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REDÉCOUVRIR LE BOIS

Pour parvenir aux objectifs européens de réduction des émissions de carbone, le BTP redécouvre le bois.

En effet, les meilleures performances de réduction des émissions de gaz à effet de serre sont obtenues quand le bois est présent comme matériau de construction dans les bâtiments, en remplacement de matériaux traditionnels particulièrement énergivores. Steven Ware est architecte au sein de l’agence européenne ArtBuild, « J’étais biologiste avant de devenir architecte. J’ai donc une certaine sensibilité pour le vivant. Et celui-ci est une source d’inspiration à plusieurs niveaux : il ne s’agit pas seulement respecter la nature, la biodiversité, mais aussi d’essayer de comprendre comment le vivant fonctionne et pourquoi la notion de carbone est si importante. Le changement climatique nous pousse à regarder bien plus vers l’avenir que ce que l’on avait l’habitude de faire jusqu’à présent. L’univers de la construction ne peut plus reposer principalement sur l’acier et le béton. Il nous faut déplacer le curseur vers des matériaux biosourcés, le bois, le chanvre, le lin,… Au sein de notre agence, nous sommes conscients que le secteur du bâtiment a développé beaucoup de mauvais comportements, de mauvaises habitudes au siècle dernier » . L’architecte insiste : « Les crises profondes auxquelles nos sociétés contemporaines sont confrontées – climatiques, économiques, sociales – nécessitent de revoir la conception des bâtiments quelles que soient leurs destinations, habitat, bureaux, tertiaire. Et c’est là que le matériau bois intervient. Parce que non seulement il s’agit d’un matériau dans lequel on se sent bien, mais parce qu’il permet de concevoir un bâtiment de qualité, modulaire, préfabriqué, et à faible empreinte écologique » . C’est ce dont témoignent les projets en cours de l’agence : à Bordeaux, l’ensemble résidentiel Silva, avec trois lots de grande hauteur dont un de 16 étages intégrant majoritairement le bois dans sa structure avec des planchers en CLT et des façades poteau-poutre en bois lamellé-collé de provenance locale. Ou encore le chantier du nouveau siège social d’Engie à La Garenne Colombes, en région parisienne. Le choix du bois révèle d’autres avantages, l’accélération des travaux sur site, la réduction des déchets, l’amélioration du comportement sismique et une réduction significative des fondations.

Ossature bois, poteau-poutre ou CLT ?

« D’une certaine façon, les systèmes constructifs de nos immeubles, en ossature bois et poteau-poutre, ne sont pas très éloignés de la charpente traditionnelle et de l’ossature bois que l’on utilisait il y a plus d’un siècle » rappelle Paul Jarquin, le président du groupe immobilier REI Habitat qui précise « ils ne seront ni obsolètes, ni fragiles dans 15 ans. La construction bois est une tendance qui s’installe dans le moyen et le long terme. les produits biosourcés gagnent en visibilité dans les métropoles. Tous les promoteurs immobiliers commencent à intégrer le fait que, en 2028, c’est-à-dire demain, les bâtiments devront comporter des niveaux très importants de bois et de biosourcés. Il ne s’agit pas d’un effet de mode, mais bien d’un enjeu de transition énergétique, écologique, pour une neutralité carbone à 2050. Dans la réhabilitation comme dans le neuf, ça passe par les matériaux bois et biosourcés » . REI Habitat est un promoteur écologique " historique ", constructeur de logements en bois depuis 15 ans, dont le système constructif de référence associe le poteau-poutre et l’ossature bois. Un choix délibéré qui correspond aux bâtiments conçus par le groupe immobilier : « L’ossature bois s’entend pour des immeubles inférieurs à cinq étages. Au-delà, le poteaupoutre prend le relais, avec de l’ossature bois en remplissage » . Un concept de semi-industrialisation qui se poursuit par de l’assemblage sur site. « Nous construisons sur ce modèle depuis une dizaine d’années. A l’époque déjà, nos murs arrivaient complètement finis, avec l’isolation, le pare-pluie, les menuiseries extérieures jusqu’au bardage qui était également posé en usine » . Pour Paul Jarquin, le système est arrivé à son point d’orgue. « Nous n’avons plus à innover dans ce domaine, d’autant que ce sont des solutions qui sont également devenues économiquement performantes ». Quant à construire en CLT, le promoteur n’y est pas opposé, mais le système constructif en couches de lamelles de bois croisées et pressées correspond peu à la démarche de frugalité qui est l’une des signatures du groupe « Pour nous, l’autre nom de la construction bois, c’est la construction écologique. Et lorsque l’on pense écologie, il y a la notion du " moins, c’est mieux ", si chère à Philippe Madec*. Le fait de puiser moins de ressources, même dans la construction bois, c’est opter pour la frugalité et cela fait sens ». Plus gourmand en bois, le CLT l’est indéniablement. « En modélisant un immeuble avec notre système constructif, puis en CLT, on s’aperçoit que le projet en CLT consomme deux fois plus de bois et d’arbres.

Le bois a beau être une ressource renouvelable à l’infini, elle n’est pas non plus illimitée. Il est très important d’avoir cette réflexion » . Mais c’est aussi cette masse volumique qui permet au CLT de concurrencer le béton, ou même l’acier. « Aujourd’hui, la construction bois compte en son sein plusieurs technologies et systèmes constructifs qui lui permettent de répondre à toutes les typologies de bâtiment », confirme Charly Régnier, responsable développement au sein du groupe Stora Enso spécialisé dans la production de CLT. Le groupe a d’ailleurs mis au point un outil de travail permettant de tester différents systèmes constructifs par rapport à un projet, ses contraintes et son budget. « Par exemple, dans le cas d’un projet d’établissement scolaire, nous pouvons évaluer une construction tout CLT, CLT / lamellé-collé / ossature bois ou encore avec une poutraison métallique, et proposer la meilleure option à notre client ».

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