A/R Magazine voyageur

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« Le vrai péril du tourisme c’est sa tendance à la superficialité. » Edgar Morin Amoureux du monde

Magazine voyageur – www.ar-mag.fr

miam-miam

Hanoï, restaurant à ciel ouvert

Guide du queutard  Japon, l’Empire des sens interdits

Colombie à la recherche de la cité perdue

Tourista

Voyage désenchanté au Tibet

Heureux qui comme Le tour du monde en vélosolex

aller retour N°08 — sept. / oct. 2011

bretagne

Le chemin de groix

Finlande

Turku, capitale européenne de la culture 2011

Liban

Beyrouth où va la nuit ?

nouvelle zélande —

Parc national de Te Urewera

Durable

du microcrédit au tree climbing : 20 pages pour partir autrement

L 13134 -7- F:- 5,50 e - RD L 13134 8 - F: 5,50

€ - RD



A/R magazine voyageur — 3

A / R magazine voyageur 1 rue du Plâtre — 75004 Paris 06 87 83 22 56 www.ar-mag.fr

l’édito Sandrine Mercier —

Directeur de la publication M ichel Fonovich mfonovich@ar-mag.fr Rédactrice en chef Sandrine M ercier smercier@ar-mag.fr Reporter Christophe M igeon cmigeon@ar-mag.fr Directeur artistique A lbéric d’H ardivilliers alberic@ar-mag.fr Maquette L éopoldine Solovici Journalistes C amille Rustici Lucas L ahargoue Stagiaire Justine Briot Diffusion MLP Service des ventes (réservé aux professionnels) Vive la P resse 09 61 47 78 49 Imprimeur Agir Graphic – L aval Publicité A/R publicité pub@ar-mag.fr B&H régie bhanicotte@bhregie.com 06 12 98 51 05 Publication bimestrielle Prix de vente : 5,50 € Édité par les éditions du Plâtre SAS au capital de 10 000 € Siège social : 1 rue du plâtre — 75004 Paris R.C.S : 523 032 381 / ISSN : 2108-3347 CPPAP : 1015K90544 © A/R magazine voyageur La reproduction, même partielle, des articles et illustrations publiées dans ce magazine est interdite.

Prenez le vert Au train où vont les choses, 2011 finira bien par passer. On se souviendra plus tard que cette année-là, Albert avait dit oui à Charlene et que les forêts avaient connu leur année de gloire grâce à l’ONU. 2011 Année internationale des forêts. Comment rester insensible à leur appel ? A/R est allé dans le Morvan grimper et dormir à la cime des chênes, en Nouvelle-Zélande où les arbres moussus ressemblent à des croque-mitaines et jusqu’en Colombie dans la Sierra Nevada Santa Marta qui dissimule sous sa jungle impénétrable, la cité perdue de Teyuna. Et puis c’est tout ! Essayez de vous promener dans les bois sur l’île de Groix. C’est impossible, un peu comme si Charlene voulait enfoncer ses ongles et ses doigts délicats dans la « jongle » des cheveux de son prince. Et au Liban, si quelques cèdres résistent encore par-ci par-là et même si un irréductible a pris racine sur le drapeau, la majorité a rendu l’âme. Pas de forêts donc, ce qui ne les empêche pas de figurer dans ce numéro : jours paisibles en Bretagne et nuits débridées à Beyrouth. Sachez-le, on se prépare déjà pour 2012 qui a été désignée Année des coopératives. Je vous embrasse. Sandrine

Image de couverture : Christophe Migeon

A/R est nominé aux Trophées du Tourisme Responsable de la SNCF dans la section Information. Les lauréats seront dévoilés le 21 septembre à Paris, Porte de Versailles à l’occasion du salon IFTM Top Résa. Le lendemain soir, on célèbrera la sortie de ce numéro dans une ambiance colombienne. Lieu à découvrir sur www.ar-mag.fr, Facebook et Twitter. n°08 / septembre — octobre 2011


4 — A/R magazine voyageur / carnet

Sommaire sept. / oct. 2011

Regards :

006

Antoine Blanchet & Gaëlle Le Gélard 010 — 023

Carnet Actus : 010 Nos adresses 012 L’entretien : 014 Edgar Morin

Bric-à-brac Culture :

018 019

Archi / Livres / Ciné / Agenda 026 — 065

Le guide du queutard :

095 L’empire des sens interdits Carnettiste : 096 Stéphanie Ledoux Je vous écris de : 098 Patrick Bard à Santiago du Chili

Contributeurs : Patrick Bard (PB), Anne Chabot (AC), Vanessa Chambard (VC), Laurent Delmas (LD), Jean-Luc Eyguesier (JLE), Antonio Fischetti (AF), Stéphanie Ledoux (SL), Jean-François Mallet (JFM), Valéry Poulet (VP), Ariane Puccini (AP), Matthieu Raffard (MR), Guillaume Reynard (GR), Juliette Robert (JR), Albert Zadar (AZ)

Partir Week-end : Turku / Finlande France :

Île de Groix / Bretagne Liban : Beyrouth, où va la nuit ? Colombie : à la recherche de la Cité Perdue

026 030 040 052

068 — 085

Durable Actus : 068 Nouvelles fraîches mais durables De l’air : 070 Petites distances, grands plaisirs Parc National : 072 Te Urewera / Nouvelle-Zélande C’est quelqu’un ! : 080 Jérémy Camus Passage à l’acte : 082 Tree Climbing

Bretagne : Le chemin de Groix P.30

Beyrouth : Où va la nuit ? P.40

Parc national : Nouvelle-Zélande P.72

Guide du queutard : Japon P.95

088 — 098

Bazar Miam-Miam :

088

Hanoï

Heureux qui comme : 092 Paul-Henri Vanthournout

Tourista

Le Tibet désenchanté septembre — octobre 2011/ n°08

094


carnet L’entretien : Edgar Morin Cinéma : Habemus Papam Agenda : La Normandie a 1100 ans

N°08 2011

sept.oct.


6 — A/R magazine voyageur / carnet

regards de photographes —

Lofoten, Norvège

septembre — octobre 2011/ n°08

Antoine Blanchet —

Né à Paris en 1981, Antoine se consacre à des études de cinéma à l’université Paris 8 (Saint-Denis) qu’il poursuit ensuite à New York. Sur place, il réalise un premier court-métrage de fiction, “Land Without Shadows”, sélectionné dans plusieurs festivals américains. Il germera de ce film une exposition photographique sur Coney Island, rue du Vertbois, à Paris. Depuis, Antoine continue à travailler sur les paysages et les atmosphères de ses différents voyages (Colombie, Thaïlande, Norvège et Brésil). www.antoineblanchetfilms.tumblr.com


carnet / A/R magazine voyageur — 7

Gaëlle Le Gélard —

Née en 1988, Gaëlle Le Gélard est diplômée de l’ESAG Penninghen. De sa passion pour le Grand Nord, elle a fait le centre de son travail. Lors d’un séjour de six mois en Islande, elle a construit un projet qui s’est par la suite concrétisé avec son diplôme : un atlas des géographies sensibles des régions polaires, 350 pages de photos et d’histoires sur un maxi format. Les thèmes principaux de son travail, aussi bien graphique que photographique, sont le silence, l’espace et la lumière … et bien sûr les hommes, même rares. www.gaellelegelard.com

Islande

n°08 / septembre — octobre 2011


14 — A/R magazine voyageur / carnet

l’entretien

Edgar Morin

« Je suis amoureux du monde » à

90

ans il est l’intellectuel français le plus reconnu à

l’étranger, docteur honoris causa de 28 universités à travers

! il n’a pas été facile de caler un rendez-vous dans son agenda de grand voyageur. edgar morin nous reçoit chez lui à paris en plein déménagement. les souvenirs remontent sans brouiller sa curiosité pour le monde. le monde

Propos recueillis par : Sandrine Mercier Photos : Matthieu Raffard

De retour du Maroc, vous partez bientôt ver ce que faisait Montesquieu dans les au Brésil. Êtes-vous souvent en voyage ? Lettres Persanes, essayer de se voir avec le En ce moment, je suis plutôt en déména- regard des autres. gement, car je dois quitter mon appartement. C’est aussi un autre voyage. Quitter Voyagez-vous encore pour le simple plaisir ? un lieu où il y a tellement de souvenirs Je lie mon plaisir à mes voyages. Invité à qui me lient ! Partir c’est mourir un peu, des conférences dans le monde entier, j’ai alors il faut ressusciter après. Cette année le plaisir d’exprimer mes idées, mais aussi j’ai 90 ans, et tous les dix ans, quelque de découvrir quelque chose qui me chose change dans ma vie, quelque chose touche, m’émeut. Pas seulement la beauté meurt et quelque chose renaît. Quand des paysages, mais aussi la bonté des gens, j’avais dix ans, en 1931, ma mère est la vitalité des peuples, la nourriture. Je morte, quand j’ai eu vingt ans, j’ai pris le crois que je suis amoureux du monde risque mortel de la Résistance. À trente parce que partout où j’ai été, j’ai trouvé ans, je suis rentré au CNRS. Je ne vais des voluptés, des ivresses, des joies, des pas vous faire toute la liste, mais tous les émerveillements … dix ans ma vie change. Y a-t-il un pays, une destination pour Une définition du voyage ? laquelle vous avez une attirance particulière ? Le voyage c’est surtout le décentrement, La Toscane. Il y a une densité de beauté c’est à dire regarder d’une autre façon plus grande qu’ailleurs. Les villages, les l’Hexagone. En restant en France, on est paysages m’émeuvent beaucoup … Je prisonnier d’une vision close, on ne se dirais aussi Séville et l’Andalousie, je voit pas « vu de loin ». L’idée est de retrou- dirais le Brésil … septembre — octobre 2011/ n°08

L’idée de l’île, c’est quelque chose qui vous fait rêver ? Oui. Je rêve à l’île et je rêve à l’oasis. Ce sont deux formes différentes mais qui veulent dire la même chose. D’un côté, autour c’est la mer, et de l’autre, le désert. Ça parle de l’infini. C’est quelque chose de riant d’être dans l’infini de la mer ou dans l’infini du sable. C’est un rêve profond en moi. Alors que le monde est en ébullition depuis quelques mois, est-ce qu’il n’est pas frivole de s’intéresser au voyage, à la beauté du monde ? Le voyage n’est pas que dans le plaisir esthétique. J’avoue que j’ai de moins en moins envie d’aller dans des musées ou dans les grands lieux. Par exemple pendant longtemps je voulais aller aux chutes de l’Iguaçu à la frontière du Brésil et de l’Argentine, maintenant je n’en ai plus tellement envie, ce qui m’intéresse vraiment c’est la diversité de l’hu-



30 — A/R magazine voyageur / partir

Île de Groix / Bretagne

Le chemin de Groix Île de Groix / Bretagne Texte & images: Christophe Migeon

À trois miles nautiques des côtes du Morbihan flotte un caillou incrusté de chapelles et serti de plages blondes. Sur Groix, les thons remplacent les coqs à la pointe des clochers, les chemins ne mènent pas à Rome, mais se perdent dans la lande et les canots – prononcer « canote » – se mènent toujours à la godille.

01

septembre — octobre 2011/ n°08


partir / A/R magazine voyageur — 31

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à

Groix, les départs sont peutêtre plus émouvants que les arrivées. Lorsque la navette qui fait la liaison entre l’île et Lorient quitte le bassin de Port-Tudy 04 au prix d’une manœuvre qu’on n’oserait même pas tenter à bord d’un pédalo, les gens qui restent éparpillés sur les quais, font de grands moulinets avec les bras et pleurent le départ des malheureux contraints de réintégrer le tourbillon de la vie continentale. Certains vont jusqu’à grimper sur les bittes d’amarrage et se mettent à battre des ailes comme s’ils voulaient décoller dans cet air breton gonflé d’impalpables voilures. Une prétention qui ne manque pas de faire glousser les goélands. Le navire s’éloigne avec son chargement de damnés en route vers leur purgatoire de cités putrides et d’emplois du temps congestionnés. À moins que ça ne soit Groix elle-même qui ait largué les amarres et gagne le large, loin des embardées et des coups de roulis d’un monde frénétique.

La dolce vita ou presque

« Vivre à Groix, c’est d’abord être peinard » confie William Duviard, un charpentier de marine au tempérament d’artiste. « La vie ne s’écoule pas à la même

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vitesse qu’en face. Et puis le trajet en navette permet de filtrer les ennuis. On les laisse de l’autre côté, sur le continent. L’île en cela est très protectrice. » William est roux, peut-être aussi un peu fêlé, du moins suffisamment pour baptiser son atelier Le rouquin marteau. Ouvert sur le port, c’est un parfait observatoire du microcosme groisillonnais. Tout en poursuivant à petits coups de pinceau vifs la finition d’une marine sur bois, William raconte la quiétude insulaire, les maisons qu’on ne ferme jamais à clé, les ardoises dans les cafés ou les épiceries qu’on ne règle qu’en fin de mois, l’extraordinaire sensation quelque soit l’endroit de l’île d’être dans son propre jardin. Une dolce vita pur beurre salé … Mais le paradis armoricain délivre hélas quelques fruits pourris. « Ici chacun sait ce que font les autres. Groix est un petit bocal où il est bien difficile d’échapper à la loupe des voisins. Une liaison extra-conjugale est impensable. Alors, il faut fermer ses écoutilles et s’isoler des ragots. » Quand on habite à Groix, il n’y a nul endroit pour fuir l’adversité. Il faut faire face et l’affronter. Il y a notamment cette horripilante revendication des origines, cet ostracisme diffus qui distingue ceux dont les aïeux engraissent la terre

01. Du granit, du lichen c’est Pen Men... 02. L’entrée de Port-Tudy 03. La chapelle de Kelhuit sous un éventail de cirrus

du cimetière depuis des générations, et les autres, « immigrés de fraîche date » : « Voilà 15 ans que je suis installé à Groix. Mais ça ne suffit pas. Je ne suis qu’un néogroisillon. Quand on me reproche de ne pas être d’ici, je réponds toujours la même chose : je suis venu améliorer l’espèce … » conclut le rouquin exogène, un rire mal éteint couvant dans ses yeux plissés.

Deux drôles de Groisillons

On s’échappe de Port-Tudy par des ruelles pentues semées de bistroquets aux enseignes alléchantes pour déboucher d’une façon ou d’une autre, devant l’église de Loctudy, ou plutôt du Bourg comme on préfère dire par ici. De là, un complexe lacis de routes part en étoile dérouler son maigre bitume sur le vert pâle d’une lande déplumée. Les gens soucieux de respecter leur programme à la lettre s’efforceront de déchiffrer la carte au prix de sérieux maux de tête. Les n°08 / septembre — octobre 2011


44 — A/R magazine voyageur / partir

Beyrouth / Liban

les turpitudes politiques n’ont jamais raison de la fête au liban, elles la déplacent tout au plus.

septembre — octobre 2011/ n°08


partir / A/R magazine voyageur — 45

la fête malgré tout

Difficile de savoir si cette frénésie nocturne cherche à conjurer l’angoisse du lendemain ou si elle se nourrit de cette incertitude.

n°08 / septembre — octobre 2011



partir / A/R magazine voyageur — 53

colombie

LES AVENTURIERS DE LA CITÉ PERDUE Dans la Sierra Nevada de Santa Marta, les vestiges précolombiens d’un village Tayrona retrouvés par hasard dans les années 70 sont aujourd’hui l’objet d’un fameux circuit de randonnée au cœur d’une forêt qui fut naguère le théâtre de luttes acharnées et d’obscurs trafics. Un trekking véritablement initiatique pour pénétrer enfin un monde hors du temps et loin de l’homme blanc. Texte & photos: Christophe Migeon

n°08 / septembre — octobre 2011


partir / A/R magazine voyageur — 53

colombie

LES AVENTURIERS DE LA CITÉ PERDUE Dans la Sierra Nevada de Santa Marta, les vestiges précolombiens d’un village Tayrona retrouvés par hasard dans les années 70 sont aujourd’hui l’objet d’un fameux circuit de randonnée au cœur d’une forêt qui fut naguère le théâtre de luttes acharnées et d’obscurs trafics. Un trekking véritablement initiatique pour pénétrer enfin un monde hors du temps et loin de l’homme blanc. Texte & photos: Christophe Migeon

n°08 / septembre — octobre 2011


88 — A/R magazine voyageur / bazar

miam-miam Goûts & saveurs venus d’ailleurs

Manger à Hanoï  Hanoi est un restaurant à ciel ouvert. C’est dans la rue que se déguste le meilleur de la cuisine populaire. À toute heure de la journée, on y trouve des barbecues improvisés où grillent des brochettes de porc à déguster accompagnées d’un bouillon au nuoc-mam et d’herbes fraîches. Il suffit de se caler sur de minuscules chaises en plastique prévues pour des enfants et aussitôt les plats arrivent. Chaque maison a sa spécialité : soupes, viandes, volailles, poissons, fritures, desserts. Pour avaler un repas complet, il est nécessaire de changer d’endroit plusieurs fois et donc de faire la queue plusieurs fois si l’on considère que les gargotes devant lesquelles elles se forment sont les meilleures. À l’heure du fastfood mondialisé, chaque plat est le témoignage brillant d’une cuisine populaire qui résiste. septembre — octobre 2011/ n°08

Images: Jean-François Mallet


bazar

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Les adresses de Jean-François 1 Chà Cà La Vong Mangez un poisson préparé devant vous dans une poêle et assaisonné d’herbes diverses et d’arachides. Une spécialité de la ville depuis 1871. Absolument délicieux. 14 rue Cha Ca 38 25 39 29 2 Quynh Nga Une minuscule échoppe où déguster les meilleurs Bun Cha de Hanoi. Déroutant et savoureux 1 rue de Hué 38 26 34 16 (téléphoner avant pour être sûr) 3 Ban Tom Ho Tay Où découvrir les meilleurs pâtés impériaux de la ville et une spécialité : les beignets de crevettes ultracroustillants Duong Thanh Niên- Tây Hô 38 29 37 37 4 Mai Anh Un restaurant typique où l’on déguste de sublimes soupes au poulet. Un bouillon léger de nouilles goûteuses avec des morceaux de poulet émincés posés sur le dessus du bol. 32 Lê Van Huu 39 43 84 92

n°08 / septembre — octobre 2011


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