Clausel Aurélie Decosse Arnaud Kahouadji Rayan
Série ES
Sciences économiques et sociales / Géographie
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Sommaire Les produits du marché des stupéfiants illicites L’utilisation de la drogue de l’antiquité à nos jours Les aspects du développement d’un pays
1. Economie parallèle, définition et fonctionnement 1.1 Qu’est-ce qu’une économie parallèle 1.2 Qu’est-ce que le trafic de stupéfiants 1.3 Le blanchiment d’argent, dernière étape d’un trafic bien organisé
2. Pourquoi une économie parallèle de stupéfiants 2.1 Répondre à un besoin de produits addictifs 2.2 Contourner les contraintes imposées par l’Etat 2.3 Sortir de la précarité en cultivant des stupéfiants
3.
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Le poids et les effets du trafic de stupéfiants sur l’économie 22 3.1 Un poids considérable sur l’ économie mondiale mais variable selon les pays 22 3.2 Des effets positifs sur l’économie légale 23 3.3 Des effets négatifs sur l’économie légale 25
1.
Un frein à l’équilibre des pays producteurs : les stupéfiants vecteurs de conflits 1.1 La drogue permet la création de gouvernements parallèles 1.2 Des populations désespérées et effrayées, poussées à intervenir 1.3 Le Mexique : une guerre silencieuse d’une violence extrême
2.
Un impact négatif sur les relations des pays producteurs avec les autres pays et organisations internationales 2.1 Les frontières, véritable terrain de guerre 2.2 Les pays consommateurs premiers financiers des talibans 2.3 La narco-déforestation : destruction du patrimoine mondial naturel et extermination des peuples autochtones
3.
Des pays consommateurs non épargnés par les problèmes liés à la drogue
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40 40 46 50
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3.1 La toxicomanie, un véritable problème de société 53 3.2 Les pays consommateurs, dernier maillon du trafic 56 3.3 Des politiques pour aider, dissuader ou punir la consommation de stupéfiants 59
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otre économie est composée de très nombreux marchés légaux mais aussi illégaux donnant naissance à une économie parallèle. Parmi les marchés de l’économie parallèle nous pouvons citer les marchés illégaux du trafic d’armes, d’organes ou encore de stupéfiants. C’est ce marché illégal des stupéfiants que nous avons choisi d’étudier. Mais avant d’introduire l’objet de notre étude, voici en préambule quelques notions de base sur les stupéfiants.
Les produits du marché des stupéfiants illicites Ces produits qui entrainent une dépendance sont classés en quatre grandes catégories : les drogues douces, les drogues dures, les médicaments psychoactifs et les hallucinogènes.
Drogues douces
Drogues dures ou très dures
Le cannabis et ses dérivés : La marijuana Le Shit Le Haschish…
Les dérivés du coca : Cocaine/Crack Les dérivés du pavot : Héroïne Opium Morphine
se présentent sous trois formes :
Pavot
Rameaux de coca
Opium Résine
Cocaïne
Herbe
Huile
Les Halucinogènes MDMA/Ecstasy Crack LSD (acide lysérique) Les Champignons hallucinogènes Les plantes à mescaline Le Peyolt (cactus) La Salva Divinorium…
Héroïne Morphine
Les Médicaments Psychoactifs produits dopants Vendus sous ordonnance de manière légale. Dans la plus part des pays un véritable
« Champignons Magiques »
Comprimés d’ecstasy Ce stupéfiant se présente souvent sous forme de petits bonbons colorés qui paraissent inoffensifs.
marché parallèle s’est créé pour répondre aux besoins des personnes dépendantes. Ce marché est notamment du à l’émergence d’internet et mets en vente des produits souvent contrefaits. Les Produits: Les tranquillisants,
Buvard de LSD à mâcher Tout comme l’ecstasy le LSD est présenté de manière inoffensive sous forme de buvard imprimé de dessins souvent tirés de comics ou de dessins animés.
les somnifères, les antidépresseurs, les neuroleptiques, les anabolisants…
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L’utilisation de la drogue de l’antiquité à nos jours Connue depuis la nuit des temps par les peuples du monde entier, la drogue a toujours été considérée comme un produit précieux. Elle a longtemps servi comme seule remède disponible. Certains historiens qualifient même la drogue de « plus vieux médicament » au monde, dans la mesure
Bas relief Assyrien (VIIIème Siècle avant J-C), le deuxième homme porte du pavot comme offrande pour son Dieu.
où nous avons trouvé des traces de son utilisation dans des momies et sur des bas reliefs… On estime qu’elle était déjà utilisée par les sumériens plus de trois mille ans avant J-C. C’est au XIXème siècle que le commerce de la drogue, à l’époque légal, prit une ampleur considérable en Europe et en Amérique du nord. A cette époque les produits stupéfiants envahissaient la société de consommation : Paru en 1886 cet ouvrage met en parallèle la réussite d’un poète et sa consommation de drogue.
• Leur vertus étaient vantées par de nombreux ouvrages et célébrités comme Baudelaire, Flaubert ou encore la reine Victoria. • Des salons ont même été créés au milieu des années 1800 pour permettre aux esprits de se réunir et échanger leur théories et œuvres toujours après l’ingestion de drogue comme l’opium ou le haschish. Ces séance étaient appelées"fantasias". Ces salons étaient souvent créés par des docteurs (comme Moreau) pour étudier les effets de la drogue sur le corps et l’esprit. Les stupéfiants ont passionnés tous les savants et docteurs de l’époque qui prescrivaient et encourageaient l’utilisation de drogues dures à tout le monde y compris aux enfants à qui on donnait souvent de la morphine pour les endormir.
Le Club des haschishins fut créé par le docteur Jacques-Joseph Moreau en 1844, actif jusqu'en 1849. Les séances mensuelles ont lieu chez le peintre Fernand Boissard, à l'Hôtel de Pimodan sur l'île Saint Louis, à Paris. Parmi les membres du Club les plus connus citons Gautier, Dumas, Baudelaire, Delacroix ou de Nerval.
C’est à partir du milieu du XXeme siècle que l’Homme prit conscience du danger de la drogue et de la dépendance qu’elle entraine. Après avoir été perçus comme bénéfiques pour l’homme pendant des millénaires, les stupéfiants sont rendus illégaux dans la plus part des pays occidentaux. Un marché illicite va rapidement se créér notamment pour répondre aux besoins en Héroïne des soldats américains qui
Publicité anglaise de 1885 pour un médicaments contre le mal de dent à base de cocaïne en vente en pharmacie.
découvrirent cette drogue pendant la guerre du Viêt-Nam (1955-1975). 35000 d’entre eux en consommaient chaque jour. Ils l’ont transporté avec eux dans leurs voyages la diffusant ainsi sur tous les continents.
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Les aspects du développement d’un pays
ujourd’hui le marché des stupéfiants a des impacts de nature différente et d’importance différente sur l’ensemble des pays du globe qu’ils soient en développement, développés ou PMA (Pays les Moins Avancés), ou qu’ils soient producteurs ou consommateurs. Pour savoir si l’économie parallèle des stupéfiants illicites est un atout pour le développement des pays, nous allons tout d’abord montrer en quoi ce marché répond à une véritable logique économique et ses effets sur l’économie, puis nous verrons dans une deuxième partie les effets politiques et sociaux dans les pays producteurs et consommateurs. 5
www.centerblog.net
Caricature de Acojose, des trafiquants blanchissent l’argent obtenu illégalement grâce à l’économie parallèle
e trafic de stupéfiants est aujourd’hui le troisième commerce international après le pétrole et l’alimentation. En effet le commerce des stupéfiants constitue un véritable système économique ancré dans la mondialisation. Cette partie va traité du concept de l’économie parallèle ainsi que du trafic de stupéfiants. Elle évoquera les causes très diverses de l’essor de cette économie illégale. Nous constaterons aussi que cette économie a un impact considérable sur le reste de l’économie et les populations.
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1. Economie parallèle définition et fonctionnement Saviez-vous qu’avec l’argent généré par la vente de drogues en France ( 3 milliards de dollars) les trafiquants pourraient se payer 10 Airbus A380 ? Mais comment ce trafique s’organise-t-il ? Comment les sommes d’argent astronomiques qu’il génère peuvent-elles être réutilisées dans l’économie légale ? Nous verrons dans cette première sous partie ce que signifie le concept d’économie parallèle puis nous évoquerons l’organisation du trafic de stupéfiants pour ensuite parler du blanchiment d’argent.
1.1 Qu’est-ce qu’une économie parallèle ? L’économie souterraine, parallèle ou illégale est une partie de l’économie où des biens, produits ou services, sont produits, échangés ou consommés en violation de la loi. Plusieurs termes désignent l’économie parallèle : Les anglo-saxons parlent d’ « underground economy » ou « hidden economy » (souterraine ou cachée), d’autres de « shadows » ou « dark economy » (économie de l’ombre ou noire). Dans les pays du sud de l’Europe, on utilise souvent le terme d’économie
L’économie souterraine échappe aux autorités.
occulte. L’expression « économie seconde » est employée dans les pays d’Europe de l’Est et en Russie. « Economie informelle » a commencé a être utilisée pour désigner l’économie parallèle en Afrique noir et en Amérique du sud à partir des années 1970. Cette sorte d’économie regroupe des activités qui ont pour point commun d’échapper à la régulation publique mais dont les services ou biens vendus peuvent être légaux ou illégaux (exemple du travail non déclaré ou la contrebande, dans ces deux cas les services ou biens vendus sont légaux contrairement à la drogue qui est prohibée). L’économie parallèle n’est pas recensée au niveau de l’État ou par les organismes de comptabilité car les différentes activités ne sont pas déclarées aux administrations fiscales et sociales. Cela permet aux trafiquants d’écouler des marchandises interdites et aux contrebandiers de vendre leurs marchandises à un prix nettement moins élevé que la norme. En effet l’Etat ne perçoit pas les taxes (en France TVA) qu’il devrait percevoir à l’achat de ce produit dans le marché légal. La contrebande affecte surtout les produits lourdement taxés. En France pour les stupéfiants cela concerne majoritairement les cigarettes (TVA à 20%) et les médicaments psychoactifs, vendus Le trafic de tabac (stupéfiant de type légal) représente 5% du marché français et fait perdre à l’Etat chaque années 800 millions d'euros. De plus les cigarettes vendues sur ce marché sont souvent plus dangereuses pour la santé car souvent contrefaites.
sous ordonnance. Cela rend ainsi assez difficile la mesure de l’importance de cette économie.
www.lepoint.fr
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L’économie souterraine représente un secteur très actif mais cependant trop négligé par certains économistes car son existence même suppose qu’elle reste secrète. Les estimations disponibles en données chiffrées sont donc plus ou moins précises ce qui ne permet pas de rendre compte de sa véritable ampleur. Toutefois ce n’est plus un sujet tabou. En effet depuis quelques années sont existence est largement diffusée par le biais de films ou de séries car elle suscite l’intérêt des populations. Un économiste a d’ailleurs écrit à son propos : « Tout comme la pornographie l’économie souterraine semble susciter un mélange d’indignation, de curiosité coupable et d’admiration incrédule. C’est un sujet à propos duquel on connaît peu mais on suspecte beaucoup. » (Cowell – 1987) Il existe plusieurs formes d’économie souterraine : La première forme d’économie souterraine est
Le travail au noir en France en 2011
le travail au noir et le travail clandestin qui englobent tout travail qui ne respecte pas les règlementations, qu’elles soient sociales ou fiscales. Le « travail au noir » est occasionnel, comme par exemple un baby-sitting ou une Intervention professionnelle en dehors des heures de travail. Le travail clandestin est une situation où l’employeur ne déclare pas les revenus du personnel pendant une très longue durée. En France les travailleurs au noir sont surtout des seigneurs (plus de 60 ans) qui représentent 21,4% des travailleurs non déclarés et des jeunes qui eux représentent 8% de ces travailleurs. Tous les trafiquants sont considérés comme des travailleurs clandestins car leurs marchandises étant illégales et très lucratives, ils ne déclarent pas leur revenus et ne sont donc pas imposés dessus. La seconde forme d’économie parallèle est l’économie domestique et communautaire. Ce phénomène très présent dans les pays développés, correspond au travail domestique et à l’autoproduction comme le bricolage, le jardinage ou encore la cuisine. Pour les stupéfiants, cela pourrait être la mise en place d’une culture de cannabis à des fins de consommation dans un cadre communautaire.
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Enfin l’économie parallèle regroupe différents marchés dont le marché noir ou illicite qui correspond à la vente de produits ou services illégaux comme la drogue, les armes ou encore le trafic d’être vivants (animaux, prostitution…). On remarque souvent un parallèle plus ou moins visible entre, les différentes branches de ce marché dont le plus évidant est celui entre le trafic d’armes et le trafic de stupéfiants.
1.2 Qu’est ce que le trafic de stupéfiants ? Le trafic de stupéfiants ou « narcotrafic » désigne l’ensemble des échanges commerciaux illégaux de stupéfiants. C’est surtout dans les années 1980 que le trafic s’est développé notamment grâce au processus de la mondialisation qui à permit la mise en place d’échanges économiques entre pays du nord et pays du sud. Ces échanges sont à l’origine de la mise en place massive d’exploitations de pavot, de coca et de cannabis à travers le monde. Ce trafic s’étend à l’international et par conséquent utilise les différents moyens de transports. Le plus utilisé est sans doute le transport par voie maritime grâce à la containerisation qui permet de dissimuler la marchandise dans la masse et de franchir les mers et océans. Mais les trafiquants utilisent aussi le transport aérien soit en glissant de la marchandise illégale dans des www.lemonde.fr
valises de passagers, soit par jets privés. Cependant l’avion est moins utilisé car plus contrôlé, mais les trafiquants rivalisent d’ingéniosité pour utiliser ce transport rapide. En décembre 2012 et en août 2014 des femmes en provenance d’Amérique Latine ont été interpelées dans des aéroports espagnols alors qu’elles transportaient de la cocaïne dans leurs faux seins. A l’intérieur des territoires la marchandise est transportée par voies terrestres.
En 2013, 1,3 tonne de cocaïne pure en provenance de Caracas a été saisie à Roissy à bord d’un avion Air France. La drogue était à l’intérieur de valises. Cet événement montre que les trafiquants se sont implantés partout, il y avait forcément un complice dans la compagnie.
Le commerce de stupéfiants à l’échelle mondiale est aussi permis grâce aux nouvelles technologies. Internet est avec les cités et les vendeurs particuliers, le seul lieu où l’on peut se procurer de la drogue en France. Elle est généralement mise en ligne directement par les trafiquants et expédiée depuis les pays producteurs. Elle est mise en vente massivement sur ce qu’on appelle le dark net, une sorte d’Internet illégal au sein d’Internet. Sa vente est rendue possible grâce à des sites comme Silk Road, ex site en ligne clandestin parfois surnommé « l’Ebay de la Drogue » . Le trafic de stupéfiants pourrait donc se définir comme un vaste ensemble de systèmes d’échanges partant des pays producteurs pour arriver aux mains du consommateur.
Les différentes étapes intervenant dans le trafic de stupéfiants : 1- La production : un rôle majeur dans le trafic Les paysans producteurs vont percevoir qu’un faible pourcentage du revenu généré par le trafic,
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mais malgré ce pourcentage, ces cultures illicites restent plus rentables que les cultures légales et sont souvent vues comme un moyen de sortir de la précarité. Les profits réalisés par les producteurs vont être directement réinjectés dans l’économie sans intermédiaire, grâce au blanchiment d’argent.
Les cultures se situent très souvent dans les pays du « sud» économique ou une grande partie de la population vit dans la pauvreté.
www.haschich.com
Les pays producteurs de stupéfiants illicites Cependant à cause de la crise économique les cultures peuvent se déplacer dans les pays du nord, notamment grâce à internet qui permet aux particuliers de se fournir en matériel et instructions nécessaires à la mise en place des cultures à domicile. Ces cultures de stupéfiants « sur place » permettent aux toxicomanes (consommateurs importants) de se fournir chez eux à moindre coup, mais aussi à d’autres de développer des nouveaux réseaux, de couper le contact avec les « grands chefs » et d’obtenir une marchandise moins chère, car ce n’est pas la drogue qui coûte chère mais la logistique et le transport. En effet, la valeur de ces produits augmente exponentiellement à chaque passage de frontière. Le produit commence donc à véritablement prendre de la valeur qu’après avoir quitté le pays producteur. Cette étape représente le coût le plus important, notamment pour les passages de frontières avec des systèmes d’organisations criminelles et de corruption. Ces organisations vendent le produit transformé en intégrant le coût de transport du produit et des réseaux de distribution. Elles réalisent les plus gros profits. A noter que les producteurs français vendent généralement la drogue aux même prix que si elle provenait de l’étranger faisant donc ainsi un maximum de bénéfices.. Les cultures dans les pays du nord destinées à la vente restent toutefois marginales car très contrôlées et très risquées pour les producteurs. La culture en Europe : En 2012 pas moins de 2 225 pieds de cannabis ont été découverts dans une maison délabrée à Essoyes et dans une ancienne boulangerie de Virey-sous-Bar (Aube, France).Chacun des bâtiments contenait plusieurs pièces destinées à la culture de cannabis, chacune des pièces, correspondant à un stade différent d'avancée de la culture
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En Espagne le code pénal
De nombreux sites internet expliquent comment planter le pavot chez-soi
autorise la consommation et la culture privée de www.howtodrugs.com
cannabis. A Rasquera, petit village Catalan espagnol, la culture de drogue de type Douce destinée aux commerces est devenue légale et même encouragée par la mairie après un référendum voté en 2012. La mairie a donc loué des terrains pour vendre du cannabis aux Membres de
Un Champ à Rasquera
l’Association Barcelonaise de Consommation Privée de Cannabis (ABCDA) et ainsi épongé une dette de plus de 1 million d’euros (800 habitants)
2- La distribution : logistique, transport et commercialisation Le trafic évolue donc dans l’espace mais aussi dans ses méthodes de dissimulation car la concurrence est très forte. Cette concurrence entraine d’ailleurs des guerres de territoires aussi bien au niveau des cultures dans les pays producteurs que dans les aires de ventes comme les cités en France. Du fait des risques encourus par les trafiquants en cas d’arrestation (pouvant aller de la prison en France à la peine de mort en Indonésie ou au Viet Nam) on assiste en Amérique du sud à deux effets : 1) La mise en place (multiplication) de nouvelles aires www.fastcompany.com
de culture et d’acheminement : « l’effet ballon » Les narcotrafiquants doivent faire face à de nouvelles problématiques notamment de la part des Etats Unis qui imposent à l’encontre du narcotrafic de nouvelles lois plus sévères. Ils doivent par conséquent multiplier ou déplacer le trafic et l’acheminement dans un autre pays ou dans une région moins contrôlée ou moins accessible comme l’Amazonie.
Schéma de la complexité de l’organisation du Cartel La Familia Mexique, effet cafard.
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2) La dispersion des organisations criminelles : « l’effet cafard » Plus le groupe est dispersé (par exemple avec plus de hiérarchie) moins le risque est élevé pour les trafiquants (repérage des agences antidrogues). Ces deux grands effet apparaissent de plus en plus de nos jours à cause du progrès réalisé en matière de lutte par les pays notamment en Amérique latine. On assiste aussi à la multiplication de « mains sales » c’està-dire que les grands trafiquants, les chefs de réseaux sous traitent les étapes dangereuses car s’ils sont attrapés le réseau peut être démantelé. La commercialisation est organisée sous forme de structure pyramidale : les narco trafiquants s’occupent de transactions de plusieurs kilogrammes contrairement aux « petits dealers » qui vendent très souvent dans la rue, livrés à eux-mêmes et aux dangers. on appelle cela aussi le «trafic des fourmis» car le nombre d’hommes nécessaires à l’écoulement de la drogue est gigantesque et que comme dans une fourmilière chacun à son rôle et son salaire. Dans la pyramide plus vous êtes haut, plus ce que vous
Les réseaux les plus développés s’arrêtent entre ces deux cases
percevez du trafic est important et plus vous êtes bas, plus votre travail sera dangereux et vos « revenus » faibles.
Exemple de Schéma d’un système pyramidal
3- Le cas particulier du micro trafic Dans certains cas le trafic et les filières de transformation sont inexistantes. Les trafiquants utilisent des laboratoires afin de transformer, les plantes de base ( coca, cannabis) en drogue consommable. Ces laboratoires sont souvent au plus près des champs afin de limiter les trajets et l’interception de la marchandise. Il existe aussi des laboratoires mobiles car depuis quelques années en Amérique du sud les armées ont pour mission de détruire les laboratoires de préparation pour étouffer le trafic. L’existence de laboratoires de synthèse permet de diminuer le nombre d’intermédiaires et de destiner une partie de la production à la consommation locale. on vent directement aux consommateurs, à des petits revendeurs de la région mais aussi sur Internet. On peut parler dans ce cas de « micro-trafic », la drogue passe directement des mains du producteur à celles du consommateur.
Un laboratoire de fortune en Colombie
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1.3 Le blanchiment d’argent, dernière étape d’un trafic bien organisé On estime que chaque année plus de mille milliards de dollars, issus de l’intégralité des activités criminelles mondiales passeraient par le blanchiment d’argent, dont environ la moitié proviendrait du trafic de stupéfiants. Le blanchiment d’argent permet aux trafiquants de dissimuler les fonds obtenus de manière illégale en les réinvestissant dans des activités légales (achats immobiliers…). L’objectif de cette manipulation financière est de justifier la provenance d’une grande quantité d’argent aux autorités c’est pourquoi les petits trafiquants (dealers) n’ont pas besoin de faire appel à ce mode de dissimulation de revenus. Généralement l’argent des trafiquants est souvent en liquide (voir photo prise dans la ville du baron mexicain, partie II, partie 1, petit 3) et en grandes quantités. Il leur est donc impossible de déposer leur argent tel quel à la banque ou de le dépenser dans de gros achats sans éveiller les soupçons. En France, par exemple il est impossible de payer en espèces quand la valeur de l’achat dépasse les 3 000 euros et tout passage de frontières avec une somme d’argent liquide supérieure à 10 000 euros doit être signalé aux autorités françaises et à celles du pays d’où provient l’argent. Les capitaux perçus par les grands narcotrafiquants sont si importants que seul notre système financier peut les écouler. Les trafiquants utilisent donc
Dessin comique , nous illustrant l’incapacité d’un trafiquant à utiliser l’argent de son trafic sans l’avoir blanchie.
le système financier des échanges économiques légaux pour pouvoir écouler les capitaux qu’ils ont illégalement gagnés sur les marchés de l’économie parallèle : c’est le blanchiment d’argent. La première étape du blanchiment consiste à faire rentrer par des moyens divers l’argent dans le système bancaire. Il existe alors de nombreuses techniques pour « duper » les banquiers. Parmi les plus connues on peut relever la technique du casino et du faux ticket gagnant. Les trafiquants, souvent complices avec le gérant du casino (ou eux même gérant), utilisent une partie de l’argent sale pour acheter quelques jetons (ticket…) et corrompent le patron afin qu’il atteste que la somme qu’ils veulent blanchir ait été gagnée au jeux. Cependant cette méthode ne marche plus très bien car elle est connue par les autorités. D’autres méthodes plus discrètes existent comme celle du commerce complice. Les trafiquants mélangent de l’argent sale à la caisse de pizzerias, d’épiceries ou encore de laveries ( cette méthode était à l’origine appliquée aux laveries d’où le mot blanchiment). Les administrations ne peuvent pas savoir combien de clients sont entrés dans le commerce. Généralement pour blanchir des sommes conséquentes les mafieux exercent leurs pouvoirs sur plusieurs commerces, voire contrôlent des chaînes. Quand cette technique s’applique à plusieurs commerces elle est appelée la technique dite du millefeuille.
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Enfin une autre technique très courante est celle des fausses factures factures ( voir schéma ) www.les-renseignements-genereux.org
La technique des fausses factures La deuxième étape du blanchiment d’argent est le brassage. Il s’agit de brouiller d’avantage les pistes et de placer l’argent placé préalablement sur un compte bancaire d’une banque peu regardante vers une banque plus prestigieuse. Nous allons évoqué deux techniques utilisées par les trafiquants. La première est l’utilisation d’internet avec la création de sites de jeux ou de casinos en ligne par les blanchisseurs. Le blanchisseur crée en toute légalité un site de type casino en ligne et ouvre un compte bancaire dans une banque prestigieuse du pays de son choix pour sa « société ». Des complices placent de l’argent sales dans des banques à travers le monde (beaucoup de complices car petites sommes d’argent à chaque fois) et vont alors s’inscrire sur le site et faire mine de perdre leur argent. Le blanchisseur va alors récupérer cet argent soit disant perdu dans son compte de banque prestigieuse. Cette technique présente aussi un avantage de taille pour les trafiquants car leur site étant public de vrais joueurs jouent sur leur site (bien sûr, ils ne gagnent jamais). La deuxième méthode que nous allons mettre en avant est celle de la multiplication de transfères bancaires. Le but est de transférer l’argent sale ,d’un paradis fiscal (où il a été précédemment placé lors de la phase de placement) jusqu’à une banque prestigieuse du pays souhaité. Cette technique repose sur le fait que les banques de plus en plus prestigieuses font confiance à la banque précédente.
Petite Banque Allemande
La multiplication des transferts et le passage par des paradis fiscaux de l’argent du trafic rendra difficile le lien entre le dépositaire final du compte et l’origine des fonds. De plus l’argent passe souvent par des paradis fiscaux. L’argent déposé dans le dernier compte va ensuite pouvoir être utilisé.
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La dernière étape du blanchissement d’argent est l’intégration, l’argent va pouvoir être utilisé dans des transactions , dans l ’économie légale (achats immobiliers, automobile…). Les risques pris dans les étapes suivantes feront augmenter le prix des stupéfiants pour le consommateur qui devra payer « la taxe de blanchiment ».
Le système du blanchiment d’argent
mlte.over-blog.com
1- Le placement , prélevage ou immersion : Il s’agit de l’étape la plus difficile pour les trafiquants. Il faut placer l’argent sale liquide sur un compte bancaire quelconque en masquant sont origine illégale. 2- La dispertion, le brassage ou l’empilement : Il faut brouiller les pistes . Il faut légitimer la possession de l’argent et réussir à cacher son origine. 3- L’intégration, l’essorage ou le recyclage : L’argent peut être investi.
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2. Pourquoi une économie parallèle de stupéfiants Saviez- vous qu’aujourd’hui 18 à 38 millions de personnes sont accro à une drogue interdite ? Qu’en France quelques 100 000 personnes vivent de ce commerce ? Qu’en 2011 en Afghanistan 1,6 millions de personnes vivaient uniquement de la culture de pavot ? Nous verrons donc dans cette partie les origines du marché (besoins addictifs) mais aussi ce qui le pousse à perdurer.
2.1 Répondre à un besoin de produits addictifs Les premières économies parallèles remonteraient à 10 000 ans avant J.C. Elles concernaient surtout les produit contrôlés par les souverains. En Egypte durant l’antiquité comme le parfum était lourdement imposé par le Pharaon, un marché parallèle (contrebande) est donc né. Mais, c’est surtout au XXème siècle que les marchés parallèles se sont développés, à cause de l’avancée des recherches en matière de santé ce qui a entrainé l’interdiction de certains produits à la vente et une hausse des taxes pour d’autres. Le but étant à terme de stopper la consommation de ces stupéfiants. Cependant les stupéfiants sont des produits addictifs et donc malgré les interdictions proclamées par les gouvernements certains consommateurs sont en besoin et donc pour satisfaire ce besoin un nouveau marché illégal va se créer. L’Etat français tente de dissuader les jeunes de devenir de nouveaux consommateurs de tabac (stupéfiant légal) et de pousser les autres à arrêter leur consommation en élevant le prix de celui-ci. Ainsi en dix ans sont prix a presque doublé.
Les dangers potentiels des stupéfiants ont commencé a être exposés au grand jour à la fin des années 1890 notamment avec la première conférence internationale sur les stupéfiants de 1909. En 1903, le célèbre soda américain Coca-Cola va aussi retirer la cocaïne de sa recette après que des femmes américaines blanches ( nous sommes en pleine période de ségrégation) aient assimilé la violence perpétrée par les populations noires à la boisson. Le début du XXeme marque le début des débats sur la consommation des stupéfiants. On essaye tout d’abord de guérir les addictions, l’opiomanie par un traitement à base de morphine, et l’addiction à la morphine par un médicament mise en place par les laboratoires Bayer appelé héroïne. On croyait qu’en dérivant l’opium et en le mettant sous une autre forme on pourrait se débarrasser de l’addiction mais en faite on créait des produits de plus en plus dangereux. La seule solution qui s’imposa alors fut le contrôle du marché par l’Etat voir l’interdiction de celui-ci.
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C’est après la première guerre que les interdictions commencèrent à apparaître, notamment aux Etats-Unis qui vota en 1919 l’interdiction de l’alcool. Très vite de nombreux américains descendent dans les rues, ils ont besoin de ce stupéfiant. Très rapidement l'Amérique www.letemps.ch
va assister à l’effet contraire du but de cette Manœuvre : une hausse de la criminalité avec la naissance de mafia comme celle du célèbre Al Capone qui fit fortune grâce à la prohibition de la boisson et devint rapidement avec sa mafia de Chicago, l’ennemi public numéro 1.
Manifestation contre l’interdiction de la bière aux États-Unis, dans le New Jersey en 1931. Notons que pendant cette période l’Etat empoisonnait l’alcool pour réduire le nombre de consommateurs. Il est ainsi responsable d’environ 10 000 meurtres.
Les criminels avaient compri que malgré l’interdiction des autorités, les ventes sur le marché illégal allaient croître grâce aux alcooliques et à l’attrait généré par les produits illicites sur la société de consommation. En 1933 après l’emprisonnement à Alcatraz de Capone, les Etats-Unis relégalisent le stupéfiant pour éviter que de nouveaux criminels se mettent à le vendre illégalement. En 1961 c’est au tour des drogues de devenir interdites dans le monde grâce à la convention unique sur les stupéfiants de l’ONU qui sera peu à peu appliquée dans tous les pays. En 1971 tous les pays du nord économique appliquent la convention de 61. Cependant, là aussi des personnes ont besoin de ces stupéfiants, notamment les soldats américains qui ont découvert l’opium au Viet-Nam où il est cultivé comme plante sacré . On voit aussi naitre une demande due au mouvement hippie qui s’oppose à l’Etat et donc consomme des stupéfiants en signe de contradiction. Cette demande est à l’origine du marché d’aujourd’hui car les ventes de stupéfiants n’ont pas cessé après son interdiction qui a entrainé de nouveaux consommateurs… www.novaplanet.com
L’alcool redevient légal baisse des homicides et de la criminalité
Prohibition de l’alcool
Des Gis de l’US Army devenus héroïnomanes sont soignés dans des baraquements à Long Binh . On estime qu'en 1970, 10 à 15% des combattants américains au Vietnam consommaient de l'Héroïne sous différentes formes. Entre 1969 et 1970, plus de 16 000 soldats furent rendus à la vie civile autant de nouveaux clients pour le marché noir alors « en construction. »
Début de la prohibition de la drogue, création d’une économie parallèle, hausse des homicides
classiques.uqac.ca
L’évolution des meurtres aux Etats-Unis
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2.2 Contourner les contraintes imposées par l’Etat Dans son ouvrage « la richesse des nations » écrit en 1776, l’économiste écossait Adam Smith écrivait: « il existe un penchant naturel à tous les hommes […] qui les portent à trafiquer, faire http://en.wikipedia.org/wiki/Adam_Smith
des trocs et des échanges d’une chose pour une autre » Pour lui l’échange était fondamental pour le développement des Hommes et des sociétés et chaque fois que ce penchant pour l’échange est contrarié selon lui les individus vont naturellement chercher à contourner la contrainte. Donc, si des obstacles s’opposent à l’échange, la demande et l’offre vont se réfugier dans l’économie souterraine.
Adam Smith ( 1723-1790) était l’un des fondateurs du libéralisme
Il existe différents types de contraintes: Les impôts et les différentes taxes, aujourd’hui dans tous les pays l’Etat intervient de manière plus ou moins importante en imposant des taxes parfois lourdes sur l’achat de produits ou de services, en imposant les revenus les plus importants ou encore en prélevant de l’argent aux entreprises (impôts sur les bénéfices par exemple). De là, certains individus vont effectuer une comparaison type efforts/salaire (ils ne seront pas imposés s’ils travaillent dans l’économie parallèle et donc leur pouvoir d’achat sera supérieur) et d’autres vont essayer de maximiser le nombre d’achats qu’ils peuvent réaliser avec leur budget (achètent des marchandises issues de la contrebande pour contourner la TVA impôt indirect et par conséquent pouvoir acheter plus avec un même budget). Dans l ’économie légale les individus se sentent moins récompensés pour leurs efforts et donc sont tentés de contourner le système en ce tournant vers la deuxième économie, l’économie souterraine. L’ensemble des impôts et des taxes est appeler charges ou fardeau fiscal. Ce graphique peut notamment illustrer ce phénomène : On voit que les impôts, les taxes et les charges sont un facteur de développement de l’économie parallèle. On observe que dans les pays n’ayant pas un fardeau fiscal
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très élevé, comme les Etats-Unis, le poids de l’économie parallèle n’est pas très élevé et que plus on se décale vers la gauche, vers les pays où le fardeau fiscal est élevé plus, l’économie parallèle représente une proportion élevée du PIB (La Belgique en est un exemple). Quatre pays n’entrent pas dans le moule le Portugal, L’Espagne, la Grèce et l’Italie qui rencontraient des difficultés en 2005, ce qui a favorisé l’ économie parallèle.
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L’existence de réglementations strictes qui contrôlent le marché du travail a aussi tendance à faire augmenter, le phénomène de travail au noir (travail non déclaré comme la vente de stupéfiants en France). Or généralement les personnes impliquées dans le trafic de drogues et dans la contrebande en France sont des jeunes en échec scolaire, des personnes sans qualification ou encore des clandestins ou étrangers. Ces personnes ont en commun une difficulté à s’insérer dans le marché du travail. Le contexte de crise actuel vient accentuer ce phénomène. Ainsi selon les estimations, le chômage (absence de travail déclaré) touche aujourd’hui près de 40% des moins de 26 ans issus des banlieues défavorisées françaises. Ce phénomène peut être dû à de la discrimination ( l’existence du « plafond de verre », les jeunes voient l’emploi mais ne peuvent pas y accéder à cause de leurs origines) mais surtout à cause de l’existence d’un salaire minimum en France le SMIC ( Salaire Minimum Interprofessionnel de Croissance ). Les entreprises ne peuvent pas verser des salaires en dessous de ce SMIC et donc pour le même prix, elles préfèreront embaucher des gens plus qualifiés. La règlementation a donc tendance à augmenter le coût du travail légal (on peut penser aux salaires planchers) et donc cela baisse (d’après la théorie libérale) la demande de travail (demande des entreprises). L’offres ( actifs) étant supérieure à la demande dans le marché du travail légal contrôlé par l’Etat, les jeunes pour subsister vont se tourner vers le marché du travail au noir incluant le trafic de stupéfiants. Salaire La mise en place d’un prix plancher crée une situation de rationnement. (Il n’y a pas un équilibre entre l’offre et la demande).
Salaire équilibre permettant le plein emplois inférieur au salaire plancher
Schéma de l’offre/ demande dans le cas du marché du travail
On voit à travers ce schéma que la réglementation apparait comme un facteur très important. Les différents individus sont attirés vers l’alternative de l’économie souterraine face au chômage ou à des emplois précaires causés par une forte réglementation du travail.
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2.3 Sortir de la précarité en cultivant des stupéfiants Si la culture de stupéfiants s’étend surtout dans les pays du sud économique c’est que les populations voient souvent cette culture comme le seul moyen de satisfaire leurs besoins primaires, c’est-à-dire de se nourrir, de se loger et de se vêtir . Les paysans sont toujours plus www.cairn.info
nombreux à se tourner vers cette culture car elle est plus rentable ; un kilogramme de culture illicite rapporte environ quatre fois
plus qu’un kilogramme d’un produit de Comparaison des données économiques pour les diverses cultures du Alto Huallaga (Perou) la culture autorisée. Même des produits nobles comme le cacao et le café destinés aux marchés occidentaux ne peuvent rivaliser avec la coca. Au Pérou les paysans de la région du Alto Huallaga cultivent en moyenne 1,5 hectares de coca pour un revenu annuel net de environ 4 100$ soit un revenu jusqu’à huit fois plus important que celui d’un agriculteur sans coca. Cependant les prix peuvent encore variés d’avantage, selon les régions et les pays. En Afghanistan un paysan à le choix de cultiver sur son jerib de terre 1 100 kg de blé qui lui rapporteront 200 euros ou bien cultiver 8 kg de pavot lui rapporteront 300 euros. Les différences importantes de revenus pour les paysans les poussent donc à agir dans l’illégalité. Les drogues peuvent permettre à des familles nombreuses de sortir de la misère et dans des pays comme l’Afghanistan ou en moyenne, une famille compte cinq enfants cette différence n’est pas négligeable.
Cependant le prix payé aux paysans qui fait pousser la plante de départ est jusqu’à 2 000 fois moins important que le prix final. En clair le trafic rapporte bien plus aux trafiquants qu’ aux paysans. Généralement dans des pays comme la Colombie les paysans transforment eux mêmes le coca en cocaïne et remportent ainsi la somme des deux premières lignes. Tout le monde peut s’impliquer dans la culture, femmes, personnes du troisième âge et enfants
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La culture de stupéfiants demande aussi une quantité importante de main d’œuvre, même si cette main d’œuvre est très productive (voir tableau page précédente). En effet les paysans travaillent souvent avec toute leur famille ou des habitants de leur village car les rôles ne sont pas les mêmes pour tout le monde. Les exploitations créent d’autres emplois que celui de fermier. Les champs de cultures illicites font travailler des hommes qui assurent la semence, et le bon déroulement de la croissance de la culture mais aussi des femmes et des enfants aux récoltes. Les trafiquants aident aussi les paysans à maximiser leurs récoltes en embauchant parmi le peuple des gardiens. La culture de cannabis rapporte ainsi de l’argent à des jeunes souvent âgés de 16 à 25 ans qui sont payés par les dealers pour surveiller les champs.
Des hommes entretiennent un champ de cannabis au Maroc
Ces gardiens armés lourdement travaillent et se relèvent jours et nuits pour éviter, tout vol, intrusion ou signaler l’arrivée de policier. Les cultures peuvent aussi mettre à contribution un grand nombre de femmes surtout dans le milieu du cannabis. Avant d’être vendu aux dealers un travail de préparation est nécessaire. Pendant plusieurs jours après la récolte le cannabis
Un gardien de champ de pavot, dans le sud de l’Afghanistan.
est séché pour être ensuite travaillé. Quand les plantes sont sèches pour fabriquer du haschish d’autres étapes sont nécessaires. A l’aide d’un linge tendu le pollen des fleures séchées est récupéré. Il sera ensuite pressé pour former des pains de cents grammes à un kilo et vendu aux dealers. Dans les exploitations de pavot d’autres mains que celles des paysans sont aussi nécessaires à la transformation des plantes en laboratoires.
L’étape du linge
En moyen une petite exploitation de 1,5 hectares au Pérou offre du travail à une vingtaines de personnes, même si ce travail reste communautaire et que les bénéfices sont souvent divisés entre membre d’une même famille ou les différentes familles qui y travaillent. Les stupéfiants permettent d’apporter un emploi viable à des populations souvent isolées et c’est pour cette raison que le trafic sera aussi très difficile à stopper. Si la demande des pays consommateurs baisse, les conditions de vie de ces populations vont baisser et l’économie des pays producteurs sera impactée, les populations vont s’appauvrir et la consommation va baisser.
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3. Le poids et les effets du trafic de stupéfiants sur l’économie Saviez-vous qui si le trafic de drogues était un pays, son PIB le classerait au 11eme rang des puissances mondiales? Et que ce trafic équivaut, en Afghanistan premier producteur d’opium au monde, a environ 60% du PIB. L’économie parallèle de stupéfiants est extrêmement importante dans le monde mais on remarque des disparités selon les pays. Cette sous partie va vous évoquer les disparité du poids de ce marché dans les différents pays et comment ses impacts se propagent puis si ces impacts sont positifs ou négatifs pour l’économie.
3.1 Un poids considérable sur l’ économie mondiale mais variable selon les pays Aujourd’hui tous les pays ouverts aux échanges mondiaux hébergent du trafic de drogues ou de la contrebande sur leur territoire. En effet comme dit précédemment les stupéfiants entrent et sortent des territoires pour rejoindre des trafics situés dans les pays finaux où ils vont êtres vendus.
Les principaux échanges avec l’Europe Bien sûr l’existence d’échanges entre pays différents suggère qu’il y est une offre et une demande, cependant plus la demande sera importante plus l’offre le sera et plus le poids du trafic sera important dans les pays ayant pour rôle d’exporter (plus de production donc plus d’argent pour les trafiquants) mais aussi dans les pays consommateurs où le trafic se prolonge. Le poids peut aussi varier dans un même pays selon les régions en fonction de l’importance de la demande de cette région mais aussi le prix auxquels la drogue est vendue. En France les régions où le poids du trafic est le plus important sont la région PACA avec la ville de Marseille souvent qualifiée de capitale de la criminalité française, et la région île de France. C’est d’ailleurs dans ces deux régions que la plupart des cités dangereuses zones de non-droit sont installées. En France le prix moyen de 1 gramme de cannabis est de 5 euros, celui
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celui de 1 gramme d’héroïne est de 40 euro et enfin celui de 1 gramme de cocaïne est de 60 euros. Ce qui est loin d’être le cas dans les pays producteurs où dans les pays dit « passeurs » pays proches des pays producteurs. Ainsi à New York un gramme de cocaïne coûte jusqu’à 10 fois plus chère qu’à Sao Polo au Brésil pays plus proche des producteurs de cocaïne (Colombie…). Enfin, un gramme de marijuana coute 28 fois plus chère à Berlin qu’au Lagos pays producteur, l’écart de prix est encore plus importante entre producteurs et consommateurs.
La valeur du trafic selon les région du monde www.midilibre.fr
Les écarts de prix des stupéfiants illicites au sein du territoire français. Cette différence s’explique par l’existence plus nombreuse d’organisations de trafic (concurrence) dans certaines régions. Le fait que dans certaines régions le prix de l’héroïne soit bas par rapport à la moyenne nationale et que le cannabis plus haut nous révèle montre que la plupart des organisations de trafic sont spécialisées dans l’un des domaines.
L’économie souterraine est une économie dite « cachée » donc les méthodes d’évaluation du poids de cette économie ne sont pas précises et difficiles à évaluer. Cependant la plupart des chiffres s’accordent sur une même tendance : les pays en développement sont les plus touchés par l’économie informelle atteignant 35 à 44% du PIB, pendant que dans les pays de l’OCDE (pays développés) l’économie souterraine représenterait 14 à 16% du PIB.
3.2 L’économie parallèle des effets positifs sur l’économie légale Certains pensent que l’économie parallèle serait bénéfique pour l’économie : Milton Friedman, prix Nobel en économie, pensait même que cela permettrait aux individus de faire preuve d’initiatives et donc de relancer en quelque sorte l’économie. D’autres économistes pensent qu’elle agirait tel un « amortisseur » notamment en temps de crise, les chômeurs bénéficieraient donc de cette alternative. Il y aussi différents exemples économiques qui montrent la nécessité de l’économie parallèle. On peut penser notamment à l’ URSS avant la libéralisation. L’Etat était en crise et il y avait
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une pénurie à l’échelle du pays, les vitrines étaient vides, les populations désespérées notamment lors de la famine organisée par l’Etat en Ukraine qui a fait plus de 5 millions de victimes en 1933. L’Etat confisquait toutes les vivres pour supprimer une partie de la population trop nombreuse. Durant cette période les l’économies souterraines se sont donc beaucoup développées et a donc aidé les populations soviétiques. Bien sûr le produit le plus concerné par cette économie étaient l’alcool qui fut d’ailleurs prohibé dans le pays sous le gouvernement de Lénine.
En URSS pendant la pénurie alimentaire, la population faisait la queue pendant des heures devant les magasins où l’alimentation est rationnée.
L’économie parallèle permet donc de ravitailler des populations en cas de pénurie grave dans l’économie légale. L’économie parallèle de stupéfiants, très lucrative est aussi une bonne alternative aux revenus de transferts parfois inexistants ou fortement diminués à cause de la crise dans certains pays, d’où le développement de plus en plus important de cultures dans des pays en crise comme la Grèce ou d’Europe de l’Est, comme l’Albanie où dans le sud du pays des villages se transforment en véritable champs de cannabis comme Lazarat. Dans ce pays la drogue est pourtant illégale mais il constitue une plaque tournante du trafic d’opium, provenant de pays comme l’Afghanistan et l’Inde qui rejoint l’ouest par la Turquie. Les habitants de ces campagnes, en situation de chômage, de pauvreté et oubliés par l’Etat ont donc lancés des cultures de cannabis. Les seules altercations notables qu’ils eurent avec les forces de l’ordre eurent lieu en 2012 et en 2014 à Lazarat où les habitants ont répliqué avec des armes. Une ex paysanne désœuvrée a d’ailleurs confié à deux journalistes hollandais la phrase suivante:
« L’Etat ne nous donne rien. Pourvu que la police ne s’en mêle pas elle nous priverait de notre seule ressource ».
Un champ de cannabis à Lazarat: Ce village produit environ 900 tonnes de Marijuana par an ce qui ferait gagner à ses habitant 4,5 milliards d’euro par an .
Cependant malgré ses effets positifs, l’économie parallèle de stupéfiant à aussi des effets négatifs sur l’économie.
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3.3 Des effets négatifs sur l’économie légale Les aspects négatifs ne sont pas à négliger. En effet l’expansion de l’économie souterraine réduit les recettes de l’Etat ce qui pose des problèmes très variés : • Moins de dépenses publiques, problèmes de distribution des ressources ou d’intervention économique de l’Etat, ce qui peut entrainer une augmentation encore plus importante de ce phénomène de création d’économie souterraine. • Hausse de la dette publique, les revenus non-déclarés ne seront pas imposés et les travailleurs non-déclarés (au chômages) peuvent continuer à percevoir des revenus comme le RSA ( Revenu de Solidarité Active). Les dépenses de l’Etat ( ce qu’il doit par exemple verser sous forme de revenus de transfert) deviennent plus importantes que ses recettes ( impôts, taxes…) et l’Etat est obligé d’emprunter à d’autres pays à qui il devra reverser des taux d’intéret en plus du remboursement de la totalité de la somme prêtée. • L’Etat va donc augmenter les impôts pour les gens honnêtes qui ont déclaré leurs revenus et pour les entreprises ce qui va créer un effet « pervers » voir « perpétuel » (cercle vicieux)
Ensuite on peut remarquer que la concurrence n’est pas respectée, les entreprises corrompues voir illégales s’en sortent donc mieux, elle n’auront pas à payer certaines charges sur le bénéfices par exemple et pourront embaucher plus en payant leurs salariés en dessous du SMIC. Plus un pays est corrompu (exemple de la Grèce) ou absent face aux politiques de lutte contre cette économie souterraine, moins l’économie réelle du pays bénéficie d’investissements notamment d’investissements étrangers. Cependant le trafic de stupéfiants n’a pas que des impacts sur l’économie, mais il peut également affecter les relations entre les pays, bouleverser l’équilibre des états ou encore être responsable de milliers de morts chaque année.
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http://www.voltairenet.org/articl178702.html
Taliban posant en Afganistan avec les symboles de leur puissance : Le commerce de pavot et la possession d’armes lourdes (ici lance roquettes)
ien que le commerce et la production des stupéfiants apparaissent parfois comme une nécessité pour sortir de la pauvreté et faire vivre des millions de personnes dans le monde, ils s’avèrent aussi être une source importante de conflits politiques, militaires et et avoir même des conséquences sur l’environnement. Ce marché fait des centaines de milliers de victimes chaque année sans compter les morts liées aux problèmes de santé et à l’exclusion sociale qu’il engendre. Dans cette partie de l’étude nous allons donc tout d’abord montrer le frein considérable que peuvent représenter la production et le commerce de la drogue pour le développement des pays producteurs, qui sont souvent en développement ou pauvres à l’image de l’Afghanistan, puis nous analyserons dans un deuxième temps son impact sur les sociétés occidentales qui sont des pays consommateurs.
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1. Un frein à l’équilibre des pays producteurs : les stupéfiants vecteurs de conflits Saviez-vous que le Mexique est aujourd’hui le pays le plus dangereux au monde ? Et que chaque année des milliers de militaires meurent en combattant des trafiquants ? Cette première sous-partie traite de l’existence de tentions importantes au sein des pays exportateurs.
1.1 La drogue permet la création de gouvernements parallèles Dans certains pays hébergeant des cultures de produits illicites, l’Etat perd le control de certaines régions où des groupes terroristes font régner la terreur comme les talibans en Afghanistan et les FARC en Colombie. Ainsi en Colombie, l’Etat n’a plus accès à
Les FARC comptent dans leurs rangs des femmes et dès leur plus jeune âge les enfants sont initiés au maniement des armes.
une grande partie de son territoire rural tombé aux mains des FARC dans les années 1960. Les Forces Armées Révolutionnaires de Colombie est une guérilla marxiste formée en
Insigne FARC
en 1964 autour de Manuel Marulanda. Elle est composée d’unités mobiles dans tout le monde rurale Colombien. Les FARC sont spécialisées dans la culture, la production et l’exportation de stupéfiants et plus particulièrement de coca. Ce groupe terroriste est un véritable Etat. Il possède son propre drapeau et ses dirigeants sont répartis dans ce qu’ils appellent leur secrétariat général. Les habitants des zones contrôlées sont soumis au système juridique FARC appelé Conseil révolutionnaire de guerre qui réalise de nombreuses exécutions, des prises d’otages (femmes, journalistes, enfants) et commet des actes de tortures récurrents contre l’ennemi (paysans qui refusent leurs lois, étrangers, militaires) ou dans leurs rangs pour remotiver les troupes. Les FARC imposent aussi leur propre système éducatif afin d’endoctriner le peuple dans leurs rangs ou de les faire produire dès leur plus jeune âge.
Estimation des revenus des FARC (en millions $) Extorsion 281
Enlèvement
Stupéfiants
43
900
Source : police nationale – novembre 2012
La drogue leur sert de principal moyen de financement mais ils ont aussi leur propre système de taxation imposé aux paysans des alentours qui sont victimes d’enlèvements ou de travaux forcés en cas de non-paiement. Cependant ils sont plutôt aimés par le peuple rural car ils fournissent les soins médicaux et scolaires dans les endroits isolés.
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Des opérations militaires contre le narcotrafic Pour lutter contre les groupuscules terroristes sur leur territoire certains pays à l’image du Mexique n’hésitent pas à investir dans des armées efficaces envoyées pour détruire les exploitations. En Colombie, l’Etat a rapidement compris que pour s’attaquer aux FARC il faut s’attaquer à leur source de revenus car ils leur permettent d’acheter des armes et
Des soldats colombiens entraînés pour combattre les FARC , à Florencia, en Colombie.
d’attirer des colombiens dans leur trafic : la production, la synthétisation et la vente de cocaïne. Les terroristes sont extrêmement bien équipés. Ils possèdent des armes lourdes achetées sur les marchés illégaux. On trouve parmi ces armes des mitraillettes, des fusils d’assaut et des lances roquettes. Ils créent aussi des champs de mines pour éviter l’avancer des militaires et isoler un peu plus leurs laboratoires. Ces laboratoires permettent de transformer la pâte de coca en cocaïne. L’Etat envoie donc des brigades militaires spéciales contre le narcotrafic composées de l’élite de l’armée colombienne pour détruire les laboratoires de fortune servant à la fabrication de drogue. Nous pouvons assister à une attaque en direct filmée par le reporter français Roméo Langlois pour sont reportage La Colombie à balles réelles (disponible sur Youtube). Dans son reportage le journaliste se fait enlever par des FARC et sauve sa vidéo en jetant le film dans un buisson. Ce document est très important car il constitue un témoignage rare, mais aussi parce que des militaires meurent et prononcent leurs derniers mots à leur famille sous nos yeux. Cependant malgré ces opérations militaires le nombre d’attaques et de combattants des FARC est à la hausse même s’ils perdent des territoires.
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L’Etat perd le contrôle de certaines régions où il ne parvient plus à maintenir la démocratie. Une guerre civile déchire le pays et on peut assister à des dégradations de ses relations diplomatiques avec certains autres comme la France. Ainsi La France voyant que les militaires colombiens et le gouvernement ne parvenait pas à faire libérer l’otage Ingrid Betancourt, est intervenue militairement lors de l’opération du 14 Juillet 2003 et ce fut un échec. L’Etat dépense des sommes colossales pour payer ses 208 500 soldats. On estime que ses dépenses représentent 86 dollars par habitant/an (salaire moyen /an environ 6000$) et augmentent chaque année Les inégalités sociales se creusent car les FARC et autres guérillas confisquent les terres aux paysans qui refusent de coopérer, les coupant ainsi de leurs revenus . Les FARC eux gagnent des hectares cultivables pour leur culture de coca.
Affiche demandant la libération de tous les otages des FARC dont Ingrid Betancourt. Cette franco-colombienne, personnage politique important en Colombie, fut enlevée en 2002 lors de sa campagne présidentielle puis libérée avec d’autres otages plus de six ans après par les militaires colombiens en 2008.
1.3 Des populations désespérées et effrayées, poussées à intervenir Les manifestations des populations locales Dans les pays déchirés par les conflits liés aux stupéfiants la population vit dans une peur constante. Les guérillas occupent le centre de tous les esprits et sont au centre de tous les débats. En Colombie par exemple, Juan Manuel Santos a été réélu président en 2014 en mettant en avant la lutte contre les FARC qu’il a entamé dans les années 2000. Il représente un véritable espoir de paix pour les citoyens. Pendant son mandat précédent des pas vers la paix ont été franchis cependant la plupart des citoyens ne croient plus à la disparition des FARC. Les citoyens n’ont plus confiance dans les gouvernements et multiplient les manifestations. C’est le cas en Colombie mais aussi dans des pays comme le Mexique ou le Pakistan où les talibans s’emparent peu à peu du pouvoir du pays et avancent grâce à des armes achetées avec l’argent tiré (en grande partie) du commerce de l’opium.
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Après la disparition de 43 étudiants, les Mexicains continuent de manifester (ici à Acapulco, le 10 novembre) pour réclamer la vérité sur le sort qu’ont connu les futurs instituteurs le 26 septembre 2014 et montrer leur colère face au « narco-état ».
www.sudouest.fr
Manifestation contre les FARC et pour la paix en Colombie à Cali (Colombie) le 6 Décembre 2011
La création de groupes d’autodéfense Les Etats étant impuissants, voir même parfois corrompus par des infiltrations de mafieux ou FARC dans les fonctions gouvernementales ou dans les services de sécurité de certaines régions, le peuple est obligé de prendre les armes. On assiste en effet à la création de groupes d’autodéfense surtout en Amérique Latine. Ces groupes sont financés par des victimes potentielles des guérillas c’est à dire les propriétaires terriens, les paysans, les grandes entreprises étrangères propriétaires de terrain cultivables ou encore les organisations professionnelles comme la Fédération des cultivateurs de céréales d’Amérique latine ou plus localement en Colombie l’association des producteurs de bananes de l’Urabà. Le but principal de ces milices est de permettre aux paysans de conserver leurs terres, souvent confisquées par les cartels ou FARC pour accroitre toujours plus leur production de drogue, et de faire revenir la paix dans les régions hors contrôle. Les premiers groupes furent créés peu de temps après l’apparition des guérillas et portaient des noms évocateurs comme Muerte a los secuestrados (mort aux ravisseurs). Aujourd’hui la mise en place de groupes d’autodéfense est croissante notamment à l’ouest du Mexique. C’est le cas dans l’Etat du Michoacan où des hommes tentent de libérer des villages entiers
Les habitans de El Potrero, petit village du Mexique, défilent dans la rue en 2013 armés d’armes improvisées (morceaux de bois, barres de fer) pour protester contre l’enlèvement d’un chef d’un groupe d’autodéfense par le cartel des templiers.
Des soldats d’un groupe d’autodéfense dans le Michoacan au Mexique.
sans aide de l’armée.
La plupart des membres des milices sont des riches propriétaires de terres occupées ou des populations d’origines aisées . A l’image d’un chirurgien père de quatre enfants qui a confié au journal Le Monde la phrase suivante : « On fait juste le travail d’un Etat défaillant avec l’appui des riches propriétaires de terres occupées ».
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Cette lutte contre le cartel des Templiers a cependant plongé les groupes d’autodéfense dans l’illégalité. En effet ces civils sont lourdement armés avec des armes souvent prohibées, issues du trafic d’armes ou « récupérées sur les champs de bataille ».
Un conflit en trois camps Aujourd’hui les groupes d’autodéfense créent un conflit en trois camps et font passer leurs membres du statut de victimes à celui de bourreaux dans la mesure où ils font des victimes. Au Michoacan ils ont hoté la vie à 983 personnes en 2013. Depuis la fin des années 1990 ces groupes sont en effet devenus dangereux pour l’Etat car ils sont lourdement armés et se servent des exploitations de stupéfiants confisquées aux guérillas pour se financer. Alors malgré le soutien des paysans, comme en Colombie où des manifestations et plus de soixante-quinze lettres ont été envoyées au président en 1997 pour éviter l’expatriation des chefs de l’AUC (Autodéfense Paysanne Unie de Cordola) vers les Etats-Unis, des politiques de répressions importantes ont été mises en place comme des emprisonnements ou des expatriations.
Les groupes d’autodéfense sont passés de bras droit des gouvernements_ en Colombie les groupes d’autodéfenses ont été reconnus le 11 Février 1994 après avoir abattu plusieurs centaines de FARC qui voulaient s’emparer du pouvoir et voulaient se présenter aux élections_ à de nouveaux ennemis de l’Etat à éloigner, faisant ainsi augmenter les dépenses de l’ état pour faire revenir la paix sur le territoire.
Un conflit en trois camps Guérillas
Etat
Groupes d’autodéfense Se bat contre
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Une démédiatisation du conflit Le crime organisé et le trafic de drogue limitent certaines libertés fondamentales dans les pays où la production de drogue fait partie intégrante du paysage, comme la liberté d’expression et la liberté de la presse. Certains citoyens comme les journalistes se sacrifient pour informer les populations des actions des narcotrafiquants : entre 2006 et 2012 cinquante-trois journalistes mexicains ont été assassinés par les trafiquants et douze autres ont disparus. Aujourd’hui dans ce pays les journaux n’osent plus parler du conflit comme le grand quotidien Zocalo dont la plupart des journalistes ont reçu des menaces de mort. Ce désert médiatique n’a fait qu’empirer la situation car les pays étrangers et les habitants sont de moins en moins informés et ne savent plus quelle attitude adoptée face au problème. En effet tout journaliste, quelque soit sa nationalité, reçoit des menaces de mort quand il s’empare du sujet et souvent ces menaces sont mises à exécution comme pour le journaliste franco-espagnol Christian Poveda. Ce journaliste est mort assassiné le 2 septembre 2009, sur une route du Salvador (Amérique Centrale ) alors qu’il venait de finir le tournage de son documentaire La Vida Loca qui évoque la vie des jeunes du gang Mara 18 au Salvator. Dans ce pays, tout comme dans la majorité des pays d’ Amérique Centrale, des maras (nom des groupes) dont l’activité est la culture de stupéfiants (surtout de type drogue douce ) et le transfert de leurs récoltes aux Etats-Unis, se disputent des terres cultivables. Leur but est à la fois de tuer l’ennemi et se montrer plus fort que lui mais aussi de s’enrichir toujours plus en augmentant toujours plus la production. La Vida Loca de Christian Poveda est un documentaire de 90 minutes sortit en 2009. Il nous raconte le quotidien de membres d’une mara au Salvator qui vivent aux rythmes des fusillades, enterrements, désemprisonnements et des enlèvements.
Au Salvator les habitants vivent au rythme de la guerre qui oppose les deux maras d’Amerique Centrale , la Mara Salvatrucha et la Mara 18. Aujourd’hui comme 90% des homicides qui ont lieu au Salvator, le meutre de Poveda de quatre balles dans la tête en 2009 reste non-élucidé.
Les Maras phénomène transnational : des réseaux développés
blogs.mondomix.com
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La création de blogs anonymes sur internet Les médias étant dans l’impossibilité ou ne voulant plus relayer l’information de simples citoyens prennent donc la situation en main en créant des blogs anonymes dans lesquels ils appellent à l’aide au monde et divulguent des informations sur les activités des cartels, maras ou autres guérillas. Sur ces blogs tout le monde peut faire part de ce qu’il sait de manière anonyme à condition que les dirigeants du site approuvent l’informations.
Généralement les fondateurs de ces sites sont en très mauvaise position, « Envoyez des informations sur votre région et elles seront publiées de c’est le cas de Lucy (pseudonyme)
manière anonyme », appel à témoin lancé sur le site : www.blogdelnarco.com qui traite des actions des cartels mexicains.
héroïne anonyme qui tient l’un des principaux site d’informations sur le narcotrafic au Mexique appelé BlogdelNarco. Cette femme consacre sa vie et son argent à fuir les narcotrafiquants qui ont mis sa tête à prix depuis le création du site. Aujourd’hui elle vie en Europe mais des citoyens et des pseudos reporters continuent de faire vivre le site avec elle. Ce livre de 398 pages paru en avril 2013 fut écrit par les reporters du site dont ‘Lucy ‘ , qui figure sur la couverture le visage caché par un bandeau. A trente ans elle est devenue pour les mexicains une Héroïne nationale. Ce livre revient sur les Actualités les plus marquantes publiées par le site et les photos les plus violentes parmi toutes les photos ultraviolentes qui ont été publiées (d’une cruauté et d’une violence extrême bien trop violentes pour être relayées par la presse).
Les médias étrangers et locaux partagent un regard positif sur le travail des héros anonymes. Comme le célèbre quotidien britannique The Guardian
"As Mexico's media outlets stopped reporting on the cartels and the government remained silent, Blog del Narco, launched in March 2010, began to fill the void. The blog featured raw photos and videos of executions, and gun battles uploaded by anonymous contributors. Within months, Blog del Narco was one of the most visited websites in Mexico with 3milions monthly visitors. The blog documented the drug war in all its horror: photos of decapitated heads, mutilated torsos and other stomach-jarring acts of violence committed by organized crime to induce terror among the population.“* -The Guardian * Comme les médias mexicains ont arrêté d’évoquer les actions des cartels et que l’Etat semblait avoir mis ces préoccupations de côté, le BlogdelNarco lancé en Mars 2010 a commencé à remplir le vide d’information qui était entrain de s’installer. Le blog commença donc à divulguer des photos et des vidéos d’exécutions et de combats armés mis en ligne par des contributeurs anonymes. En quelques mois, le blog est devenu l’un des sites les plus visités au Mexique avec trois millions de visiteurs mensuels. Le blog couvre la guerre de la drogue avec toutes ses horreurs: des photos de têtes décapitées, des torses mutilés et bien d’autres actes à vous retourner l’estomac, commis par des bandes de crimes organisées qui veulent installer un climat de terreur au sein de la population.
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Non respect de la déclaration universelle des droits de l’Homme (1948) qui promulgue la liberté d’expression et le droit de divulguer des informations (article 19)
Non respect de l’article 19.2 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (1966) qui promulgue la liberté d’informer et le droit à l’information : « Toute personne a droit à la liberté d'expression ; ce droit comprend la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sans considération de frontières, sous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de son choix ». Les deux textes ont pourtant été ratifiés par le Salvator et le Mexique mais à cause d’une ingérence des conflits par l’Etat ces droits ne sont pas respectés.
L’ingérence de l’Etat amène la population à se faire justice elle même et à prendre des risques ce qui renforce le climat d’insécurité du pays. De plus ce manque d’intervention peut faire perdre la confiance qu’ont les citoyens en l’Etat et aux services de sécurité mis en œuvre pour les protéger (police, armée…)
Les Etats rencontrent ou vont rencontrer des problèmes d’intégration et d’isolement social à cause des gangs qui recrutent des jeunes adolescents en manque de repères. On entre dans une mara ou un cartel entre neuf et douze ans et la moyenne d'âge des membres est située généralement entre dix-sept et vingt ans. Après les gangs les vies sont brisées (prison…) et le chômage presque inévitable (ils rentrent dans la petite délinquance et sont obligés de continuer…).
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1.3 Le Mexique : une guerre silencieuse d’une violence extrême Depuis les années 1980 ce pays pourtant qualifié comme pays en paix est déchiré par une véritable guerre civile sous fond de trafic de drogue. Au départ pourtant cette guerre commence en Colombie avec la montée en puissance des FARC et du commerce de coca. Les FARC cherchent en effet un moyen de faire passer la drogue aux Etats-Unis par le nord du Mexique et mettent en place un réseau avec l’aide de petits délinquants mexicains. Cependant très rapidement les mexicains vont assister à une montée en puissance des gangs colombiens et des FARC qui ont trouvé en la drogue un moyen de financement efficace. Très rapidement les jeunes délinquants du nord vont profiter de leur localisation proche de la frontière des Etats-Unis et vont commencer à cultiver le coca et le pavot. Aujourd’hui, ce qui a commencé comme un petit business de producteurs indépendants, c’est transformé en véritable guerre de territoire. On estime qu’entre 40 et 50 % des mexicains seraient impliqués de près ou de loin dans l’un des cartels. Le narcotrafic: une manière simple de devenir millionnaire Sur le territoire mexicain on trouve une dizaine de cartels dont le plus important, le plus vieux et le mieux internationalisé est celui de Sinoala dont l’ex-patron Joaquín Guzmán a longtemps été l’un des hommes les plus recherchés au monde avant son arrestation le le 22 février 2014 . El Chapo de son surnom fait aussi partie des hommes les plus riches au monde avec une fortune estimée à plus de 3 milliards de dollars. Arrestation du trafiquant de drogue mexicain Joaquin Guzman, El Chapo le 22 février 2014 à Mexico. Il avait pourtant pas moins de 300 garde du corps…
Après s’être échappé d’une prison mexicaine en se cachant dans un panier de linges salles, les Etats-Unis ont lancé une vaste opération de recherche offrant cinq millions de dollars à toute personne qui donnerait des renseignements si ces renseignements menaient à l’arrestation de ‘El Chapo’. Le Mexique promettait aussi une récompense de trois millions de dollars.
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Documents sur El Chapo et le Sinaloa El Chapo, le narcotrafiquant qui vaut un milliard Il y a quelques jours, Joaquin Guzman, surnommé El Chapo, « le petit » en argot mexicain, a reçu le titre d'ennemi public n° 1 de Chicago (Etats-Unis), une mention qui n'avait pas été décernée depuis les années 1930. A l'époque, son titulaire n'était autre qu'Al Capone, figure des truands de la prohibition. « Pour moi, Guzman est le nouvel Al Capone », a estimé Jack Riler, agent spécialisé dans les affaires de drogues à Chicago, une ville gangrenée par le cartel d'El Chapo. « Son vice, son côté diabolique et son pouvoir » le rendent « clairement plus dangereux qu'Al Capone à son époque », a renchéri la Chicago Crime Commission. Il faut dire que le business d'El Chapo ne connaît pas la crise. Les services américains estiment qu'il a importé à Chicago au moins 1500 kg de cocaïne par mois pendant plusieurs années, se servant de cette mégapole comme plateforme pour inonder tout le Middle West de sa poudre blanche.
Ismael Zambada ‘ El Mayo’ dans "Proceso" en 2010 : "S'ils m'attrapent ou ils me tuent, rien ne changera". Zambada ex-bras droit de Guzmán et nouvelle tête pensante du cartel ne cesse de provoquer les autorités mexicaines qui luttent contre le Cartel dans ce qu’ils appellent la Guerre des drogues.
Le Parisien 03 Mars 2013, auteur non-indiqué
Article de presse français Les conflit avec les cartels mexicains sont les plus violents Cependant le cartel de Sinaloa n’est pas le seul cartel à cultiver sur le territoire mexicain où la concurrence est rude. En effet un véritable conflit s’est installé à cause d’un nombre de Cartels toujours plus important sur le territoire. Tout comme les FARC ou les maras leur but est de posséder toujours plus de terre, de produire toujours plus et de gagner des parts de marché. Comme l’expliquent des habitants de zones en conflits « Ces hommes seraient près à tuer leur famille pour quelques milliers de dollars ». En effet le nombre de victimes engendrées par ce conflit, l’élève tout en haut du classement des conflits les plus meurtriers et les plus violents. Les trafiquants font cinq sortes de victimes. Ils tuent : • des membres de cartels adverses • des journalistes et des personnages politiques • des paysans refusant de leur donner leur terre • des militaires et policiers (surtout depuis l’arrivée au gouvernement de Felipe Calderón fin 2006 et la mise en place d’offensives militaires) • des victimes civiles, victimes collatérales ou tuées pour effrayer la population
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Les exécutions se font aussi de manière violente, soit par armes lourdes ou par des moyens plus barbares, décapitations, découpages de corps, pendaisons, écartèlements, vidages d’organes… De plus au Mexique les cartels ont pour tradition d’exposer les corps de leurs victimes dans les rues pour faire régner la terreur. On estime ainsi qu’ entre 2007 et 2014 plus de 80 000 personnes ont été victimes des cartels et plus de 30 000 ont disparues, sans compter les millions de personnes qui ont été blessées physiquement ou psychologiquement par les cartels, c’est-à-dire la majorité des mexicains. Cependant on estime que depuis 2013 le nombre d’homicides est à la baisse.
Documents sur le Mexique A son arrivée au pouvoir en décembre 2006 le président Calderon lance de nombreuses offensives armées dans ce qu’il appelle la Guerre des drogues pour lutter contre le narcotrafic. Cependant ces assauts n’ont fait qu’alourdir le bilan d’homicides qui s’élevait à 50 000 entre 2007 et Mars 2012. Le nombre de victimes baissera lors de l’arrivée au pouvoir de Enrique Peña Nieto en 2012.
Tableau sur le nombre de membres des cartels tués à cause des conflits inter-cartels entre 2006 et 2010
america-latina.blog.lemonde.fr
Evolution du nombre d’homicides liés aux cartels au Mexique entre 2007 et Mars 2012
Le 13 Mai 2012, 49 corps ( 43 hommes et 6 femmes) découpés en morceaux sont retrouvés à 4h du matin sur une autoroute proche de San Juan. Il s’agirait de victimes du cartel los Zetas.
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4 mai 2012, 23 cadavres sont découverts, 14 décapités et 9 autres pendus à un pont de Nuevo Laredo, une ville violente près de la frontière américaine. Un drap avec un message du patron du cartel de Sinaloa, Joaquin Guzman est suspendu près des corps. Il est adressé au président mexicain et à un haut commandant des Zetas, Miguel Angel Treviño, dit "Z40". www.lemonde.fr
La frontière des Etats-Unis et du Mexique. La ville de Juarez (Chihuahua au Mexique) est tristement connue comme la ville la plus violente au monde. Aussi connue sous le nom de “capitale du meurtre”, c’est par ses frontières que transite la majorité des stupéfiants produits en amérique du sud. Depuis 2006 cette ville a connu près de 4 000 meurtres.
www.jordanb.fr
En 2006 les autorités mexicaines ont découvert 250 millions de dollars en liquide, une collection de fauve, une collection d’œuvres d’art et un arsenal de guerre en or massif au domicile d’un baron de la drogue à Mexico.
Les cartels disposent d’un véritable arsenal de guerre souvent issu du trafic d’armes. En Juin 2011, les autorités mexicaines ont réalisé l’une des plus importantes saisies d’armes avec pas moins de 215 armes saisies et plus de 29 000 cartouches.
Science et vie junior n°279,12/12 Science et vie junior n°279,12/12
Le Mexique plus violent qu’un pays en guerre: Comparaisons du nombre d’homicides dans ces pays durant les neuf premiers mois de l’année 2010
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Une société encadrée, surveillée et fortement militarisée : Les Mexicains vivent dans un pays dont l’un des objectifs principaux est de traquer, arrêter et emprisonner les membres des différents cartels. Les forces de police n’hésitent donc pas à arrêter toute personne susceptible d’avoir des informations et cela de manière arbitraire. L’armée encadre de manière importante les populations dans la mesure où 71% de ses effectifs sont déployés en permanence dans le pays . A noter que les citoyens ne font pas confiance à l’armée qu’ils jugent corrompue. En effet en 2011, 10% de ses 365 généraux étaient emprisonnés pour corruption ou complots avec l’un des cartels. L’Etat a donc mis en place une propagande importante (vidéos, affiches) vantant les exploits de l’armée. Le but de ces campagnes est de trouver de nouveaux soldats et de vanter les mérites de l’Etat mexicain en mettant en avant les avancées dans la lutte réalisée, mais aussi de contrer la propagande mise en place par les cartels. Le Mexique dépense aussi des sommes très importantes dans sa politique de lutte qui pourtant est très peu efficace. Le pays investit ainsi entre 2,5 et 4 milliards de dollars chaque année pour lutter contre le narcotrafic. Cependant beaucoup de géopoliticiens pensent que la dépense pourrait être deux fois plus considérable que ce qu’affirme le gouvernement mexicain. Une grande partie des dépenses part dans le financement d’agents de service d’Etat comme ceux du CISEN. Les politiques de luttes ne sont pas très efficaces à cause de l’omniprésence de la pauvreté qui pousse les jeunes à s’investir dans les cartels. Le narcotrafic creuse les inégalités au sein du pays. Le gouvernement est aussi très largement corrompu.
Pour la seule ville de Ciudad Juarez, près de 5 000 soldats lourdement armés ont été déployés en mars 2009
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2. Un impact négatif sur les relations des pays producteurs avec les autres pays ou organisations internationales Saviez-vous qu’en 2014 les Etats-Unis et l’Union Européenne étaient indirectement responsables de la mort de 3 485 soldats de l’OTAN (Organisation du Traité Atlantique Nord) et de celle de 13 700 policiers et militaires locaux durant la guerre contre les talibans en Afghanistan ? Cette seconde sous partie traite de l’existence de difficultés de certains pays exportateurs dans leurs relations avec le monde freinant ainsi leur développement.
2.1 Les frontières, véritable terrain de guerre Depuis le début du commerce parallèle des stupéfiants, les pays frontaliers aux pays exportateurs ont vu le nombre de conflits sur leur territoire augmenter de manière importante et ont rapidement compris que leur rôle était de freiner ces exportations. Qu’il soit simple pays de passage ou pays consommateur, leurs objectifs sont les mêmes, éviter la propagation des stupéfiants produits par leurs voisins au sein de leur territoire ou à travers le globe. Les pays frontaliers ont donc équipé leurs frontières de manière efficace en soldats. C’est le cas le long de la frontière de plus de 3 000 kilomètres qui sépare les Etats-Unis du Mexique ou dans les pays frontaliers à l’Afghanistan comme le Tadjikistan, pays par lequel passe une grande partie de la production afghane à base de pavot. www.herodote.net
La protection des frontières de l’Afghanistan Dans les pays aux frontières de l’Afghanistan souvent très pauvres la surveillance des frontières s’effectue avec leurs soldats et une aide internationale. Au Tadjikistan l’Etat recrute parmi les plus pauvres. Alors que le salaire mensuel par habitant ne s’élève presque jamais au dessus de 72 dollars, le pays offre une rémunération de 20 dollars par mois, nourrit et logé, à tout homme acceptant de « devenir soldat
L’ Afghanistan et ses frontières
des frontières ». Malgré le danger omniprésent, les soldats se battent tous les jours. Tous les ans des centaines de jeunes souvent âgés de moins de vingt ans quittent leur famille pour prendre les armes dans l’une des plus importante zone de non-droit du monde. Le long de la frontière de plus de 3 100 kilomètres de nombreuses zones très violentes sont recensées dont la plus dangereuse est sans doute Sari Gor.
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Les soldats se répartissent par groupes de cinquante dans des zones qui comprennent un habitat collectif et quelques miradors où des patrouilles tournent vingt www.lapresse.ca
quatre heures sur vingt quatre et sept jours sur sept. Cependant il est impossible de surveiller toute la frontière très longue et en majorité montagneuse . La création de ces unités a été permise par l’aide apportée par les pays consommateurs et par l’ONU et autres organisations, qui aident à se défendre ce pays très pauvre et en partie corrompu par les trafiquants afghans.
Soldat Tadjike qui monte la garde à la frontière, symbolisée par la rivière Piandj
Le but des occidentaux est d’intercepter la marchandise mais aussi d’éviter que les talibans pénètrent sur le territoire et lance une grande partie des tadjikes, qui trouveraient en la drogue un moyen de sortir de la misère, dans la production d’opium pour eux. Différentes organisations internationales débloquent donc des fonds pour équiper les soldats : •
l’OTSC (L'Organisation du Traité de Sécurité Collective) qui réunit l'Arménie, la Biélorussie, le Kazakhstan, le Kirghizstan, la Russie et le Tadjikistan.) et fournit des armes.
• l’ONU par le biais de l’ONUDC ( Office des Nations Unis contre la Drogue et le Crime) qui a permit en 2000 la création de l'Agence de Contrôle des Drogues du Tadjikistan. Ceci a permis d’augmenter le nombre d’interventions de 116% et donc d’augmenter le nombre de saisies.
Quelques origines des aides au Tadjikistan
Office des Nations Unis contre la Drogue et le Crime
L’Union Européenne
L'Organisation du Traité de Sécurité Collective
L’ Organisation du Traité de l’ Atlantique Nord ( Le secrétaire général de l'OTAN, Anders Fogh Rasmussen et le Président Rahmon à New York, le 22 septembre 2010)
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La protection de la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique La deuxième grande frontière de la drogue est entre les Etats-Unis et le Mexique. Elle mesure 3 200 kilomètres et est symbolisée par une muraille dont la construction a commencé en 2002. En 2006 le président George W.Bush a décidé de la consolider pour éviter l’immigration clandestine et limiter le passage de la drogue d’un pays à un autre. Mur érigé entre le Mexique et les Etats-Unis
Le mur devrait être achevé en 2017 et mesurer 4,5 mètres de haut. Il aura coûté entre 10 et 20 milliards de dollars.
Source : « We need a fence » (Association sécuritaire américaine)
La frontière est composée de deux barrières parallèles (fabriquées à partir de cylindres d’acier, de grillage et de béton) entre lesquelles passe une route destinée à la Border Patrol (patrouille d’intervention aux frontières composée de plus de 18 000 hommes à la frontière mexicaine). Devant chaque barrière est creusé un fossé destiné à empêcher l'approche de véhicules et devant chaque fossé, a été érigée une ceinture de barbelés de plus de deux mètres de haut. La frontière s’étant environ sur quarante mètres de largeur. Le mur est aussi équipé de milliers de miradors et de cameras de surveillance. La barrière est aussi composée de barrages www.lejdd.fr
routiers et de points de contrôle car le mur occupe 1/3 de la frontière. Les autorités américaines et mexicaines travaillent ensemble, les mexicains tentant de stopper de leur côté et les américains du leur. En 2012 les Etats-Unis auraient saisi plus de 1 000 tonnes de marijuana et
En 2010 les mexicains ont réalisé une saisie record de 105 tonnes de cannabis et arrêté 11 trafiquants.
3 000 tonnes de cocaïne. Après avoir été saisis les stupéfiants sont souvent brulés sous haute surveillance. Les Etats-Unis et le Mexique possèdent donc une frontière plutôt efficace. Cependant leur alliance va devoir redoubler d’efforts pour faire face à des narcotrafiquants de plus en plus ingénieux.
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Quelques moyens mis en œuvre par les trafiquants pour faire passer la drogue de l’autre coté du mur
Les douaniers américains ont découvert une cuve de dioxyde de carbone qui servait de propulseur à l’engin. Ils ont mis la main sur 33 barils de marijuana. Perte sèche pour les trafiquants : 42 500 dollars « On n’avait jamais vu ça avant. On a vu des catapultes, mais ça, jamais », commente Kyle Estes, porte-parole des gardefrontières américains, cité par le Global Post. L’inventivité des trafiquants ne connaît pas de borne - dernièrement, la police espagnole a interpellé une femme dissimulant de la cocaïne dans ses faux seins.
www.leparisien.fr
Trafic de drogue : après les catapultes, le canon
En janvier dernier un drone chargé de trois kilos de drogue s’est écrasé à Tijuana (Mexique) près d’un centre commercial.
Courrier international Claire Maupas 13 Décembre 2012
En Janvier 2012 un long tunnel destiné au passage de la drogue a été découvert entre le Mexique et l’Arizona. On estime qu’il existerait entre cent et deux cent passages dans ce genre entre les deux pays.
Les Etats-Unis consolident aussi leurs frontières en versant des aides à la majorité des pays d’Amérique latine ou en intervenant militairement afin qu’ils freinent le trafic et stoppent la drogue avant qu’elle n’arrive aux frontières. Cependant ces aides sont souvent perçues comme une humiliation par les sud américains qui se sentent contrôlés par les Etats-Unis et perdent aussi confiance en leur pays souvent incapable de gérer correctement le conflit sans aide extérieure.
Mexique : Aides des Etats-Unis dans la lutte contre le trafic de drogue Le président George W. Bush a sollicité l’aide du congrès américain afin qu’il accepte de débloquer dans un premier temps 500 millions de dollars sur le total prévu (1,400 millions de dollars) pour « l’initiative de Mérida », un plan d’aide au Mexique pour la lutte contre le trafic de drogue et le crime organisé, et 50 millions pour l’Amérique centrale Article extrait du « Diario de Yucatán » du 23/10/2007Traduit par Aline Timbert
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Le plan Colombie
libertad95.wordpress.com
Dès son élection en 1998 le président colombien Pastrana Arango décide de mettre en place un plan d’actions pour éliminer les FARC du territoire et ainsi réduire le narcotrafic. Très rapidement en 1999 les Etats-Unis décident d’intervenir militairement et financièrement car la majeure partie de la cocaïne colombienne (premier exportateur mondial de stupéfiants à base de coca) termine au mains des délinquants américains. En 2000 les américains entament ce qu’ils appellent une lutte antiterroristes en utilisant leurs bases aériennes pour lancer des avions de fumigation. Les « gendarmes du monde » ont aussi détruit les exploitations par voies terrestres.
Ce plan fut à l’origine de trois types de conflits importants : entre les colombiens et les américains, les colombiens avec leurs dirigeants, et la Colombie avec les associations de protection de l’environnement. En effet le quotidien El Tiempo tira la sonnette d’alarme dès 2000 en dénonçant que • Plus de 85 hectares de campagne ont été fumigés. • Les pesticides sont à l’origine de l’apparition de maladies chez les colombiens • La destruction de plusieurs centaines d’hectares de cultures légales (chômage, et pauvreté plus forts encore, de nombreux paysans victimes se sont d’ailleurs reconvertis dans la culture illégale) • La migration des paysans et habitants des campagnes vers les grandes villes (les FARC gagnent du terrain car les habitants partent).
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Des pays font preuve d’ingérence face aux conflits comme en Colombie ou encore en Afghanistan où l’Etat est trop faible pour contrôler les talibans. Cette impossibilité de gérer les conflits entraine l’ intervention des autres pays qui sont souvent néfastes (guerre, destruction) pour les habitants des pays cultivateurs en question, malgré que ces mesures puissent rassurer une partie de la population. Les pays frontaliers souffrent de leur proximité avec l’Etat producteur. Ils se retrouvent sur le chemin de la drogue et voient une partie de leur population s’allier aux trafiquants, des combats éclater (insécurité) mais ils ont un rôle clé dans la lutte contre le commerce de la drogue. Cependant ces pays souvent pauvres ne disposent pas des moyens nécessaires pour se défendre et doivent laisser d’autres pays intervenir à leur place.
Le Mexique est un cas à part : Il est à la fois à la frontière entre des pays exportateurs (d’Amérique du Sud) et un pays consommateur (Les Etats-Unis), tout en devenant lui-même un pays exportateur car il a au début très mal protégé ses frontières du sud. Aujourd’hui grâce à sa proximité avec un pays consommateur (les Etats-Unis) il défend ses frontières au nord contre la sortie de stupéfiants de son pays. Mais il a du mal à contrôler le fléau au sein de son territoire (cartel) et sa frontière sud est beaucoup moins bien protégée que celle du nord (malgré les mesures mises en œuvre). De ce faite les trafiquants de toute l’Amérique Latine parviennent à acheminer leur production au Mexique. Ceci cause un problème majeure pour ce pays transformé en véritable ‘stocks’ de drogues. Ces problèmes ne permettent pas aujourd’hui de classer le pays comme pays émergent (BRICS). Les économistes classent en effet le Mexique parmi les "MINT" (Mexique, Indonésie, Nigeria ,Turquie) futures pays émergents. Selon les économistes le Mexique s’affirmera comme une puissance très importante quand il réussira son combat contre le narcotrafic .
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2.2 Les pays consommateurs premiers financiers des talibans
La guerre d’Afghanistan
En 2001 au lendemain des attentats du 11 Septembre perpétrés par Al-Quaïda Afghanistan et son chef Oussama Ben Laden, les Etats-Unis interviennent en Afghanistan dans le cadre d’une coalition internationale regroupant les membres de : •
L’OTAN (France, Canada, le Royaume-Uni, Belgique…)
• du FIAS (Force Internationale d‘Assistance et de Sécurité) • de d’Alliance du Nord (Afghans contre les talibans). Leur but est de chasser les Talibans du pouvoir, car islamistes, ils fournissent une aide précieuse (des fonds et une terre) à Al-Quaïda. Cependant cette guerre contre les talibans s’est révélée beaucoup plus difficile que prévu. En 2014 après plus de 13 ans de guerre (2001-2014) les occidentaux, qui ont tout de même réussi à chasser les talibans du pouvoir, se retirent en affirmant qu’il était impossible de venir à bout des talibans. Les occidentaux ont compris qu’ils étaient responsables de cette guerre, non pas parce qu'ils l’ont déclarée mais parce qu‘ils l’ont causée en finançant indirectement les talibans et Al-Quaïda. En effet les pays en guerre contre les talibans sont aussi leur principaux clients… Les talibans et l’Opium Aujourd’hui l’Afghanistan produit 90% de l’Opium mondiale. Cette production a débuté à grande échelle à la fin des années 1980 quelques années avant que les Talibans venus du Pakistan commencent à apparaitre en Afghanistan( 1994). Les sociologues remarquent très rapidement un parallèle très clair entre l’évolution du nombre de talibans et l’augmentation de la production de pavot dans le pays. En 1996 les insurgés talibans s’emparent du pays en,
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assassinant le président lors de la prise de Kaboule où ils apparaissent armés de nombreuses armes lourdes et de chars. Ils se sont servit du pavot cultivé dans les champs mis en place pour s’armer et se préparer à la guerre. Selon l’ONUDC en 2012 le pavot a rapporté plus de 700 millions de dollars aux talibans et chaque année ce
De nombreux paysans se tournent vers la culture de pavot beaucoup plus lucrative : 172 dollars (128 €) par kilo d’opium séché contre moins de 1 dollar (0,75 €) pour le même poids de blé
chiffre serait en croissance. Le pavot leur a en effet servi par la suite à financer la guerre contre les occidentaux. Sans la drogue ils auraient plus facilement été éliminés par l’OTAN et n’auraient pas obtenu le soutien d’une grande partie de la population. Dès l’arrivée des forces armées, les talibans ont besoin de fonds, malgré les répressions des années précédentes (en 2000 ils interdisent la production de pavot dans certaines régions),ils se sont mis à encourager le développement d’exploitations de pavot. Ainsi en 2013, selon l’ONUDC, le nombre d’hectares cultivés dans le pays aurait été multiplié par plus de vingt-six par rapport à 2001 et s’élevait à environ 210 000 hectares. Pour financer leurs combats, les talibans encouragent le trafic et la mise en place de la culture de la plante au plus grand bonheur des paysans. Les cultures illicites rapportent jusqu’à 30 fois plus. Par conséquent les paysans ne craignent plus les talibans et les voient parfois comme des bienfaiteurs. Le fait que le peuple et les paysans soutiennent les terroristes n’a pas pas facilité l’intervention des occidentaux. Plus de 50% des paysans afghans sont impliqués et parmi eux nombreux se sont battus au côté de terroristes. La culture du pavot est souvent vue comme le seul moyen de gagner sa vie. Des talibans Afghans
Pendant la guerre, certains paysans aident les
Les consommateurs d’héroïne ont financé deux terroristes en tentant simplement de subsister décennies de guerre en Afghanistan. Ils ont permis à des terroristes de s’emparer du pouvoir et de supprimer mais d’autres coopèrent avec les guerriers. Les les libertés fondamentales en Afghanistan. Les Consommateurs sont en partis responsables des attentats soldats partient se battre ont ainsi découvert du 11 septembre 2001 réalisés par Al-Quaïda et financés en grande partie par les talibans rétribués par les que les talibans repoussaient souvent leurs consommateurs de stupéfiants. Enfin les talibans bien armés ont tué beaucoup de soldats issus offensives à après les récoltes, pour être le des pays de leurs clients, certains soldats finançaient eux-mêmes leur ennemi avec leur propre consommation. mieux équipés possible dans leurs attaques.
La culture de pavot pourtant contraire à leur religion aurait raporté aux talibans plus 400 millions de dollars entre mars 2011 et mars 2012 grâce à des taxes lourdes imposées illégalement sur la production de pavot des paysans. Ainsi les revenus du pavot sont divisés en trois entre trafiquants, talibans et paysans.
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Si aujourd’hui l’Etat n’agit pas de manière significative contre l’extension des cultures de pavot sur son territoire, c’est qu’il est trop faible face aux talibans dans certaines régions et qu’il est aussi largement corrompu. L’ONU a affirmé que plus d’un élu afghan sur deux est intéressé financièrement « de près ou de loin » au trafic.
Les estimations divergent (en vert celles de l’ONDUC en noir celles d’autres associations )
L’évolution de la culture de pavot en Afghanistan On observe qu’en 2001 il y a une baisse considérable de la production car les talibans ont mis en place des mesures de répression importantes en 2000 car la drogue est contraire à l’islam. Cependant en 2002 la production reprend quasiment son niveau de départ car les talibans en guerre soutiennent de manière importante la production. En 2014 le nombre d’hectares a encore augmenté et est passé à un niveau 28 fois supérieur à celui de 2001.
« L’année dernière, l’héroïne afghane a tué plus de 100.000 personnes dans le monde, ce qui dépasse le nombre des victimes de la bombe atomique larguée sur Hiroshima et cela sans compter le nombre de soldats tombés sous leurs balles… » Viktor Ivanov, directeur du Service fédéral russe de contrôle des stupéfiants (FSKN), 2010.
Jeunes enfants travaillant dans un champs de pavot dans la province de Helmand. En Afghanistan on estime que près de 35% des enfants âgés de 5 à 14 ans travaillent, dans la province de Helmand, principale région productrice de pavot ( 40% de la production du pays) et plus de la moitié des enfants travaillent dans des champs de pavot. Ceci inquiète l’Unicef car non seulement ces enfants ne sont pas scolarisés mais ils développent aussi une addiction dès leur plus jeune âge à la drogue qu’ils produisent.
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La toxicomanie ravage le pays. Les afghans sont entourés par la drogue. On compte plus de 1,6 millions de cas de toxicomanie graves pour une population de 30 millions d’habitants, dont 300 000 enfants âgés souvent de moins de 10 ans. Dans ce pays l’opium est souvent utilisé comme seul remède disponible pour les familles. Elle sert aussi à calmer les enfants en cas d’exitation, les aide à s’endormir (bouillon à base d'opium). Du fait de la forte utilisation de l’opium, l’une des seule ressources disponibles sur place, de nombreux enfants décèdent. Cependant des ONG, comme l’ONUDC, Unicef ou Wadan ont mis en place des centres de désintoxication pour les enfants comme celui de Jalalabad dont le plus jeune patient a tout juste trois ans. Dans ces centres les enfants recoivent des traitements médicaux et en cas de crise de manque grave des douches froides. On leur apprend aussi à vivre leur vie d’enfants (jeux), car ces enfants sont souvent issus de familles pauvres et travaillent pour la plupart dans des champs de pavots. La mise en place de centres et de campagnes anti-opium financés par les ONG pourraient être décisive pour l’avenir du pays où plus de la moitié des habitants ont moins de 18 ans. La Guerre en Afghanistan aura coûté la vie à plus de 12 0000 civiles, 30 000 soldats afghans (armée et Alliance du nord) et à de nombreux soldats occidentaux dont 89 français. L’arrêt de la production d’opium est aujourd’hui très peu envisageable même si depuis la fin de la guerre les talibans détruisent certaines exploitations (très peu) car la culture et la consommation de drogues est contraire à la religion musulman. Le problème c’est qu’aujourd’hui cette culture ne s’arrêtera que lorsque les occidentaux arrêteront eux mêmes de consommer des drogues dures et que la toxicomanie disparaitra en Afghanistan. Sans être pessimiste, cela n’est pas envisageable dans un avenir proche. De plus l’arrêt de la production de pavots en Afghanistan serait à l’origine d’une crise financière grave pour ce pays car le pavot représenterait entre 40% et 60% de son PIB. L’autre problème c’est que le pavot (beaucoup plus lucratif) entraine la baisse des cultures céréalières. En effet les paysans se tournent d’avantage vers la culture de ce stupéfiant illicite et le pavot remplace de plus en plus la culture alimentaire. Ceci fait peur à certains spécialistes car l’Afghanisan à une croissance démogrophique importante et rapide. La population devrait atteindre plus de 50 millions d’individus d’ici 2025 et si la quantité de pavot cultivée ne diminue pas, le pays pourrait rencontrer des difficultés à nourrir sa population.
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2.3 La narco-déforestation : destruction du patrimoine mondial naturel et extermination des peuples autochtones L’ Amérique du Sud possède sans doute l’un des patrimoines naturels les plus importants au monde avec la forêt Amazonienne considérée comme le poumon vert de notre planète. Il est donc important de la protéger et de nombreuses associations comme Greenpeace ou WWF ont lancé des campagnes de sensibilisation afin de lutter contre la déforestation. De grandes parties de la forêt sont aussi des parcs naturels ou inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO.
www.la-croix.com
La forêt en chiffres en 2011 390 milliards d’arbres 63% de la forêt est Brésilienne 2,5 millions d’espèces d’insectes 40 000 espèces de plantes 3 000 espèces de poissons, 1 294 espèces d’oiseaux 427 espèces de mammifères 427 espèces amphibiens et 378 reptiles La narco-déforestation détruit le patrimoine mondial naturel Le narcotrafic commence à prendre une place importante dans la forêt, endroit propice à la
culture car peu accessible aux forces de l’ordre. En effet depuis la mise en place de mesures de lutte dans les pays, les trafiquants se sont peu à peu retranchés dans la forêt. Les trafiquants ne déforestent pas seulement pour réaliser des plantations mais aussi pour mettre en place des routes et pistes d’attérrissage clandestines nécessaires à l’acheminement de la drogue, vers les Etats-Unis. Ainsi des photos récemment prises du ciel du Honduras, du Guatemala et de Nicaragua montrent largement de nombreuses routes qui balafrent tristement le paysage. Des chercheurs ont démontré qu’entre 2007 et 2011 au Honduras la déforestation aurait quadruplé et dans la même période les maras ont aussi augmenté de manière importante leurs exportations alors que de nombreuses exploitations étaient détruites près des villes. En 2011 des trafiquants se seraient même installés dans la réserve biosphère de Rio Platano, patrimoine mondial de l'Unesco et dans le parc national de la Laguna del Tigre (Guatemala) où la déforestation a augmenté de 5 % à 10 % en sept ans.
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Les trafiquants n’utilisent pas seulement les terrains pour cultiver mais aussi pour blanchir, l’argent de leur trafics. www.tdg.ch
Ainsi ils mettent en place l’élevage intensif de bovins et la culture d’huile de palme.
Une culture de coca vue du ciel au Honduras
La forêt du Honduras est rasée au profit de routes servant au transport de la drogue.
Image Greenpeace contre l’élevage de bovins en forêt Amazonienne. L’élevage bovin est responsable à 61% de la destruction de la forêt.
Les narcotrafiquants exterminent les peuples autochtones L’aménagement des espaces amazoniens par les trafiquants est à l’origine de conflits d’usage importants les opposant aux populations indigènes vivant dans la forêt. La forêt amazonienne abriterait des centaines de tribus vivant en autarcie et isolées de notre monde. Pourtant depuis quelques années certaines tribus sortent de leur isolement pour tirer la sonnette d’alarme et demander de l’aide aux Etats, Comme l’a fait en 2012, une tribu inconnue du Venezuela, les Yanomamis, qui voyaient depuis quelques années leur territoire se faire envahir par des narcotrafiquants et des chercheurs d’or. Cet appel à l’aide intervient après la mort par balles d’une dizaine d’entre eux. Des membres de la tribu Yanomami
En effet les indigènes souffrent de mauvais traitements : Les trafiquants sont près à tout pour s’emparer de leurs ressources. Ils utilisent les ressources d’eau pour leur culture et veulent s’emparer de leurs « villages » souvent situés dans des endroits stratégiques. Pour parvenir à leurs fins, ils n’hésitent pas à empoisonner la nourriture (souvent fruits) des tribus ou bien à les recruter de force pour s’occuper du bétail ou encore pour gérer les récoltes.
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Aujourd’hui les pays comme le Venezuela ou le Honduras ne parviennent pas à aider ces peuples et dénient même certains événements décrits par les indigènes (comme leur mort). Ainsi en 2012 après la plainte des indigènes le président Maldonado a déclaré « qu’il n’y avait aucune trace de personnes décédées ni même de maisons ou ‘shabono’ (maison communautaire) incendiées parmi les communautés censées avoir été victimes de ce crime » par la suite son ministre de l’Intérieur Tareck el Aissami a affirmé que « la zone ne semblait présenter aucun signe de violence et par conséquent aucune enquête ne serait lancée ». Ce refus des gouvernements à défendre les indigènes les entraine dans des procès notamment avec des associations de protection des peuples de la forêt Amazonienne ou avec l’ONU. Selon l’ONU les gouvernements doivent aider les peuples indigènes et les traiter comme tout être humain possédant desles droits Déclaration de l’ONU sur droits des peuples autochtones: Article 8.2 Les États mettent en place des mécanismes de prévention et de réparation efficaces visant : (a) Tout acte ayant pour but ou pour effet de priver les autochtones de leur intégrité en tant que peuples distincts, ou de leurs valeurs culturelles ou leur identité ethnique; (b) Tout acte ayant pour but ou pour effet de les déposséder de leurs terres, territoires ou ressources; (c) Toute forme de transfert forcé de population ayant pour but ou pour effet de violer ou d’éroder un quelconque de leurs droits; (d) Toute forme d’assimilation ou d’intégration forcées; (e) Toute forme de propagande dirigée contre eux dans le but d’encourager la discrimination raciale ou ethnique ou d’y inciter.
Les américains ont montré l’existence de ces exploitations au grand public car malgré les plaintes des indigènes, les Etats ignoraient ou faisaient mine d’ignorer la situation. . En Janvier 2014 des chercheurs américains ont publié leur rapport, intitulé « Drug policy as Conservation policy: Narco-deforestation » dans une revue scientifique pour dénoncer ce qu’ils jugent que les Etats ont mis de coté. Ce rapport a d’ailleurs créé des tensions lors du Congrès mésoaméricain des aires protégées de Mars 2014 (Costa Rica). La difficulté d’accès aux lieux décourage les Etats. Les pays qui préfèrent parfois sacrifier les droits des indigènes plutôt que de dépenser de l’argent dans des enquêtes et dans des moyens d’intervention. Cependant depuis peu, les Etats-Unis apportent de l’aide aux gouvernements pour détruire les routes et les pistes d’atterrissage des trafiquants. Les associations environnementales engagent des poursuites pour non-respect de l’environnement. Les Etats perdent aussi des ressources naturelles précieuses et spécifiques à leur territoire, ce qui va à l’encontre du développement durable.
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3. Des pays consommateurs non épargnés par les problèmes liés à la drogue Saviez-vous que depuis le 1er Janvier dernier plus de 600 européens sont morts d’une overdose ? Et que les jeunes Français sont en tête des consommations de cannabis au niveau européen ? Cette troisième et dernière sous partie évoque les problèmes liés à la drogue que connaissent les pays consommateurs et leur volonté de stopper le marché par tous les moyens.
3.1 La toxicomanie, un véritable problème de société Dans les pays consommateurs, les stupéfiants sont à l’origine de nombreux problèmes sociaux. Tout comme dans les pays producteurs des ‘gangs’ se mettent place pour vendre en toutes inégalités toutes sortes de stupéfiants et des meurtres ont lieu dans le cadre du marché. Cependant dans ces pays un autres phénomène s’est développé : la toxicomanie qui isole toute une partie de la population.
Estimation du nombre de consommateurs de cannabis en France métropolitaine parmi les 11-75 ans * en 2011
La consommation de substances Source : infographie OFDT
illicites, importantes dans les pays du nord, s’explique par le fait que
Expérimentateurs 13,4 millions
les populations ont les pouvoirs
dont actuels 3,8 millions
d’achat nécessaire pour s’en procurer. En France par exemple plus de
dont réguliers 1,2 millions
50% des personnes âgées de 25 ans auraient expérimenté au moins un stupéfiant illicite au cours de leur vie.
Expérimentateurs : ayant consommé au moins une fois dans leur vie Actuels : consommateurs dans l’année Réguliers : au moins 10 consommations de canabis dans le mois
Cependant ce n’est pas le consommation « expérimentale » qui pose problème mais bien la consommation régulière qui mène parfois jusqu’à la toxicomanie. Le problème de la consommation régulière est d’ailleurs traité par des sociologues comme ceux de l’OFDT (Observatoire Français de la Drogue et de la Toxicomanie) qui déterminent le profil type des toxicomanes et des consommateurs réguliers. En Europe par exemple la consommation régulière commencerait entre 14 et 20 ans et concernerait surtout des personnes de sexe masculin issues de banlieues ou de familles aisées. Généralement «les consommateurs réguliers » consomment des drogues douces et ne sont pas forcément isolés par la société ce qui les différencie des toxicomanes qui eux consomment surtout des drogues dures, des médicaments et des hallucinogènes. Un toxicomane est une personnes souffrant d’une dépendance physique et psychologique à un ou plusieurs stupéfiants ce qui entraine souvent des difficultés d’intégration dans la société et peut causer sa mort prématurément.
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En France le nombre de morts par surdose tant à se stabiliser aux alentours de 350 morts par an, ce qui est beaucoup moins important que 20 ans plutôt ou il y avait 100 morts de plus. Ce pic de mortalité représente le début de l’importance du marché en Europe. La baisse à la fin des années 1990 correspond au développement www.ofdt.fr
des traitements de substitution aux opiacés et d’un recul du nombre de consommateurs d’héroïne. Après cette période, où la consommation avait baissé, le nombre de décès va réaugmenter mais de manière moins importante qu’entre 1985 et 1994 où ce nombre avait triplé en 10 ans. Parmi les victimes comptabilisées dans le graphique on trouve des toxicomanes morts par surdose mais aussi des patients souvent âgés morts après une surdose de médicaments ou un suicide due à un traitement. C’est ce genre de décès qui font la différence dans les bilans depuis le début des années 2000. On peut aussi remarquer que plus de 75% des morts par surdose sont des hommes. La toxicomanie comme indiqué précédemment est à l’origine de problèmes d’isolement social. Très peu de toxicomane ont des conditions de vie stables, un emploi, un domicile ou encore une famille. La majorité d’entres eux sont des personnes ayant rencontré des difficultés d’ordre personnel et qui se sont lancées dans la consommation dans le but de
Downtown Eastside un quartiers aux allures de pays du sud. Ici des toxicomanes attendent l’ouverture de la pharmacie.
« se soulager ». Mais en se lançant dans cette consommation ils s’isolent de plus en plus et en s’isolant de plus en plus ils consomment de plus en plus. La toxicomanie est un cercle vicieux du quel il est difficile de sortir. De plus les toxicomanes perdent pour la plupart le sens des réalités du fait de leur consommation excessive et commettent des délits voire des crimes ou se prostituent pour acheter leurs doses souvent très coûteuses. Ainsi le quartier de toxicomanes Downtown Eastside de Vancouver au Canada est l’un des plus dangereux quartiers au monde où pas moins de 800 personnes auraient disparues depuis les années 1980. Dans ce quartier les toxicomanes vivent dehors ou dans des hôtels délabrés.
La prostitution est très présente dans le quartier, car les femmes sont prêtes à tout pour l’héroïne. De nombreuses femmes disparaissent dans le quartier certaines sont victimes de meurtres. Ce livre est une mémoire aux victimes de Pickton, le boucher de Vancouver qui aurait tué entre 6 et 49 héroïnowomen et les a découpées et données en pâture à ses bestiaux a vendu leur chair à ses clients et à des 54 entreprises de cosmétique.
D’autres documents sur la place de la drogue dans les pays du nord économique La France est le premier consommateur de drogue douces et de tabac en Europe.
Campagne de prévention française contre l’usage de stupéfiants avec la conduite Dans les pays du nord, drogue et routes font des ravages. En effet la drogue ne tue pas que par surdose mais aussi par la route et peut emporter avec elle des gens qui n’en n’ont jamais consommé.
L'usage de drogues est parmi les vingt principaux facteurs de risques sanitaires à l'échelle mondiale et l'un des dix principaux dans les pays développés. Les problèmes liés à l'usage de drogues sont souvent associés à l’apparition d’autres problèmes de santé comme le sida, l'hépatite, la tuberculose, le suicide, le décès par surdose et les maladies cardiovasculaires. Ainsi 30 % des cas d'infections à VIH sont causés par ce mode de transmission dans les pays du nord. La drogue est aussi à l’origine de décès de personnes innocentes notamment sur les routes ou victimes de personnes ayant perdu l’esprit ou du VIH propagé par les toxicomanes.
Campagne de prévention canadienne contre l’usage de stupéfiants avec la conduite
Les toxicomanes ont tendance (surtout en Amérique du Nord) à se réunir entre personnes isolées dans des quartiers ou la police et l’Etat perdent totalement le contrôle. Dans ces quartiers où règne une terreur constante les politiques mises en place par l’Etat ne sont souvent pas appliquées. Le Canada qui pénalise par de la prison l’usage de stupéfiants, laisse les gens se droguer sur les trottoirs de Downtown Eastside. Tout comme les pays du Sud, les pays du Nord sont dépassés. Dans certains pays la consommation tant à augmenter ce qui a un impact sur l’augmentation de la production.
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3.2 Les pays consommateurs, dernier maillon du trafic Vénissieux les Minguettes (France) ou encore les quartiers sensibles Marseillais partagent des problèmes communs: un trafic aux pieds des immeubles, des meurtres, des habitations délabrées, des populations effrayées et une police absente car zone de non-droit… En effet les quartiers « sensibles » des pays consommateurs constituent le dernier maillon d’un trafic partant d’Asie, d’ Amérique latine ou encore d’ Afrique. Le trafic est très bien organisé, généralement seul trois des personnages du réseau son sur le terrain : les sous chefs ou sous sous chefs qui approvisionnent les vendeurs et
Les Minguettes, Vénissieux 69 France, classé comme l’un des quartiers les plus difficiles de France, il est une véritable zone de non-droit, les policiers y ont difficilement accès.
viennent récupérer l’argent « des deals » régulièrement pour éviter de perdre trop en cas de descentes de police, les dealers (aussi vendeurs ou charbonneurs). Les vendeurs sont souvent les plus exposés aux dangers et les plus souvent arrêtés. Souvent jeunes (entre 16 et 18 ans) ou clandestins, ils vivent sous la menace permanente des chefs. En effet en cas d’arrestation, ils ont pour consigne de ne rien dire sur qui sont les autres membres du réseau et sur où se cache la drogue. En bas de l’échelle on trouve les guetteurs, souvent de jeunes mineurs ( 13-14 ans) déscolarisés. Leur rôle est de guetter l’arrivée de clients, de les compter pour permettre le réapprovisionnement des dealers et enfin de signaler la présence de
Deux guetteurs dans la cité de Bassens à Marseille 15eme
policiers. Dès 13 ans le revenu moyen de ces membres les plus bas du réseau est d’environ 2 500 euros ce qui les encourage à continuer. Un jeune interviewer par BFM tv en 2012 a d’ailleurs dit "je ne vais tout de même pas travailler pour mille euros par mois...". Une fois que les jeunes rentrent dans ce trafic, ils y restent. Ce trafic a lieu à l’intérieur des cités à l’abris des regards et des policiers dans les halles ou les caves des immeubles. Ce trafic est mobile, ils changent d’emplacements régulièrement afin de ne pas laisser le temps aux enquêteurs de trouver ‘les planques’. Les planques prennent souvent place dans des boîtes aux lettres vandalisées, dans des caves ou encore plus curieux, dans les aérations de certains immeubles. Ainsi dans le reportage intitulé Marseille quand la jeunesse dérape diffusé sur NT1, les policiers sont alertés de la présence de drogues et d’armes lourdes cachées au fond d’une cave dans un parasol plié par un dealer arrêté.
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Les habitants des immeubles entrepôts vivent dans la peur permanente et côtoient les trafiquants tous les jours. Ils savent que les hommes sont armés et nombreux et ne peuvent par conséquent pas intervenir même s’ils le souhaiteraient. Dans les cités sensibles de France les habitants descendent dans la rue pour manifester et demander un meilleur encadrement des jeunes et plus archive.francesoir.fr
d’effectifs de police notamment après des règlements de compte. En 2012 par exemple dans la seule ville de Marseille, 24 règlements de compte très violents ont eu lieu. Ce chiffre est en moyenne de par 20 par an. Généralement dans la cité phocéenne les corps sont ensuite brulés et laissés sur place jusqu’à ce qu’un habitant appelle la police. On retrouve donc une forte violence dans les pays consommateurs qui se rapproche des violences mexicaines même si c’est dans une moindre
Les descentes de police se font rares et quand elles se réalisent les policiers se déplacent en groupes mobiles dans toute la citée. Les attaques sont programmées. Généralement dans les 40 cités citées seule l’élite intervient, c’est à dire la BAC (Brigade Anti-Criminalité), les CRS (Compagnie Républicaine de Sécurité) ou la BRI (Brigade de Recherches et d’Interventions).
mesure. lci.tf1.fr
Les chiffres d’affaires des dealers de la Castellane à Marseille
Règlement de compte dans la cité des Bleuets, à Marseille, le 13 Mars 2013
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Comme dans les pays du sud les populations des cités sont terrorisées et ne se sentent plus en sécurité dans leurs immeubles. Ce sentiment vient souvent s’ajouter à de nombreuses difficultés de précarité et de chômage. Or c’est justement ce sentiment de délaissement et de misère qui fait plonger les jeunes très tôt dans le cercle vicieux du trafic de drogue. Ils ont grandi au milieu du trafic et rentrent dedans pour sortir de la misère, pour se sentir en sécurité (avoir des armes) et ne pas être isolés par les autres jeunes. Tant que le trafic restera dans les cités françaises, malgré tous les moyens de prévention mis en place (car ils ne vont souvent pas à l’école ou le sujet est tabou dans « les écoles sensibles ») l’argent facile continuera d’attirer des jeunes. Les dealers détériorisent encore plus les bâtiments pour mettre en place leurs planques ou pour marquer leur territoire. Les populations, tout comme en Amérique latine, manifestent et s’arment pour se protéger dans les cités. Le trafic de drogues est presque systématiquement associé au trafic d’armes. Ainsi on assiste à une banalisation du port d’armes dans les banlieues difficiles. En France on estime que près de 30 000 armes circuleraient illégalement sur le territoire. Ces armes, souvent venues d’Europe de l’Est et achetées sur Internet, servent aux trafiquants de moyens d’intimidation, de moyens de défense contre la police et pour garder leur territoire (règlements de compte…) mais plus inquiétant encore d’armes pour commettre des attentats. Dans les cités ou quartiers pauvres d’Europe on assiste en ce moment à la montée des extrémismes religieux. C’est pourquoi la lutte contre le trafic de drogues devient de plus en plus importante car il permet aux terroristes de financer leurs départs aux Djihad et leurs armes. Le budget annuel de l’Etat en terme de police contre le trafic de drogues est de 500 millions d’euros par an. Cependant seul un peu moins de 20% des stupéfiants sont saisis (frontières, cités) et on estime même que le commerce se développerait. En effet les ventes ont de plus en plus lieu non stop avec des relais de vendeurs et des changements de lieux de ventes fréquents alors qu’au début des années 2000 elles avaient surtout lieu entre 6h et 23h. Certaines personnes dénoncent la corruption et l’implication des forces de l’ordre dans le trafic. Ainsi tout comme dans les pays producteurs, certains membres des forces de l’ordre ont cédé à l’appât du gain. En 2012 7 policiers « ripoux » de la Brigade anti-criminalité (BAC) de Marseille ont été arrêtés. Ils revendaient la drogue saisie chez les dealers.
Manifestation à Marseille contre les violences et le manque d’intervention policière dans les cités
Des jeunes vandalisent une voiture de police dans la cité de Clichy sous Bois (93) en 2010
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3.3 Les politiques pour aider, dissuader ou punir la consommation de stupéfiants Les gouvernements des pays consommateurs ont rapidement compris que les solutions aux problèmes engendrés par les stupéfiants ainsi que leur commerce dans le monde reposent sur eux et sur les mesures qu’ils prennent pour : 1) Empêcher l’apparition de nouveaux consommateurs 2) Aider les toxicomanes et consommateurs réguliers à freiner/stopper leur consommation Le premier objectif de ces pays est de dissuader les jeunes de commencer à toucher à la drogue. Les Etats mettent donc en place tout d’abord de la prévention. Cette prévention peut passer par l’école : dans la majorité des pays du nord les élèves étudient en sciences les effet des drogues sur le cerveau et les dangers de sa consommation. En France dès le primaire l’enfant va entendre parler des drogues . Les pays ont compris que la prévention devait encadrer les jeunes à tous les âges : Aux Etats-Unis, l’un des pays les plus touchés par la drogue et son commerce, la prévention passe par le biais de dessins animés et de jeux ludiques pour les plus jeunes et par des campagnes montrées dans les écoles (spots publicitaires, affiches…). La prévention s’adresse aussi aux parents et à l’entourage des personnes fragiles. De la documentation gratuite est d’ailleurs distribuée aux parents demandeurs dans de nombreux pays . Au Canada en 2008 tous les parents ont par exemple reçu des invitations pour participer à cinq ateliers de prévention contre l’usage de la drogue des enfants d’âge scolaire organisées par le SSDCO (Service de Sensibilisation aux Drogues et aux Crimes Organisés de la gendarmerie royale du Canada). Les ateliers ont prit place dans pas moins de 152 villes et communautés canadiennes.
Campagnes pour les enfants et jeunes adolescents
All-Stars to the Rescue Dessin animé destiné au jeune publique américain (3-10 ans) réalisé en 1990. Il fut diffusé simultanément sur toutes les grandes chaines le 21 Avril 1990.
Capitain America goes to war against drug 1990 Les comics et surtout Capitain America ont longtemps illustré les problèmes que rencontre la société américaine (guerre froide…). Ce tome s’adresse à un publique large (enfants, adolescents voire adultes).
Wally Bear and the NO! Gang 1992 Ce jeux fut vendu au Canada et aux Etats-Unis. Le jeux avait pour but d’apprendre aux enfants à dire non aux stupéfiants. Il fut retirer des bacs en 2006
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Campagne destinée aux jeunes :
Campagne lancée par IADA ( Israel anti-drug authority) en 2011 Elle utilise le réseau social Facebook pour mettre en parallèle deux images à chaque poste sensé illustrer la vie d’Adam. Sur l’une des images il vit avec la drogue sur l’autre non.
Campagnes destinées à l’entourage
"Contre les drogues, chacun peut agir " Campagne française destinée aux magasines et à la télévison mise en place en 2010 par l’INPES (Institut national de prévention et d'éducation pour la santé)
Guide de prévention destiné aux parents distribué au Canada en 2008
La France est l’un des seuls pays d’’Europe de l’ouest où l’usage de la drogue est prohibé. Dans les autres pays, les toxicomanes sont aidés sans sentence pénale comme au Portugal. Depuis quelques années un débat est né dans les pays consommateurs. Selon certains pour que la drogue cesse d’attirer les jeunes il faudrait que certains stupéfiants deviennent licites, d’autres au contraire si opposent en avançant les conséquences de celle-ci sur la santé et la vie des consommateurs et sur le fait que si les drogues douces sont légalisées, les jeunes en quête de liberté risquent de se tourner vers des stupéfiants plus dangereux. Ceci s’appel la théorie de l’escalade, la drogue douce mène au drogues dures, les jeunes vont commencer le cannabis dans le but de consommer plus tard de l’opium ou du cannabis (augmentation des cas plus graves) Ce débat suscite toujours trois point de vue : • celui qui est contre la légalisation des drogues douces • celui qui est pour la légalisation des drogues douces pour usages thérapeutiques et • celui qui est pour sa légalisation totale.
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La France, qui est l’un des pays les plus répressifs en terme de consommation de drogue mais aussi l’un des plus grands consommateurs (en terme de pourcentage), est pour l’instant opposé à toutes mesures pouvant faciliter l’accès aux stupéfiants. La France est l’un des seuls pays en Europe à punir la consommation de drogues douces et à interdire les salles de shoots. En Europe, elle est le pays qui dépense le plus d’argent ( 900 millions/an) dans la lutte et qui obtient les plus mauvais résultats. liberalite.20minutes-blogs.fr
Le statut du Cannabis dans le monde Les pays ayant adopté une logique de criminalisation de la toxicomanie et de l’usage de drogues sont souvent les pays les plus dépensiers et dans lesquelles la violence et le nombre de consommateurs augmentent le plus. Aux Etats-Unis, l’Etat dépense 40 milliards de dollars par an dans ce qu’il appelle « The War On Drug ». Cependant les Etats étant indépendants les lois ne sont pas les mêmes sur tout le territoire américain : certains Etats ont dépénalisé le cannabis pendant que d’autres infligent des peines de prison voire de mort. En Floride la loi dit que « la distribution illégale de stupéfiants par une personne de plus de 18 ans ayant entrainé la mort est condamnable par la peine capitale ». Si certains Etats ont décidé de dépénaliser le cannabis c’est que les pays ayant mis en place une politique d’aide aux toxicomanes ont obtenu des résultats bien meilleurs que ceux qui au contraire continuent à pénaliser. Selon les sociologues les jeunes adoptent une logique inverse à la réalité : pour eux interdire le cannabis leur donne l’impression d’être libre en le consommant, alors que l’autoriser et aider les toxicomanes leur donne une idée de dépendance en des associations. Le Colorado est l’un des seuls Etats où le cannabis est en vente libre. Depuis sa légalisation la ville de Denver enregistre des chiffres surprenant car les trafiquants ont quitté la ville : les homicides ont diminué de moitié, les vols de véhicules de 30% et les crimes violents de 10,6%. L’Etat a aussi gagné 130 millions de dollars grâce aux taxes en 2014. Pendant que la criminalité augmentait dans les Etats voisins. www.konbini.com
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Certains pays ont mis en place des politique d’aides aux toxicomanes et aux consommateurs. Dans ces pays le toxicomane n’est pas vu comme un criminel mais comme un malade qu’il faut soigner. Le premier pays européen à entrer dans cette logique fut le Portugal en 2001. Cinq ans après cette initiative, le pays affichait des chiffres impressionnants : • le nombre de décès avait réduit de plus de moitié, • la consommation chez les jeunes de 40% • près de deux fois plus de toxicomanes ont franchi les portes de centres de cure Le gouvernement a aussi assisté à une baisse de la criminalité et a pu réinjecter l’argent économisé en service de sécurité pour aider « les malades ». Avant 2001 le Portugal était le pays européen où la consommation de drogues était la plus importante. En France l’aide aux toxicomanes est en plein débat malgré la mise en place de numéros d’aide comme « drogue info service 0 800 23 13 13 » ou encore « écoute cannabis », mais le pays n’est pas encore près à dépénaliser l ’usage de la drogue. Après le succès du Portugal un grand nombre de pays de l’Union Européenne ont suivi son exemple comme l’Italie ou la
Transform Drug Policy Foundation
République Tchèque en 2009. On observe qu’en 2012 le nombre de décès était quatre fois moins important qu’en 2001
Le nombre de décès par overdose au Portugal entre 2001 et 2012
Les désaccords qui subsistent dans les différents pays et au seing même des EtatsUnis rendent les conditions plus difficiles pour les états qui ont la volonté de prohiber la drogue. Le trafic a tendance à se déplacer chez eux car le marché noir est très lucratif (prix élevés car compensation de prise de risques à toutes les étapes). Cette arrivée de dealers provoque une augmentation de la criminalité et donc une augmentation des dépenses en terme de lutte et de sécurité, pendant que leurs voisins qui ont soit légalisé ou soit dépénalisé la drogue ont des résultats positifs. Ceci est particulièrement visible en France car l’Espagne à rendu le cannabis légal sur son territoire. Les pays qui ont légalisé ou dépénalisé l’usage de la drogue ont vu le nombre de consommateurs chuter et le nombre de toxicomanes en cure augmenter. Cependant la part des cas graves sur le total des consommateurs a augmenté. Les personnes les plus fragiles et certains jeunes ont en effet été victimes de la théorie de l’escalade (cannabis puis cocaïne puis héroïne) qui lui même résulte de la théorie de la porte d’entrée (Gateway theory) : la drogue étant dépénalisée les fumeurs de cannabis passeront plus facilement d’un stupéfiant à un autre (pas de différence de pénalité entre les stupéfiants, juste une différence dans les quantités possédables par l’utilisateur) . Lors de rencontres (fêtes) entre consommateurs de stupéfiants, les consommateurs de cannabis des pays où l’usage de drogues est dépénalisé vont plus facilement accepter d’expérimenter des drogues plus dures quand ils vont se le voir proposer part d’autres consommateurs. Ce phénomène est aussi présent dans les pays où l’usage de drogue est prohibé bien que moins fréquent. En France on estime que moins de 15% des consommateurs réguliers de cannabis deviennent héroïnomanes contre plus de 20% au Portugal. En rendant légal le cannabis les Pays-Bas ont perçu plus de 400 millions d’euros grâce aux impôts (lourds) imposés aux lieux de vente, et pas moins de 1400 millions d’euros grâce au tourisme cannabique (venu acheter et consommer dans le pays).
Dans l’état du Colorado qui a légalisé la vente de cannabis aux plus de 21 ans, la loi a du mal à être respectées. Le but de cette loi était de détourner les jeunes du cannabis mais les industriels ont mis en place des stratégies pour attirer les adolescents, comme la fabrication de bonbons au cannabis. L’Etat s’est donc lancé dans une nouvelle lutte (certe moins coûteuse que la première) contre la vente de produits qui rendent attrayant le stupéfiant et la vente aux mineurs (moins de 21 ans). En effet la loi dit que le cannabis ne devrait pas paraître « fun » aux enfants.
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Aux vues de tous les éléments de notre recherche et de notre analyse nous pouvons maintenant répondre précisément à notre problématique et affirmer que l’économie parallèle des stupéfiants illicites n’est pas un atout pour le développement des pays qu’ils soient pays producteurs ou pays consommateurs. Pourtant la première partie de notre analyse montre que ce marché illicite correspond à une véritable logique économique d’augmentation de la production en réponse à l’augmentation de la demande, de développement des parts de marché et d’accroissement des gains à la fois pour les producteurs, les distributeurs et les revendeurs. Ce marché parallèle permet aussi de faire travailler et vivre des familles entières les sortant ainsi de la précarité et du chômage que ce soit dans les pays producteurs ou consommateurs. Mais la deuxième partie montre que c’est justement les profits énormes, réalisés sur ce marché parce qu’il est illicite, qui sont à l’origine des violences, vols, meurtres, guerres de territoires, voire même guerres civiles ou internationales. L’argent des pays consommateurs devient alors la source principale du financement des armes de guerre achetées par les trafiquants. Le développement des relations entre trafic de stupéfiants illicites et trafic d’armes contribue aussi à l’augmentation de l’insécurité chez les pays producteurs et pays consommateurs. De plus les trafiquants de stupéfiants illicites apportent leur soutien financier au développement des groupes islamistes extrémistes qui sévissent ensuite tant chez les pays producteurs que les pays consommateurs. La dépénalisation du marché des stupéfiants illicites apparait aujourd’hui comme une solution qui permettrait aux pays producteurs et consommateurs de sortir de cette spirale infernale. Certains pays consommateurs ont déjà commencé un processus de légalisation ou de dépénalisation des stupéfiants illicites et les statistiques montrent une baisse significative des délits, meurtres et violence dans ces pays. La question est alors de savoir si la dépénalisation des stupéfiants va ou non accroître la demande et être ainsi à l’origine de profits encore plus importants, et donc indirectement être source d’augmentation de violence et de morts soit du fait des trafiquants, soit du fait des toxicomanes. En cas de légalisation du marché les pays consommateurs mais aussi producteurs devront redoubler d’efforts pour mettre en place des politiques de prévention et d’accompagnement des toxicomanes encore plus efficaces. Il est à noter qu’il serait souhaitable que cette décision fasse l’objet d’une entente internationale pour ne pas déclencher le transfert des réseaux des trafiquants d’un pays où le marché a été légalisé vers un pays où le marché est encore prohibé…
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Les principaux impacts ĂŠconomiques
Les principaux impacts sociaux
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Les principaux impacts environnementaux
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