AWOTELE La revue des critiques ciné
N°2
En français & in English
FOCUS Travel Trash!
Cinéma : Which relationships between South Africa and the Continent How does international success
DURBAN International FILM FESTIVAL 16 - 26 July 2015
influence the recognition of an African Film in the continent?
AWOTELE 2 La revue des critiques ciné № 2 - Juillet 2015
SOMMAIRE Jerusalema de Ralph Ziman @ Entjha Films
FOCUS p 7. Cinéma : quels rapports entre l‘Afrique du Sud et le continent ? - Si proche, si loin par Alcény Barry (Burkina Faso) - Renouveau dans les coproductions interafricaines par Michel Amarger (France)
Moolade de Sembène Ousmane@ Les Films du Paradoxe
- Qui est riche sans être généreux n'a rien par Claire Diao (France/Burkina Faso) p 36. Le succès d’un film africain à l’international impose-t-il sa carrière sur le continent ? - Comment mesure-t-on un succès international ? par Didi Ckeeka (Nigéria) - Nul n'est prophète en son pays par Luisa Fresta (Angola) - Nul n'est prophète en son continent ? par Bilel Boudjellouli (Algérie)
FLASHBACK p 63. Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou 2015 Viva Riva! de Djo Tunda wa Munga @Music Box Films
- C'est eux les chiens par Aboubacar Demba Cissokho (Sénégal) - Palmarès Couverture : Necktie Youth by Sibs Shongwe-LaMer @Premium Films
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ed it o COMITE EDITORIAL AMARGER Michel BARRY Saïdou Alcény DIAO Claire
Coordination générale, iconographie : DIAO Claire
Comité rédactionnel : AMARGER Michel, BARRY Saïdou Alcény, BOUDJELLOULI Bilel, CHEEKA Didi, CISSOKHO Aboubacar Demba, DIAO Claire, FRESTA Luisa Traduction : FOEHN Mélanie, DIALLO Ataher, MBENGUE Magatte, PEYRACHE Josilene Conception graphique : TARMALINGOM Marilyne
Et de deux. Awotele 2 est là. Comme un deuxième pas dans la longue marche des critiques d’Afrique à côté des cinémas d’Afrique. Ce deuxième numéro met le cap sur le Sud du continent. A l’occasion du Durban International Film Festival (16-26 juillet 2015), les critiques des cinémas d’Afrique ont questionné les rapports entre les cinémas du reste du continent et celui de l’Afrique du Sud. Plus de deux décennies après la fin de l’Apartheid et le retour parmi les pays africains de cette nation qui possède une industrie de cinéma bien structurée, quel bilan tirer ? Y a-t-il un pont jeté entre ce cinéma florissant et ceux moins prospères du reste du continent ? Par ailleurs, lorsqu’un film africain primé dans un festival hors d’Afrique ne bénéficie pas du même accueil ou au contraire triomphe au Fespaco ou à Carthage, il naît souvent des polémiques. Dans le premier cas, on crie à l’injustice, dans le second à l’influence de ce prix sur les jurés. D’où l’importance de nous interroger sur l’impact d’un succès extra-africain sur la carrière d’un film et sur sa réception en Afrique. Awotele est un magazine panafricain. On y entend bruire beaucoup de langues du continent. Il y a des textes en français, en anglais, en portugais, etc. Nous nous battons pour les traduire et les mettre a la portée du plus grand nombre. Et nous y arriverons. Car nous avons pris conscience de notre force et de votre solidarité. Comme Aimé Césaire, nous sommes convaincus que « le soleil tourne autour de notre terre éclairant la parcelle qu’a fixée notre volonté seule et que toute étoile chute de ciel en terre à notre commandement sans limite ». Bonne lecture…
Contact : awotele@gmail.com
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Le comité de rédaction
ed it o Editorial Board: AMARGER Michel BARRY Saïdou Alcény DIAO Claire
Overall Coordination, Illustrations: DIAO Claire
Editorial Committee: AMARGER Michel, BARRY Saïdou Alcény, BOUDJELLOULI Bilel, CHEEKA Didi, CISSOKHO Aboubacar Demba, DIAO Claire, FRESTA Luisa Translation: FOEHN Mélanie, DIALLO Ataher, MBENGUE Magatte, PEYRACHE Josilene Graphic Design: TARMALINGOM Marilyne Contact : awotele@gmail.com
Step two. This is Awotele 2. It’s like the second step in the long walk of African critics alongside African cinemas. This second edition is headed towards the Southern part of the continent. On the occasion of the Durban Film Festival, the critics of African cinemas have raised the issue of the relationships between films from the rest of the continent and movies from SA. Over two decades after the end of apartheid and the return of this nation endowed with a well-structured cinema infrastructure among its African peers, the question arises as to what is the situation now ? Was a bridge laid down between the sprouting SA cinema and the poorer productions elsewhere in the continent ? From another standpoint, when an African film with a prize received at a festival outside of the continent does not meet the same welcome or, on the contrary, achieves recognition at Fespaco or Cathage, this often raises questions. In the first case, some people say there is no justice. In the second case others will say that the jury was influenced by the prize received outside. Hence the importance of asking ourselves about the impact of the success achieved outside of the continent on its future career or the way it is received in Africa. Awotele is a Pan African magazine, with the sounds of many African languages. There are texts in French, English, Spanish, Portuguese, etc. We are endeavoring to translate them and to make them available to a larger audience. And we will succeed, as we are taking stock of our strength as well as of your solidarity. As Aimé Césaire said, we are convinced that “the sun is going around our planet earth, casting a light on the piece of land selected by our sole will, and that any star falls from sky to earth under our limitless command”. Read on... 5
The Editorial Board
AWOTELE La revue des critiques ciné № 2 - July 2015
TA B L E O F C O N T E N T S FOCUS p 11. Cinema : Which relationships between South Africa and the African Continent ? - So close, yet so far by Alcény Barry (Burkina Faso) - What's new in the joint productions between African countries by Michel Amarger (France) - The rich who lacks generority does not have a thing by Claire Diao (France/ Burkina Faso) p 41. How does international success influence the recognition of an African Film in the continent? - How is international success measured? by Didi Ckeeka (Nigeria) - No man is a prophet in his own country by Luisa Fresta (Angola) - No man is a prophet in his own continent? by Bilel Boudjellouli (Algeria)
FLASHBACK p 67. The 2015 Pan African Film and Television Festival of Ouagadougou - They Are The Dogs by Aboubacar Demba
Cover : Necktie Youth by Sibs Shongwe-LaMer @Premium Films
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Waati de Souleymane Cissé @Les Films Cissé
Cinéma : quels rapports entre l‘Afrique du Sud et le continent ?
@DR
SI PROCHE SI LOIN
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C
omment évoquer les rapports entre les cinémas de l’Afrique occidentale francophone et celui de l’Afrique du Sud sans utiliser le passé. Et même en parler au passé (dé)composé tant les premiers contacts ne débouchèrent sur rien. L’Afrique du Sud ne fut jamais une terra incognita pour l’Afrique de l’Ouest francophone, car si aucun ressortissant de l’Afrique de l’Ouest ne souhaitait y poser le pied pendant l’Apartheid, ce territoire à la pointe australe du continent ne fut cependant jamais absent des préoccupations politiques et artistiques de cette région. En effet, l’Afrique de l’Ouest a été solidaire de ses frères noirs qui vivaient sous le régime ségrégationniste de l’Apartheid. Une solidarité qui se manifestait à travers la musique, la littérature et un peu moins dans le cinéma. On se rappelle Thomas Sankara, le chef de l’Etat du Burkina Faso, offrant quatre Kalanichkov au représentant de l’ANC à l’OUA (actuel UA) pour soutenir leur combat pour l’égalité raciale! Avec la fin de l’Apartheid, le retour de ce grand pays dans les nations du continent apparaissait comme le retour de l’enfant prodigue. Puissance économique, militaire et culturelle, l’Afrique du Sud était perçue comme la locomotive qui allait tirer le continent vers le développement. Et les cinémas de l’Afrique de l’Ouest francophone attendaient beaucoup de la première industrie cinématographique du continent. Le cinéma Sud-africain est un miracle, vu d’Afrique de l’Ouest francophone. Boycotté du reste du monde pour son régime de ségrégation, ce pays a développé en serre une véritable industrie cinématographique comprenant la production, la distribution, l’exploitation et les studios sur le modèle hollywoodien avec l’accompagnement de l’Etat. Claude Forest dans Le cinéma en Afrique : l’impossible industrie notait que Ster Kinekor disposait en 2010 de 418
écrans (58 complexes, 60 000 fauteuils) avec une part de marché de 65 % pour 17 millions de tickets vendus. A côté de Ster Kinekor, il y a deux autres géants de la distribution que sont Nu-Metro Distribution (NMD) et United International Pictures (UIP) qui se partagent le reste du marché. D’Afrique francophone, on découvrait des films sud-africains en V.O si proches des films hollywoodiens. Nerveux, rythmés, servis par d’excellents comédiens et bâtis sur des scénarios haletants. Mon nom est Totsi de Gavin Hood a emballé le public ouagalais lors du Fespaco 2007 ! Par la suite, ces films en poussant loin les excès et en perdant de leur nouveauté vont moins séduire. Mais au début, c’était l’émerveillement devant ces films venus du sud et la fascination devant la puissante machinerie cinématographique qui les fabrique. L’Afrique de l’Ouest et l’Afrique du Sud se tiennent aux deux extrêmes de l’industrie cinématographique. D’un côté, il y a un cinéma dans toute sa splendeur et de l’autre, un cinéma anémique, sous perfusion, qui n’existe pas en tant qu’industrie mais seulement par ces réalisateurs. Et pour compliquer les choses, la concurrence de nouvelles images comme la télévision, les DVD, les VCD et le téléphone cellulaire vont réduire le public des cinémas de l’Afrique francophone comme peau de chagrin et entraîner la fermeture des salles. Par conséquent, c’est la loi physique de l’appel d’air qui devrait être entre ces deux mondes-là. Le cinéma francophone n’attendant qu’une occasion de s’engouffrer dans la brèche. Deux éclaireurs, les meilleurs de leur génération Le premier contact entre les deux cinémas se fera par le truchement de la création cinématographique et non par
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Waati fut un des films africains francophones les plus chers de l’époque. Daniel Toscan du Plantier, le producteur délégué, ne mégota pas sur le budget. Ce film suit la trajectoire d’une adolescente sud-africaine qui quitte son pays à la suite du meurtre de son père par un policier et que les tribulations mèneront à travers l’Afrique occidentale. Dans la distribution, il y a des acteurs sud-africains et des acteurs maliens et ivoiriens. Malheureusement ce film n’ouvrira pas les portes de salles sud-africaines ni ne débouchera sur des collaborations futures avec le cinéma sud-africain. Il ne sera pas non plus bien reçu par le public francophone et surtout hexagonal. Dans les Inrocks, le critique français Vincent Ostria finira son article sur Waati par ce conseil cruel au réalisateur; « Cissé a donc présumé de ses forces. On espère qu’il redeviendra vite le chantre de l’Afrique mythique». Comme pour dire que le réalisateur africain est condamné à filmer des histoires mythiques et jamais le contemporain ou le quotidien. Ce film sera d’ailleurs le dernier grand film de Souleymane Cissé.
Il faut dire que les producteurs et distributeurs français ne regardent pas cette ouverture vers le sud du continent sans inquiétude. L’espace francophone est un marché de plusieurs millions de cinéphiles et il est évident qu’ils ne souhaitent pas le partager avec un autre.
Idrissa Ouédraogo n’aura pas plus de baraka avec Kini et Adams. Cette histoire d’une longue amitié d’hommes mise à l’épreuve par l’ouverture d’une mine dans le village tourné au Zimbabwé n’ouvrira pas de collaboration entre le réalisateur burkinabè et les
Hormis ces deux exemples, nous ne connaissons pas d’autres tentatives ou tentations australes. L’échec des deux grands cinéastes a certainement échaudé les cinéastes francophones. Le double risque de ne pas être adopté par le public sud-africain et d’être mis
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cinéastes sud-africains. Ce film, le plus abouti de sa filmographie, avec des comédiens anglophones superbement dirigés, bien qu’il soit sélectionné au Festival de Cannes 1997 aura un accueil mitigé. Comme si le monde du cinéma français reprochait à son cinéaste chouchou de l'époque de lui faire une infidélité.
Cinéma : quels rapports entre l‘Afrique du Sud et le continent ?
Souleymane Cissé tourne Waati, une histoire sud-africaine en 1995 et Idrissa Ouédraogo réalise Kini et Adams en 1997. Ces films visent à jeter un pont entre les deux publics en donnant à voir ici et là-bas les réalités des communautés sud-africaines. Ainsi l’écran donnerait à voir aux deux communautés ce qu’un autre écran, politique celui-là, a caché pendant longtemps.
Waati de Souleymane Cissé @Les Films Cissé
les contrats de producteurs. Cette approche se fera donc à travers des films sur l’Afrique du Sud.
au ban par les amateurs et les professionnels français des cinémas d’Afrique fait que le pont levis est en train d’être levé entre ces deux régions si proches et si lointaines… Les premières tentatives ont-elles été maladroites ou trop précoces, venues avant que les conditions d’une vraie rencontre ne soient là ? Il est évident que nombre de cinéastes de l’Afrique de l’Ouest francophone auraient aimé que le cinéma tira force et réussite en se tournant vers l’industrie de l’Afrique du Sud. Pour tous, ç’aurait été une fierté que la boussole du cinéma en Afrique indiqua le Sud, l’Afrique du Sud suscitant une aimantation assez forte pour rompre le tropisme vers le Nord. Mais l’Afrique du Sud est une nation qui fut longtemps repliée sur elle-même ; s’ouvrir prend du temps. Comme un ressort longtemps comprimé, elle va se détendre. Et le colosse du Sud qui regarde de l’autre côté de l’océan, l’Amérique et l’Europe, se tournera un jour vers l’intérieur du continent. Inéluctablement, l’Afrique du Sud sortira de son insularité culturelle pour dialoguer avec les autres cinémas du continent. Et ce jour-là, les cinémas d’Afrique pourront s’appuyer sur une industrie pour fabriquer des films de qualité et les faire voir à toutes les populations du continent.
Références : FOREST Claude, Le cinéma en Afrique : l’impossible industrie, in Revue Mise au Point, Tribulations numériques du Cinéma et de l’Audiovisuel à l’amorce du 21e siècle, avril 2012. https://map.revues.org/800 Kini & Adams d’Idrissa Ouédraogo, fiction, Burkina Faso, 1997 Mon nom est Totsi de Gavin Hood, fiction, Afrique du Sud, 2005 OSTRIA Vincent, Waati, in Les Inrocks du 30 novembre 1994. http://www.lesinrocks.com/ cinema/films-a-l-affiche/waati/ Waati de Souleymane Cissé, fiction, Mali, 1994
Kini & Adams d'Idrissa Ouédraogo @ PolyGram Film Distribution
Saïdou Alcény BARRY ASCRIC-B Burkina Faso
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Waati de Souleymane Cissé @Les Films Cissé
Cinema : Which relationships between South Africa and the African Continent ?
So far so close
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@DR
H
ow to talk about the relation between West African movie industry and that from South Africa without resorting to the past. One must even use the past because the first contacts between those two cinemas amounted to nothing. Here is a flashback of these aborted encounters with two African filmmakers Souleymane Cissé and Idrissa Ouédraogo. South Africa has never been a Terra incognita to Francophone West Africa even though West Africans did not wish to travel to South Africa during Apartheid years, yet the situation in South Africa was a permanent concern in West Africa.
duction to distribution, exhibition and studios based on the Hollywood model. This was made possible with the help of the State. In his article Cinema in Africa the impossible industry, Claude Forest noted that in 2010 the distributor Ster Kinekor had 418 movie screens in 58 complexes with a total number of 60,000 seats. This represented a total market share of 65 % out of 17 million cinema tickets. Next to Ster Kinekor, two other giants distributors existed which are Nu Metro Distribution and United international Pictures and they dominate the rest of the industry.
In Francophone Africa, South African movies were screened in their original In fact West Africans have always version and so they were similar to shown their solidarity to their brothers Hollywood movies. Movies from SA who lived under the segregated regime were dynamic, well paced and well cast of Apartheid. Such solidarity was exwith talented actors. Storylines were pressed through music, literature and also well built. Gavin Hood’s Tsotsi was to a smaller extent, through movies. acclaimed by the audience in OuagaOne historic image of that solidarity dougou during the Fespaco in 2007! was when Thomas Sankara, the late It is yet worth mentioning that in the president of Burkina Faso offered 4 long run these movies, by pushing too Kalachnikov to the ANC representative far and losing originality, became less at the African Unity Organization to attractive. In the beginning, South show his support to their fight for racial African movies were pure amazement equality. and absolutely fascinating because of the powerful local cinematographic At the end of Apartheid, the come machinery. back of the country in the continent appeared as the return of the prodigal West African movie industry and its son. South Africa being an economic, South African counterpart are both military as well as a cultural power, it at the far ends of the movie industry. was seen as a powerful engine that On one hand, you have a splendid will pull the whole continent towards and thriving movie industry and on prosperity. So West African cinema in- the other hand a struggling anemic dustries placed big hope on this movie one which doesn't exist as an industry industry. but only through its directors. And to make things more complicated there From West Africa, South African movis the competition of new movies as ie industry is seen as a miracle. Once TV production, DVDs, VCDs and momarginalized from the world because of bile devices are slashing out a meager its segregated regime, the country deaudience of the francophone movie veloped within its boundaries a genuindustry which is causing the closure of ine movie industry which embraced the movie theatre venues. whole chain of the industry, from pro-
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their generation The two cinemas made their first contact through movies and not by contracts between producers. The relation thus started through movies dealing with the situation in South Africa. So Souleymane Cissé shot Waati, a South African story, in 1995 and Idrissa Ouedraogo Kini and Adams in 1997. These movies were to link moviegoers between the two zones by showing to both communities what was politically hidden for years. Waati was of the most expensive movies among the French speaking movies in Africa at that time. Daniel Toscan du Plantier, the delegate producer, generously financed the movie. The story shows a South African girl in her teens who leaves her country after the murder of her dad by a policeman. Her journey will take her through West Africa. The cast includes South African actors as well as Malians and actors from Ivory Coast. Unfortunately, the movie did not open the doors of South African movie theatres and didn't initiate future collaborations with the South African movie industry. It was not well received by the francophone audience mainly in France. In the French Magazine Les Inrocks, film critic Vincent Ostria wrote « Cissé overestimated his talent. We do hope that he will soon be the master of mythical Africa he has once been. » As if the African film director must always show mythical stories and never show 14
contemporary or everyday stories. Waati was his last big movie. Ouedraogo was not any luckier with Kini and Adams. The story of a long friendship between men was challenged by the drilling of a mine in their village. Set in Zimbabwe, it did not initiate a collaboration between the director from Burkina Faso and South African movie directors. The movie was the best crafted of his filmography with Anglophone actors who were superbly directed but was not acclaimed in Cannes where it was presented in 1997. It is as if French film industry was unhappy with his once favorite director to have done a form of infidelity. One has to say that French producers and distributors did not see with a good eye this interest towards South Africa’s movie industry. This could be a real threat to a market of many million
Cinema : Which relationships between South Africa and the African Continent ?
Two pioneers, the best of
Waati de Souleymane Cissé @Les Films Cissé
Consequently, it's the physical law that holds « nature hates emptiness » which may prevail between these two cinema industries. The Francophone one is just waiting for an opportunity to make its way as its South African counterpart.
Francophone viewers that France does not really want to share. These are the two and only examples of the exchange of the two cinemas. The failure of these two African giant directors has demotivated other directors who are afraid of risking a failure in South Africa and be banned by French audience and professionals keen of African cinema at the same time. Have the first initiatives been too early or not well worked on beforehand? Were they set before the real conditions of a true collaboration were met? It is obvious that many Francophone West African directors would have been happy to see a successful relationship with South Africa. What would have been an alternative to help put and end to the exclusive relationship with the North.
But South Africa is a nation that has been isolated for a long time. You need time to open up. The giant of the South which is nowadays interested by the USA and Europe will one day turn its eyes to Africa. This day will enable African directors to benefit from a real industry and know-how to make quality movies to be seen by all the populations of the continent.
Saïdou Alcény BARRY ASCRIC-B Burkina Faso
References: Kini & Adams d'Idrissa Ouédraogo @ PolyGram Film Distribution
FOREST Claude, Le cinéma en Afrique : l’impossible industrie, in Revue Mise au Point, Tribulations numériques du Cinéma et de l’Audiovisuel à l’amorce du 21e siècle, April 2012. HYPERLINK "https://map.revues.org/800"https://map. revues.org/800 Kini & Adams by Idrissa Ouédraogo, fiction, Burkina Faso, 1997 Tsotsi by Gavin Hood, fiction, South Africa, 2005 OSTRIA Vincent, Waati, in Les Inrocks, November 30, 1994. HYPERLINK "http://www. lesinrocks.com/cinema/films-a-l-affiche/ waati/"http://www.lesinrocks.com/cinema/ films-a-l-affiche/waati/
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L’attractivité de l’Afrique du Sud relancée
Le cinéma de l’Afrique du Sud change de couleurs sans perdre son éclat, nison impact. Depuis la fin de l’apartheid, il gagne des marchés à l’exportation, capable de conquérir des récompenses prestigieuses comme l’Oscar remis à Mon nom est Tsotsi de Gavin Hood, 2005. A l’intérieur, la production s’étaye avec le professionnalisme de sociétés de cinéma offensives, et le concours de studios confortables qui attirent les tournages étrangers ambitieux tel Invictus de Clint Eastwood, 2009. Les échanges internationaux sont favorisés par des festivals structurés dans la lignée du 36ème Durban International Film Festival qui se déroule du 16 au 26 juillet 2015, dans la province de KwaZulu-Natal. On y découvre le meilleur du cinéma sud-africain commercial, présenté en première, mais aussi les dernières nouveautés africaines et internationales. Avec près de 200 projections, les organisateurs du DIFF contribuent à diffuser des films dans les meilleurs cinémas et dans quelques townships où il n’y a habituellement pas de salles en service. Mais le volet public se double aussi d'ateliers, de réunions professionnelles, qui visent à renforcer la productivité locale. Talent Campus Durban, organisé en liaison avec Berlinale Talent Campus depuis 2008, veut favoriser l‘émergence de nouveaux auteurs africains.
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Cinéma : quels rapports entre l‘Afrique du Sud et le continent ?
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Invictus de Clint Eastwood @ Warner Bros
Renouveau dans les coproductions interafricaines
Rhodesia Countdown de Michael Raeburn @ Michael Raebur n
le pays de sa naissance, débarrassé du régime de l’apartheid. Le film, coproduit par la France, le Mali, le Burkina Faso, est favorisé par le nouveau régime de Nelson Mandela qui permet au réalisateur de compléter une vaste fresque sur l’identité africaine. Le Camerounais Jean-Pierre Bekolo tourne lui aussi en anglais et avec des acteurs du sud, mais au Zimbabwe, Le Complot d’Aristote, 1996. Coproduit par la France, le Zimbabwe via la société Framework International, et le British Film Institute, cette fiction parodique montre un réalisateur qui combat le cinéma américain et ses mythes au profit d’un cinéma local qui n’intéresse pas le public. L’énergie et la fougue débridée du cinéaste camerounais soulignent le clivage entre les auteurs et le public africain. Et le Durban FilmMart, forum de coproductions, lancé en 2010, avec la ville et son organisme de soutien au cinéma, peut renouveler de manière accrue la collaboration entre des réalisateurs d’Afrique de l’Ouest, des professionnels d’Afrique du Sud, pour élargir les modes de production et de diffusion de leurs films sur le continent
Dans la foulée, le burkinabè Idrissa Ouedraogo tente d’élargir son audience en réalisant en anglais, Kini et Adams, 1997. Il est produit par le Burkina, la France, le Royaume-Uni, et financé aussi par le Zimbabwe avec la dynamique société Framework International, ainsi que l’Afrique du Sud. Ce partenariat rafraîchit l’inspiration du cinéaste burkinabè qui conte l’amitié puis les divergences de deux copains Des regards audacieux vers le dont l’un est un rêveur et l’autre un pragmatique qui veut réussir. Malgré le sud de l’Afrique rythme vif du film, porté par la vivacLes liens de partenariat noués entre ité de la langue anglaise, cette fiction les pays d’Afrique de l’ouest, du centre, ambitieuse, présentée au Festival de avec ceux du sud, restent encore Cannes 1997, ne connaît pas le succès épisodiques. Venus de zones culturelles espéré, incitant le cinéaste à se replier différentes, aux histoires indépendansur le marché burkinabè. tes, les réalisateurs abordent souvent De son côté, Michael Raeburn, né en les territoires du sud en se démarquant Egypte, qui a vécu son enfance au Zimde la sensibilité anglophone et de babwe et y a tourné des films incisifs sa langue. Pourtant depuis la fin de comme Rhodesia Countdown, 1969, l’apartheid, quelques cinéastes reconou populaires tel Jit, 1991, multiplie les nus ont exploré les territoires du sud. ouvertures et les déplacements. En 1995, le Malien Souleymane Cissé ouvre et conclue le récit de Waati (Le Temps) en Afrique du Sud. Son héroïne, Nandi, une jeune Noire qui fuit les brutalités de l’apartheid, parcourt la Côte d’Ivoire, le Mali, la Namibie avant de revenir, adulte, régler ses comptes dans 17
montrent le chemin. Le Camerounais Daniel Kamwa qui a contribué à l’essor du cinéma dans son pays, avec des succès populaires comme Pousse-Pousse, 1975, ou Notre fille, 1980, continue de produire des films indépendants tels Le Cercle des pouvoirs, 1997, réalisé avec Jules Takam, ou Mâh Saah-Sah, 2008.
sud-africaine dernier cri
Aujourd’hui, il cultive de nouvelles alliances pour orchestrer une production essentiellement africaine entre le Cameroun et d’autres pays du continent. Il implique directement les studios d’Afrique du Sud pour réaliser Turbulences, 2015, un long-métrage d’animation en 3d-4k.
Ces incursions d’auteurs venus du nord n’entraînent pas un véritable courant mais ouvrent des voies nouvelles de collaboration. Et même si la majorité des réalisateurs préfèrent se tourner vers le Nord pour chercher des appuis, certains venus de l’est du contient, ou des contrées anglophones, s’orientent vers l’Afrique du Sud pour s’appuyer sur la forte structuration du domaine du cinéma dans le pays. Les vétérans
C’est une première pour un auteur d’Afrique Noire qui signe un film d’animation à message, pour tout public, en bénéficiant des nouvelles technologies numériques. L’apport du studio Inventio Corporation, dirigé par Pierre-Paul Nyobe, a permis au cinéaste camerounais de fabriquer des personnages animés d’après la modélisation d’acteurs noirs, transformés et réinventés par ordinateur. Le film post-produit en
Une coproduction
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Cinéma : quels rapports entre l‘Afrique du Sud et le continent ?
Rhodesia Countdown de Michael Raeburn @ Michael Raebur n
En 2008, il investit l’Afrique du Sud pour Triomf, l’adaptation d’un roman de Madeleine Van Niekerk, situé dans les derniers jours précédent l’élection de Mandela, en 1994. On suit les soubresauts d’une famille de Blancs déjantés, sous pression, dans la banlieue de Johannesburg. Le style nerveux et ferme du réalisateur, en phase avec la sensibilité anglophone, s’appuie sur une production française avec l’Afrique du Sud via la firme Giraffe Creations.
France pour mettre les voix françaises, circule en version sous-titrée en anglais afin de conquérir tous les territoires africains et même américains.
Turbulences de Daniel Kamwa @ DK7 Communications
Turbulences évoque les péripéties d’un couple de diplômés, reconvertis en paysans sous l’impulsion d’une initiative du gouvernement qui prône le retour à la terre avec l’aide de subventions. Mais l’argent n’est pas versé et les paysans se débrouillent seuls pour faire fructifier les terres. Ils apprennent alors qu’elles sont cédées par le président à une multinationale, et sous la pression, ils tentent de fuir en partant en clandestins vers le Nord. La fable politique dénonce la mauvaise gouvernance en Afrique,
l’émigration, avec des incursions dans les rêves où apparaissent lutins et oiseaux magiques. Une rencontre avec Daniel Kamwa permet de cerner comment le travail en Afrique du Sud peut stimuler un réalisateur d’Afrique de l’Ouest combatif.
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l’expérience de Turbulences
M.A : Qu’y avez donc vous trouvé ? Un état d’esprit différent de celui des techMichel Amarger : Qu’est-ce qui vous a niciens d’Afrique de l’Ouest pour tramotivé à réaliser Turbulences du côté vailler ? du sud de l’Afrique ? Il existe des studiD.K : Comme je n’avais jamais travaillé os d’animation au Burkina, au Sénégal, avec des techniciens d’Afrique du Sud, alors pourquoi se diriger vers l’Afrique je ne peux pas comparer. En tous cas, je du Sud ? me suis très bien entendu avec eux. Daniel Kamwa : Il n’y a pas de raison que le sud reste coupé du reste du continent. C’est vrai que pendant l’apartheid, ça constituait comme un morceau séparé. Mais maintenant, après la sortie de prison de Nelson Mandela et son premier mandat puis l’évolution qui a suivi, il y a un besoin d’aller vers ce pays pour montrer que les Sud-africains ne sont pas seuls mais aussi pour voir ce qu’ils peuvent faire. L’Afrique du Sud a quand même une pratique cinématographique très forte. On a beaucoup tourné en Afrique du Sud. Je me rappelle, en tant qu’acteur en France, dans la publicité, que beaucoup de publicités 20
M.A : Mais que vous a apporté vos rapports avec eux ? Une efficacité, un dynamisme ? D.K : Une très très grande efficacité, une très grande capacité à comprendre les besoins, où le réalisateur veut aller et parfois même la capacité de devancer la pensée du réalisateur. C’est comme ça qu’on pu faire ce film dans des conditions confortables. Quand je dis que j’ai mis trois ans pour réaliser Turbulences, on me dit que ce n’est pas possible, qu’un film comme ça se fait en six ans… Donc ça prouve qu’ils sont efficaces en Afrique du Sud.
Cinéma : quels rapports entre l‘Afrique du Sud et le continent ?
Daniel Kamwa @DR
Entretien : Daniel Kamwa et
se tournaient en Afrique du Sud parce qu’ils ont de très bons techniciens, ils sont bien équipés. Beaucoup de films américains se tournaient aussi là bas, à l’époque où les films animaliers se faisaient beaucoup. On tournait aussi beaucoup au Zimbabwe qui s’appelait encore la Rhodésie. Il était très proche de l’Afrique du Sud et donc il y avait une synergie. Il y avait même de grands laboratoires. Aujourd’hui, on tourne de moins en moins avec de la pellicule, on tourne en numérique et donc on trouve des techniciens très bien formés, beaucoup d’équipement en Afrique du Sud. Et puis les prix sont vraiment beaucoup plus bas par rapport à l’Europe. C’est vrai que ça aurait été plus facile pour moi, d’aller au Burkina pour travailler sur Turbulences parce que je connais déjà le pays, mais j’avais aussi besoin de découvrir cette partie du continent, au sud, qui a beaucoup à nous apporter.
M.A : Ils sont entrés en participation financière ? D.K : Oui bien sur. Ca aussi c’est important parce que je n’aurais sans doute pas trouvé cette participation financière dans aucun pays d’Afrique de l’Ouest. M.A : Ca veut dire que vous pourriez réenclencher un projet avec des partenaires en Afrique du Sud. ? D.K : C’est ce que je souhaite… Ca pourrait être un film d’animation ou pas. D’ailleurs, du côté de la diffusion, je voudrais voir ce qui est possible en Afrique du Sud. Il y a le festival de Durban dont vous m’avez parlé, et je pense que je vais essayer de voir dans quelle mesure je peux aller montrer Turbulences là bas. Ca me donnerait l’occasion de créer des connections avec les producteurs et les auteurs sud-africains parce qu’ils ont beaucoup de choses à dire.
tout il y a le Canada avec le Québec qui a besoin d’avoir des versions françaises de films américains. Celles qui passent au Canada sont faites en France. Souvent ce sont les blockbusters qui sont doublés en français. Ce sont des films très très grand public. Alors même si j’espère avoir beaucoup d’entrées, je ne prétends pas avoir fait un blockbuster. Doubler Turbulences en anglais, sauf si un distributeur me le demande, cela représente beaucoup d’argent. M.A : Voyez-vous plus d’opportunités pour distribuer ce film sur le marché du sud, dans l’Afrique anglophone, plutôt que sur le marché de l’Afrique de l’Ouest où le coût de la vie est peut être moindre, et où ça peut être moins rentable ?
D.K : Je ne fais pas de tri. On gagne un peu moins là, on gagne un peu plus làbas puis on fait la moyenne. On veut surtout rentabiliser son film et peut-être même faire des bénéfices pour aider à faire d’autres films. On ne peut pas avoir le même succès partout quel que soit le M.A : Existe t’il une version anglaise du film. Il y a des films américains qui marchfilm pour conquérir ce marché ? ent mieux à l’étranger qu’aux Etats-Unis. Certains marchent bien en France mais D.K : Non, il n’y a pas de version en pas en Angleterre, pourtant ça pourrait anglais mais il y a une version avec des être le contraire. Selon le contenu et la sous-titres anglais. manière d’un film, ça plait à tel ou tel public. Donc on doit faire une moyenne pour savoir si le film est rentabilisé. M.A : Le fait que Turbulences soit parlé en français ne peut-il être un frein pour aborder le marché anglophone ? D.K : Je ne pense pas. Aujourd’hui, de plus en plus, la plupart des films se contentent de sous-titres dans telle ou telle langue selon le pays où l’on veut l’exploiter. Une version dans une langue étrangère suppose quand même qu’il y ait un gros marché et qu’il y ait une demande. Moi qui m’intéresse au doublage, je pense que si la plupart des films américains sont doublés en français, c’est parce que la sphère culturelle francophone est assez développée. Et surTurbulences de Daniel Kamwa @ DK7 Communications
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D.K : Il faut y croire et il faut travailler dans ce sens. C’est nécessaire. En même temps, on parle du cinéma africain comme un bloc mais il y a beaucoup de variété et de diversité dans le cinéma africain. Le film burkinabé, fait par un Burkinabé, n’a rien à voir avec un film fait par un Ivoirien ou par un Sénégalais. On a des approches différentes. Pour l’instant, comme on ne fait pas suffisamment de films pour avoir une particularité nationale, on parle du cinéma africain comme dans la musique on parle de « world music ». C’est un fourre-tout où on met tout ce qui n’est pas musique typiquement française ou anglaise. On dit « world music» et vous y trouvez des Africains, des Français, des Asiatiques… Et là aujourd’hui, on parle de cinéma africain parce que c’est la seule manière de désigner tous ces films un peu parcellaires qui viennent à la fois d’Afrique du Nord, d’Afrique de l’Ouest ou d’Afrique du Sud.
Michel AMARGER Afrimages France
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Références : Invictus de Clint Eastwood, fiction, USA, 2009 Jit de Michael Raeburn, fiction, Zimbabwe, 1991 Kini et Adams d'Idrissa Ouédraogo, fiction, Burkina Faso, 1997 Le Cercle des pouvoirs, de Daniel Kamwa et Jules Takam, fiction, Cameroun, 1997 Le Complot d’Aristote de Jean-Pierre Békolo, fiction, Cameroun, 1996 Mâh Saah-Sah de Daniel Kamwa, fiction, Cameroun, 2008 Mon nom est Tsotsi de Gavin Hood, fiction, Afrique du Sud, 2005 Notre fille de Daniel Kamwa, fiction, Cameroun, 1980 Pousse-Pousse de Daniel Kamwa, fiction, Cameroun, 1975 Rhodesia Countdown de Michael Raeburn, documentaire, Zimbabwe, 1969 Triomf de Michael Raebrun, fiction, Zimbabwe, 2010 Turbulences de Daniel Kamwa, animation, Cameroun, 2015
Cinema : Which relationships between South Africa and the African Continent ?
M.A : Croyez-vous au développement des collaborations interafricaines ?
Invictus de Clint Eastwood @ Warner Bros
Renewal in Sight in Inter-African Coproduction /
South Africa’s Attractiveness Renewed
South African cinema is changing – a change that continues to rime with grandeur and influence. Since the end of Apartheid, it has captured export markets as well as prestigious awards such as the Academy Award for Gavin Hood’s Tsotsi (2005). As for domestic activity, production is supported by the professionalism of active cinema companies, and the participation of comfortable studios that attract foreign shootings such as Clint Eastwood’s Invictus (2009). International exchanges are facilitated by festivals inspired from the 36th Durban International Film Festival that, this year, will take place from July 16 to 26 in the KwaZulu-Natal province. There, the best commercial South African cinema can be found, together with the latest African and international novelties. With more than 200 productions, DIFF organizers contribute in disseminating movies in the best cinemas and a few townships where no movie theatres are usually running. Public-oriented activities come alongside workshops, professional meetings whose aim is to reinforce local productivity. The Talent Campus Durban, organised with the Berlinale Talent Campus since 2008, aims to facilitate the emergence of new African authors and the Durban FilmMart, a forum for coproductions that was initially launched in 2010 thanks to municipal sponsorship program for cinema, has renewed and encouraged collaboration between West African directors, South African professionals, to adopt new production and distribution met ods throughout the continent.
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the continent. Bold Interests in South Africa
local cinema that lacks public interest. The Cameroonian director’s energy and fieriness highlight the divide between authors and African audiences. One year later, Burkinabe director Idrissa Ouedraogo seeks to attract international audience by directing a film in English, Kini and Adams (1997). It was produced by Burkina Faso, France, the United Kingdom with the participation of Framework International, along with South Africa. This collaboration has stirred the Burkinabe director’s inspiration to tell the story of a friendship between two boys, a dreamer and a realist with an ambition to succeed. Despite its fast-paced rhythm, sustained by the vivacity of the English language, this ambitious work of fiction, competing in the 1997 Cannes Film Festival, somewhat did not obtain the success expected. After that, the film director concentrated solely on the Burkinabe market.
Partnerships between West African countries, Central African countries and the South are, to date, episodic still. Directors originating from different cultural regions with independent histories, come to the South with a touch that is different from Anglophone sensibility and its language. Yet, since the end of Apartheid, a few renowned directors have explored Southern territories. Egyptian-born director Michael Raeburn, spent his childhood in Zimbabwe In 1995 Malian director Souleymane and created incisive movies such as Cissé opens and concludes the narraRhodesia Countdown (1969) or poputive of Waati (Time) set in South Afrilar movies such as Jit (1991), relies on ca. The hero, Nandi, is a young black openings and movements. In 2008, he girl who flees from the brutality of invests in South Africa for Triomf, an the Apartheid regime and finds heradaptation of a novel by Madeleine self traveling to the Ivory Coast, Mali, Van Niekerk, set a few days prior to the Namibia before she returns in order election of Nelson Mandela to Presito settle issues in her homeland, freed dency. The story focuses on a wacky from Apartheid. The film was co-profamily of whites, under pressure, living ducted by France, Mali, Burkina Faso in a Johannesburg suburb. The direcand favoured by the new regime led by tor’s dynamic rhythm and masterful Nelson Mandela, allowing the director style was supported by Giraffe creato build up a vast frescoe on African tions through a French production in identity. South Africa. Cameroonian director Jean-Pierre Bekolo also shoots in English and with actors originating from the South, i.e Zimbabwe, with Le Complot d’Aristote in 1996 with the participation of Framework Festival and the British Film Institute. This parodic fiction portrays a director whose fight targets American cinema and its myths for the benefit of 24
Cinema : Which relationships between South Africa and the African Continent ?
2008,aims to facilitate the emergence of new African authors and the Durban FilmMart, a forum for coproductions that was initially launched in 2010 thanks to municipal sponsorship program for cinema, has renewed and encouraged collaboration between West African directors, South African professionals, to adopt new production and distribution methods throughout-
The Latest South African Production These incursions undertaken by Northern authors have not created a movement. They paved the way for new forms of collaboration. Even if most directors prefer to turn towards the North to obtain support, some coming from the East of the continent or from English-speaking countries look towards South Africa to rely on the well-developed film industry. Veterans have set the example. Cameroonian director Daniel Kamwa played a major role in the development of the country’s cinema industry thanks to popular movies such as Pousse-Pousse (1975), Our Daughter (1980), Le Cercle des pouvoirs (1997) co-directed with Jules Takam, or Mâh Saah-Sah (2008).
ers must make do to bring forth the fruits of the earth. They learn that the President has given them over to a multinational company and attempt t o leave the country when t h e y find themselves under p r e s s u r e – northward bound as illegal immigrants. The political fable denounces bad governance in Africa, emigration with incursions into dreams with elves and magic birds. An interview with Daniel Kamwa will help us understand how work in South Africa may stimulate a militant West African director. Interview: Daniel Kamwa’s ex-
Today, he concentrates on forming perience during Turbulences` new alliances to orchestrate an essentially African production, involving Cameroon as well as other countries. He has worked directly with South African studios for Turbulences (2015), a 3D-4k animated motion picture.
Daniel Kamwa @DR
This is the first time an African director authors an animated film with a message, suitable to all publics and using new digital technologies. The participation of the Inventio Corporation studio, under the direction of Pierre-Paul Nyobe enabled the Cameroonian director to created animated characters out of the modelization of Black actors, who were transformed and reinvaded thanks to computers. The post-production version was made in France to do French voices, and also circulates in subtitled version so as to conquer all African countries, even North America.
Turbulences retraces the adventures of a graduate couple who converted themselves into farmers upon a government initiative that encourages moving back to the land through subsidies. But they Michel Amarger: What brought you to do not receive the money and the farm25
South African cinema is strong. I remember that, when I used to work as an actor in France, many advertisements were shot in South Africa because they have excellent technicians, and are well equipped. Shootings also took place in Zimbabwe, then Rhodesia. It was near South Africa. There was a synergy. There even were great laboratories. Today, film rolls are used less and less and filming increasingly goes digital. In South Africa, professional technicians are therefore extremely easy to find and equipment is plentiful. Prices are much cheaper than in Europe.
M.A: What did you learn from them? Efficiency? Energy? D.K: A formidable efficiency; a great capacity to understand needs, the director’s vision, and sometimes, the capacity to anticipate the director’s needs. This is how the movie was made in easy conditions. When I say it took me three years to make Turbulences, people tell me that’s impossible, a movie of this stature takes six years. This shows how efficient they are, down in South Africa.
Turbulences de Daniel Kamwa @ DK7 Communications
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Cinema : Which relationships between South Africa and the African Continent ?
direct Turbulences in the South? Anima- The truth is that it would have been tion studios exist in Burkina Faso and easier for me to go to Burkina Faso Senegal, so why choose South Africa? because I already know the country, but I also had this need to discover Daniel Kamwa: There is no reason for that part of the continent, the South, the South to be cut off from the rest from which we have much to learn. of the continent. It is true that, during Apartheid, South Africa stood alone, M.A: What did you find there? A difbut today, with Nelson Mandela’s libferent state of mind than West African eration and his first presidential mantechnicians, in terms of work? date, there is a need to reach out to this country to show that South Afri- D.K: Since I had never worked with South cans are not alone. This, also, is the only African technicians, I cannot compare. way to see what they are capable of. In any case, I went on well with them.
more, most movies have subtitles in the target country’s languages. A foreign-language version presupposes that there is a great market and demand. My interest in doubling has brought me to believe that the reason for North American movies to be dubbed into French is because the French cultural sphere is quite important. Most importantly, there is Quebec who needs to have French versions of American movies. Turbulences de Daniel Kamwa @ DK7 Communications The dubbing occurs in France. The movies usually are movies for the wider public, blockbusters. So, even if I do hope to make a success, it is not my ambition to make a blockbuster. Dubbing Turbulences in English would require a lot of M.A: Did they go for financial partici- money, and there is no point of doing pation? it unless a film distributor requires it. D.K: Of course. That, too, is imporM.A: Are there any opportunities to distant because I never would have tribute the movie in the South, in Engbenefited from that type of financlish-speaking African countries, rather ing in any West African country. that in West Africa where the cost of life is less important, hence less profitable? M.A: Does this mean that you might start another venture with South Afri- D.K: I do not discriminate. We make can partners? less money here, we make more money there and then we make the averD.K: This is what I want… It could be age. Our aim is to make profits from the an animated motion picture, or somemovie to help make other movies. A film, thing else. Also, I’d like to see what poswhatever film that may be, cannot meet sibilities there are in terms of diffusion the same success everywhere. Some in South Africa. There is the Durban American movies are more popular Festival you told me about, and I think abroad that within the States. Some are I will try to see if Turbulences can be successful in France but not in the UK, screened there. This would be the occaeven though it should be the other way sion for me to create connections with round. So we make an average to know South African producers and authors – if we have made profit from the film. they have the capacity to do so much. M.A: Do you believe in the developM.A: Is there an English version of ment of inter-African partnerships? the movie to conquer that audience? D.K: We must believe in it and work toD.K: No. There only is a subwards that objective. It is necessary to titled version of the movie. do so. At the same time, ‘African’ cinema is spoken of as a whole when there M.A: Turbulences is in French. Is is a variety of film types and a creative that not an impediment to reach diversity. The Burkinabe film, directout the English-speaking market? ed by a Burkinabe, has nothing to do D.K: I do not think so. Today, more and with an Ivorian or Senegalese-direct-
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Michel AMARGER Afrimages France
REFErences : Invictus de Clint Eastwood, fiction, USA, 2009 Jit de Michael Raeburn, fiction, Zimbabwe, 1991 Kini et Adams d'Idrissa Ouédraogo, fiction, Burkina Faso, 1997 Le Cercle des pouvoirs, de Daniel Kamwa et Jules Takam, fiction, Cameroun, 1997 Le Complot d’Aristote de Jean-Pierre Békolo, fiction, Cameroun, 1996 Mâh Saah-Sah de Daniel Kamwa, fiction, Cameroun, 2008 Notre fille de Daniel Kamwa, fiction, Cameroun, 1980 Pousse-Pousse de Daniel Kamwa, fiction, Cameroun, 1975 Rhodesia Countdown de Michael Raeburn, documentaire, Zimbabwe, 1969 Triomf de Michael Raebrun, fiction, Zimbabwe, 2010 Tsotsi de Gavin Hood, fiction, Afrique du Sud, 2005 Turbulences de Daniel Kamwa, animation, Cameroun, 2015 Waati de Souleymane Cissé, fiction, Mali, 1994
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Cinéma : quels rapports entre l‘Afrique du Sud et le continent ?
ed film. We have different approaches. But, as of yet, not enough movies are made to define national specificities, so we speak of African cinema as music criticism speaks of ‘world music’. It is a catch-all category where we stuff everything that isn’t typically French or British. One speaks of ‘world music’ and conjures up African, French and Asian people altogether. And today, we speak of African cinema because it is the only way to designate all these somewhat scattered works originating from North Africa, West Africa and South Africa.
Qui est riche sans être généreux n’a rien
Necktie Youth by Sibs Shongwe-LaMer @Premium Films
Après 1994, l’Afrique du Sud s’est développée à grande vitesse et son cinéma, détenu jusqu’alors par une minorité afrikaans, s’est progressivement ouvert aux autres langues de la société multiculturelle post-apartheid. Comme partout ailleurs, cette ouverture ne signifie pas pour autant un changement de cap radical : aujourd’hui encore, les professionnels regrettent que le septième art sud-africain soit aux mains des mêmes personnes et que l’embauche de salariés noirs soit encouragée par des quotas et aides financières favorisant davantage la discrimination positive que les compétences.
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Alors que La Cité de Dieu (Fernando Meirelles, 2002) faisait des ravages du côté du Brésil et de l’Occident, un film comme Tsotsi accola à l’Afrique du Sud un label de « film de gangster » dont on commence pourtant, dix ans plus tard,
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à se lasser. Long-métrages de fiction, documentaires, séries TV… les gangsters sud-africains se sont tellement déployés sur les écrans que l’on attend avec impatience d’autres propositions, comme la violence intérieure portée par Skoonheid de Oliver Hermanus (2011), drame psychologique sur un homosexuel refoulé ou Necktie Youth de Sibs-Shongwe La Mer (2015) sur la désintégration d’un groupe de post-adolescents inadaptés aux attentes de la société qui les entoure. Certes, la violence des pays africains a trouvé en Afrique du Sud son paroxysme avec les films de gangster, aujourd’hui repris au Kenya (Nairobi Half Life de Tosh Gitonga) ou au Nigéria (A Mile From Home d’Eric Ameghien). Mais l’Afrique du Sud ne peut se limiter à ses propositions artistiques. Le pays possède une industrie cinématographique appuyée sur de solides infrastructures, maîtrise une langue anglaise hautement utilisée dans le business du septième
Cinéma : quels rapports entre l‘Afrique du Sud et le continent ?
Nairobi Half Life de Tosh Gitonga @ One Fine Day Films
Sur les écrans, l’Afrique du Sud a apposé une touche novatrice made in Africa avec des films montés à l’américaine (montage cut, effets spéciaux, utilisation de grues et d’hélicoptères), mêlant zoulou, xhosa, afrikaans et anglais. Des films comme Drum de Zola Maseko (Etalon d’Or du Fespaco 2005), U-Carmen eKayelitsha de Mark Donford-May (Ours d’Or du Festival de Berlin 2005), Tsotsi de Gavin Hood (Oscar 2006 du meilleur film étranger) et Nothing But The Truth de John Kani (Etalon d’argent du Fespaco 2009) révélèrent de nouveaux auteurs anglophones n’ayant rien à envier aux films occidentaux : maîtrise de l’interprétation, de la mise en scène et des choix esthétiques, idées novatrices, liberté de ton…
Beauty d'Oliver Hermanus @DR
sur pied un Fonds Sud devenu avec le temps l’Aide au cinéma du monde, ce n’est pas pour venir en aide aux pays en voie de développement n’ayant pas d’infrastructures cinématographiques mais plutôt pour entretenir sa propre industrie : un pourcentage de l’aide allouée doit être dépensée dans le pays, la plupart des chefs de poste des films aidés en sont issus et la post-production est généralement effectuée sur son sol. Un retour sur investissement bénéfique à la visibilité du pays, en somme.
art et a développé d’importantes relations professionnelles et commerciales avec l’Occident. Présente dans une dizaine de marchés et festivals internationaux de cinéma (Cannes, Toronto, Annecy, HotDocs, New York, Los Angeles…), l’Afrique du Sud est certainement le pays africain le plus offensif sur le marché. Seul hic, il est souvent considéré comme hors d’Afrique par ses voisins. « Quand je marche dans vos rues, je ne vois pas l’Afrique », avait ainsi asséné en guise d’introduction à sa master-class le réalisateur sénégalais Moussa Touré lors du Durban Film Festival 2012. A force de regarder vers le Nord et ceux qui ont de l’argent, l’Afrique du Sud oublie que c’est en terme d’offres et d’exclusivités qu’elle pourra se démarquer d’un marché toujours plus vorace et compétitif. En guise de comparaison, si la France a un jour mis
En ce sens, il est étonnant qu’un pays bénéficiant de financements nationaux, d’infrastructures solides et d’un rayonnement international comme l’Afrique du Sud n’ait pas encore songé à s’appuyer sur d’autres pays africains pour élargir son influence mondiale. Un fonds d’aide au court-métrage comme Africa First, organisé de 2008 à 2013 par la société de production américaine Focus Features qui offrait 10 000$ par projet à 5 réalisateurs africains par an, pourrait être un type d’aide porté par l’Afrique du Sud. Une aide à la production documentaire pourrait aller de pair avec le créneau télévisé AfriDocs, diffusant chaque semaine en prime-time depuis 2014 et dans 49 pays d’Afrique, des documentaires africains via les chaînes DStv et GOtv. Des bourses d’études pourraient être attribuées à des étudiants africains souhaitant se former dans une école de cinéma comme le permet l’Ecole supérieure des arts visuels (ESAV) de Marrakech au Maroc. Une aide à l’écriture de scénario, ou de résidence d’écriture pourrait compléter les prix attribués chaque année par le Durban FilmMart du Durban Film Festival. Une aide à la co-production de longs-métrages africains pourrait également être envisagée par la National Film and Video Foundation (NFVF)
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icaine à l’international sans tenter de copier ce que le marché possède déjà. Et en se réconciliant avec ses voisins, elle pourrait prouver qu’elle est une terre d’hospitalité. Car s’il faudra bien un jour produire et consommer africain, le cinéma ne dérogera pas à la règle. Un dicton ne dit-il pas d‘ailleurs que « qui est riche sans être généreux n’a rien » ? Comme dirait Nelson Mandela, « Cela semble toujours impossible, jusqu'à ce qu'on le fasse ».
Claire DIAO ASCRIC-B France / Burkina Faso
Références: A Mile From Home d’Eric Ameghien, fiction, Nigéria, 2013 Drum de Zola Maseko, fiction, Afrique du Sud, 2005 La Cité de Dieu de Fernando Meirelles, fiction, Brésil, 2002 Mon Nom Tsotsi de Gavin Hood,fiction, Afrique du Sud, 2005 Nairobi Half Life de Tosh Gitonga, fiction, Kenya, 2012 Nothing But The Truth de John Kani, fiction, Afrique du Sud, 2009 Necktie Youth de Sibs-Shongwe LaMer, fiction, Afrique du Sud, 2015 U-Carmen eKayelitsha de Mark Donford-May, fiction, Afrique du Sud, 2005 Skoonheid (Beauty) de Oliver Hermanus, fiction, Afrique du Sud, 2011
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Cinema : Which relationships between South Africa and the African Continent ?
tout comme une aide à la post-production, développée à la Mostra de Venise depuis 2013 (Final Cut Venice) et aux Journées Cinématographiques de Carthage (Takmil) depuis 2014, permettrait de sortir des œuvres sur le continent sans avoir à quémander du soutien hors du continent. Une aide à la distribution devrait évidemment être encouragée au vu de la visibilité dont bénéficie l’Afrique du Sud dans les marchés du film internationaux et de ses canaux de diffusion (comme DStv) sur le continent – nous ne parlerons pas ici du cas M-NET qui avait racheté les droits de nombre d’auteurs d’Afrique francophone pour les diffuser en VOD, au grand dam de ceux qui avaient financé ces films sans penser à une viabilité commerciale de ces oeuvres. Un pays d’Afrique seul ne peut s’imposer à l’international. Il peut montrer sa particularité et se vendre (comme le Maroc qui accueille 20 à 30 tournages internationaux par an) mais va très vite s’essouffler. Car le marché international est en quête perpétuelle de nouveauté, d’auteurs émergents, de projets inédits… En attirant à elle les meilleurs projets africains, l’Afrique du Sud pourrait défendre une identité 100% afr-
"The rich without generosity does not own a thing"
Necktie Youth by Sibs Shongwe-LaMer @Premium Films
Starting in 1994, South Africa stepped up its development, and its Afrikaans' minority- owned filmmaking industry gradually opened to other languages of the post-apartheid multicultural society. Yet, as it often happens elsewhere, this move did not translate into a radical change in orientation: even today, film professionals regret that the SA seventh Art is still under the control of the same people, and that the hiring of black employees is encouraged by quotas and financial incentives leading more to positive discrimination rather than to competence based selection.
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While City of God (Fernando Meirelles, 2002) was working marvels in Brazil and in the West, a film like Tsotsi was tagged as « gangsta film », a genre since developped in SA. As a result, ten yers after, people got tired of it. Through fiction features, documentaries, TV series SA gansta were so much all over the
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screens that people were eager to see new proposals such as internal violence as shown in Beauty by Oliver Hermanus (2011), a psychological drama about a repressed homosexual, or Necktie Youth by Sibs-Shongwe La Mer (2015) about the breaking-up of a post-teen group who cannot adapt to the expectations of the surrounding society. It is a fact that the violence in African countries has reached its peak in SA with gangsta films with echos in Kenya (Nairobi Half Life by Tosh Gitonga) or in Nigeria (A Mile From Home by Eric Ameghien). But SA cannot be limited to its artistic proposals. The country has a film industry based on a strong infrastructure, uses the English language which is highly in use in the cinema business and has woven strong professional and commercial ties in the Western world. SA participates in at least ten international markets and festivals (Cannes, Toronto, Annecy, HotDocs, New York,
Cinema : Which relationships between South Africa and the African Continent ?
Nairobi Half Life de Tosh Gitonga @ One Fine Day Films
On the screens, SA has imposed a new touch made in Africa through American style films (editing cuts, special effects, use of cranes and helicopters) mixing Zulu, Xhosa, Afrikaans and English. Films like Zola Maseko's Drum (Golden Stallion at Fespaco 2005), Mark Donford-May's U-Carmen ekayelitsha (Golden Bear at Berlin Film Festival 2005), Gavin Hood 's Tsotsi (Oscar 2006 of the best foreign film) and John Kani's Nothing But The Truth (Silver Stallion at Fespaco 2009) unveiled new Anglophone authors who could stand up to Western film standards: mastery of interpretation, direction and aesthetics, innovation, tone of voice…
Beauty d'Oliver Hermanus @DR
sustaining the French industry itself. Part of the assistance must be spent in France, most of the major posts of the film must originate in France and post-production is generally done on French soil. To summarize, it is a return on investment which benefits the country's image. In that regard, it is surprising to note that a country with national funding, solid infrastructure and an international exposure such as SA did not think of using other African countries as supports for enlarging its international influence. A short-film support Fund such as Africa First, as organized from 2008 to 2013 by the American production society Focus Features and offering $10,000 per project to 5 African producers a year could be a type of assisLos Angeles…); it is with no doubt tance born by SA. A support to docuone of the most offensive country in mentary production could be matched the market . The only problem is that with the TV series AfriDocs which has neighboring African countries often see been broadcasting African documenSA as foreign to Africa. “When I walk taries every week during prime time your streets, I do not see Africa” said since 2014 in 49 Africa countries via Senegalese director Moussa Touré in the DStv and GOtv channels. the opening speech of his master class, during the 2012 Durban Film Festival. Scholarships could be awarded to African students wishing to be trained in film schools as it is done in the School The habit of looking up to the North of Higher Education in Visual Arts and to those who have the money is (ESAV) in Marrakech, Morocco. making SA forget that the only walk to An assistance in script writing or resifreedom from a more and more vodential writing seminar could be set-up racious and competitive market is by to complete the prizes awarded every increasing its offers and its exclusive year by the Durban FilmMart of the productions. Durban Film Festival. Support could also be envisaged by the National Film and Video Foundation (NFVF) for the joint-production of African features, As in comparison, The Fonds Sud set just like the support to post-producup by France which turned later into tion done at the Mostra de Venise the Aide aux cinémas du monde is not since 2013(Final Cut Venice) and the simply a support to developing counCarthage International Film Festival tries that do not have film production (Takmil) since 2014. This would make it infrastructure. It is in fact a way of possible to produce films in the conti-
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neighbors the country can prove that it is a land of hospitality. Sooner or later, Africa will have to produce for its own A support to distribution should also consumption. And cinema will have to be encouraged, given the exposure that go by that rule. SA has on the international film market and its distribution channels (such as As the saying goes, « The rich without DStv) in the continent. Not to mention generosity does not own a thing ». As the case of M-NET which had bought Nelson Mandela would say, « Things the rights of many francophone Afriwill always look impossible to do, until can authors for VOD broadcasts at the you do it ». detriment of those who provided funding for the films without thinking about their commercial viability. An African country alone cannot achieve international recognition. It can show its peculiarities and sell its products (as is the case with Morocco which hosts 20 to 30 international shootings every year) but will soon lose ground. This because the international market is always looking for novelties, rising authors, new projects…
Claire DIAO ASCRIC-B France / Burkina Faso
By attracting the best African projects, SA could defend a 100 % African identity on the international scene without trying to copy what is already on the market. Through reconciliation with its
References: A Mile From Home by Eric Ameghien, fiction, Nigeria, 2013 Beauty by Oliver Hermanus, fiction, South Africa, 2011 City of God by Fernando Meirelles, fiction, Brazil, 2002 Drum by Zola Maseko, fiction, South Africa, 2005 Nairobi Half Life by Tosh Gitonga, fiction, Kenya, 2012 Necktie Youth by Sibs-Shongwe LaMer, fiction, South Africa, 2015 Nothing But The Truth by John Kani, fiction, South Africa, 2009 Tsotsi by Gavin Hood, fiction, South Africa, 2005 U-Carmen eKayelitsha by Mark Donford-May, fiction, South Africa, 2005
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Le succès d’un film africain à l’international impose-t-il sa carrière sur le continent ?
nent without having to beg for outside assistance.
Comment mesuret-on un succès international ?
Hijack Stories d'Oliver Schmitz @ Paradise Films
La question qui se pose presque immédiatement est de savoir : comment mesure-t-on un succès international ? La suivante est : où est le film ? Si je dis par exemple que Viva Riva ! représente une Nouvelle Vague africaine, je pense que ce serait une affirmation osée. Et, cependant, je suppose que peu d’Africains auront vu ce film en comparaison des tout derniers navets bollywoodiens en circulation. Les films d’arts martiaux asiatiques et les films de gangsters latino-américains ont réussi à s’accrocher et à imposer une carrière, alors, pourquoi pas l’Afrique ? Qui peut dire que tel 37
Dans son livre sur le cinéma africain, African Films–New Forms Of Aesthetics And Politics, Manthia Diawara identifie les trois axes majeurs de la nouvelle vague du cinéma africain. La vague ARTE avec Abderrahmane Sissako, Gahite Fofana, Mahamat-Saleh Haroun qui en sont les porteurs naturels; la Guilde des cinéastes africains, l’axe panafricain et de la diaspora, qui comprend Jean-Pierre Bekolo, Balufu Bakupa-Kanyinda, Jihan El Tahri, Newton Aduaka, et John Akomfrah; ainsi que l’axe narratif avec des réalisateurs tels que Zézé Gamboa, Mansour Sora Wade et Cheick Fantamady Camara. Le livre donne également une vision précise du rôle joué par le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) français dans la définition de ce que sont le cinéma et les cinéaste africains soit, de manière séparée, Sembène Ousmane, Souleymane Cissé et Idrissa Ouédraogo. Ce que ces axes ont en commun, c’est le financement européen, un financement qui, naturellement, ne constitue pas une générosité désintéressée : il est souvent conditionné par des droits de distribution dans des circuits non-commerciaux. Cela soulève, d’une part, la question de la viabilité commerciale
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pour des distributeurs éventuels – et donc du succès commercial international. De l’autre, l’existence de ces axes rend difficile la réussite au niveau trans-local sur la base du succès international. Le scénario est imposé de l’extérieur. Tout d’abord, les films africains qui sont dans les circuits internationaux vont simplement de festival en festival, dans les salles de cinéma d’art et dans les institutions éducatives. Ils peinent à être couronnés de succès, rapportent souvent très peu et sont rarement montrés dans les salles en Afrique. La prescription du Troisième Cinema de Tahar Cheriaa pour les cinéastes africains avait donné le LA : « Votre cinéma devra être un cinéma militant, écrivait-il. Il devra être d’abord et avant tout une action culturelle avec une valeur socio-politique, ou il ne sera rien. S’il devait également devenir une action économique, ce serait seulement un produit dérivé ». Cela a fait du cinéma africain, à ses débuts, un cinéma d’intellectuels, un cinéma qui n’a pas l’approche de viabilité commerciale – c’est-à-dire qu’il n’est pas produit sur la base des profits réalisés par d’anciennes productions – mais qu’il dépend plutôt de subventions en provenance essentiellement d’agences de financement européennes. Forcément, cela conduit, avec la disparition des luttes de libération à travers l’Afrique sub-saharienne, à l’ère du « cinéma calebasse » - un cinéma qui alimente les besoins de la vision européenne de l’Afrique, enfantin dans son innocence et sa simplicité. Alors que ce type de cinéma a réussi à se créer une niche à l’international, il n’a pu pénétrer que de façon marginale en Afrique. La raison en est, je pense, dans une large mesure, que ces axes de production sont intimement liés à la division coloniale et linguistique du continent et qu’on ne peut pas traiter la question
Le succès d’un film africain à l’international impose-t-il sa carrière sur le continent ?
film qui fait le buzz – particulièrement dans le groupe de cinéastes africains qui l’ont vu – va s’imposer ? Dans la mesure où il est possible de faire le lien ce qui vient à l’esprit sont certains films de gangsters essentiellement d’Afrique australe, commençant au moins par Mapantsula, Hijack Stories, Tsotsi, Jerusalema (Gangster’s Paradise). Que dirait-on des films “calebasse” d’Idrissa Ouédraogo – Yam Daabo, Yaaba, Tilai, Samba Traoré ? Et des films de Mahamat Saleh Haroun – Un Homme Qui Crie, Gris-Gris ? Est-ce qu’ils constituent une carrière imposée ? Le simple fait de poser la question est une réponse.
tude paternaliste européenne : reste sur ces films simples, tu te défais si tu t’essaies à la complexité.
Assaltos en Luanda de Henriques Narciso @DR
Il faut se rappeler qu’Idrissa Ouédraogo a obtenu le prix de la FIPRESCI avec Yam Daabo, le Grand Prix du Festival de Cannes avec Tilaï, l’Ours d’Argent de la Berlinale avec Samba Traoré. Plutôt que d’être imposé au niveau
Un homme qui crie de Mahamat-Saleh Haroun @Pyramide Distribution
sans se demander ce qu'est un cinéma africain ? « Tout d’abord je voudrais juste dire que l’utilisation officielle du terme «film africain » devrait vraiment faire l’objet d’un débat, a écrit le réalisateur franco-guinéen Mama Keïta. J’ai déjà dit que pour moi c’est une fausse étiquette… En ce qui me concerne, « cinéma africain » est une création coloniale, un raccourci utilisé par un certain nombre d’institutions françaises. Les gens parlent de « cinéma africain » de la même façon qu’ils diraient qu’ils ont du mal à distinguer un Africain d’un autre ». On aurait tendance à partager le point de vue de Mama Keïta. Quelqu’un peut parler de cinéma européen tout en distinguant les différentes approches nationales, c’est-à-dire le néo-réalisme italien, le cinéma expressionniste allemand, etc. Par ailleurs, il est étrange de voir que, malgré cette terminologie généralisante, chaque fois qu’on mentionne « cinéma africain » ou qu’on montre des films africains, on exclue généralement les films du Maghreb et même les films d’Afrique du Sud. Trop souvent le terme « film africain » se cantonne aux films des pays francophones.
Jerusalema de Ralph Ziman @ Entjha Films
Bien trop souvent le terme « cinéma africain » gomme toutes les différences et amalgame les films africains par un dénominateur commun. Cela découle de la perception exotique de l’Afrique comme étant noire ou comme étant un seul pays. Dans la mesure où les cinéastes africains ne remettent pas en cause cette perception en présentant leurs films dans toute leur diversité, cela devient un véritable fardeau. En quoi consiste ce fardeau ? Ici pourrais-je faire une petite digression en poursuivant une réflexion parallèle sans offenser quelqu’un ? Il me semble que le succès international relatif, c’est-à-dire lors de festivals internationaux de cinéma, de certains films ou cinéastes, se fonde sur du chauvinisme culturel et sur une atti39
On peut en dire autant d’Un homme qui crie, Prix du Jury à Cannes, de Haroun. Et cela parce que ces films ont été jugés « vrais ». En traitant de la pauvreté rurale en Afrique, ils ont montré clairement une vision primitive de l’Afrique en accord avec les stéréotypes européens. Ils ont remporté un succès relatif à des festivals internationaux - mais pas dans le domaine de la distribution internationale. On peut également dire la même chose des premiers films de gangsters avant Viva Riva ! Ils montraient la pauvreté urbaine en Afrique du Sud pendant et après l’apartheid. Cependant ce qui a marché en faveur de ces films a également été en leur défaveur : au-delà de la question de l’authenticité, combien de personnes du continent voudraient s’asseoir et subir les bombardements répétés d’images tirées de la réalité ? Le vivre ne signifie pas vouloir le voir. C’est en cela que réside la force et les faiblesses de Nollywood. C’est de cela que nous devrions parler maintenant. Très rapidement, sur Sembène. Prenez par exemple, Moolaade, Un film que je mentionne immédiatement après ce que je viens de dire plus haut, juste pour une question de relation entre les deux : la visibilité sur le continent. Malgré les critiques élogieuses du film – feu Roger Ebert, le critique de cinéma américain, lui a rendu un vibrant hommage – le seul pays africain où il est passé à l’écran, c’est le Maroc. Les films de Sembène, c’est sûr, n’ont pas été perturbés par des stratagèmes commerciaux. Il n’a pas fait des raccourcis vers des sensibilités européennes, pas de passes vers le cinéma « parfait » et, par conséquent, pas de succès international.
j’ai eue avec John Akomfrah, le cofondateur du Black Audio Film Collective, sur Sembène à propos du cinéma imparfait, sur pourquoi une évaluation du cinéma de Sembène demande une révision des standards traditionnels du cinéma. Selon les standards conventionnels du cinéma « parfait », les films de Sembène sont de mauvais films, pour ne pas dire imparfaits. Mais là n’est pas la question. Le succès artistique de Sembène – manque de perfection et autres – n’a pas réussi à l’imposer sur le continent. Mais Nollywood, sans succès international avec des prix dans les festivals, critiques élogieuses ou distribution internationale, est en train de se faire une place sur le continent. Djibril Diop Mambety avait dit au sujet du cinéma (africain) : « Je crois que les Africains, en particulier, doivent réinventer le cinéma. Ce sera difficile parce que notre public est habitué à un langage filmique spécifique, mais un choix devra être fait : soit être populaire et parler aux gens de façon simple et directe, soit chercher un langage filmique africain qui exclue le bavardage et se focalise davantage sur l’utilisation du visuel et du son ». De ce point de vue, on pourrait dire la même chose de Nollywood: soit on se rend de façon inconditionnelle aux carrières imposées, sans combattre, à la tyrannie du populaire, soit on cherche le courage et le sens artistique pour élargir les horizons de l’expérience filmique. La plupart du temps, j’utilise le terme Nollywood en tant que construction monolithique imaginaire fabriquée par la sémiologie du discours hégémonique de
J’ai le souvenir d’une conversation que @Nollywood Film Week
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Le succès d’un film africain à l’international impose-t-il sa carrière sur le continent ?
continental, le succès dans les festivals de ces films a juste renforcé la carrière personnelle de Ouédraogo en tant que collaborateur dans la production de films exotiques.
l'Occident. Avec le temps, la focalisation internationale sur Nollywood est passée de la curiosité des élites, à la fascination de l’exotique, à un regard biaisé et manipulateur qui reproduit l’hégémonie qui est si centrale aux relations impérialistes. La piété qui entoure l’écriture dominante du Nigéria n’est pas une victoire, mais une perte. Nollywood perd en appel en tant que réaction radicale à une écriture francophone figée, qui devient désirable en tant que seule écriture valable, juste parce qu’elle est populaire. La sémiologie, en tant que pure analyse sociologique et d’exposition de Nollywood – en tant qu’événement parallèle dans les festivals de film internationaux – est utilisée pour imposer Nollywood en tant que carrière filmique, un monolithe, une donne éternelle à travers le continent. Le carriérisme est une restriction des choix esthétiques : les populations, les populations africaines, ne désirent pas autre chose des films africains. Cette imposition – soutenue par les chercheurs universitaires qui ne se permettent de jouir de la culture populaire qu’après l’avoir recouverte d’une toge de respectabilité sous la forme de recherche académique (est-ce la seule façon pour eux de profiter de la culture populaire sans se sentir ghettoïsés ?) constitue une véritable fraude au niveau du continent. L’imposition de Nollywood à travers le continent et dans les milieux de cinéastes de la diaspora ne constitue pas une réinvention du cinéma africain. Ce n’est pas non plus le résultat du succès international de Nollywood. Ce serait plutôt une expression de l’inaptitude des films africains à avoir du succès à l’international sur le plan esthétique. Depuis toujours les films africains se fracassent sur les attentes construites du public international - dans le sens qu’il existe un standard esthétique pour
les films africains. C’est pour cela que les films africains qui réussissent dans les festivals internationaux ne s’imposent pas sur le continent. En se soumettant à ces attentes esthétiques, les cinéastes africains, et ce n’est pas leur faute, ne sont pas capables de faire une contre-critique esthétique. Car les films africains sont pour la plupart financés par des sources non-africaines.
Didi CHEEKA Nigeria
Références: CHERIAA, Tahar. "African Cinema and the Headshrinkers: Looking back at a Strategy for Liberation." In: African Experiences of Cinema d'Imruh Bakari et Mbye B. Cham, éditions BFI, 1996, pp: 42-44. DIAWARA Manthia, African Film - New Forms of Aesthetics and Politics, éditions Prestel, 2010 Hijack Stories d'Oliver Schmitz, fiction, Afrique du Sud, 2000 Jerusalema de Ralph Ziman, fiction, Afrique du Sud, 2008 Mapantsula d'Oliver Schmitz, fiction, Afrique du Sud, 1987 Mon nom est Tsotsi de Gavin Hood, fiction, Afrique du Sud, 2005 Moolaade de Sembene Ousmane, fiction, Sénégal, 2002 Samba Traoré d'Idrissa Ouedraogo, fiction, Burkina Faso, 1992 Tilai d'Idrissa Ouedraogo, fiction, Burkina Faso, 1990 Un homme qui crie de Mahamat-Saleh Haroun, fiction, Tchad, 2010 Viva Riva! de Djo Tunda wa Munga, fiction, DRC, 2010 Yaaba d'Idrissa Ouedraogo, fiction, Burkina Faso, 1989 Yam Daabo d'Idrissa Ouedraogo, fiction, Burkina Faso, 1986
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Almost at once, we confront the question: how is international success measured? And, following this, where is the movie? If I say, for instance, that Viva Riva! represents an African New Wave, I suppose it would be a truly audacious statement. And yet, I’d guess, fewer Africans have seen this movie than have seen the latest inane Bollywood fare. Asian martial arts and Latin American gangster movies had caught on and imposed a career, so, why not Africa’s? Who can say whether this film’s buzz – especially among the core group of African filmmakers who has seen it – will impose a narrative?
Hijack Stories d'Oliver Schmitz @ Paradise Films
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How does international success influence the recognition of an African Film in the continent?
How is international success measured?
To the extent it is possible to trace a connection, what comes to mind are certain gangster movies mostly from southern Africa, beginning at least with Mapantsula, Hijack Stories, Tsotsi, Jerusalema (Gangster’s Paradise). What oft he Calabash Cinemas of Idrissa Ouedrago – Yam Daabo, Yaaba, Tilai, Samba Traore? And the films of Mahamat Saleh Haroun – A Screaming Man, GrisGris? Do they constitute a career imposition? Merely to frame the question is to confront the answer. In his book on African cinema, African Films–New Forms Of Aesthetics And Politics, Manthia Diawara traces the three major strands in the “new African Cinema wave”: the Arte wave, with Abderrahmane Sissako, Gahite Fofana, Mahamat-Saleh Haroun as its standard bearers; The Guild of African Filmmakers, a pan-African and diasporic strand that includes Jean-Pierre Bekolo, Balufu Bakupa-Kanyinda, Jihan El-Tahri, Newton Aduaka, and John Akomfrah; as well as a “narrative strand” with directors like Zeze Gamboa, Mansour Sora Wade and Cheick Fantamady Camara. The book offers also a fine insight into the role the French Centre National du Cinema (CNC) plays in determining what African Cinema is and who the African Filmmaker is – separately, Sembene Ousmane, Sou-
leymane Cisse, and Idrissa Ouedrago. What these strands have in common is European funding. Funding, of course, was not disinterested munificence: it came, for the most part, with rights to distribute the films in non-commercial venues. This, on the one hand, raises the question of commercial viability – and hence, international commercial success – for would-be commercial distributors. On the other hand, the existence of these strands complicates translocal narrative imposition based on international success. Narrative is externally imposed. First of all, African films on the international circuit simply make the rounds of festivals, arthouse cinemas, and educational institutions. They hardly achieve international success and hardly turn in a profit, and hardly get seen in Africa. Tahar Cheriaa’s Third Cinema prescription for African filmmakers had set the tone: “Your cinema shall be militant cinema,“ he had written. “It shall be first and foremost a cultural action with social and political value, or it will be nothing. If it eventually can also become an economic action, that will only be a by-product.“ This had made African cinema, in its earlier phase, an intellectual’s cinema, a cinema that does not approach commercial viability – that is, producing on the basis of profits from previous productions – rather, one that depended on grants from mostly European funding agencies. Necessarily, this gave way, with the collapse of the liberation struggles across sub-Saharan Africa, to the era of “calabash cinema“ – a cinema that catered to Europe’s vision of Africa – childlike in its innocence and simplicity. Whereas this cinema established a niche for itself within the context of international cinema it penetrated Africa only peripherally. Because, I think, to a great extent that these strands are intimately connected with the colonial-linguistic division of the continent, one cannot really tack43
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Assaltos en Luanda de Henriques Narciso @DR Jerusalema de Ralph Ziman @ Entjha Films
It seems to me that the relative international success, that is, at international film festivals, of certain African films and filmmakers is based on cultural chauvinism, a patronizing European attitude: stick to these simple films, you outdo yourself when you attempt complexity. Recall that Ouedrago won FIPRESCI with Yam Daabo, Cannes’Grand Prix with Tilai, Berlinale’s Silver Bear with Samba Traore. Rather than constitute a continental imposition, these films‘ festival success simply solidifies
One can say the same of Saleh Haroun’s A Screaming Man, Cannes’Jury Prize. Because these fims were taken to be “true“ – in dealing with African rural poverty, they presented the pristine, primitive view of Africa consistent with European stereotype – they achieved relative success at
How does international success influence the recognition of an African Film in the continent?
All too often the term African Cinema erases all distinctions and conflates films from Africa into a common denominator. It stems from the exotic notion of Africa as black and as a country. To the extent that African filmmakers do not challenge this notion by presenting films in their diversity it becomes an imposition. In what does this imposition consist? Here, I wonder if I can digress somewhat and pursue a somewhat related thought without causing offense?
Ouedrago’s personal career as a professional collaborator in the production of exotica.
Un homme qui crie de Mahamat-Saleh Haroun @Pyramide Distribution
le the question without first posing the question: what is African Cinema? “First of all, I’d just like to say that the use of “African Cinema” as some kind of official term really needs to be discussed”, wrote French-Guinean filmmaker Mama Keïta. “I’ve already mentioned that I see this as a totally bogus label … As far as I’m concerned, “African Cinema” is a colonial creation, an abbreviation used by a range of French institutions. People say “African Cinema” in the same way they say they have problems telling one African from another.” One is inclined to agree with Mama Keïta. A person can talk about European cinema and still understand and delineate the various national strands, viz. Italian neo-realism, German expressionist cinema, etc. As an aside, it is curious to note that, in spite of the sweeping terminology, whenever “African Cinema” is mentioned, and whenever films from Africa are shown, films from the Maghreb and even South Africa are usually excluded. All too often, “African Cinema” exhausts itself in films from the Francophone.
international film festivals (not in international distribution). One can equally say the same of the earlier gangster films before Viva Riva! – they presented urban poverty in apartheid and post apartheid South Africa. However, this, that worked in the favour of these films, equally worked in their disadvantage: quite apart from the question of authenticity, how many people on the continent wants to sit through repeated bombardment with images ostensibly taken from the reality? That I live it does not necessary mean I want to see it. In this lies the strenght and weakness of Nollywood. We shall deal with this, presently.
task because our viewing audience is used to a specific film language, but a choice has to be made: either one is very popular and one talks to people in a simple and plain manner, or else one searches for an African film language that would exclude chattering and focus more on how to make use of visuals and sounds“. In this regard, one can say the same of Nollywood: either one surrenders unconditionally to the imposition of a career, without a fight, to the tyranny of the popular, or one searches for the courage and artistry to extend the borders of the film experience.
For the most part, I use the term Nollywood as the imagined monolith conBriefly, on Sembene. Take, for instance, struct produced by Western hegemonMoolaade, a film I mention immediately ic discourse. Over time, international after the above point for only one con- focus on Nollywood has shifted from necting reason: visibility on the conelite curiousity, fascination with the extinent. Inspite of the film’s critical acotic, to a one-sided gaze that is manipclaim – late American film critic, Roger ulative and reproduces the hegemony Ebert, gave it glowing tribute – the only so central to imperialist relations. African country in which it screened The piety surrounding Nigeria's mainwas Morocco. Sembene’s films, to be stream narrative is not a victory but a sure, was not troubled by commercial loss. Nollywood losses its appeal as a stratagems. He made no shortcuts to radical reaction to an ossified, FrancoEuropean feelings, no passes at “perphone narrative, becoming desirable, as fect“ cinema and, therefore, no interthe only valid narrative, just for being national success. I recall a conversation popular. Semiotics, in the sense of a I once had with Black Audio Film Colpurely sociological analyses and exlective co-founder, John Akomfrah, on hibtion of Nollywood – as a side show Sembene in connection with Imperfect in international film festivals – is used Cinema, on why a proper appraisal of to impose Nollywood as a career, a Sembene’s cinema demands a revision monolith, an eternal given accross the of customary cinema standards. By the continent. The careerism is in the reconventional standards of “perfect“ striction of aesthetic choices: people, cinema, Sembene’s movies are bad African people, are unwilling to enjoy movies, imperfect, so to say. But, that is not the point: Sembene’s artistic success – imperfectness, and all that – did not impose a career on the continent. Bet, Nollywood, without international success in the form of festival prizes, critical acclaim and international distribution is imposing a career on the continent. Djibril Diop Mambety had said, in connection with (African) cinema: “I believe that Africans, in particular, must reinvent cinema. It will be a difficult 45
The imposition of Nollywood as a career across the continent and among diaspora filmmakers is not a reinventing of African cinema. Nor is it a result of Nollywood’s international success. Rather, it’s an expression of the inability of African movies to achieve international success aesthetically. Always, movies from Africa smashes itself against the constructed expectations of international spectatorship – in the sense that there is a standard of aesthetics for African movies. It’s why African movies that succeed at international film festivals never impose a career on the continent. Having subordinated themselves to these aesthetic expectations, African filmmakers, mostly due to no fault of theirs, are unable to an aesthetic counter-critique: African movies are for the most part financed not from Africa.
Didi CHEEKA Nigéria
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Références: A Screaming Man by Mahamat-Saleh Haroun, fiction, Chad, 2010 CHERIAA, Tahar. "African Cinema and the Headshrinkers: Looking back at a Strategy for Liberation." In: African Experiences of Cinema / edited by Imruh Bakari and Mbye B. Cham. pp: 42-44. London: BFI Pub., 1996. DIAWARA Manthia, African Film - New Forms of Aesthetics and Politics, Prestel Ed., 2010 Hijack Stories by Oliver Schmitz, fiction, South Africa, 2000 Jerusalema by Ralph Ziman, fiction, South Africa, 2008 Mapantsula by Oliver Schmitz, fiction, South Africa, 1987 Moolaade by Sembene Ousmane, fiction, Senegal, 2002 Samba Traore by Idrissa Ouedraogo, fiction, Burkina Faso, 1992 Tilai by Idrissa Ouedraogo, fiction, Burkina Faso, 1990 Tsotsi by Gavin Hood, fiction, South Africa, 2005 Viva Riva! By Djo Tunda wa Munga, fiction, DRC, 2010
How does international success influence the recognition of an African Film in the continent?
something better from African movies. This imposition – helped along by academic researchers who can permit themselves to enjoy popular culture only after throwing a toga of respectability over it in the form of academic research (it is the only way they can permit themselves enjoy popular culture without feeling they are slumming?) – defraudes the continent.
nul n’est prophète en son pays ? ''Ce sont ces limbes, cette frontière entre le monde du tangible et de l’intangible - qui sont vraiment le royaume de l’artiste'' Federico Fellini
P
our connaître la réelle dimension et l'impact du cinéma africain en son propre continent, nous avons discuté avec des cinéastes et avons sondé des spectateurs. Autrement dit, nous avons cherché à connaître l’opinion, en amont et en aval, de ceux qui interfèrent dans ce processus. Nous avons donc écouté deux célèbres réalisateurs angolais qui ont partagé avec nous leur vision sur le fonctionnement du cinéma en tant qu’industrie et objet de loisirs dans le cas angolais. Une lecture qui pourra éventuellement être élargie à d'autres pays de la région.
Le but de cette enquête n’est nullement une étude scientifique, mais plutôt une façon de rapprocher les discours des participants concernant la manière dont les films sont perçus, leurs fonctions sociale et ludique dans le quotidien du public ciblé. Ainsi nous avons voulu entendre Zézé Gamboa 1 et Mariano Bartolomeu2 sur cette question et ses dérivations, Mariano Bartolomeu estime que le succès international d'un film africain aurait peu d'influence sur le continent même, et que, le cas échéant, cette influence reste très marginale. Selon lui, la réussite internationale se résume, le plus souvent, à un succès critique, car il s’agit de films qui, dans 47
l'arène internationale (disons en Europe, et maintenant d'une manière plutôt timide aux États-Unis), passent principalement dans les festivals de cinéma. Ce n’est que dans ce contexte qu’ils sont reconnus. Il poursuit son raisonnement: « (...) Même un film comme Viva Riva!3 - réalisé suivant une formule plutôt commerciale au lieu d’un langage plus « artistique » et « intellectuel », comme il est souvent d’usage dans les films acclamés par la critique internationale - n’aurait pas vraiment connu de succès auprès du grand public, quantitativement parlant. Contrairement aux films réalisés en interne, qui sont conçus clairement à l’intention du public local, sans prétentions techniques et loin d’un quelconque raffinement esthétique. Je pense notamment aux films produits et tournés selon la formule de Nollywood. Ce sont ceux-là qui parviennent normalement à attirer l’attention du grand public africain. Ce succès peut avoir des échos auprès de la diaspora en Europe et aux Etats-Unis, à tel point qu'il existe déjà un marché de fait pour ces films. En Angola, il y a quelques années, nous avons assisté au phénomène des films de Nathaniel Narciso, lequel, avec des films comme Assaltos em Luanda 1 et 2 a connu un grand succès de box-office auprès du public local (...) ».
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ariano Bartolomeu considère que, tout comme l’Angola, plusieurs pays africains ont essayé de simuler la formule nigérienne, obtenant ainsi un certain succès commercial. Le dénominateur commun de ces films serait le fait que leurs auteurs savent écouter les attentes thématiques d’un public spécifique. Ils reflètent la vie quotidienne et les croyances locales, ou précisément africaines, c’est-à-dire, que ces œuvres offrent une auto-identification immédiate du public avec la réalité exposée à l'écran.Mariano Bartolomeu poursuit son explication sur les options des cinéastes et des scénaristes sur le continent: « (...) On peut envisager deux formes différentes de succès lorsque l’on parle du cinéma africain actuel. D’abord, celui en rapport avec la critique internationale, comme, par exemple, ceux d' Abderrahmane Sissako, acclamés dans des festivals internationaux, mais qui, hélas, ne vont pas forcément rencontrer un large public en Afrique. Ensuite, le succès au box-office des films de Nollywood et d'un certain cinéma qui, bien que techniquement reste encore quelque peu rudimentaire, rencontre un accueil favorable auprès des spectateurs locaux. 48
Zézé Gamboa estime quant à lui que suite à la fermeture des salles de cinéma dans la plupart des pays africains, même les films ayant connu un certain succès sur la scène internationale, ne sont pas vus. Tout cela à cause du manque de distributeurs et d'exploitants. Selon le cinéaste, dans cette industrie, entre autres, l'existence de la production, de la distribution, et de l'exploitation est impérative. Donc, en conséquence de ce manque de salles, tout ce qui est inhérent à la visibilité et à la disponibilité des films reste replié sur soi. Zézé Gamboa conclut son analyse en soulignant certains contextes spécifiques: « (...) Il y a une situation particulière, ce sont les festivals ; ils comptent sur une audience assidue, et il existe plusieurs festivals de cinéma en Afrique. D'autre part, les chaînes de télévision, qui seraient le véhicule idéal pour diffuser nos films, n’ont pas de capacités financières pour les acheter. Ceci dit, nous voilà doublement pénalisés. À Luanda, avec les nouveaux centres commerciaux, apparaissent des salles de cinéma relativement bien équipées. Mais il faut savoir que Luanda n’est pas le reste du pays, et cet effort sera donc le bienvenu lorsqu’il aura une dimension nationale. En plus de tout cela, il faut absolument trouver des soutiens réels pour le cinéma (...) »., Ainsi, pour faire un peu la synthèse de ces deux opinions avec mes convictions personnelles, on peut retenir l’idée suivante : le succès du cinéma africain sur la scène internationale a un impact réduit dans les pays d’origine et le continent en général, en vertu de la fragilité des chaînes de distribution et de strutures physiques
Le succès d’un film africain à l’international impose-t-il sa carrière sur le continent ?
Zézé Gamboa @OGlobo
Il faudrait trouver une formule qui permette l’approche de ces deux courants. Je suis persuadé que les nouvelles générations de faiseurs de films africains, très exposées à des sites Web comme YouTube, Vimeo, etc., trouveront un jour la bonne méthode pour réussir aussi bien à l'extérieur qu’à l'intérieur du continent ».
correctement mises en place ayant une couverture efficace et homogène dans les pays africains. Les grandes villes comme Luanda feraient l’exception, mais comme le remarque Zézé Gamboa, « Luanda n’est pas le pays ». Nous nous rendons compte qu'il y a des formules commerciales à succès à court terme, qui sont à l'opposé du cinéma pérenne, doté d’un but esthétique, et qui aspire non seulement à servir d’objet de détente immédiat mais aussi à informer, former et proposer un débat autour de plusieurs thèmes universels qui invitent à une réflexion sur la citoyenneté. Ces deux courants principaux résument les diverses logiques du cinéma africain en fonction de l'intention de ses créateurs et du public ciblé. Entre le cinéma d’élites et le cinéma populaire, voire à tendance kitsch, je me permets de penser qu'il y a un océan de possibilités et de langages à explorer. La présence de films africains dans les festivals continue d’être une forme de communication par excellence, aussi bien au niveau de la fiction que des documentaires. Ce qui, par ailleurs, permet de donner une certaine visibilité à de nouvelles valeurs et de voir des films qui abordent des sujets échappant au regard des médias dominants ; ce sont en général des films conçus pour des spectateurs attentifs, dont les intérêts ne sont pas réduits aux blockbusters habituels. Ils cherchent des voies alternatives dans le cinéma, aussi bien au niveau du contenu que de la forme. On trouve presque toujours de bonnes surprises dans ces festivals, notamment ceux en langue portugaise, mais je suis consciente que ces œuvres atteignent à peine le public dans les pays d'origine, et de manière évidente, en dehors de ces circuits. Je crois, comme l’affirme Mariano Bartolomeu avec espoir, qu’il est possible en effet de concilier la rigueur artistique et l’aspect commercial ; le cinéma est un
art, mais aussi une industrie, et s’il ne génère pas de recettes… il finira par se noyer dans le regard d’une douzaine de fanatiques ou des spectateurs festivaliers inconditionnels, comme moi… Je le fais d’ailleurs de façon engagée et avec des attentes toujours renouvelées! Les films sont des images dynamiques, des histoires qui racontent la vie des gens. Les spectateurs sont toujours à la recherche d’une quelconque identification, qui puisse créer de l'empathie, les provoquer, les intriguer et faire surgir des émotions. Mais qu'en est-il des spectateurs de films africains en Afrique ? Dans l’Afrique qui m’est plus familière, la lusophone, je crois que la plupart des spectateurs s’intéressent principalement aux films reconnus l’international, les plus médiatisés. La production locale reste peu connue ; d’une façon résiduelle, on pourrait quelque fois discuter sur des films africains qui ont fait l'objet d'une certaine attention dans des festivals comme Cannes. Au cours des dernières années, je me suis battue avec acharnement et une grande joie pour le soi-disant dialogue Sud / Sud, en ce qui concerne le cinéma. À travers cette petite utopie, autour de laquelle j’ai pu réunir des partenaires tout aussi motivés, notamment le Jornal Cultura en Angola, le site Buala, le magazine portugais Metropolis ou le portail brésilien O Gazzetta. Ensemble, nous avons cherché à informer les pays lusophones au sujet de certains films provenant d’Afrique lusophone et francophone ; il s’agit pour l’instant d’une première étape, que j’espère un jour pouvoir se transformer en un projet plus inclusif. Nous, public Africain, regardons souvent vers le Centre, vers l’Occident, sans savoir ce qui se passe dans d'autres pays périphériques où nous avons,cependant, des œuvres dignes d’intérêt. Ces œuvres, bien que tournées avec des moyens techniques 49
pantes. Les projections de films dans la langue locale permettraient également d’arriver à cette popularisation, en quelque sorte, laissant au spectateur le confort de se concentrer uniquement sur la narration.Il y a aussi la question de la globalisation. Lorsque Mariano Bartolomeu parle de l'auto-identification du spectateur qui se revoit dans les films qui décrivent le quotidien du « voisin de palier », à l’image des télé-réalités, cela me fait réfléchir aussi à la motivation opposée : celle qui nous mène à aimer l'inconnu, le mystérieux, le lointain, l’inaccessible… à ce qui nous fait rêver. Quelque chose de très périphérique peut-être, qui nous conduit incessamment à la recherche, à travers d'autres cultures, de ce que nous ne trouvons pas dans la nôtre, par manque d’amour-propre culturel, quisait une marque d’une identité postcoloniale, ou par simple méconnaissance. En guise de conclusion - et pour clôturer un débat qui ne se terminera pas dans cet espace, et encore moins dans cette brève synthèse ! - je dirais que le succès du cinéma africain sur notre continent, au-delà des aspects pra-
Assaltos en Luanda de Henriques Narciso @DR
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Le succès d’un film africain à l’international impose-t-il sa carrière sur le continent ?
réduits, font preuve d’une qualité technique positive. Nombre de ces films sont autoproduits ou faits presque sans budget, à l'aide de professionnels qui acceptent de travailler sans salaire, juste pour la gloire et le plaisir de participer à un travail qui permette d'élever le statut du cinéma sur le continent et le statut du continent dans le cinéma. Parfois, ils incluent aussi des non-acteurs, qui s’adaptent à des rôles plus proches de leur réalité quotidienne sans grande difficulté, grâce à leur talent naturel et à un encadrement forcément professionnel. Bien sûr, ce modèle ne serait pas viable à long terme, mais il constitue une preuve claire de la motivation qui mène certains professionnels du cinéma, y compris les réalisateurs, acteurs et techniciens divers, a surmonter des difficultés insoupçonnables et faire des films, financés par leur patrimoine personnel, le crowdfunding et des années de patience et de persévérance. C’est parfois un travail amateur qui se déroule maintes fois dans un climat de grand professionnalisme... Le cinéma peut également représenter une forme de démocratisation et niveler les lettrés et les illettrés dans l'amour du langage des images et des dialogues. Je me souviens que Sembène Ousmane a évoqué cet aspect, le fait que le film puisse être accessible à tout un chacun. Néanmoins, dans les pays de langue portugaise il y a une tradition du sous-titrage des films, à l’exception de certains films d'animation pour les enfants. Ce qui exige nécessairement la lecture des sous-titres, sauf si le spectateur comprend la langue des dialogues. Ce travail de décodage demande également une capacité de lecture rapide tout en faisant attention aux images. Pour nous, il s’agit d’une habitude que l’on cultive et que l’on apprécie, car cela permet de connaître la voix de l'acteur : un outil irremplaçable et souvent une de ses caractéristiques les plus frap-
Mariano Bartolomeu @ Banda Sapo
1 - Réalisateur, scénariste et producteur angolais, auteur de plusieurs documentairesdepuis les années 90 et de deux longs-métrages: O Herói et O Grande Kilapy.
tiques d’ordre conceptuel déjà évoqués par les réalisateurs mentionnés ci-dessus, ce succès passera forcément à l’avenir par la connaissance de notre place parmi nos pays, et à une certaine manière complice de regarder vers l'intérieur. Tout en comprenant notre place relative pour mieux nous intégrer dans un monde où les frontières culturelles s’atténuent graduellement.
2. Réalisateur de cinéma et de télévision, producteur angolais, auteur de plusieurs courts-métrages de fiction. Il habite actuellement aux Etats-Unis, prépare un script sur un film historique et un long-métrage (road-movie) 3 Long-métrage de fiction. Film policier du réalisateur congolais Djo Tunda wa Munga..
Luisa FRESTA Angola
References: Viva Riva ! by Djo Tunda wa Munga, fiction, DRC, 2010 Assaltos em Luanda 1 de Henriques Narciso, fiction, Angola, 2007 Assaltos em Luanda 2 de Henriques Narciso, fiction, Angola, 2009
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''It’s this in-between…this frontier country between the tangible world and the intangible one – which is really the realm of the artist" Federico Fellini
I
n order to ascertain the real dimension and the impact of African cinema in it’s own continent, we discussed with filmmakers and sounded spectators. In other words, we tried to know the opinion, upstream and downstream, of those involved in the process. We therefore listened to two famous Angolan directors who shared with us their vision on the functioning of cinema as industry and as leisure in the Angolan case. This vision can also be extended to other countries in the region. The purpose of this survey is not a scientific study, but a way of bringing together what participants have to say about how they perceive films, and their social and entertainment functions in the daily life of the targeted audience. Hence, we wanted to listen to Zézé Gamboa and Mariano Bartolomeu about this question and related issues. Mariano Bartolomeu thinks that international success has little or maybe a very marginal bearing on its status on the continent. In his opinion, international success often narrows down to success in terms of critic, as this is often the case for films which, in the international arena (let’s say in Europe, 52
and now to a smaller extent, in the United States) are often shown during festivals. They achieve recognition only in those contexts. He went further to say “(…) Even a film like Viva Riva which was shot following a commercial line, instead of using a more “artistic” or “intellectual” language as is often the case for films which receive international critics’ acclaim – would have not really met with success with the general public, quantitatively speaking. As opposed to films produced locally, which are directed at a local public, with no technical ambitions and far from any aesthetic refinement. I am thinking about the films produced and shot in the Nollywood way. These are the films, which normally attract the attention of the greater African public. This success may catch the attention of the diaspora in Europe and the United States, as witness the already existing de facto market for these films. In Angola, a few years ago, we witnessed the phenomenon of the films by Henriques Narciso, who, through films like Assaltos em Luanda 1 and 2 achieved a huge box office success with local audiences (...)”. Mariano Bartolomeu considers that,
How does international success influence the recognition of an African Film in the continent?
No One is a Prophet in His Own Country?
Zézé Gamboa @OGlobo
much like Angola, several African countries have followed the Nigerian example and have achieved some commercial success. A common denominator between these films is that the authors know how to listen to thematic expectations from specific audiences. They reflect daily life and local creeds, or specifically African, meaning that they allow the public to immediately identify itself with the reality displayed on the screen. Mariano Bartolomeu goes on with his explanation about the options available to filmmakers and screenwriters of the continent: “(…) One can imagine two different types of success when speaking about the present day African cinema. First of all, there is the success tied to international critic, like, for instance, the films made by Abderahmane Sissako. His films meet public acclaim at international festivals, but, alas, do not necessarily find a large audience in Africa. Then, there is the success of Nollywood films and that of a certain type of cinema, which in spite of being technically rudimentary, are favora-
bly received by local audiences. It may be necessary to find a formula mixing the two approaches. I am convinced that the new generation of African filmmakers who are exposed to websites such as Youtube, Vimeo, etc., will one day find the good method for achieving success both outside and inside the continent”.Zézé Gamboa considers for his part that, due to the closure of film theaters in most African countries, even internationally acclaimed films are not viewed. This is because of the lack of distributors and exhibitors. According to the filmmaker, in this industry, among others, it is imperative to have production, distribution and exhibition. Hence, due to the lack of theaters, anything pertaining to visibility and availability remains withdrawn. Zézé Gamboa concludes his analysis by underlining some specific contexts: “Festivals constitute a particular situation; they depend on a regular audience, and there are many festivals in Africa. On another hand, TV channels that could be the ideal vehicles for broadcasting our films do not have the financial capability to buy them. This is a double punishment for us. In Luanda, new and well-equipped movie theaters are emerging along the new commercial centers. But Luanda is not the rest of the country, so that this trend will be most welcome when it becomes national. In addition to all this, real supports are absolutely needed for cinema (…)”. So, in order to somewhat synthetize these two opinions with my own personal convictions, the following idea can be retained: the success of the African cinema at the international level has a limited impact in the countries of origin and the continent at large, based on the fragile distribution channels and the physical infrastructure well put in place and having an adequate and homogenuous coverage in the African countries. Big cities like Luanda would be an exception, but as Zézé Gamboa commented: “Luanda is not the country”.
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blockbusters. They are looking for alternative ways in cinema, as much in terms of content than of form. There are always good surprises to be found in these festivals, particularly those in Portuguese, but I am aware that these productions barely reach the public in the countries of origin, and obviously outside these circuits. I think, as Mariano Bartolomeu stated with hope, that it is in fact possible to combine artistic rigor commercial aspect; film is an art, but also an industry, so if it does not generate income‌ it will in the end drown in the eyes of a dozen fanatics or staunch festival spectators like myself‌ I actually do it as a committed spectator and with always renewed expectations! Films are dynamic images, stories, telling the lives of people. Spectators are always in search for some form of identification, which can generate empathy, be challenging to them, intriguing and bringing out emotions. But what of spectators of African films in Africa? In the part of Africa with which I am more familiar, i.e. the Lusophone, I
How does international success influence the recognition of an African Film in the continent?
Viva Riva! de Djo Tunda wa Munga @Music Box Films
We realize that there are short-term successful commercial method, in opposition to a perennial cinema, with an aesthetic objective, and which not only aims at being a ready entertainment tool but also at informing, training and offering a debate covering several universal themes, while inviting people to reflect on the issue of citizenship. These two main currents summarize the different logics of African cinema depending on the intention of the creators and on the targeted audience. Somewhere between the elites’ cinema and the popular movies, and even the kitsch type, I am inclined to think that there is a wide array of possibilities and languages to explore. The presence of African films in festivals continues to be a privileged form of communication, as much for fiction as well as for documentaries. Besides, this allows some visibility for new values and for films dealing with subjects escaping the sight of the major media. These are films, which are thought out for attentive public who are not interested only in the usual
Viva Riva! de Djo Tunda wa Munga @Music Box Films
think that most spectators are mainly interested in films which had international recognition, the ones in the media. Local production remains little known; finally, one could sometimes discuss about films which attracted some attention in festivals like Cannes. Over the past years, I have fought hard and with enthusiasm for the so-called South/South dialogue, for what pertains to cinema. Through this little utopia, I was able to gather equally motivated partners, particularly the Jornal Cultura en Agola, the Buala site, the Portuguese magazine Metropolis or the Brazilian Portal O Gazetta. Together we have tried to inform the Lusophone about certain films coming from Lusophone and Francophone Africa; this is a first step for the time being, I hope it will turn one day into a more inclusive project. We, as African public, we often look towards the Centre, towards the West, without knowing what is happening in other peripheral countries where we do have worthy productions. These works, even when shot with limited technical means, have proven to be of positive technical quality. Many of those films is self-produced or produced almost without a budget, thanks to professionals who agree to work without pay, just for the glory and
the pleasure of taking part in a job which raises the status of cinema in the continent and the status of the continent in cinema. Sometimes, they include non-actors, who adapt with no big difficulty to roles close to their daily lives, thanks to their natural talents and to a necessarily team of professionals. Of course, this model will not be sustainable over the long run, but it constitutes a clear proof of the motivation leading some cinema professionals, including directors, actors and various technicians to overcome incredible difficulties and make films, funded with their own resources, crowdfunding and years of patience and perseverance. It is often an amateur work often conducted in a climate of great professionalism‌ Cinema can also represent a form of democratization that evens out educated and non-educated people in the love for image language and dialogues. I remember that Sembène Ousmane mentioned this aspect, the fact that film can be accessed by everyone. Yet, in Portuguese speaking countries there is a tradition of adding subtitles to films, except for some animation films for children. That necessarily requires the reading of subtitles, unless the spectator understands the language of
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say that the success of African cinema in our continent, beyond the practical aspects of conceptual nature that the above mentioned film directors already touched on, this success will go in the future mandatorily through the knowledge of our place in between our countries, and a knowing way of looking towards the interior. While understanding our relative place for better integrating a world in which cultural barriers are gradually fading away.
References : Viva Riva ! by Djo Tunda wa Munga, fiction, DRC, 2010 Assaltos em Luanda 1 de Henriques Narciso, fiction, Angola, 2007 Assaltos em Luanda 2 de Henriques Narciso, fiction, Angola, 2009
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Luisa FRESTA Angola
Le succès d’un film africain à l’international impose-t-il sa carrière sur le continent ?
the dialogues. This de-coding requires fast reading capabilities while paying attention to images. For us this is a habit that we cultivate and appreciate because it allows one to know the voice of the actor: an irreplaceable tool and often one of its most striking characteristics. Screening films in local language could also facilitate somewhat this popularization, giving the spectator the comfort of focusing only on the narrative. There is also the issue of globalization. When Mariano Bartolomeu speaks of the self-identification of the spectator who sees himself in the films describing the everyday life of the “next door neighbor”, like in the reality shows, this makes me think of the opposite motivation: the one that leads us to like the unknown, the mysterious, the remote, the un-accessible… what makes us dream. Something peripheral maybe, which leads us continuously to research, through other cultures, into what we cannot find in our own culture, for lack of cultural self-esteem, and who knows a post-colonial identification mark, or simply by ignorance. As a conclusion – and to close a debate that will not end in this space, and even less in this short synthesis! – I would
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Affiche @DR
NUL N'est prophte EN SON CONTINENT
Le succès, notion relative que l’on attribut à une œuvre, un film en l’occurrence, ne peut pas vraiment se mesurer. S’agissant de succès pour un film africain, la question devient opaque, voire assez difficile, si on se réfère à la norme internationale.Qu’entend-on par succès ? Le succès d’estime ou en salle ? Son voyage à travers les festivals où il n’appartient plus à son auteur ? On se perd parfois dans cette question mais c’est pour la bonne cause, tout en donnant de temps à autres, de cela doit naitre de la maison mère. Des beaux exemples. productions internationales qui ont mené l’Afrique dans les cérémonies les Mais peut-être qu’il plus prestigieuses mais il reste quand faut que le parcours même une ombre au tableau et non d’un film commence des moindres. depuis son berceau de naissance, car cette reconnaissance doit Le financement d’abord naître en Afrique. Il y a eu de beaux exemple par le On va vite en besogne, mais le financepassé, comme, oui c’est un peu chauvin ment est une pierre angulaire, il est le de le citer, Chronique Des Années De nerf de la guerre cinématographique et Braise de Mohamed Lakhdar-Hamina, le carburant à tout bon projet. Il s’agit avec un succès critique qui a amené d’une ombre au tableau pour plusieurs une Palme d’or pour l’Afrique lors du raisons, une des principales serait festival de Cannes en 1975, une année le fait que, pour qu’un film réussisse après sa sortie, car il n’appartiendra à l’international, il faut que le sujet jamais au Panthéon du cinéma arabe traité soit propre au continent, ainsi, mais bien du cinéma africain. Il faut l’exportation du film sera plus facile, aussi dire que cette œuvre maitresse la spécificité est une base de réussite de Lakhda-Hamina avait recueilli un pour l’international. Quand on parle de peu plus de 500 000 entrées lors de sa l’Algérie, ce sera soit un film sur le cosortie en France. lonialisme ou la décennie noire, pour la Tunisie, la révolution de jasmin ou plus Les Dieux Sont Tombés Sur la Tête de récemment le Mali avec la domination Jamie Uys, succès commercial sans islamiste dans ce territoire, etc… Tout conteste, qui connut un succès interest une question de sujets traités, qui national, qui confirme l’adage, nul n’est devront mettre en lumière une période prophète en son pays, en sachant que
Fidaï de Damien Ounouri, qui parle de l’histoire de son grand-oncle, ancien combattant au sein du FLN en France, a connu des échos à travers le monde, en Afrique notamment. Paradoxalement, son pays d’origine, l’Algérie, bien qu’accueilli et diffusé dans moult festivals, n’a pas connu une large distribution du fait de manque d’infrastructures, à savoir les salles en somme.Malgré tout, certains films sont devenus des monuments du cinéma africain, bien que ne connaissant pas une destinée continentale comme on pourrait l’imaginer, comme Les vacances de l’Inspecteur Tahar de Moussa Haddad ou bien Washma (Traces) de Hamid Benani. Après tout, tout est question de vision, la popularité d’un film à l’international ne signifie pas forcément une carrière continentale, et là on ne parle que des derniers films diffusés dans le monde via des festivals de renommée. On peut toujours chipoter mais c’est une réalité, qui est relative à certains
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desseins politiques étrangers (attention propos fallacieux mais à demi vrais), on ne va pas crier à la paranoïa loin de là, mais force est de constater qu’on ne va pas voir un film d’action africain qui fera l’objet d’un remake de la part d’Hollywood. Mais il faut rappeler que le succès est une notion relative, le succès en salles est de prime abord ce qui domine d’habitude, mais le succès est aussi l’impact que laissera un film dans les esprits. Mais après tout, on ne peut jamais être catégorique sur la question du succès d’un film africain sur ses propres terres. Du moins, c’est ma vision des choses, il y a succès et succès, le succès critique, il est vrai, doit avoir plus d’importance qu’un succès commercial mais pour ça, encore faut-il que l’Afrique, je parle de tout le continent, soit dotée d’une industrie performante, que ce soit au point de vue qualitatif que quantitatif. A l’exception peut être du Nigéria.
Le succès d’un film africain à l’international impose-t-il sa carrière sur le continent ?
Fidaï de Damien Ounouri @Les Films de l'Atalante
de l’histoire qui parlera au spectateur européen.
Pour conclure, le cinéma africain est déjà bien présent dans divers festivals, mais son véritable giron n’est pas encore fixé. Petit phrase pleine de doute, en attendant la réponse d’un détracteur.
Bilel BOUDJELLOULI Algérie
Références Chroniques des années de braise de Mohamed Lakhdar-Hamina, fiction, Algérie, 1975 Fidaï de Damien Ounouri, documentaire, France/ Algérie, 2012 Les Dieux sont tombés sur la tête de Jamie Uys, fiction, Afrique du Sud, 1980 Les vacances de l’inspecteur Tahar de Moussa Haddad, fiction, Algérie, 1972 Washma de Hamid Benani, fiction, Algérie, 1970
Chroniques des années de braise de Mohamed Lakhdar-Hamina @Film Distribution
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What does success mean? Is self-esteemed or public success? Is it gained through festivals, in which case it does no longer belong to the author? We are sometimes at a loss with this question, but it is for the good cause, since it is leading us to good examples from time to time.
Yet it may be necessary that the career of a film starts from the cradle, as this recognition must first start in Africa. There have been good examples in the past, like – yes this a bit chauvinistic to cite it –Mohammed Lakhdar-Hamina’s Chronicle of the Years of Fire. It won critique success which led to a Golden Palm for Africa at the 1975 Cannes Festival, just one year after it came out. And this film will never be counted as a monument of Arab Cinema but as success of African Cinema. It must be added that this masterpiece by Lakhdar-Hamina recorded over 500,000 entries when it was shown in
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France. The Gods Must Be Crazy by Jamie Uys, was a commercial success which won international fame, confirming the saying that no one is a prophet in his own country, knowing that this should originates from the alma mater among all the international productions which led Africa to the most prestigious ceremonies while remaining a major darkness spot. Funding This is going fast, but funding is a cornerstone, the sinews of the cinema war and the fuel of any good project. It’s a spot of darkness for several reasons, one of the main ones being that, for a film to reach international success, the subject must be specific to the continent, so that it can be exported easily, specificity being a base of success at the international level. When speaking of Algeria, the film must be on colonialism or the ten years of darkness, for Tunisia it must be the
How does international success influence the recognition of an African Film in the continent?
Affiche @DR
Can anyone be a prophet in his own continent?
Success is a relative concept applied to a piece of work, a film in this case. It cannot really be measured. When it comes to an African film, the question becomes fuzzy, or even difficult when referring to international standards.
Fidaï de Damien Ounouri @Les Films de l'Atalante
Jasmin Revolution, and more recently Islamic domination in Mali, etc. It all depends on the subject which must highlight a period of History that is appealing to a European spectator. Fidaï by Damien Ounouri which tells the story of his grand-uncle, a former fighter with the FLN in France, was recognized worldwide, particularly in Africa. But in his country of origin, Algeria, despite the fact that it was screened in many festivals, it was not distributed widely because of the lack of infrastructure, i.e. the lack of movie theaters. Despite all this, some films have become icons of African cinema, while not being known on the rest of the continent as could be expected. This is the case with Inspector Tahar’s Holidays by Moussa Haddad or Washma (Traces) by Hamid Benani. After all, everything is a question of perspective, international fame does not mean continental success, and here we are only mentioning the last
films screened worldwide via known festivals. One can always quibble about this situation but it is a fact, related to some foreign political objectives (caution: these words are misleading but they are half true). Far from being paranoid, it is a fact that people will not go see an African action movie “remade” in Hollywood. But it is important to remember that success is a relative concept, success in showrooms is what is seen first, but success is also based on the impact a film will have on minds. Anyway, you can never be categorical about the success of an African film in Africa. At least this is my opinion, there is success and success. It’s true that success based on critique must be more important than commercial success, but for that, Africa as a whole should have a working industry, both in terms of quality and quantity, maybe except for Nigeria. In conclusion, African cinema is well represented in various festivals, but
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Bilel BOUDJELLOULI Algeria
References : Chronicle of the Years of Fire by Mohamed Lakhdar-Hamina, fiction, Algeria, 1975 Fidaï by Damien Ounouri, documentary, France/Algeria, 2012 The Gods Must Be Crazy by Jamie Uys, fiction, South Africa, 1980 Inspector Tahar’s Holidays by Moussa Haddad, fiction, Algeria, 1972 Washma by Hamid Benani, fiction, Algeria, 1970
Chroniques des années de braise de Mohamed Lakhdar-Hamina @Film Distribution
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How does international success influence the recognition of an African Film in the continent?
its lap is yet to be determined. This is a little expression of doubt, waiting to be challenged by a detractor.
C’est eux les chiens de Hicham Lasri
ous les traits d’un faux documentaire, le réalisateur marocain prend prétexte d’un reportage de télévision pour questionner, à la lumière de l’actualité, un épisode de l’histoire récente du Maroc. Pour son deuxième long-métrage, C’est eux les chiens, Hicham Lasri propose, avec une audace artistique singulière, une lecture décalée et quelque peu désabusée des échos des révoltes qui ont secoué des pays du monde arabo-musulman et dénommées ‘’printemps arabe’’ par les médias, occidentaux notamment.
Lasri et son producteur Nabil Ayouch exhument le personnage d’un prisonnier politique à la recherche de sa femme et de ses enfants, après une trentaine d’années passées en prison.
Crédit photos: C'est eux les chiens d'Hicham Lasri @ Nour Films
S
Une lecture décalée du ‘’printemps arabe’’ Derrière cette idée, le parti pris est de revenir sur les ‘’émeutes du pain’’ de Casablanca, en 1981, un point d’Histoire méconnu des Marocains.
Lasri s’était déjà fait remarquer avec son premier long-métrage The End (2011), dans lequel il affichait une option esthétique qui faisait valser le spectateur entre passé plus ou moins lointain et présent refoulé, fiction et réalité. Cette ligne est encore clairement affichée dans C’est eux les chiens. La caméra du jeune réalisateur se pose sur les manifestations lancées par le mouvement dit du ‘’20-Février’’ qui essaie de prolonger la vague de révolte née en Tunisie, mais les protestations contre ‘’la vie chère’’, pour ‘’des médias libres, plus de dignité et d’égalité’’ se révèlent être de simples échos aux boule-
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Là se trouve le premier flair artistique de Hicham Lasri : saisissant cette perche sans lendemain, même si le journaliste estime que « les vents du printemps arabe soufflent sur le Maroc », il s’intéresse plutôt à cet homme qui n’existe que par un numéro de matricule (404) et dont le temps est resté bloqué à l’année 1981 marquée par une grève et une ‘’rafle’’. L’équipe de télévision décide de le suivre finalement dans cette quête qui se révèle être double : celle d’un passé et d’une identité – il ne se souvient même pas de son nom – et recherche d’une famille pour laquelle il est mort, enterré et oublié. A partir de cette manifestation de rue, on perçoit, relayés par des médias enthousiastes, les échos de ce qui se passe en Libye ou en Syrie – où le mot d’ordre est le suivant : ‘’abattre le régime’’. Les journalistes se réjouissent du fait que le Maroc est une ‘’exception’’ dont les autorités ont su gérer ‘’avec maîtrise’’ les velléités de ‘’révolution’’. Hicham Lasri, lui, suit les pérégrinations de ses différents personnages, avec une caméra au cœur de son action. Le spectateur est dérouté, mais le propos du réalisateur est intéressant, et la formidable interprétation de l’attachant Hassan Badida lui donne de l’étoffe. Le réalisateur comprend la portée limitée de ces manifestations du ‘’Mouvement du 20-Février’’ et saisit le jeu d’un acteur Majhoul (Hassan Badida) dont l’apparente naïveté n’a d’égale que le talent à restituer une mémoire douloureuse refoulée : il parle de la ‘’Marche verte’’, organisée en 1975 à l’appel du roi Hassan II, de la répression politique des ‘’années de plomb’’, de l’image d’un ‘’Maroc moitié flics-moitié barbus’’… La réalité qui entoure son acteur n’échappe pas à Hicham Lasri qui 64
traite pêle-mêle de l’image des ressortissants d’Afrique subsaharienne vus comme des bandits, reclus, clandestins et trafiquants douteux, de la manipulation des médias, incapables d’éclairer les citoyens sur les enjeux politiques majeurs. A travers la figure du directeur d’un organe de presse qui, parce qu’il en avait ‘’marre de militer, marre de se battre’’, Hicham Lasri fait constater l’échec de cette gauche ‘’marxisée’’ qui s’est retrouvée orpheline et déboussolée après la chute du Mur de Berlin. Le réalisateur confronte les instants des révoltes antérieures à ceux du ‘’Printemps arabe’’. Par le biais d’une métaphore très subtile incarnée par son acteur principal, dresse en réalité un bilan qui tient en un mot : statu quo. Les aspirations sociales et politiques de la jeunesse n’ayant pas changé, le Maroc n’a pas bougé et c’est un progressiste ‘’ressuscité’’ – et à la dignité niée - qui vient rappeler cette ‘’vérité’’ à des concitoyens qui le prennent du coup pour un fou.
Aboubacar Demba CISSOKHO ASCC Sénégal
REFERENCE: C’est eux les chiens d’Hicham Lasri, fiction, Maroc, 2013, 1h28. Avec Hassan Badida, Yahya El Fouandi, Imad Fijjaj.
Flashback
versements entrevus en Egypte ou en Libye.
They Are the Dogs by Hisham Lasri
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his is a pseudo-documentary based on TV a report where the Moroccan director raises questions about a recent episode of Moroccan history. In his second feature film entitled They are the Dogs, Hicham Lasri is presenting with a special artistic audacity an offbeat and somewhat disenchanted reading of the echoes about the revolts which shook the Arab world and were called “Arab Spring” by the media, particularly in the West. Lasri and his producer Nabil Ayouch unearth the character of a political prisoner who has been looking for his wife and children after spending thirty years in jail. The story refers back to the Casablanca “Bread
Revolt” of 1981, a historical event which is not well known to Moroccans.Lasri became famous after he produced his first feature film The End (2011) in which he showed his aesthetic talent by making the public moveback and forth from a more or less distant past to a repressed present, between fiction and reality. This approach is still present in They are the Dogs. The camera of the young director shows the protests started by the so-called “20 February movement” which tries to expand the wave of revolt as it took off from Tunisia, but the protests against “high living costs”, for a “free press”, more “dignity and equality” turned out to be simply echoing the events in Egypt or Libya. This revealed the first artistic intui-
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Crédit photos: C'est eux les chiens d'Hicham Lasri @ Nour Films
A new read of “The Arab Spring”
In the end, the TV crew decided to follow him in this quest for what appeared to have two objectives: the quest for a past and for an identity – he does not even remember his name – and a quest for a family which considers him as dead, buried and forgotten. Starting with this street demonstration, one can feel through the enthusiastic echoes in the media the sounds of what is happening in Libya or Syria - where the motto is : “Down with the regime”. The journalists are happy to see that Morocco is an “exception” and that the authorities were able to manage any revolution attempt. Hicham Lasri, on side, follows the whereabouts of his different characters with a camera in the heart of the action. The public is a bit lost, but the director is saying interesting things, and the outstanding interpretation of the charming Hassan Badida is giving substance to the story. The director understands the limits to these protests of the “20 February Movement” so he uses the apparently naïve play of a talented actor (Hassan Badida) to bring back to life a sore memory: he speaks about the “green march” called in 1975 by King Hassan II, about the political repression of the “melted iron years” and the image of a “half cophalf bearded Morocco”… Hicham Lasri is well aware of the reality surrounding his actor, as he higgledy-piggledy addresses the issue 66
of Sub-Saharan Africans seen as thugs, cloistered and illegal aliens involved in all sorts of trafficking, and unable to explain the important political stakes to their fellow countrymen. Hicham Lasri uses the figure of a media director who has grown “tired of being an activist and of fighting” to show the failure of this “Marxist” left which was orphaned and disorientated by the fall of the Berlin wall. The film director pitches these moments of past revolts against those of the “Arab Spring”. He uses a subtle metaphor embodied in his main actor, and actually synthetizes a situation which can be described by one word: status quo. The social and political aspirations of the youth has not changed, nothing much has changed in Morocco, so it is a “revived” progressive – deprived of his dignity – who is bringing back this truth to his fellow citizens. And they think he is a fool.
Aboubacar Demba CISSOKHO ASCC Sénégal
REFERENCE: C’est eux les chiens d’Hicham Lasri, fiction, Maroc, 2013, 1h28. Avec Hassan Badida, Yahya El Fouandi, Imad Fijjaj.
Flashback
tion of Hicham Lasri: he seizes the opportunity even if the journalist thinks that “the winds of the Arab Spring are blowing across Morocco” and focuses on this man whose existence is tied to his identification number (404) and whose memory of time remains stuck to the year 1981 and the major strike and police raid which took place at that time.
FLASHBACK : FESPACO PALMARES 2015 ETALON D'OR Fièvres de Hicham AYOUCH, Maroc ETALON D'ARGENT Fadhma N'Soumer de Belkacem HADJADJ, Algérie ETALON DE BRONZE L'œil du cyclone de Sékou TRAORE, Burkina Faso PREMIER PRIX DU DOCUMENTAIRE Miners Shot Down de Rehad DESAI, Afrique du Sud DEUXIEME PRIX DU DOCUMENTAIRE Devoir de mémoire de Mahmadou CISSE, Mali TROISIEME PRIX DU DOCUMENTAIRE Tango Negro de Dom PEDRO, Angola POULAIN D’OR COURT-METRAGE De l'eau et du Sang d’Abdelilah ELJAOUHARY, Maroc POULAIN DARGENT COURT-METRAGE Madame Esther de Luck RAZANAJOANA, Madagascar POULAIN DE BRONZE COURT-METRAGE Zakaria de Leïla BOUZID, Tunisie PRIX PAUL ROBESON DE LA DIASPORA Morbayassa, Le serment de Koumba de Cheik Fantamady CAMARA, Guinée PRIX OUMAROU GANDA DE LA PREMIERE OEUVRE L'Oeil du cyclone de Sékou TRAORE, Burkina Faso PRIX DE LA MEILLEURE SERIE TV Chroniques Africaines de Marie Christine AMON, Côte d'Ivoire PRIX SPECIAL DU JURY SERIE TV Eh les hommes, Eh les femmes d’Apolline TRAORE, Burkina Faso PRIX DU MEILLEUR FILM FICTION DES ECOLES Sagar de Pape Abdoulaye Seick de ESAV, Maroc PRIX DU MEILLEUR FILM DOCUMENTAIRE DES ECOLES Je danse donc je suis d’Aïssata OUARMA de l'ISIS-SE, Burkina Faso PRIX SPECIAL DU JURY FILM DES ECOLES The Traveller de Peter SEDUFIA de NAFTI, Ghana PRIX DE LA MEILLEURE INTERPRETATION FEMININE Maimouna N'DIAYE dans L'Oeil du cyclone de Sékou TRAORE, Burkina Faso PRIX DE LA MEILLEURE INTERPRETATION MASCULINE Fargass ASSANDE dans L'Oeil du cyclone de Sékou TRAORE, Burkina Faso PRIX DE LA MEILLEURE AFFICHE Cellule 512 de Missa HEBIE, Burkina Faso PRIX DU MEILLEUR MONTAGE Fadhma N'Soumer de Belkacem HADJADJ, Algérie PRIX DU MEILLEUR DECOR Timbuktu d’Abderrahmane SISSAKO, Mauritanie PRIX DE LA MEILLEURE MUSIQUE Timbuktu d’Abderrahmane SISSAKO, Mauritanie PRIX DU MEILLEUR SON Fadhma N'Soumer de Belkacem HADJADJ, Algérie PRIX DE LA MEILLEURE IMAGE C'est eux les chiens d’Hicham LASRI, Maroc PRIX DU MEILLEUR SCENARIO Fadhma N'Soumer de Belkacem HADJADJ, Algérie PRIX DE LA CRITIQUE 2015 C'est eux les chiens d’Hicham LASRI, Maroc
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FLASHBACK : FESPACO 2015 AWARDS’LIST
GOLDEN STALLION Fevers by Hicham AYOUCH, Morocco SILVER STALLION Fadhma N'Soumer by Belkacem HADJADJ, Algeria BRONZE STALLION The Eye of the Cyclone by Sékou TRAORE, Burkina Faso DOCUMENTARY FIRST PRIZE Miners Shot Down by Rehad DESAI, South Africa DOCUMENTARY SECOND PRIZE Duty of Memory by Mahmadou CISSE, Mali DOCUMENTARY THIRD PRIZE Tango Negro by Dom PEDRO, Angola GOLDEN FOAL FOR SHORTFILM Water and Blood by Abdelilah ELJAOUHARY, Morocco SILVER FOAL FOR SHORTFILM Madame Esther by Luck RAZANAJOANA, Madagascar BRONZE FOAL FOR SHORTFILM Zakaria by Leïla BOUZID, Tunisia PAUL ROBESON DIASPORA AWARD Morbayassa, Koumba’s Oath OUMAROU GANDA FIRST FEATURE AWARDThe Eye of the Cyclone by Sékou TRAORE, Burkina Faso BEST TV SERIES AWARD African Chronicles by Marie Christine AMON, Ivory Coast TV SERIES SPECIAL JURY AWARD Eh men, Eh women by Apolline TRAORE, Burkina Faso BEST SCHOOL FICTION AWARD Sagar by Pape Abdoulaye Seick from ESAV, Morocco BEST SCHOOL DOCUMENTARY AWARD I dance so I am by Aïssata OUARMA from ISIS-SE, Burkina Faso SCHOOL SPECIAL JURY AWARD The Traveller by Peter SEDUFIA from NAFTI, Ghana BEST FEMALE AWARD IN A LEADING ROLE Maimouna N'DIAYE in The Eye of the Cyclone by Sékou TRAORE, Burkina Faso BEST MALE AWARD IN A LEADING ROLE Fargass ASSANDE in The Eye of the Cyclone by Sékou TRAORE, Burkina Faso BEST POSTER AWARD Cellule 512 by Missa HEBIE, Burkina Faso BEST EDITING AWARD Fadhma N'Soumer by Belkacem HADJADJ, Algeria BEST SET DESIGN AWARD Timbuktu by Abderrahmane SISSAKO, Mauritania BEST MUSIC AWARD Timbuktu by Abderrahmane SISSAKO, Mauritania BEST SOUND AWARD Fadhma N'Soumer by Belkacem HADJADJ, Algeria BEST IMAGE AWARD They Are the Dogs by Hicham LASRI, Morocco BEST SCRIPT AWARD Fadhma N'Soumer by Belkacem HADJADJ, Algeria 2015 FILM CRITIC AWARD They Are the Dogs by Hicham LASRI, Morocco
Flashback
by Cheik Fantamady CAMARA, Guinea
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