de 11 à 12 ans, Moreno, 1934. (critère : s’asseoir à côté des élèves choisis – 2 choix au maximum et les lignes barrées indiquent les choix réciproques).


Opérations sur les matrices d’adjacence, Pierre Mercklé, 2004.

Trobriand. - matrilin

Tcherkesses. - patrilin

Siuai. - matrilin

Tonga. - patrilin

Formes d’avunculat, formes de filiation et systèmes d’attitudes, Lévi-Strauss, 1958.


Familles modèles, Emmanuelle Murbach,2010, Espace Écureuil, Toulouse, exposition Portraits de famille.


Les Dimanches, VĂŠronique Ellena, 1997.

Les Grands Moments, VĂŠronique Ellena, 1997.


All By Myself, Nan Goldin, 1992 –1996.

Gotscho kissing Gilles, Nan Goldin, 1993.


La Ronde, Richard Louvet, 2012.


Flocking Diplomats 02, Catalogtree, septembre 2008.


Flocking Diplomats 06, Catalogtree, octobre 2008.


Premier plan schématique du métro de Londres, Henry C. Beck (dit Harry Beck), 1933.

Web Trend Map, studio tokyoïte Information Architects, 2006.


World map of social networks, Vincenzo Cosenza, juin 2011.


,

La Table généalogique Pierre di Sciullo, 2006.



Colours and Culture David McCandless, 2009.


Cosmic 140, Information Architects, 2010.


The Paper Pie Chart, Alexandra Muresan, 2010.


Types de visualisation de l’information, Edward Tufte.


Recherche l’amour en ligne « Je veux… », sources : Match.com, Guardian Soulmates, Matchmakers.com, Outpersonals.com, Datavision p. 72 – 73.



,

Avatars source : Obijan.com, forums World of Warcraft, Datavision p. 168.


,

Les types de relations sentimentales Datavision p. 128.


X « est le nouveau » noir, une carte des clichés, Randall Szott, Datavision p. 24 – 25.






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