MÉMOIRE LE CIMETIÈRE DE MARSEILLEVEYRE Un parcours dans la nature Anaïs Vigneron Master «les pensées du projet, l’architecture comme discipline» Guy depollier Directeur d’étude Benoit Adeline ENSAG 2016
Sommaire
SOMMAIRE 4-7
INTRODUCTION
LE CADRAGE COMME THÈME DE RECHERCHE 8 - 11 12 - 13 14 - 17
La photographie, la peinture et le cinéma Reconnaître un cadrage Les catégoriser
LA CALANQUE DE MARSEILLEVEYRE COMME SITE 18 - 23 24 - 31 32 - 35
Le cadrage de l’archipel du Riou Travail de la forme par rapport au site Un programme de cimetière à l’origine de la forme
LES PARTI-PRIS DU PROJET DE CIMETIÈRE 36 - 37 38 - 39 40 - 41 42 - 43
Le cadrage entre deux volumes - Le cimetière de Marc Barani Le principe de columbarium - Le cimetière d’Aldo Rossi Le retour à la nature du cimetière - Le cimetière de César Portela La symbolique du projet à travers son aspect sculptural - Le mouvement artistique du Land Art
LE CIMETIÈRE DE MARSEILLEVEYRE 44 - 49 50 - 55 56 - 59
Un programme fragmenté Un parcours au milieu de la nature La matière, la lumière et de la symbolique
60 - 61
CONCLUSION
62 - 63
BIBLIOGRAPHIE
64 - 65
WEBOGRAPHIE
68 - 69
REMERCIEMENTS
4 Photographie du Salk Institute de Louis Kahn Ă La Jolla en Californie,1965.
Introduction
INTRODUCTION
La ville de Marseille a été choisie comme terrain d’expérimentations dans le cadre du PFE. Notre master 2, encadré par l’enseignant
Louis Kahn à La Jolla en Californie.
Guy Depollier, se compose en deux
L’analyse par le plan, la coupe, les
phases. Une première est basée sur
maquettes ainsi que des lectures de ces
la recherche, l’expérimentation et la
projets m’ont amené à un thème précis
réflexion que nous pouvons aborder de
de recherche : le cadrage en architecture.
deux manières : à partir d’un site ou d’un thème. Celui-ci étant issu de la sélection
Afin de cerner au mieux ce que
de trois bâtiments.
signifie le cadrage en architecture, j’ai étudié différents domaines comme la
La deuxième phase est l’approfondisse-
peinture, la photographie, le cinéma
ment de ces recherches par la conception
où la notion de cadrage était présente.
d’un projet qui découle de ce thème.
Ces recherches artistiques m’ont permis
J’ai choisi d’aborder l’année en approfon-
d’appréhender ce sujet avec un regard
dissant un thème plutôt qu’un site. Une
différent. J’ai pu par cette réflexion en
introspection sur mon travail d’étudiante
donner une définition et une liste non
à l’ENSAG a permis de me questionner
exhaustive de leurs caractéristiques.
sur mes goûts architecturaux. J’ai pu constater que j’étais sensible à différents
Après cette phase de recherche plus
thèmes comme la contemplation, le
théorique sur le cadrage, j’ai débuté la
parcours et l’environnement du projet.
phase de projet en choisissant un sujet à cadrer et par la même occasion un site.
J’ai choisi trois projets puisés dans mes souvenirs, dans mes visites ou
Mon premier rapport à cette ville fut ce
mes voyages, j’ai cherché à quel
trajet où l’on passe d’une ville dense,
moment j’avais eu cette expérience
très urbaine, bruyante, pleine d’activités
de la contemplation. J’ai finalement
jusqu’à un lieu où la route prend fin, où
choisi le Pavillon du Bareïm de Anna
tout est calme : on aperçoit alors la mer
Holtrop à Milan, la médiathèque
et les îles du Riou. La ville se laisse oublier
Albert Camus de l’atelier Fernandez et
peu à peu pour n’entendre que les vagues
Serres à Carnoux et le Salk Institute de
et le vent.
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Introduction
Soudain, la nature nous encercle totalement. Marseille est loin. Ici la nature reprend toute sa force, c’est le parc des calanques. C’est avec ce visage de Marseille que j’ai voulu travailler : le retrait, le calme, la nature, le grand territoire. C’est depuis
Ces références m’ont chacune orientée
la calanque de Marseilleveyre que je
sur des principes forts, caractéristiques
choisis de cadrer l’archipel du Riou.
du projet que je souhaitais développer.
L’approche du projet s’est faite princi-
Ces projets m’ont amené à pousser mes
palement par un travail de maquette
recherches sur l’histoire des cimetières,
et de volumétrie à partir du site, de sa
leurs évolutions, leurs enjeux et leurs
topographie, de son rapport à l’eau et au
problématiques actuels. Chaque cimetière
relief ainsi qu’aux cadrages sur les îles.
raconte son histoire, il change de visage
Très rapidement ce travail a donné une
en fonction de l’endroit où il se trouve,
forme forte et assez plastique qui a été
il évolue et correspond à une époque.
un fil conducteur pour la suite de mon travail. Cette esquisse a évolué grâce
Le projet de cimetière pour Marseilleveyre
à plusieurs programmes : un centre de
est composé à partir d’un parcours issu de
recherche, puis des logements, mais c’est
plusieurs échelles, celle de la ville et celle
à nouveau les caractéristiques propres
de la calanque. Ce parcours est basé sur
du lieu : sa topographie, ses accès,
un programme fragmenté et composé de
son statut de parc naturel qui m’ont
plusieurs éléments forts le caractérisant:
arrêté sur le choix d’un programme de
la salle de commémoration et les
cimetière, un programme assez singulier
monolithes accueillant les columbariums.
me poussant rapidement à approfondir des recherches et des références.
L’espace du cimetière a été pensé à partir de la symbolique de la mort, c’est
Trois références ont marqué la suite
à dire par un travail sur la lumière, le
de mon travail : Le cimetière d’Aldo
parcours, la matérialité, le rapport à la
Rossi à Modène en Italie, celui de
nature où chaque élément du programme
César Portela à Fisterra en Espagne et
vient traduire un sentiment fort et un
l’extension du cimetière de Roquebrune-
ressentit particulier à ces moments
Cap-Martin en France de Marc Barani.
difficiles de la mort d’un proche.
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Tableau de Matisse, La Desserte : harmonie en rouge de 1908. On observe parfaitement la coupure intentionnelle de la chaise et du tableau sur la gauche et de la robe de la dame Ă droite.
Le cadrage comme thème de recherche
A. LE CADRAGE COMME THÈME DE RECHERCHE 1/ La photographie, la peinture et le cinéma
Mes premières recherches sur le cadrage ont été assez compliquées, car j’avais l’impression que tout était un cadrage et donc rien n’en était vraiment. Je me suis rendu compte que ce thème n’était pas si simple à maîtriser et que je devais
de nombreux artistes « Certains peintres,
l’appréhender par un autre domaine que
comme Degas et Manet, auront
celui de l’architecture pour le comprendre.
tenté de sortir du cadrage imposé par la peinture conventionnelle:
Je suis donc allée voir ce qu’était un cadrage dans le milieu de la peinture, du cinéma ou encore de la photographie, c’est à dire dans l’art en général. En peinture la définition du cadrage 1 Wikipedia, l’encadrement, [en ligne] adresse URL: https:// fr.wikipedia.org/wiki/ Encadrement_(art) 2 Alexandre Tylski, Cinéma & peinture: Dans le sens des toiles [en ligne] Adresse URL: http://www. cadrage.net/dossier/ cinemapeinture/ cinemapeinture.html, ESAV/UTM, 2001. 3 MagasineN, Le Cadrage _ Les Leçons de Cinéma, [en ligne] Adresse URL: https://www.youtube. com/watch?v=lTNl6xYLGF, 2012
en coupant le corps des individus, des décors et des objets, rappelant la dureté de la photographie »2 Au cinéma le cadrage est tout aussi
correspond tout d’abord à l’action
important, « le cadrage c’est tout ce
d’encadrer «L’encadrement d’une
que vous voyez à l’image, le cadre a
œuvre d’art (peinture ou photogra-
plusieurs valeurs et plusieurs échelles
phie), pour la mettre en valeur et la
en fonction de ce qu’on veut montrer,
protéger est le moyen qui consiste à
celles-ci ont donc un but précis »3
l’entourer d’une bordure, qui en limite et explicite le cadrage défini par son cadre. Par métonymie, le mot-cadre se
Il y a d’ailleurs un métier pour ça au cinéma: le cadreur. C’est en photographie que la notion de
substitue au terme encadrement fait
cadrage est la plus facile à comprendre,
par la bordure »1 En peinture le cadre
car c’est le principe même de la photo. Au
est bien définit d’une part par l’objet,
final, le cadrage en peinture et au cinéma
le cadre, et d’autre part par la toile qui
est bien plus complexe, car il ne suffit pas
délimite déjà le champ possible. Cette
simplement de cadrer avec son objectif,
notion de cadre en peinture a fait réagir
bien d’autres éléments entrent en jeux.
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Photographie d’Henri Cartier-Bresson Magnum Photos.
Photographie de Raymond Depardon, Magnum Photos.
Le cadrage comme thème de recherche
11 Le cadrage s’opère par trois règles en photographie, la première étape pour cadrer est qu’il faut obligatoirement avoir choisi un sujet, ce sujet en photo va être choisi, car il nous fait éprouver des sentiments, une émotion, un questionnement, il nous fait réagir lors de son observation. La seconde étape c’est de trouver le placement pour prendre la photo, il faut que ce placement corresponde au meilleur point de vue pour observer le sujet. La troisième étape est de composer son image de façon à organiser l’espace dans le cadre pour que le sujet que l’on a sélectionné s’impose au lecteur. Photographier c’est l’action de cadrer un sujet grâce à un positionnement et une composition particulière de l’image. Ces trois règles peuvent être utilisées pour l’architecture et donc pour comprendre à quel moment nous sommes face à un cadrage dans une architecture.
Photographie de l’intèrieur de la Villa Malaparte de Adalberto Libera, 1937.
12
Photographie du jardin de la Villa le Lac de Le Corbusier, 1924.
Le cadrage comme thème de recherche
2/ Reconnaître un cadrage
« Voir, observer, penser »1 disait Serge Tisseron dans un texte sur la photographie. Ces trois verbes expriment bien l’état d’esprit de quelqu’un qui est face à une photographie ou on peut l’imaginer face à un cadrage dans un espace. Un cadrage n’est donc pas choisi au hasard, il est là pour une raison, elles peuvent être multiples, elles permettent d’exprimer des sentiments, de réfléchir à ce qu’on observe. D’après un cours donné par la professeure Anne Faure sur « le cadrage comme outil de perception ». On peut à nouveau comprendre la fonction propre du cadrage comme élément qui met en valeur quelque chose par le fait d’en dissimuler d’autres. « Le cadre en peinture et en architecture a pour fonction de délimiter et de matérialiser un espace. Il s’agit d’un vide qui existe par les proportions et la 1 Serge Tisseron, la mysère de la chambre claire photographie et inconscient, champs arts, 1996. Page 10 citation d’Auguste Sander. 2 Anne Faure, dans son article sur : le cadrage comme outil de perception : la villa Lemoîne de Rem Koolhaas, [en ligne] Adresse URL: http://www.grenoble. archi.fr/pdf/cv/faureanne-le-cadragecomme-outil-de%20 perception.pd
forme que lui donne le cadre. En marquant la limite, le vide se convertit en chose. Le cadre agit comme une barrière au champ optique en délimitant une fenêtre qui concentre le regard sur un espace visuel précis. »2 On se demande alors à partir de quand exactement y a-t-il un cadrage. Le cadrage existe, à l’opposé du simple percement, lorsqu’il y a une volonté d’orienter le regarde du visiteur, cette volonté existe, car on souhaite montrer un sujet précis, mais aussi et c’est aussi important d’où on souhaite montrer ce sujet. On revient aux trois règles, le cadrage est une volonté de choisir un sujet, de choisir un emplacement soit un point de vue et finalement une volonté d’aménager l’espace par n’importe quel dispositif architectural.
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Maquettes schématiques des cinq grandes catégories de cadrage en architecture. l’aménagement mobilier, le mur épais, le plafond bas, l’estrade ou le socle, les deux volumes.
Le cadrage comme thème de recherche
3/ Catégoriser les cadrages
Mes premières tentatives de catégorisation du cadrage en architecture m’ont permis de comprendre que le cadrage était autre chose qu’un simple percement. J’ai pu améliorer cette analyse et j’ai défini cinq grandes catégories. On trouve donc des catégories plutôt liées à une composition de l’espace ou un dispositif architectural : le cadrage issu d’un aménagement mobilier, le cadrage issu du mur épais qui devient mobilier, le mur épais et le plafond bas, le socle ou l’estrade, la vue entre deux murs ou entre deux bâtiments. Ces cinq thèmes sont une base pour reconnaître un cadrage, mais ils peuvent ensuite être déclinés en d’autres dispositifs ou assemblés les uns avec les autres. De cette analyse plus juste du cadrage on peu ensuite l’étudier à une plus grande échelle qu’uniquement celle du bâtiment. Je veux parler de l’échelle urbaine, le cadrage est aussi une notion importante de la ville et de nombreux dispositifs existent pour obtenir un cadrage sur la ville. On retrouve la catégorie du cadrage entre deux bâtiments, il y a aussi le principe du porche, de l’arche, de la porte urbaine qui débouche souvent sur une place ou un grand axe. Les plus belles villes comme Paris on fait un gros travail de cadrage en manipulant différents dispositifs. On peut faire référence à l’axe historique qui donne la vue sur l’alignement de la défense, à l’Arc de Triomphe, des Champs-Élysées, à l’obélisque jusqu’au Musée du Louvre. Après cette phase de recherche sur le cadrage, j’ai voulu Citation d’après une correction du professeur et architecte Guy Depollier.
mettre en pratique la création d’un cadrage dans un contexte « Le cadrage participe à l’installation d’un projet dans un lieu comme lien fort au contexte »1
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O DEPOLLIER
rer des règles qu’il y a la voon regard sur drage donne ment particuque j’ai repré-
hérence avec mettre en vahe par sa to16 e, ce sont les eilleveyre qui est un endroit y a plusieurs el, le bord de ble des catérécis par une Par ces diffés calanques.
LE CADRAGE
—
27 11 2015 — STUDIO DEPOLLIER
ANAÏS VIGNERON —
Mes recherches sur le cadrage mon amené à m’inspirer des règles du cadrage en photographie. C’est à dire que lorsqu’il y a la volonté de cadrer il y a aussi une vonlonté d’orienter son regard sur un sujet précis depuis un emplacement choisi, le cadrage donne lieu à une composition de l’espace, à un aménagement particulier. On retrouve plusieurs catégories de cadrages que j’ai représenté en coupe et en schéma. Le cadrage ne peut pas être étudié sans être en cohérence avec un contexte, un lieu, l’action de cadrer permet de mettre en valeur le site. Pour ce theme j’ai choisi un site très riche par sa topographie, ses points de vue, sa richesse naturelle, ce sont les calanques et plus particulièrement la baie de Marseilleveyre qui est placé en face de l’archipel du Riou. Ce contexte est un endroit idéale pour créer un parcours autour du cadrage, il y a plusieurs sujets à cadrer : l’archipel, la mer, la falaise, le ciel, le bord de mer, la flore, l’horizon, l’écume, la roche... L’ensemble des catégories de cadrages permettent de cadrer un sujet précis par une composition du cadrage à un emplacement choisi. Par ces différents exemples on peut découvrir ce lieu si riche des calanques.
J’ai voulu représenter les schémas de cadrage à partir d’un site choisi la calanque de Marseilleveyre. On retrouve plusieurs type de cadrage: 1 - cadrage du ciel 2 - cadrage à la hauteur du regard 3 - cadrage par le mobilier 4 - cadrage par la double peau 5 - cadrage par le mur épais qui devient une assise 6 - cadrage par le plafond bas
Le cadrage comme thème de recherche
pographie, ses points de vue, sa richesse naturelle, ce sont les calanques et plus particulièrement la baie de Marseilleveyre qui est placé en face de l’archipel du Riou. Ce contexte est un endroit idéale pour créer un parcours autour du cadrage, il y a plusieurs sujets à cadrer : l’archipel, la mer, la falaise, le ciel, le bord de mer, la flore, l’horizon, l’écume, la roche... L’ensemble des catégories de cadrages permettent de cadrer un sujet précis par une composition du cadrage à un emplacement choisi. Par ces différents exemples on peut découvrir ce lieu si riche des calanques.
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7 - cadrage en hauteur après un escalier 8 - cadrage depuis une mezzanine 9 - cadrage entre deux volumes
Croquis personnel, ma première intention était de cadrer l’archipel de Riou depuis la calanque de Marseilleveyre.
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Photographie de l’archipel du Riou vue d’en haut du site de la calanque de Marseilleveyre. Photographie aérienne du site de la calanque de Marseilleveyre.
La calanque de Marseilleveyre comme site
B. LA CALANQUE DE MARSEILLEVEYRE COMME SITE 1/ Le cadrage de l’archipel du Riou
Ma première approche avec le projet s’oriente rapidement sur le choix d’un site, en effet, je ne peux pas commencer un travail de projet théorique autour du cadrage si je n’ai pas de sujet à cadrer. Le sujet est d’ailleurs tout aussi important que le site. Mon choix s’est fait après ma première visite de la ville qui fut assez originale. J’ai en fait traversé depuis le nord jusqu’au sud la ville pour arriver « jusqu’au bout du monde » comme le disent les Marseillais, à la plage de la Anse de la Maronnaise. Mon premier rapport à cette ville fut ce trajet où l’on passe d’une ville dense, très urbaine, bruyante, pleine d’activités pour arriver dans un lieu où la route prend fin, où tout est calme. On voit la mer et les îles de l’archipel du Riou, on entend juste les vagues et le vent, soudain la nature nous encercle totalement. Marseille est loin, ici la nature reprend toute sa force, c’est le parc des calanques. C’est avec ce visage de Marseille que j’ai voulu travailler, le retrait, le calme, la nature, le grand territoire, j’ai choisi de cadrer l’archipel du Riou depuis la calanque de Marseilleveyre. Je cherchais donc un endroit accessible à pied ou par la mer, avec une topographie particulière où je pouvais avoir un espace en belvédère pour observer la totalité des îles et un espace de plage pour pouvoir accoster sans problème. J’ai finalement choisi la calanque de Marseilleveyre idéalement située en face des îles de l’archipel du Riou.
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La calanque de Marseilleveyre comme site Plan masse de l’état des lieux de la calanque de Marseilleveyre. Échelle 1/1000
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Maquette vue du dessus du sud de Marseille avec l’ensemble des calanques et l’archipel du Riou, échelle 1/20000.
Maquette vue en élévation du sud de Marseille avec l’ensemble des calanques et l’archipel du Riou, échelle 1/20000.
La calanque de Marseilleveyre comme site
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Maquette vue du dessus de la calanque de Marseilleveyre, échelle 1/1000.
Maquette vue en élévation de la calanque de Marseilleveyre, échelle 1/1000.
Photographie de mes notes personnelles, premiers croquis du principes de monolytes en tissu.
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La calanque de Marseilleveyre comme site
2/ Travail de la forme par rapport au site
Afin de commencer une phase de recherche autour de la forme, un travail assez théorique au début, je décide de travailler sur un programme de logement. Le premier positionnement se fait assez rapidement dans les hauteurs. C’est un tissu qui s’étend dans la longueur vers le bord de mer. Mes premières esquisses se font à partir d’une grille où plusieurs unités de forme rectangulaire 25
viennent se chevaucher pour créer des cadrages entre les bâtiments. Cette esquisse est l’occasion de travailler à deux échelles, celle du tissu avec les accès, les circulations, les espaces extérieurs et intérieurs communs puis à une plus petite
Il faut donc que je trouve un
échelle celle de l’unité d’habitation elle-
positionnement plus en rapport
même. J’imagine tout d’abord des unités
avec le site et à l’inverse un site plus
avec le thème du mur épais où les services
en rapport avec le cadrage et plus
et les cadrages viendraient se placer.
de richesse dans les cadrages.
Ce principe de nappe, de petits
J’ai donc revu mon positionnement à un
ensembles de plusieurs unités avec les
endroit moins pentu et plus arrondi par
murs épais vont rester tout au long
la forme du rivage, cet emplacement
mes recherches, c’est ensuite un travail
m’a permis de tracer un ensemble de
de placement dans la calanque, de
cercles issu du même centre à partir de
disposition à partir d’une trame, d’un
la courbe du rivage. C’est ensuite à partir
jeu de hauteur et de proportions.
de ce principe de plan concentrique où
Le positionnement par rapport à la grille
chaque cercle a le même écartement
pose un questionnement, en effet, on est
que je viens positionner chaque volume à
dans un système très linéaire et aléatoire
partir d’une règle précise d’écartement.
qui est trop restrictif, le cadrage dans cette
Ce principe va rester une règle de
esquisse perd énormément de valeur.
composition de la forme du projet.
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Photographies de la maquette de la première esquisse, vue en élévations et en plan, échelle 1/1000.
La calanque de Marseilleveyre comme site Plan d’étage de la première esquisse, échelle 1/500. Évolution de la première esquisse à partir d’une grille, placement des unités par rapport aux chemins existants.
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Photographie de la maquette de principe de positionnement, vue en élévations et en plan, échelle 1/1000.
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Photographies de la maquette d’essai de la deuxième esquisse, vue en élévations et en plan, échelle 1/1000.
La calanque de Marseilleveyre comme site Photographies de la maquette de la deuxième esquisse, vue en élévations et en plan, échelle 1/500.
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La calanque de Marseilleveyre comme site
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Photographies de l’évolution de la maquette avec le principe de mur épais et d’ouverture zénithale, vue en élévations et en plan, échelle 1/500.
32
Croquis de principe d’installation dans le site par rapport aux chemins existants, recherche de la circulation entre les diffÊrents monolithes.
La calanque de Marseilleveyre comme site
3/ Un programme de cimetière à l’origine de la forme
C’est cette dernière règle qui a marqué la forme de mon projet et définit un programme plus adapté à cette volumétrie.
à vis... Finalement ce lieu reculé, naturel
Comme je le précise au début, mes
et loin de toute activité doit conserver
premières pensées vont vers l’idée
toute sa sérénité et un programme plus
principale de la contemplation, donc le
en accord avec ces caractéristiques.
fait de s’arrêter un instant pour observer quelque chose, si je reprends cette idée
C’est le programme d’un cimetière
et que j’observe ma dernière esquisse,
qui a donc était perçu comme le plus
je peux penser le projet d’une manière
adapté. En effet, avec un programme
plus plastique, imaginer le projet à une
tel que celui-là le projet peut rester
autre échelle. L’idée qui ressort de cette
très simple, sans venir déformer la
dernière maquette c’est qu’il y a une vraie
nature plastique de cette forme.
force sculpturale, une image forte d’un enchaînement de monolithes tournés vers
C’est après une visite de la calanque
le large et formant un tissu sur ce site
de Marseilleveyre et une véritable
vierge. Une sorte de symbolique vient
analyse du lieu que je décide d’implanter
marquer ce projet et à ce moment-là je
définitivement le projet de cimetière au
pense qu’un programme de logement
croisement des deux chemins existants
viendrait dénaturer ce positionnement fort.
du site, sur cette légère pente qui suit
Il y a une citation de l’artiste Serra
la courbe de la montagne. C’est un
qui représente ma façon de voir mon
sentiment de calme, de sérénité et de se
projet sous un angle sculptural « La
trouver en communion avec la nature
dialectique de la marche et du regard
à cet endroit précis qui m’a confirmé le
dans le paysage, déclare Serra, constitue
choix de l’emplacement. Ce sont surtout
l’expérience de la sculpture ». Je cherche à
les accès existants, la végétation et la
faire un projet proche des caractéristiques
courbe de la topographie qui offrent une
de la sculpture, mais qui est malgré tout
magnifique vue en belvédère sur les îles
une architecture, un espace fonctionnel.
qui m’a confirmé le choix du programme
Le premier programme défini théori-
à cet endroit précis de la calanque.
quement était du logement, mais pour
C’est ensuite un travail de composition
répondre à ce thème il faut penser à
des éléments à partir du programme que
toutes les commodités autour, c’est-à-dire
je continue le travail autour de la forme
les fenêtres, les accès, l’électricité, les vis
et précise la volumétrie des monolithes.
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Maquette schématique du principe de parcours. En noir ce sont tous les chemins existants et l’intégration du débarcadère et de l’accueil restaurant au cimetière. Échelle 1/2000 Maquette de principe de l’installation des monolithes par rapport au dessin de plusieurs cercles. Échelle 1/2000
La calanque de Marseilleveyre comme site
35
Maquette de principe de l’installation des monolithes par rapport au dessin de plusieurs cercles. Échelle 1/1000
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Photographie de l’extension du cimetière de Roquebrune de Barani à Saint-Pancrace en France.
Les partis-pris du projet
C. LES PARTIS-PRIS DU PROJET 1/ Le cadrage entre deux volumes - Le cimetière de Marc Barani
Le principe du cadrage entre deux volumes est l’élément fort de ce projet qui en a fait une référence forte à l’extension du cimetière de Roquebrune de Marc Barani. Ce projet va me permettre ensuite de me poser la question des accès, comment me déplacer à l’intérieur de ces éléments fragmentés, lui y répond par ces escaliers pris entre deux murs qui permettent de faire un cadrage. Il y a ensuite la notion du cimetière paysager à laquelle je vais m’intéresser, cette référence a été pensée comme une promenade au milieu de la nature. En effet, si l’on analyse l’évolution des cimetières ils tendent de plus en plus à devenir des promenades, des parcs. Comme l’explique Alice Bialestowski dans son dossier sur les lieux funéraires « À cette mouvance générale portée sur l’attrait et la biodiversité de la nature, correspond également l’effacement progressif de la théâtralisation des cérémonies religieuses et de la dématérialisation consécutive du support tombal. Dans ces jardins funéraires, de plus en plus nombreux, loin de se cristalliser sur une parcelle privative, le recueillement semble davantage trouver sa place au sein d’un ressenti général, d’un parcours paysager où la présence de la nature les assimile à de véritables lieux de promenade.» 1 1 Bialestowski Alice, dossier - Les lieux funéraires, AMC, n° 215 mai 2012
C’est donc sur ce principe de « jardin funéraire » que j’ai souhaité penser mon cimetière, il est au milieu du parc des calanques et c’est une véritable promenade.
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Photographies du cimetière San Cataldo d’Aldo Rossi à Modène en Italie.
Les partis-pris du projet
2/ le principe de columbarium - Le cimetière d’Aldo Rossi
Le cimetière réalisé par Aldo Rossi à Modène a retenu mon attention sur l’élément qui semble unique dans le projet, ce cube percer de plusieurs trous.
1 Bialestowski Alice, dossier - Les lieux funéraires, AMC, n° 215 mai 2012 2 Bialestowski Alice, dossier - Les lieux funéraires, AMC, n° 215 mai 2012
Cet élément est en fait un ensemble de
viennent favoriser la hausse de la
columbariums placé dans les murs, le
crémation, les villes manquent de plus en
bâtiment est ouvert par le haut. C’est
plus de foncier, le prix d’un enterrement
ce principe d’élément unique qui faisait
dans une tombe est bien plus coûteux
référence à mon projet ainsi que l’idée
que la crémation et la location d’un
de l’ouverture zénithale. En revanche
columbarium, il représente donc aussi
le principe de mettre uniquement des
pour les familles de grosses économies.
columbariums m’a permis de pousser mes
Le principe de cimetière uniquement sous
recherches sur ce principe présent dans
forme de columbarium est très présent
tous les cimetières, mais peu connu.
en Italie, c’est une pratique culturelle et
C’est à nouveau dans le dossier - Les lieux
religieuse fréquente, en France on reste
funéraires écrits par Alice Bialestowski,
encore très ancré dans nos habitudes
que j’ai prix conscience de l’évolution
d’enterrer les morts, mais cette pratique
de nos cimetières et par la même
tant à évoluer. « En pleine mutation,
occasion la hausse de la pratique de la
les sites funéraires seront très
crémation. « En pleine mutation, les
différents d’ici à 20 ans et la tendance
nécropoles contemporaines adaptent
déjà amorcée à la végétalisation
leurs équipements à la crémation
s’accentue en grande partie du fait
et tendent à remplacer le modèle
de la pression démographique et de
du cimetière traditionnel par celui
la crémation des corps qui augmente
de parcs ouverts et paysagers dont
de 1% chaque année. En 2007,
les enjeux rattrapent ceux de la
près de 28% des obsèques étaient
ville. » « Bien qu’elle se banalise, la
concernées par cette pratique, un taux
crémation s’insère également dans
qui dépasserait les 50% à l’horizon
une réflexion plus large en apportant
2030.»2 Je prends donc le parti-pris de
un élément de réponse à l’impossible
faire un cimetière uniquement composé
étalement des cimetières qui rejoint
de columbarium, les urnes se trouvant
les préoccupations environnemen-
à l’intérieur des murs épais des unités
tales. »1 En effet, de nombreux éléments
fragmentées dans ce parc des calanques.
39
Photographie du cimetière de Finisterre de CÊsar Portela en Espagne.
40
Les partis-pris du projet
3/ Le retour à la nature du cimetière - Le cimetière de César Portela
La troisième référence est celle du cimetière de César Portela en Italie c’est « Un cimetière fait de petites structures, regroupées le long d’un parcours préexistant qui suit la pente de la colline, sans clôtures et avec l’étendue de la mer partout présente comme fond.»1 L’architecte a «renoncer aux
41
espaces clos et éliminé les barrières»1 César Portela a sur ce site fixé d’autres
C’est à travers un article de la revue le
limites, «celles qui caractérisaient
courrier de l’architecte sur le diplôme
l’ancien lieu de sépulture celtique : la
des étudiants Lidia Pardini et Sébastien
mer, le fleuve, la montagne et le ciel.»1 Cette référence à été très importante pour
1 Le cimetière de Finisterre en Galicie - César Portela, Floornature, [en ligne] Adresse URL: http:// www.floornature. eu/projets-maisonset-lieux-publics/ projet-le-cimetiere-de-finisterre-en-galicie-cesar-portela-4634/, 2005. 2 Lidia Pardini et Sébastien Ramirez, Diplôme - Cimetière, Le Courrier de l’Architecte, [en ligne] Adresse URL: http://www.lecourrierdelarchitecte.com/ article_1049, 2010.
Ramirez sur leur projet de centre funéraire, que j’ai compris cette problématique.
mon projet elle m’a permise de confirmer
« Autre point non négligeable :
mon esquisse d’un ensemble de mono-
l’espace des cimetières n’est pas
lithes répartie dans la pente face à la mer.
infini, à l’inverse du nombre de morts.
Ce projet est sans le vouloir très proche
Les cimetières des communes sont
de mon projet et m’a confirmé le choix
rapidement saturés et deux problèmes
de plusieurs partis-pris comme m’installer dans un parc naturel pour mieux retourner dans la nature, comme le choix de ne pas avoir d’enceinte à ce cimetière,
se posent : celui de la position même de l’enceinte, généralement rattrapée par la ville et, par conséquent, celui de
de choisir d’en faire une véritable
son extension et de la pertinence des
promenade dans le parc des calanques.
concessions à perpétuité. »2
Ce thème de l’enceinte dans les cimetières
À cette problématique je réponds par
est un élément important, c’est une façon
l’utilisation unique de columbarium
de faire qui tend à disparaître ou à évoluer
et par un travail de cimetière plus
pour répondre à plusieurs problématiques
vertical comme certains pays le
de l’étalement de la ville.
fond déjà pour leurs cimetières.
42
Croquis personnels des oeuvres : 15 Untitled Works in Concrete, Donald Judd Pierres relevĂŠes, Richard Long Observatory, Robert Moriss Double Negative, Micheal Heizer
Deplaced/Replaced, Michel Heizer Sun Tunel, de Nancy Holt Shift, Richard Serra
Les partis-pris du projet
4/ La symbolique du projet à travers son aspect sculptural - Le mouvement artistique du Land Art
Un élément m’a aussi intéressé et a marqué mon cimetière, avec la référence du celui de César Portela, c’est son lien avec le Land Art. J’ai fait de vraies recherches sur ce mouvement
notion d’échelle, souvent gigantesque, entraîne le corps dans un rapport
se retrouvent dans mon projet.
assez particulier avec l’œuvre, tout un
L’artiste renommé de ce mouvement
jeu d’échelle se met en place et est à
Richard Long tenait le discours suivant
la base du Land Art. Ce jeu d’échelle
par rapport au Land Art : « Les artistes
provoque chez le spectateur « un
utilisent les éléments de la nature
flottement existentiel », ce dernier
pour créer leurs œuvres. Ils inter-
perd ses repères, il est envahi par
viennent directement sur la nature.
l’œuvre. Sa perception de l’espace est
Ils veulent mettre en valeur la
chamboulée, il n’est plus seulement
mémoire et le passé intemporel des
spectateur, mais aussi découvreur.
lieux, essentiellement sauvages. »1
Il doit rentrer dans l’œuvre et il
Par ces mots, je retrouve tout à fait
la découvre en la parcourant, en
l’image d’un cimetière. En effet, la mort est un retour vers la nature, c’est aussi la question de la mémoire du défunt,
2 Richard Long, Artwiki, [en ligne] Adresse URL: http:// www.artwiki.fr/ wakka.php?wiki=RichardLong
ne fait plus qu’un avec celui-là. Cette
et certains thèmes plus symboliques
la symbolique de la mort et donc de
1 Richard Long, Artwiki, [en ligne] Adresse URL: http:// www.artwiki.fr/ wakka.php?wiki=RichardLong
« L’œuvre s’inscrit dans l’espace et
marchant à l’intérieur de celle-ci. De ce fait, il fait partie de l’espace-temps de l’œuvre. Étant donné que l’œuvre
du temps qui passe et ces thèmes
est réalisée dans la nature elle-même,
sont caractéristiques du Land Art.
elle est laissée en proie de celle-ci,
Il y a d’autres éléments qui sont proches
elle subira les changements de la
de ma démarche comme mon travail
nature. »2
de la matérialité, j’aimerais pouvoir
C’est exactement l’idée que je recherche
réutiliser la pierre blanche marbrière du
quand je laisse des éléments du
site pour construire ce cimetière ou du
programme ouvert en toiture avec
moins celle d’une carrière proche du site.
l’eau qui circule à l’intérieur. Certaines
Pour terminer, il y a la notion d’échelle,
symboliques du Land Art se retrouvent
ce cimetière fait référence à nouveau
dans ma démarche avec ce projet
aux paroles de Richard Long lorsqu’il dit
de cimetière ouvert à la nature.
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CIMETIÈRE CRÉMATORIUM
CIMETIÈRE CRÉMATORIUM
Le cimetière de Marseilleveyre
D. LE CIMETIÈRE DE MARSEILLEVEYRE
1/ Un parcours au milieu de la nature
L’un des partis-pris de ce cimetière est le fait de l’inscrire dans un parcours, de le placer au milieu de la nature. Ce parcours à plusieurs échelles tout d’abord celle de la ville et ensuite celle de la calanque. Le premier parcours commence par l’inhumation du défunt au crématorium de Saint-Pierre de la Réunion au centre de Marseille. Ensuite la famille et les proches du défunt vont se rendre en voiture jusqu’à la calanque de Callelongue tout au sud de Marseille. Depuis cette calanque deux choix sont possibles : Prendre un bateau qui les conduits directement dans la calanque de Marseilleveyre ou d’emprunter le chemin de randonné existant qui rejoint Marseilleveyre après une heure de marche. Ces deux accès expriment déjà la notion de parcours du cimetière, en effet, le recueillement des proches commence par ce petit voyage dans la nature un vrai moment de retour sur soi, de méditation et de contemplation du paysage. Une fois arrivé par bateau on emprunte le débarcadère, construit à cet effet, pour rejoindre la plage et rentrer dans l’espace d’accueil. Au bout de cet accueil, il y a le patio qui mène à des escaliers et au chemin existant de la falaise, au bout de celui-ci on arrive au croisement avec le chemin existant de la forêt et finalement au cimetière. Lorsqu’on arrive depuis la terre, soit depuis la randonnée, c’est plus simple, on arrive directement au croisement des deux chemins et à l’entrée du cimetière. À une plus petite échelle, celle du projet, le projet est organisé à partir d’un parcours qui suit les différents éléments du Carte des cimetières et du crématorium de Marseille, échelle 1/50000.
programme. Le visiteur va pouvoir suivre le chemin qui suit chaque columbarium et passe derrière le bâtiment, chaque monolithe a son entrée et une ouverture qui permet une vue sur les monolithes.
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Carte du parcours depuis le crématorium à la calanque de Callelongue, puis le parcours depuis Callelongue jusqu’à Marseilleveyre. échelle 1/50000.
CRÉMATORIUM SAINT PIERRE DE LA RÉUNION
CALANQUE DE CALLELONGUE
VOITURE BATEAU PIETON
CALANQUE DE MARSEILLEVEYRE
BATEAU PIETON
BATEAU PIETON
Le cimetière de Marseilleveyre
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Le chemin est voulu très simple et naturel, semblable aux chemins de terre existants de la calanque. Sur le parcours un cadrage différent sur le paysage se forme entre les columbariums. Arrivé en haut du cimetière on poursuit le parcours soit dans les jardins des souvenirs, qui sont des terrasses végétalisées en belvédère sur la calanque, ou on peut aller directement dans la salle de commémoration. Cette fois-ci on descend doucement le long d’une rampe attirée par un grand cadrage sur les îles. Ce parcours à travers le cimetière est voulu long et rude, il permet de prolonger ce retour sur soi, un recueillement au milieu de la nature et un dernier voyage pour le défunt et ses proches avant de rejoindre Carte du parcours depuis le débarcadère et le chemin de randonné, parcours à travers le cimetière. échelle 1/2000.
l’emplacement où déposer l’urne dans son columbarium. Ce long parcours à travers la ville et la calanque, l’eau et la montagne, est aussi un symbole de la mort qui ce veut être notre dernier voyage sur terre.
Jardins des souvenirs
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Salle de commémoration
Ensemble de columbariums
Accueil et restaurant Logement du gardien
Débarcadère
Plan masse ombré du cimetière Situation des éléments de programme. échelle 1/1500
Le cimetière de Marseilleveyre
Perspective du projet dans la calanque.
Le cimetière de Marseilleveyre
2/ Un programme fragmenté
J’ai souhaité que ce cimetière soit un
des informations sur les navettes pour aller
lieu pour tous les Marseillais, il n’est
à Callelongue et les chemins pour repartir
attaché à aucun culte si ce n’est celui
à pieds. Le patio est un espace intime
de la nature. Ce programme est voulu
avec un arbre pour faire de l’ombre et
fragmenté en plusieurs éléments.
des assises, c’est un espace tampon avant de monter au cimetière. Il a une surface
Débarcadère
de 75 m2 et pour le patio de 28 m2.
On trouve en premier un débarcadère
pour accoster plus facilement depuis
Le restaurant
un point de ralliement prévu au départ
Ce programme est une rénovation du
de la calanque de Callelongue avec
restaurant existant, il à été entièrement
l’organisation de navettes. Ce ponton est
reconstruit pour accueillir le point de
flottant, en bois, il est prévu autant pour
rendez-vous du cimetière et le logement
les plaisanciers que pour les visiteurs
du gardien. Le bâtiment est en béton brut
du cimetière. Il est voulu très long et
constitué à partir de granulats de la pierre
assez large pour que l’on puisse circuler
blanche marbrière des pierres de taille
dessus et s’y asseoir les pieds dans l’eau.
du projet, ce qui l’inscrit dans l’unité de la
Il a environ une surface de 100 m .
construction. La surface initiale du restau-
2
rant ainsi que sa terrasse ont été conserL’accueil
vées aussi on trouve une surface totale
Cet espace est relié au restaurant et
de 118 m2 et une terrasse de 158 m2.
permet aux personnes allant au cimetière de trouver un lieu de rassemblement
Le logement du gardien
avant de monter. C’est aussi un espace
Comme le cimetière est assez excentré
où l’on trouve de l’ombre, des assises et
et difficile d’accès, j’ai choisi de faire un
un point d’eau avec des toilettes. L’accueil
logement pour le gardien, il se trouve
est volontairement détourné de l’entrée
au-dessus du restaurant pour rassembler
du restaurant pour plus d’intimité pour
les points d’eau et d’électricité. Il y
les proches du défunt. Au même endroit
avait déjà un logement à l’étage du
on trouve aussi le bureau du gardien avec
restaurant donc j’ai souhaité conserver le
les registres que l’on peut consulter, il y a
programme. Il bénéficie d’une vue sur la
aussi des casiers pour que les visiteurs du
mer et la plage avec une terrasse privée,
cimetière viennent déposer leurs objets
c’est un bel espace en T2 assez généreux
personnels si besoin. On trouve ensuite
de 75 m2 et la terrasse fait 12 m2.
53
Perspectives d’ambiances extérieures du parcours entre les columbariums puis en haut dans les jardins des souvenirs. Perspective intérieure de la salle de commémoration.
Le cimetière de Marseilleveyre
Les monolithes / columbariums Ce sont les éléments majeurs du cimetière, ils sont ouverts sur l’extérieur et contiennent dans l’épaisseur du mur les columbariums en pierre. Les
y a trois terrasses soit une surface 84m2
proches vont déposer l’urne contenant
ces espaces sont aussi des belvédères
les cendres du défunt à l’intérieur et il
sur la calanque et on a donc une vue
sera placé ensuite une plaque en pierre
sur tout le cimetière depuis celles-ci.
avec îles inscriptions gravées. Pour que la pluie puisse s’évacuer, il y a un système
La salle de commémoration
de récupération de l’eau à la base du
C’est l’espace le plus important par sa
mur intérieur, l’eau est ainsi redirigée
taille et la dernière sur le parcours. On
vers l’extérieur du bâtiment. Ces unités
y arrive par la plus haute terrasse, on y
mesurent neuf mètres de long par six
descend par une grande rampe au bout
mètres de large et sont d’une hauteur
de laquelle il y a un cadrage sur les îles.
variable entre cinq et sept mètres, ils sont
La salle est ouverte en partie en toiture
construits entièrement en pierre de taille,
pour illuminer la falaise qui tombe à pic
il y a différentes proportions, mais avec
dans la salle et sur laquelle il y a toute
une taille de base de 0,6 m/ 1 m / 1,36
la journée une lumière différente. C’est
m. Il y a un total de dix monolithes soit
une salle où se retrouvent les proches du
une surface de 280 m2 contenant chacun
défunt pour lui faire un dernier hommage
114 columbariums soit une capacité
au milieu de la nature avant d’aller placer
d’accueil de 1140 urnes pour le cimetière.
ses cendres dans un columbarium ou de les déverser dans les jardins du souvenir.
Les jardins du souvenir
L’aménagement de l’espace est organisé
Ces terrasses sont attribuées dans les
par un long mur qui suit la rampe et se
cimetières à l’étalement des cendres du
retourne pour former une petite pièce et
défunt pour ceux qui le souhaitent. Ces
mourir contre la falaise. La salle principale
espaces sont délimités, car il est interdit de
a des places assises qui font face à la
déverser les cendres dans la nature pour
falaise et un hôtel. L’espace plus intime
des raisons hygiéniques. Ces terrasses
est le lieu de recueillement face à la
sont construites sur le même principe
falaise, où l’on peut allumer une bougie ou
que les monolithes accueillant les colum-
avoir une dernière pensée pour le défunt.
bariums, c’est-à-dire en pierre de taille
Cette salle de commémoration est elle
avec des murs d’un mètre d’épaisseur.
aussi ouverte directement à la nature et
Ces murs épais contiennent de la terre et
a un système de récupération de l’eau
on y trouve la végétation de la calanque,
lors des pluies qui coulent le long de la
assez dense pour avoir quand même le
falaise. La surface totale comprenant
sentiment d’être au milieu de la nature. Il
la rampe est de 270 m2 environ.
55
56
Photographie personnelle du Duomo de Naples, 2016. L’entrée dans ce lieu est très marquant par la splendeur de son plafond ainsi que par sa hauteur gigantesque. Notre regard est attiré par le haut.
Le cimetière de Marseilleveyre
3/ Un projet autour de la matière, de la lumière et de la symbolique
Dans ce projet j’ai accordé beaucoup d’importance à l’environnement de la calanque, aux matérialités et aux éléments
commémoration bien que ce ne soit
qui représentent ce lieu ainsi qu’a la
pas un lieu de culte. Lorsqu’on a perdu
symbolique forte d’un lieu comme le
un proche on est très ému et on a pas
cimetière. La salle de commémoration et
forcement envie de croiser le regard
les monolithes ont été les deux éléments
de quelqu’un, on respire un bon coup
forts du projet.
pour retenir ses larmes. Je pense que l’architecture d’un lieu peut répondre
Pour réaliser la salle de commémoration,
ou accompagner cet état d’esprit où
j’ai fait un travail plus particulier sur
l’on veut être uni avec ses proches, mais
ces espaces où l’on vit le moment très
tout de même se retrouver seul avec ses
difficile de dire au revoir à un proche.
pensées et se recueillir. Il faut donc selon
Lors d’un enterrement dans une église par
moi un espace imposant par sa hauteur
exemple c’est le même principe à chaque
ou sa surface, un dispositif lumineux
fois, l’entrée dans le monument est placée
intéressant par une lumière zénithale et
au centre, on arrive sur une belle hauteur
une différence entre l’espace du public et
et une lumière qui vient d’en haut, on lève
de l’orateur. L’individu doit savoir où aller,
donc la tête et on avance jusqu’au bout on
le chemin doit être logique et guidé par
se place d’un côté ou de l’autre. Ensuite
l’aménagement de l’espace, ça doit être
on trouve au bout de la promenade une
simple et efficace.
estrade un peu plus haute, cette estrade permet à tout le monde de pouvoir
C’est avec le travail de la rampe et
observer la personne qui parle et de
de l’ouverture zénithal qui illumine la
continuer à lever la tête. Être assis plus
falaise que j’ai tenté avec simplicité de
bas avec les fenêtres placées en haut du
répondre à ce type d’espace attribué
mur incite l’individu à lever la tête vers
à un sentiment plutôt qu’une religion.
le haut et à contempler le plafond, les
Encore une fois j’ai cherché à replacé
vitraux. On trouve soit une œuvre d’art
la nature comme élément central du
comme des fresques, des mosaïques,
projet, dans une église on lève la tête
des sculptures, soit un bel élément
pour voir les icônes, les vitraux, la lumière
architectural, une lumière particulière.
venue du ciel qui symbolise dieu, ici
Je pense donc que certains dispositifs
dans cette salle j’ai voulu que ce soit la
doivent apparaître dans ma salle de
nature qui soit mise sous la lumière.
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Photographie de Jerome Cabanel de l’ancienne carrière de Port-Miou qui donnait une pierre de taille blanche et dure, la Pierre de Cassis.
Le cimetière de Marseilleveyre
Le second travail important de ce projet est celui des monolithes qui accueillent les columbariums, j’ai souhaité rendre ces lieux imposant, majestueux tout en étant un simple travail de la matière et de la lumière. Ces éléments ont les murs très épais avec 1 mètre d’épaisseur et sont très haut pour protéger les visiteurs des regards, de la chaleur du soleil et les placer dans un espace intime. D’après Gille Perraudin « La pierre incarne, depuis que l’homme est sédentaire, le refuge, la protection » La pierre est donc très importante dans ma démarche, c’est un matériau naturel, solide, pérenne et qui respecte la nature, car il en est à l’origine. C’est dans le travail de Gille Perraudin que j’ai puisé cet intérêt et avec la ville de Marseille dont la plupart des bâtiments historiques qui la représentent sont en pierre de taille. De plus, je souhaitais utiliser un matériau local, la pierre blanche marbrière de Cassis. Dans leur construction ces monolithes n’ont besoin d’aucun autre matériau c’est uniquement un travail d’assemblage de pierres de taille de différents gabarits.
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60
Conclusion
CONCLUSION
Travailler sur un projet de cimetière était passionnant, plein de découvertes et donc de prise de position pour répondre au mieux à l’évolution de ces lieux qui traversent les générations. 61 Après des recherches sur le cadrage, sur la forme ainsi que sur le programme de cimetière, je suis arrivée à un concept fort imaginé dans la calanque de Marseilleveyre. J’ai développer un concept de cimetière très sculptural, constitué uniquement de columbarium qui s’arpentent à partir d’un parcours au milieu de la nature et donc sans limite véritable si ce n’est la montagne et la mer. Ce cimetière est un vrai retour à la nature pour les défunts et une réappropriation de ces lieux de recueillement pour tous. Ce cimetière est finalement un travail à plusieurs échelles, celle du grand paysage : de Marseille et des calanques, mais aussi à l’échelle du site de la calanque de Marseilleveyre : avec sa matérialité, sa végétation, ses chemins et ses constructions. Ensuite à l’échelle du détail constructif de chaque élément du projet et de leur matérialité. Le cimetière de Marseilleveyre tente de répondre par un concept fort aux évolutions des lieux de recueillement d’aujourd’hui. Ce cimetière s’inscrit donc dans un territoire, dans le parc national des calanques, dans la calanque de Marseilleveyre, dans la garrigue, sur les chemins de randonnée des calanques et dans la pierre blanche marbrière du site.
62
Bibliographie
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Je dédie ce projet de fin d’études, le cimetière de Marseilleveyre à mon grand-père Hubert Vigneron que j’ai malheureusement perdu pendant l’année de mon PFE. Lui qui aimait tant la nature et les voyages m’a malheureusement permis d’apporter beaucoup plus de sincérité dans ma démarche.
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Remerciements
Je remercie tout d’abord toute l’équipe enseignante de leur suivie et de la richesse de leurs enseignements. Je remercie tout particulièrement Benoit Adeline pour m’avoir guidé, rassuré et enseigné pour ce projet, j’ai adoré ces échanges toujours pleins d’énergie et très constructifs pour mon projet, mais aussi personnellement. Je remercie bien évidemment ma famille, qui m’a motivée, rassurée, soutenue et conseillée. Merci Nicolas pour ta douceur, Thomas pour tes conseils avisés en photographie, Cloé pour ton soutient et tes services précieux, papa pour tes conseils, Patrick pour ta gentillesse et surtout ma 69
petite maman pour tout finalement... Je remercie ensuite mes amis qui sont la deuxième chose la plus importante que l’ENSAG m’a donnée, après mon diplôme!
Je le remercie en dernier parce qu’il est le
Ces études étaient merveilleuses et dures
plus important, mon Paul. Mon collègue
à la fois, mais grâce à vous c’était plus
de travail, mon maître de l’architecture,
facile, c’était beaucoup de rire, de films,
mon voisin, mon meilleur ami et surtout
de voyages, de bon repas, de danses, de
mon amour.
karaoké, de bières...
Merci d’avoir été là depuis pratiquement
Merci Soline, Laure, Camille, Léa,
le début, tu m’as énormément appris,
Antoinette, Loïse, Alexandra, Charles,
conseillé, réconforté, tu m’as donné
Auguste, Flavien, Florent, Jules, Edward.
confiance en moi et en l’architecture que je fais, tu m’as fait voyager, rendu plus tolérante avec les autres et exigeante envers moi-même, tu m’as toujours poussé à faire mieux, tu m’as parfois bien énervé, mais souvent pour de bonnes raisons, je dois l’admettre (difficilement parfois) tu as souvent raison et pour ce projet de fin d’études tu as été comme toujours de bons conseils. Encore merci.