Introduction
Employées de maisons organisant aux Etats-Unis Par Andrea Cristina Mercado et Ai-jen Poo Introduction Même si les associations d’employées de maisons qui organisent aux États-Unis restent cantonnées à certaines régions, il est indéniable qu’elles ont connu un essor considérable ces derniers temps. Après plusieurs siècles pendant lesquels les employées de maisons n’étaient pas considérées comme de la véritable main d’œuvre, le temps est venu pour elles de reprendre la lutte là où elle avait été abandonnée, pour obtenir le respect et un pouvoir accru, dans tout le pays. Les employées de maisons représentent une force en expansion. De plus, leurs expériences sont liées aux inégalités systémiques subies par les femmes, les travailleurs en général, les immigrés et les personnes non blanches ; le potentiel de rajeunissement pour de nombreuses branches luttant sur le terrain est donc énorme ; notamment pour les secteurs féministes, de lutte pour les droits de travailleurs, des immigrés et la justice face au racisme. L’étude de cas suivante présente deux organisations d’employées de maisons et la nouvellement formée Alliance nationale des employées de maisons, née de ces deux premières organisations. L’étude présente les leçons tirées de ce mouvement en croissance.
Histoire des employées de maisons aux États-Unis et de leurs luttes Les employées de maisons ont joué un rôle fondamental dans le développement de la vie sociale et économique des États-Unis. Historiquement, cette main d’œuvre tire ses racines dans le commerce transatlantique des esclaves et l’économie des plantations, qui fournirent les ressources et le matériel nécessaire à l’industrialisation des ÉtatsUnis.1 Les femmes esclaves africaines travaillaient dans les champs de céréales ou de coton, mais aussi chez les propriétaires de plantations, où elles s’occupaient de leurs familles et enfants. Les femmes chicana et autochtones de l’Ouest et du
Sud-ouest travaillèrent aussi en maisons pendant la période de pré-industrialisation. Pendant l’industrialisation, le travail domestique des femmes resta invisible et non reconnu. Si le travail domestique servit de fondement à la croissance de l’économie, il resta toujours invisible, délibérément exclu, à plusieurs reprises, de toute reconnaissance ou protection contre les mauvais traitements, dans le droit du travail aux États-Unis.2 Avec l’avènement du mouvement des femmes aux États-Unis, qui permit l’entrée des femmes blanches de classe moyenne dans la main d’œuvre, les femmes non blanches furent payées à faire les tâches domestiques. Le travail compris comme du « travail de femmes », qu’il soit à la maison ou dans la sphère « publique », était considéré com-
1. Au début du XXe siècle, les femmes européennes immigrées qui venaient d’arriver et avaient également trouvé du travail au domicile de familles quittèrent ces emplois dès qu’elles purent travailler en usine. Les femmes afroaméricaines qu’on empêchait souvent de faire partie de la main d’œuvre « publique » continuèrent à travailler au domicile de familles et ce type de travail finit par être conçu comme un « travail de femmes noires ». L’image de la « nounou » s’est même transformée en véritable représentation de la femme afro-américaine dans les médias de masse pendant tout le début du XXe siècle. Jones, Jacqueline Jones, Labor of Love, Labor of Sorrow: Black Women, Work, and the Family from Slavery to the Present, New York: Basic Books, 1985. 2. Jones, Jacqueline Jones, Labor of Love, Labor of Sorrow: Black Women, Work, and the Family from Slavery to the Present, New York: New York, Basic Books, 1985.