INDUS 23

Le journal

L’INDUS Le journal de l'APIEP

Dossier L’industrie pharmaceutique vue d’ailleurs

Retour de stage Actus & Innovations

N° 23

L’INDUS N° 23 > Sommaire

L’ÉCOLE DE MANAGEMENT SPÉCIALISÉE DANS LES INDUSTRIES DE LA SANTÉ

Sommaire novembre 2018 p. 5

Édito.

p. 4

Dossier : L’Industrie Pharmaceutique vue d’ailleurs

La professionnalisation au cœur du programme : L’objectif de cette formation est de permettre aux étudiants d’intégrer l’industrie dans les secteurs du médicament, du matériel médical ou encore des biotechnologies avec la double compétence recherchée par les recruteurs. Jusqu’à présent spécialisée en Management et Marketing, l’IMIS propose une nouvelle spécialisation en Affaires Réglementaires depuis 2017.

Domaines de formation

p. 11

• Management • Marketing ou Affaires Réglementaires • Industries de la Santé • Industries Pharmaceutiques • Biotechnologies

Vu d’ailleurs p. 5 L’industrie pharmaceutique en Inde p. 7 L’industrie de santé en Arabie Saoudite : attentes et réalités p. 11 Le renouveau de l’industrie pharmaceutique russe p. 13 L’industrie pharmaceutique à l’Armée p. 15 Comment constituer le futur écosystème de santé ? p. 19

Actus p. 20

Critères d’admission

Le programme : • 4 mois de fondamentaux d'octobre à janvier : enseignements liés à la vie de l'entreprise (management, stratégie d'entreprise, finance, gestion de projet) • 8 mois en alternance de février à septembre (une semaine de cours par mois): enseignements en fonction de la spécialisation choisie (Marketing ou Affaires Réglementaires), appliqués au domaine de la santé.

Politique de la sécurité sociale dans les années à venir

• Bac +4 scientifique/santé • 5ème année pharmacie industrie

Niveau de diplôme décerné à l’issue de la formation

p. 24

Retour de stage p. 22

• Bac +5

Innovations p. 24

Type de formation

• Alternance (de fév. à sept.)

DMLA – Espoirs et innovation

Durée de la formation

Débouchés de la formation :

• 12 mois

Les étudiants entrent à l’IMIS avec leur incontournable compétence scientifique et deviennent des managers de haut niveau dans les industries de la santé, spécialisés dans le Marketing (chef de produit, chargé d'études de marché, responsable communication scientifique par exemple), ou dans les Affaires Réglementaires (chargé d'affaires réglementaires).

En bref p. 27

Prix de la formation

Tests p. 29

• 6 990 € pour les 12 mois

Localisation

p. 27

• Lyon, France

Camille CHEVALIER

Chargée de développement IMIS cchevalier2@groupe-igs.fr 04 72 85 38 27 www.imislyon.com

2

3

DR.

Édito

23

Chères lectrices, chers lecteurs, C’est un honneur pour moi que de m’adresser à vous aujourd’hui à l’occasion de l’ouverture de la 33e édition du Forum de l’Industrie Pharmaceutique ainsi que de la sortie du 23e numéro de notre journal L’INDUS. L’APIEP a toujours eu comme ambition de favoriser, créer et entretenir un contact privilégié entre les étudiants en pharmacie et le monde divers et varié de l’industrie pharmaceutique. C’est un travail prenant, rigoureux et exigeant mais aussi gratifiant : vous êtes toujours plus nombreux à nous suivre, à nous solliciter et à nous demander conseil. Vous aider N’hésitez pas à consulter notre site internet : et vous accompagner est non seulement une priorité, mais aussi une www.apiep.net. grande joie pour nous.

Vous pourrez y consulter À ce titre, L’INDUS est un formidable outil de découverte, d’apprenlibrement tous les précédents numéros de notre journal, tissage et de connaissance du monde de l’industrie pharmaceutique. y trouver des informations Sous la direction de notre rédacteur en chef et ami, Ruslan Abrashiconcernant nos évènements tov, qui peut compter sur une équipe motivée et compétente, le ainsi que de nombreuses offres de stages et d’emplois. journal ne cesse de se professionnaliser, de s’améliorer, tant sur la forme que par son contenu.

Ainsi nous vous proposons aujourd’hui d’aborder le thème de « L’industrie Pharmaceutique, vue d’ailleurs ». Nous parlons souvent de l’industrie pharmaceutique française, mais il nous semblait pertinent de se demander : comment cela se passe-t-il dans d’autres pays ?

Comment s’articule l’exercice de l’industrie pharmaceutique dans des institutions, en l’occurrence à l’Armée? Comment cela se passerait-il dans les années à venir ?

Dans le dossier principal de cet INDUS nous vous invitons donc à voyager en Russie, en Inde ou encore en Arabie Saoudite afin de découvrir comment y est organisée l’industrie pharmaceutique ; puis nous vous proposons un article du Pharmacien Inspecteur Général Burnat au sujet de l’industrie pharmaceutique au L’INDUS Numéro 23 sein de l’Armée française, pour finir sur un court retour de lication de l’APIEP conférence concernant l’insertion de l’industrie pharma- Novembre 2018 • Pub é Paris-Sud 11 Faculté de Pharmacie - Universit ceutique dans l’écosystème de santé de demain. enay-Malabry Chât 5, rue J-B. Clément • 92290 Enfin vous trouverez également un article sur l’actualité e-mail : apiep.pharma@gmail.com • www.apiep.net réglementaire, un retour de stage d’Anca Petre, ancienne Directeur de la publication : Ruslan Abrashitov étudiante de la Faculté de pharmacie de Châtenay-Malabry Rédacteurs : Dossier « L’industrie pharmaceutique s : « Poliainsi qu’un article traitant d’une innovation dans la prise en vue d’ailleurs », Ruslan Abrashitov • Actu à venir », ées ann les dans tique de la Sécurité Sociale charge de la DMLA. a Petre • InAnc e : stag de ur Reto • ry Kfou Constance Toute l’APIEP se joint à moi pour vous souhaiter une agréable novations : « DMLA - espoirs et innovation », Ruslan lecture et un excellent Forum. Nous espérons sincèrement Abrashitov • News : Claire Wright, Fanny Constans, lan Abrashitov que vous trouverez des informations utiles à votre orienta- Léa Gouache-Brakha et Rus s imu Cron l Pau : ure vert tion et à votre épanouissement dans cette belle filière qu’est Cou kha Partenariats : Léa Gouache-Bra , ainsi qu’à tous aide leur pour s l’industrie pharmaceutique. teur relec Merci aux

L’INDUS N° 23 > Dossier : Vu d’ailleurs

J’ai le plaisir de vous présenter le 23e numéro de L’INDUS. Ce numéro paraît à l’occasion de la 33e édition du Forum de l’Industrie pharmaceutique de l’APIEP, événement qui exprime le plus explicitement les efforts portés par l’APIEP pour l’accompagnement, l’information et le soutien des étudiants dans la sphère de l’industrie pharmaceutique.

Par Ruslan Abrashitov, Rédacteur en chef du journal L’INDUS

Vu d’ailleurs…

Nous avons décidé d’orienter le dossier principal de ce numéro autour d’un thème original : « L’industrie pharmaceutique, vue d’ailleurs ».

Il s’agirait de se pencher sur l’industrie pharmaceutique à laquelle nous ne sommes pas forcément habitués. Ainsi, le dossier se déclinera en trois temps- l’ailleurs géographique, institutionnel et temporel.

Une explication s’impose.

Commençons par « l’ailleurs géographique ».

Afin d’illustrer cette partie du dossier, considérons la citation d’un des pères fon-

dateurs de l’astronautique, Constantin Tsiolkovsky : « La Terre est le berceau de l’humanité, mais on ne passe pas sa vie entière dans un berceau ».

De même, l’industrie pharmaceutique, dont le berceau a été l’Europe occidentale au xixe siècle, s’est répandue à travers le monde et est devenue le symbole de la réussite économique et technique.

Nous avons choisi trois états afin de décrire succinctement leurs industries de santé -Inde, Arabie Saoudite et Russie. Ces trois pays ont en commun un facteur, ils ne possèdent pas (pour des rai-

Ours :

ance tout au long nos partenaires pour leur confi de l’année. es : Conception & réalisation graphiqu : 2114-7388 Nadine Gautier-Quentin • N° ISSN

Éric Billemaz Président de l’APIEP

4

5

sons historiques différentes) de traditions industrielles en matière de santé de longue date. Ils ont dû créer leurs modèles assez récemment (en comparaison aux pays comme la France ou l’Allemagne) et les confronter, tant bien que mal, à la réalité du marché.

Les rédacteurs de cette partie, bien qu’ayant tous un rapport avec le monde de l’industrie pharmaceutique, sont différents du fait de leur parcours et donc de points de vus fournis sur les particularités de l’industrie dans tel ou tel pays.

L’INDUS N° 23 > Dossier : Vu d’ailleurs

L’INDUS N° 23 > Dossier : Vu d’ailleurs

Industrie pharmaceutique en Inde Nous allons d’abord survoler le système de santé indien, pour ensuite pouvoir nous attarder sur les aspects plus techniques, que j’ai eu l’occasion de découvrir lors de mon VIE. Par Pauline Blotin, PhD, VIE Marketing en Inde

Il s’agira de Mlle Pauline Blotin, ancienne étudiante de Châtenay-Malabry, PhD ayant effectué son VIE marketing en Inde, du Dr Mohammed Sonbol, médecin psychiatre ayant été responsable d’essais cliniques en Arabie Saoudite et du Dr Olga Streltsova, DG de Wörwag Pharma, Russie.

La

deuxième partie sera repré-

sentée par

« l’ailleurs

institu-

tionnel ».

Nous sommes habitués au fait que l’industrie pharmaceutique, bien qu’ayant des responsabilités importantes en matière de Santé Publique, soit associée aux intérêts privés- ceux d’un laboratoire ou d’un conglomérat. Cependant, l’industrie pharmaceutique peut également être exercée en institution et servir l’intérêt collectif.

Nous avons choisi un exemple particulier du contexte d’exercice de l’industrie pharmaceutique- il s’agit de l’industrie de Santé à l’Armée.

Pour la plupart d’entre nous, nous jouissons, dans notre quotidien, d’une paix relative. Cependant, il ne faut pas oublier que la France est engagée dans des multiples conflits et opérations de maintien de paix à travers le monde et sur son territoire national.

L’Armée française, garante de la souveraineté nationale, est appuyée par une multitude de services, réalisant son soutien à des niveaux diverses.

Un de ces nombreux services est le SSA, Service de Santé des Armées, dans le contexte duquel s’exerce l’industrie pharmaceutique appliquée au domaine militaire.

Avant de rentrer dans le vif du sujet, j’aurais voulu remercier ceux qui ont participé à l’élaboration de ce numéro par leur travail de rédaction, d’expertise ou de relecture. Cela revient à remercier les rédacteurs, les professionnels de santé venus de divers horizons, les enseignants, les partenaires, les étudiants, les membres APIEP et l’équipe de L’INDUS.

6

Le rédacteur de cette partieancien Inspecteur Général des Services Pharmaceutiques des Armées, Dr Burnat, nous expliquera les différentes modalités d’exercice, les enjeux, et les parcours menant vers l’Industrie pharmaceutique appliquée à l’Armée.

La

« l’ail». Il s’agit d’une courte retranscription de conférence ayant eu lieu à l’occasion de la Pharmacité du LEEM, articulée autour de la question « Comment bâtir un écosystème de santé de demain ? » J’espère que vous trouverez le dossier intéressant et pertinent.

Je vous souhaite une agréable lecture et un excellent Forum. troisième partie est

leurs

temporel

Généralités sur l’Inde

L’Inde et la santé

L’Inde est un État fédéral qui comprend 29 États, établis sur des bases essentiellement linguistiques, et sept territoires de l’Union créés pour des raisons politiques ou historiques.

Au début des années 1990, de nombreuses réformes économiques ont vu le jour en Inde, avec la libéralisation et l’ouverture de pans entiers de son économie. Depuis le début des années 2000, le pays connaît une croissance soutenue, et apparaît désormais comme un moteur de la croissance mondiale qui attire de nombreux investisseurs étrangers.

L’Inde doit cependant faire face à de nombreux défis. Le niveau du PIB par habitant demeure faible et malgré l’émergence d’une classe moyenne dynamique (environ 10 % de la population), une large partie de la population vit sous le seuil de pauvreté, dans des conditions sanitaires précaires (en particulier en milieu rural où vivent les deux tiers de la population).

De par sa population, ses 22 langues parlées à travers le pays, son envergure, ses différents états et ses cultures, son PIB élevé, l’Inde a bel et bien les caractéristiques d’un continent à part entière.

La santé est devenue l’un des secteurs majeurs en Inde, que ce soit en termes de revenus ou d’emplois. L’amélioration de la santé fait partie d’une des priorités du gouvernement Indien, très dynamique dans ce secteur. De plus, le domaine de la recherche est très actif : plus de 50 technologies innovantes sont en cours de développement pour des maladies d’ampleur internationale.

Notons également que de plus en plus d’entreprises indiennes fusionnent avec des entreprises locales ou internationales, leur permettant de gagner de nouveaux marchés et d’acquérir de nouveaux produits. C’est l’exemple d’Urgo : le laboratoire français a acquis une partie d’une entreprise familiale indienne- Eucare.

Le secteur de la santé en Inde est en plein essor, qu’il s’agisse du secteur privé ou public.

Le coût total des dépenses de santé est de 100 milliards de dollars. Il devrait atteindre les 280 milliards d’ici 2020, avec un taux de croissance de 20 %.

Les hôpitaux, les cliniques, les centres de diagnostic et les pharmacies représentent 65 % de ces dépenses. Cette augmentation des dépenses de santé est due à l’augmentation de la classe moyenne indienne, c’est-à-dire à une meilleure éducation engendrant une

7

meilleure connaissance thérapeutique et une volonté de se soigner. Le changement d’alimentation non négligéable fait également augumenter les dépenses en santé. Le diabète est un bon exemple, cette maladie, réel fléau en Inde, touche plus de 69 millions de patients.

Le système de santé en Inde est divisé en deux grands secteurs: public et privé.

Particularités du système Il est indispensable de distinguer les hôpitaux publics des hôpitaux privés en Inde.

Les hôpitaux publics sont financés par le gouvernement central, le Railway (compagnie ferroviaire indienne) ou encore l’armée. Ils proposent des soins d’urgence gratuits ou à très bas prix (70 centimes d’euros à 2 euros). Ces hôpitaux sont fréquentés principalement par les populations pauvres à faible pouvoir d’achat. Le service y est quasi inexistant et les temps d’attente pour les patients peuvent s’avérer très longs, plus de 4-5 heures dans cer-

L’INDUS N° 23 > Dossier : Vu d’ailleurs

tains cas, du fait de la surcharge des services. Une proportion faible de ces hôpitaux est accréditée par la NABH (National Accreditation Board for Hospitals and Healthcare Providers) qui correspond à un gage de qualité, de sécurité et d’excellence. Le NABH réunit un groupe d’experts indépendants financé par des acteurs principaux dans la santé tels que le gouvernement, l’industrie pharmaceutique ou les consommateurs.

En qualité de laboratoire pharmaceutique, pour accéder au marché des hôpitaux publics, il faut postuler à des appels d’offres et proposer un prix pour les produits. Ces offres sont gérées par le service d’achat de l’hôpital (composé d’hommes d’affaires et non de médecins). Généralement les produits les moins chers remportent les appels d’offres.

Le fonctionnement des hôpitaux privés est très différent.

En effet, il est possible de séparer ces hôpitaux en 3 classes : les chaînes d’hôpitaux pouvant compter plus de 50 hôpitaux repartis en Inde. Ces hôpitaux se trouvent dans les mégapoles et sont appréciés par les classes moyennes et aisées. Ensuite, on distingue les cliniques privées: hôpitaux de plus petite taille généralement indépendants. Enfin, on peut citer les « Mega hospitals » : hôpitaux de luxe, qui peuvent être assimilés à des hôtels cinq étoiles.

Ces hôpitaux sont uniquement fréquentés par des populations extrêmement aisées.

La plupart de ces hôpitaux privés possèdent l’accréditation NABH. Les traitements et soins sont intégralement payés par les patients et peuvent s’avérer très chers.

L’INDUS N° 23 > Dossier : Vu d’ailleurs

Afin de pénétrer le marché des hôpitaux privés, il convient de faire des commandes en direct auprès des hôpitaux, ce sont les médecins qui décident quels produits ils souhaitent avoir à disposition. Pour les chaînes d’hôpitaux, il y a une centrale d’achat, c’est donc à ce niveau que les commandes peuvent être faites. Les médecins y sont les principaux décisionnaires.

Une troisième classe de soin voit le jour en Inde, c’est le « home care », les soins pratiqués directement chez le patient. Des médecins et des infirmières se déplacent à domicile pour diagnostiquer, soigner ou traiter les patients, ce mode de soin augmente de façon considérable (+18 % en un an).

Les dépenses des hôpitaux publics représentent 1,3 % du PIB alors que les hôpitaux privés représentent 2,7 % du PIB de l’Inde. Le secteur privé est en pleine croissance et très dynamique. Ses parts de marché ont évoluées de 66 % à 81 % de 2005 à 2015 et ne cessent de croître.

La croissance des hôpitaux privés, les parts de marché des dépenses totales de la santé qu’ils représentent, incitent les laboratoires pharmaceutiques internationaux à se focaliser sur ce secteur privé, plus dynamique et avide de produits innovants.

En Inde, seuls les hôpitaux gouvernementaux peuvent apporter des soins gratuits, mais très limités par le manque d’infrastructures et de moyens. Autrement, les patients doivent payer la totalité de leurs frais. Il n’est pas rare pour un citoyen de devoir emprunter de l’argent

8

aux banques pour pouvoir payer les soins. Certaines assurances privées permettent de rembourser certains soins, mais moins de 20 % de la population a accès à ces dernières.

En conclusion, comme le payeur final est le patient, le prix est un élément fondamental qu’il convient de définir avec attention. Il n’est pas rare que des patients refusent des soins qui leur paraissent accessoires à cause du prix trop élevé. Ce phénomène est d’autant plus vrai pour les dispositifs médicaux et pansements.

Concernant le prix, en Inde, tous les produits ont un MRP. Le MRP (Maximum Retail Price) calculé par l’entreprise, est le prix maximum qui pourra être demandé au payeur. Le revendeur peut décider de vendre à un prix inférieur au MRP mais jamais au-dessus sous peine d’être hors la loi. Tous les produits en Inde, dispositifs médicaux compris et médicaments, doivent être marqués par le MRP. Un produit ne peut pas entrer sur le territoire indien dans l’optique d’être vendu sans MRP.

Mon VIE en Inde Tout au long de mon VIE sur le territoire indien, j’ai été impliquée dans un lancement de produit dans un contexte d’acquisition d’entreprise décrit précédemment. Ainsi, je tiens à expliciter quelques particularités d’exercice sur le territoire indien, par domaines. Commençons par le marketing.

Les données de marché Dans les pays en voie de développement, la collecte de données est assez rare.

Concernant l’Inde, pour les dispositifs médicaux, les données sont quasi inexistantes : spécialement dans le domaine des plaies. C’est un marché où la gestion des soins des plaies par des techniques traditionnelles règne. Les données fournies par le gouvernement indien ou les données internationales ne suffisent pas à avoir une vision exhaustive du marché. Il faut donc trouver des solutions.

L’appui de l’entreprise indienne est très utile lors d’une collaboration franco-indienne, car étant implantée depuis plusieurs années, sa connaissance du marché est importante mais ne suffit cependant pas à répondre à toutes les questions nécessaires à un lancement de produits.

De ce fait, faire appel aux services d’une agence consultante spécialisée dans les études de marché semble être une nécessité. Se lancer dans un marché sans en connaître ses caractéristiques est très risqué, surtout dans un pays en voie de développement où l’entreprise initie son implémentation.

Enfin pour compléter l’étude de marché faite par une entreprise externe, il est essentiel de « s’imprégner du marché » et de rencontrer par soi-même les différents acteurs (leaders d’opinions, médecins, infirmiers, département des achats des hôpitaux…), afin d’avoir une vision proche du terrain.

Les enjeux de positionnement produits et force de vente La cannibalisation est un sujet plutôt sensible, notamment dans le cadre d’une acquisition où les deux entreprises sont positionnées dans les mêmes aires thérapeutiques. C’est un phénomène observé lorsque les ventes d’un produit augmentent en contrepartie d’une diminution de celles d’un autre.

Le positionnement produit est donc un point stratégique d’un bon lancement de produit.

Un autre enjeu marketing est la formation de la force de vente. Les premières personnes à convaincre pour un bon lancement sont les visiteurs médicaux qui sont au contact des médecins au quotidien. Comment optimiser leur formation et leur motivation pour la nouvelle gamme de produits français ? À nous d’être créatifs !

Plan d’action marketing Mais comment pénétrer le marché Indien au mieux ?

Comment augmenter rapidement la notoriété des produits et de la marque ?

9

L’une des actions principales pour un lancement peut être d’impliquer des leaders d’opinion en créant un comité consultatif de médecins, pour les convaincre de l’efficacité des produits. Le but est de développer des relations à long terme avec ce comité, pour les impliquer tout d’abord dans les différents lancements mais aussi dans toutes les problématiques scientifiques, comme par exemple le positionnement des produits. L’organisation d’évènements scientifiques, de symposiums, la participation à des congrès… pour augmenter la visibilité de nos produits est nécessaire.

Mais un bon plan marketing de lancement ne suffit pas au succès. Le Market Access en Inde est une problématique importante à comprendre.

Market Access en Inde Comment en Inde, les produits pharmaceutiques se retrouvent-ils sur le marché?

Comment être enregistré sur la liste d’un hôpital privé? La réponse à cette question n’est pas forcément évidente. En effet, chaque hôpital peut fonction-

L’INDUS N° 23 > Dossier : Vu d’ailleurs

ner de façon différente. Cette question est pourtant majeuresi le dispositif n’est pas disponible dans l’hôpital, aucune vente ne pourra être faite.

Pour les hôpitaux gouvernementaux, la question s’avère plus simple, puisque les produits sont disponibles à l’utilisation et à la vente s’ils ont remporté l’appel d’offre effectué par le service d’achat de l’hôpital.

Donc, comment gérer au mieux cette problématique ?

Le plus simple consiste à lister les hôpitaux à potentiel et ensuite de s’intéresser à leur mode de fonctionnement. Pour cela, l’aide et la collaboration de la force de vente est obligatoire. Cette mission s’avère compliquée car les hôpitaux à potentiel (les hôpitaux privés) sont plus difficiles d’accès pour la force de vente.

Le processus de cette démarche doit être compris et accepté par les visiteurs médicaux. Travailler cette démarche avec eux peut être une idée judicieuse pour être sûr de la faisabilité du projet. De plus, les faire participer à la mise en place du projet augmente son acceptabilité et donc sa réussite.

Le pricing Comme l’étude de marché ainsi que mon expérience sur le terrain le démontrent, le prix est un élément décisif pour une bonne pénétration du marché.

C’est un critère majeur en Inde qu’il faut considérer avec beaucoup d’attention.

La problématique de pricing est très complexe.

D’une part, les hôpitaux, côté département des achats, souhaitent des prix plutôt élevés (en effet avec des prix plus

L’INDUS N° 23 > Dossier : Vu d’ailleurs

élevés, leur marge sera également plus conséquente).

D’autre part, les chirurgiens veulent des prix les plus bas possible pour qu’un maximum de patients puisse avoir accès à ces soins et pour garantir une meilleure observance thérapeutique de ces derniers.

La stratégie de pricing doit prendre en considération le plus de facteurs possibles afin de trouver un ajustement le plus rationnel qui soit.

RH en Inde Force est de constater que la gestion des ressources humaines en Inde est assez particulière. Les Indiens consacrent un intérêt majeur pour les relations humaines. Pour citer un exemple, il est très fréquent que le départ d’un visiteur médical en entraîne celui d’un autre ou d’autres.

De ce fait, la gestion des RH et notamment des visiteurs médicaux, est assez difficile. Le travail est, certes, important mais ne suffit pas à tout satisfaire : la famille et les amis restent clés dans la conception de la vie indienne. De ce fait, une motivation permanente est nécessaire pour maintenir une force de vente stable et motivée. Pour cela, le lancement de nouveaux produits est un bon argument.

Il faut être constamment présent et disponible afin de les rencontrer et de les écouter pour répondre au mieux à leurs besoins et interrogations éventuelles.

Un autre aspect, très important de la culture Indienne, sont les festivals. Ils se tiennent tout au long de l’année et il est impossible d’organiser des meetings ou des rendez-vous lors

10

de ces festivals très chers aux Indiens. Que nous parlions d’évènements en interne ou en externe (avec des médecins), il est bon de retenir que pendant ces dates il sera impossible de les réunir.

Cet aspect culturel est un réel enjeu, notamment pour réunir toute la force de vente. Il existe une multitude de festivals propres à l’Inde du Nord et propres à l’Inde du Sud qui compliquent la situation : il convient donc de prendre cet élément en compte sérieusement.

Les festivals sont aussi des moments où les médecins s’attendent à recevoir des attentions marketing de la part des laboratoires, comme des cadeaux, des échantillons de produits, ou même des sucreries très appréciées en Inde…

De ce fait, une promotion marketing est nécessaire lors de ces évènements. Cet aspect social est difficile à comprendre pour une entreprise occidentale, mais majeur pour le bon déroulement des opérations.

Avec un peu d’imagination, ces festivités peuvent être un très bon moyen de promotion et de démarcation !

La gestion des ressources humaines est un facteur déterminant à un bon lancement, particulièrement dans ce contexte international où la culture française doit collaborer et s’adapter à la culture indienne. Vivre cette fusion m’a énormément enrichie personnellement.

Mes missions très variées, m’ont permises d’appréhender les enjeux majeurs d’une entreprise pharmaceutique s’implantant en Inde et d’imaginer des solutions, des stratégies pour faire évoluer le marché.

L’industrie de santé en Arabie Saoudite : attentes et réalités Propos recueillis par Ruslan Abrashitov

Co-écrit et relu par Dr Mohammed Sonbol, médecin psychiatre, ancien chef de service, Djeddah, Arabie Saoudite.

L’Arabie Saoudite, avec sa population croissante qui avoisinera bientôt les 30 millions d’habitants, l’accroissement du nombre d’hôpitaux tant publics que privés, l’amélioration progressive du niveau de vie et de l’intérêt des sujets saoudiens vis-à-vis de la santé, ce pays voit des opportunités évidentes se présenter dans le secteur pharmaceutique. Ces opportunités sont saisies non seulement par les entreprises pharmaceutiques étrangères, mais aussi par le gouvernement saoudien, conscient des enjeux.

Domiciliation — entre l’enjeu et la nécessité Le marché saoudien du médicament est majoritairement occupé par les entreprises étrangères, ce qui implique l’importation des médicaments pour ce marché. Le Programme de Transformation Nationale (National Transformation Program), fixe comme objectif le passage de la part des médicaments fabriqués en Arabie Saoudite de 18 à 40%- cela définit la domiciliation de la production pharmaceutique comme un des points prioritaires des objectifs économiques. La mesure paraît raisonnable- l’état cherche ainsi à pérenniser une des branches stratégiques de son économie, et se préparer à une éventuelle baisse des prix du pétrole, dont le pays est étroitement dépen-

dant. Dans le même contexte, les hôpitaux sont appelés à faire plus d’économies lors de l’achat des médicaments, et cela constitue une excellente opportunité pour la production locale et l’augmentation de l’offre.

Un autre phénomène constitue un bon argument pour la domiciliation. En effet, sans parler parler du pouvoir d’achat qui augmente, et de l’intérêt croissant de la population pour la santé… les maladies chroniques sont de plus en plus présentes chez les saoudiens.

Les statistiques alarmantes témoignent de l’accroissement des cas de diabète de type 2, d’hypertension, de mucoviscidose et de thalassémie.

Les bémols Cependant, il faut avoir à l’esprit que l’état est en partie à l’origine de la large présence étrangère sur le marché. Depuis des dizaines d’années, les compagnies pharmaceutiques internationales bénéficient de conditions favorables sous formes d’accords bilatéraux ou de procédures simplifiées appliquées à l’accès au marché. Bien que de telles mesures soient fortement incitatives pour les Big Pharma étrangères, elles placent l’industrie nationale dans un contexte de concurrence et de lutte pour le marché. À présent, les choses ont changé. Le gouvernement saoudien

11

essaie d’orienter les industriels étrangers pour que ces derniers coopèrent avec des compagnies saoudiennes, ouvrent des sites de production sur leur territoire et procèdent à un transfert progressif du savoir-faire, afin de constituer une industrie nationale dans le contexte de partenariat. En tant qu’exemple, on peut citer l’association du laboratoire AstraZeneca avec les distributeurs saoudiens SITCO et Naghi ou le passage des compagnies ayant le statut d’importeur ou de distributeur au grade d’acteurs autonomes, capables de produire pour le marché saoudien. Dans ce cas de figure se retrouvent plusieurs compagnies saoudiennes, par exemple Al-Jazeera Pharmaceutical Industries ou Tabruk Pharmaceutical Manufacturing.

L’autre complexité réside dans le caractère peu rentable de la R&D sur le territoire saoudien. Malgré l’augmentation de 80 % des investissements

L’INDUS N° 23 > Dossier : Vu d’ailleurs

concernant la recherche et le développement sur la dernière décennie, le processus de développement de nouvelles molécules s’est allongé de 30 %, avec des résultats plus faibles.

L’autre problématique de l’industrie pharmaceutique Saoudienne découle du problème lié aux RH dans cette branche d’activité. Passons maintenant à l’interview. n tant que médecin psyE chiatre, quel a été votre rapport avec l’industrie pharmaceutique Saoudienne ?

J’ai participé, avec quelques autres collègues psychiatres, aux essais cliniques concernant l’Olanzapine, pour le compte du laboratoire Lilly, en tant que « responsable Arabie Saoudite ». Notre centre de contrôle était en Australie.

En quoi l’aspect RH constitue une vraie faiblesse pour l’industrie pharmaceutique saoudienne ?

L’Arabie Saoudite connaît une certaine pénurie en matière de médecins (moins de 20% sont saoudiens) et de pharmaciens.

Par exemple, concernant la pharmacie d’officine, beaucoup de pharmaciens viennent de l’Inde, du Pakistan ou d’autres pays Arabes. Ces cadres ont souvent pour objectif de gagner le maximum d’argent en peu de temps. Cet état d’esprit est la porte ouverte à la corruption. D’où, la vente des médicaments sans ordonnance, sans limitation de quantité. Cette dimension est moins prononcée pour l’industrie, mais certains abus sont présents, nous allons y revenir.

Comment le gouvernement réagit à cela ?

La réaction est la prise des mesures extrêmement restric-

tives par le ministère de la Santé…En cas d’abus médicamenteux, souvent présents du fait de la facilité d’accès, la réponse est l’interdiction du médicament sur le marché ou sa suspension. Cela a été le cas pour les antitussifs à base de la codéine, ou pour Lyrica (prégabaline), fortement utilisée en psychiatrie, et pouvant induire des hallucinations à forte dose, en cas d’abus. Mais interdire un médicament sous prétexte d’abus n’est pas une solution.

Lors de voyages à l’étranger les gens ramènent des médicaments, qu’ils revendent ensuite à un prix exorbitant- et alimentent ainsi le trafic de médicaments. Il serait plus judicieux d’établir un contrôle sur les prescriptions et la délivrance des médicaments.

Et l’industrie pharmaceutique ?

Autant d’exemples d’incohérences, malheureusement.

Chaque groupement pharmaceutique étranger a un sponsor saoudien, une sorte de garant, chargé d’importer et de redistribuer les médicaments sur le marché saoudien. En cas de conflit d’un laboratoire avec son sponsor, les produits d’un laboratoire entier peuvent disparaître et créer des complications et des conséquences parfois gravissimes pour les patients (en cas d’absence d’équivalents).

Une autre forme de corruption existe entre les médecins et les laboratoires. Les laboratoires étrangers sont en concurrence féroce pour les prescriptions des médecins. Parfois, cela va jusqu’à instaurer un système de prime (récompense financière pour un x nombre de prescriptions comportant le produit d’intérêt), d’avantages sous dif-

12

férentes formes... Cela fausse la concurrence. Ainsi on peut assister à l’achat des princeps « promus » de cette manière plutôt que de génériques.

Le système est fracturé entre public et privé ?

Oui. Il existe une différence notable entre des hôpitaux publics, où n’importe quelle consultation va certes être totalement gratuite, avec une possible délivrance de médicaments, mais à une vitesse très lente. Vous pouvez attendre jusqu’à un an pour obtenir un rendez-vous. Le secteur privé est très développé, les médecins sont compétents, mais le service est très cher. Ces structures ont pour objectif principal le bénéfice…

Il peut arriver que l’on demande à un patient de payer en avance sous forme de caution. Le système d’assurance maladie tel qu’on le connait en Europe n’existe pas. Cependant, des compagnies d’assurance existent, les services de ces dernières sont également très chers. Elles assurent de manière collective (par dizaine ou vingtaine de personnes), cela coûte cher pour une famille peu nombreuse. Les patients ont l’habitude de s’orienter plutôt vers des pharmacies, où l’on peut se procurer des médicaments sans ordonnance. La santé publique en souffre, les antibiorésistances ne cessent de croître…

La domiciliation de l’industrie pharmaceutique saoudienne- ça a un rapport avec la réalité ?

Le gouvernement a des plans dans cette direction. Certaines réussites ont eu lieu, mais ça va être très lent, beaucoup de travail est encore à accomplir.

Le renouveau de l’industrie pharmaceutique russe Co-écrit et traduit du russe par Ruslan Abrashitov

La débâcle post-soviétique Il serait compliqué de comprendre les progrès actuels de l’industrie pharmaceutique Russe, sans avoir à l’esprit l’histoire économique de ce pays sur les trente dernières années.

L’industrie pharmaceutique russe a commencé à se dégrader peu avant la chute de l’URSS, du fait de l’incohérence en matière de décisions politiques.

Dans le cadre des partenariats visant la production et la distribution pharmaceutiques dans le camp socialiste, les substances actives provenant de l’URSS subissaient la fin de traitement dans les pays comme la Hongrie ou l’Allemagne de l’Est. Les médicaments qui en étaient issus se distribuaient ensuite au sein du bloc, entre les pays membres. À la chute du bloc de l’Est, les partenariats entre les pays du bloc, d’ordre technologique et économique concernant l’industrie pharmaceutique (échange de personnel, schémas de fabrication, transfert du savoir- faire et autres) ont été dissouts. Les usines situées dans les pays satellites de l’URSS ont été fermées ou rachetées, pour plus tard mettre en place les mêmes schémas, avec des substances actives chinoises ou indiennes.

À l’époque de la Pérestroïka, l’industrie pharmaceutique russe n’a pas été à l’abri du déclin économique général, du fait de la privatisation et de la revente d’usines entières, de l’inflation, de l’effondrement de la production et de la corruption. À la sortie progressive de la Perestroïka, il s’est avéré que le marché pharmaceutique russe était largement dominé par les entreprises étrangères qui ont su exploiter la situation et s’implanter sur le marché russe.

Renaissance et protectionnisme Depuis les années 2010, la tendance s’inverse. Le marché a été témoin d’une véritable volonté de protectionnisme de l’industrie pharmaceutique et les faits ont suivi. Le plan « Pharma 2020 » élaboré par le gouvernement russe en 2009, qui vise à poser les bases pour une industrie pharmaceutique nationale, passait par la nécessité de localiser la production sur le territoire russe pour les firmes étrangères. Le plan vise ainsi à augmenter la production locale des produits pharmaceutiques et des médicaments innovants.

D’autres lois et initiatives propres à la Russie ont été prises dans les dernières années. On peut citer la loi fédérale numéro 44, dite « Sur

13

les achats », permettant aux compagnies russes d’accéder au marché des achats hospitaliers, ou la création de l’inspectorat externe appelé GMP (Good Manufacturing Practice). La vision du marché auprès des fonctionnaires du gouvernement russe a également changé, les entreprises nationales ont su prouver qu’elles étaient en état d’être une réelle alternative aux compagnies étrangères.

La Russie est un marché très spécifique en matière d’industrie pharmaceutique, et cela découle de plusieurs facteurs.

La fréquence de l’automédication sans passage par un professionnel de santé est plus élevée que dans les pays occidentaux, ce qui est une tendance risquée vis-à-vis de la santé collective, mais intéressante en ce qui concerne le potentiel du marché. L’espérance de vie progresse lentement, l’allongement de la durée de vie est un facteur positif pour l’industrie pharmaceutique. Le marché pharmaceutique russe est composé par un nombre beaucoup trop important de médicaments jugés comme obsolètes, cela constitue un important potentiel en matière de modernisation pour le marché.

D’autres facteurs rentrent en compte pour définir ce marché, mais le format réduit ne nous permet pas de tous les aborder. Passons maintenant à l’interview.

L’INDUS N° 23 > Dossier : Vu d’ailleurs

Olga Streltsova, Docteur en médecine, DG de Wörwag Pharma, Russie. r Streltsova, en quoi D le plan Pharma 2020 a changé le travail des compagnies pharmaceutiques étrangères sur le territoire russe ?

Le plan Pharma 2020 a été une initiative très habile de la part du gouvernement Russe, il se décline en plusieurs aspects, on va s’attarder sur quelques-uns. L’état s’est positionné vis-à-vis des compagnies étrangères de manière à ce que ces dernières réalisent, de manière durable, le transfert des technologies innovantes. Cela passe par une série d’actes réglementaires, mais aussi par des actions très concrètes, comme la localisation de la production des compagnies étrangères sur le territoire Russe, parfois jusqu’à la production des principes actifs. Quelques compagnies étrangères ont pris l’initiative de s’associer avec les entreprises russes, afin d’articuler leurs activités sous forme d’un partenariat. e plan Pharma 2020 estL il contraignant pour les compagnies étrangères ?

Sont-elles gagnantes, à long terme ?

Naturellement. Bien qu’une part de contrainte existe, ce plan est très avantageux pour les firmes étrangères. C’est la garantie de la présence des entreprises étrangères à long terme. Tout le monde y est gagnant.

L’INDUS N° 23 > Dossier : Vu d’ailleurs

ans combien de temps D on pourra parler de la localisation massive de la production des principes actifs sur le territoire Russe ?

Une dizaine d’années, je dirais. Cela prendra du temps, beaucoup de travail reste à accomplir. uelles sont les différences Q majeures, si l’on compare la situation actuelle à celle d’il y a 10 ans ?

Des progrès importants ont été réalisés…En 2008, en Russie, le marché innovant en matière de traitements anti-cancereux, anti-diabétiques, était dominé par les Big Pharma étrangères. Aujourd’hui plusieurs compagnies russes travaillent dans le domaine de la thérapie innovante, et s’en sortent très bien… ar exemple la compagnie P Biocad ?

Oui, on peut citer Biocad.

L’autre différence, c’est la régulation du marché. Elle est devenue plus systématique, plus rationnelle…et s’approche de plus en plus des modèles de régulation européens. Aussi, des efforts importants ont été faits. L’état a amélioré l’accès de la population aux médicaments faisant partie de la Liste modèle des Médicaments Essentiels (LME). Cela passe par une méthode originale de fixation des prix, l’état se charge de comparer les prix de ces médicaments avec les prix dans les « Basket Countries » (ensemble de pays regroupés dans un but d’analyse, proches selon des critères économiques précis), et de

fixer le prix maximal pour un médicament faisant partie de la LME. Ce prix sera considéré comme une limite et ne pourra pas être dépassé. uelques particularités du Q marché pharmaceutique Russe ?

Il me semble que la principale différence avec l’Europe réside dans la structure du marché. De 60 % à 70 % des ventes réalisées sur ce marché sont dites « out of pocket » (directement de la poche du patient), ce taux est immense si on le compare au marché pharmaceutique européen.

Le financement de l’état ne concerne que les 35 % restants. Cela découle de la fréquence importante de l’automédication en Russie. Plutôt que de s’adresser à un professionnel de santé, les patients « consultent » leur famille, leurs voisins…Le niveau d’éducation thérapeutique de la population est faible. Avec toutes les conséquences néfastes que cela peut avoir. Les maladies cardio-vasculaires font des ravages, du fait du mode de vie, mais aussi de l’observance de traitement, extrêmement faible. e gouvernement cherche L à inverser la tendance ?

Bien sûr, de plus en plus de campagnes d’information, d’éducation thérapeutique apparaissent. Ce n’est pas encore l’idéal, mais la base est posée.

L’industrie pharmaceutique à l’Armée Dr Pascal Burnat Docteur en pharmacie, militaire.

Enseignant agrégé à l’École du Val de Grâce du Service de Santé des Armées.

Dernier poste occupé : Inspecteur Général des services pharmaceutiques des Armées.

Pro patria et humanitate* Les armées françaises représentent 230 000 femmes et hommes présents sur le territoire national mais aussi en opérations extérieures (OPEX) à l’étranger. Le soutien médical de ces militaires est réalisé par le service de santé des armées (SSA). Ce service dispose en métropole de huit hôpitaux des armées et dans l’ensemble national dont les territoires et départements d’Outre-mer d’environ 180 antennes médicales des armées qui sont intégrées au sein des forces dans les différents établissements, bases aériennes, régiments, navires et bases navales. Le personnel médical de ces antennes est responsable du maintien de la santé des militaires, d’actions de prévention, d’expertise, de soins

et de préparation aux activités opérationnelles. La nécessité pour les forces armées de pouvoir se déployer en tout lieu et dans des conditions de sécurité aléatoires entraîne la mise à disposition de tout un éventail de soins adaptés aux risques inhérents à l’exposition des militaires en opération. Ces risques ne sont généralement pas présents quotidiennement dans la société civile en temps de paix. Afin de satisfaire aux besoins en matériels et produits de santé de cet ensemble sur le territoire national et en OPEX, le SSA dispose d’une direction des approvisionnements en produits de santé des armées (DAPSA) avec une centrale d’achat, un établissement central des matériels du service de santé des armées (ECMSSA), une pharmacie centrale des armées (PCA), un centre de transfusion sanguine des armées (CTSA) et deux établissements de ravitaillement sanitaire des armées (ERSA) destinés au stockage et à la distribution. La PCA située près d’Orléans sur la commune de Fleury les Aubrais a été ouverte en 2002 suite à sa reconstruction ; elle est responsable de la fabrication de mé-

* Pour la Patrie et l’humanité

14

15

dicaments spécifiques destinés à pallier l’absence de spécialité pharmaceutique disponible ou adaptée. C’est l’industrie pharmaceutique de l’armée, elle est le seul établissement pharmaceutique régalien.

L’idée d’une pharmacie centrale destinée aux armées est née après la bataille de Valmy (1792) où des déficits importants en médicaments et produits de santé avaient cruellement impacté la suivie des blessés. Ainsi, le 3 Ventose an II (22 février 1794) la Convention crée « un magasin général des médicaments simple et un laboratoire où l’on préparera les médicaments composés ».

Cette création se fait sous l’impulsion de Pierre Bayen et d’Augustin Parmentier (également agronome, promoteur de la pomme de terre), tous les deux sont des pharmaciens militaires, principaux responsables de la pharmacie militaire sous la Révolution puis l’Empire. L’organisation de cet établissement installé alors au sein de l’actuelle Ecole militaire à Paris est très novatrice pour l’époque car elle associe un centre de production de produits de santé, leur

L’INDUS N° 23 > Dossier : Vu d’ailleurs

stockage, leur distribution destinée aux armées, et enfin un laboratoire de contrôle. Il s’agit d’une véritable industrie pharmaceutique militaire avec une échelle de fabrication dépassant les préparations réalisées dans les officines.

Cette création est parallèle à celle 18 prairial an III (6 juin 1795) de l’Apothicairerie des hôpitaux de Paris dont l’organisation est largement inspirée par Augustin Parmentier traduisant les relations étroites entre le monde civil et militaire dès la création de cette forme d’industrie pharmaceutique.

Quelles relations entre l’industrie militaire et civile ?

L’industrie pharmaceutique militaire représentée par la PCA n’a pas pour vocation de concurrencer l’industrie pharmaceutique civile, elle n’en a ni les moyens ni l’intérêt.

Des productions de la PCA ont ainsi été arrêtées, car ces médicaments étaient également fabriqués par l’industrie civile.

Les médicaments de la PCA ne représentent qu’une très faible part de ceux achetés à l’industrie civile pour assurer les soins dans les hôpitaux des armées qui accueillent plus de 80% de patients civils, des antennes médicales des armées, des OPEX, etc. Les modèles de fabrication civils qui réalisent des productions uniques en quantité importantes sur des lignes de fabrication pérennes et permanentes permettent d’atteindre des coûts de production que ne permettent pas des productions par « cam-

L’INDUS N° 23 > Dossier : Vu d’ailleurs

pagnes » comme le fait la PCA car les besoins quantitatifs de production sont plus limités.

Par contre, la PCA dispose de différents systèmes de productions permettant des formes galéniques très variées sur un même site, assurant une grande polyvalence ce qui fait son originalité (comprimés, gélules, pommades, poudres, solutés injectables, ampoules, auto-injecteurs, etc.) adaptées à des productions par « campagne ». Les médicaments sont produits alternativement en fonction des besoins.

Il est ainsi possible d’accroître la production de tel ou tel produit en augmentant la fréquence des campagnes et en basculant sur une organisation en deux/ huit notamment en situation de crise, comme lors de la crise de la grippe H1N1 de l’hiver 2009-2010 où la PCA a fabriqué massivement des comprimés de 30 mg Oseltamivir avec un principe actif fourni par le laboratoire Roche sur la base d’un brevet déposé par la PCA. Cette production avait pour finalité de répondre en urgence à un besoin national auquel ne pouvait satisfaire pour la France l’industrie pharmaceutique ci-

16

vile. Cet exemple illustre une des facettes originales de l’industrie pharmaceutique militaire vouée à la résilience de la nation.

La PCA fabrique essentiellement des produits destinés aux soins en urgence sur le terrain avec une large place donnée aux injectables comme notamment ceux contenus dans la trousse individuelle du combattant (TIC). Ainsi, dans les opérations extérieures, comme aujourd’hui au Mali, chaque militaire est pourvu d’une TIC qui comprend, en particulier, du chlorure de sodium hypertonique à 7,5 % pour perfusion (afin d’assurer le remplissage vasculaire et le traitement du choc hémorragique) et de la morphine chlorhydrate 10mg/ml en dispositif d’auto-injection Uniject de 2ml (pour la prise en charge immédiate de la douleur par le blessé lui-même ou un de ses compagnons). La doxycycline fabriquée par la PCA est destinée notamment à la prévention du paludisme mais aussi à la prise en charge du risque biologique (charbon).

L’autre versant de la production est destiné à la prévention ou au traitement dans le

cadre d’une attaque nucléaire radiologique biologique ou chimique (NRBC) pour les armées ou la population civile.

Différents médicaments sont produits, notamment pour le risque chimique et le traitement contre les toxiques organophosphorés (VX, VR, sarin, soman) comme l’Ineurope ®, un auto-injecteur qui contient sous forme lyophilisée de l’atropine, du méthyl sulfate de pralidoxime et un précurseur du diazépam ; des ampoules d atropine (40 mg dans 20 ml) et pour le risque NR du DTPA en injection et surtout de l’iodure de potassium (comprimé de 65 mg) très largement diffusé pour le milieu civil sur les sites des centrales nucléaires et des ports nucléaires (porte-avions, sous-marins) .

Comme toute industrie pharmaceutique, la PCA a une activité de recherche et développement en collaboration avec d’autres praticiens du SSA. Cette activité est axée sur de nouvelles thérapeutiques ou formes galéniques destinées à améliorer la prise en charge du blessé à l’avant.

Les pharmaciens de la PCA sont très actifs au sein de commissions comme celles de la société française des techniques pharmaceutiques afin de réfléchir sur des problématiques communes avec les autres industriels, partager leur expérience et faire évoluer leur savoir-faire.

La PCA du fait de son implantation orléanaise a noué également de nombreux liens avec les industries pharmaceutiques de la région qui accueillent des pharmaciens militaires au cours de leur cursus de formation.

Quelles différences réglementaires ?

La majorité des médicaments produits par la PCA disposent d’une AMM, car si ces médicaments sont par essence destinés aux armées, certains d’entre eux peuvent aussi être utilisés par des patients civils français ou étrangers ce qui impose cette démarche.

Le code de la santé publique autorise la PCA cependant à fabriquer des médicaments sans AMM en l’absence de spécialités disponibles ou adaptées. Ce dispositif législatif est un gage de réactivité pour répondre à des exigences opérationnelles.

Afin de satisfaire à la réglementation, la DAPSA dispose d’un bureau des affaires réglementaires avec deux jeunes pharmaciennes aux compétences adaptées (master 2) responsables de ce bureau, engagées sous statut fonctionnaire civil pour l’une et de pharmacien commissionné militaire pour l’autre. Elles instruisent les dossiers d’AMM des médicaments de la PCA qui sont identiques à ceux réalisés par les industriels civils avec les mêmes contraintes. Le bureau affaires réglementaires est également associé très en amont dans les projets de recherche et développement pour définir la stratégie de développements et les budgets afférents.

La PCA est régulièrement inspectée par les inspecteurs de l’Agence nationale de sécurité sanitaire des médicaments (ANSM) car elle est soumise aux mêmes obligations réglementaires concernant les conditions de fabrication, la démarche qualité et

17

le contrôle, que l’industrie civile. Les bonnes pratiques de fabrication sont opposables quel que soit le statut du médicament.

Les pharmaciens et la PCA Les étudiants en pharmacie peuvent réaliser sur demande des stages au sein de la PCA comme dans tout établissement de l’industrie pharmaceutique. C’est notamment à l’occasion de tels stages qu’ils découvrent cette activité originale de l’industrie pharmaceutique. La PCA est également agréée pour accueillir des internes en pharmacie.

Le personnel de la PCA comprend environ 120 personnes du Ministère des Armées dont huit pharmaciens plus deux destinés aux affaires réglementaires sous la responsabilité de la DAPSA. Parmi ces dix pharmaciens, il existe quatre statuts différents. La majorité sont dits « militaires d’active » recrutés après concours au niveau du bac, ils ont intégré l’Ecole du service de santé de Lyon-Bron et ont réalisé leurs études à la faculté de pharmacie de Lyon.

Ils peuvent accéder aux DES notamment celui de pharmacie industrielle et biomédicale (PIBM) que certains possèdent à la PCA. Deux autres catégories de militaires, les officiers commissionnés et les officiers sous-contrats sont recrutés à l’issue de leurs études pour des postes déficitaires ou des activités spécifiques de la PCA non pourvues par des officiers d’active. Leur contrat est renouvelé périodiquement en fonction des besoins avec une

L’INDUS N° 23 > Dossier : Vu d’ailleurs

durée maximale de 17 et 19 ans mais ils peuvent éventuellement devenir des militaires d’active ce qui leur confère des obligations mais aussi des avantages et un contrat maximum à 62 ans. Les pharmaciens militaires de la PCA sont projetés sur les théâtres d’opérations comme tout praticien militaire.

Enfin un statut plus récent est celui de fonctionnaire civil recruté à l’issue des études pharmaceutiques pour des pharmaciens ayant des compétences spécifiques correspondant aux besoins de la PCA et plus largement du SSA. Pour accéder à ces postes, il est souhaitable de rencontrer les responsables de la PCA puis de faire une candidature auprès du bureau ressource humaine de la direction centrale du service de santé des armés. La PCA comme les autres établissements du SSA (hôpitaux, antennes médicales, etc.) accueille des pharmaciens de réserve pour des périodes variables allant de 5 à 30 jours par an en fonction des disponibilités de ces pharmaciens et des besoins. Ils ont un engagement à servir dans la réserve (ESR) et ont un statut de militaire avec ses obligations, ses grades et un uniforme identique à celui d’active. La localisation de leurs activités est définie et ils ont la possibilité de partir en OPEX sur volontariat. Lorsque ces pharmaciens sont thésés, ils ont au minimum le grade de capitaine pour les non thésés celui d’aspirant. Ils perçoivent un solde pour leur période de réserve qui est non soumis pour l’instant à l’impôt.

Dans le cas des étudiants en

L’INDUS N° 23 > Dossier : Vu d’ailleurs

pharmacie, ils peuvent être réservistes comme aspirants et doivent effectuer une formation préalable comme tous les réservistes. La PCA accueille des pharmaciens de réserves principalement du monde industriel et réglementaire. D’autre part, l’unité d’enseignement optionnelle «UE libre Santé et Défense » ouverte depuis trois ans aux étudiants de 3e et de 4e année de pharmacie dont ceux de Châtenay-Malabry, mais aussi aux étudiants en médecine et odontologie des facultés parisiennes, permet de découvrir cet univers militaire assez méconnu mais fondamental dans ce monde où le sentiment de sécurité n’est que factice. 130 étudiants de tous horizons ont suivi cet UE organisé par l’Ecole-duVal de Grace en 2018.

Quelle dynamique pour l’industrie pharmaceutique militaire ?

Actuellement la politique de l’industrie pharmaceutique militaire est tournée en priorité à la satisfaction des besoins spécifiques des armées françaises et de la population française, mais une nouvelle dynamique a été impulsée dans le cadre de l’ouverture du SSA depuis quelques années. Il s’agit de valoriser les produits de la PCA pour d’autres ministères français comme notamment ceux de l’Intérieur et celui de la Santé pour l’aide aux populations en cas de crise sanitaire ou d’évènement NRBC. L’ouverture est aussi dirigée vers les besoins d’armées étrangères notamment celles de l’OTAN qui ne

18

sont pas pourvues de cette forme d’industrie peu répandue, mais qui ont des besoins de traitements, principalement NRBC. Il n’est pas envisagé cependant du fait des obligations et des moyens disponibles, actuellement limités, de participer à la prise en charge des ruptures de stocks en médicaments classiques.

Comment constituer le futur écosystème de santé ?

Retour sur la conférence « Écosystème de santé de demain », Pharmacité du LEEM, 14 septembre. Intervenants : Cédric Arcos (DGA du Conseil régional IDF), Dr Monteil, Mr Chen.

Ruslan Abrashitov, rédacteur chef de L’Indus

Quelles perspectives ?

Les fonctions spécifiques de l’industrie pharmaceutique militaire existent du fait des besoins et de l’impossibilité structurelle de l’industrie civile de les satisfaire actuellement.

L’instabilité internationale ne faiblit pas, les risques notamment dans le domaine NRBC ne sont pas prêts de disparaître ce qui conserve à la PCA tout son intérêt. Malgré une production à une échelle relativement modeste comparée à l’industrie pharmaceutique plus classique, la PCA remplit un rôle unique et déterminant pour les armées françaises et pour la population en cas de crise, du fait de ses moyens et de son organisation qui y est dédiée.

Il apparaît intéressant pour un étudiant en pharmacie industrielle de mieux connaître les problématiques sanitaires des armées de son pays grâce, par exemple, à l’UE Santé et Défense, et d’y participer notamment comme pharmacien de réserve à la PCA ou dans un autre établissement.

La création d’un écosystème nouveau en matière de santé est nécessaire, mais cette création comporte des enjeux et des problématiques qui doivent être explicitées. Nous allons aborder quelques-unes de ces problématiques.

Comment bâtir un écosystème nouveau en matière de santé ?

D’après le Dr Monteil, il s’agirait d’éveiller les soignants aux nouvelles technologies pour renforcer l’alliance entre la technologie et la médecine de demain. Il s’agirait aussi d’améliorer la médecine grâce aux technologies, qui peuvent aider le système administratif, les soignants et les patients, le tout dans un système de soin très rigide. L’enjeu serait d’établir une communication pérenne entre les entrepreneurs, qui ont des idées et qui se lancent sans avoir des rapports directs à la santé (avec le risque que les inventions ne soient pas appliquées à la clinique) et les soignants au contact avec le quotidien, ayant des idées d’amélioration, mais pas de formation fondamentale pour faire autre chose que du soin. Leurs idées, bien que pertinentes, ne sont que très rarement développées.

Comment les faire communiquer ? Par exemple par une communauté en ligne, par le partage des informations concernant la veille technologique, et des réflexions communes à des problématiques posées. Certains soignants se sont tellement reconnus dans cette activité, qu’ils ont décidé de changer de carrière ou de faire du consulting à temps partiel…

Il faut aussi un véritable terrain d’entente entre les patients et les soignants pour comprendre que le produit se développe dans la bonne optique d’utilité.

Rôle du traitement des données ?

D’après Mr Chen, spécialiste en data, ce n’est pas parce qu’il y a des participants qu’il y a un écosystème. Aujourd’hui, le traitement des données permet d’avoir des infos sur les millions des patients, mais ces données sont intégrées sur des serveurs indépendants.

Il existe un besoin de plateforme commune et de langage commun pour permettre une collaboration, le tout avec sécurité, exactitude (en matière de qualité des données) et répétabilité de la démarche.

Rôle de la volonté politique dans la création du nouveau écosystème.

D’après Mr Arcos, la santé devrait être vue avant tout comme une source de création de valeur. L’ambition actuelle est de faire de L’IDF un des leadeurs en matière de santé, mais il y a un manque de coo-

19

pération et d’investissement.

Comment orienter les choix d’investissements ?

Le premier point, c’est d’avoir une ambition politique, fixant la santé comme un sujet majeur — cela revient à considérer la santé comme une source de création de richesse, de plus-value et de compétences.

Deuxièmement, il faudrait fixer un cadre à cette priorité, par thème et par dimension (par exemple sur l’IA, la cancérologie et le diagnostic). Il faudrait faire en sorte de coordonner les interventions des différents acteurs et simplifier les interventions politiques.

Bien que le dernier CSIS ait abouti à des engagements intéressants, il faudra décloisonner le système de santé, aller plus loin dans la décentralisation. Un écosystème implique une prise de décision réactive.

Un système figé et centralisé a tendance à considérer chaque problématique comme une crise, l’exemple est l’épidémie de grippe…Le projet politique est à réinventer, le système actuel ne permet pas la projection dans l’avenir.

Il faudrait arrêter de considérer la santé comme un sujet technocratique, l’hyperréglementation dont nous sommes les témoins est la conséquence de la perte de contrôle sur le processus. Nous sommes face au nouveau monde avec des acteurs nouveaux. Nous devons considérer la santé non seulement comme une source de dépense, mais aussi comme une source de richesse ; comme une solution et non pas comme un problème.

L’INDUS N° 23 > Actus

L’INDUS N° 23 > En bref

Politique de la sécurité sociale dans les années à venir Constance Kfoury, étudiante en 3e année de Pharmacie, Faculté de Châtenay-Malabry

PLFSS 2018 et ses conséquences Mardi 25 septembre 2018, un projet de loi de financement de la sécurité sociale a été présenté.

Plusieurs mesures ont ainsi été votées.

Tout d’abord le congé maternité sera amélioré pour les femmes indépendantes. En effet, celles-ci verront la durée maximale de leur congé maternité pris en charge rallongée à 112 jours, comme les salariées.

Les familles qui touchent le complément de mode de garde (CMG), pour faire garder leur enfant, conserveront le bénéfice de cette allocation à taux plein jusqu’à la scolarisation. De même, les parents d’enfants handicapés qui recourent à un mode d’accueil individuel, bénéficieront d’une majoration de 30 %, ce qui représente un gain potentiel d’environ 140 euros par mois par famille.

De son côté, le « reste à charge zéro » est l’une des mesures phare de ce projet. En effet, la mise en place de l’offre « 100% santé » débutera en 2019 et

s’échelonnera jusqu’en 2021.

De plus, à terme, tous les assurés pourront bénéficier de prothèses dentaires, auditives et de lunettes entièrement remboursées.

Dès 2019, certains changements seront visibles (revalorisation de 170 millions d’euros des soins conservateurs dentaires, diminution du reste à charge des lunettes). Bien évidemment, cela représentera un coût important estimé à 50 millions d’euros pour l’assurance maladie. À partir de novembre 2019, la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) s’étendra pour couvrir 1,2 millions de personnes parmi lesquels, les actuels bénéficiaires de l’aide à la complémentaire santé (ACS) pourront en bénéficier pour 1 euro par jour.

Des fonds seront levés pour les personnes âgées. Ainsi, les EHPAD toucheront 125 million d’euros.

Enfin, les dépistages santé tirent aussi leur épingle du jeu. En effet, le dépistage précoce de l’autisme va être favorisé via la mise en place d’un parcours 0 à 6 ans entièrement financé par l’Assurance-Maladie, ainsi que le développement de plateformes dédiées, ce qui représente un coût de 23 millions d’euros.

Les 20 examens médicaux obligatoires gratuits réalisés avant l’âge de 6 ans seront, quant à eux, étalés jusqu’à 16 ans. Ainsi, les jeunes dès 3 ans pourront consulter un dentiste pour un dépistage

20

gratuit et les soins qui en découlent, tous les trois ans jusqu’à 24 ans.

Déremboursement massif Cependant, l’ensemble de ces mesures a un prix et le déremboursement massif en sera la conséquence.

Comme chaque année, le gouvernement veut renforcer le recours aux médicaments génériques dans le cadre des économies demandées au secteur de la santé en 2019.

Ainsi, les patients refusant, sans justification médicale, les médicaments génériques proposés par leur pharmacien à la place des médicaments princeps seront moins bien remboursés à partir de 2020, à savoir qu’un générique coûte en moyenne 40% de moins que le princeps selon le Ministère de la Santé.

Pour cela, des « critères médicaux objectifs, définis en lien avec l’agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé» seront définis pour limiter les recours des médecins à la mention « non substituable » sur les ordonnances. Cette réduction de la liberté de prescription des médecins fera économiser à terme quelques 100 millions d’euros. « Le taux de substitution générique/princeps dépasse à ce jour les 80% en France, mais les mécanismes en faveur de la substitution montrent un certain essoufflement » justifie le gouvernement.

Au cœur de ce déremboursement- les médicaments contre la maladie d’Alzheimer. En effet, un « manque d’efficacité » déclaré par la HAS semble être à l’origine de cette décision radicale, selon l’actuelle ministre de la santé. Décision plutôt mal reçue par les familles qui permettrait, néanmoins, une économie pour la sécurité sociale d’environ 90,3 millions d’euros. L’objectif majeur étant le développement d’une prise en charge non médicamenteuse axée sur l’orthophonie, la stimulation cognitive et autres.

Alors certes, aujourd’hui aucun médicament ne permet de traiter cette maladie qui touche de plus en plus de personnes, (du fait du vieillissement de la population), mais est-il raisonnable de priver ces malades de médicaments en faveur du ralentissement de la maladie ? L’économie empiète-t-elle sur la science ?

Autre cible, l’homéopathie. La HAS n’a pu, dans le cadre d’un renouvellement d’inscription sur la liste des médicaments remboursables, se prononcer quant au service médical rendu (SMR) de ces produits.

Or, le SMR conditionne un éventuel remboursement par l’assurance maladie. Il faut savoir qu’il existe 4 niveaux de SMR, le SMR « important » pour les remboursements à 65%, le SMR « modéré » pour les remboursements à 30%, le SMR « faible » pour les remboursements à 15% ainsi que le SMR « insuffisant » correspondant à l’avis défavorable à l’inscription sur la liste de médicaments remboursables.

Comment expliquer alors que le remboursement de ces

produits soit toujours en vigueur, alors que le SMR n’a pas été évalué ? Cette explication remonte à 1984 et la publication d’un arrêté signé par la ministre de la santé, Madame Georgina Dufoix, fixant une liste des médicaments remboursables. Le taux de remboursement initial était fixé à 65%, c’est seulement en 2004 que ce taux est ramené à 30 %.

Il faut savoir que n’importe qui peut aujourd’hui se fournir en homéopathie, avec ou sans prescription médicale.

En France, ces médicaments connaissent un certain succès.

L’avenir du secteur de la santé « En 2019, le trou de la sécurité sociale aura disparu ».

Alors que le gouvernement visait un retour à l’équilibre des comptes de la Sécu en 2020, il y parviendra avec un an d’avance. Ce retour au vert s’explique par : une croissance économique jugée « correcte », ainsi qu’un total de dépenses sociales plus faible que prévu.

Le secteur de la santé, quant à lui, devra réaliser 3,8 milliards d’euros d’économies.

Ainsi, la limitation des achats et dépenses à l’hôpital se poursuivra et 1,1 milliard d’euros seront économisés sur les médicaments. Le déficit sera alors réduit à 500 millions d’euros en 2019, il était encore de 5,8 milliards d’euros en 2015.

Pour réduire la dépense, différentes pistes sont proposées. En effet, la sécurité sociale veut se concentrer sur la chirurgie ambulatoire (entrée et sortie du patient

21

le même jour), la limitation du séjour à la maternité (retour à la maison de la maman 72 h après l’accouchement), la réduction des transports sanitaires (ambulances) et le passage à la chirurgie au forfait (paiement par la sécurité sociale d’un forfait global qui recouvre toute la prise en charge : de la consultation pré-opératoire, au kiné à la sortie…

Ainsi, la sécurité sociale est prête à payer un peu plus pour éviter les cas de ré-hospitalisation et une seconde prise en charge, ce qui, à terme revient plus cher.

Une enveloppe budgétaire sera néanmoins attribuée afin de financer la création de postes d’assistants médicaux.

Enfin, dans le but d’enrayer l’affluence massive des hôpitaux, de nouveaux modes de financement seront mis en place avec notamment, la création de forfaits pour les pathologies chroniques, dont le diabète et l’insuffisance rénale chronique dès 2019.

Il faut espérer que cette politique de restrictions ne fasse pas augmenter l’affluence dans les hôpitaux privés et ainsi augmenter les inégalités sociales. À l’avenir le vieillissement de la population, l’augmentation des dépenses de santé et la nécessité d’encourager la natalité rendront encore plus cruciaux les problèmes de la Sécurité Sociale.

Cette course à l’économie estelle sans risque pour la santé de la population à long terme ? Beaucoup de changements sont encore nécessaires… mais tout cela a un prix.

L’INDUS N° 23 > Retour de stage

L’INDUS N° 23 > Retour de stage

Retour de stage

de valeur qui était sur le point de disrupter des pans entiers d’activité.

Anca Petre > Étudiante en 6e année de Pharmacie, faculté de Châtenay-Malabry > M2 Marketing pharmaceutique > Co-fondatrice de « 23 Consulting ».

La blockchain est, depuis un an, le nouveau terme à la mode dans la santé. Après le secteur financier et ses grandes banques internationales, après Carrefour et Telegram, c’est l’industrie pharmaceutique qui commence à explorer cette technologie et à plancher sur ses usages.

L’incroyable « hype » de la blockchain est apparu en 2015 lorsque The Economist, bible des milieux économiques et financiers a titré : « Blockchain, The Trust Machine ». En trois mots, le magazine venait de définir l’essence même de cette technologie et la proposition

La blockchain est effectivement un outil informatique qui permet à des acteurs qui ne se font pas confiance d’échanger de la valeur dans un cadre confidentiel, transparent et sécurisé. En d’autres termes, la blockchain est un registre décentralisé de transactions stocké dans tous les ordinateurs des membres du réseau pair-à-pair. Chaque transaction est horodatée et ne peut être ajoutée au registre qu’à condition que la majorité des membres du réseau la valide.

Une fois que les données sont sur une blockchain, il devient impossible de les modifier ou de les supprimer. En somme, la blockchain est un registre immuable qui garantit l’intégrité des données échangés entre plusieurs acteurs. Elle garantit la confiance « by design ».

J’ai entendu parler pour la première fois de la blockchain pendant la Summer School de l’INSEEC en juillet 2016. En effet, à ce moment-là j’étais en 3ème année de pharmacie et j’avais entamé un double diplôme avec l’INSEEC Business School afin d’acquérir des compétences plus poussées en business et management. Un des

22

avantages de ce programme est la possibilité de passer un mois à Londres pendant l’été afin de suivre des cours en anglais et découvrir le secteur pharmaceutique local. Un de nos professeurs, Dinis Guarda, nous a alors présenté les technologies allant impacter le secteur de la santé dans les années à venir.

La blockchain en faisait partie.

Curieuse d’en savoir plus, j’ai longuement échangé avec lui à l’issue du cours. Spécialiste de la blockchain dans le secteur financier, M. Guarda m’a mise au défi de mener des recherches sur le lien entre cet outil informatique révolutionnaire et la santé, domaine dans lequel j’effectue mes études.

Selon ses dires, je pourrais devenir une « superstar de la blockchain » si je m’intéressais à cette question. J’ai accepté de relever le défi ; non sans émettre quelques sérieux doutes quant à la faisabilité de ses propos.

J’ai passé les deux mois suivants à étudier la question.

La première étape et non des moindres a été de comprendre la blockchain d’un point de vue technique. N’ayant jamais étudié l’informatique, cette phase initiale s’est montrée particulièrement difficile et m’a demandé une sérieuse remise à niveau grâce à divers cours en ligne. Après avoir

atteint un niveau satisfaisant, j’ai commencé à relier les fonctionnalités de la blockchain aux problématiques du secteur de la santé. Traçabilité des médicaments, tenue de registres immuables, intégrité des données de la recherche clinique, les champs d’application m’ont semblé infinis. Constatant que ce sujet n’était pas encore beaucoup étudié et abordé dans les médias, j’ai commencé à publier les résultats de mes recherches sous forme de courts articles.

Mon premier papier, publié à l’automne 2016, visait à expliquer les mécanismes par lesquels la blockchain permet de créer de la confiance entre plusieurs parties prenantes qui souhaitent partager de l’information. S’en sont suivis d’autres articles, analysant les startups se lançant dans ce secteur ou encore les usages potentiels de la blockchain pour l’industrie de la santé.

Ces articles m’ont permis de gagner en visibilité sur les réseaux sociaux et rapidement on m’a proposé d’intervenir lors de conférences en France mais aussi en Espagne, en Angleterre, en Roumanie ou encore au Canada. Avec ces événements se sont aussi multipliés les contacts avec des professionnels souhaitant euxmêmes appliquer la blockchain dans leur entreprise et désireux d’entendre mon avis sur leurs idées. Ces discussions que j’ai menées pendant près d’un an, m’ont permis de comprendre les différentes problématiques rencontrées par ces professionnels et le rôle que la blockchain pouvait jouer dans d’éventuelles solutions. Cependant, consciente de ne pas pou-

voir approfondir mes connaissances sur la blockchain dans l’industrie de la santé faute de sociétés ayant mené la réflexion suffisamment loin, j’ai décidé de travailler pendant l’été 2016 au sein d’une startup de Fintech et blockchain basée à Londres. Cette expérience au sein d’une startup m’a permis d’acquérir les bases de la gestion d’une société dans le milieu des nouvelles technologies.

Suite à ce stage et face à la demande croissante de formation ou d’accompagnement des personnes que je rencontrais, j’ai décidé qu’il était temps de créer ma propre organisation afin de répondre à ces sollicitations de manière structurée et professionnelle.

La concrétisation de ce projet est survenue suite à de nombreux échanges avec Nassim Chellal, un ami de longue date, avec plusieurs années d’expériences en tant qu’économiste et enseignant. Les rôles ont été rapidement répartis : il gèrerait la société dans ses aspects financiers, administratifs ou juridiques, pendant que je me concentrerais sur le développement de l’activité autour de la blockchain en santé. Pendant les premiers mois de notre activité, nous avons tous les deux jonglé entre la société et nos autres occupations respectives. De mon côté, il s’agissait de trouver un équilibre entre le stage hospitalier de 5ème année, l’étude de cas, les cours et mes engagements professionnels. Nous attendions tous les deux le moment du début de mon stage en entreprise afin de se consacrer pleinement à la société et en accélérer le développement.

23

Ainsi, j’ai eu la chance de pouvoir effectuer mon stage de 5ème année dans ma propre entreprise et le défi s’est avéré être de taille. Monter une entreprise est, sans aucune surprise, un véritable challenge. Il n’y a personne pour vous montrer le chemin à suivre ou valider vos choix. Vous êtes responsable de vos décisions qu’elles soient bonnes ou mauvaises et, au début, elles ont tendance à être plutôt mauvaises ! Manager une équipe, définir une stratégie d’entreprise, prospecter, communiquer, cela n’est pas inné et demande de procéder par essai-erreur avant d’y arriver. Mais finalement, j’ai choisi cette voie de mon plein gré et je ne peux pas m’en plaindre.

Le travail que nous faisons est passionnant et nous permet de découvrir des facettes de l’industrie pharmaceutique que je n’avais pas décelées sur les bancs de la faculté. Nous rencontrons des personnes inspirantes et motivantes qui œuvrent pour challenger le « status quo » de l’industrie, faire des Big Pharma des acteurs du numérique et encourager les futurs pharmaciens à s’intéresser à des sujets qui sortent des sentiers battus.

Le sujet qui nous tient à cœur, ce n’est pas la blockchain en elle-même : c’est créer de la valeur pour l’industrie pharmaceutique et pour les patients grâce au numérique. La blockchain est certes un outil puissant mais ce n’est qu’un outil parmi tant d’autres. J’encourage donc les étudiants à être curieux, à s’intéresser aux nouvelles technologies et à prendre le virage du numérique.

L’INDUS N° 23 > Innovation

L’INDUS N° 23 > Innovation

lement, seulement la forme néo-vasculaire peut être traitée. Elle se caractérise par la prolifération des vaisseaux sanguins anormaux localisés sous la rétine. La diffusion du sérum et ou du sang à partir de ces vaisseaux provoque alors des soulèvements ponctuels de la rétine ou des hémorragies rétiniennes.

Néanmoins, malgré un ralentissement possible grâce au traitement, cette forme peut évoluer vers la forme atrophique, plus grave car non traitable à l’heure actuelle.

La forme atrophique correspond à la disparition, lente mais progressive, des cellules de l’épithélium pigmentaire rétinien, puis de photorécepteurs de la macula. Les trous de taille croissante sont alors visibles sur la macula en fond de l’œil ; plusieurs années peuvent s’écouler avant que le patient ne perde la vision centrale.

DMLA – Espoirs et innovation Ruslan Abrashitov, étudiant en 4ème année de Pharmacie faculté de Chatenay-Malabry

Généralités La DMLA (Dégénérescence Maculaire Liée à l’Âge), est une pathologie oculaire, correspondant, comme son nom l’indique, à la dégradation progressive de la macula- partie centrale de la rétine responsable de la transmission de la majorité de l’information visuelle à destination du cerveau. Affectant la vision centrale du sujet âgé, la maladie concerne près de deux millions de patients français, et demeure la première cause de handicap visuel chez la personne âgée. Du fait de l’allongement de la durée de vie, son incidence dans la po-

pulation européenne ne fera que croître. Cela fait du traitement de la DMLA un enjeu important de santé publique.

Physiopathologie Plusieurs formes et phases de la maladie peuvent être distinguées. La maladie débute par une phase précoce dite « MLA » -Maculopathie Liée à l’Âge. Cette phase précoce est due à l’accumulation des « drusen mous » (dépôts blanchâtres visibles en fond de l’œil autour et à l’intérieur de la macula). Souvent asymptomatique, cette phase précoce peut néanmoins se manifes-

24

ter par des tâches floues ou des déformations des lignes droites (« métamorphopsies »). La MLA peut être stable tout au long du vieillissement, tout comme elle peut évoluer vers des formes dégénératives (sous l’influence de différents facteurs que nous allons décrire ultérieurement).

On distingue deux types de formes dégénératives — la forme néo-vasculaire et la forme atrophique. Bien que les deux mènent vers une dégradation irréversible de la macula et une perte progressive de la vision centrale, une nuance sera faite vis-à vis de la thérapeutique. Actuel-

le risque de développer une DMLA par 250.

D’autres facteurs favorisant la DMLA sont le tabagisme et l’obésité.

Une alimentation équilibrée et riche en sélénium, zinc, vitamines C et E, lutéine et acides gras polyinsaturés semble être un facteur protecteur vis-à-vis de la survenue et l’éventuelle aggravation de la DMLA.

Traitement La forme néo-vasculaire peut être traitée par des injections intra-vitréennes des molécules anti-VEGF, telles que le pegaptanib, le ranibizumab ou le aflibercept.

La forme atrophique peut être ralentie par des compléments alimentaires, il n’existe pas de traitement spécifique à l’heure actuelle.

Facteurs

Innovations thérapeutiques

Plusieurs facteurs favorisant ou protecteurs de la DMLA ont été mis en évidence. Le facteur principal reste l’âge, car la DMLA apparaît majoritairement après 50 ans.

Une susceptibilité génétique liée aux polymorphismes existe également. Dans ce cas de figure, on peut citer les variantes codant pour le gène responsable de la protéase HTRA-1, le facteur H du système du complément et le facteur C2-FB du complément. Bien que ces variantes génétiques ne soient pas des marqueurs diagnostics, la présence simultanée des trois variantes peut multiplier

Plusieurs pistes concernant l’innovation en matière de traitement des formes atrophiques existent. On peut citer les stratégies s’approchant de l’immunothérapie, visant à limiter le recrutement des macrophages au niveau des photorécepteurs (développement des inhibiteurs sélectifs des facteurs du complément) ; la mise au point de la rétine artificielle ou encore la photosensibilisation des cellules ganglionnaires de la rétine.

Nous avons décidé de nous attarder sur une autre piste.

Il s’agit de la thérapie cellulaire. Consistant en l’im-

25

Grille d’Amsler, test d’autosurveillance permettant de dépister la DMLA. La déformation les lignes lors de l’observation, pourrait témoigner de la DMLA.

plantation dans la rétine de cellules souches, cette piste a été explicitée par Dr Marc Peschanski lors d’une conférence faisant partie du salon Pharmacité du LEEM. Neurophysiologiste, spécialiste des maladies neurodégénératives et des cellules souches, Dr Peschanski est le directeur scientifique de l’institut I-Stem.

D’après le scientifique, une étape importante en matière de l’exploitation des cellules souches embryonnaires a été franchie en mars 2018. En effet, depuis 2011 plusieurs équipes à travers le monde menaient des essais cliniques concernant l’application de cellules souches à la DMLA. Ainsi, une équipe anglaise a réussi à obtenir chez deux patients atteints de la DMLA le passage de la cécité à la vision.

Les deux patients en question ont été capables de lire jusqu’à 80 mots par minute 300 jours après la greffe. Commentaire du Dr Peschanski : « C’est une étape [comparable] à ce que Christiaan Barnard avait obtenu en novembre 67 sur les greffes du cœur. […]

L’INDUS N° 23 > Innovation

L’INDUS N° 23 > En bref

En bref

Par Léa, Fanny, Claire et Ruslan

deux boutons pour le troisième. Et enfin, le dernier test est un simple test de mémoire. Ces tests permettent donc de vérifier si les symptômes principaux de la maladie sont présents chez le patient.

Nous voyons qu’une simple application smartphone permettra certainement le diagnostic rapide de cette maladie de Parkinson sur énormément de patients.

Sources : Les clés de demain et Le Monde

Parkinson – vers une détection précoce connectée ?

Dr Peschansky lors de son intervention à la Pharmacité du LEEM, le 14 septembre 2018, source LEEM

c’était la première fois que l’on était capable de greffer un cœur. La faisabilité était avérée, c’était une piste. On est dans la même situation avec les greffes de cellules.

On a la preuve du concept, et maintenant nous pouvons regarder plus loin. » Malgré l’enthousiasme d’une telle avancée, à présent deux questions se posent. D’abord il s’agirait de résoudre les problèmes de compatibilité donneur/receveur (dans le cas de transplantation d’organes, la question était partiellement résolue par des immunosuppresseurs tels que la ciclosporine).

La deuxième question est d’ordre technologique. Il s’agirait de faire de cette méthode un traitement pour des millions de patients et donc de résoudre les problématiques de la production et de la distribution à large échelle, non résolues actuellement. Tel est le défi lancé à l’industrie

pharmaceutique de demain.

D’après Dr Peschanski : « Multiplier par 10000 les capacités de production actuelles sera notre ticket pour passer de la recherche à la médecine ».

Bien que des nombreuses questions restent à résoudre, ces avancées ont de quoi inspirer une nouvelle génération de professionnels de santé. Mettons-nous au travail, et la DMLA deviendra peutêtre un vestige du passé, d’ici quelques dizaines d’années...

26

Du nouveau au LEEM

La maladie de Parkinson est une maladie neuro-dégénérative où les neurones à dopamine impliqués dans le contrôle du mouvement sont progressivement détruits.

Les symptômes majeurs de cette maladie sont la rigidité, la lenteur dans les mouvements et le tremblement au repos. Les traitements existant aujourd’hui ne permettent pas d’arrêter de manière nette l’évolution de la maladie, mais seulement d’améliorer la qualité de vie des patients. Il y a donc beaucoup de recherches sur les traitements, mais aussi sur les diagnostics afin d’aider les patients atteins ou permettre la prise en charge le plus rapidement possible.

Une avancée va certainement pouvoir améliorer le diagnostic de cette maladie, qui touche plus de 200 000 personnes en France.

Deux chercheurs Suisses, Patrick Schwab et Walter Karlen, ont développé une application smartphone qui permettrait de se servir des données du téléphone pour analyser et détecter les signes de la maladie. Cette application établit un diagnostic rapide et efficace ainsi qu’un suivi de l’évolution de la maladie à distance. Cette application permettrait donc aux médecins d’accéder aux résultats de leurs patients sans qu’ils soient présents.

Voici son principe d’action. Les deux chercheurs ont développé un test rapide et facile d’utilisation qui est décomposé en quatre sous-parties. La première requiert de marcher et de faire demi-tour afin de vérifier la lenteur des mouvements. Il suffit de parler dans le micro pour le deuxième test et de tapoter sur

Le conseil administratif du LEEM (Les Entreprises du Médicament) a élu son nouveau président- Philippe Tcheng.

Docteur en médecine, PDG du groupe Sanofi-Aventis et co-secrétaire du Conseil Stratégique des Industries de Santé (CSIS, instance de dialogue entre les industriels du secteur et les pouvoirs publics), Mr Tcheng succède à Mr Patrick Errand, président sortant, en charge depuis 2013.

Parmi les priorités fixées par le nouveau président du LEEM, on peut citer la rénovation du dialogue entre le LEEM et le CSIS, la promotion du bon usage du médicament, la valorisation du savoir-faire français en matière de production et de recherche ainsi que la pérennisation du développement des entreprises du médicament. D’après Mr. Tcheng : « Face aux défis qui attendent nos entreprises dans un environnement en mutation permanente, le LEEM doit continuer d’évoluer.

Ses missions devront être animées par deux convictions fortes : dialoguer pour changer, innover pour progresser ».

Source : LEEMEDIAS

27

L’INDUS N° 23 > En bref

L’INDUS N° 23 > Tests

How is the pharmaceutical industry affected by Brexit ?

One of the problems of Brexit is the relocation of the EMA from London to Amsterdam. The agency will move hundreds of its current staff, and may implement changes to rules for medicinal products developed and tested in the UK. The major problem with Brexit is the uncertainty created. Indeed, Brexit will be effective in March 2019 and with less than 6 months to go, we do not even know if there will be deals between the EU and the UK for the medical market. This uncertainty leads pharmaceutical companies to adopt one of two different responses. Some of them anticipate a « no-deal Brexit » and are working on the transfer of centralized licenses, which is expensive. Others are waiting but falling behind : not all licenses will be ready in time for Brexit which will result in shortages. In addition to late licenses, given the UK’s absence from the Shengen area, border issues could also create shortages. The UK is already stocking products but it’s also a country that exports a lot ! A problem of scarcity could arise everywhere in Europe. Reinforcement of borders could also reduce flows of people, talent and skills. Last, but not least, is the problem that, from today, the EMA no longer entrusts so many contracts to the UK’s Medicines and Healthcare products Regulatory Agency (MHRA) which is generating a shortfall of billions of pounds for the MHRA. To summarise, this lack of clarity is a source of concern for the whole pharmaceutical industry. Many things remains to be fixed. The next EU summit is planned for December 1314, 2018 ; we hope to know more by then !

AMAZON : le nouveau pharmacien

S’entraîner au TAGE MAGE

C’est en juin dernier qu’Amazon annonce vouloir racheter PillMark, une start-up de pharmacie en ligne, un domaine de plus sous le contrôle du géant américain. La transaction devrait se concrétiser fin 2018 au prix d’efforts financiers. Mais Amazon n’était pas seul sur le projet, la grande chaine de magasin WallMart était également très intéressée, mais le financement ne faisait pas le poids face à Amazon.

On assiste alors aux États-Unis à une guerre des pouvoirs, la pharmacie au cœur du débat.

En réponse, WallMart a décidé de s’allier aux officines pour faire face à la nouvelle concurrence. Mais le géant du e-commerce a obtenu sa licence de vente pour les 50 états, accompagnée de partenariats avec les assurances maladie. Non seulement Amazon pourra vendre des médicaments en accès libre mais aussi des médicaments sur ordonnance. On pourra donc assister aux États-Unis aux prémices de la nouvelle pharmacie « sans contact ».

1. Calcul Au début de la saison de chauffage, la cuve de fuel de M. Dupont d’une capacité de 1000 litres est pleine. Alors que la cuve est encore pleine au quart, M. Dupont fait le plein avec un tarif de 2,10 € le litre. À la fin de la saison de chauffage, la cuve est pleine au cinquième, et M. Dupont fait le plein au tarif de 2,80 € le litre.

Quelle est en euros sa dépense de fuel pour cette période ?

A. 3790 B. 3815 C. 3925 D. 4110 E. 4225

Sources : Lepoint et les Échos

Sources : The Scientist and Les Échos

28

En partenariat avec la FNEGE

D. Si chaque information permet séparément de répondre à la question.

E. Si les deux informations ensemble ne permettent pas de répondre à la question.

2. Raisonnement Au Parlement européen de Strasbourg trois députés dont les initiales des noms sont P, B et N comparent le niveau de richesse respectif de leur pays. La conclusion est la suivante : « c’est l’Allemagne la plus riche ». Plus précisément, le pays de P n’est pas plus riche que le pays de B et ce dernier n’est pas plus pauvre que le pays de N. Qui, de P, B ou N, est (ou sont) de nationalité allemande ?

A. P B. B C. N D. P & N E. Il est impossible de le déterminer

4. Compréhension / Expression Lorsque le médecin ne comprend plus, ne sait plus quoi faire, est à bout de ses ressources thérapeutiques « normales », il peut placer ses espoirs de guérir son patient en lui prescrivant un produit placebo, dont il peut espérer le succès sans être capable de l’expliquer.

A. un médicament pharmacologiquement neutre, donné pour plaire et pour apaiser le patient.

B. une médecine donnée au malade pour lui plaire, non pour le guérir.

C. une sorte de médicament sans principe pharmacologique propre, mais pouvant avoir un effet psychologique favorable.

D. un produit extérieurement semblable aux meilleurs médicaments, mais dépourvu de principe actif.

E. un faux médicament pour guérir les faux malades.

. Conditions Minimales 3 En séance au Parlement Européen, on dénombre dans l’hémicycle 66 femmes de plus que d’hommes. Combien y a-t-il de femmes dans l’hémicycle ?

1. Le nombre d’hommes est un multiple de 6.

2. Le nombre d’hommes correspond à la moitié du nombre de femmes.

Vous cocherez : A. Si l’information (1) permet à elle seule de répondre à la question, et si l’information (2) à elle seule ne permet pas de répondre à la question.

B. Si l’information (2) permet à elle seule de répondre à la question, et si l’information (1) à elle seule ne permet pas de répondre à la question.

C. Si les deux informations (1) et (2) ensemble permettent de répondre à la question, et aucune séparément ne le peut.

5. Compréhension / Expression Dans l’histoire de la langue, les mots sont comme des hôtels qui hébergent le moins de locataires possible. Seuls de vieux mots prestigieux sont suffisamment grands pour loger plusieurs familles sans expulser pour autant les premiers arrivants.

C’est ainsi que...

A. Le vieux cinématographe était si grand qu’il a pu donner successivement naissance au cinéma , puis au ciné.

B. Micro était déjà le diminutif de microphone, bien avant de devenir celui de micro-ordinateur.

C. Nourrice et tonnelle étaient de bons vieux mots français, passés en Angleterre avant de nous revenir sous la forme de nurse et tunnel.

D. Nestlé a vu sa descendance s’étoffer avec l’apparition des nouveaux produits de la

29

L’INDUS N° 23 > Tests

LABORATOIRES AUVEX

+ TVM + EUROPHARTECH

70 ANS D’INNOVATION EN SANTÉ ANIMALE

gamme : Nescafé , Nestea , Nesquick , etc.

E. Le carrossier qui s’occupait des carrosses a ensuite appliqué sa compétence aux automobiles.

6. Logique Quel chiffre remplace le point d’interrogation ?

3612

71428

A. 4816 B. 47852 D. 93 E. 248

SANTÉ ANIMALE + SANTÉ HUMAINE

61224

C. 159

+

Le TAGE MAGE est une marque déposée par la FNEGE.

Plus de d’informations sur : www.tagemage.fr La préparation en ligne officielle du TAGE MAGE : www.prepmyfuture.com/tagemage

Que ce soit dans la recherche, le marketing, le réglementaire ou la qualité, le groupe Dômes Pharma offre aux pharmaciens de nombreuses opportunités d’exprimer leurs talents, quel que soit leur profil.

Suivez-nous sur les réseaux sociaux et consultez nos offres sur domespharma.com

Solutions : 1. B / 2. B / 3. B / 4. C / 5. E / 6. E

81632

186 217 ?

124 62

30

Un groupe pharmaceutique international indépendant

5

AIRES THÉRAPEUTIQUES : MALADIES CARDIOVASCULAIRES, DIABÈTE, CANCERS, MALADIES IMMUNO-INFLAMMATOIRES ET NEUROPSYCHIATRIQUES

PRÉSENT DANS

149 PAYS

PLUS DE

250

PARTENAIRES DANS LE MONDE

21 700

25 %

COLLABORATEURS DONT

2 200 EN R&D

4,15

DU CHIFFRE D’AFFAIRES (HORS GÉNÉRIQUES)

INVESTIS CHAQUE ANNÉE EN RECHERCHE

MILLIARDS D’EUROS DE

CHIFFRE D’AFFAIRES EN

& DÉVELOPPEMENT

2016-2017

ouvert aux étudiants et jeunes diplômés Retrouvez toutes nos opportunités étudiantes sur

www.servier-campus.fr

Tous les ans, de nombreux étudiants intègrent nos équipes dans des domaines aussi variés que la recherche et le développement, la production, la promotion et les fonctions transverses (juridique, finance, RH, systèmes d’information, etc.).

Rejoignez un groupe engagé, innovant et reconnu comme l’une des meilleures écoles de formation de l’industrie pharmaceutique.

Stages, alternances, V.I.E., postes junior, etc.

Découvrez les possibilités de carrières offertes par la diversité de nos métiers et notre présence à l’international.