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LA SAINT-VALENTIN CHEZ LES V.I

Cette affaire de Saint-Valentin à Abidjan, si quelqu’un n’est pas mort dedans, vous n’allez pas arrêter !

Abidjan ce lupanar, la citadelle des V.I… Vendeuses et vendeurs d’illusion ! J’ai toujours dit que la Saint-Valentin était la vraie fête nationale de la Côte d’Ivoire. Les roses rouges en plastique à chaque carrefour, les cœurs en velours made in China aux mains des vendeurs ambulants, les joailleries prises d’assaut, et les ballets de bouquets et de livreurs…

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Toute la chaine esthétique profite des retombées de cette journée : mèches humaines ou synthétiques, lèvres et ongles carmin, gommage pour une peau satinée, robes et lingeries affriolantes, costumes de circonstance, petit tour chez le « barber ». Poudres, jeux, jouets, perles, encens et gels en tout genre pour éveiller les sens et galvaniser les troupes… Les hôtels et restaurants affichent complet, avec des menus de Saint-Valentin qui rivalisent d’inventivité. Ballotin d’amour et sa sauce océane… djaaa c’est simple tomate farcie !

Abidjan, qui es-tu ? Abidjan, la cité du paraître ou du m’as-tu-vu, où si tu n’as pas d’amour ou de goumin, c’est que tu n’existes pas. Au moins il faut avoir goumin, on saura que tu fus quelque chose pour quelqu’un.... Abidjan, la ville du Love Bombing et du Ghosting… ils y ont même inventé un terme repris dans toute l’Afrique de l’Ouest : le mougou pan ! Ou l’art de disparaître comme un fantôme une fois arrivé(e) à ses fins, après une intense période de séduction.

Alors, on en rit chaque année. De la créativité des amoureux qui « ne trompent pas leur femme, mais se trompent de femme… ». Ceux qui célèbrent la Saint-Valentin le jour J avec Madame, et le weekend avec le 2ème bureau. Celles qui prétextent un palu foudroyant pour disparaître du bureau toute la journée ouvrée du 14 février et réapparaître à Bassam ou Assinie en galante compagnie… Ceux qui partent subitement en mission ladite semaine à Yamoussoukro et reviennent la voiture maculée de boue et le coffre chargé d’agoutis et de régimes de bananes, alors qu’ils n’ont jamais quitté le district d’Abidjan.

On m’a même soufflé l’histoire de ce tonton ventripotent, qui est volontairement allé se livrer au commissariat et s’est fait enfermer au petit matin en cellule de dégrisement. Le parfait alibi à sa sex-capade nocturne. Il était tout fier de raconter que son épouse était si soulagée de le retrouver sain et sauf, qu’il a eu droit à un massage, un pépé soup bien épicé, avant de taper sa meilleure sieste toute la journée.

Mi-admiratifs, mi-scandalisés, mi-résignés, nous entendons chaque année ces histoires de la SaintValentin de la Duplicité. Mais bien sûr comme le poil à gratter que je suis, je ne peux m’empêcher de me demander ce que cela dit de nous, en tant que société dans son ensemble. En tant que citoyens, amoureux, parents et consommateurs. Quelle idée avons-nous de l’amour et de l’engagement ?

Dupes, complices, désabusés, enjaillés, sincères… Ce qui est sûr, fête commerciale ou pas, on est déjà nés. Cette Saint-Valentin à Babi, on va tous se blaguer ou se faire blaguer.

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