KORTEJO

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K MAISON

O DE

R

T

FAMILLES

AUDREY AYDIN

E POUR

J

O

CELIBATAIRES


Photo de Birol Ăœzmez

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Auparavant appelée Maison de Familles (Kortejo en hébreu), aujourd’hui converti en un hôtel pour célibataires, c’est devenu l’une des rares constructions traditionnelles juives qui continuent à exister dans les rues d’Izmir. L’hôtel Akhisar et ses habitants livrés à eux-mêmes dans leur petite chambre, laissés à l’abandon avec leurs secrets, leurs regrets et leurs destins sont les derniers témoins à vivre cette aventure historique.

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«Je ne sais pas pour les autres, peut être, ils s’opposeront à ce que je vais dire, mais moi j’aime cette vie. Je suis en vie, grâce à ce vécu, grâce à cette façon de vivre. Que nous réserve la vie ? Qu’est-ce qui m’arrivera ? On finira par mourir, tous.»

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Photo de Canan Altinbulak

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En parlant des chats: «Tout le monde est là. Arap, Duman, Pakize, Sultan, Pakize… Celui-ci s’appelle Sari Ibo, comme mon voisin avec qui je partage ma chambre. Duman et Arap… Mangez! Tenez, c’est bien mes filles.»

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«Ce que je ressens le plus dans cette chambre : c’est la solitude, la peur. La peur de ne pas pouvoir sortir d’ici... On peut mourir ici.»

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«Les douches sont hors-service depuis toujours. Je vais une fois par semaine au hamam qui se trouve à deux rues plus haut. Chaque matin je me rince le visage, les peids puis je me rase pour être présentable.»

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« Mon plus grand regret, c’est les erreurs que j’ai faites quand j’étais jeune. De temps en temps je vois mon fils. Je fais tout mon possible pour qu’il ne me voie pas. Il ne sait pas que j’habite ici, dans cette chambre.»

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Photo de Birol Ăœzmez

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«Moi je n’habite pas là. J’habite sur les sommets de Bornova. Je travaille ici comme femme de ménage, je viens les après-midi pour faire les lessives et étendre le linge, faire le ménage dans les chambres. Je connais les gens depuis longtemps ici. Ça m’arrive de prendre un thé avec Mehmet et Ibrahim en attendant que leur lessive se termine pour l’étendre. Je travaille pour mes filles, pour financer leurs études. Elles ne connaissent pas cet hôtel, elles ne vivent pas dans cette réalité, elles ne connaissent pas ce monde.»

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«Me revoilà après 20 ans dans ma ville natale. Maintenant je vis dans cet hôtel et je suis content. Je n’ai pas pu gagner beaucoup d’argent, j’étais dans le milieu du cinéma mais… Je n’avais plus personne dans ma vie, je n’avais plus d’argent.»

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«Je suis libre, je veux l’être. Je ne suis pas obligé d’être comme toi, de vivre comme toi. Je suis comme je suis. C’est une vie qui rentre dans une valise.»

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«Mon père a fait faillite, mon fils a fait faillite...Mais malgré tout ce qui s’est passé, il ne faut jamais couper les ponts avec sa famille.»

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«Ma plus grande peur c’est que cette chambre soit le dernier arrêt. Si je meurs, ils m’enterreront au cimetière des anonymes.»

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Photo de Birol Ăœzmez

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«Tout le monde veut de l’argent, la vie est devenue l’argent. Regardez où je loge, regardez mes vêtements, deux pantalons, quatre chemises, c’est tout ! Des fois je prête mes habits aux amis, quand ils ont un entretien de travail, quand ils n’en ont plus de propres. Alors il me reste juste une chemise, un pantalon. Ils finissent par me les rendre. La semaine dernière j’ai fait un don à LÖSEV (Aide aux enfants contre la leucémie). Je me suis acheté un peu de nourriture, le reste de mon salaire c’est pour aider. Voilà la valeur de l’argent pour moi.»

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Photo de Birol Ăœzmez

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«Je me suis séparé de ma femme en 1996. Je lui ai écrit des poèmes, beaucoup de poèmes… C’était mon cadeau pour elle quand je n’avais pas d’argent pour lui offrir autre chose. Nous sommes des gens qui n’avons pas d’autre endroit pour vivre que la chambre d’hôtel. Des gens perdus.»

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- Avez-vous de l’espoir ? «Quelqu’un qui vit a toujours de l’espoir, moi je vis.»

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«Il fait froid dans les chambres, on n’a pas de chauffage. Je n’ai pas d’argent pour acheter un radiateur électrique et on n’a pas le droit d’avoir un poêle dans la chambre évidemment. Mais à l’entrée, dans le salon de l’hôtel il y a un poêle qui est bien alimenté. Souvent et surtout l’hiver, on vient tous se réchauffer et boire du thé.»

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«Je ne possède rien dans la vie, j’ai juste mon métier. Si j’avais eu une famille… Un bon niveau de vie peut être… Il ne faut pas que tu tombes amoureux, les autres peuvent, moi je n’aurais pas dû. L’amour c’est ça, c’est disparaître.»

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«Parfois je ne vis pas ici. Mon frère se dispute souvent avec sa femme, à chaque fois elle se barre, elle claque la porte de la maison. Alors je viens vivre chez mon frère quelque temps… Pour les réconcilier, tu vois, hahaha !... Ils finissent toujours par se remettre de leur dispute alors ma belle sœur revient à la maison et rebelote moi je reviens à l’hôtel.»

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«Dans cet hôtel, j’ai vu passer beaucoup de célibataires qui n’ont pas de maison. C’est le cas pour moi aussi. Je suis entrainé par le courrent de la vie. Je sais pas où cela m’emmène.»

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«J’ai aimé à en mourir, j’ai été aimé aussi, mais le destin… Il m’a réservé autre chose.»

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On a beaucoup galéré. On a fait notre possible, juste pour que ce bâtiment continue à exister. Mon frère et moi avons hérité cet hôtel de notre grandpère. On a habité ici, on a grandi ici avant qu’on le convertisse en hôtel. Je me souviens encore le jour où mon père a planté le poirier. Cet endroit a une valeur sentimentale pour moi.

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Photo de Canan Altinbulak

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Canan Altinbulak a fait un documentaire sur les habitants de cet hôtel. Pendant qu’on discutait une question s’est posée : - Quelle est la chose qui t’a le plus marquée pendant ton tournage ? - Il y a eu plusieurs évènements certes, mais celui auquel je repense souvent encore aujourd’hui c’est l’image de Yagmur qui joue au ballon dans la cour. C’est la fille de Zekai. Yagmur vivait avec sa mère après le divorce de ses parents. Mais souvent elle vient chez son père car sa mère a des problèmes psychologiques. Elle la faisait mendier dans la rue. Du coup son père la prend avec lui. Les habitants l’aiment bien, mais est-ce le meilleur endroit pour une fille de son âge ? Les gens d’ici sont adultes, ils se sont retrouvés ici par le hasard de la vie, mais cette enfant innocente, qui n’appartient pas à cet environnement qui grandit entre des gens loin d’un contexte familial, est-ce juste ? C’est une réalité que toi ou moi on ne peut pas changer. 62


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Suite à la demande de M. Mehmet et Mme Asiye le 5 juillet 2007 dans les environs de 10h30, ce lieu a été scellé par le procureur de la république M. Tarhan le même jour à 15h45 afin d’enquêter sur la mort de M. Saban.

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