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Biodynamismes en milieu urbain



Biodynamismes en milieu urbain

Comment revaloriser la biodiversité dans l’espace urbain ?

Arthur Schmidt Enseignant encadrant : Christophe Huon Mémoire de fin d’étude Master 2 Architecture, Ingénierie et Environnement - ENSA Nancy Année 2018-2019 Soutenance : 01/03/2019 Jury : Christohpe Huon (Ingénieur / Maître de conférences associé ENSAN) Veronika BOLSHAKOVA (Architecte / Doctorante CRAI)


Avant-propos Réchauffement climatique, extinction des espèces, montée du niveau des océans, épuisement des ressources... L’équilibre entre Homme et Nature est de plus en plus fragile et se détériore de jour en jour. La nécessité d’un changement drastique du modèle de vie actuel s’impose peu à peu pour chacun d’entre nous. Ces constats, simples à théoriser et pourtant difficiles à traiter, ont toujours été pour moi le moteur d’une réflexion particulière. Tout au long de ma formation, d’architecte comme personnelle, je n’ai jamais cessé de me poser un cadre écologiques, c’est-à-dire de trouver des voies plus respectueuses de l’environnement dans mes gestes quotidiens. Mon investissement a le plus souvent été personnel et étendu à mes proches, je ne me suis que très rarement engagé au travers d’actions plus larges. Même si je témoigne un profond respect pour les personnes capables et désireuses de changer l’opinion public, j’ai toujours pensé qu’un petit geste répété chaque jour serait lui aussi moteur d’un changement plus grand.


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Mais aujourd’hui j’en arrive au terme de ma formation, même si la vie active me paraît encore floue et lointaine, j’ai acquis la conviction, depuis quelques années déjà, de la nécéssité de me servir de mon futur statut d’architecte comme d’un tremplin pour transmettre mes idéaux écologiques. Il m’a toujours été donné de penser que l’architecte jouissait d’un statut majeur sur la gestion, la conception et la construction du patrimoine bâti, qui est un secteur d’enjeux capital dans le renouvellement de nos modes de vies vers un modèle plus responsable - le petit geste moteur d’un changement plus grand. Si mes actions sont encore à l’état de projet, mes idées se sont déjà façonnées et développées depuis le début de ma formation d’architecte et par mes expériences personnelles. C’est dans cette optique que je me suis lancé dans la rédaction d’un rapport d'étude de licence consacré aux Earthships à la fin de ma troisième année. Ce modèle constructif, développé par l’architecte américain Mickaël Reynolds, fait l’apologie d’un bon nombre de principes liés à l’écoconstruction, tout particulièrement le réemploi de matériaux. Bien que très enrichissant, ce rapport m’a aussi permis de développer une pensée critique forte sur ce type de constructions, en particulier dans leur

réel impact écologique, bien plus conséquent que dans le modèle théorique de Reynolds. Si ce rapport a pu fragiliser mon intérêt pour ce genre de projet il m’aura tout de même conforté et fait évoluer dans ma quête personnelle d’une architecture plus "propre". Dans cette optique et dans la continuité de mon sujet de licence, j’avais d’abord songé à concentrer ce travail sur l’utilisation du déchet en architecture. Estimant avoir déjà beaucoup étudié la question, j’ai fait le choix de m’ouvrir une nouvelle voie et de ne plus me focaliser sur des matériaux ou de la mise en œuvre, mais sur le vivant, acteur peut-être encore trop ignoré du monde du bâtiment.


Remerciements Je souhaiterais tout d’abord exprimer ma reconnaissance à Christophe Huon, mon enseignant encadrant pour ce travail, pour sa patience et son aide dans l’élaboration de ce mémoire de fin d’études, et pour ses réflexions toujours pertinentes dans un sujet dans lequels nous partageons beaucoup d’idées. J’aimerai ensuite adresser mes sincères remerciement à Sébastien Heim, Président et fondateur de l’association Hyménoptera, pour ses précieux conseils et les temps passé avec moi sur ce travail, mais aussi pour son magnifique engagement en faveur de la biodiversité. Merci à Ludivine Gay, Etienne Paquet, Benjamin Hartheiser et Tristan Klieber pour leur amitié et pour nos nombreuses discussions sur des sujets attenants à l’approche environnementale dans le bâtiment ou la vie de tous les jours. Je connais grâce à vous la valeur pédagogique du débat et de la discussion. Mention particulière à Ludivine et Benjamin pour l'aide à la mise en forme et au dessin.


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J’adresse également mes sincères remerciements au corps enseignant de l’ENSA Nancy, qui a su me guider dans ma formation et m’amener à toutes les réflexions qui ont abouti à ce travail. Plus en amont, je souhaiterais remercier ma famille pour l’éducation, les principes et le goût du travail qu’elle m’a transmis et dont je suis fier, et ses encouragement quels que soient mes projets. Je souhaite aussi remercier mon frère Eliott, qui a su me redonner le goût de la lecture et de l’écriture, à une période à laquelle j’en avais grandement besoin. Mes sincères remerciements à Dominique, Ludivine et Eliott pour les nombreuses lectures et re-lectures de ce travail. Il n’aurai su trouver sa forme finale sans vos précieux conseils. À tous ces intervenants, je présente mes remerciements, mon respect et ma gratitude.


Sommaire

Biodynamismes en milieu urbain

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Comment revaloriser la biodiversité dans l’espace urbain ?

Introduction p. 10 I. LA PLACE DE LA BIODIVERSITÉ À L’ANTHROPOCÈNE p. 14 1.1. Un contexte d’urgence p. 14 1.2. La biodiversité et l’Homme p. 20 1.3. Importance dans la prise en compte écologique dans les projets p. 28 II. LE RÉACTIONNISME CONTEMPORAIN p. 32 2.1. La Loi p. 36 2.2. La conception p. 42 2.3. L’Homme et la biodiversité p. 64 III. LE PROJET CARRÉ NATURE p. 76 3.1. Analyse du site p. 76 3.2. Intentions conceptuelles p. 108 3.3. Projet p. 114 Conclusion p. 142 Bibliographie p. 146 Table des illustrations p. 152 Table des matières p. 156 Annexes p. 166

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Introduction

James Lovelock, scientifique indépendant et environnementaliste, développa dans les années 80 la théorie de Gaïa1. Selon lui, la Terre serait semblable à un “super-organisme vivant”, dont l’évolution serait marquée par les ères géologiques. Comme tous les organismes, la Terre serait capable de s’autoréguler, et serait formée de plusieurs organes : diversité vivante, sols, hydrographie, etc… Si cette théorie peut paraître assez extravagante, et rejetée de la sphère scientifique car impossible à démontrer, Lovelock théorisa pourtant l’interdépendance de ces systèmes, expliquant que la disparition de l’un d’entre eux entraînerait la chute des autres dans ce système équilibré. Ce phénomène est aujourd’hui largement accepté et l’on peut déjà en voir les conséquences : diminution de la biodiversité, dérèglements climatiques, etc… Lovelock nous amène ainsi sur la notion fondamentale d’interactions qui sera le thème principal développé dans ce travail. Nous nous concentrerons sur le système le plus menacé à l’heure actuelle : la biodiversité; d’où le choix du terme

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biodynamismes, notion empruntée à Grégoire Bignier dans son ouvrage Comment partager le monde habité?2, reflétant l’évolutivité et la capacité d’interactions du monde vivant.

environnementales que nous connaissons aujourd’hui, qui ébranlent peu à peu l’Homme, jusqu’à devenir des menaces à sa propre existence.

Et comment mieux étudier ces biodynamismes qu’en travaillant sur l'un des paysages les plus déséquilibrés de tous : l’espace urbain. Cette problématique est actuelle, après des décennies d’artificialisation de la société de consommation de masse, l’Homme cherche aujourd’hui à redéfinir ses rapports avec la nature dans le maillage urbain qu’il a construit et consolidé au cours de son histoire.

Si aujourd’hui la gestion du végétal est devenu le moteur de conception d’un urbanisme conscient de ces nouveaux enjeux, la prise en compte de la faune et de leurs interactions est encore trop peu développée dans l’espace urbain. Ce constat simple remet en question toute notre gestion d’un espace urbain responsable.

Et pourtant, ce rapport au naturel a constamment changé avec les époques, et avec la mentalité de ses contemporains. Elle a été intégrée historiquement à la ville par des arguments esthétiques, d’agréments, de santé, de symbolique ou encore d’économie, prônée par l'hygiénisme du XIX ème siècle par exemple, dans les villes antiques (Babylone) ou encore la culture bouddhiste. Aujourd’hui -et c’est un phénomène inéditl’Homme doit reconsidérer ses rapports avec la nature car elle est menacée par nul autre que lui-même. Le développement de cette conscience est étroitement liée aux crises

Néanmoins, pour intégrer la nature à la ville l’Homme doit apprendre à jouer avec de nouvelles contraintes : la nature n’est pas un matériau, elle est indomptable et n'obéira jamais aux limites que ce dernier lui impose, c’est pourquoi les villes ont toujours été construites pour se protéger de la nature, donc en opposition à celle-ci. Pour en assurer un contrôle précaire, il en dégage des types (jardins, parcs, etc...), car paradoxalement, s’il veut la renier, il en a aussi besoin et reconnaît ses qualités. Il n’existe donc pas de nature indéfinie ou sauvage en ville d’où l'extrême difficulté de ces enjeux : comment créer un espace naturel dans un territoire où même le naturel est artificialisé,

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et où l’évolution de ces espaces s’est toujours voulue isolée du monde sauvage? Pourtant, la ville peut aussi se montrer comme un espace favorable à la biodiversité, des chercheurs allemands ont notamment montré que le villes s’étaient historiquement installées et développées sur des points chauds de la biodiversité, et sont de ce fait des terrains pouvant être plus propices au développement ou réinsertion de biotopes3. Le choix d’un site pour fonder une ville a toujours été en relation avec la richesse de son paysage. Plusieurs caractéristiques en font un site d’installation propice à l’Homme : présence d’eau, densité végétale pour les matériaux de construction, de faune pour la chasse, ...etc. Pour résumer, l’Homme a toujours ou presque bâti sa société sur des biotopes riches.

C’est donc avec cet ensemble de contraintes et de dualités que nous tâcherons d’étudier ce rapport entre nature et espace urbain, mais aussi entre nature et Homme, en essayant de trouver une réponse à la problématique suivante : Comment et pourquoi les biodynamismes doivent-ils être pris en compte à la conception de l’espace urbain à l’ère de la crise écologique ? Quels en seront les apports, architecturaux comme environnementaux? Nous verrons comment l’espace urbain, qui s’étend de jour en jour pourrait devenir un secteur capital pour sauvegarder et donner un second souffle à une biodiversité qui se réduit ironiquement de jour en jour. Ce travail fera la plaidoirie de la nature en ville, et s’attachera à trouver un compromis équitable entre nature entretenue, nature aménagée, et nature sauvage. Ce travail s’appuiera principalement sur des recherches documentaires et entretiens, mais aussi sur des expériences personnelles. Il sera également l’occasion de développer un projet, inscrivant les principes qui seront défendus tout au long de ce texte à un contexte réel. Ce projet s’inscrira sur un ensemble

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collectif situé à Nancy, quartier Rives de Meurthe, baptisé Carré Nature. Ironiquement, cet ensemble collectif tend plus vers une artificialisation totale. Il montre néanmoins des possibilités d’aménagements vertueux et est situé dans un secteur en pleine mutation. Ce travail aboutira ainsi à la conception d’un projet, et nous nous attacherons à stratifier la méthode de conception pour mieux en comprendre l’aboutissement. Le plan de ce travail sera donc inspiré des phases de conception de l’architecte, élaborant peu à peu le scénario d'un projet. Dans la première partie nous étudierons donc le contexte global de cette crise environnementale qui redéfinira les rapport de l’Homme à la nature. Dans la seconde partie, nous préciserons nos intentions en travaillant à une échelle plus locale et en étudiant le contexte législatif et sociétal qui régit la construction, notamment grâce à l’étude des textes d’urbanismes mais aussi à l’étude des mœurs. Dans la troisième et dernière partie, nous détaillerons le projet à proprement parler, illustrant ainsi les propos précédemment défendus.

Lovelock, J., La Terre est un être vivant, L’hypothèse Gaïa (1979), Paris, Flammarion, 1993. 2 Bignier Grégoire, Architecture et écologie : comment partager le monde habité ?, Paris , éditions Eyrolles , 2012, p.70, Chapitre Biodynamisme 3 Kühn I., Brandl R. et Klotz S., 2004, The flora of German cities is naturally species rich, Evolutionary Ecology Research, 6, 749-764. 1

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I. La place de la biodiversité à l’Anthropocène 1.1. Un contexte d’urgence La crise écologique Pour comprendre la situation actuelle, passons tout d’abord en revue les événements clés qui ont amené la prise de conscience et la gestion actuelle de la crise environnementale. On reconnaît les premiers penseurs de la crise écologique dès le début du XXème siècle. Ces intellectuels n’ont pourtant pas su faire entendre leurs avertissements à la société occidentale moderne qui était alors baignée dans l’idéologie du progrès, déjà émise par les Lumières, et complètement embrassée par la société à l’Ère Industrielle. En somme, cette idéologie affirme que l’humanité et la société évolueront constamment vers des meilleures formes, grâce à des progrès matériels et moraux constant.4 Les Guerres Mondiales vont profondément ébranler cette idéologie, et rendre compte de la fragilité de la société. Durant ces guerres, les progrès technologiques ont dépassé de loin les progrès moraux. Comment mieux illustrer ce phénomène

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qu’en citant Hiroshima ou les "batailles-boucheries" de la Première Guerre Mondiale. La conception "traditionnelle" de la guerre a profondément changé au cours de ces deux guerres dûe à la nouvelle puissance de l’armement moderne.5 Néanmoins, aux guerres ont succédé des années d’euphorie, les Trente Glorieuses, qui auront tout de même étendu l’optimisme d’une croissance économique jusqu’aux années 90, empêchant ainsi le développement d’une conscience écologique du grand public. Et ce malgré les premiers signes de crise écologique durant la guerre froide, tels que la prise de conscience de la toxicité des engrais chimiques, pour l’Homme comme pour son environnement, par exemple. C’est à partir des années 70-80 qu’apparaissent les premiers mouvements sociétaux. La prise de conscience de ces minorités pourrait être liée aux grandes catastrophes industrielles (Tchernobyl, Bophal (fig. 1)) et les grands phénomènes de pollution transfrontalière (trou dans la couche d’ozone, pluies acides,...). Ces mouvements lancés dans les années 70 – probablement propulsés par l’édition du Rapport Meadow en 72, intitulé The Limits of Growth édité par des scientifiques

du M.I.T., qui annonce que la croissance matérielle perpétuelle entraînera tôt ou tard une dégradation des conditions de vie et de la démographie – ont permis la naissance de structures gouvernementales concentrées sur la gestion de la crise écologique comme par exemple le Ministère de l’Environnement en France6 et les premières lois de conservation de l’environnement. Ces années ont aussi donné naissance au mouvement écologique et permis la médiatisation de la crise environnementale, sensibilisant l’opinion publique, et imposant les premières contraintes écologiques au monde économique.7 C’est seuleument à partir des années 2000 que le processus s’accélère notoirement, et que la conscience écologique moderne s’installe peu à peu. Le développement des moyens de communication et les événements climatiques incontestables, signes d’une crise écologique, comme la canicule de 2003 en France par exemple, vont fortement développer la conscience écologique du grand public.

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En somme, la conscience d’une crise écologique n’a émergé que très récemment dans les mentalités. Le déni collectif de la majorité du XXème siècle a clairement retardé une action sociétale de freinage de la consommation abusive des ressources naturelles. Aujourd’hui la problématique reste la même, si la crise écologique est plus ou moins reconnue par tous, beaucoup de mentalités ne sont pas encore réellement prêtes à sacrifier confort, temps ou argent pour empêcher le phénomène. L’idéologie du progrès pousse encore et toujours au pillage des ressources alors que l’action collective n’est que très modeste. Biodiversité et biodynamismes

fig. 1, En 1984, un nuage de gaz toxique s’échappe d’une usine de pesticides à Bhopal (Inde) suite à une explosion, provoquant la mort de près de 25 000 personnes en quelque jour, et à l’origine de 200 000 handicaps graves.

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Pour bien comprendre les enjeux de ce mémoire, il nous faut également comprendre le rapport qu’entretient la biodiversité avec la crise environnementale. Mais avant tout, accordons-nous une petite réflexion étymologique du mot biodiversité. C’est un néologisme créé à partir du grec bios, vie, et de diversité venant du latin diversus, opposé, contraire, divers. Ce terme est apparu à la fin des années 80 et consacré par


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le Sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992 : "La diversité biologique, ou biodiversité, est la variété et la variabilité de tous les organismes vivants. Cela inclut la variabilité génétique à l’intérieur des espèces et de leurs populations, la variabilité des espèces et de leurs formes de vie, la diversité des complexes d’espèces associées et de leurs interactions, et celle des processus écologiques qu’ils influencent ou dont ils sont les acteurs."7 La biodiversité désigne donc l’intégralité de la diversité vivante, mais aussi la diversité du patrimoine génétique et des interactions des organismes. On considère que ce terme recouvre trois niveaux : - la biodiversité génétique qui concerne la variabilité des gènes au sein d’une même espèce - la biodiversité spécifique qui désigne l’ensemble des espèces qui peuplent la planète - La biodiversité des écosystèmes qui désigne la diversité de l’ensemble d’un milieu (par exemple la banquise, la forêt tropicale, ...etc)

Au-delà de la biodiversité, ce mémoire rendra surtout compte des échanges entre différentes biodiversités et la Société. Nous parlerons donc de la notion de biodynamisme, expliquée par Grégoire Bignier dans son ouvrage Comment partager le monde habité?. Ce terme, d’après Bignier, ajoute à la biodiversité « […] la notion d’évolution historique et génétique en même temps que la capacité du monde vivant à se déplacer dans l’espace [...]»8. Un biodynamisme rend donc compte de tout le fonctionnement d’une biodiversité, grâce à la compréhension de son évolution mais aussi de ses interactions, et soulève le fondamental schéma de l’interdépendance des organismes vivants. Cette notion de biodynamisme pourra, au fil de ce travail, nous amener à comprendre l'interaction entre espace urbain et milieu naturel. D’autre part, cette notion illustre particulièrement l’importance de l’interaction de la biodiversité avec un espace et un temps, un "contexte", en somme. Ces biodynamismes sont les fondements de la vie, car aucun organisme vivant ne pourrait subsister indépendamment, sans interactions avec son milieu ou ses pairs. La modification des milieux dûe à la crise écologique influe sur ces biodynamismes à toutes les

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échelles, amenant la destruction de cycles symbiotiques qui permettent aux espèces de cohabiter. Pour résumer, le déclin de la biodiversité engendré par l’action de l’Homme entraînera à terme le déclin de l’Homme. Le bilan de l’Anthropocène L’urgence de la situation est encore plus significative à l’observation de statistiques. Les chiffres sont édifiants et reflètent l’urgence de la situation. Concentrons-nous sur les organismes vivants et citons par exemple ceux de la Plateforme Intergouvernementale sur la biodiversité et les Services Ecosystèmiques (IPBES)9, qui a réuni en mars 2018 quelques 750 experts internationaux en Colombie afin de trouver des solutions pour lutter contre la disparition d’espèces animales et végétales dans le monde. Cette assemblée a permis de mettre en évidence que notre planète compte environ 8,7 millions d’espèces, parmi lesquels 91 523 figurent sur liste rouge, dont 25 821 sont menacées. La situation est telle que l’on parle de situation d’extinction

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de masse, la première depuis l’extinction des dinosaures, il y a 65 millions d’années. La faune a diminué d’environ 60% ces quarante dernières années. Et l’effondrement du monde vivant atteint d’autres secteurs : en termes économiques par exemple, la seule déforestation et dégradation des forêts engendre des pertes économiques de près de 3 600 milliards d’euros. Autre donnée dégagée par la IPBES, intéressante car illustratrice à part entière d’un biodynamisme dégradé : plus de la moitié des récifs coralliens ont disparu ces dernières années. Or le corail joue un rôle fondamental de captage de CO2 initialement présent dans l'atmosphère, fait peut être encore trop ignoré du grand public. Le captage de CO2 par les océans est contrairement à ce que l’on pense, à l’origine de 60% du captage de gaz à effet de serre contre seulement 30% pour la végétation. Ce captage est en très grande partie permis par la végétation sous-marine dont les coraux composent une grande partie. Les océans saturent, entre pollution par les plastiques et disparition de la biodiversité marine, il captent de moins en moins de gaz et ces phénomènes pourraient accélérer la hausse des températures de la planète.


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Cette partie aura permis de détailler l’état de la crise écologique à l’Anthropocène. Cette dernière notion désigne l’ère géologique actuelle, d’abord employée par les scientifiques soviétiques dans les années 60, ainsi dénommée car l’Homme a acquis une telle maîtrise (ou non-maîtrise ?) de son environnement qu’il en modifie la structure générale à l’échelle de la planète, le précipitant dans une nouvelle ère géologique. L’Anthropocène, dont les scientifiques débattent encore sur l’avènement, fait état de l’urgence de la situation environnementale aujourd’hui. Aussi, il est fondamental de comprendre la notion de biodynamisme pour comprendre par la suite comment l’architecte ou l’urbaniste devra et pourra en tenir compte dans ça conception de l’espace urbain. Notre environnement est un système d’échanges stables que l’Homme a dérangé profondément. On pourrait métaphoriquement comparer l’Homme aux espèces invasives, comme les poissons à tête de serpent en Floride10 ou les coccinelles asiatiques en Europe, qui ont d’ailleurs toutes deux étés introduites par l’Homme dans des milieux pour "réguler" les milieux naturels, et qui sont finalement entrées en concurrence avec les espèces locales jusqu’à les supplanter.

Histoire de la crise écologique, Conférence faite à Soulac par Simon Charbonneau pour l’association Agora,18 octobre 2012, Compte rendu disponible en ligne sur : http://biosphere.blog.lemonde.fr/2012/10/18/histoirede-la-crise-ecologique/ 5 Ibid 6 Aujourd’hui rebaptisé Ministère de la Transition Écologique et Solidaire 6 Ibid1 7 XVIIIème Assemblée générale de l’Union mondiale pour la Nature [UICN], Costa Rica, 1988. 9 Bignier Grégoire, Architecture et écologie : comment partager le monde habité ?, Paris ,éditions Eyrolles , 2012, p.70, Chapitre Biodynamisme 9 IPBES, science and policy for people nature, in Home, in Event and documents, in IPBES-6 Planetary, disponible en ligne sur :https://www.ipbes.net/ event/ipbes-6-plenary 10 Les poissons à tête de serpent on été introduits en Floride pour réguler la population de poissons chats, mais ces super prédateurs ont au bout du compte éliminé toutes les espèces de poissons et d’amphibiens locaux, jusqu’à laisser des milieux stériles dans un environnement humide fondamental de Floride. 4

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1.2. La biodiversité et l’Homme Nous allons à présent nous intéresser à la relation entre Homme et biodiversité. Bien sûr, ces rapports diffèrent selon la période, les sociétés dans lesquelles ils cohabitent et même le type d’espèces concernées. Illustrons ce dernier cas. Dans les luttes de maintien de la biodiversité, il nous est toujours présenté un certain type d’espèces qui semblent avoir une place tendre à l’Homme dans toutes les cultures, communément définies comme les "flagship species"11 citons pour exemple le tigre ou le dauphin. Les flagship species attirent sur eux la plupart des efforts de conservation au détriment peutêtre, d’autres espèces tenant des rôles tout autant importants à l’échelle du système naturel. Inutile d’expliquer que certaines espèces ont une "image", et ont toujours été présentées comme des nuisibles, araignées, guêpes, serpents et peuvent parfois simplement être tuées parce que l’Homme les présente comme des espèces qui n’ont pour seule vocation de lui faire du mal. Néanmoins, malgré l’intérêt de l’Homme pour les flagship spécies au détriment d’autres espèces, l’attention qui leur sera portée permet souvent d’entraîner la sauvegarde de milieux naturels complets, grâce aux zones protégées, intouchables car

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abritant une espèce choyée du grand public. Pour en rester sur la biodiversité animale, il nous convient de distinguer plusieurs espèces pour mieux comprendre leur relation à l’Homme. Cette classification concerne globalement l’intégralité des pays développés mais nous verrons ensuite que l’on peut y retrouver quelques singularités culturelles. Nous distinguons donc : -Les flagship species précédemment citées, qui sont très souvent des mammifères et sont très présentes dans le monde médiatique (éléphants, grands félins, etc...). -Les espèces domestiques qui ont un statut particulier à l’Homme, et dont la prise en compte dans l’espace urbain est d’ores et déjà évidente (espaces de jeux, gamelles d’eau sur les terrasses de restaurants, etc...) -Les espèces clé de voûte, c’est-à-dire les espèces prenant une position importante dans le cycle biologique, leur disparition pouvant entraîner la disparition d’autres espèces (certains hyménoptères12 par exemple, dont le rôle de pollinisateur est essentiel à beaucoup de milieux naturels, et particulièrement en Europe.) -Les espèces qui ont une valeur écologique et économique

qui dépasse largement l’exploitation qui en est faite, ici on parlera surtout des espèces destinées à la consommation ou à l’usage anthropique, totalement coupés de certains cycles naturels. Ces distinctions nous permettent d’établir un premier rapport entre le genre humain et les autres espèces qui l’entourent. Naturellement, le genre humain de la société de consommation moderne différencie psychologiquement différemment les espèces du tableau précédemment établi. Il aura plutôt tendance à les classer comme soit espèces domestiques, d’élevage, sauvage ou encore, de nuisible. Malgré cela, il existe encore des différences culturelles sur l’ensemble du monde. L’anthropologue Philippes Descola en établi les genres dans son ouvrage Par delà Nature et Culture.13

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En effet Descola dégage dans son ouvrage quatre classes de rapports entre l’Homme et le monde animal (fig. 2): -Les cultures naturalistes, qui considèrent les continuités physiques (darwinistes) mais distinguent le psychisme et prônent la singularité du genre Humain (ex: la culture occidentale moderne) -les cultures analogistes, qui excluent tout lien mimétique entre homme et animal mais intègrent des correspondances (ex : astrologie chinoise) -les cultures animistes, qui, à l’inverse des cultures naturalistes, confondent le psychisme, mais différencient le physique (ex : cultures animistes d’Amérique du sud) -les cultures totémismes, qui confondent intégralement genre humain et animal (ex : la culture aborigène australienne) Donc, d’après Descola, la notion de perception de la biosphère varie selon la culture dans laquelle elle s’exerce. Pour appliquer des rapports entre le monde Humain et naturel il est ainsi évident de comprendre ces rapports culturels localisés. Ainsi, il est ici illustré qu’il n’y a pas de solution universelle à l’intégration de la biodiversité dans l’espace artificialisé urbain.

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Il nous faut désormais comprendre comment et pourquoi la société occidentale moderne, sur laquelle nous concentrerons notre réflexion dans ce travail, a pu établir cette vision naturaliste du monde animal. Elle correspond plus ou moins à l’arrivée de l’Anthropocène, dont le réel commencement est encore difficile à dater, mais est clairement visible à partir XVIIIème siècle avec l’essor de l’Ère Industrielle. Au-delà, l’étude de l’histoire des mœurs nous laisse quant bien même des traces de relation symbiotiques dans l’espace urbanisé. Au Moyen-Âge, par exemple, chiens et ongulés (porcs, etc...) assuraient le nettoyage des rues en absorbant les déchets, entrant ainsi en concurrence avec les espèces vectrices de maladies (rats, etc...) et assurant une hygiène relative. Mais à cette époque déjà, les prémices de la dissociation entre Homme et biodiversité étaient déjà visibles. En fait, l’étude nous révèle que cette séparation est également très influencée par les théologies monothéistes, qui reconnaissent clairement l’Homme comme une singularité de son environnement. Ici, notre travail prend une tournure délicate : comment l’Homme peut-il reconsidérer son lien à la biodiversité s’il rentre en conflit avec son éducation religieuse?


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fig. 2, Le monde vu par Descola dans son ouvrage Par-delà Nature et Culture. On peut cependant considérer que la mondialisation pousse aujourd'hui à la vision naturaliste, cette carte n'est que le reflet des influences tribales indigènes.

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La flore est quant à elle intrinsèquement liée à l'espace urbain, en formant une composante à part entière. Adoptée ou rejetée selon les périodes et les modèles sociétaux en Occident, son rapport avec la ville et si complexe qu'il pourrait incarner un travail de mémoire à lui seul. En Europe, le végétal a eu beaucoup d'incarnations pour l'espace urbain : symbolisme, hygiénisme, esthétisme, etc... Concentrons-nous sur son évolution en Occident depuis le Moyen-Âge, théorique balbutiement de l'Anthropocène, car l’Homme commence a modifier singulièrement son paysage. La ville typique du Moyen-Âge prend une configuration défensive, le plus souvent centrée sur une place forte avec des rues étroites et sinueuses. Elle s’installe cependant souvent à côté d’un espace boisé pour en tirer multiples ressources : bois de construction, nourriture, etc... La Renaissance réinterprera ensuite l'héritage antique et son symbolisme. La végétation n’y sera pas encore inclue, à l’exception des jardins privés de la bourgeoisie, facteur important, car la végétation commence peu à peu à être associée à la qualité de vie. Ce caractère bourgeois des jardins évoluera et trouvera son apogée sous Louis XIV.

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La ville industrielle sera le théâtre d’un bouleversement des espaces urbains, d’abord provoqué par l’exode rural, puis par le remodelage de ces villes surpeuplées. Haussmann importera l'hygiénisme anglais. La végétation en ville prend alors des enjeux sanitaires et doit être proportionnellement répartie. Les Cités-Jardins du début du XXème siècle d’Howard (fig. 3) incarnent un premier travail complet sur l’intégration de la nature en ville, et constitueront une référence clé des lotissements modernes.14 L'après-guerre signe l’arrivée massive du béton et des grands ensembles. L'explosion démographique va agrandir ou créer des villes ex-nihilo. Ce modèle ultra-urbain sera vite rejeté car il devient symbole de mal-vivre (pollution, sectarisation sociale, etc…). L’espace végétalisé dans ces zones n’offre pas le cadre agréable qu’il devait y apporter et est même parfois évité. Arrivent alors les villes nouvelles qui retravailleront avec le végétal pour créer des "villes-campagnes". Mais cette végétalisation simplifiée sera contestée de nos jours avec l’arrivée de la "ville durable" et les enjeux de la crise écologique. Les villes veulent aujourd’hui se créer un patrimoine naturel fort, réduire


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fig. 3, Ward and Centre Garden-Citiy, Modèle type de la citée-jardin d'Hebenezer Howard

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l’imperméabilisation des sols, se tourner vers les énergies renouvelables, etc… La pression médiatique et celle du grand public exige aujourd’hui ce nouvel urbanisme. Mais pour l'individu lambda, le végétal reste une décoration, une ressource comestible, un moyen de délimitation ou d’occultation, ou est alors limité à sa fonction de captage et stockage des polluants. L’état du pavillonnaire occidental est catastrophique. Le modèle de consommation de masse (industrie mais aussi télévision, ou médias) a poussé à une ultra-simplification du jardin privatif, favorisant l’utilisation de machines, d’engrais et de pesticides. Mon village natal situé en Alsace m’a rendu témoin depuis l’enfance d’un pavillonnaire stérile, où l’espace tampon gravilloné et les thuyas offrent un faux cadre de vie agréable, sans intimité ou richesse naturelle. Les enjeux de la biodiversité ne doivent pas s’appliquer qu’aux espaces "super-urbains", mais aussi à leurs périphéries et aux territoires ruraux.

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L’Homme doit donc clairement reconsidérer ses rapports à son environnement naturel. Malgré cela, il est notable que l’Homme contemporain en vient de plus en plus, par le développement de l’information les progrès de la science, à remettre en question les différentes cultures et théologies millénaires. Attention, il n’est pas dit ici que l’Homme doit avoir un rapport uniquement physique à son entourage, nous développerons plus tard la question des rapports spirituels et psychiques de l’Homme à son environnement. Nous avons donc pu établir le cadre de réflexion de ce travail. La société contemporaine, héritière de traditions centenaires, voir millénaires, doit aujourd’hui reconsidérer ses positions. L’étude de son histoire a pu nous montrer la délicatesse de cette opération. De plus, bien que l’Homme contemporain se classe psychologiquement au sommet de sa biodiversité alors qu’il en est partie intégrante, il y établit encore des classements sans la considérer comme un ensemble équilibré. Une vision millénaire erronée d’un monde déséquilibré. Pour Aristote : "Les plantes existent pour le bien des animaux, et les bêtes sauvages pour le bien de l’Homme. […] Comme la nature ne fait jamais rien inutilement ou en vain , il est indéniablement vrai qu’elle a fait tous les animaux pour le bien de


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l’Homme"15. Le raisonnement d’un intellectuel historique des plus reconnus, encore très serieusement considéré pour beaucoup. Le lecteur est ici en droit de se demander : quel est alors l’intérêt pour un étudiant en architecture de développer un tel sujet qui paraît, à première vue, si éloigné de sa profession ?

Flagship : produit vedette, species : espèces Abeilles, guêpes, fourmis et frelons. 13 Philippe Descola, Par delà Nature et Culture, Gallimard, 2005 14 Histoire de la ville : urbanisme et architecture, Canopé, Académie de Versailles, in Accueil, in Ressources pour enseigner, in Médiathèque, in Bibliographies, 20 Avril 2010, Disponible en ligne sur : https://www. reseau-canope.fr/atelier-essonne/spip.php?article345 15 Aristote, La Politique, J. Vrin, 1970 p.16 11

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1.3. Importance de la prise en compte écologique dans les projets architecturaux et urbains « L’architecte ne crée pas seulement pour son temps, la postérité devra aussi avoir à jouir de son œuvre […] Mais pour répondre également aux besoins matériels de son temps, il faut aussi qu’il soit un homme moderne. Non seulement il doit connaître exactement les besoins culturels de son temps, mais il doit aussi se tenir à la pointe de cette culture. »16 A. Loos La culture, comme nous l’explique Loos ou encore Vitruve avant lui, est sans doute l’instrument le plus aiguisé de l’architecte ou de l’urbaniste. La pluridisciplinarité est un paramètre fondamental de la conception, car toute notion concernant l’Homme ou ses pratiques est à prendre en compte dans un projet, qu’il soit architectural ou urbain, s’il a pour vocation d’être plus qu’un objet esthétique. C’est ici que le concepteur doit combiner ses savoirs et son expérience pour justifier chacun de ses choix. Si l’architecture est pour l’Homme, elle doit s’inscrire dans un prolongement de son cadre culturel à tous les niveaux.

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C’est aussi pour cette raison que fleurissent aujourd’hui les projets écologiques, s’inscrivant dans un courant de bio-design. Les architectes ont également joué une grande part dans le développement de la conscience écologique du grand public au travers de leurs réalisations. Depuis près d’une décennie, tout projet architectural ou urbain neuf, tient compte des paramètres environnementaux dans le discours de son concepteur. Il ne serait pas faux de dire qu’aujourd’hui, ce paramètre écologique est devenu une qualité architecturale. Certains architectes en ont même fait le leitmotiv de leurs travaux, parfois peut-être, au détriment de l’usager17. Mais, tout d’abord, il nous faut dégager une notion fondamentale : il existe plusieurs courants écologiques distincts, que Grégoire Bignier nous détaille dans son ouvrage Comment partager le monde habité ?. « Nous avons identifié trois champs éthiques différents qui encadrent généralement les pensées qui s'y rattachent. Ils sont logiquement fondés sur les piliers des disciplines utilisées pour les définir. Soit : -un champ scientifique qui pense principalement la

biosphère et les solutions à son développement humain selon une approche systémique ; -un champ économique qui considère la biosphère en terme d’échanges selon des organisations descriptibles et quantifiables ; -un champs théologique qui questionne en permanence la place de l’homme au sein d’un système, à la fois tangible et spirituel. »18 Ainsi, on dégage trois champs éthiques dans lesquels on a cependant, à première vue, du mal à classer l’architecte ou l’urbaniste. Même si les pointures du monde architectural semblent ont pour la plupart avoir fait le choix d’une approche scientifique, en utilisant des technologies de pointe (Jean Nouvel, etc...)19, l’idéal voudrait que le concepteur s’inscrive dans un courant à la synthèse de ces trois champs pour avoir la meilleure qualité environnementale possible. Néanmoins, l’évolution architecturale semble aller dans le bon sens, et une notion décisive a fait son apparition dans les mœurs architecturales ces dernières années : la notion de dette écologique. Ici, pour l’architecte, le schéma est simple :

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son projet doit rembourser la "portion" de milieu naturel qu’il "consomme" dans son projet, en terme d’espace, de matériaux, d’énergies, de perturbation de la faune,... Cette notion peut paraître évidente mais elle est fondamentale, car signal d’une réelle prise de conscience de l’impact de l’anthropisation. Ainsi, on assiste par exemple à l’émergence de bâtiments à biodiversité positive, qui vont mettre en œuvre des systèmes pour perturber au minimum la faune et la flore locale, voire leur offrir des conditions de développement idéales. Ces enjeux sont aujourd'hui capitaux quand on observe les facteurs de diminution de la biodiversité (fig. 4), où le développement de l'espace anthropique est, au final, le principal responsable de la disparition d'écosystèmes.

fig. 4, Diagramme extrait d’un rapport de la WWF de 2014 présentant les facteurs responsables de l’extinction d’une espèce (en %). On observe qu’une majeur partie est liée à un facteur humain direct, dont une bonne portion se rapporte à la destruction et diminution des espaces naturels.

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En dehors de l’intérêt commercial et idéologique du concepteur à inscrire son projet dans un schéma environnemental, il doit aussi le faire car il en a le pouvoir. De nombreux théoriciens de l'architecture se sont attelés à montrer et démontrer que le concepteur, par ses choix, influençait le comportement de l’usager, alors pourquoi n’influencerait t-il pas un comportement écologique ? Au-delà de l’usager, cette influence toucherait sa concurrence, les constructeurs, les riverains, etc... Si l’écologie est l’affaire de tous, le concepteur dispose d’une position idéale pour amener des valeurs écologiques concrètes au grand public. Et c’est par ces considérations que les mots d’Adolf Loos prennent une nouvelle tournure. Voyons à présent comment, dans ce contexte d'Anthropocène, la société, et plus particulièrement le territoire français, organise sa réponse aux phénomènes de disparition de la biodiversité.

Adolf Loos, L’Ancienne et la Nouvelle Représentation en Architecture, 1989, in Ornement et crime, trad. Sabine Cornille et Philippe Ivernel, rivage Poche, 2010 17 Cette notion sera développée dans la partie Analyse de typologies architecturale (p. 52 à 59) 18 Bignier Grégoire, Architecture et écologie : comment partager le monde habité ?, Paris ,éditions Eyrolles , 2012, p.22, Chapitre Éthiques 19 Analyse de typologies architecturale, loc. cit2. 16

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II. Le réactionnisme contemporain L’urgence d’une action nous paraît maintenant évidente. Dans cette partie, nous nous attacherons à distinguer les différents processus déjà à l’œuvre à plusieurs niveaux. Nous considérerons par la suite la structure hiérarchique suivante : la loi régit la conception, qui régit à son tour l’individu et pour partie la biodiversité qui s'établit dans ce cadre anthropique. Nous étudierons donc successivement chacune de ces structures, et détaillerons d’un point de vue critique les actions déjà à l’œuvre et leurs incidences. Le cadre de recherche de ce travail sera limité en France métropolitaine. Nous étudierons donc principalement des mesures appliquées à la France, tout en tâchant d’établir des comparaisons avec des systèmes étrangers alternatifs. Ma position d’étudiant français mise à part, la France est un secteur tout à fait stratégique pour mener ce type d’étude. En effet, la France est présente sur tous les océans à l'exeption de l’océan Arctique. Son patrimoine naturel maritime, même s’il ne sera pas spécifiquement travaillé dans ce mémoire, est l’un des plus vastes au monde, s’articulant autour de beaucoup de points chauds de la biodiversité20 (fig. 5).

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Fig. 5, Les points chauds de la biodiversité sont nombreuses aux abords des eaux sous juridictions Française. Au delà des limites de la metropole, la France dispose donc d’une influence importante sur des secteurs clés.

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La métropole comporte à elle-même plusieurs zones biogéographiques, également présentes en Europe (zones alpines, continentales, atlantiques et méditerranéennes) (fig. 6). En outre, la France tient la première place en Europe pour la diversité d’espèces telles que mammifères, amphibiens et oiseaux. Si la France jouit d’un patrimoine naturel exceptionnel et d’une influence européenne et internationale, ce patrimoine y est également menacé. La France est présente dans le triste classement des dix pays abritant le plus d’espèces menacées. En France, entre 2006 et 2015, 590 000 ha de terrain ont été artificialisés21, c’est à dire l’équivalent d’un département de la superficie de la Seine-et-Marne en dix ans, réduisant la surface encore favorable aux biotopes naturels. À un tel rythme, il est plus que nécessaire de mettre en place en France une stratégie de conservation des patrimoines naturels efficace, ou alors de freiner drastiquement l'étalement urbain et agricole.

Fig. 6, La France se situe au carrefour de plusieurs zone biogéographique, abritant ainsi des ecosystèmes variés sur tout le territoire.

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Zone avec un indice de biodiversité élevé, même dans des conditions naturelles, la biodiversité à tendance à favoriser certains sites particuliers 21 Ministère de la Transition écologique et Solidaire, in Politiques publiques, in Biodiversité et Paysages, in La biodiversité en France, disponible en ligne sur : https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/biodiversite-presentation-et-enjeux 20

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2. 1. La Loi Dans cette partie nous étudierons la politique française actuelle de conservation et de revalorisation de la biodiversité. Pour ce faire, nous allons étudier le programme du Ministère de la Transition Écologique et Solidaire, principal corps de l’État à travailler sur la gestion de la biodiversité en France. Déjà, on peut poser ici une première limite à notre politique environnementale : une question si complexe et prédominante n’est traitée seulement par ce ministère, qui doit traiter l’ensemble de la question de la transition écologique, c’est à dire la gestion de notre patrimoine naturel et la transition écologique de notre patrimoine anthropologique, et doit intervenir dans de multiples secteurs : énergie, bâti, transports, .. etc. En fait, il serait fort possible que le partage de ce travail entre plusieurs corps ministériels serait plus productif et aboutirait à des mesures plus nombreuses et plus réactives. Pourquoi n’aurait-on pas un Ministère de la Biodiversité ou de l’Énergie alors que l’on a un Ministère du Sport ? La transition écologique est une question si omniprésente qu’elle pourrait déjà être beaucoup plus affichée dans la hiérarchisation des pouvoirs français.

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Néanmoins, il faut reconnaître les nombreux aboutissement de la gestion environnementale. Commençons par un historique des lois et décrets fondamentaux qui ont déjà permis des actions fortes de conservation de la biodiversité et amené à la gestion de la crise actuelle. 1906 : Loi organisant la protection des sites et monuments naturels de caractère artistique. Première loi notable et efficiente sur la gestion de la biodiversité. Il s’agit de réunir localement des conseillers qualifiés et de déterminer des sites d’exception à conserver. Une loi qui ne s’attaque pas réellement à la gestion de la biodiversité au dela de son caractère esthétique mais permettra déjà la sauvegarde de quelques milieux en France. La Loi de réorganisation de la protections des sites et monuments de 1906 parue en 1930 lui apportera quelques modifications et lui donnera sa forme définitive, faisant naître la notion fondamentale de patrimoine naturel.22 1960 : Loi relative à la création des parcs nationaux. Dans le prolongement de la loi de 1906, le gouvernement Français s’attache désormais à une réelle conservation des territoires naturels d’envergure. On y intègre aussi la notion d’interférence

humaine et on essaye de limiter les altérations d’interventions artificielles dans ces zones. Les parcs naturels peuvent concerner des zones terrestres et maritimes23. Néanmoins il faut souligner que ces programmes viseront aussi à un développement touristique, et auront donc des intérêts économiques. J'ai cependant pu observer par moi-même ce phénomène dans ma région natale. La fôret de Haguenau, faisant partie du 6ème plus grand massif forestier de France, est maintenant fortement déboisée pour la rendre accessible au public : création de chemins et sentiers, structures pour les promeneurs, etc... Ces modifications risquent encore d'affaiblir cet écosystème fragile et de perturber la faune. Ce texte législatif est donc à nuancer, car en dépit d'une bonne intention, il ne s'agit que d'une forme d'artificialisation supplémentaire d'un espace naturel. 1976 : Loi sur la protection de la nature. Cette loi pose les bases de la conservation de l’environnement en France. Les projets d’aménagements doivent maintenant être soumis à une étude pour minimiser leur impact environnemental. Cette loi dresse, entres autres, la liste des espèces animales et végétales protégées et crée les réserves naturels. Elle fait également naître la notion de droit de l’environnement.24

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1993 : Loi paysage. Cette loi vient donner des directives paysagères, autrement dit, des instruments de gestion qui doivent être pris en compte dans les documents d’urbanisme. Néanmoins, cette loi ne donne pas de définition précise du paysage, compliquant ainsi son application.25 1996 : Premiers plans nationaux d’action en faveur des espèces menacées. Un plan d’action qui mobilise différents acteurs (institutionnels, académiques, associatifs,...etc) pour organiser, suivre et réintroduire les espèces concernées, mais aussi en informer le grand public.26 2004 : Stratégie nationale pour la biodiversité. Établie à la suite d’une convention internationale pour la biodiversité, cette stratégie vise trois objectifs : la conservation de la biodiversité, l’utilisation durable des espèces et des milieux naturels, le partage juste et équitable des bénéfices issus de l’utilisation des ressources génétiques. La France s’est engagée sur 20 objectifs en faveur de la biodiversité à tenir d’ici 2020.27

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2007 : Trame verte et bleue. "La trame verte et bleue" (TVB) est une démarche isue du Grenelle de l’environnement qui vise à maintenir et à reconstituer un réseau d’échanges pour que les espèces animales et végétales puissent circuler, s’alimenter, se reproduire, se reposer dans les territoires anthropisés, et assurer ainsi leur cycle de vie. La Trame Verte et Bleue porte l’ambition d’inscrire la préservation de la biodiversité dans les décisions d’aménagement du territoire, contribuant ainsi à l’amélioration du cadre de vie et à l’attractivité résidentielle et touristique.28 Cette démarche prend conscience de l’artificialisation des territoires et des enjeux du maintient de la biodiversité dans les espaces urbains. Aujourd’hui elle est déclinée sur plusieurs niveaux : trame brune (sols), trame noire (zones d’obscurité nocturne, ...etc). Elle prône la mise en place de corridors écologiques. Si cette politique de conception est encore influente, l'urbanisme contemporain à aujourd'hui plutôt tendance à instaurer cette trame sous forme d'"archipels", reliant les points écosystèmiques les uns aux autres par des continuités, à l'instar du corridor écologique aux limites très imperméables d'abord favorisé par les premières applications de la TVB.


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2016 : Loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Cette loi renforce et actualise les lois de 1976 et de 1993.29 2018 : Plan biodiversité. Dernière mesure mise en place par notre gouvernement, qui vise à accélérer la stratégie nationale pour la biodiversité. Pour la première fois, l’ensemble du gouvernement prend des engagements à travers ce plan. Trop récent pour être déjà critiqué, il semblerait tout de même que notre gouvernement affiche une volonté d’actions et de moyens.30 Ce court historique nous permet d’avoir un aperçu global des stratégies nationales pour la biodiversité au niveau législatif. À l’image de l’ensemble de notre société, on constate le retard significatif de ces mesures si l’on le calque sur l’historique de l’Anthropocène et le début de la crise environnementale. On verra aussi plus tard le réel impact de ces textes sur les documents d’urbanisme.

connaissance (ZNIEFF, Vigie-Nature, ...etc). Cette meilleure appréhension des milieux permet d’élaborer des stratégies de conservation et de protection à toutes les échelles, mais elle permet aussi de sensibiliser le grand public sur la richesse des écosystèmes de l’hexagone. Elle mène aussi des programmes d’inventaires locaux et participatifs pour les collectivités, avec l’Atlas de la Biodiversité Communale, par exemple, qui compte sur la participation de chacun dans le recensement de nouvelles espèces. Le Ministère de la Transition Écologique et Solidaire mène donc principalement des missions d’information du grand public. On regrette le manque d’action plus radicales de préservation et de mesures concrêtes, sans néanmoins dénier l’importance du travail d’information. En somme cette politique repose essentiellement sur la bonne volonté des acteurs et de leur participation.

Le Ministère de la Transition Écologique et Solidaire mène néanmoins de très importantes démarches d’inventaire et de

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Loi sur les monuments Naturels et sites, 1930, in Le Droit de la Protection de la Nature en France, Virginie & Jean-Charles Croquet, 2003-2008, disponible en ligne sur : http://droitnature.free.fr/Shtml/LoiMonumentsNaturels. shtml 22

Loi n°60-708 du 22 juillet 1960 relative à la création de parcs nationaux, in les autres textes législatifs et réglementaires, in Accueil, in Legifrance, le service public de la diffusion du droit, 1991, disponible en ligne sur : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000512209&categorieLien=cid 23

Plans nationaux d’actions en faveur des espèces menacées, Ministère de la Transition Écologique et Solidaire, in Accueil, in Politiques publiques, in Biodiversité et paysages, Janvier 2018, disponible en ligne sur : https:// www.ecologique-solidaire.gouv.fr/plans-nationaux-dactions-en-faveur-desespeces-menacees 26

Stratégie nationale pour la biodiversité, Ministère de la Transition Écologique et Solidaire, in Accueil, in Politiques publiques, in Biodiversité et paysages, Juillet 2017, disponible en ligne sur : https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/strategie-nationale-biodiversite 27

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Loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, in les autres textes législatifs et réglementaires, in Accueil, in Legifrance, le service public de la diffusion du droit, 2019, disponible en ligne sur : https://www. legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=LEGITEXT000006068553

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Loi n° 93-24 du 8 janvier 1993 sur la protection et la mise en valeur des paysages et modifiant certaines dispositions législatives en matière d'enquêtes publiques, in les autres textes législatifs et réglementaires, in Accueil, in Legifrance, le service public de la diffusion du droit, 2019, disponible en ligne sur : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000541949&categorieLien=id

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Trame verte et bleue, Ministère de la Transition Écologique et Solidaire, in Accueil, in Politiques publiques, in Biodiversité et paysages, Janvier 2017, disponible en ligne sur : https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/trameverte-et-bleue Loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, in Accueil, in Politiques publiques, in Biodiversité et paysages, Août 2017, disponible en ligne sur : https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/loi-reconquete-biodiversite-nature-et-des-paysages Plan Biodiversité, Comité interministériel biodiversité, 4 juillet 2018, document pdf disponible en ligne sur : https://www.ecologique-solidaire. gouv.fr/sites/default/files/18xxx_Plan-biodiversite-04072018_28pages_ FromPdf_date_web_PaP.pdf 30


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2. 2. La conception Intéressons nous désormais à la conception. Tout comme l’action gouvernementale, les prises en compte environnementales dans la conception sont globalement assez récentes, mais c’est tout de même un secteur moteur de changements en faveur de l’écologie. On le voit : les entreprises, architectes, bureaux d’études, etc…, aiment s’afficher sur un courant écologique. Ce phénomène marketing est qualifié de greenwashing, et est aujourd'hui pratiqué par une bonne partie des industriels. De notre point de vue, c’est une bonne chose, des solutions sont imaginées et développées tous les jours pour améliorer les qualités environnementales du bâti. Nous avons déjà parlé de la tendance à la haute technicité dans le bâti, une méthode peutêtre un peu regrettée. De mon point de vue, il est fondamental aujourd’hui d’exploiter des méthodes traditionnelles, lowtech, et de collaborer avec son environnement, au lieu de s’en isoler et de créer artificiellement des apports naturels (ventilations, éclairage). La biodiversité gagnerait très certainement si le concepteur avait d'avantage recours à des méthodes traditionnelles et vernaculaires. On sait par exemple, que dans

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beaucoup d’architectures vernaculaires, on utilisait le bétail comme source de chauffage et leur nourriture (foin) comme isolant. Une relation presque symbiotique tout à fait inspirée des cycles naturels, qui est utile aux deux partis. On est alors en droit de réinterroger ces méthodes radicales pour leur donner une définition contemporaine qui pourrait peut être appliquée à l’architecture d’aujourd’hui.

du territoire (fig 7). L’enjeu sera ici d’étudier ceux qui amènent directement au processus de conception de l’architecte et de l’urbaniste afin de voir comment ils influencent ou non une conception soucieuse de la biodiversité.

Attachons-nous désormais à mieux comprendre les processus de conception. Il nous faudra pour cela étudier les textes qui les régissent, et c’est pourquoi nous effectuerons dans cette partie une analyse des textes imposés et proposés aux concepteurs. Nous essayerons d’en détacher les apports à la biodiversité et d’en relever les manques. Dans un souci de cohérence, nous nous concentrerons sur les textes attenants au secteur géographique du projet détaillé dans la troisième partie, c’est-à-dire l’agglomération Nancéienne, et plus particulièrement le secteur des Rives de Meurthe. Ces analyses refléteront néanmoins la démarche globale du système national, car bon nombre de ces processus sont appliqués à cette échelle. De même, les documents étudiés sont eux-mêmes le fruit de l’articulation de nombreux documents de planification

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Fig. 7, Méthodes de rédaction des documents d’urbanismes, les documents directements utilisés par les concepteurs découlent de la synthèse d’un grand nombrede documents produits par des experts de chaque domaine

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Analyse du SCoT du Sud Meurthe et Mosellan : « Le ScoT (Schémas de Cohérence Territoriale) [...] est un document de planification stratégique qui fixe à l’échelle d’un territoire les grandes orientations d’aménagement et de développement pour les 10/20 ans à venir dans une perspective de développement durable. »31 Le SCoT permet de donner les axes majeurs à l’élaboration du PLU. Notre démarche nous permettra de voir comment ces données ont pu être interprétées dans le PLU qui sera lui-même outil de conception des espaces urbains. L’étude du SCoT sera en effet déscisive pour comprendre l’aménagement à l’échelle du territoire et les enjeux qui seront favorisés. Le dossier SCoT du Sud Meurthe et Mosellan dont cette analyse fera l'étude est disponible en accès libre en ligne sur : https://www.grandest.fr/wp-content/uploads/2017/02/scotsud-meurthe-et-moselle.pdf.

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● En cohérence avec les objectifs nationaux, le SCoT du Sud Meurthe et Mosellan, s’engage à une réduction de la consommation de terres agricoles. Pour ce faire, il promeut la densification et la diversification de plusieurs zones déjà urbanisées. En plus de lutter contre l’étalement urbain et la perte de territoires agricoles, cette réduction de la consommation foncière permet de ralentir l’artificialisation des sols et est donc favorable à la biodiversité. (p.7) ● Dans les principes de Trame Verte et Bleue, le SCoT indique des continuités alluviales (Trame Bleue) et des continuités thermophiles (Trame Verte) à maintenir sur le territoire. Ces trames sont importantes pour les biodynamismes à l’échelle du département pour nuire le moins possible aux cycles naturels. De plus, elles permettent la conservation de biotopes terrestres, humides et aquatiques particuliers en interdisant leur artificialisation. (p.9.)

tés écologiques. (p.9.) ● Le SCoT préconise également des analyses des schémas naturels à une échelle locale au cours de l’élaboration du PLU. Ces analyses doivent permettre d’identifier et de délimiter les biotopes afin de pouvoir les protéger. (fig. 8) ● Autre donnée un peu plus sensible à mettre en relation, le SCoT vise à promouvoir le développement des déplacement doux. En plus de réduire les émissions de gaz à effet de serre on notera aussi l’impact de l’utilisation de l’automobile sur la faune, et particulièrement sur les insectes, dont on estime la quantité annuelle de biomasse victime de collisions sur les axes routiers entre 120 et 200 tonnes.32

● Le SCoT appelle au renforcement de l’armature verte urbaine, c’est à dire à la valorisation des espaces naturels ou agricoles urbains, et au maintien et développement des espaces de nature en ville tout en préservant et restaurant les continui-

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fig. 8, Plan d’aménagement général des espaces naturels à l’echelle du département de Meurthe et Moselle. Cohéremment aux enjeux de Trame Verte et Bleu, ce plan vise à preserver les continuités biologiques à l’échelle du département.

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Le SCoT affiche une certaine cohérence avec le programme du Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire. On en retrouve plusieurs axes clés, comme la Trame Verte et Bleue ou le programme de ralentissement de l’artificialisation des sols. Si le SCoT est plus un outil politique qu’un outil du concepteur, il a tout de même une influence sur les politiques d’urbanismes locales, les articulant à l’échelle du département. Passons maintenant à l’étude du PLU de notre zone de projet.

Définition d’un ScoT, in qu’est ce qu’un Scot, in Syndicat d’étude du bassin de Brive Scot, disponible sur http://www.scotsudcorreze.fr/qu-est-ce-qu-unscot-, consulté le 06-11-2018 32 Jean Pierre Chambon, La mortalité des insectes liés à la circulation automobile, insectes et activités humaines, disponible sur -ttp://www.insectes. org/opie/pdf/2613_pagesdynadocs4eaac12659ce3.pdf, consulté le 07-112018 31

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Analyse du PLU section UVg NANCY : Le PLU (Plan Local d’Urbanisme) est le principal outil de conception législatif du concepteur. Toute nouvelle conception doit se soumettre aux règles qu’il énonce, il a donc une influence forte sur le configuration de tout projet. Le PLU est, en somme, l’articulation de toutes les politiques d’urbanisme. Nous étudierons dans ce passage la section Uvg du PLU du grand Nancy, qui comprend notre secteur d’intervention (Rives de Meurthe). Nous en citerons les extraits ayant une influence directe sur la biodiversité et les analyserons. Ce document est disponible en ligne sur : https://www.nancy. fr/fileadmin/documents/Utile/Urbanisme/Acc%C3%A8s%20 aux%20plans/2014%20reglement%20PLU/2014-reglement-plan-local-urbanisme.pdf « 4.2 - Eaux usées : Dans les zones d’assainissement collectif, le branchement sur le réseau de collecte des eaux usées est obligatoire pour toute construction ou installation. Les eaux usées domestiques doivent être évacuées sans aucune stagnation, ni traitement préalable, dans le respect des

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caractéristiques du réseau d’assainissement (selon que celui ci est unitaire ou séparatif). En l’absence de réseau collectif raccordé à un dispositif de traitement, ou dans l’attente de celui-ci, un système d’assainissement non collectif est admis à condition que celui-ci soit conforme à la réglementation en vigueur et en adéquation avec l’aptitude des sols à recevoir un tel système. Dans les zones d’assainissement non collectif, la mise en place d’une filière d’assainissement non collectif, conforme à la réglementation en vigueur et en adéquation avec l’aptitude des sols à recevoir un tel système est obligatoire. » (p. 221) ● Aucune considération pour des méthodes de traitement des eaux noires, si le réseau de traitement est accessible, la phytoépuration n’est donc possible que dans des cas ou le projet serait isolé, ce qui est en plus improbable dans notre zone d’étude. La phytoépuration est une méthode de traitement des eaux usées qui est fonctionnelle grâce à la mise en place d’un cycle naturel de décomposeurs, comprenant animaux et végétaux. Ce système de traitement pourrait être un axe structurant de maintien de la biodiversité, car elle fait intervenir tout un écosystème, mais n'est pas encore considéré dans ce PLU.

« 4.3 - Eaux pluviales : Dans les zones du territoire communautaire favorables à l’infiltration des eaux pluviales, on procédera à l’infiltration des eaux pluviales. Cependant, quand la nature du sol ne permet pas d’avoir recours à l’infiltration ou dans les zones du territoire communautaire défavorables à l’infiltration des eaux pluviales, le rejet au réseau de collecte n’est autorisé qu’après stockage temporaire des eaux avant restitution à débit contrôlé. Le débit de fuite autorisé est alors fonction de la zone de limitation des débits d’eaux pluviales où se situe le projet. Pour les unités foncières inférieures à 2000 m 2 , la limitation du débit d’eaux pluviales vers le réseau de collecte n’est pas obligatoire. Le pétitionnaire doit cependant privilégier des techniques permettant de tendre vers le rejet zero : - en choisissant l’infiltration des eaux pluviales (puits d’infiltration), - par la mise en place de citerne de récupération des eaux pluviales (pour l’arrosage uniquement dans l’intérêt d’une restitution au milieu naturel), - par l’utilisation de matériaux poreux ou de toitures végétalisées. » (p. 221) ● Ici un bon point, le PLU autorise et encourage le traitement par infiltration et les dispositifs de récupération d’eau de pluie, il en propose même plusieurs (puits d'infiltration,

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citernes de récupération, etc...). « Article UV 11 : Aspect extérieur - Le projet peut être refusé ou n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l’aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu’à la conservation des perspectives monumentales. » (p. 225) ● Le projet peut être refusé s’il porte atteinte au paysage naturel. Un très bon point, même si le document ne précise pas réellement comment un projet peut porter atteinte à son environnement que par sa volumétrie et son esthétisme. Néanmoins, dans un espace déjà fortement urbanisé cet article atteste plus d’une manifestation de bonne volonté sans conséquence réelle pour la biodiversité et est plutôt réservé à des ouvrages d’architecture un peu trop excentriques pour la politique d’uniformisation du secteur.

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« Article UV 13 : Espaces libres et plantations - espaces boisés classés Dans l’ensemble de la zone : - Dans tous les secteurs, les espaces libres (hors constructions et accès) doivent faire l’objet d’un traitement de qualité pouvant associer arbres, plantations et diverses parties minérales. Ces espaces libres seront en pleine terre ou sur dalle et pourront être aménagés en jardins clos et couverts, de type serres, jardins d’hivers ou patios plantés […] - Les aires de stationnement d’une superficie supérieure à 500 m² devront faire l’objet de traitement paysager. ». (p.228) ● On impose une gestion de l’espace naturel avec l’intervention d’un professionnel du domaine suivant la dimension de cet espace. Dans les autres cas, le Grand Nancy encourage à une gestion volontaire du patrimoine naturel. Une dimension très certainement insuffisante, le PLU gagnerait sûrement à encourager le développement de projets paysagers même sur de très petits espaces. Notons néanmoins que dans certains sous-secteurs (Ucv, UCd), 30% d’espace boisé est requis.


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Le PLU nous présente donc très peu d’extraits relatifs à la gestion de la biodiversité dans l’architecture, ou à l’organisation de l’espace urbain. Il a en réalité plus de considération pour la flore que pour la faune, essentiellement pour ses qualités paysagères en milieu urbain. Peu d’axes de développements dictés par le SCoT sont visibles dans cette zone, même si localement cette dite zone pourrait présenter des intérêts pour la biodiversité. Le Canal par exemple, est un espace naturel dans lequel une certaine biodiversité s’est développée, tout comme les friches sur les terrains constructibles au Sud du secteur. Des analyses locales plus poussées auraient pu être préconisées dans des secteurs pouvant devenir stratégiques pour l’insertion de la biodiversité dans l’espace urbain. La ville de Nancy n’a pas encore adopté le Coefficient de Biotope par Surface (CBS) dans son PLU, comme certaines villes françaises, à l’image de la ville de Paris par exemple. Le CBS est "un coefficient qui décrit la proportion des surfaces favorables à la biodiversité [...] par rapport à la surface totale d’une parcelle. Le calcul du CBS permet d’évaluer la qualité environnementale d’une parcelle, d’un ilôt, d’un quartier, ou d’un plus vaste territoire"33. Encore un outil purement quan-

titatif mais qui pousserait pourtant à une gestion concrête de l'espace végétalisé. Il existe encore bon nombre de documents influençant la conception, s’adressant cette fois directement à l’architecte, et à la façon dont il traitera de plusieurs enjeux environnementaux. La certification HQE (Haute Qualité Environnement) traite par exemple directement de biodiversité, en dressant une notation pour évaluer les qualités du projet sur ce domaine, comme pour ses qualités thermiques, d’utilisation de matériaux locaux, etc... Cette certification reste cependant à suivre car elle vise des améliorations de sa notation concernant les rapports à la biodiversité. Un nouveau mode de conception est également apparu ces dernières années, proposant le concept de Bâtiments à Biodiversité Positive. Quantitatif et qualitatif, il vise à favoriser l’implantation de la biodiversité sur le bâti. En fait cette dernière doit être supérieure ou égale à celle présente avant la conception. Si ces nouvelles pratiques vont beaucoup nous influencer dans la conception de notre projet, elles ne sont néanmoins

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pas obligatoires à l’élaboration d’un projet, et peut être encore trop peu valorisées aujourd’hui car ces labels ont aussi leurs limites : trop de démarches et de lourdeurs adinistratives, parfois frein à l'innovation, des niveaux de performances trop faibles ou irréalisables, des coûts supplémentaires, des outils de calcul peu pertinents, etc... Ces labels gagneraient beaucoup à adopter une homogénéisation des exigences et une approche plus souple, sans oublier le suivi du bâtiment en fonctionnement ainsi que le retour des utilisateurs pour profiter d'une expérience concrête et profitable dans l'évolution de ces démarches.34 Leur critères d’évaluation restent cependant très intéressants et pourraient peut être s’appliquer à tout bâtiment neuf dans le futur, à la manière des exigences obligatoires de la Réglementation Thermique (RT). Avant d'aborder l'étude de l'individu, dernier axe de recherche de cette partie, analysons plus en détails les typologies de réponses architecturales contemporaines à la problématique de la biodiversité en milieu urbain.

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Le Coefficient de Biotope, Fiche Outil Méthode n°11, Biodiversité, ADEME, Disponible en ligne sur : http://multimedia.ademe.fr/catalogues/ CTecosystemes/fiches/outil11p6364.pdf 34 La Qualité Environnementale est-elle normalisable?, VAD, Ville et Aménagement durable, novembre 2010, disponible en ligne sur : file:///D:/T%C3%A9l%C3%A9chargements/101126_QE_est_elle_normalisable_VAD.pdf 33

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Analyse de typologies architecturales : «Nous avons identifié trois champs éthiques différents qui encadrent généralement les pensées qui s’y rattachent. Ils sont logiquement fondés sur les piliers des disciplines utilisées pour les définir. Soit : -un champ scientifique qui pense principalement la biosphère et les solutions à son développement humain selon une approche systémique ; -un champ économique qui considère la biosphère en terme d’échanges selon des organisations descriptibles et quantifiables ; -un champ théologique qui questionne en permanence la place de l’homme au sein d’un système, à la fois tangible et spirituel.»35 Pour bien comprendre les stratégies de conception qui sont aujourd’hui motrices de l’architecture pro-environnementale, il nous faut étudier quelques projets de référence qui permettront de comprendre la diversité de la réponse écologique et ses enjeux. Dans la première partie de ce travail, nous avons vu que Bignier établissait une distinction des approches intellectuelles à la question écologique. Il a ainsi dégagé trois domaines : le

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domaine scientifique, le domaine économique et le domaine théologique. On peut aussi distinguer ces champs en architecture, leur étude critique nous permettra d’en distinguer les caractéristiques mais aussi leurs limites. Analysons maintenant successivement plusieurs projets appartenant chacun à un des champs suivants. Cette réflexion autour de ces approches différentes nous permettra également de dégager des intentions conceptuelles pour le projet du Carré Nature.

Le champ scientifique est peut être aujourd’hui l’approche conceptuelle favorisée par les architectes. Il est ici choisi une approche systémique, c’est à dire que chaque problème est traité indépendamment, en faisant appel aux progrès technologiques. L’approche scientifique est largement favorisée par les architectures “flagships” : des projets d’architectes reconnus à l’internationale et très publiés. Nous allons ici étudier le projet One Central Park de Jean Nouvel à Sydney (2008-2014) (fig. 9). Il s’agit d’une tour résidentielle et commerciale de 34 étages. L’architecte fait appel à Patrick Blanc, un botaniste français qui collabore avec beaucoup d’architectes internationaux pour concevoir et organiser des surfaces végétalisées sur leurs architectures. Il mettent donc en place une végétalisation ponctuelle de l'enveloppe le long des façades. La deuxième particularité de ce projet est la présence d’un héliodon qui va permettre de garder une illumination continue des surfaces végétalisées36. Patrick Blanc étudiera les espèces locales pour composer ses surfaces végétalisées37 (fig. 10). Malheureusement ses compositions sont plutôt disposées selon une approche artistique. Au final, le dispositif mis en place fait plutôt office d’agrément

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décoratif que de catalyseur de biodiversité. Second point propre à l’approche scientifique : la technicité exacerbée. Dans ce projet on n’adopte pas les plantes à leur localisation, c’est l’héliodon qui va réfléchir la lumière pour qu’elle ait la trajectoire idéale. Ce système mécanique énergivore illustre bien l’approche systémique : on travaille sur un point au détriment des autres, c’est-à-dire que pour permettre à la végétalisation en façade de prospérer, et ramener de la lumière naturelle dans le bâtiment, on met en place un système consommateur d’énergie. De plus, cette approche systémique donne également lieu à l’emploi de matériaux très high-tech, donc souvent fort générateurs d’énergie grise, demandant des compétences de montage particulières, nécessitant un personnel qualifié, et souvent associé à un prix très élevé. Cette tour sera néanmoins la première tour résidentielle certifiée Green star 6 pour son engagement durable.

Fig. 9, One central Park, Sydney

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Fig. 10, Dessins originaux de Patrick Blanc pour la composition des surfaces végétalisées du One Central Park

Bignier Grégoire, Architecture et écologie : comment partager le monde habité ?, Paris ,éditions Eyrolles , 2012, p.70, Chapitre Biodynamisme 36 One Central Park, AJN, in Projets, disponible sur : http://www.jeannouvel. com/projets/one-central-park/ 37 One Central Park, Mur vegetal Patrick Blan, in Réalisations, disponible sur : https://www.murvegetalpatrickblanc.com/realisations/sydney/one-central-park-sydney 35

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Le second champ d’approche évoqué par Bignier est le champ économique. La démarche favorisée par cette approche est celle de la quantification de l’écologie. Cette quantification n’est pas seulement une quantification des ressources, elle décrit aussi la provenance, le rendement etc… Le champ économique est aujourd’hui également beaucoup utilisé dans le domaine architectural car il permet de rationaliser les échanges envers les différents acteurs de la construction ou pour la communication commerciale. Mais cette quantification permet surtout d’avoir des exigences incontestables, c’est pourquoi il est aujourd’hui le champ d’approche favorisé par les différentes certifications du monde du bâtiment (HQE, RTE, …), car pour appliquer des restrictions à grande échelle, le système d’évaluation est souvent lié à des mesures quantitatives. Dans cet optique, un autre projet flagship sera étudié pour illustrer le champ économique. Il s’agit du très publié projet Vertical Forest de Stefano Boeri à Milan (2009-2014). Ce projet de tour résidentielle dispose de bacs de culture à chaque niveau dans lesquels sont disposés plusieurs essences d’arbres différentes. Au total c’est près de 800 arbres qui seront disposés sur le projet, avec des spécimens allant de 3 à 9 m de haut, pour lutter contre la déforestation et la densification urbaine

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empêchant l’implantation de nouveaux arbres en ville.38 On observe déjà que la quantification est très affichée dans le discours de présentation du projet de l’architecte. Boeri justifie l’efficacité de son système par toute une série de chiffres allant de la dimension des spécimens, à la quantité de forêt équivalente à ses Vertical Forest. Il considère aussi beaucoup les rendements, utilisant comme argument phare l’absorption du CO2. Ce projet est proche du domaine scientifique à beaucoup d’égards, car il utilise aussi beaucoup de systèmes high-tech, notamment pour le système d’irrigation. Bien que très publié, ce projet reste assez contradictoire. Premièrement sur un modèle d’enjeux : le but clair de Boeri dans ce projet est de lutter pour le retour du végétal dans les milieux denses. Or, Milan n’es pas un modèle de densité comme on pourrait l’imaginer. Le projet est même situé à coté d'un parc gigantesque et désertique qui ne compte pas un seul arbuste (fig. 11). Il démontre à lui seul tout l'effet de green-washing en architecture.


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De même, le projet de Boeri est un projet au financement lourd. Il utilise un système extrêmement high-tech dans le seul but d'installer des arbres sur un édifice, et à tous les niveaux. Comme pour l’approche scientifique, la technicité a un coût non négligeable. Mais ce projet demande aussi un entretien constant, car les arbres ne sont pas entretenus par les résidents mais par un professionnel, qui procède à un élagage annuel. Ces opérations de pilotage sont aussi à tenir en compte dans la dépense globale du projet.

fig. 11, Vertical Forest, Milan

Vertical Forest, Stefano Boeri Architetti, in Projets, disponible sur : https:// www.stefanoboeriarchitetti.net/en/project/vertical-forest/ 38

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Le troisième champ d’approche de l’écologie est le plus complexe à appréhender, il s’agit du champ théologique. Ici le matériau n’est plus au coeur de la pensée du concepteur mais c’est l’individu, qui doit à nouveau être placé dans un système tangible. Ce champ propose des concepts parfois radicalement nouveaux, où c’est l’usager qui influera sur l’efficacité écologique du bâti. Le champ théologique est donc très souvent associé à des projets utopistes, qui affectent profondément le style de l’usager. Les Earthships de Michael Reynolds pourraient être classés dans ce domaine. Ce concept est né dans les années 90, très porté par la vague écologiste hippie. Il s’agit de petits modules d’habitations auto-constructibles à partir de matériaux de récupération. La plupart des Earthships sont construits sur le modèle le plus efficace prôné par Reynolds, une habitation autonome semi-enterrée, dont la seule partie émergente est une serre de cultivation, et les pièces de vies sont situées en retrait. Ce modèle constructif veut un impact minimal sur son environnement : semi-enterré et sans fondations lourdes. Reynold veut inclure ses earthships dans des cycles naturels. Il travaille aussi beaucoup sur la réutilisation de déchets (pneus, bouteilles, …)

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mais aussi l’utilisation de matériaux naturels trouvés in-situ (terre, enduits à l’argile, bois, ...). On ne repense pas le rapport du matériau à la biodiversité mais plutôt celui de l’humain. Le fonctionnement de l’architecture n’est uniquement assuré par les comportements de l’usager. Mais l’approche est aussi définie par le modèle constructif qui est à tous les niveaux pensé en cohérence avec les enjeux environnementaux. Pour vivre avec la biodiversité, l’architecte choisit ici de minimiser son impact sur le site, voir même d’établir une symbiose entre la biodiversité et l’usager. Elle lui servira de ressource (culture, construction, thermique) que l’usager lui rendra par tout un système d’échanges pensé par l’architecte (phytoépuration, ruissellement et récupération des eaux de pluies, …). Mais ici aussi les ambitions de Reynolds ont donné un résultat contradictoire. La recherche absolue d’autonomie, voire d'autarcie, nécessite un équipement qui, bien que de récupération, se révèle aussi d’une haute technicité (panneaux photovoltaïques, batteries, éoliennes, traitement des eaux, …).39 Sur le plan constructif ces projets présentent souvent beaucoup de malfaçons, et finissent même par devenir incohérents avec


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la pensée théorique de Reynolds. L'idéalisme d’une autoconstruction vertueuse pour l'environnement laisse vite place à des matériaux de construction plus faciles à mettre en oeuvre. Au final, le matériau principal du Earthship se révèle être le ciment (fig. 12). Le pilotage est également d’une grande complexité, et autant le dire tout de suite, ces projets ne sont pas fait pour tout le monde. Les Earthships demandent un suivi constant, et exigent quasiment la présence de l’usager à temps plein, et cela dès le début de la construction, car les systèmes tombent fréquemment en panne et les avaries sont nombreuses.40 Si chaque champ d’approche présente ses qualités et défauts, ils permettent tout de même une richesse de la réponse écologique. On retiendra l'un des facteurs les plus importants à mettre en oeuvre qui aura été plus ou moins travaillé dans les trois exemples vus ci dessus : un travail avec les ressources locales. Dans la réponse écologique, cette réflexion est la seule certitude : il faut travailler avec son environnement proche, en jouant de ses atouts et de ses acteurs. La réponse universelle tant attendue du grand public n’existe donc pas.

fig. 12, le mortier qui assure le jointage des bouteilles est un mélange de terre, fibre et ciment. Pour avoir participé à un chantier Earthship, j'ai pu me rendre compte de la quantité de ciment que ce dispositif exige. Est-ce alors vraiment le modèle écologique irréprochable tant médiatisé? Michael Reynolds, Earthship: How to Build Your Own, Vol. 1, Solar Survival Architecture, Septembre 1990 40 Arthur Schmidt, Earthships, enjeux, caractéristiques et limites des "Vaisseaux-Terre", rapport de fin de licence, 2017 39

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2.3. L’Homme et la biodiversité La conception de la crise environnementale a bien évolué chez l’individu au cours de ces dernières années. L’essor de l’information a certainement joué un rôle clé dans le développement d’une prise de conscience, au point même d’avoir quasiment atteint une forme d’effet de mode sur le grand public. L’altruisme écologique s’affiche de plus en plus, beaucoup de gens adoptent une consommation plus raisonnée, allant de leur alimentation jusqu’au mobilier et peu à peu à l’architecture. Néanmoins, la conscience environnementale de l’individu trouve le plus souvent ses bornes aux limites du confort de chacun. La relation de l’individu avec la faune dans l’espace urbain est encore très limitée pour la simple raison que cette faune est peu présente dans cette zone. Le plus souvent, la faune sauvage en ville est psychologiquement associée par l’individu à des représentations négatives multiples : telles que maladie (rats), phobie (insectes) ou encore pollution (fientes de pigeons)41. De même, la faune ne constitue pas un élément fort du paysage urbain en raison de la quantité de leur biomasse en milieu

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urbain, mais aussi de la taille moyenne de la faune des villes. De plus, la faune est constamment en mouvement. Toutes ces contraintes ne lui permettent pas d’être un axe majeur de réflexion des villes dans leur politique de gestion ou de la pensée du citadin. La plupart des interactions de l’individu a lieu avec la faune domestiquée. L’animal domestiqué peut être un compagnon de substitution pour les personnes sans enfant, de confident ou encore de compensation à la solitude. Ils montrent même parfois des vertus thérapeutiques, ou peuvent êtres facteurs de socialisation. Thème encore peu développé dans ce mémoire, il convient tout de même de souligner que cette faune domestiquée peut avoir des impacts conséquents sur la faune sauvage en milieu anthropisé. Les chats par exemple, avec 12 millions d’individus estimés -autrement dit l’animal de compagnie le plus populaire en France-est en réalité presque comparable à une espèce invasive pour son environnement. Le Muséum d’Histoire Naturel a lancé en 2015 une enquête participative pour en estimer l’impact sur la biodiversité. Cette étude révélera que le chat domestique s’attaque à plus de 50 espèces en Europe

occidentale, rongeurs, oiseaux mais aussi reptiles et amphibiens figurent sur son tableau de chasse. Selon d’autres études, les chats domestiquent tuent en moyenne 27 proies par an, autrement dit 324 millions de petits animaux à l’échelle nationale sont tués chaque année, faisant du chat un réel frein au développement de la biodiversité dans l’espace urbain, voir même une menace à celle-ci.42 Pour en revenir à la faune nuisible, ce travail ne prétendera pas à une harmonie entre usager et faune à l'intérieur du bâtiment. Il est clair que les standards actuels prônent un habitat étanche à tout type de vie, mais il sera montré dans ce travail comment jouer de l'habitat pour qu'il devienne une "zone-blanche" dans un écosystème, un espace à la fois fermé et perméable par des dispositifs qui permettront la circulation de la faune à l'extérieur sans entrave physique et contraignante. Un cadre extérieur plus propice aux biodynamismes permettrait notamment une meilleure régulation de la faune nuisible, nous permettant d'atteindre un schéma équilibré de l'espace urbain.

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Le développement du végétal en ville s’est quant à lui considérablement développé ces dernières années. Ce développement est évidement très lié à la croissance des villes, à leur étalement et densification, générant parfois des espaces naturels fragmentés ou des espaces mal aménagés. Beaucoup d’études sur les qualités psychologiques d’un environnement végétalisé ont vu le jour, montrant son influence sur l’individu. Le taux de végétalisation d’une ville est devenu critère d’appréciation de l’espace urbain à toutes les échelles. Le succès des parcs et espaces verts démontre le besoin du citadin de renouer le contact avec la nature, de profiter de ses vertus apaisantes et oxygénantes. Ces psychologies sont peut-être l'héritage des courants hygiénistes du XIX ème, effacés par la société de consommation dont l’individu essaye aujourd'hui de se dénouer. L’agriculture et la sylviculture urbaine sont également en plein essor. Explicitement, cet essor est dû à un besoin économique et une volonté de s’inscrire dans un cercle vertueux, implicitement, l’Homme est fier de produire du naturel et reconnaît l’esthétisme de la nature. L’Homme a cependant tendance à introduire des espèces exo-

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tiques dans l’espace urbain. Il le fait parfois au détriment des espèces locales, mais ces implantations peuvent aussi être le catalyseur de certaines biodiversités différentes en leur créeant des milieux plus favorables. Les platanes de la Pépinière à Nancy, par exemple, abritent un grand nombre de corneilles. Dans cet exemple, la flore exotique amène au développement d’une faune envahissante qui peut être dangereuse pour l'écosystème local, car elle entre en concurrence avec les autres espèces indigènes pour la nourriture, mais aussi pour les espaces de nidifications, etc... La relation de l’Homme avec la nature en ville est donc plutôt contrastée. Ironiquement, l’Homme a même tendance à artificialiser la nature dont il s’entoure ; par exemple avec l’importation d’espèces exotiques pour la flore, et la domestication pour la faune. La question de l’implantation d’une biodiversité sauvage en ville devient alors assez délicate, mélée au caractère indomptable de la nature, aux nuisances à l’espace artificialisé et aux connotations historiques de la faune. Cette partie aura permis d’établir un contexte à plusieurs échelles dans l’élaboration de notre projet. Le projet pourra ainsi s’implanter dans le système local en cohérence


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avec la pensée de l’individu contemporain. Cette étude stratifiée nous aura aussi permis de rendre compte de la principale fragilité des plans d’action en faveur de la biodiversité : ils reposent essentiellement sur la bonne volonté. Aujourd’hui, c’est donc à l’échelle de l’individu que l’on peut et qu’il faut agir. Pourtant, il est important de reconsidérer la biodiversité dans nos espaces urbains pour d'autres motifs que sa sauvegarde. Voyons maintenant quels services écosystèmiques la nature peut-elle amener à la ville.

Arnould Paul, Le Lay Yves-François, Dodane Clément et al., « La nature en ville : l’improbable biodiversité », Géographie, économie, société, 2011/1 (Vol. 13), p. 45-68. URL : https://www.cairn.info/revue-geographie-economie-societe-2011-1-page-45.htm, § 18 42 Le chat domestique, un fléau envahissant pour la biodiversité, notre-planète.info, in Actualités, 19 octobre 2017, disponible sur : https://www. notre-planete.info/actualites/118-chat-domestiques-biodiversite-oiseaux, consulté le 07-11-2018 41

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Apport du naturel à la ville Si les bienfaits physiques de la nature sur l’Homme sont déjà bien connus et largement démontrés, les qualités “psychologiques” du naturel sont de plus en plus étudiées. On sait déjà que la flore à des effets de “stabilisation” de notre atmosphère grâce à la photosynthèse qui permet de capter des gaz nocifs à l’Homme et polluants (CO2, SO2, NO2, ...). Ces gaz sont de plus en plus présents du fait des émissions liées à la consommation humaine croissante dans des espaces artificialisés grandissants. Ce rôle du végétal dans les modèles ultra-urbains n’est donc plus à démontrer. La flore joue cependant aussi un rôle moins connu de régulateur de températures. Les phénomènes d’îlot de chaleur urbain (ICU), provoqués par la haute artificialisation des espaces urbains. La végétation relâche de la vapeur d’eau dans l’atmosphère par transpiration, permettant de réguler l’hygrométrie et de rafraîchir l’air ambiant pendant les périodes chaudes (fig. 13). De même, l’ombre produite par la végétation permet également d’empêcher le réchauffement des surfaces artificialisées. À l’inverse, le végétal peut aussi influencer la consom-

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mation énergétique du bâti en modifiant la rugosité de son environnement proche, et donc la vitesse de pénétration et la force des vents en leur fournissant des obstacles naturels.

couches supérieures du sol. Elles créent aussi des aérations de leur substrat, permettant à l’eau de pénétrer en profondeur plus aisément dans des sols déjà perméables.

fig. 13

De plus en plus, la société reconnaît aussi les bienfaits du naturel sur l’esprit. Ces vertus psychologiques sont fortement liées au cadre agréable qu’il apporte dans les milieux urbains. Les squares et parcs peuvent par exemple pousser aux activités physiques, car ils sont toujours associés à des lieux d’activités, et si la qualité du site perçue par les usagers y est bonne, peuvent devenir un facteur de motivation pour une activité physique. D’autres études en cours travaillent encore sur les bienfaits de la nature sur la longévité, le stress, la guérison de certaines maladies, etc... Des thérapies encouragent d’ores et déjà le contact avec la nature, beaucoup de programmes incluant des personnes âgées (EHPAD), autistes, alzheimer, etc… proposent des activités de jardinage à but thérapeutique.

Au niveau des sols, la végétation permet aussi de prévenir l’érosion et de maintenir la perméabilité des sols, empêchant ainsi glissements de terrain et inondations. Les racines permettent de retenir les sédiments, et donc de stabiliser les

En Corée du Sud, où plus de 70% des habitants se disent déprimés par le travail d’après une enquête du géant de l’électronique Samsung, on installe des forêt thérapeutiques. De la

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méditation pré-natale au travail du bois pour les patients atteints de cancer, où aux enterrements dans la fôret, ces espaces sont devenus de réels espaces thérapeutiques, employant des “gardiens de la santé” qui vont donner leur expertise aux citoyens. Selon le ministère sud-coréen en charge des forêts, la thérapie forestière réduirait les coûts des soins médicaux et bénéficierait aux économies locales.43 Les espaces verts offrent aussi des opportunités d’interactions sociales. L’espace vert est devenu une réelle composante de la ville contemporaine, un lieu d’activités de plus en plus sollicité, devenant ainsi une plateforme d’échanges des milieux urbains utilisés notamment par les communes ou les associations, pour des évènements, des actions participatives ou pédagogiques, etc... De plus, le végétal prend aujourd’hui un impact économique certain. Le cadre de vie qu’offre la proximité du naturel peut influencer les valeurs foncières environnantes. La proximité d’un espace vert est devenue une qualité d’habitat mise en avant par les acteurs du monde foncier. Crompton, dans son étude The impact of parks on property values : a review of the

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empirical evidence 44, met en lumière l’évolution des valeurs foncières suivant leur proximité d’un espace vert dans plusieurs villes aux Etats-Unis, comme dans ce tableau extrait d’une étude de la ville de Worcester, Massachusetts, par Lillydahl et Singell (fig. 14)

fig. 14

En plus de la qualité de vie qu’ils offrent, ces espaces sont pour la plupart intouchables en ville, ne changeant jamais de destination, assurant d’autant plus la valeur du bien immobilier avec la certitude qu’un espace vert aménagé, donc nonconstruit en sera toujours proche, garantissant ainsi un certain isolement prolifique au bien foncier. Néanmoins si ce phénomène économique est théoriquement démontré et expérimenté, il dépend d’une ville à l’autre et


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prend en compte une infinité d’autres facteurs. L’espace vert urbain peut aussi être un lieu évité, s’il est mal fréquenté, mal aménagé ou encore pollué par exemple. Toujours dans un aspect économique, le végétal est aussi, rappelons le, une ressource constructive. Si en ville la prospection de cette ressource n’est pas encore ou très peu à l’étude, les végétaux sont tout de même producteurs de biomasse, pouvant elle même être utilisée dans la production d’énergie ou l’agriculture, c’est-à-dire comme combustible ou engrais. En France, la biomasse est la première source d’énergie renouvelable (66%), avec une part du bois énergie qui représente à elle seule 46% des EnR (fig. 15).45 L’espace naturel en ville a donc bien plus à offrir que de simples vertus décoratives. La qualité de son emplacement, de son aménagement et de sa gestion sont aujourd’hui aussi primordiales que celles d’un équipement public.

fig. 15 Mix énergétique et production d’EnR en France en 2011 (en énergie primaire) Florence Williams, Comment la nature régénère votre cerveau, National Géographic, Janvier 2016, p.31-49 44 Crompton J.L., 2001. The impact of parks on property values : a review of the empirical evidence. Journal of Leisure Research, p. 1-31. 45 Biomasse, Une Nouvelle Approche de l’Urbanisme, ADEME & Vous, n°68, p.15 43

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Et si la nature s’adaptait à l’espace urbain? Jusqu’ici, nous avons exposé la partie humaine et artificielle de la gestion de la biodiversité en ville. Cependant, le naturel est lui aussi flexible et adaptable, et, à certains égards, l’espace urbain peut aussi offrir un cadre idéal au naturel. Nous avions déjà évoqué les travaux de Kuhn, Brandl et Klotz sur la surprenante disposition des espaces urbains à accueillir la biodiversité46. Si ce postulat traite majoritairement de la flore, il est de même pour la faune. Beaucoup d’espèces animales ont déjà manifesté leur épanouissement dans l’espace urbain. La ville peut en effet donner un cadre attractif à certaines espèces opportunistes. Nous avons déjà vu que la ville pouvait générer des micro-climats, mais elle incarne aussi un environnement complet : cachettes, nouvelles sources de nourriture, etc… Des études ont déjà démontré que les villes pouvaient offrir un cadre particulièrement adapté à beaucoup d’espèces d’oiseaux grâce à la variété et la porosité de son paysage. Mais fait plus étonnant encore : la nature évolue pour s’adapter à la ville.

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En effet, il est démontré que certains facteurs environnementaux stressants sont à même d’accélérer l’évolution des espèces47, à l’image, par exemple, d’une éruption volcanique dans un milieu naturel. La pression soumise aux différentes espèces par un environnement hostile peut catalyser l’évolution d’une espèce.

chant dans cette zone, et ainsi générer une nouvelle sous-espèce de merle spécifique à l’environnement de l’aéroport de Madrid.48

Or la ville est un endroit oppressant par excellence pour la biodiversité (fig. 16) : bruit, pollution, chaleur urbaine, foule, fragmentation des territoires, éclairage… Ces facteurs ont d’ores et déjà stimulé l’évolution de certaines espèces urbaines, qui s’adaptent au plus vite à un nouvel environnement. À l’inverse des évolutions darwiniennes s’étalant sur des milliers d’années, l’espace urbain peut modifier les caractéristiques d’une espèce en quelques décennies seulement. Une étude espagnole a, par exemple, révélé que les merles vivant à proximité de l’aéroport de Madrid avaient changé la structure de leur chant pour se distinguer de la pollution sonore générée par l’activité de l’aéroport. Ces oiseaux ont également adapté les horaires de leurs échanges en fonction des décollages et atterrissages. À terme, ces évolutions comportementales pourraient valoriser les individus dont la morphologie est la plus adaptée pour le

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Fig. 16, Les facteurs stressants pour la bidiversité dans l’espace urbain. Foule : La densité humaine est plus élevée que dans n’importe quel environnement naturel, donc plus de prédateurs potentiels pour la biodiversité.

Fragmentation : Beaucoup d’obstacles artificiels (routes, bâti, ...) fragmentent l’espace urbain, entravant les déplacements.

Béton : l’imperméabilisation des sols empêche l’infiltration de l’eau mais aussi des nouvelles graines.

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Sons et lumières : la polution sonore et lumineuse dérègle les comportements de la biodiversité et influe leur rythme de vie. Ilôts de chaleur : les modifications micro-climatiques dans l’espace urbain peuvent perturber la biodiversité. Pollution : les réseaux hydrographiques ont de fortes teneurs en métaux lourds toxiques et l’air contient plus de particules fines en ville Déchets : Une source de nourriture inédite pour la faune urbaine, dans sa composition et sa texture.


Comment revaloriser la biodiversité dans l’espace urbain ?

Une certaine biodiversité est donc capable de se développer dans l’hostilité de l’espace urbain. Ce constat est optimiste lorsqu’on connait le développement des zones urbaines actuelles. Néanmoins, il n’incarne pas une forme de réponse complète à notre problématique. Ces espèces urbaines, faune et flore, sont des espèces devenues aujourd’hui communes dans l’espace urbain, et s’ils incarnent des nouveaux biodynamismes dans ces environnements, ils ne sont cependant pas forcément spécifiques à leurs nouvelles implantations géographiques. On pourrait presque considérer ces espèces “super-développées” comme des espèces exotiques à leur environnement naturel, or, l’objectif de ce travail cherchera à valoriser les espèces locales et la diversité de chaque environnement et géographie. Cependant, l’évolution et l’adaptabilité dont les espèces urbaines ont fait preuve pourrait s’imaginer avec des espèces locales, à moindre échelle, mais nous permettant tout de même de les projeter dans un espace urbain.

Cette étude aura eu pour but d'informer le lecteur des paramètres sociétaux qui influeront notre démarche de conception dans la troisième et dernière partie. Ainsi, si la structure anthropique s'adapte à cette crise environementale, la biodiversité, bien que réduite, trouve elle aussi une forme de résilience, et son développement dans l'espace urbain pour restaurer un équilibre naturel détruit à l'Anthropocène pourrait, en plus d'assurer sa sauvegarde, répondre à d'autres services.

Nous avons donc établi dans cette partie l'ensemble du système de réactions induites par la crise écologique. Toutes ces considérations font donc état de la gestion et l'évolution de la biodiversité dans les mileux urbain.

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Kühn I., Brandl R. et Klotz S., 2004, The flora of German cities is naturally species rich, Evolutionary Ecology Research, 6, 749-764. 47 Biodiversité, Vive la Ville!, Vincent Nouyrigat, Sciences et vie, N°1216, janvier 2019, p.65-83 48 Ibid

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III. Le projet Carré-Nature Le contexte actuel et les champs d’interventions de notre conception ayant été définis, il nous faut maintenant comprendre quels dispositifs et sytèmes peuvent entrer en compte dans cette conception plus favorable à la biodiversité. Cette partie sera l’occasion de réaliser et d'analyser un projet de rénovation concentré sur la problématique de la biodiversité dans l’espace urbain. L’intérêt sera ici de donner une valeur réelle et contextuelle à l’argumentaire de ce mémoire. Ce projet illustrera l’application directe de dispositifs généraux et ponctuels permettant une sauvegarde et favorisant le développement des cycles naturels dans l’espace urbain. L’édifice choisi est situé à Nancy, dans le quartier des Rives de Meurthe. Ce quartier est en constante évolution depuis près d’une décennie, étant le théâtre d’un projet d’urbanisation moderne. Ce secteur présente ainsi des infrastructures récentes, prenant déjà en compte certains facteurs de conception écologique.

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Le quartier Rives de Meurthe : Ce secteur, situé à l’est de l’agglomération de Nancy, est un témoin de l’histoire de la ville. Les multiples installations historiques de ce quartier sont encore visibles et témoignent de son passé riche, favorisé par sa proximité du centre-ville et sa situation entre les bras d’eau que forment le canal et la Meurthe. Il a toujours été un secteur clé dans le développement de la ville, témoin de multiples activités économiques dès le Moyen-Âge, et particulièrement à la Révolution Industrielle, où sa proximité des voies d’eau le rendait propice à l’installation d’usines. Ce secteur encore désordonné ne connait un plan d’aménagement que dans les années 1990 avec la création de la ZAC Stanislas-Meurthe, rebaptisée plus tard Rives de Meurthe, faisant ainsi partie des opérations de restructuration urbaines majeures de l'agglomération nancéienne. L'aménagement de la ZAC Rives de Meurthe illustre une volonté de redynamisation de ce secteur, avec un programme riche, développant économie et habitat, tout en valorisant sa situation exceptionnelle entre Canal et Meurthe.49 Ce secteur présente donc le modèle de densité actuel favorisé par les urbanistes. Mais l’interêt réel de ce secteur dans le

développement d’un projet cohérent avec notre problématique réside également dans la richesse de son biotope originel, dont les abords de la Meurthe sont encore les témoins aujourd'hui. Ce secteur comprend notamment plusieurs secteurs en friche, qui seront capitaux pour les enjeux que nous développerons.

Quartier Rives de Meurthe, Nancy, in Utile, in Dans mon quartier, disponible sur : https://www.nancy.fr/utile/dans-mon-quartier/quartier-rives-demeurthe-867.html, consulté le 01/12/2018 49

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Le lotissement Carré Nature. Situé au cœur du secteur des Rives de Meurthe, le lotissement Carré Nature voit sa construction débuter en 2008. C’est un projet de l’agence Pietri Architectes, situé à un carrefour stratégique entre la ligne de tramway et Centre Commercial des Deux-Rives. Ce projet dispose donc d’une visibilité particulière dans ce secteur. Le Carré Nature se veut dans la continuité des jardins d’eau d’Alexandre Chemetoff, aménagement-symbole du projet urbain de la ZAC Rives de Meurthe. Ce projet développé sur le thème de la nature et du végétal, comporte 91 logements et quelques locaux commerciaux50. Un dispositif de volets en bois coulissants donne un aspect particulier à cet édifice. Ce projet développe aussi un jeu de balcons et de terrasses intéressant, permettant à tous ses occupants de disposer d’une surface extérieure privative. L’autre qualité de ce projet réside dans la variété de logements proposés, du studio au T5, cohérent avec les multiples activités du quartier, pouvant accueillir de l’étudiant seul à la famille nombreuse.1 Le projet se développe autour d’une cour centrale, qui illustre quelque timide volonté de végétalisation, insuffisantes pour un développement de biodiversité conséquent.

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fig. 17, Isonométrie générale de l’îlot

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À l’image du quartier, la végétalisation est très maîtrisée, et présente plusieurs types de végétaux exotiques, choisis pour leurs qualités esthétiques ou d’entretien. La surface occupée par le projet est entièrement artificialisée.

son implantation et sa visibilité pourraient en faire un terrain d’accueil favorable pour illustrer un nouveau genre d’architecture, qui favorise toutes les formes de vie à l’ère de l’Anthropocène.

Bien que relativement agréable à vivre, le dispositif de volets qui donnait une qualité architecturale particulière à cet immeuble connaît des dysfonctionnements. À la suite de la chute de plusieurs d’entre eux à cause de l'usure de leur système de coulisse, une partie des volets a été retirée des façades. Le remplacement de ces volets tarde, et le syndic favorise le choix de volets aluminium effet bois plus légers pour parer au problème. Dans les années à venir, le lotissement Carré Nature devra donc présenter plusieurs types de volets différents : les volets d’origine, en bois non-traité appelés à griser, les volets en aluminium, ou encore des volets roulants, aléatoirement mélés selon l’accord -ou non- des copropriétaires. Il va sans dire que ces dispositifs vont profondément affecter l'esthétisme du bâtiment. Ce bâtiment n’est donc plus cohérent avec les enjeux que se sont donnés ses concepteurs, dix ans après sa construction, et pourrait aujourd’hui déjà prétendre à une rénovation. En outre,

Installé depuis trois ans dans ce logement, il m'a tenu à coeur d'utiliser mon expérience d'usager pour établir ce projet. Le résultat qui en aboutira sera la suite d'une longue serie d'observations et d'expériences bien antérieures à la rédaction de ce mémoire. Bien sûr, le fruit de mes analyses et de mes reflexions sera exposé dans ce travail, et la méthodologie employée pourrait s'appliquer à n'importe quelle rénovation.

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Carré Nature, Pietri Architectes, in logements, disponible en ligne sur : http://www.pietriarchitectes.com/projects/view/135 50

fig. 18, Plan général de l’îlot


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fig. 19 à 23, état actuel de l'immeuble

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Analyse macro : Toujours dans l’interêt de l’élaboration de notre projet du Carré Nature, nous allons maintenant procéder à une analyse du site à l’échelle macro, c’est à dire à l’échelle de l’agglomération nancéienne intra-muros. Cette analyse sera centrée sur les facteurs altérant la biodiversité à l’échelle du territoire nancéien. Elle permettra de refléter les conditions globales d’élaboration du projet, et pourra servir pour étendre des interventions favorables à la biodiversité à ladite échelle, révélant les principaux secteurs d’enjeux et de faiblesses de ce territoire. Ainsi seront successivement analysés maillage végétal, intensité urbaine, conditions micro-climatiques (par le biais de l’analyse des ilôts de chaleurs urbains), et pollution sonore. Ces facteurs ont précedemment été identifiés comme potentiels obstacles à la biodiversité dans l’espace urbain. À ces cartes sera ajoutée une ultime analyse présentant les dispositions particulières du territoire nancéien, reflétant ses caractéristiques morphologiques et dispositions, pouvant influer sur l’implantation et la sauvegarde de biodiversité.

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Végétation urbaine : Si Nancy est plutôt perçue comme une ville à dominante minérale par ses usagers, cette carte nous en revèle les espaces "naturels". Bien évidemment, les espaces ci-représentés sont artificialisés et ne sont plus composés des biotopes originaux, mais nous présentent cependant des espaces végétalisés aux sols encores perméables. On constate une grande hétérogénéité de l’agglomération nancéienne dans la structuration et la localisation de ses espaces verts, notament dans l’hyper-centre, exempt de toute végétation, qui aura sûrement valu à Nancy son titre de ville-minérale. Certains espaces ci-représentés ne sont également pas tous des espaces-verts à proprement parler ; on distingue par exemple la vaste surface du Cimetière du Sud au bas de la carte. Bien qu’ayant été prévu à une autre destination, il s’agit pourtant bien d’un espace végétalisé avec un sol pérméable, et reste donc un terrain d’accueil favorable à la biodiversité. Sur la carte, les points rouges représentent l’équivalence à 1 m² de prairie fleurie. On remarque aussitôt que leur présence n’est liée qu’à certains espaces, illustrant bien l’artificialisation des espaces naturels en milieu urbain. Par artificialisation,

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il est entendu la gestion anthropique de ces espaces, qui sont premièrements qualifiés (en fonction de leur situation et de leur usage) puis aménagés (on rappelle la propension des paysagistes à implanter des espèces exotiques et décoratives). Ces espaces, bien que végétalisés, n’incarnent donc pas à part entière des zones naturelles, et ne sont que les reflets de la gestion actuelle de la biodiversité dans l’agglomération. Notre secteur d’intervention est, quant à lui, situé dans une zone à la végétalisation plus homogène. Fruit d’un aménagement récent, la prise en compte de l’espace naturel par les urbanistes (Trame Verte et Bleue) est plus ressentie. On distingue notamment la végétalisation de la Meurthe et son canal, qui sont aujourd’hui des secteurs attractifs de la zone, situés à proximité d'une zone humide protégée. Pour résumer, si Nancy n’est pas un modèle de "ville verte", notre projet s’inscrira pourtant dans un espace au maillage végétal fort, qu’il sera important de considérer et de valoriser. fig. 24, Espaces végétalisés de l'agglomération nancéienne


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Résidence Carré Nature Équivalence à 1m² de praire fleurie Site inscrit Zone humide Parcs et jardins ENS + Natura 2000 Massif de la Haye

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Intensités urbaines Cette carte illustre la synthèse spatiale des intesités urbaines, nous permettant de dégager graduellement les zones où l’activité humaine est la plus forte. Elle est la synthèse de : • la densité de population, • le nombre d’emplois dans les commerces, • les services, • l’industrie, • la validation quotidienne aux arrêts Stan, • les espaces publics rayonnants, • les effectifs étudiants. On remarque que le secteur du Carré Nature se situe dans la première couronne, c’est-à-dire là où l’activité humaine est la plus forte dans l’agglomération nancéeienne. Bien évidemment cette carte illustre une moyenne, les intensités urbaines dépendent de micro-localisation (axes circulatoires, centre d’interêt, ...) et du moment de la journée.

Le Carré Nature est donc situé dans une zone où l’activité humaine est particulièrement intense, le coeur métropolitain, et s’illustre donc à première vue comme un lieu plutôt évité par la biodiversité51, et particulièrement par la faune à l’exception de certaines espèces urbaines que nous avons déjà citées auparavant.

51 Cf partie sur l'évolution et adaptation des espèces urbaines, fig. 16, Les facteurs stressants pour la bidiversité dans l’espace urbain, p.72

fig. 25, intensités urbaines, plus l'activité humaine est intense, plus la zone correspondantre sera foncée

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Résidence Carré Nature

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Ilôt de chaleur urbains : L’ilôt de chaleur ou ICU est un phénomène de réchauffement de l’espace urbain par des processus complexes où s’entremêlent cause et effet : inertie thermique, nature et caractéristique des textures (porosité, couleur), quantité d’énergie solaire, présence d’eau ou de végétation, vents, morphologie des espaces, chaleur anthropique (chauffage, climatisation, industrie, pollution), etc... 52 Ces ilôts de chaleur générant des micro-climats, les espaces urbanisés ne sont plus les climats des biotopes indigènes, et peuvent donc perturber la biodiversité. Leur étude sera notamment prise en compte dans l’élaboration du projet et le choix des espèces à implanter, en tenant compte du fait que notre intervention réduira ce phénomène localement. À l’échelle de l’agglomération, on constate des ilôts de chaleur importants autour de l’hyper-centre, probablement très en lien avec son intensité humaine et sa forte minéralité, mis en évidence dans les cartes précedentes. Notre zone d’intervention reste cependant dans un secteur moyennement affecté par ces ilôts de chaleur (variant de +1C° à +4C°). Notons cependant que les ilôts de chaleur peuvent aussi être bénéfiques du

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point de vue de la réduction des dépenses énergétiques liées au chauffage des zones urbaines dans les périodes froides, et a contrario aux phénomènes de surchauffe dans les périodes estivales.

IAU ÎdF, Les îlots de chaleur urbains – L’adaptation de la ville aux chaleurs urbaines, Novembre 2010, p.8, disponible en ligne sur : https://www. iau-idf.fr/fileadmin/NewEtudes/Etude_768/les_ilots_de_chaleur_urbains_ Adaptation_de_la_ville_aux_chaleurs_urbaines.pdf 52


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Résidence Carré Nature

fig. 26, zonage et caractérisation des ICU dans l'agglomération nancéienne

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Cartographie de la pollution sonore : Les cartes ci-contre illustrent l’intensité des pollutions sonores de l’agglomération en période diurne et nocturne. On remarque d’emblée la concentration de la pollution sonore autour de l’axe de contournement ouest. Globalement, notre secteur d’étude est situé dans une zone d'intensité moyenne, tout de même assez intense en journée, avoisinant les 60 à 70 dB.53 Le Carré-Nature est cependant situé dans un axe assez important, à proximité d’un centre commercial et d’un arrêt Stan, et peut donc atteindre des valeurs ressenties supérieures à certains moment de la journée. Les facteurs bruits sont particulièrement significatifs pour la faune, qui aura plutôt tendance à les éviter. Élaborant notre projet dans une zone particulièrement sujette à la pollution sonore, il sera important de considérer des dispositifs accoustiques d’absorption pour créer un archipel favorable à des biodynamismes. À titre de comparaison, 70 dB sont équivalent au bruit émis par un aspirateur. 53

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Jour

Nuit

Résidence Carré Nature

fig. 27, cartographie de la pollution sonore de l'agglomération nancéienne

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Atouts et fragilités de l’agglomération nancéienne On remarque premièrement sur la carte ci-contre la disposition topographique en cuvette de l’agglomération. Cette disposition est le témoin d’un biotope originel particulier qui est encore visible à certains égards. La ville de Nancy est en effet située dans un milieu marécageux humide, déjà identifié dans le SCoT comme faisant partie d’un corridor écologique particulier à valoriser. Les rives de la Meurthe sont encore témoin de ce biotope exceptionnel à plusieurs localisations au sein même de l’espace urbanisé. Malheureusement, cette carte témoigne aussi de l’extrême artificialisation de l’agglomération qui ne se limite pas à ses espaces bâtis, mais aussi à des zones végétalisées simplifiées : plantations monospécifiques, espaces agricoles et bords d’eau artificialisés. Elle révèle aussi les limites d’une urbanisation sans transition paysagère, et donc la fragmentation extrême d’une partie de ce territoire urbanisé. Si le territoire concerné par notre zone de projet (les Rives de Meurthe) est présenté à première vue comme un territoire

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d’intervention secondaire, car présentant déjà beaucoup d’aménagements cohérents avec notre démarche par rapport au reste de l’agglomération nancéienne (nombreux espaces verts, trottoirs plantés, etc), nous verrons dans une analyse micro, c’est-à-dire à l’échelle de l’ilôt et de ses environs, que ce secteur présente encore beaucoup de limites dans ses conditions d’accueil du biotope. S’il peut être considéré comme un secteur plutôt végétalisé, cette analyse a pu démontrer qu’il n’était cependant que très peu favorable au développement de la faune, en raison de sa forte intensité urbaine, de son micro-climat et de sa haute pollution sonore.


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Résidence Carré Nature

fig. 28, identification des atouts et fragilités de l'agglomération nancéienne

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Analyse micro Suite à notre analyse macro, il est maintenant important de déterminer les conditions propres à l’échelle d’intervention de notre projet. Nous concentrerons cette étude sur l’ilôt dont fait partie la résidence du Carré Nature et ses proches environs. Cette micro-analyse est exclusive et encore non documentée, elle sera donc effectuée à l’échelle des moyens de l’auteur. Elle pourra donc plutôt être qualifiée d’analyse sensorielle pour une partie de ses données qui seront le fruit de l’observation et de l’expérience in situ de l’auteur et des outils dont il dispose.

fig. 29, découpage parcellaire simplifié

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Nature des sols et végétation L’ilôt du Carré Nature est quasi intégralement artificialisé. Les bacs et couloirs plantés qu’on distingue sur le projet sont pour la plupart sur dalle. La végétation sur dalle, bien qu’ayant une meilleure gestion des eaux de pluie et une absorbtion partielle, reste un espace impérméable, dans le sens où l’eau ne peu rejoindre les réseaux naturels souterrains. Bien que criticables, certains dispositifs sont plutôt intéressants d’un point de vue architectural. Les couloirs périphériques sont en fait des cours anglaises plantées (bambous), permettant de masquer les ouvertures sur le parking depuis le niveau de la rue sans perdre l’éclairage naturel. Ils permettent aussi de réduire le vis-à-vis depuis l’espace public. Ce dispositif ce retrouve sur plusieur résidences de la zone. Sur cet ilôt, seule subsiste une petite zone non-artificialisée. Il s’agit de la parcelle adjacente, qui dépend a priori du lotissement voisin, car suite à sa construction, cette parcelle a été cloturée. Cette parcelle comporte quelques arbres remarquables. Cet ilôt suit un plan d’aménagement particulier des coeurs d’ilôts du secteur : des vastes espaces centraux sont dégagés, et végétalisés à diverses mesures, comme on peut le constater

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sur la parcelle voisine sur la carte ci-contre. Ces coeurs d’ilôts forment donc une continuité sur quelques de blocs de la ZAC Stanislas-Meurthe, allant du parking à la végétation en bacs au petit parc privé. Ces espaces, bien qu’accessibles au public, sont réservés aux riverains. La végétation située sur l’ilôt est donc majoritairement de la végétation d’agrément. à l’image de l’ensemble de l’opération de la ZAC Stanislas-Meurthe, les trottoirs sont plantés, avec quelques bandes gazonnées. Les bacs plantées de la cour du Carré Nature sont pour la plupart occupés par divers arbustes, qui font souvent office de surface occultante pour les logements situés en rez-de-jardin.

fig. 30, Nature des sols


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Végétation sur dalle Végetation sur sol naturel

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Circulation des vents La résidence du Carré-Nature, par sa disposition centrée sur une cour, génère un courant d’air fort dans cet espace. Les vents forts qu’on retrouve autour de l’espace dégagé du Canal et ceux générés par le trafic automobile sont ainsi confinés et fortement ressentis dans la cour centrale. La parcelle adjacente, légèrement boisée fait toutefois office de petit filtre réduisant quelque peu les effets de tirages dûs à la volumétrie de l'ilôt. Cette circulation de l’air crée cependant quelques zones calmes, dont une majeure (en vert sur la carte). Cette cour n’est globalement pas agréable dans le cas d’un vent fort, de plus cette circulation accentuée de l’air amplifie le bruit généré par le fort trafic du boulevard de la Mothe et du tram sur l’avenue du XXème Corps. Ces désagréments sonores sont encore plus accentués en période hivernale lorsque la densité de végétation est faible.

fig. 31, Circulation des vents dominants

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Zone à l'abri des vents Circulation des vents

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Éclairage L’éclairage artificiel a des conséquence néfastes sur les organismes vivants, principalement liées aux déréglements des cycles jours-nuits qu’il induit sur la faune, la flore mais aussi sur l’Homme. L’éclairage public situé en périphérie de l’ilôt est relativement fort, de plus, une partie des lampadaires est située à hauteur des appartements du second étage pouvant parfois occasionner des gênes pour leurs occupants. Le centre commercial situé sur la rue Emilie du Châtelet (non représenté sur la carte ci-contre) est lui sujet à l'écl;airage publicitaire fort du Centre Commercial des Deux-Rives. L’espace de la cour est quant à lui plutôt faiblement éclairé, il ne reçoit aucune lumière directe, ou alors elle se retrouve à nouveau filtrée par la végétation de la parcelle adjacente. Les résidents produisent une faible pollution lumineuse car les logements ne sont pas tous occupés, et ceux occupés sont souvent occultés (volets, stores) pour réduire les vis-à-vis. fig. 32, Éclairage anthropique

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Éclairage urbain Éclairage privé

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Ombrage L'étude réalisée ci-contre nous démontre la faible quantité de rayonnement naturel qui atteint la cour centrale. Cette étude a été réalisée avec le moteur d'ombrage du logiciel Archicad, avec les conditions d'exposition réelles, au solstice d'été et d'hiver. L'éclairage naturel dans la cour est ponctuel et très variable selon le moment de la journée ou la saison. On optera donc plutôt pour des écosystèmes à tendance semi-ombragé dans cette zone-ci. En revanche, les pans de toiture bénéficient d'un ensoleillement maximal continu tout au long de l'année.

fig. 33, Étude des ombres portées

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Solstice d'été 10h

Solstice d'hiver 10h

Solstice d'été 15h

Solstice d'hiver 15h

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Situation écosystèmique La carte ci-contre identifie les archipels écosystèmiques environnants, c'est-à-dire les zones où un biotope particulier subsite en milieu urbain. Les zones identifiées sont pour la plupart des milieux humides, artificiels ou naturels. Sur les berges de la Meurthe, plusieurs configurations morphologiques du paysage permettent le développement de ces milieux (îles, presqu'îles). Du côté Canal, on remarque aussi la présence d'un écosystème humide riche, artificiel cette fois. Les jardins d'eau, bien que présentant des biotopes hybrides (dûs à la présence d'une flore éxotique), sont toutefois l'abris d'un écosystème moins riche que sur les berges de la Meurthe. Cet écosystème souffre d'un entretien trop fréquent et de son isolement géographique. En revanche, certains terrains de la ZAC Rives de Meurthes sont encore en friche, présentant un écosystème pionnier très riche. Bien que temporaires, ces zones ont de réelles incidences sur les écosystèmes locaux. Le projet exposé dans la troisième partie devra articuler tout ces écosystèmes pour avoir une efficacité maximale sur

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la biodiversité locale. Pour ce faire, il s'inspirera de leur structure écosystèmique et proposera des conditions similaires.

fig. 34, Archipels écosystèmiques environnants et maillage végétal (1) Carré Nature (2) Biotopes naturels riche (3) Biotopes artificiels riche (4) Friches


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3 3

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La permaculture et les trois zones : Si des outils conceptuels ont déjà été développés précédemment, le projet imaginé pour la résidence du Carré Nature s’appuiera sur deux d’entres eux en particulier : la permaculture et le principe des trois zones. Ces procédés en plein essor seront fondamentaux dans le réaménagement de notre site. La permaculture est un concept développé dans les années 70 par Bill Mollison et David Holmgren en réponse au modèle destructeur et pollueur de nos sociétés contemporaines. Ce concept puise ainsi dans les méthodes et connaissances traditionnelles en y ajoutant des connaissances nouvelles et modernes pour subvenir aux besoins de l’Homme contemporain sans dégrader l’environnement. L’originalité de la démarche de Molllison et d’Holmgren n’est pas d’avoir mis en avant des principes déjà connus, mais d’avoir mis en avant les inter-relations et inter-connections de ces principes. Cette méthode tire parti des biodynamismes et veut résoudre des problèmes complexes par des solutions

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simples, à l’instar de la science moderne, le plus souvent réductionniste, car traitant les problèmes au cas par cas. La permaculture défend ainsi une éthique fondée sur trois principes fondamentaux : - prendre soin des Hommes - distribuer de façon équitable - prendre soin de la Terre L’autre originalité de ce concept réside dans sa flexibilité. Il ne favorise aucune discipline et son action peut se développer à toutes les échelles et par n’importe qui. De même, la permaculture promeut un continuel apprentissage, l’usager est en perpétuelle amélioration des techniques qu’il développe pour obtenir des systèmes toujours plus autonomes et durables. En fait ce concept s’explique plus clairement par sa méthode de conception, aussi connue sous le nom de déroulement “OACME” : observer, analyser, concevoir, mettre en place, évaluer (ré-).54

de sa construction dans ses usages comme sa qualité d’habitat. En permaculture comme en éco-construction, le site offre des avantages et des possibilités : un arbre par exemple ne sera plus seulement réduit à un simple agrément esthétique, il pourra faire office de protection solaire ou contre les vents, permettra d’accueillir une biodiversité, éventuellement d’en cueillir les fruits, ou encore servir de ressource de construction locale comme de stabiliser l’érosion des sols. Évidemment, ces principes sont fondés sur une analyse précise et parfois même sensible de son environnement. Ici, les connaissances, l’expérience et l’implication du concepteur deviennent primordiales et la qualité de son analyse préliminaire influera l’efficacité du système final.

L’application de la permaculture à la conception et à la construction reprend les principes de l’éco-construction. Le concepteur tire parti des axes structurants de l’environnement de son projet à toutes les échelles, pour améliorer l’efficacité

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Le concept des trois zones est quant à lui un dérivé des principes fondamentaux de la permaculture. Très peu répandu en France, c’est pourtant un concept qui commence à se développer peu à peu (fig. 35). Il s’agit d’organiser son espace extérieur, comme un jardin par exemple, en trois zones distinctes : une zone tampon, une zone maigre et une zone maraîchère55. Ces trois zones seront respectivement les terrains d’accueil d’écosystèmes différents adaptés à leurs conditions. Ce principe lutte contre l’hyper-simplification56 de l’environnement, et s’oppose farouchement aux jardins stériles et lourdements entretenus qu’on peut retrouver chez les particuliers. La zone tampon est une zone constituée d’amas de branches, bois mort et pierres. Elle agit comme un filtre à la biodiversité permettant d’abriter et nourrir tout type de faune. La zone maigre est quand à elle un milieu très pauvre constitué d’un substrat dépourvu d’azote et pauvre en engrais. Cette zone favorise une large diversité végétale qui ne subit pas la concurrence des graminés et autre plantes nitrophiles favorisant les sols riches. La zone maraîchère est la zone de culture. Bien que dédiée à la production alimentaire, cette zone peut aussi favoriser certains écosystèmes.

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Évidemment, ce principe des trois zones condamne le matériel de jardinage et les produits traditionnels. Ces écosystèmes se stabilisent d’eux-même et demandent alors peu d’entretien. Si toutefois un entretien est nécéssaire, il devra être effectué avec des outils manuels, sans faire appel à la machinerie du jardinier moderne (tondeuse, débroussailleuse et taille-haies sont à proscrire). En plus d'être très gourmand en énergie57, ces gadgets font des ravages sur les insectes et leurs milieux, altérant la biodiversité des zones traitées.. Cette organisation paysagère permet alors de générer un maximum de diversité dans tout type d’espace et quelque soit la zone géographique, tout en étant particulièrement efficiente pour la microfaune58 et les insectes. Développer le concept des trois zones dans un espace urbain dense pourrait stimuler et diversifier plus efficacement des biodynamismes. Évidemment, la localisation de notre projet et son microclimat valorisera plus l’un ou l’autre type de zone, mais l’association du concept des trois zones à la permaculture, c’est à dire avec une analyse micro bien définie qui saura montrer comment tirer parti du site, permettra de faire subsister les trois zones.


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fig. 35, Jardin en trois zones à Obersteinbach (67), ce type de jardin valorise une biodiversité beaucoup plus large du'un jardin "classique"

Rosemary Morrow, Manuel d’apprentissage pas à pas de la permaculture, Acquérir son autonomie en s’appuyant sur les services de la nature, éditions Imagine un Colibri, septembre 2015 55 Biodiversité, Hymenoptera, le jardin écologique, in Biodiversité, disponible sur : http://hymenoptera.fr/biodiversite/ 56 renvoie aux cultures monospécifiques, aux jardins artificialisés, etc... 57 Les moteurs de tondeuses ont un très mauvais rendement. Par unité de puissance, une tondeuse ou un tracteur-tondeuse pollue 35 fois plus qu’une voiture standard en rejet de CO2. Source : Gestion des milieux herbacés, Problématique & réponses diversifiées, Biodiversité et Bâti, disponible en ligne sur : http://www.biodiversiteetbati.fr/Files/Other/DocComplGTBPU/ F14-MilieuxHerbaces-Natureparif.pdf 58 La microfaune désigne l'ensemble des animaux (inférieurs à 0.2mm). Elle joue un rôle fondamental dans la décomposition de matière organique, la sédimentation, etc... 54

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Expérimentations personelles Mon attrait personnel pour ces pratiques n’a pas été seulement documentaire. J’ai expérimenté la permaculture, pour des convictions personnelles, mais aussi pour approfondir mes connaissances dans la rédaction de ce mémoire. Bien sûr, ces interventions sont pour l’instant restées à l’échelle de mes possibilités, mais elles y auront fait leurs preuves. Je me suis donc lancé dans des petites installations, dans mon appartement à Nancy, pour mettre en pratique et tester quelques principes de permaculture et des trois zones. J’ai donc fabriqué et installé une petite jardinière sur mon balcon. Conformément aux principes de permaculture, j’ai taché de dépenser le moins possible : meuble d'origine et pot sont de récupération, la terre et les feuilles ont été trouvée en forêt, et les plantes ont été cultivées en boutures de plantes issues du domicile familiale. Disposant d’un ensoleillement très faible (environ 2 heures le matin en été), j’ai sélectionné des plantes adaptées, mais aussi qui me seraient utiles (menthe, thym, ciboulette, persil, salades, mâche,...). Ces plantes ont été disposées dans la jardinière suivant leurs besoins et leur complémentarité.

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J’ai disposé un lit de feuilles mortes locales (de diverses essences) qui en se décomposant permettent de nourrir les plantes, en sollicitant notamment des micro-organismes et créer un micro-biotope sur une surface de 50 cm². Ce lit de feuilles permet également de conserver l’humidité, très efficacement : la fréquence des arrosages est d’environ une par mois, pour ma jardinière peu profonde et installée sur un balcon couvert. Pour encore développer la micro-faune dans ma jardinière, j’ai disposé une petite bûchette de résineux qui présentait déjà des petites formations de mousse, ainsi que des petits fagots de branchages extraits de différentes essences d’arbres. J’ai pu très rapidement y observer le développement de micro-organismes (décomposition, mousses, ...etc). J’ai également mis à profit le lapin d’une de mes amies pour créer un engrais naturel. Une fois séchées, ses déjections se sont révélées être de formidables boosters de croissances pour mes plantes. J’ai aussi bricolé un petit composteur, qui m’a permis de réduire mes déchets organiques et d’en tirer des engrais liquides et solides. J’utilise ces engrais pour faire pousser mes propres boutures et étendre mes petites cultures. Je me suis réellement pris au jeu, donnant à chacune de mes plantes un pourcentage d’autonomie (une salade vivace me donnera 1%

d’autonomie, les aromates 2%,...). Ce procédé a été stimulant et me permet de me fixer de petits objectifs. Bien sûr, je n’atteindrai pas l’autonomie complète, mais il y a une réelle satisfaction à consommer un végétal que l’on a soi-même fait pousser. Ce n’était pas mon premier essai de jardinage sur balcon, mais il a réellement été le plus fructueux. Avec un investissement personnel minime et des conditions difficiles, j’ai obtenu de très bons rendements pour de très petites surfaces. Mais le plus impressionnant pour moi a été l’observation de l’efficacité d’un cycle naturel sur une production alimentaire. La micro-faune a des impacts peut-être encore trop sous-estimés (en tout cas pour l’industrie et la consommation de masse) sur la production végétale (aération des sols, pollinisation, décomposition,...). Ma grande surprise a été d’arriver à mettre en place ces cycles sur un espace si réduit, et m’a réellement convaincu d’étendre ce processus à tout un projet architectural, en diversifiant ces principes et leurs échelles. Voyons maintenant comment ils pourraient s’appliquer à l’échelle d’un immeuble collectif.

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La rénovation du Carré Nature : L’analyse à plusieurs échelles du site choisi nous a permi d’en distinguer les caractéristiques à valoriser et les failles à pallier pour notre projet du Carré Nature. Cohéremment avec les principes de conception énoncés précédemment, le projet valorisera plusieurs principes de permaculture et du dispositif des trois zones. La première grosse intervention a mener pour améliorer les qualités d’accueil écosystémique du Carré Nature réside dans la végétalisation de ses surfaces de toitures. Plusieurs études sont en effet menées sur les apports écosystémiques des toitures végétales (Dusza, 2017)59. Ces études démontrent les différents apports de ce dispositif dans l’espace urbain, sur la qualité de l’air grâce à la photosynthèse notamment, mais aussi sur leur propension à accueillir une biodiversité locale, et particulièrement sur les insectes dont la population est en fort déclin (75% depuis les 30 dernières années)60. La toiture végétalisée se révèle alors comme une solution à la perte de biodiversité dans les espaces urbanisés, offrant végétaux et surface poreuse. La densification des villes et la perte

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d’espace naturel ont rapidement mis en avant les potentialités des toitures dans nos espaces ultra-urbain. Les grandes superficies de toiture du Carré Nature seraient donc idéales pour ce type de dispositif et permettront par ailleurs de réduire significativement la perméabilité globale de l’îlot. Il existe trois types de toitures végétalisées : intensives, semi-extensives et extensives. (voir fig. 36) Ces types sont choisis en fonction de l’usage, la dimension et l’inclinaison de la toiture. Bien sûr, les frontières entre ces systèmes de végétalisation sont perméables. Il existe également plusieurs techniques de pose (fig. 37). Pour ce projet, nous privilégierons un toit végétalisé de type extensif, développant ici notre zone maigre pour tirer parti des apports solaires importants en toiture, mais aussi réduire l’impact financier de cette intervention et l’entretien. Nous opterons pour le système de pose complet (a- fig 37) par déduction : le système (b) en modules implique des interruptions du substrat et le système (c) précultivé restreindrait le choix de la végétation au catalogue des modèles commercialisés.

fig. 36, principales caractéristiques des toitures végétalisées d'après les règles professionnelles françaises pour la conception et la réalisation des toitures et terrasses végétalisées (en daN)

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fig. 37, Principales techniques de végétalisation de toitures

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Les toitures végétalisées présentent d’autres avantages environnementaux répondant à des problèmes d’empreinte écologique et pouvant favoriser le développement d’un écosystème : - La végétation améliore la qualité de l’air en absorbant les polluants grâce à la photosynthèse -La perméabilité du substrat et la végétation permettent la retenue d’une partie des eaux de pluie -L’épaisseur et la porosité du dispositif permet une isolation acoustique efficace en absorbant les ondes sonores. -La transpiration des végétaux permet de diminuer les effets d’îlot de chaleur, et de réduire la surchauffe des surfaces de toiture en été -l’isolation thermique des surface de toitures est également améliorée -La présence du dispositif permet d’augmenter la durée de vie des matériaux de la toiture initiale en les protégeant des rayonnements solaires (UV) et des chocs thermiques (gel-dégel, canicules)


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Bien sûr, ces différents avantages varient selon l’épaisseur du système de toiture végétalisée et du type de végétaux employés. La diversité des végétaux et le type de toiture végétale influe aussi sur la diversité de la biodiversité qui en résultera. Mais les différents types de toitures végétales (intensive, semi-extensive et extensive) sont qualitativement comparable car elles valorisent des écosystèmes différents.61 Si la toiture végétale offre déjà un panel écosystémique varié, son efficacité sur la biodiversité peut encore être améliorée en y intégrant des éléments diversifiants le milieu. Du bois mort favorisera le développement de la faune et des champignons, des pierres permettront le développement de mousses et des panneaux photovoltaïques orientés plein sud pourront apporter un microclimat ombragé et sec favorisant certaines espèces. La toiture végétalisée nécessite cependant un entretien plus important que les dispositifs de toiture standard. Suivant le type de toiture, l’entretien peut être aussi important que celui d’un jardin, à une ou deux interventions par an. S’ajoutant au prix initial (de 40 à 200 euros du m²), ce facteur peut induire des coûts supplémentaires, pesant globalement lourd sur la fac-

ture de ce type de dispositif. L’État met en place certaines aides favorisant la rénovation durable, mais dans le cas du Carré Nature, qui est une construction relativement récente (1996), ces aides seraient réduites, favorisant plutôt les projets de rénovation du bâti ancien.62

Yann Dusza. Toitures végétalisées et services écosystémiques : favoriser la multifonctionnalité via les interactions sols-plantes et la diversité végétale. Ecologie, Environnement. Université Pierre et Marie Curie - Paris VI, 2017. 60 Hallmann CA, Sorg M, Jongejans E, Siepel H, Hofland N, Schwan H, et al. (2017) More than 75 percent decline over 27 years in total flying insect biomass in protected areas. PLoS ONE 12(10): e0185809. https://doi. org/10.1371/journal.pone.0185809 61 Optimisation de la Biodiversité sur les Toitures Végétalisées, Guide BBP, les fiches Techniques, p.1-6, Disponible en ligne sur : http:// www.biodiversite-positive.fr/wp-content/uploads/2011/10/Toitures-v%C3%A9g%C3%A9talis%C3%A9es-05-janv.pdf 62 Ibid 59

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Deuxième secteur d’intervention majeur, la cour centrale fera l’objet d’un nouvel aménagement paysager. Comme pour les toitures, l’un des principaux enjeux sera de réduire son imperméabilité. Cette cour étant installée au dessus du parking souterrain, le sol naturel n’est pas accessible, et un dispositif semblable à ceux des toitures végétales sera employé. Néanmoins, on optera ici pour une couche de substrat plus haute permettant un panel de végétaux plus large et plus dense (modèle intensif). Pour conserver les facilités de circulation, un pavage ponctuel sera mis en place sur les axes de circulations identifiés sur le schéma ci-contre. Le dispositif de pavage employé ne devra pas nuire à la qualité des déplacements, ni à la perméabilité du sol. Cette intervention permettra de réduire de plus de 50% la surface imperméable de la cour. Dans l'idée de favoriser les circuits court et l’énergie grise et réduisant les dépenses, on réemploiera une partie du pavage actuel. Au-delà des enjeux de protection contre les excès d’eau pluviale, la perméabilité des dispositifs comme les toitures végétalisées ou les pavés perméables permet de filtrer les

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eaux de pluie (polluants, sédiments) avant de les renvoyer dans les réseaux ou directement dans les systèmes naturels. Les bacs de culture existants seront réutilisés pour installer une végétation plus dense, profitant de la grande profondeur de substrat. Le bac le plus ombragé sera converti en bassin, générant une zone humide permettant en été le rafraîchissement de la cour (fig. 38). Le dispositif de mare mis en place ne sera pas alimenté en eau, mais sera tributaire des conditions climatiques et trouvera de lui même son équilibre, se remplissant ou s’asséchant au grès des conditions. Ces cycles sont importants et valorisent tour à tour diverses espèces.63

Association des Naturalistes de l’Ariège, la mare un écosystème d'une grande diversité, document pédagogique, cottes, 09240 la Bastide de Sérou, janvier 2000, disponible en ligne sur : http://www.mares-franche-comte.org/ zfiles/69.pdf 63


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fig. 38 : Coupe sur bassin de type mare échelle 1/20°

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Ces deux grandes interventions majeures seront complétées par plusieurs types d’installations ponctuelles légères qui ont des incidences sur les écosystèmes, mais aussi sur les usages des occupants. La plupart de ces dispositifs peuvent être trouvés dans le commerce, mais ils peuvent aussi être réalisés à partir de matériaux de récupération. - Les nichoirs : Les enjeux thermiques du bâtiment ont aujourd’hui mené à la diminution de la porosité des façades. Pourtant, la ville s’est avérée être un environnement propice à plusieurs espèces d’oiseaux cavernicoles, profitant des niches et porosités en altitude de l’espace urbain. Les nichoirs à oiseaux permettront de parer ces effets, pouvant être significatifs sur ces populations. - Les composteurs : Les usagers du Carré Nature ne disposent pas de dispositifs de compostage commun. Ces composteurs permettront de réduire les déchets ménagers tout en fournissant engrais pour la végétation. Malheureusement, ces dispositifs souffrent d’une mauvaise réputation car accusés -à tort- d’être source de mauvaises odeurs, il sera donc capital de les disposer pour éviter au maximum les probables plaintes des usagers.

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- Les hôtels à insectes (fig. 39) : Très en vogue actuellement sur les ronds-points des petites communes d’Alsace, les hôtels à insectes ne sont pas forcément efficients à eux seuls sur les populations d’arthropodes. Il est en effet nécessaire d’installer ces dispositifs à proximité des milieux naturels de la microfaune pour assurer leur développement. Ainsi, plusieurs de ces dispositifs seront installés dans la cour, mais aussi sur les toitures. Ces hôtels à insectes seront placés avec une exposition sud/sud-est, dos aux vents dominants. L’endroit choisi sera évidemment isolé des axes circulatoires.


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fig. 39, Organisation de l’hôtel à insectes 1: Pour les chrysopes : boîte remplie de fibres d’emballage, avec quelques ouvertures en fentes. 2 : Pour les bourdons : l’autre boîte avec un trou de 10 mm de diamètre et une planchette d’envol. 3 : Pour certaines abeilles et guêpes solitaires, comme la mégachile : la natte de roseau enroulée. 4 : Pour les abeilles solitaires : des briques creuses remplies d’un mélange de glaise et de paille. 5 : Pour divers hyménoptères, notamment les syrphes : des tiges à moëlle (ronce, rosier, framboisier, sureau, buddleia). 6 : Pour les insectes xylophages : des vieux bois empilés. 7 : Pour certaines abeilles et guêpes solitaires, comme les osmies : du bois sec avec des trous. 8 : Pour les forficules : un pot de fleurs rempli de fibres de bois. 9 : Pour les carabes : des morceaux de branches.

3 1 2 8 7 6 9 5 4 échelle 1/20°

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- Le caveau à insectes : Moins connu que l’hôtel à insectes, ce dispositif valorise pourtant une large diversité, et complémente bien son proche cousin. Il s’agit d’un trou de 50 à 70 cm de profondeur dans lequel sont disposées plusieurs essences de bois jusqu’à 1 m de hauteur au delà du trou. Ces essences de bois fourniront nourriture et cachette pour une large faune (insectes, invertébrés, mais aussi amphibiens et reptiles se nourrissant des taxons précédemment cités), mais permettent aussi le développement de champignons et mousses. Ces dispositifs seront installés dans des bacs existants. - Les zones maigres (fig. 40) : La zone maigre, dépourvue d’azote, permettra à certaines plantes de se développer sans subir de concurrence des plantes gourmandes en azote et à la croissance agressive. Son installation est simple : il suffit de retirer la terre arable et riche (qui pourra être utilisée pour la zone maraîchère, puis de la remplacer par un mélange de sable et de gravier en couche de 30 à 50 cm. Ces zones à première vue pauvres, se développent pourtant rapidement jusqu’à accueillir une large diversité végétale.64 fig. 40, Zone maigre

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- le sandarium : similaire à la zone maigre, cette zone sablonneuse ne sera pas végétalisée. Elle permettra aux insectes fouisseurs de nicher dans le sol en y creusant des loges alvéolaires. Le sable qui constitue le substrat doit disposer d’un diamètre assez large pour s’agréger. Pour éviter les dommages des chats, qui auront tendance à y creuser pour faire leurs besoins, des pierres et du bois mort seront disposés en recouvrant la quasi totalité de la surface, en laissant des aérations pour que les insectes puissent atteindre la zone sablonneuse.65 - Haies de bois mort : Les branchages issus de la coupe et l'entretien des arbustes et haies initialement dans la zone de projet ne seront pas évacués, mais seront disposés en fagots sur la parcelle adjacente. Ces “haies” de bois mort fourniront abri et nourriture à toute une diversité faunistique, permettant aussi le développement de mousses et de champignons dans cette zone ombragée. Des plantes grimpantes s’y installeront rapidement. L’entretien de la zone permettra de continuellement alimenter ces haies en réduisant le déplacement de cette biomasse, et donc la consommation d’énergie du transport.

Biodiversité, Hymenoptera, le jardin écologique, in Biodiversité, disponible sur : http://hymenoptera.fr/biodiversite/ 65 Ibid 64

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- Tumulis (fig. 41) : Ces petites structures sont un assemblage de pierres locales. Elles permettent de générer un micro-climat: la face sud profitera des apports solaires pour présenter une surface chaude appréciée des reptiles et papillons, et l’ombre générée par la structure profitera à la biodiversité lors des fortes chaleurs. L’inertie thermique de ces structures pourrait permettre la stabilisation des températures dans cette cour souvent froide car partiellement ombragée et offrant un couloir de circulation pour les vents.66 - Ces aménagements seront également l’occasion de disposer d'espaces cultivables accessibles aux usagers. Une zone maraîchère sera donc imaginée sur la parcelle adjacente. Ici les enjeux sont variés, les plantes assureront un rôle écosystèmique tout en bénéficiant aux usages, et cet espace pourra d'autant générer du lien social entre les occupants du Carré Nature et son immeuble voisin.

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fig. 41 : Pyramides de pierre


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- Les récupérateurs d’eau de pluie : En cohérence avec les indications du PLU de la zone, des dispositifs de récupération des eaux de pluie seront mis en place et connectés aux descentes d’évacuation. Cette eau sera à libre disposition des usagers et pourra servir aux cultures. Dans la cour, les jardinières périphériques courant le long des façades seront destinées à être laissées libre d’aménagement, laissant ainsi l’opportunité pour les occupants de l’immeuble de cultiver leurs propres fruits et légumes. Ce dispositif est un peu plus délicat car il fera appel à la bonne volonté des usagers. Cependant, le regain de popularité des potagers et des jardins collectifs pourraient jouer en la faveur de ce dispositif, donnant de ce fait une qualité supplémentaire à ce logement. Mais il permettra aussi de sensibiliser les usagers au maraîchage, et d’entretenir leur contact avec la nature.

Biodiversité, Hymenoptera, le jardin écologique, in Biodiversité, disponible sur : http://hymenoptera.fr/biodiversite/ 66

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Bacs cultivables privatifs

fig. 42 : Plan, élévation et coupe du dispositif de jardinières pour balcon de type loggia

Pour les balcons, un petit système de jardinière pourra être installé chez les copropriétaires qui en feront le choix. Initialement pensé pour mon propre balcon, ce dispositif peut être installé dans les balcons de type loggia (fig. 42), mais s’adapterait aussi aux terasses en saillie. Ces jardinières comportent un petit bac de culture principal, un composteur individuel directement relié au bac, s’inspirant du système de culture keyhole67, et d’un panneau géotextile avec des poches pour optimiser l’espace cultivable. Ce dispositif permettra une culture intensive sur un espace réduit mais sera aussi organisé selon le principe des trois zones à son échelle, permettant une circulation totale de la faune sur l’îlot, et particulièrement des insectes. L’intérêt sera de ne pas seulement valoriser la cour et les toitures, mais aussi les espaces intermédiaires ponctuels et privatifs.

La culture Keyhole tire parti des engrais générés par un composteurcentrale et articule la zone maraîchère autour 67

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échelle 1/50°


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Poches en géotextile Trappe d'accès Composteur individuel amovible Bac de récupération des écoulements

Terre Billes de drainage échelle 1/20°

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Puits d'échange air-sol L’espace de la cour se déployant au-dessus du parking, l’ensemble des surfaces plantées du Carré Nature ne sont pas encore réellement en contact avec les sols naturels. Un dispositif permettant les échanges air-sol sera installé à cet effet. Ces tubes en béton traverseront la dalle de parking en contrebas jusqu’à atteindre le sol naturel (fig. 43). Il seront remplis de sédiments prélevés sur un site naturel local similaire, idéalement sur les terrains en friche plus au sud. Les “carottes” prélevées devront garder la même structure sédimentaire pour reproduire au maximum la structure naturelle du sol avant son artificialisation. Ces tubes devraient permettre le développement de la biodiversité souterraine (micro-organismes, champignons, etc...) jusqu’alors asphyxiée par l’artificialisation de la zone en créant des poches souterraines. Les eaux de pluie qui s’écouleront à l’intérieur du tube chargé de nutriments pourront rejoindre les sols profonds et y permettre à nouveau le développement des micro-organismes souterrains. Ces tubes traverseront l'espace de stationnement sous-terrain situé en dessous, ils devront donc s'inscrire dans la trame

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structurelle du parking pour ne pas nuire à son usage et à la facilité de stationnement. Ce dispositif est expérimental, mais pourrait constituer une bonne solution pour réduire le confinement des sols naturels dans les espaces ultra-artificialisés, s'il permet effectivement de générer des biodynamismes air-sol (sédimentation, décomposition, irrigation, etc...).


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fig. 43 : Coupe de principe des puits d’échange

Bac cultivable Végétalisation de la cour centrale Stratification du biotope originel

Radier de fondation Tout-venant du terrassement Sol naturel échelle 1/100°

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Volets végétalisés Le problème des volets ayant été déclaré, ce projet prendra aussi en compte leur remplacement, au profit d'un système de volets-végétalisés (fig.44). Un substrat confiné dans le géotextile recouvert d’une grille au maillage large sera placé dans un caisson aluminium. Des végétaux en godets seront plantés dans un substrat léger (sphaigne, fibre de coco). La grille permettra le développement de mousses sur la paroi verticale, mousses qui pourront retenir l’humidité permettant de réduire les interventions humaines. Ces interventions pourront être effectuées depuis l’intérieur par les usagers. L’ensemble du dispositif sera moins lourd que les volets d’origine en bois massif, et devrait donc régler les problèmes de sécurité qui y étaient liés. Ces volets permettront aussi d’affirmer l’identité du projet, lui accordant un visuel fort, donnant l’illusion d’une façade quasi entièrement végétalisée et mouvante.

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fig. 44 : Système de volet végétalisé

Cadre de finition aluminium

Grille maillage large Substrat léger (shpaigne, fibre de coco) Perforation d'accès arrosage

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Caisson Aluminium Bac de récupération

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Les multiples interventions (fig. 45) mises en place dans ce projet valorisent une faible technicité faisant appel à des matériaux locaux pour la plupart des aménagements paysagers (bois, terre, récupération), et auront un impact financier léger. Néanmoins, la charge financière de l’ensemble du projet sera élevée, dûe à certains dispositifs plus élaborés (toiture végétale, tubes d’échange). Mais l’ensemble de l’intervention pourrait avoir des conséquences positives sur la valeur foncière de l’immeuble, et sans doute réduire d’autres dépenses (ajout d’isolation, petits rendements agricole, diminution des déchets ménagers, …). Il serait cependant envisageable que la mutation du projet vers le modèle proposé soit phasée, mettant en place petit à petit les différents dispositifs, facilitant le financement et l’acceptation de l’opération. Les aménagements étant principalement paysagers, et nécessitant des plantes locales pour la plupart, ils pourraient même être mis en place par des bénévoles par le biais d'une action pédagogique. L’intégration de l’usager dès les processus de construction seraient également un enjeu à pourvoir pour le développement de la biodiversité dans l’espace urbain. De même, ce projet, a été conçu suite à l’étude des documents

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d’urbanismes et réglementations locales, et est donc totalement réalisable sur un plan législatif. Il s’est avéré important de présenter un projet réalisable sur tous les plans (juridiques, technique, financier), pour démontrer que les principes défendus dans cet exposé étaient appliquables. Les comportements de la nature ne pouvant être anticipés, nous ne pouvons que spéculer sur l’efficacité réelle du système. Plusieurs de ces dispositifs ont cependant été testés par Sébastien Heim et moi-même, dans différents environnements et se sont déjà avérés concluants. Quoiqu’il en soit, il est certain que les mesures présentées dans cet exposé seront positives pour la biodiversité, quelle qu’en soit l’échelle.


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fig. 45 : Plan d'aménagement général et organisation des différents systèmes Faune : Nichoirs (1) : oiseaux cavernicoles Hôtels à insectes (2) : divers insectes Caveau à insecte (3) : insectes fuisseurs, decomposeurs, champignons, mousses Sandarium (4) : insectes fuisseurs Haie de bois mort (5) : décomposeurs Pyramide de pierre (6) : reptiles, papillons Bassin (7) : amphibiens, insectes aquatiques, plantes aquatiques Flore & cultures : Zone maigre (8) : plantes grasses Espace cultivable collectif (9) : plantes comestibles Équipements collectifs Composteur collectif (10) Récupérateurs d'eau de pluie (11) Installation photovoltaïque (optionnel) (12)

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Sols Puits d'échange air/sol (13)

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Comment revaloriser la biodiversité dans l’espace urbain ?

fig. 47, Isométrie projetée

fig. 46, Perspective de la cour centrale

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Projection à l’échelle macro Si l’importance d’une contextualisation micro a toujours été prônée dans ce travail, il reste néanmoins important d’avoir un aperçu des conclusions que tire ce rapport à l’échelle d’un territoire. Cette partie fera donc l’ébauche d’un travail de réaménagement du territoire nancéien pour améliorer ses capacités d’accueil aux différents biodynamismes qui ont pu être exposés précédemment. La propagation de notre projet à l’échelle de l’ilôt pourrait être approuvée si elle suit un schéma de développement à l’échelle territoriale. En fait, il est primordial de comprendre que la problématique abordée par ce travail doit se décliner à plusieurs échelles, car les enjeux qu’elle affecte sont tout autant locaux qu’universels.

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Comment revaloriser la biodiversité dans l’espace urbain ?

Pour s’affranchir de son urbanisme minéral, la ville de Nancy devra estomper les limites de son urbanisme. Les grandes opérations d’aménagement récentes (fig. 48) ne doivent pas esquisser des limites franches, mais générer des perméabilités en s’étendant aux espaces alentours jusqu’à se relier les unes aux autres et renforcer le maillage vert nancéien. L’interêt ici serait de réduire la fragmentation des territoires dont souffre Nancy et ses biotopes. Tous les enjeux, sans rentrer dans une démarche de "couloir écologique", sont de créer des passerelles naturelles pour reconquérir les zones stériles, et former un réseau d'archipels favorable à la biodiversité (fig. 49). Idéalement, ces grands secteurs de reconquêtes (ZAC Stanislas-Meurthe, Plateau de la Haye, etc..) compteraient plusieurs projets valorisant la biodiversité comme celui imaginé pour le Carré Nature, pour établir une statégie de communication forte et une sensibilisation des riverains aux enjeux de sauvegarde de la biodiversité. Ces projets pourraient aussi s’établir dans des cadres associatifs ou pédagogiques pour générer de l’attractivité et du lien social, particulièrement dans les quartiers plus sensibles, répondant alors à d’autres enjeux de la ville contemporaine.

Malheureusement, la ville n’est pas une feuille blanche, un projet d’aménagement devra composer avec une structure urbaine existante et déjà dense, surtout dans les secteurs où ses enjeux seraient les plus importants. Néanmoins, il existe déjà des pistes de réflexions lancées par plusieurs villes pour redensifier leur maillage végétal. La ville de Bâle impose par exemple un verdissement extensif des toitures plates sur les nouvelles constructions pour la sauvegarde de la biodiversité, et la ville de Paris a lancé depuis 2005 une politique de création de toiture-terrasse végétalisée pour chaque projet d’équipement public nouveau ou en réféction de toiture68. Des initiatives de la sorte se multiplient en Europe et à l’internationale. La toiture végétalisée s’augure peu à peu comme une des solutions phares de la ville durable. À Nancy, de tels dispositifs permettraient de renforcer largement son maillage végétal. À l’évidence, ces dispositifs, bien qu’efficaces individuellements, pourraient suivre un schéma d’aménagement pour approuver leur efficacité écologique. Ils pourraient constituer une bonne piste pour la végétalisation d’une ville au patrimoine si riche : la toiture végétalisée pourrait s’y associer sans le dénaturer.

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Un autre piste forte a été explorée à l’élaboration de ce travail. Les villes contemporaines auront besoin d’un quota de "nature incontrôlée" pour développer leur attractivité à la biodiversité. De multiples études ont déjà été effectuées sur les qualités écosystèmiques de friches en milieu urbain, démontrant d’ailleurs les qualités des sols urbains et industriels2. Des espaces de ce type sont d’ailleurs présents à proximité du Carré Nature. Ces espaces, encore considérés comme "délaissés" par une doxa majoritaire, sont pourtant des catalyseurs de biodiversité. Ainsi, pourquoi ne pas proposer des espaces libres de développement au sein même des espaces urbanisés pour que le problème de manque de biodiversité se solve de lui-même? Dans ce schéma, la ville de Nancy pourrait réserver des parcelles à cet effet, et pourquoi pas au sein même de structures déjà existantes? La Pépinière pourrait par exemple disposer d’un espace restreint au public, sans aucune intervention humaine, où la biodiversité serait libre de développement. Bien sûr, il est évident que de fermer un espace public souleverait des contestations, et les friches souffrent de leur image de décharges abandonnées incohérente avec l’image de la ville contemporaine. Mais ces dispositifs répondent à

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beaucoup d’enjeux, notamment la dépollution de sites industriels69, et pourraient donc s’imaginer comme espaces temporaires, laissés libres d’évolution sur une dizaine d’années, jusqu’à l’apparition d’un climax70, puis reconvertis en partie, lançant le processus sur un autre espace disponible. Ce schéma cyclique pourrait tout à fait s’inscrire dans un développement des biodynamismes, permettant une reconquête active de la biodiversité. Pour illustrer cette mécanique, on pourrait citer le stade de Tchernobyl, qui suite à la catastrophe de 1986, se trouva délaissé. Les graminés constituant l’herbe de la pelouse laissée sans entretien laissèrent place à des espèces rustiques pionnières (chardons, orties, ronces, etc...) auxquelles succédèrent des espèces plus élaborées (bouleaux, trembles, conifères, etc...) créant un biotope particulier et stable.71 Ces espaces en friche, pouvant suivre un schéma ponctuel ou définitif, en étant établi dans des milieux variés (humides, secs, ...), pourraient offrir une richesse écosystémique à l’agglomération nancéienne. fig. 48, Secteurs favorables à la biodiversité et écoquartiers


Comment revaloriser la biodiversité dans l’espace urbain ?

Résidence Carré Nature Zones de renouvellement urbain Zone humide Parcs et jardins ENS + Natura 2000 Massif de la Haye

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Résidence Carré Nature Zones de renouvellement urbain Zone humide Parcs et jardins ENS + Natura 2000 Massif de la Haye Continuités des biotopes à développer Zone de rayonnement des quartiers en remodelage urbain

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Comment revaloriser la biodiversité dans l’espace urbain ?

Ainsi, si le développement de la biodiversité est déjà au coeur des politiques d’aménagement du territoire nancéien, la ville pourrait encore élargir ses horizons et sortir d’un urbanisme rigide et conservateur. Les apports d’une telle gestion sont nombreux (labels, développements économiques et touristiques, ...), et sont déjà affichés par de nombreuses villes qui veulent le leadership de la gestion environnementale (Bâle, Berlin, Paris, ...). La gestion durable d’une ville s’augure déjà comme un symbole de pouvoir politique et intellectuel, et s’avère donc primordiale pour les villes ne pouvant pas compter sur un patrimoine végétal fort comme Nancy. Méhan Méziani et Yann-Fanch Vauléon, Étude sur le potentiel de végétalisation des toitures à Paris, APUR, Atelier Parisien d’urbanisme, disponible sur : https://www.apur.org/sites/default/files/documents/vegetalisation_toitures_terrasses.pdf 69 Séré G., Schwartz C., Morel J.L., Les services écosystémiques rendus par les sols urbains et industriels, Laboratoire sols en environnement, INRA, Université de Lorraine, disponible sur : http://lifti.org/wp-content/ uploads/2018/06/LIFTI_Sere_2018.pdf 70 État écologique stable 71 Bignier Grégoire, Architecture et écologie : comment partager le monde habité ?, Paris ,éditions Eyrolles , 2012, p.73, Chapitre Biodynamisme 68

fig. 49 , Dynamiques de développement

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Conclusion

Les phénomènes liés à la crise environnementale amènent aujourd’hui l’Homme à réinterroger son rapport à la nature et plus particulièrement à la biodiversité. Dans l’espace urbain, ce rapport à la biodiversité est d’autant plus délicat : si la biodiversité peut y être présente, on y observe toutefois une absence des cycles d’interaction de celle-ci, ou biodynamismes, comme on pourrait les retrouver dans un espace sauvage. Ces biodynamismes sont pourtant fondamentaux, à la fois catalyseurs et régulateurs de biomasse, les cycles naturels sont essentiels à l’Homme puisqu’il en fait lui-même partie. Pourtant il s’en éloigne sans cesse et de plus en plus rapidement depuis l’avènement de l’Anthropocène. Ils sont fondamentaux dans le fonctionnement de notre environnement : s’ils sont perturbés, ils peuvents induire des phénomènes climatiques. Finalement, le rétablissement de ces biodynamismes pourrait être une piste de réponse à de nombreux problèmes contemporains liés à la crise environnementale comme nous l’avons démontré à plusieurs reprises. Parallèlement, cet espace urbain s’étend de plus en plus, et les statistiques révèlent que d’ici

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Comment revaloriser la biodiversité dans l’espace urbain ?

l’horizon 2050, plus de 80% de la population sera urbaine. La question de l’espace naturel en ville est par conséquent, de plus en plus à considérer. Ce travail fait donc l’état d’un paradoxe contemporain : l’Homme a toujours cherché à se dénouer de sa nature - les villes sont les points culminant de l’ espace artificiel, l’Homme s’y protège du monde sauvage- , et cherche aujourd’hui à réconcilier le contact avec son environnement naturel. Au coeur de ce paradoxe, l’architecte, ou le concepteur dispose d’une position charnière car il doit imaginer cet espace urbain, et donc son lien à la nature. Il est alors fondamental que les concepteurs soient aujourd’hui sensibilisés à ces questions de biodynamismes. Ces réflexions sont tout de même de plus en plus affirmés, profitant de l’essor du courant écologiste, qu’il faudra quand même nuancer des phénomènes de greenwashing, c’est-à-dire ceux qui n’ont d’écologique que la prétention, et veulent en tirer une promotion commerciale. Plus délicat encore, toutes ces réflexions s’installent sur un patrimoine moral et bâti hérité de l’évolution de la société depuis l’Anthropocène. C’est à dire que ces changements devront s’effectuer dans un contexte fort,

tant physique que psychologique, d’où l’importance de leur prise en compte dès aujourd’hui. La structure sociétale en France est le reflet de cet héritage. Les mesures prises pour la sauvegarde de la biodiversité sont timides à toutes les échelles. Et c’est inquiétant pour un pays sur le devant de la scène internationale, qui s’est historiquement toujours affiché dans l’innovation sociétale : droits social, leadership économique, etc… La France accumule aujourd’hui des retards à tous les niveaux de mesures écologiques, de sa structure hiérarchique à l’individu. Nous avons soulevé ce thème, montrant que l'essor écologique sera peut être le reflet d’une puissance politique de demain, car témoin d’une gestion efficace du territoire et de progrès sociétaux et intellectuels. La conception est, quant à elle, l’incarnation directe de l’ambition écologique française. Dépassée sur la scène internationale, la France manque d’innovation à l'échelle du territoire, car elle est trop ancrée dans un urbanisme historique et des mentalités rigides. Cette évolution est ainsi très lente, même si les écoquartiers fleurissent, ils sont encore loin de la symbiose Homme-Biodiversité que ce travail défend.

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Nous avons donc choisi d’élaborer un projet, moment de “contextualisation” des idées développées dans ce travail, qui prendrait en compte cette structure sociétale et aborderait notre problématique dans ce cadre, en jouant avec ses limites pour trouver un compromis viable. Je me suis servi de ma position d’usager et d’étudiant en architecture pour imaginer un projet au plus proche de l’habitant qui intégrerait ces nouveaux paramètres environnementaux. Le projet de rénovation du lotissement Carré Nature a alors permis de mettre en application des concepts contemporains soucieux des biodynamismes : la permaculture et le principe des trois zones. Héritant des principes de ces concepts, cette démarche a permis d’imaginer des procédés simples, cohérents avec leur environnement, accessibles économiquement et sans porter atteinte au fonctionnement de l’architecture originelle. Mais ce projet ne s’est pas arrêté à la sauvegarde de la biodiversité, il a montré comment son intégration pouvait répondre à d’autres critères comme la culture urbaine, le lien social, la qualité de vie, l’esthétisme, ... Ces principes ont été appliqués à un projet existant, mais pourraient influencer un projet dès sa conception, voir articuler sa

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composition architecturale ou urbaine. De même , si ce sujet s’est installé dans un contexte urbain occidental, il serait intéressant de développer ces problématiques dans d’autres environnements ayant d’autres enjeux et contraintes. Ici aussi, l’architecture n’a pas de réponse universelle, chaque site devra faire l’objet d’une autre interprétation dans laquelle le concepteur saura intégrer son projet à des biodynamismes. Nous avons, par exemple, dans ce travail, limité notre recherche à l’espace urbain, mais il n’est pas le seul où la biodiversité est menacée. Les espaces ruraux sont eux aussi théâtres d’une artificialisation menaçante : étalement agricole, culture monospécifiques, … Dans ces espaces où l’usager est constamment en contact avec la nature, ces préoccupations sont moins visibles par le grand public que dans l’espace urbain, d’où l’extrême importance d’un travail d’information. C’est avec cet ensemble de paramètres que ce travail a voulu ouvrir une réflexion sur notre gestion de la biodiversité aujourd’hui, et proposer des solutions à plusieurs l’échelles.


Comment revaloriser la biodiversitÊ dans l’espace urbain ?

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Bibliographie Ouvrages

Études

Adolf Loos, L’Ancienne et la Nouvelle Représentation en Architecture, 1989, in Ornement et crime, trad. Sabine Cornille et Philippe Ivernel, rivage Poche, 2010

Arthur Schmidt, Earthships, enjeux, caractéristiques et limites des "Vaisseaux-Terre", rapport de fin de licence, 2017

Aristote, La Politique, J. Vrin, 1970 p.16 Grégoire Bignier, Architecture et écologie : comment partager le monde habité ?, Paris ,éditions Eyrolles , 2012 Lovelock, J., La Terre est un être vivant. L’hypothèse Gaïa (1979), Paris, Flammarion, 1993. Michael Reynolds, Earthship: How to Build Your Own, Vol. 1, Solar Survival Architecture, Septembre 1990 Philippe Descola, Par delà Nature et Culture, Gallimard, 2005 Rosemary Morrow, Manuel d’apprentissage pas à pas de la permaculture, Acquérir son autonomie en s’appuyant sur les services de la nature, éditions Imagine un Colibri, septembre 2015

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Crompton J.L., 2001. The impact of parks on property values : a review of the empirical evidence. Journal of Leisure Research, p. 1-31. Jean Pierre Chambon, La mortalité des insectes liés à la circulation automobile, insectes et activités humaines, disponible sur -ttp://www.insectes.org/ opie/pdf/2613_pagesdynadocs4eaac12659ce3.pdf, consulté le 07-11-2018 Kühn I., Brandl R. et Klotz S., 2004, The flora of German cities is naturally species rich, Evolutionary Ecology Research Méhan Méziani et Yann-Fanch Vauléon, Étude sur le potentiel de végétalisation des toitures à Paris, APUR, Atelier Parisien d’urbanisme, disponible sur : https://www.apur.org/sites/default/files/documents/vegetalisation_toitures_terrasses.pdf Yann Dusza. Toitures végétalisées et services écosystémiques : favoriser la multifonctionnalité via les interactions sols-plantes et la diversité végétale. Ecologie, Environnement. Université Pierre et Marie Curie - Paris VI, 2017.


Comment revaloriser la biodiversité dans l’espace urbain ?

Articles périodiques

Documents en ligne

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Biomasse, Une Nouvelle Approche de l’Urbanisme, ADEME & Vous, n°68, p.15 Florence Williams, Comment la nature régénère votre cerveau, National Géographic, Janvier 2016, p.31-49 Articles périodiques en ligne Hallmann CA, Sorg M, Jongejans E, Siepel H, Hofland N, Schwan H, et al. (2017) More than 75 percent decline over 27 years in total flying insect biomass in protected areas. PLoS ONE 12(10): e0185809. https://doi. org/10.1371/journal.pone.0185809

Le Coefficient de Biotope, Fiche Outil Méthode n°11, Biodiversité, ADEME, Disponible en ligne sur : http://multimedia.ademe.fr/catalogues/CTecosystemes/fiches/outil11p6364.pdf La Qualité Environnementale est-elle normalisable?, VAD, Ville et Aménagement durable, novembre 2010, disponible en ligne sur : file:///D:/T%C3%A9l%C3%A9chargements/101126_QE_est_elle_normalisable_VAD.pdf Optimisation de la Biodiversité sur les Toitures Végétalisées, Guide BBP, les fiches Techniques, p.1-6, Disponible en ligne sur : http:// www.biodiversite-positive.fr/wp-content/uploads/2011/10/Toitures-v%C3%A9g%C3%A9talis%C3%A9es-05-janv.pdf Séré G., Schwartz C., Morel J.L., Les services écosystémiques rendus par les sols urbains et industriels, Laboratoire sols en environnement, INRA, Université de Lorraine, disponible sur : http://lifti.org/wp-content/ uploads/2018/06/LIFTI_Sere_2018.pdf

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Comment revaloriser la biodiversité dans l’espace urbain ?

Loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, in les autres textes législatifs et réglementaires, in Accueil, in Legifrance, le service public de la diffusion du droit, 2019, disponible en ligne sur : https://www. legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=LEGITEXT000006068553 Loi sur les monuments Naturels et sites, 1930, in Le Droit de la Protection de la Nature en France, Virginie & Jean-Charles Croquet, 2003-2008, disponible en ligne sur : http://droitnature.free.fr/Shtml/LoiMonumentsNaturels. shtml Loi n° 93-24 du 8 janvier 1993 sur la protection et la mise en valeur des paysages et modifiant certaines dispositions législatives en matière d'enquêtes publiques, in les autres textes législatifs et réglementaires, in Accueil, in Legifrance, le service public de la diffusion du droit, 2019, disponible en ligne sur : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000541949&categorieLien=id Ministère de la Transition écologique et Solidaire, in Politiques publiques, in Biodiversité et Paysages, in La biodiversité en France, disponible en ligne sur : https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/biodiversite-presentation-et-enjeux One Central Park, AJN, in Projets, disponible sur : http://www.jeannouvel. com/projets/one-central-park/

One Central Park, Mur vegetal Patrick Blan, in Réalisations, disponible sur : https://www.murvegetalpatrickblanc.com/realisations/sydney/one-centralpark-sydney Plan Biodiversité, Comité interministériel biodiversité, 4 juillet 2018, document pdf disponible en ligne sur : https://www.ecologique-solidaire.gouv. fr/sites/default/files/18xxx_Plan-biodiversite-04072018_28pages_FromPdf_date_web_PaP.pdf Plans nationaux d’actions en faveur des espèces menacées, Ministère de la Transition Écologique et Solidaire, in Accueil, in Politiques publiques, in Biodiversité et paysages, Janvier 2018, disponible en ligne sur : https:// www.ecologique-solidaire.gouv.fr/plans-nationaux-dactions-en-faveur-desespeces-menacees Stratégie nationale pour la biodiversité, Ministère de la Transition Écologique et Solidaire, in Accueil, in Politiques publiques, in Biodiversité et paysages, Juillet 2017, disponible en ligne sur : https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/strategie-nationale-biodiversite Trame verte et bleue, Ministère de la Transition Écologique et Solidaire, in Accueil, in Politiques publiques, in Biodiversité et paysages, Janvier 2017, disponible en ligne sur : https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/trameverte-et-bleue

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Vertical Forest, Stefano Boeri Architetti, in Projets, disponible sur : https:// www.stefanoboeriarchitetti.net/en/project/vertical-forest/

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Entretiens Sébastien Heim, Directeur de l’association Hortus Hyménoptera


Comment revaloriser la biodiversité dans l’espace urbain ?

Vidéo Permaculture : Le jardin aux trois zones, Marcus Gastl, réseau Hortus France, 25 novembre 2016, disponible sur : https://www.youtube.com/ watch?v=slcpAZjdMlA&vl=de-DE

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Table des illustrations fig. 1 : photographie, Trigger warning : fin du monde – Harz-Labour, 21 décembre 2018, Solitudes Intangibles, disponible en ligne sur : http://solitudesintangibles.fr/trigger-warning-fin-du-monde/, p. 16 fig. 2 : carte, Le monde vu par Descola dans Par-delà Nature et Culture, Etudes rurales, in Débat, in Autour du livre de Philippe Descola, Emmanuel Lézy et Gérard Chouquer, disponible en ligne sur : https://journals.openedition.org/etudesrurales/8402, p. 23 fig. 3 : diagramme, Ward and Centre Garden-Citiy, Ebenezer Howard, in Les cités Jardins de demain, éditions Dunod, 1969, p. 25 fig. 4 : diagramme, Primary Threats to LPI populations, WWF, 2014, Depuis 1970, la population d'espèces sauvages a été divisée par deux, Arthur Cios, publié le 30/07/2015, Konbini, disponible en ligne sur : https://www.konbini. com/fr/tendances-2/population-especes-sauvages-divisee-par-deux, p. 30 fig. 5 : carte, Les points chauds de la biodiversité, Ministère de la Transition Écologique et Solidaire, in La biodiversité s’explique, p.17, juillet 2018, disponible sur : https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/ files/10004_brochure-32p_Biodiversite-s-explique_web_planches.pdf, p. 33

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fig. 6 : carte, La France au carrefour de quatre zones biogéographiques, Ministère de la Transition Écologique et Solidaire, in La biodiversité s’explique, p.15, juillet 2018, disponible sur : https://www.ecologique-solidaire. gouv.fr/sites/default/files/10004_brochure-32p_Biodiversite-s-explique_ web_planches.pdf, p. 34 fig. 7 : diagramme, Méthodes de rédaction des documents d’urbanismes, La biodiversité à l’échelle de la planification territoriale, fiche technique, Urbanisme Bâti et Biodiversité, disponible sur https://urbanisme-bati-biodiversite.fr/IMG/pdf/fiche2_u2b-ok.pdf, p. 44 fig. 8 : carte, Valoriser le capitale nature, ScoT du Sud Meurthe et Mosellan, Trame verte et bleue, juin 2017, disponible sur https://urbanisme-bati-biodiversite.fr/IMG/pdf/fiche2_u2b-ok.pdf, p. 48 fig. 9 : photographie, One Central Park, AJN, in Projets, disponible sur : http://www.jeannouvel.com/projets/one-central-park/, p. 58 fig. 10 : dessin, One Central Park, Mur vegetal Patrick Blan, in Réalisations, disponible sur : https://www.murvegetalpatrickblanc.com/realisations/sydney/one-central-park-sydney, p. 59 fig. 11 : photographie, Vertical Forest, Boeri, Stefano Boeri Architetti, in Projets, disponible sur : https://www.stefanoboeriarchitetti.net/en/project/ vertical-forest/, p. 61


Comment revaloriser la biodiversité dans l’espace urbain ?

fig. 12 : photographie, Arch20, in Home, in Architecture, in Earthship Homes | Micchael Reynolds, disponible en ligne sur : https://www.arch2o. com/earthship-homes-michael-reynolds/arch2o-earthships_michael_reynolds-33/, p. 63 fig. 13 : schémas, L'arbre un outil efficace contre les ICU, L’Arbre urbain rend de très nombreux services écosystémiques, Arbre en Ville, in accueil, disponible en ligne sur : http://www.arbre-en-ville.fr/, p. 69 fig. 14 : Tableau, Crompton J.L., 2001. The impact of parks on property values : a review of the empirical evidence. Journal of Leisure Research, 33 (1), p. 1-31., disponible en ligne sur : https://www.researchgate.net/publication/285974700_The_Impact_of_Parks_on_Property_Values_A_Review_ of_the_Empirical_Evidence, p. 70 fig. 15 : diagramme, Mix énergétique et production d’EnR en France en 2011 (en énergie primaire), 66% de l’énergie produite à partir d’EnR, Ademe & vous, n°68, septembre 2013, p. 15, p. 71 fig. 16 : Schéma, Les facteurs stressants pour la bidiversité dans l’espace urbain, Arthur Schmidt, informations trouvées dans l'article Biodiversité, Vive la Ville!, Vincent Nouyrigat, Sciences et vie, N°1216, janvier 2019, p.65-83, p. 74 fig. 17 : dessin, Isométrie générale de l'ilôt, Arthur Schmidt, p. 79

fig. 18 : dessin, plan masse de l'ilôt, Arthur Schmidt, p. 81 fig. 19 à 23 : Photographies, Carré Nature, Ludvine gay, 10/02/2019, p. 00 fig. 24 : carte, Espace végétalisés de l'agglomération nancéienne, Arthur Schmidt, p. 87 fig. 25 : carte, Cartographie des intensités urbaines, Livre Blanc, coeur d’Agglomération de Nancy, p.30, disponible sur : https://www.agencescalen.fr/ files/Aduan/Autres%20publications/livre-blanc-coeur-agglo-2016-aduan. pdf, p. 89 fig. 26 : carte, Caractérisation des îlots de chaleur urbain par zonage climatique et mesures mobiles : Cas de Nancy. François Leconte. Climatologie. Université de Lorraine, 2014. Français. <tel-01141361> , p. 186, p. 91 fig. 27 : carte, Cartographie du bruit, https://sig.grand-nancy.org/StoryMap/ Bruit/, metropole grand nancy, documentation complémentaire, p. 93 fig. 28 : carte, Analyse critique, identification de points forts et de points faibles, disponible sur : https://vivrelespaysages.cg54.fr/nancy-et-sa-couronne.html, p. 95 fig. 29 : plan schématique, Découpage parcellaire simplifié, Arthur Schmidt, p. 97

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fig. 30 : plan schématique, Nature des sols, Arthur Schmidt, p. 99

fig. 39 : dessin, Organisation de l’hôtel à insectes, Arthur Schmidt, p. 121

fig. 31 : plan schématique, Circulation des vents dominants, Arthur Schmidt, p. 101

fig. 40 : photographie, Zone maigre, jardin en trois zones à Obersteinbach (67) chez Sébastien Heim, Arthur Schmidt, p. 122

fig. 32 : plan schématique, Éclairage anthropique, Arthur Schmidt, p. 103

fig.00 : photographie, Pyramides de pierre, jardin en trois zones à Obersteinbach (67) chez Sébastien Heim, Hymenoptera le jardin écologique, in Biodiversité, Sébastien Heim, propriété Hymenoptera.fr, disponible en ligne sur : http://hymenoptera.fr/biodiversite/ p. 124

fig. 33 : schéma, Étude des ombres portées, Arthur Schmidt, p. 105 fig. 34 : Photographie aérienne, Archipels écosystèmiques environnants et maillage végétal, Arthur Schmidt, p.107 fig. 35 : photographie, jardin en trois zones à Obersteinbach (67) chez Sébastien Heim, Arthur Schmidt, p. 111 fig. 36 : tableau, Yann Dusza, Toitures végétalisées et services écosystémiques : favoriser la multifonctionnalité via les interactions sols-plantes et la diversité végétale. Ecologie, Environnement. Université Pierre et Marie Curie - Paris VI, 2017. p.22, p. 115 fig. 37 : schéma, Yann Dusza, Toitures végétalisées et services écosystémiques : favoriser la multifonctionnalité via les interactions sols-plantes et la diversité végétale. Ecologie, Environnement. Université Pierre et Marie Curie - Paris VI, 2017. p.24, p. 116 fig. 38 : dessin, Coupe sur bassin de type mare, Arthur Schmidt, p. 119

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fig. 42 : dessin, Plan, élévation et coupe du dispositif de jardinières pour balcon, Arthur Schmidt, p. 126-127 fig. 43 : dessin, Coupe de principe des puits d’échange, Arthur Schmidt, p. 129 fig. 44 : dessin, Système de volet végétalisé, Arthur Schmidt, p. 131 fig. 45 : Plan, Plan d'aménagement général et organisation des différents systèmes, Arthur Schmidt, p. 133 fig. 46 : Montage, Perspective de la cour centrale, Ludivine Gay, Arthur Schmidt, p. 134 fig. 47 : Dessin, Isométrie projetée, Arthur Schmidt, p. 135


Comment revaloriser la biodiversité dans l’espace urbain ?

fig. 48 : carte, Secteurs favorables a la biodiversité et écoquartiers, Arthur Schmidt, p. 139 fig. 49 : carte schématique, Dynamiques de développement, Arthur Schmidt, p. 140

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Table des matières Introduction (p. 10 - 13) I. La place de la biodiversité à l’Anthropocène (p. 14-31) 1.1. Un contexte d’urgence (p. 14-19) 1.1.1. La crise écologique (p. 14-16) 1.1.2. Biodiversité et biodynamismes (p.16-18) 1.1.3. Le bilan de l’Anthropocène (p. 19) 1.2. La biodiversité et l’Homme (p. 20-27) 1.2.1. Types de biodiversité (p. 20-21) 1.2.2. Types de cultures (p. 22) 1.2.3. Relation historique occidentale (p. 23-27) 1.3. Importance dans la prise en compte écologique dans les projets (p. 28-31) 1.3.1. Pluridisciplinarité de l’architecte (p. 28-29) 1.3.2. Écologie commerciale (p. 29-30) 1.3.3. Éthique (p. 30-31)

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Comment revaloriser la biodiversité dans l’espace urbain ?

II. Le réactionnisme contemporain (p. 32-75)

III. Le projet Carré Nature (p. 76-141)

2.1. La Loi (p. 36-39) 2.1.1. Un seul ministère (p. 36) 2.1.2. Historique des Lois (p. 37-39) 2.1.3. Autres interventions (p. 39)

3.1. Analyse du site (p. 76-107) 3.1.1. Présentation du site (p. 76-83) 3.1.2. Analyse macro (p. 84-95) 3.1.3. Analyse micro (p. 96-107)

2.2. La conception (p. 42-63) 2.2.1. Directives d’aménagement locales (p. 42-55) 2.2.2. Typologies d’architectures écologique (p. 56-60) 2.2.3. Analyse et critique d’un projet urbain (p. 60-63 )

3.2. Intentions conceptuelles (p. 108-113) 3.2.1. La permaculture et les trois zones (p. 108-111) 3.2.2. Éxpérimentations personnelles (p. 112-113)

2.3. L’Homme et la biodiversité (p. 64-75) 2.3.1. Sa relation à la nature aujourd’hui (p. 64-67) 2.3.2. Apport du naturel à la ville (p. 68-71) 2.3.3. L’évolution accélérée des espèces urbaines (p. 72-75)

3.3. Projet (p. 114-141) 3.3.1. Intervention micro (p. 114-135) 3.3.3. Projection à l’échelle de l’agglométation (p. 136-141)

Conclusion (p. 142-145) Bibliographie (p. 146-151) Table des illustrations (p. 152-155) Table des matières (p. 156-157) Index (p. 158-159) Glossaire (p. 160-165) Annexes (p. 166-167)

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Index Anthropocène (p. 19, 22, 31, 75, 80, 142)

Corridor écologique (p. 38, 94)

Approche systémique (p. 57, 58)

Courants écologique (p. 29)

Archipel écologique - écosystémique (p. 38, 106, 137)

Crise écologique - écologique (p. 14, 15, 16, 24, 64)

Architecture flagship (p. 57)

Cycle biologique - naturel (p. 21, 51, 62, 76, 113, 142)

Artificialisation des territoires - des sols (p. 38, 49, 68, 86, 128)

Cycles symbiotiques (p. 18)

Biodiversité (p. 10, 12, 16, 17, 18, 20, 22, 26, 30, 32, 36, 37, 38, 39, 42, 43, 50, 52, 53, 54, 62, 65, 67, 72, 73, 75, 76, 78, 84, 86, 88, 90, 106, 109, 114, 117, 128, 132, 137, 138, 141, 142)

Dette écologique (p. 29)

Biodynamismes (p. 11, 16, 17, 18, 19, 47, 65, 92, 108, 110, 128, 138, 142, 143, 144)

Earthships (p. 5, 62, 63)

Biomasse (p. 64, 71, 123) Biosphère (p. 22) Biotopes (p. 12, 34, 77, 90, 94, 137, 138) Climax (p. 138) Conscience écologique (p. 15, 29)

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Droit de l’environnement (p. 37)

Éco-construction (p. 5, 109) Ecosystème (p. 37, 65, 104, 116, 120) Étalement urbain (p. 47, 144) Greenwashing (p.42, 60, 143) High-tech (p. 58, 60)


Comment revaloriser la biodiversité dans l’espace urbain ?

Ilôt de chaleur (p. 90, 116) Low-tech (p. 42) Maillage végétal (p. 84, 86, 137) Micro-climat (p. 84, 90, 94, 124) Milieu (p. 19, 30, 38, 64, 75, 106, 110, 117, 138) Permaculture (p. 108, 109, 110, 112, 114, 144) Pluridisciplinarité (p. 28) Principe des trois zones (p. 110, 112, 114, 126, 144) Services - apport écosystémiques (p. 67, 114, 124) Trame verte et bleue (p. 38, 47, 49, 86) Transition écologique (p. 36, 39, 49)

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Glossaire Anthropocène (p. 19, 22, 31, 75, 80, 142) : Le terme Anthropocène, est de plus en plus employé pour désigner une nouvelle ère géologique résultante des actions anthropiques de l’Homme sur l’environnement mondial : perte de biodiversité, changement climatique, érosion des sols, … Approche systémique (p. 57, 58) : Approche scientifique qui traite chaque paramètre au cas par cas. Archipel écologique - écosystémique (p. 38, 106, 137) : Zone écosystémique semi-isolée. Architecture flagship (p. 57) : Architecture fortement publiée et souvent liée à une figure du milieu architectural. Artificialisation des territoires - des sols (p. 38, 49, 68, 86, 128) : Il s’agit de la transformation d'un sol à caractère naturel ou agricole par des actions d’aménagement, pouvant entraîner son imperméabilisation totale ou partielle. Biodiversité (p. 10, 12, 16, 17, 18, 20, 22, 26, 30, 32, 36, 37, 38, 39, 42, 43, 50, 52, 53, 54, 62, 65, 67, 72, 73, 75, 76, 78, 84, 86, 88, 90, 106, 109, 114, 117, 128, 132, 137, 138, 141, 142) : La biodiversité est un terme qui désigne la diversité du monde vivant à tous les niveaux : diversité des milieux (écosystèmes), diversité des espèces, diversité génétique au sein d'une même espèce.

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Biodynamismes (p. 11, 16, 17, 18, 19, 47, 65, 92, 108, 110, 128, 138, 142, 143, 144) : La notion de biodynamisme ajoute au terme biodiversité les paramètres de déplacement dans l’espace et d’évolution historique. Elle se concentre donc sur les interactions et évolutions de la biosphère dans d’un milieu. Biomasse (p. 64, 71, 123) : Ensemble de la matière organique d'origine végétale ou animale. Biosphère (p. 22) : Ensemble des êtres vivants et de leur milieu sur la Terre. Biotopes (p. 12, 34, 77, 90, 94, 137, 138) : Un biotope désigne une aire géographique caractérisée par des conditions climatiques et physico-chimiques homogènes permettant l'existence d'une faune et d'une flore spécifiques. Climax (p. 138) : Etat théorique dans lequel un sol ou une communauté végétale a atteint un état d'équilibre stable et durable avec les facteurs édaphiques et climatiques du milieu.Toute perturbation du milieu, naturelle ou anthropique, détruit cet état climacique. En l'absence de nouvelle perturbation, le sol et la communauté végétale évoluent de nouveau vers leur climax. Conscience écologique (p. 15, 29) : La conscience écologique désigne l'émergence d’une empathie pour les milieux naturels dégradés par la crise écologique.


Comment revaloriser la biodiversité dans l’espace urbain ?

Corridor écologique (p. 38, 94) : Les corridors écologiques assurent des connexions entre des réservoirs de biodiversité, offrant aux espèces des conditions favorables à leur déplacement et à l’accomplissement de leur cycle de vie. Courants écologique (p. 29) : Champ de pensée écologique. Crise écologique (p. 15, 16, 24) : cf Crise environnementale. Crise environnementale (p. 14, 64) : En écologie, une crise environnementale ou crise écologique se produit lorsque le milieu de vie d'une espèce ou d'une population évolue de façon défavorable à sa survie. Cycle biologique - naturel (p. 21, 51, 62, 76, 113, 142) : Cycle d’interactions naturelles, assurant l’équilibre d’un écosystème. Cycles symbiotiques (p. 18) : Un cycle symbiotique est un cycle dans lequel les différents partis assurent mutuellement leur survie. Dette écologique (p. 29) : Le concept de dette écologique, désigne une forme de dette non monétaire. Elle peut être temporelle : dette d'une génération humaine (ou de quelques générations) vis-à-vis des générations futures ou géographique : dette accumulée par des pays ou régions qui ont surexploité l'environnement ou des ressources naturelles non renouvelables.

Droit de l’environnement (p. 37) : Le droit de l'environnement concerne l'étude ou l'élaboration de règles juridiques visant la compréhension, la protection, l'utilisation, la gestion ou la restauration de l'environnement contre perturbation écologique sous toutes ses formes - terrestres, aquatiques et marines, naturelles et culturelles. Earthships (p. 5, 62, 63) : Une earthship, (en Français : géonef), est une habitation avec des ambitions écologiques, autoconstruite à moindre coût en se basant sur la récupération et le recyclage de matériaux. Elle est conçue pour être autonome des énergies fossiles, autosuffisante en eau, en électricité, pour sa régulation thermique, voire en nourriture. Éco-construction (p. 5, 109) : Également appelée construction durable, l'éco-construction consiste en la réalisation ou la rénovation d'un bâtiment de la manière la plus respectueuse de la nature possible. Ainsi, l'écoconstruction prend en compte l'ensemble des techniques de développement durable, le but étant de créer une réalisation humaine la moins polluante possible. Écosystème (p. 37, 65, 104, 116, 120) : Le terme écosystème vient de la contraction de ”système écologique”, et désigne un biotope et ses habitants. L’ensemble des écosystèmes de notre planète forme la biosphère. L’écosystème est l’unité de base de l’environnement. Il existe des micro-écosystèmes, des écosystèmes très limités en taille, et des macro-écosystèmes, des écosystèmes de grande superficie.

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Espace vert (p. 70, 86) : Désigne, en urbanisme, tout espace d'agrément végétalisé (engazonné, arboré, éventuellement planté de fleurs et d'arbres et buissons d'ornement, et souvent garni de pièces d'eau et cheminements). L'expression est généralement plutôt employée aux espaces publics ou semi-publics. Espèces exotiques (p. 66) : Espèce qui est délibérément introduite ou s'installe accidentellement dans une aire distincte de son aire d’origine. Espèces indigènes (p. 66) : Désigne une espèce originaire de la région où elle se trouve depuis des décennies. Espèces invasives (p. 19) : Espèces introduites dans un milieu qui bouleversent son écosystème. Étalement urbain (p. 47, 144) : L'accroissement démographique des grandes aires urbaines s'accompagne de phénomènes d'étalement des cités sur les espaces périphériques, phénomènes favorisés par la mise à disposition de systèmes de transport individuels ou collectifs. L'étalement urbain peut correspondre à ce que les Anglo-Saxons désignent sous le nom d"urban sprawl", introduisant ainsi une connotation négative pour désigner un mode d'expansion de la tâche urbaine plutôt anarchique et peu contrôlé. Flagship species (p. 20) : Espèce emblématique bénéficiant d’une représentation positive de la part du grand public et facilitant la mobilisation en faveur de la protection de son habitat.

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Greenwashing (p.42, 60, 143) : Le greenwashing, consiste pour une entreprise à orienter ses actions marketing et sa communication vers un positionnement prétendument écologique. High-tech (p. 58, 60) : Regroupe tout ce qui tourne autour des nouvelles technologies : l'informatique, l'Internet, la photo numérique, la Haute Définition, la téléphonie mobile... Ilôt de chaleur (p. 90, 116) : Fait référence à un phénomène d'élévation de température localisée en milieu urbain par rapport aux zones rurales ou naturelles voisines. Low-tech (p. 42) : Système simple et accessible en terme de coût et de savoirfaire qui permet de répondre à un besoin de base, comme l’alimentation, l’hygiène, l’accès à l’eau ou à l’énergie. Maillage végétal (p. 84, 86, 137) : Trame végétale d’un espace urbain. Micro-climat (p. 84, 90, 94, 124) : Désigne l'ensemble des conditions météorologiques d'une zone de faible extension géographique qui diffèrent du climat général de la zone considérée. Ces spécificités locales sont dues en général aux caractéristiques topographiques, géologiques et hydrologiques locales. Micro-faune (p. 113) : Ensemble des animaux < 0,2 millimètre.


Comment revaloriser la biodiversité dans l’espace urbain ?

Micro-organismes (p. 113, 128) : Les micro-organismes sont étymologiquement des "petits organismes", donc des êtres vivants si petits qu'ils ne sont observables qu'au microscope. Milieu (p. 19, 30, 38, 64, 75, 106, 110, 117, 138) : Ensemble des objets matériels, des circonstances physiques qui entourent et influencent un organisme vivant. Permaculture (p. 108, 109, 110, 112, 114, 144) : Contraction de « permanent » et « agriculture ». Le but est de développer des modes de vie et de fonctionnement qui ne nuisent pas à l'environnement et qui soient viables économiquement, qui subviennent à leurs propres besoins, qui n'abusent ni des humains ni du vivant, qui ne polluent pas la terre. La permaculture utilise les caractéristiques des plantes et des animaux et les combine à celles du site et des installations afin de créer sur la plus petite surface possible un écosystème cultivé qui puisse assurer la vie, que ce soit en ville ou à la campagne. Phytoépuration (p. 51) : La phytoépuration est une méthode naturelle de stabilisation des paramètres physico-chimiques de l'eau douce d'un bassin par épuration du milieu grâce à des plantes épuratrices, elle peut permettre un traitement des eaux usées. Pluridisciplinarité (p. 28) : Désigne un objet d'étude abordé selon différents points de vue et la juxtaposition de regards spécialisés.

Points chauds de la biodiversité (p. 34) : Les “Points chauds” sont des zones géographiques où la biodiversité est menacée : un point chaud est une zone, géographiquement bien délimitée, et qui renferme au moins 1500 espèces de plantes végétales endémiques, c’est à dire qui n’existent pas ailleurs (plus de 0,5 % de la biodiversité mondiale). Principe des trois zones (p. 110, 112, 114, 126, 144) : Organisation d’un espace extérieur, en trois zones distinctes : une zone tampon, une zone maigre et une zone maraîchère. Relation symbiotique (p. 43) : relation à long terme lorsque plusieurs espèces vivent ensemble dans le même écosystème. Services - apport écosystémiques (p. 67, 114, 124) : Renvoie à la valeur (monétaire ou non) des écosystèmes, voire de la Nature en général, en ce sens que les écosystèmes fournissent à l'humanité des biens et services nécessaires à leur bien-être et à leur développement. Théorie de Gaïa (p. 10) : Théorie développée par J. Lovelock selon laquelle la Terre serait semblable à un “super-organisme vivant”, dont l’évolution serait marquée par les ères géologiques. Trame verte et bleue (p. 38, 47, 49, 86) : La Trame verte et bleue est un réseau formé de continuités écologiques terrestres et aquatiques identifiées par les schémas régionaux de cohérence écologique ainsi que par les documents de planification de l'Etat, des collectivités territoriales et de leurs groupements.

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Transition écologique (p. 36, 39, 49) : La transition écologique est une évolution vers un nouveau modèle économique et social durable, qui renouvelle nos façons de consommer, de produire, de travailler, de vivre ensemble pour répondre aux grands enjeux environnementaux, ceux du changement climatique, de la rareté des ressources, de la perte accélérée de la biodiversité et de la multiplication des risques sanitaires environnementaux. Usage anthropique (p. 21) : A l’usage de la société anthropique. Zones biogéographique (p. 34) : Une zone biogéographique désigne une zone géographique climatiquement et écologiquement relativement homogène du point de vue des formations végétales et des températures.

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Sources : Futura-sciences, santé : https://www.futura-sciences.com/sante/ Futura-sciences, planète :https://www.futura-sciences.com/planete/ Actu-environnement, dictionnaire : https://www.actu-environnement.com/ Dictionnaire environnement, encyclopédie de l’environnement : https:// www.dictionnaire-environnement.com/ Larousse, dictionnaire en ligne : https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais


Comment revaloriser la biodiversitÊ dans l’espace urbain ?

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Annexes

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Comment revaloriser la biodiversitÊ dans l’espace urbain ?

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"L’amnésie constitutive de la réalité qui est celle de nos pratiques ordinaires et la cruauté quotidienne dont il s’agit dès lors portent un nom tout simple : l’indifférence. Nous ne sommes pas sanguinaires et sadiques, nous sommes indifférents, passifs, blasés, détachés, insouciants, blindés, vaguement complices, pleins de bonne conscience humaniste et rendus tels par la collusion implacable de la culture monothéiste, de la technoscience et des impératifs économiques." Élisabeth de Fontenay


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