Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
www.barillacfn.com info@barillacfn.com Conseil consultatif Barbara Buchner, Claude Fischler, Mario Monti, John Reilly Gabriele Riccardi, Camillo Ricordi, Umberto Veronesi En collaboratione avec The European House-Ambrosetti Coordination éditoriale et rédaction Codice Edizioni Projet graphique et mise en page adfarmandchicas Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées (octobre 2011) Images National Geographic Image Collection Corbis Images Image de couverture : Kenneth Garrett/National Geographic Stock
C
hers Lecteurs, Les prix des aliments et des produits agricoles ont connu une hausse considérable et une forte volatilité au cours de ces cinq dernières années.
Ce phénomène, en quelque sorte nouveau, devient un sujet de préoccupation puisque la situation de volatilité actuelle est, très probablement, destinée à se perpétuer dans le temps et elle risque, par conséquent, de mettre sous pression le système agroalimentaire tout entier, si des solutions efficaces et partagées ne sont pas mises en oeuvre. Il ne s’agit pas d’une question purement économique ou d’une préoccupation qui n’intéresse que les acteurs de la filière agroalimentaire ; en effet, cette grande instabilité a des conséquences dramatiques surtout pour les habitants des Pays les plus pauvres du monde. La Banque Mondiale a estimé qu’à cause de la hausse des prix enregistrée de 2010 à 2011, 44 millions de personnes supplémentaires vivent sous le seuil de pauvreté. Un prix d’équilibre stable déterminerait au contraire la solidité des filières, une rémunération adéquate des facteurs productifs – à commencer par le travail – et la planification possible des investissements. Le Barilla Center for Food & Nutrition a décidé, étant donné l’importance du sujet, d’en rechercher les causes profondes, en essayant de comprendre les raisons de cette discontinuité par rapport aux tendances enregistrées dans le passé récent, et d’analyser surtout les facteurs en jeu et les principales dynamiques de corrélation. Les résultats de ces recherches feront l’objet d’une série de publications ; ici nous vous présentons le premier de ces documents avec le souhait de vous aider à comprendre l’importance de ce sujet et ses aspects techniques essentiels sous une forme accessible et claire.
Gina Martin/National Geographic Stock
D’autres travaux vont suivre dès l’année prochaine puisque nous entendons, de cette façon, contribuer à garder toute l’attention des gens sur des sujets de grande envergure qui ont trait à la qualité de vie de milliards de personnes dans différents pays du monde. Je vous souhaite une bonne lecture, Guido Barilla
La vision du Barilla Center for Food & Nutrition
Shivji Joshi/National Geographic Stock
Offrir différentes contributions scientifiques de haut niveau . Devenir un outil pour les institutions, la communauté scientifique, les médias et la société civile : un point de rencontre pour tous ceux qui s’intéressent à l’alimentation, à l’environnement, au développement durable et à ses conséquences sur la vie des personnes.
Volatilità dei mercati agricoli: i fattori in gioco
L’avenir de l’alimentation se développe AVEC NOUS
Le BariLLa Center For Food & nUtrition
L
e Barilla Center for Food & Nutrition (BCFN) est un centre d’analyse et d’élaboration de projets, caractérisé par une méthode pluridisciplinaire, qui poursuit le but d’approfondir les grandes questions du débat global concernant l’alimentation et la nutrition. Né en 2009, le BCFN s’est donné la mission de se pencher sur les exigences actuelles et émergentes de la société, en recueillant des expériences et des compétences de niveau mondial et en favorisant un dialogue constant et ouvert. Du fait de la compléxité des phénomènes pris en compte, il nous a semblé nécessaire d’adopter une méthodologie permettant de dépasser les fontières de différentes disciplines et nous avons créé quatre sections d’études : Food for Sustainable Growth, Food for Health, Food for All, Food for Culture. Ces quatre sections d’étude concernent la science, l’environnement, la culture et l’économie, dont le BCFN examine en profondeur les sujets clés, en suggérant des propositions pour relever les défi s alimentaires du futur.
FOOD FOR SUSTAINABLE GROWTH Dans la section Food for Sustainable Growth, le Barilla Center for Food & Nutrition a l’intention d’approfondir la question de la meilleure utilisation des ressources naturelles dans la filière agroalimentaire. En particulier les analyses faites ont permis d’identifier les points critiques, d’évaluer l’impact sur l’environnement des activités de production et de consommation de la nourriture et d’élaborer une série de propositions et de recommandations sur les modes de vie personnels et collectifs qui peuvent agir d’une manière positive sur l’environnement et les ressources naturelles.
FOOD FOR HEALTH Dans la section Food for Health, le Barilla Center for Food & Nutrition a décidé de commencer son parcours d’étude en examinant le rapport existant entre l’alimentation et la santé. Nous avons analysé en profondeur les nombreuses recommandations élaborées par les plus grandes organisations mondiales de nutrition et interrogé à travers des panels ad hoc les plus grands experts internationaux. Ces travaux nous ont permis de faire à la société civile plusieurs propositions concrètes ayant pour but de favoriser une alimentation et un mode de vie sains.
FOOD FOR ALL Dans la section Food for All, le Barilla Center for Food & Nutrition développe la question de l’accès à la nourriture et de la malnutrition dans le but de réfl échir sur la manière de favoriser une meilleure administration du système agroalimentaire à l’échelle globale, pour rendre possible une distribution plus équitable de la nourriture et favoriser un meilleur impact sur le bienêtre social, la santé et l’environnement.
FOOD FOR CULTURE Dans la section Food for Culture, le Barilla Center for Food & Nutrition a l’intention de décrire le rapport de l’homme avec la nourriture. En particulier, le BCFN a voulu reconstruire les étapes les plus importantes du parcours qui ont accompagné le développement de la relation hommenourriture, en se refocalisant sur le rôle fondamental de la Méditerranée et de ses dimensions saillantes. Dans ce cadre, les activités du BCFN sont pilotées par l’Advisory Board, un groupe formé de spécialistes, provenant de disciplines différentes mais complémentaires, qui propose, analyse et explore des thématiques, élaborant ensuite des propositions de recommandations. Un ou plusieurs advisor ont été choisis pour chaque section : la spécialiste en énergie, changement climatique et environnement Barbara Buchner et l’économiste John Reilly pour la section Food for Sustainable Growth ; l’économiste Mario Monti pour la section Food For All ; l’oncologue Umberto Veronesi, le nutritionniste Gabriele Riccardi et l’immunologiste Camillo Ricordi pour la section Food for Health ; le sociologue Claude Fischler pour la section Food for Culture. Pendant ses deux premières années d’activité, le BCFN a réalisé et diffusé de nombreuses publications scientifiques. Dans le cadre des échéances institutionnelles et des priorités des agendas économiques et politiques internationaux, le BCFN dans ces premières années de recherche a renforcé son rôle de collecteur et de connecteur entre science et recherche d’un coté, et décisions politiques et actions des gouvernements de l’autre.
Le document que nous vous présentons se concentre sur l’approfondissement d’un thème de grande actualité, qui a éveillé l’attention mondiale des décideurs politiques et des principaux acteurs de la filière agroalimentaire sur ses conséquences en termes d’accès à la nourriture et d’impacts économiques. Il s’agit de la tendance des prix des produits alimentaires, qui ont repris à augmenter très rapidement, et du phénomène de la croissante volatilité enregistrée actuellement sur ces marchés. L’objectif du document est de cerner et d’examiner les principaux facteurs qui sont à l’origine de ces tendances, d’en comprendre les causes principales et les effets, afin de mieux comprendre le problème et de pouvoir proposer des mesures politiques efficaces.
Jonathan Blair/National Geographic Stock
Dans le thème Food for All, le Barilla Center for Food & Nutrition a approfondi jusqu’à présent deux grands domaines d’étude : d’un côté, l’accès à la nourriture et la pénurie des ressources agroalimentaires, leurs besoins émergents et les phénomènes qu’ils entrainent ; de l’autre, la définition d’un indice de bien-être qui permet de fournir des indications précises et d’orienter de manière efficace les comportements individuels et collectifs vers des conditions de bien-être objectif plus important.
Table des matières
1. L’augmentation des prix des matières premières agricoles et de la volatilité des marchés et ses conséquences 1.1 L’attention mondiale croissante sur le sujet 1.2 La dynamique des prix des matières premières alimentaires 1.3 Le phénomène de la volatilité des prix des matières premières alimentaires 1.4 Les impacts del la volatilité des prix alimentaires sur l’économie et sur l’accès à la nourriture 1.4.1 Les conséquences d’un point de vue “macro” 1.4.2 Les conséquences d’un point de vue “micro” 2. Les facteurs qui determinent l’évolution des prix des matières premières alimentaires et leur volatilité 2.1 Le modèle interprétatif du BCFN 2.2 Dinamiques démografiques, croissance économiques dans les Pays en voie de développement et modifications des choix alimentaires 2.3 Niveaux de stocks 2.4 Production agricole e pénurie des ressources Box La pénurie de l’eau, aujourd’hui et demain Box La dégradation des sols 2.5 Production des biocarburants Box La Chine et le cas de la cassave Box La jatropha, une nouvelle plante énergétique 2.6 Changement climatique 2.7 Coût de l’energie et prix du pétrole 2.8 Politiques commerciales Box Le cas du prix du riz de 2007 à 2008 2.9 Le marché des changes 2.10 La spéculation sur les marchés des matières premières alimentaires Box Le marché des futures et le Chicago Board of Trade : origines et évolution 2.11 Dynamiques géopolitiques 3. Conclusions et recommandations Notes et références
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Executive Summary
© Corbis
LE COûT DE LA NoURRITURE ET LA VOLATILITé DES MARCHéS AGRICOLES : LE VARIABLES IMPLIQUéES
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1. LA NOUVELLE PHASE DE CROISSANCE RAPIDE DES PRIX DES MATIÈRES PREMIÈRES ALIMENTAIRES ET LA CROISSANCE DE LEUR VOLATILITÉ ONT ATTIRÉ L’ATTENTION GLOBALE SUR LES CONSÉQUENCES SOCIALES ET ÉCONOMIQUES POSSIBLES À partir de la deuxième moitié de 2010, les prix sur les marchés des matières premières agricoles ont commencé à augmenter très rapidement : dans la période comprise entre juillet 2010 et février 2011, l’Indice FAO des prix des produits alimentaires a augmenté de 38%, atteignant un pic plus élevé que celui enregistré durant la crise alimentaire de 2008. En douze mois, de juin 2010 à juin à 2011, rien que le prix des céréales a augmenté de 71%. En outre, une croissance inquiétante de la volatilité des prix peut être observée, avec des oscillations rapides et très accentuées vers le haut et vers le bas, même pendant la même séance journalière, une situation qui, évidemment, crée de l’incertitude et de l’instabilité sur les marchés. Une autre donnée inquiétante est liée à la déviation standard, la mesure de la volatilité, qui a plus que doublé, ces cinq dernières années par rapport aux quinze années précédentes (29,3 par rapport à 13,5). Dans un contexte déjà difficile à cause de la conjoncture économique actuelle globale, les conséquences de ces phénomènes risquent de porter à une situation fortement critique pour la sécurité alimentaire des familles (en particulier celles à faible revenu) et le développement de la filière agroalimentaire et de l’économie en général (surtout, mais pas seulement, dans les pays en voie de développement). Les effets provoqués par l’instabilité et l’incertitude sur les marchés ont attiré l’attention de la communauté internationale, comme le témoigne, par exemple, la décision de la Présidence française d’insérer le thème de l’accès à la nourriture au centre des travaux du prochain G-20 à Cannes (3-4 novembre 2011), en accordant une attention particulière au thème des prix. 2. LES DYNAMIQUES DES PRIX DANS LE BREF ET MOYEN-LONG TERME SONT DÉTERMINÉES PAR DE NOMBREUX FACTEURS QUI AGISSENT DANS UN CADRE DE RELATIONS COMPLEXES QU’IL EST POSSIBLE D’ANALYSER À TRAVERS UN MODÈLE INTERPRÉTATIF PROPOSÉ PAR LE BARILLA CENTER FOR FOOD AND NUTRITION Le modèle interprétatif proposé par le BCFN a l’intention d’offrir une vision d’ensemble des nombreux éléments, faisant l’objet de multiples études et approfondissements, qui contribuent à définir l’évolution des prix des matières premières alimentaires, afin d’identifier et
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
EXECUTIVE SUMMARY
de comprendre les liens de causalité et les éventuelles interrelations. Il met en évidence les facteurs qui peuvent être attribués à la demande (facteurs démographiques, croissance économique des Pays en voie de développement, styles alimentaires, niveaux des stocks) et à l’offre (production agricole, ressources naturelles limitées, effets qui peuvent être attribués au changement climatique, à la production de biocarburants), ainsi que les facteurs transversaux qui ont une incidence directe ou indirecte sur les prix (niveau de la spéculation financière, évolution des taux de change, le prix du pétrole et de l’énergie, les politiques commerciales et les dynamiques géopolitiques internationales). - La croissance de la population mondiale (de 6,9 à 9,1 milliards en 2050) et son urbanisation progressive, le développement économique des Pays en voie de développement (croissance annuelle moyenne du PIB de 7,3% en Asie et de 4,5% en Afrique Subsaharienne dans les dernières cinq années) et l’évolution des choix alimentaires vers des denrées plus complexes dans ces pays (en Chine, la consommation de viande a augmenté de 128% par habitant de 1990 à aujourd’hui) constituent des défis de portée énorme pour le système agroalimentaire mondial qui dans le moyenlong terme devra essayer de faire face à une telle augmentation de la demande (selon la FAO entre 70% et 100% d’ici 2050) qui provoquera de croissantes tensions sur les prix des matières premières alimentaires. Une augmentation de la demande en viande et en produits laitiers fait accroître aussi la demande (et les prix) des produits nécessaires pour l’élevage du bétail (céréales et protéagineux) ; et en même temps, l’augmentation de leur prix engendre des prix plus élevés pour les produits de l’élevage. - Récemment, différents facteurs, dont des récoltes inférieures aux prévisions en raison des phénomènes climatiques défavorables et un changement de destination de certaines cultures au profit du secteur énergétique (biocarburants), ont obligé à puiser dans les stocks accumulés pour faire face à la croissante demande des biens alimentaires (qui a augmenté plus rapidement que l’offre) et à stabiliser les prix internes. Il existe un lien étroit entre l’évolution des stocks et la variation des prix des principales matières premières agricoles (blé, maïs, riz). En particulier, dans un horizon temporel assez vaste, il a été observé qu’une augmentation au niveau des prix correspond fondamentalement à une réduction du rapport stocks-utilisation de céréales ; au contraire, dans le cas d’une augmentation du rapport stocks-utilisation, le prix tend à se réduire (par exemple entre 1990 et 2011, la corrélation est de -0,73 pour le blé). - Face à la croissance de la demande, le système de l’offre devra se montrer capable d’assurer une condition d’équilibre du marché, afin d’éviter des situations d’instabilité et donc de volatilité élevée des prix. Les plus grandes difficultés actuelles touchent l’inefficacité des processus de distribution, les gaspillages et les pertes le long des filières (pertes dans les phases en amont dans les Pays en voie de développement, gaspillages dans les phases en aval dans les Pays développés et distorsions dans le système de distribution), plus que la production en elle-même (le montant global des calories journalières produites par personne est de 2720 kcal, en théorie suffisantes pour tout le monde). Dans le futur, cependant, le défi sera aussi d’innover pour s’orienter vers des modèles agricoles et de production à haut rendement – qui s’est accrue beaucoup plus lentement ces vingt dernières années (+ 1,22% par an) par rapport à la période 1960-1990 (+ 1,84%) – de qualité plus élevée et à faible impact environnemental. La recherche scientifique et technologique sur ces thèmes, publique et privé, sera très importante. Toutefois, il ne faut pas sous-évaluer le fait que les limites dans la disponibilité des ressources naturelles (eau et terrains cultivables surtout) représentent une contrainte très importante pour la croissance de la capacité productive de l’agriculture mondiale. - Le développement des biocarburants, très conditionné par les politiques de financements publics, a lié de manière encore plus directe les marchés des matières premières agroalimen-
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James L. Amos/National Geographic Stock
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taires avec ceux de l’énergie, déjà en relation du fait du prix des matières premières alimentaires qui apparaît fortement lié à celui du pétrole (indice de corrélation de 0,84 ces dix dernières années). En outre, puisque la plupart des biocarburants (de première génération) ne sont pas économiquement durables sans les subventions des gouvernements et qu’ils sont produits avec les mêmes input destinés à l’alimentation ou à l’élevage (céréales, canne à sucre, etc), il se crée une compétition entre le secteur énergétique et le secteur alimentaire dans l’utilisation des matières premières agricoles (en 2010, 38,4 % de la production du maïs des États-Unis a été destinée à la réalisation de l’éthanol). Par conséquent, les variations du prix du pétrole et surtout les politiques de soutien de la production des biocarburants sont responsables aussi bien des variations importantes de la demande, que des épisodes de grande volatilité à court terme et de l’augmentation des prix sur les marchés alimentaires. Dans ce contexte, le tout récent développement de variétés de maïs GM consacrées uniquement à la production du bioéthanol ouvre d’ultérieurs et nouveaux scénarios inquiétants. - Selon des estimations et après avoir exclu les autres facteurs, la hausse des températures et les variations dans les précipitations auraient déterminé une croissance des prix des céréales de 18,9% depuis 1890. Dans le futur, selon les études les plus fiables sur le changement climatique, le scénario le plus probable est celui d’une diminution de la productivité agricole globale. Par exemple, en liaison aux céréales, une diminution d’environ 1% au niveau mondial est attendue en 2080, avec des pointes d’environ 7% dans l’Afrique Subsaharienne et dans le sud-est asiatique. Les effets du changement climatique pourraient, en effet, influer négativement sur certaines zones géographiques et sur leur capacité d’assurer régulièrement des niveaux adéquats de production par rapport aux volumes actuels, surtout en raison de la hausse de la température et de conditions d’accès plus sévères aux ressources hydriques (les impacts les plus importants devraient s’enregistrer dans la bande équatoriale, dans l’espace méditerranéen et en Australie). Enfin, le changement climatique est cause de l’intensification d’évènements climatiques défavorables (sécheresse, inondations, etc) qui peuvent causer de graves pertes dans les récoltes. - Le coût de l’énergie est un des facteurs qui influent profondément sur les coûts d’exploitation dans le secteur agricole, en intéressant de nombreuses activités de la filière, de la culture des champs à la logistique et à la distribution des produits finis. Effectivement, l’évolution du prix du pétrole influence directement le coût du carburant pour la circulation des tracteurs et des machines agricoles, le prix des fertilisants, le coût de l’énergie nécessaire pour le réchauffement des étables, des locaux de séchage du fourrage, des serres, le prix du carburant pour les moyens de transport des grains, pour la distribution des semi-finis et des produits finis etc., en influant ainsi indirectement sur les prix des produits agricoles. Une analyse détaillée des prix des fertilisants, production aux besoins énergétiques élevés et parfois de dérivation directe des hydrocarbures, fait ressortir un lien très étroit avec les prix des cultures qui les utilisent beaucoup, parmi lesquelles les céréales (la corrélation entre l’indice des prix des céréales et les prix de l’azote et du phosphore ces vingt dernières années a été de 0,91). - L’imposition de barrages/subventions commerciales peut représenter un facteur de distorsion des dynamiques entre l’offre et la demande sur le marché international des matières premières alimentaires quand celles-ci ne sont pas destinées à protéger les agriculteurs des Pays en voie de développement, qui pourraient être pénalisés lourdement. Dans la période 2008-2010, suite aux prévisions à la baisse sur les récoltes futures et à la hausse au niveau international des prix, d’importants Pays exportateurs de biens agricoles ont éliminé les subventions pour les exportations (ou introduit des taxes sur l’exportation) pour accroître l’offre intérieure et limiter l’effet interne de l’augmentation globale des
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contingents représentent les leviers de l’intervention efficace dans un bref délai, essentiels pour faire face à l’émergence (mais ils sont insuffisants en absence d’intervention sur les facteurs structurels). Voici quelques exemples : Bas niveau des stocks des matières premières agricoles Création d’un système multilatéral de réserves alimentaires et amélioration de la transparence sur les flux et le stock. Mise en oeuvre de politiques commerciales de distorsion du marché de la part des Pays exportateurs et importateurs Réduction des différentes formes de restriction commerciale, tout d’abord les prohibitions, les quotas et les droits à l’exportation. Financements pour la production de biocarburants de première génération Réduction des subventions à la production de biocarburants de première génération en compétition avec les productions alimentaires, augmentation des investissements dans les nouvelles technologies et réalisation d’une plus grande ouverture commerciale dans ce secteur. Excès de spéculation et de financiarisation des marchés des matières premières alimentaires Réglementer la spéculation financière excessive sur les matières premières alimentaires.
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3. IL FAUT INTERVENIR SUR LES FACTEURS STRUCTURELS (VISION À MOYEN TERME) ET SUR LES FACTEURS CONTINGENTS (VISION À COURT TERME) Les facteurs analysés peuvent être divisés sur la base de la possibilité concrète d’intervention sur eux-mêmes, aussi bien pour réduire la volatilité que pour éviter des augmentations excessives qui mettraient à risque la sécurité alimentaire globale et le développement agroalimentaire. - Les facteurs contextuels sont des éléments constants sur lesquels il n’est pas opportun/ possible d’intervenir : croissance démographique et urbanisation, développement économique des Pays émergents, évolutions des marchés monétaires, dynamiques géopolitiques internationales, lien étroit entre le coût de l’énergie et le prix du pétrole et les facteurs productifs agricoles. - Les facteurs structurels de l’offre et de la demande – à affronter par des actions qui produiront des effets seulement sur le moyen-long terme et des problématiques auxquelles il est possible de trouver des réponses dans les processus d’adaptation du système par rapport aux conditions structurelles qui ont changé – sont : la productivité agricole, les gaspillages et les pertes le long de la filière agroalimentaire, les liens imposés par la rareté des ressources naturelles disponibles, les effets du changement climatique, « l’occidentalisation » du régime dans beaucoup de zones émergentes de la planète et l’augmentation généralisée de la consommation calorique moyenne. Il s’agit de facteurs décisifs sur le long terme, malheureusement pas en ligne avec les cycles de la politique, et donc souvent négligés. - Les facteurs contingents peuvent déterminer des résultats sur le court terme à travers des solutions adéquates et des interventions de nature technique et politique. Les facteurs
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prix alimentaires. Ces dynamiques se sont reproduites ces derniers mois et sont parmi les principaux responsables de la nouvelle et rapide hausse des prix. L’évolution du dollar représente un facteur important pour ces marchés, étant donné que les États-Unis sont le principal exportateur des matières premières agricoles du monde et que la plupart des prix sont fixés en dollar. En effet, lorsque le dollar se déprécie, le pouvoir des Pays importateurs augmente, et se traduit par une croissance de la demande des importations, en contribuant ainsi au déséquilibre entre l’offre et la demande internationale et une surchauffe des prix. Les marchés des futures exercent deux fonctions importantes : ils facilitent la gestion de la volatilité des prix et contribuent à la formation du prix. Cependant, la crise financière globale de ces dernières années a porté les investisseurs « non commerciaux » (les fonds indiciels qui détiennent des positions longues et les fonds spéculatifs qui opèrent agressivement sur le bref) à augmenter les investissements dans les dérivés des matières premières agricoles : cette augmentation du quota des contrats aux mains des investisseurs non commerciaux peut avoir créée des phénomènes de spéculation. Bien que le rôle effectif de ce phénomène sur la hausse du niveau des prix fasse l’objet de grandes discussions et ne puisse pas être encore clairement démontré, la spéculation financière du marché des matières premières peut, toutefois, en avoir amplifié la volatilité dans le court terme. L’augmentation des prix des biens alimentaires et l’apparition de déséquilibres géopolitiques dans les Pays aux conditions socio-économiques précaires semblent liées, surtout si ces Pays sont des importateurs nets de denrées alimentaires. Dans certains cas, le déclenchement des évènements dans ces pays peut influencer successivement la dynamique des prix au niveau international : c’est le cas de « l’Arab Spring » qui a provoqué une flambée du prix du pétrole – qui influence celui des matières premières alimentaires – et une forte croissance des achats des denrées alimentaires à un prix élevé de la part de ces Pays pour essayer de contrôler les tensions sociales.
© Corbis
PRODUCTION AGRICOLE
Croissance de la population Urbanisation
POLITIQUES COMMERCIALES
DYNAMIQUES GÉOPOLITIQUES
MARCHÉ DES CHANGES
Productivité Technologie/innovation Gaspillages et pertes
BIOCARBURANTS
STYLES ALIMENTAIRES Augmentation des calories consommées “Occidentalisation” du régime alimentaire
DEMANDE
PRIX
OFFRE
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LIMITES DES RESSOURCES NATURELLES Terres Eau
CROISSANCE ÉCONOMIQUE DES PAYS EN VOIE DE DÉVELOPPEMENT MARCHÉS FINANCIERS (SPÉCULATION) NIVEAUX DES STOCKS
PRIX DU PÉTROLE ET DE L’ÉNERGIE
CHANGEMENT CLIMATIQUE Hausse des températures Variation des précipitations Événements climatiques défavorables
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DÉMOGRAPHIE
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Richard Nowitz/National Geographic Stock
1. L’augmentation des prix des matières premières agricoles et de la volatilité des marchés et ses conséquences
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En 2050 la demande globale de nourriture sera entre 70 et 100%
Jusqu’en 2020 les prix enregistreront probablement des valeurs supérieures à celles de la décennie précédente
la croissance économique durable et la reprise dans les Pays en voie de développement et à bas revenu, a été confirmée. Malgré l’attention croissante de la communauté internationale sur le thème du niveau et de la volatilité des prix des matières premières alimentaires et des conséquences en termes d’accès à la nourriture, il subsiste encore aujourd’hui une situation globale de forte instabilité. En effet, ajoutées à la difficile conjoncture économique actuelle, les conséquences de l’augmentation des prix des denrées alimentaires représentent actuellement un facteur élevé de risque pour la stabilité et la sécurité de nombreuses parties du monde.
L
a croissance démographique de la population mondiale, la forte hausse des revenus, l’urbanisation et l’augmentation de la consommation de protéines d’origine animale dans les Pays émergents et dans ceux en voie de développement représentent quelques-uns des facteurs qui contribueront fortement à faire croître la demande globale de nourriture. En effet, les prévisions les plus accréditées ont estimé que la population mondiale atteindra 9 milliards de personnes en 2050, provoquant une augmentation importante de la demande globale de nourriture, qui sera entre 70 et 100%. Les attentes quant à ces prévisions, auxquelles s’ajoutent, en outre, de nombreuses variables dont les dynamiques produisent des effets considérables sur le cours des matières premières alimentaires, contribuent à exercer une forte pression sur leurs prix. Les dernières prévisions à moyen terme réalisées par la FAO et par l’OCDE révèlent des scénarios futurs assez inquiétants : on prévoit, en effet, que jusqu’en 2020 les prix enregistreront des valeurs supérieures, en termes réels, à celles de la décennie précédant la crise alimentaire de 2007/2008. Les deux organisations internationales estiment, par exemple, que le prix moyen des céréales – en valeur réelle – restera supérieur de 20% dans les 10 prochaines années par rapport à la décennie précédente. De même, le prix de la viande sera plus élevé de 30%. Si le taux de croissance de la production agricole – qui peut baisser à 1,7% en moyenne par an par rapport à 2,6% des 10 dernières années – ne permet effectivement pas de suivre le rythme de la demande, le résultat sera une hausse inévitable des prix. Ces questions ont été récemment inscrites sur les agendas politiques internationaux parmi les plus urgentes et les plus critiques à aborder. La France a décidé de mettre le thème de l’accès à la nourriture au centre de son mandat à la présidence du G-20 de cette année et le Président de la République française, Nicolas Sarkozy, a défini le problème de la hausse du prix des matières premières comme “l’une des principales menaces qui pèsent aujourd’hui sur la croissance mondiale”. Sur cette même ligne, en effet, durant la récente rencontre du G-20 des Ministres de l’Agriculture1, un plan d’action, appelé l’Action Plan on Food Price Volatility and Agricolture, a été présenté, contre la faim et la volatilité des prix des biens alimentaires sur les marchés internationaux, défini par le Ministre français de l’Agriculture, Bruno Le Maire, comme un « accord historique qui contient des mesures concrètes, loin des déclarations de principes »2. Cependant, ce ne fut pas la première réunion où le thème de l’accès à la nourriture a été discuté. Elle était déjà à l’ordre du jour des rencontres du G-8 à L’Aquila, du World Food Summit qui s’est tenu à Rome en 2009 et du G-20 de Séoul en 2010. A cette dernière occasion, toutefois, la centralité du thème de la sécurité alimentaire, définie comme un des neufs “piliers clés” qui ont un besoin urgent d’actions et de réformes afin de garantir
La hausse des prix des denrées alimentaires représente un facteur de risque pour la stabilité et la sécurité de nombreuses parties du monde
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
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1.1 L’attention mondiale croissante sur le sujet
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Willard Culver/National Geographic Stock
260 240 200 Deviazione Déviation standard standard==13,5 13,5
180 160 140 120 100
Indice Réel du Prix des produits alimentaires
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAO, août 2011.
- de mars 2009 à janvier 2010 les prix ont recommencé à monter : l’indice, aussi bien nominal que réel, a augmenté de 25% ; - de février 2010 à juillet 2010, une brève période de stabilité a été enregistrée ; - de juillet 2010 à février 2011, les prix ont connu de nouveau une forte hausse : l’indice a augmenté de 37,8% (et l’indice réel de 41,9%) ; - de février 2011 à juin 2011, le niveau des prix a légèrement baissé : l’indice, aussi bien nominal que réel, a diminué de 1,6%. En analysant dans le détail les dynamiques des prix dans les derniers mois, nous pouvons remarquer qu’en février 2011 l’indice avait atteint son record historique de 238 points (valeur nominale). De février à juin, bien qu’une légère amélioration de la situation ait eu lieu, les valeurs se sont tout de même maintenues proches des maximales. La dernière donnée de l’indice FAO (juin 2011) montre, en effet, une valeur égale à 234 points, en baisse de 0,3% par rapport à avril 2011, mais en augmentation de 39% par rapport à juin 2010.
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En février 2011, l’indice a atteint son record historique de 238 points
Figure 1.2. Dynamique du prix des matières premières alimentaires – Indice FAO des prix des produits alimentaires, valeurs réelles (1961–2010) 400 350 300 250 200 150 100 50
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAO, juin 2011.
2009
2007
2005
2003
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Le FFPI a suivi de fortes oscillations durant ces dernières années
Indice Nominal du Prix des produits alimentaires
1961
L’indice FAO des prix des produits alimentaires mesure les prix matières premières alimentaires
80 6/1990 12/1990 6/1991 12/1991 6/1992 12/1992 6/1993 12/1993 6/1994 12/1994 6/1995 12/1995 6/1996 12/1996 6/1997 12/1997 6/1998 12/1998 6/2000 12/2000 6/2001 12/2001 6/2002 12/2002 6/2003 12/2003 6/2004 12/2004 6/2005 12/2005 6/2006 12/2006 6/2007 12/2007 6/2008 12/2008 6/2009 12/2009 6/2010 12/2010 6/2011
D
urant ces 50 dernières années, les périodes d’extrême criticité pour les prix des matières premières alimentaires ont été peu nombreuses. Les plus hauts niveaux atteints au niveau global depuis les années 1970 jusqu’à aujourd’hui se réfèrent, en effet, à deux moments historiques précis : la crise alimentaire des années 1970 et la situation actuelle de fortes turbulences et d’instabilité, commencée en 2007 et qui persiste encore, à l’exception de l’inflexion enregistrée dans la deuxième moitié de l’année 2008 et en 2009. Il faut rappeler trois autres périodes d’augmentations imprévues des prix : dans les années 1978-1979, 1986-1987 et en 1995, mais ces périodes ne se sont jamais révélées aussi critiques que celles précédemment citées. La variation mensuelle des prix internationaux d’un panier de produits alimentaires est mesurée par l’indice FAO des prix des produits alimentaires (FFPI) qui est donc considéré comme l’indice de référence pour évaluer la stabilité du marché des matières premières alimentaires. Un tel indicateur est le résultat de la moyenne des indices de prix de cinq groupes de produits (céréales, fromages, huiles/matières grasses, viande et sucre) qui constituent cinq sous-indices et qui sont calculés de façon suivante : - l’indice du prix des huiles et des matières grasses consiste en une moyenne des prix de 11 huiles différentes (y compris les huiles animales et les huiles de poisson) ; - l’indice du prix du sucre est calculé en adoptant le standard fixé par l’International Sugar Agreement ; - l’indice du prix de la viande est calculé en tenant compte du prix moyen des quatre sortes de viande les plus communes ; les cotations incluent 2 produits avicoles, 3 produits de viande bovine, 3 produits à base de viande de porc et 1 produit à base de viande ovine ; - l’indice du prix des produits laitiers recueille les cotations des prix du beurre, du lait écrémé en poudre, du lait entier en poudre, du fromage et de la caséine ; - l’indice du prix des céréales est calculé en tenant compte des indices de prix des céréales et du riz. Comme le montre la figure 1.1., l’indice FAO des prix des produits alimentaires a été caractérisé par une tendance à de fortes oscillations durant ces dernières années, aussi bien en termes réels qu’en valeurs nominales. En particulier, par rapport à une importante stagnation enregistrée entre les années 1980 et 2006, depuis 2007 les prix des matières premières alimentaires ont réalisé des fluctuations amples et rapides : - de mars 2007 à juin 2008, la première forte hausse des prix a eu lieu : l’indice nominal a augmenté très rapidement, enregistrant une variation de 63,1% (et l’indice réel de 52,9%) ; - de juillet 2008 à février 2009, au contraire, une baisse soudaine du niveau des prix a été enregistrée : l’indice nominal a marqué une variation égale à -35,9% (et l’indice réel a diminué de 33%) ;
Index (2002-04 = 100)
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Déviation standard = 29,3 Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
26
1.2 La dynamique des prix des matières premières alimentaires
Figure 1.1. Dynamique du prix des matières premières alimentaires – Indice FAO des prix des produits alimentaires (juin 1990–juin 2011)
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
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Malgré les légères baisses enregistrées ces derniers mois, le risque élevé d’une nouvelle crise alimentaire est évident, si nous tenons compte de la tendance des 12 derniers mois (juin 2010–juin 2011) qui pourrait se résumer ainsi : - indice du prix des huiles/matières grasses : +52,7% ; - indice du prix du sucre : +59% ; - indice du prix de la viande : +18,3% ; - indice du prix des produits laitiers : +14% ; - indice du prix des céréales : +71%. Selon la FAO, toutefois, nous ne sommes pas encore entrés dans une nouvelle véritable crise alimentaire. Les documents les plus récents, en effet, font référence à une “période de fortes turbulences”4. Il est certain, cependant, que l’actuelle instabilité enregistrée sur les marchés agricoles détermine une situation extrêmement critique, où n’importe quel événement, comme par exemple une nouvelle grande sécheresse dans un pays exportateur important (comme cela s’est produit en Russie durant l’été 2010), pourrait à nouveau bouleverser le marché des matières premières alimentaires.
29
Figure 1.3. Dynamique du prix des matières premières alimentaires : viande, produits laitiers, céréales, huiles/matières grasses et sucre (janvier 2006–juin 2011) 450 400 350 300 250 200 150
Indice du prix des céréales
Indice du prix des produits laitiers
Indice du prix des huiles/matières grasses
5/2011
9/2010
11/2010 1/2011 3/2011
7/2010
3/2010 5/2010
1/2010
9/2009
11/2009
5/2009 7/2009
3/2009
1/2009
11/2008
7/2008 9/2008
5/2008
3/2008
1/2008
9/2007 11/2007
7/2007
5/2007
3/2007
9/2006
11/2006 1/2007
7/2006
5/2006
1/2006 3/2006
100
Indice du prix du sucre
Indice du prix de la viande Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAO, août 2011.
Risque élevé d’une nouvelle crise alimentaire
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Parallèlement à des phénomènes climatiques hostiles, une série d’autres facteurs ont exercé un fort impact négatif sur la stabilité du marché alimentaire, ce qui a comporté la hausse des prix enregistrée durant cette dernière année : et parmi ces facteurs, certains sont les conséquences du tremblement de terre au Japon, une vague sans précédent de désordres politiques dans beaucoup de Pays de l’Afrique du Nord et du Proche Orient, une forte augmentation du prix du pétrole et l’incertitude prolongée des marchés financiers et économiques globaux3. Mais, comme le montre le graphique suivant (figure 1.2.), si nous tenons compte des valeurs réelles, le maximum historique jamais enregistré correspond à la lourde crise alimentaire des années 1970, durant laquelle l’indice FAO est arrivé à enregistrer une valeur égale à presque 350 points, par rapport aux 206 points actuels. Après avoir étudié les dynamiques enregistrées par l’Indice FAO des prix des produits alimentaires, il est important d’analyser les récentes variations des prix des cinq matières premières qui le composent. Dans ce but, il peut être utile de tenir compte des deux périodes les plus récentes parmi celles précédemment énumérées : - la croissance du FFPI de juin 2010 à février 2011 a vu le sucre, les huiles/matières grasses et les céréales enregistrer une augmentation des prix supérieure à celle de la viande et des produits laitiers ; en effet, les prix de ces matières premières ont augmenté respectivement de 86%, 66% et 71% (par rapport à +12% et +13% pour la viande et les produits laitiers) ; - ensuite, de février 2011 à juin 2011 le FFPI a baissé légèrement. Les valeurs sous-jacentes ont montré une forte diminution des indices des prix du sucre (-14%) et des huiles/ matières grasses (-8%), en même temps qu’une légère augmentation de la viande et des produits laitiers (respectivement +6% et +1%). Ces augmentations ont cependant été inférieures à l’inversion de tendance enregistrée par le sucre et elles n’ont donc pas empêché la baisse du FFPI, même si elles ont contribué à la freiner. Les produits laitiers sont restés stables.
Lynn Johnson/National Geographic Stock
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Figure 1.4. Volatilité implicite annuelle de blé, de maïs et de soja (1990– 2010) 40%
30%
20%
10%
C
une tendance des prix uniforme et consolidée ne soulève pas de préoccupations
Quand les variations sont amples, imprévisibles et soudaines, elles deviennent problématiques et dangereuses
es dernières années ont vu non seulement une forte croissance des prix des matières premières alimentaires, mais aussi – et surtout – une nette augmentation de la volatilité – à des niveaux élevés en permanence pendant cinq ans de suite – et donc, de l’incertitude et de l’instabilité des marchés. La volatilité est un indicateur statistique utilisé pour évaluer la variabilité et l’incertitude des marchés. Selon les variables auxquelles on se réfère, elle peut être reconduite à différentes définitions techniques ; ici nous entendons explicitement par volatilité, la mesure de la variation des prix agricoles pendant une période donnée. Les variations de prix ne constituent pas, dans leur ensemble, un problème. Elles ne causent aucune inquiétude, par exemple, quand les prix montrent une tendance constante et bien établie, ou quand ils suivent un schéma habituel et saisonnier connu. En effet, des prix élevés en permanence stimulent la production, permettent la mise en culture de terres moins adaptées ou plus distantes des grandes voies d’eau, favorisent la rémunération et le développement des communautés rurales qui constituent la plus grande partie des populations dans les Pays en voie de développement. Au contraire, les variations des prix deviennent problématiques quand elles sont amples, imprévisibles et soudaines, puisqu’elles créent un niveau d’incertitude qui fait augmenter les risques pour les producteurs, les commerçants, les consommateurs et les gouvernements, entraînant des prises de décisions moins favorables. Enfin, les variations des prix liées à des facteurs exogènes au marché d’une matière première spécifique (par exemple, le prix du maïs influencé par le prix du pétrole) peuvent aussi être problématiques car elles sont difficilement interprétables et la cause de mauvaise décisions. Il est connu qu’en général, beaucoup de marchés de matières premières sont marqués par un haut niveau de volatilité, mais en particulier, il faut dire que les marchés des matières premières agricoles ont toujours été caractérisés par une grande volatilité pour différentes raisons. En voici quelques-unes : - la production agricole n’est pas constante à cause d’événements naturels inattendus, comme par exemple les événements météorologiques ou les infestations ; - l’élasticité de l’offre et de la demande par rapport au prix est basse. En particulier, l’offre enregistre un degré d’élasticité très bas sur une brève période : en effet, pour pouvoir remettre en équilibre l’offre et la demande après un choc du côté de l’offre, les prix doivent varier très fortement, surtout si le niveau des stocks est bas ; - la production agricole est un processus qui demande des temps longs et les producteurs, étant donné le peu d’élasticité de l’offre sur une brève période, doivent attendre la fin des cycles productifs pour pouvoir mieux répondre aux variations de prix. Ce circuit forcé provoque
0% 90
92
94
96 Blé
98
00 Maïs
02
04
06
08
10
Soja
Source : Price Volatility in Food and Agricultural Markets: Policy Responses, FAO, IFAD, FMI,OCSE, UNCTAD, WFP, World Bank, WTO, IFPRI et UN HLTF, mai 2011.
des ajustements cycliques qui augmentent ultérieurement la variabilité des marchés pris en examen5. Il est important de souligner comment la volatilité a atteint des niveaux exceptionnellement élevés ces dernières années. À ce propos, comme le montre la figure 1.1., la déviation standard6 des prix relatifs à la période 1992-2006 a été égale à 13,5, alors qu’en 2007-2011 elle a plus que doublé, atteignant la valeur de 29,3. Les causes qui ont provoqué cette forte hausse récente de la volatilité des prix peuvent être les suivantes : des événements climatiques extrêmes, la réduction du niveau des stocks, l’emploi de matières premières agricoles pour la production de biocarburants (qui a développé un lien fort avec le prix de l’énergie et a accéléré la croissance de la demande), le cours des taux de change, les restrictions au commerce, l’augmentation de la spéculation financière7 et, non des moindres, l’intervention politique sur les marchés dans maints des principaux Pays producteurs, qui a souvent altéré les dynamiques et les modèles productifs adoptés par les agriculteurs. Même en tenant compte d’un indicateur différent de celui de la déviation standard, comme celui de la volatilité implicite8, la situation de forte instabilité du marché enregistrée de 2006 jusqu’à nos jours paraît évidente. Comme le graphique reporté à la figure 1.4. le montre clairement, depuis 1990 la volatilité implicite de soja, de blé et de maïs a constamment augmenté, mais c’est durant ces dernières années qu’elle a enregistré la croissance la plus soutenue. En conclusion, même si la volatilité n’est pas un nouveau phénomène pour le secteur agricole, les dynamiques de la dernière période se placent à une échelle bien supérieure à ce qui a pu être vu jusqu’ici et elles déterminent des situations fortement dangereuses pour la plupart des sujets de la filière alimentaire. En règle générale, un tel phénomène engendre des conséquences négatives dans le secteur agricole non seulement pour la sécurité alimentaire, mais aussi pour l’économie toute entière, aussi bien des Pays développés que des Pays en voie de développement. En outre, la volatilité exagérée provoque de fortes tensions dans les filières agricoles et alimentaires en causant de graves déséquilibres entre les différents acteurs, qui amorcent des phénomènes de cyclicité dans les cotations et une nouvelle augmentation de la volatilité.
Durant ces dernières années, la volatilité a atteint des niveaux exceptionnellement élevés Les différentes causes qui ont provoqué la forte hausse récente de la volatilité
Une volatilité aussi exagérée engendre des conséquences négatives la sécurité alimentaire et l’économie toute entière
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
30
1.3 Le phénomène de la volatilité des prix des matières premières alimentaires
31
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
L’ Les familles les plus pauvres souffriront l’augmentation des prix des matières premières alimentaires Les producteurs sont défavorisés par les prix bas
la volatilité devient un problème quand elle crée de l’incertitude et des décisions d’investissement inefficientes
inquiétude globale pour la volatilité cache celle pour les niveaux des prix et toutes deux constituent l’une des principales questions liées à la sécurité alimentaire9. Alors que les producteurs tirent souvent des bénéfices et des opportunités d’un niveau élevé des prix des matières premières alimentaires, les consommateurs – en particulier les plus pauvres et résidant dans les Pays en voie de développement – en subissent gravement les conséquences. Les familles les plus pauvres, en effet, consacrent une grande partie de leur budget à la dépense alimentaire et, en consommant surtout des aliments peu traités, ils ressentent tout particulièrement l’augmentation des prix des matières premières alimentaires. Par conséquent, leur possibilité de s’alimenter de manière adéquate se trouve compromise, ainsi que l’accès à l’assistance sanitaire, à l’instruction et à d’autres biens de première nécessité. Les producteurs (en particulier les petits agriculteurs), au contraire, sont encore plus défavorisés dans un scénario de prix bas à cause desquels ils sont obligés de réduire les investissements, de produire dans des conditions non optimales et de modifier leurs standards de vie puisque la réduction des revenus menace l’entretien de leur famille ou la possibilité de soutenir les coûts opérationnels des entreprises agricoles. Par conséquent, l’incertitude peut donc déterminer des décisions et des niveaux de production non optimaux. Généralement, la volatilité devient un problème quand elle induit des comportements contraires au risque, qui conduisent à des décisions d’investissement inefficaces, et quand des situations critiques se créent que les producteurs, les consommateurs ou les nations entières ne sont pas aptes à résoudre de façon optimale. Plus en détail, les impacts d’une forte volatilité des prix des matières premières agricoles peuvent être analysés selon deux perspectives différentes : une macroéconomique et une microéconomique.
1.4.1 Les conséquences d’un point de vue “macro” Au niveau macroéconomique, l’analyse des effets de la volatilité des prix des matières premières doit partir de la distinction entre les effets de longue et de courte durée et entre les Pays exportateurs et importateurs.
Pays exportateurs Les Pays les plus à risque d’impacts macroéconomiques négatifs créés par la volatilité des prix sont les Pays en voie de développement qui dépendent des exportations de matières
premières agricoles ou dont les importations de biens alimentaires ont un poids important dans la balance des paiements ou dans la finance publique. Dans les Pays exportateurs où le Produit Intérieur Brut est fortement lié au secteur agricole, une réduction exceptionnelle des prix des matières premières alimentaires provoque de graves conséquences sur l’économie nationale. Dans un tel scénario, en effet, il est possible de noter un impact direct immédiat sur la balance des paiements, des réductions d’investissements et une diminution de l’utilisation des facteurs productifs. Ces trois phénomènes déterminent à leur tour un impact négatif sur le moyen terme sur la croissance économique du Pays. Par ailleurs, une augmentation excessive des cotations provoque souvent dans les Pays exportateurs des réactions de type protectionniste, comme le blocage des exportations, ayant pour objectif de réduire l’inflation domestique, mais qui provoque des distorsions dans la filière productive nationale et des augmentations incontrôlées sur le marché international, qui souvent, à la fin de la période, se retournent contre le Pays qui a organisé le blocage.
Une réduction exceptionnelle des prix des matières premières alimentaires provoque de graves conséquences sur l’économie des Pays exportateurs Une augmentation excessive des cotations provoque souvent des réactions de type protectionniste
Pays importateurs Les Pays importateurs, au contraire, à partir du moment où les prix des denrées alimentaires subissent une hausse exceptionnelle, peuvent aller au-devant d’une aggravation de la balance des paiements et des finances publiques ; dans ce cas aussi, l’économie toute entière est donc touchée. Une attention particulière doit être réservée aux Pays importateurs de denrées alimentaires définis “à bas revenu”, où la vague négative peut causer une augmentation de l’inflation et des coûts d’importation, qui déterminent à leur tour une détérioration de la balance des paiements. Par ailleurs, en augmentant les exportations pour pouvoir payer leurs importations, ces Pays vont audevant d’une augmentation du risque de dépréciation de leur monnaie. Enfin, une augmentation des prix des matières premières alimentaires aura un impact aussi sur les mesures fiscales liées aux importations, sur les impôts qui pèsent sur les aliments et sur les aides pour la consommation alimentaire.
les pays importateurs sont touchés par des hausses de prix exceptionelles
33
1.4.2 Les conséquences d’un point de vue “micro” Au niveau microéconomique, au contraire, certaines études récentes10 ont identifié les principaux impacts créés par une situation de grande volatilité des prix des matières premières alimentaires, en les analysant aussi bien sur le front de la demande que sur celui de l’offre et en les mettant en relation avec le niveau des prix.
Sur le front de la demande Comme nous l’avons déjà mis en évidence précédemment, du côté de la demande un niveau de prix très élevé se révèle dramatique pour les familles pauvres, spécialement pour celles qui vivent dans les Pays en voie de développement. Ces familles, qui utilisent en moyenne les 3/4 de leur budget familial pour la dépense alimentaire, se trouvent obligées d’éroder et de modifier leurs standards alimentaires et de vie, empirant ainsi la situation globale déjà critique de malnutrition. Il est donc opportun ici de distinguer, en termes
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
32
1.4 Les impacts de la volatilité des prix alimentaires sur l’économie et sur l’accès à la nourriture
Un niveau des prix très élevé se révèle dramatique pour les familles pauvres
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
34
Femmes et enfants sont les sujets les plus touchés par la volatilité des prix des matières premières alimentaires
Dans les Pays développés, les effets de la volatilité des prix sur les familles sont de portée inférieure
d’impact, entre les différents groupes socioéconomiques et les typologies des ménages. Une flambée des prix des produits alimentaires touche fortement les consommateurs nets de produits alimentaires (consommateurs et non producteurs), puisque la nourriture représente une part importante de leurs dépenses : dans de telles circonstances, en effet, une augmentation des prix réduira lourdement le pouvoir d’achat des familles en question. De plus, les familles urbaines11 à faible revenu sont parmi les plus touchées, car elles achètent leurs biens alimentaires avec le salaire qu’elles perçoivent (elles ne possèdent, ni ne cultivent de terrains) ; les familles où les femmes sont chefs de famille sont également parmi les plus touchées. Une autre catégorie très susceptible à l’augmentation des prix, en plus de celle des consommateurs nets de produits alimentaires, est celle à laquelle appartiennent les familles qui vivent d’agriculture essentiellement de subsistance, mais qui se trouvent tout de même obligées d’acheter certains biens provenant de l’extérieur. Les familles qui rencontrent des difficultés pour l’achat de biens alimentaires cherchent donc à s’approvisionner en produits de qualité inférieure et en plus petite quantité. À ce point, toutefois, une autre précision est nécessaire : l’impact direct de l’augmentation des prix sur la consommation est habituellement attendu comme négatif, mais pour évaluer un tel effet, il est important de prendre en compte dans quelle direction les prix des différents aliments vont évoluer. Si les prix vont tous dans la même direction, l’impact aussi bien sur l’économie que sur le bien-être social sera celui décrit jusqu’à présent ; dans le cas contraire, il est possible que les familles pourvoient à remplacer les produits de leur panier et qu’un tel “effet de substitution” en faveur de produits moins chers atténue l’effet de l’augmentation des prix d’autres produits. La forte augmentation des prix des matières premières alimentaires, en plus d’entraîner des effets à court terme comme ceux que nous venons de décrire (réduction de la quantité et de la qualité de la dépense alimentaire pour certaines catégories de sujets), provoque des impacts sur le moyen-long terme encore plus inquiétants. Au niveau social/nutritionnel, les sujets qui semblent les plus touchés par la volatilité des prix des matières premières alimentaires sont les femmes et les enfants, surtout ceux dans leurs mille premiers jours de vie, pour lesquels la typologie de régime détermine d’importantes implications dans le développement psychophysique. Il est donc clair que les conséquences peuvent se révéler tragiques et irréversibles : une grande partie des enfants arrête de recevoir une alimentation et une éducation adéquate, de graves pertes de capital humain et de travail sont enregistrées, la pauvreté et la malnutrition augmentent au niveau global et le taux de mortalité s’accroît drastiquement. Le développement conjoint de ces phénomènes crée de graves problèmes de durabilité future dans les Pays en voie de développement qui voient lourdement compromise leur croissance économique, souvent entraînée par l’agriculture. Mais en même temps, une diminution prolongée des prix provoque l’appauvrissement des zones agricoles les moins développées, zones qui ne peuvent pas bénéficier d’aide semblables à celles des Pays développés. Ce phénomène a sûrement été l’une des causes des imposantes migrations des populations agricoles vers les zones urbaines dans les Pays en voie de développement. Quant aux Pays développés, les effets de la volatilité des prix et de leur hausse sont de portée inférieure. Même si beaucoup de familles dépensent environ la moitié de leur budget familial pour la dépense alimentaire, ces nations jouissent d’une plus grande capacité à “ajuster” la dépense en fonction des contingences, en s’orientant éventuellement sur différents genres de biens alimentaires. Par ailleurs, les Pays les plus développés sont dotés de mécanismes de protection qui assurent aux sujets à risque une assistance appropriée.
Sur le front de l’offre Sur le front de l’offre, au contraire, un niveau élevé des prix génère des bénéfices pour les producteurs nets de matières premières alimentaires et pousse à l’augmentation de la production. La rentabilité des élevages, au contraire, est affectée, surtout si l’augmentation des coûts des nourritures animales n’est pas entièrement transférée sur les consommateurs. Des prix bas ou volatiles créent, en effet, d’importants problèmes aux agriculteurs et aux autres sujets de la filière alimentaire qui risquent de perdre leurs investissements productifs au cas où il y aurait une diminution des prix durant l’implémentation d’investissements dont la rentabilité dépend du niveau des prix. Un exemple classique est celui des agriculteurs qui ont déjà semé leurs récoltes et qui se retrouvent à devoir faire face à une baisse des prix : dans cette situation, les petits agriculteurs pauvres qui ne peuvent pas se permettre un crédit vont rencontrer des problèmes particuliers pour financer une nouvelle semence et rester ainsi en activité. Ce type de problème peut être assez grave et donc difficile à résoudre, par exemple, pour les femmes propriétaires de petits terrains, qui représentent la majorité dans beaucoup de Pays. Par ailleurs, il est important de tenir compte que beaucoup d’agriculteurs dans les Pays en voie de développement (et certains aussi dans les Pays développés) n’opèrent pas sur une échelle suffisamment ample pour pouvoir mettre de côté des revenus pour les saisons suivantes : par conséquent, le bien-être de la famille et l’existence même de l’entreprise agricole sont à risque dans une situation de volatilité excessive. L’incertitude peut aussi se traduire par des décisions d’investissement à long terme non optimales. Après avoir étudié les impacts négatifs dérivant de l’augmentation des prix dans le secteur agricole, il est indispensable de tenir compte de certaines opportunités importantes d’un tel scénario. L’agriculture, en effet, est la principale source de revenu pour la plus grande partie de la population rurale dans la plupart des Pays en voie de développement, une situation de prix stablement plus élevés pourrait contribuer à soulager la pauvreté rurale, mais seulement à condition que les producteurs soient pleinement intégrés au marché. L’ampleur de telles opportunités est aussi liée à la dimension des entreprises agricoles, et à l’accès aux autres ressources (semences, engrais, machines, etc) qui permet aux agriculteurs de saisir l’opportunité de la hausse des prix. De plus, dans les zones où l’agriculture est la condition nécessaire pour la croissance et le développement rural, une augmentation de la production agricole et une croissance de la productivité provoquent d’importants effets multiplicateurs sur les activités rurales secondaires/non agricoles et sur l’emploi.
la hausse des prix favorise les producteurs nets la volatilité met à risque le retour des investissement
Une situation de prix stablement plus élevés pourrait contribuer à soulager la pauvreté rurale
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
la fragilité des familles pauvres et de celles qui vivent d’économie de subsistance
35
Todd Gipstein/National Geographic Stock
2. Les facteurs qui déterminent l’évolution des prix des matières premières alimentaires et leur volatilité
38
D
Les nombreux facteurs qui influent sur le niveau et sur la volatilité des prix des matières premières alimentaires
ans le chapitre précédent, nous avons illustré en détail l’évolution historique et le scénario actuel des prix des matières premières alimentaires. En outre, nous avons décrit les conséquences – sur la sécurité alimentaire des familles (surtout à faible revenu) et sur la stabilité économique et politique des Pays (en particulier ceux en voie de développement) – du phénomène de l’augmentation de la volatilité et des flambées des prix auxquelles nous assistons depuis peu. Dans ce deuxième Chapitre, nous allons identifier et examiner les principaux facteurs impliqués parces dynamiques, pour en comprendre les relations les plus importantes et les effets. Pour cette raison, le BCFN a adaptation un modèle interprétatif illustré dans la figure 2.1. En offrant une vision systématique des nombreux éléments qui concourent à définir l’évolution des prix des matières premières alimentaires, ce modèle met en évidence tout d’abord des facteurs liés à la demande (niveaux des stocks des produits, facteurs démographiques, croissance économique des Pays en voie de développement, choix alimentaires) et à l’offre Figure 2.1. Le modèle interprétatif des facteurs influant sur le niveau et sur la volatilité des prix des matières premières alimentaires
Démographie Croissance de la population Urbanisation
Marché des changes
Politiques commerciales
Dynamiques géopolitiques
Croissance économique des Pays en développement Niveaux des stocks
Productivité Technologie/innovation Gaspillages et pertes
Biocarburants
Styles alimentaires Augmentation des calories consommées “Occidentalisation” du régime alimentaire
Production agricole
DEMANDE
PRIX
OFFRE
Limites des ressources naturelles Terres Eau
Marchés financiers (spéculation)
Prix du pétrole et de l’énergie
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti, 2011.
Changement climatique Hausse des température Variation des précipitations Événements climatiques défavorables
(production agricole, limites des ressources naturelles, production des biocarburants, effets conséquents au changement climatique). Il s’agit de facteurs endogènes auxquels il est possible d’associer également des facteurs transversaux exogènes, qui influent directement ou indirectement sur les prix des matières premières alimentaires. Parmi eux, le modèle interprétatif proposé tient compte des marchés financiers et du marché des changes, du prix du pétrole et de l’énergie, des politiques commerciales internationales et des dynamiques géopolitiques. L’exigence de réaliser un schéma de ce modèle par le biais d’une représentation graphique a imposé le choix de situer les différents facteurs du côté de la demande, de l’offre ou parmi les facteurs transversaux. Cependant, nous sommes bien conscients des limites de cette simplification : en effet, dans la réalité, maints de ces facteurs exercent des interactions beaucoup plus complexes dans la relation offre/demande des matières premières alimentaires. En outre, il faut dire qu’il existe de nombreuses interconnexions entre les facteurs mêmes, que nous avons donc essayé de mettre en évidence à travers des lignes pointillées. Dans les prochains paragraphes, nous chercherons à identifier et à décrire les relations entre chacune des variantes cernées et l’évolution des prix des matières premières alimentaires et leur volatilité1. Tous les éléments identifiés et représentés dans le modèle interprétatif décrit ci-dessus peuvent être également divisés selon la typologie de l’effet engendré sur les prix et de son horizon temporelde référence. Dans les paragraphes suivants, nous essaierons aussi bien de comprendre dans le détail les relations entre les variables identifiées et les prix que d’éclaircir si l’impact provoqué concerne surtout l’augmentation de la volatilité des prix dans le court terme et/ou l’augmentation du niveau des prix dans le moyen/long terme. De ces évaluations, il en découle que les effets de certains facteurs se modifient seulement sur le moyen et long terme et peuvent trouver une réponse dans des processus d’adaptation du système face à l’évolution des conditions structurelles de la demande et de l’offre : c’est le cas par exemple de la croissance démographique et économique des Pays en voie de développement, qui comporte une remarquable augmentation de la demande des biens alimentaires, du phénomène de l’urbanisation, de la hausse de la température provoquée par le changement climatique, de la progressive accentuation de la pénurie des ressources naturelles. Comme nous le verrons plus en détail dans le troisième Chapitre, en faisant référence à ces thèmes, un processus beaucoup plus ample de changement des comportements et des styles de vie, d’adaptation et d’atténuation des effets du changement climatique apparaît nécessaire, ainsi que des investissements et des innovations qui augmentent la productivité agricole. Au contraire, il y a des facteurs sur lesquels il est possible d’intervenir dans le court terme, comme dans le cas de la gestion des stocks des matières premières alimentaires, des subventions à la production des biocarburants, des excès de spéculation financière sur le marché des matières premières agricoles et des politiques commerciales.
facteurs liés à la demande, à l’offre et facteurs transversaux
Typologie de l’effet engendré sur les prix et horizon temporel de référence
facteurs modifiables seulement à moyen et long terme et facteurs sur lesquels intervenir à court terme
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
2.1 Le modèle interprétatif du BCFN
39
L
En 2050 la population mondiale augmentera d’un tiers
1990
1,3
1,2
2000
2010
Pays industrialisés
2020
Marchés en développement
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données USDA (United States Department of Agriculture), 2010.
Un autre phénomène qui a actuellement un fort impact sur la demande de denrées alimentaires est l’urbanisation5 en cours dans les Pays en voie de développement, car la migration de la campagne à la ville résulte généralement d’un changement des habitudes alimentaires vers un régime plus diversifié. L’augmentation du revenu par personne et l’urbanisation sont deux facteurs qui comportent une évolution graduelle de la composition du panier alimentaire des Pays en voie de développement, en passant d’un régime composé essentiellement de céréales à un régime plus riche en fruits, en légumes, en viande et en poisson. Les consommateurs qui habitent en ville, surtout en Asie, sont en train d’expérimenter de manière croissante le régime occidental, en réduadaptationisant la consommation des plats de leur cuisine traditionnelle. La figure 2.3. montre la valeur moyenne journalière des calories consommées dans les Pays en voie de développement dans la période 1964-2030. Dans les Pays en voie de développement, la croissance a plus que doublé par rapport à celle des Pays industrialisés (0,55 de moyenne annuelle contre 0,24%), dû à la soi-disant « occidentalisation du régime », à savoir le remplacement progressif d’aliments pauvres avec des aliments provenant de transformations plus complexes.
L’augmentation du revenu par personne et l’urbanisation modifient la composition du panier alimentaire des Pays en voie de développement
1964-1966
1974-1976
1984-1986
1997-1999
Pays en voie de développement Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données de la FAO, 2010.
2015 Pays développés
3500
2980
3440 2850
3380 2681
2450
3065
3206
Figure 2.3. Consommation par personne (kcal journalières) dans les Pays en voie de développement et dans les Pays développés
2152
l’augmentation du revenu conduit à de plus grandes consommations et à la diversification de la demande
1980
2947
40
a croissance de la population mondiale et sa progressive urbanisation, le développement économique des Pays en voie de développement et le déplacement résultant des choix alimentaires vers des produits alimentaires plus complexes représentent des défis de portée énorme pour le système agroalimentaire mondial, qui dans le moyen et le long terme devra essayer de faire face à une augmentation constante de la demande qui provoquera très probablement de fortes tensions sur le front des prix des matières premières alimentaires. Par exemple, selon les prévisions à moyen terme réalisées par l’OCDE et la FAO2, de 2010 à 2020 les prix des céréales et des dérivés de l’élevage du bétail seront plus élevés par rapport à la décennie précédente et passeront de 20% à 30%3. Les prix de la viande et des produits laitiers d’un côté, et des céréales et des huiles végétales de l’autre, s’influencent réciproquement à travers une série de relations directes et indirectes. Donc, les variations dans la demande de la viande et des produits laitiers influencent aussi la demande (et les prix) des cultures nécessaires à l’élevage du bétail. Inversement, puisque les céréales et l’huile végétale sont parmi les principaux éléments de coût pour l’élevage du bétail, une hausse du prix de ces matières premières détermine une hausse du prix de la viande. L’augmentation du revenu disponible, la migration de la campagne à la ville et l’évolution des choix des Pays en voie de développement sont des phénomènes qui expliquent une augmentation de la demande des biens alimentaires de la part de ces économies, qui apparaissent de plus en plus sur les marchés internationaux au détriment de l’autoproduction. Il est important de souligner que l’augmentation du revenu par habitant d’une si grande partie de la population mondiale se répercute directement aussi bien sur une croissance de la consommation que sur une diversification de la demande et sur une sensibilité mineure aux variations des prix. La moindre élasticité de la demande est un des facteurs qui favorisent la hausse des prix, car la portée de l’effet de substitution se contracte et induit les consommateurs à acheter des biens aux caractéristiques similaires à moindre prix. Certaines données sur les phénomènes cités précédemment peuvent aider à mieux comprendre la portée de ces défis. La plupart des Pays en voie de développement ont connu une forte croissance économique ces dernières années. En Asie, en Chine et en Inde surtout, nous assistons à une croissance économique soutenue, avec le PIB réel en hausse de 7,3 % en base annuelle de 2006 à 2011. L’Afrique Subsaharienne a atteint un taux de croissance du PIB réel de 4,5% pendant la même période. Cette forte croissance, unie à l’influence qu’elle exerce sur la consommation, représente un facteur clé pour comprendre l’évolution progressive de la demande alimentaire mondiale. Quant à la croissance démographique, selon les estimations de la FAO, en 2050 la population mondiale augmentera d’un tiers, en atteignant les 9,1 milliards par rapport aux 6,9 milliards actuels, et par conséquence la demande de denrées alimentaires pourrait augmenter de 70%
1,2
1,1
1,1
5,3
4,8
4,2
3,6
3,0
2054
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Figure 2.2. Population résidente dans les Pays industrialisés et sur les marchés en développement (1980-2020, Mld)
2030
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
2.2 Dynamiques démographiques, croissance économique dans les pays en voie de développement et modifications des choix alimentaires
à 100%4. Même dans un futur proche, comme cela s’est produit récemment (figure 2.2.), ce sera surtout la population des Pays (marchés) en voie de développement qui augmentera, aujourd’hui elle représente déjà 60% de la population mondiale. De 1980 à 2010, la population de ces pays a augmenté, avec un taux moyen annuel de 6% par rapport au taux de 2,5% des Pays industrialisés.
41
Figure 2.4. Consommation de viande par personne (kg), au Brésil, en Chine et en Corée du Sud en 1990 et en 2011 94
Figure 2.6. Consommation de viande par personne en Chine, en Europe, en Inde et aux États-Unis (kg) 140
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
56
60
54
100 80
26
23
60 40
Chine
20
Coreé du Sud 2001
La diversification du régime implique une augmentation de la consommation de produit de l’élevage
42
En particulier, la diversification du régime comporte une augmentation de la consommation des produits à forte teneur en calories et en protéines comme la viande et les produits laitiers6. La figure 2.4. montre la consommation moyenne par personne de viande en Chine, au Brésil et en Corée du Sud en 1990 et en 2011, mettant en évidence la forte croissance enregistrée ces vingt dernières années. En outre, dans ces Pays on peut observer aussi une augmentation constante de la production et de la consommation de produits laitiers. La figure 2.5. montre le cas de la Chine en ce qui concerne le beurre et le fromage. Avec la croissance de la consommation de la viande et des produits laitiers, la demande des céréales nécessaires pour nourrir le bétail d’élevage augmente aussi. Cette croissante est exponentielle : pour produire un kilo de viande de poulet, il faut environ deux kilos de céréales, pour un kilo de viande de porc environ quatre kilos de céréales et pour un kilo de viande de boeuf entre sept et huit kilos de céréales. La consommation par personne de la Chine a atteint désormais les niveaux européens (figure 2.6.). Figure 2.5. Production et consommation de beurre et de fromage en Chine (2000-2011, milliers de tonnes)
385
+3% DANS LA PRODUCTION ET +3,16% DANS LA CONSOMMATION
330
Europe
Chine
Inde
Il est intéressant de remarquer que, pour cette raison, la Chine est devenue l’un des principaux exportateurs mondiaux de graines de soja et d’huiles végétales destinées à l’élevage et utilisées comme intégrateurs protéiques dans les fourrages. L’importation d’huile de graines et d’huiles végétales destinées à l’élevage a augmenté de 1990 à 2007 respectivement de 16,2% et de 8,9% sur base annuelle. Même en Inde, une augmentation de 72% des importations d’huile de graines a été enregistrée dès 1990. Les changements dans les modèles de consommation alimentaire qui se produisent depuis quelques années au niveau mondial seront de plus en plus marqués dans le futur. Par exemple, si dans le sudest asiatique, une baisse de 4% de la consommation de riz par personne est attendue de 2000 à 2050, la consommation de fruits, de légumes et de produits laitiers augmentera de 70% et celle des oeufs, de la viande et du poisson doublera en raison d’un revenu en croissance constante (+6,1 en moyenne sur base annuelle).
La Chine est devenue un des principaux importateurs mondiaux de graines de soja et dhuiles végétales à cause de l’augmentation de la consommation de viande
Figure 2.7. Importations chinoises d’huile de graines et d’huiles végétales (1990-2007, milliers de tonnes) 35.042
220 165 110
10.199
+2,45% DANS LA PRODUCTION ET +2,88% DANS LA CONSOMMATION 2739
2710
0 2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
Production de beurre
Production de fromage
Consommation de beurre
Consommation de fromage
2011
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAPR, World Agricultural Outlook 2011.
1990
2007 Huiles végétales
Huiles de graines
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAO, 2007.
2011
2010
États-Unis
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAPRI, World Agricultural Outlook 2011.
275
55
2009
2008
2007
2006
2005
2004
2003
2002
2001
2000
1999
1998
1997
1996
1995
1994
1993
1992
0
Source : adaptation par The European House-Ambrosetti à partir des données FAPRI (Food and Agriculture Policy Research Institute), 2011.
1991
1990
1990
Brésil
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
120
43
44
Figure 2.9. Stocks globaux en relation à la production et à la consommation de riz, de blé et de maïs (1999-2011, millions de tonnes)
L
Le niveau des stocks est un bon indicateur de la capacité de l’offre et de la disponibilité future des matières premières
La relation entre le niveau des stocks et les prix alimentaires
es stocks des matières premières alimentaires représentent le quota de la récolte destinée au stockage et non à la consommation immédiate. Les principales structures de stockage pour les céréales sont les silos, qui garantissent les conditions nécessaires pour la préservation des caractéristiques chimiques et nutritionnelles des matières premières stockées. Le niveau des stocks des principales matières premières alimentaires peut être considéré comme un bon indicateur d’évaluation de la capacité de l’offre actuelle et surtout de la future disponibilité de ces matières premières. Depuis l’Antiquité, la gestion des stocks a toujours été cruciale pour la prospérité de la population : une politique clairvoyante d’accumulation dans les périodes de bonnes récoltes signifiait une disponibilité suffisante de nourriture dans les périodes de famine7. Donc le niveau des stocks a une valeur de précaution, d’un côté contre la volatilité des prix et de l’autre, concernant le niveau des prix. Un bon niveau de stocks permet en période de crise de soutenir l’offre en introduisant de nouveaux volumes sur le marché et en contribuant à maintenir les prix stables. Dans la période d’abondance, par contre, il vaut mieux destiner des quotas de la récolte aux entrepôts pour éviter le gaspillage et des niveaux excessivement bas des prix. Pour interpréter le comportement des prix sur les marchés des matières premières et identifier les causes de leur tendance, il est important de comprendre quelle relation existe entre le niveau des stocks et les prix alimentaires. Figure 2.8. Taux de variation annuel moyen de production, de consommation et niveau des stocks de riz, de blé et de maïs (monde, 2000-2011)
2,36% 0,75%
0,95%
0,93% Riz
150
450
100
400
50
0
350 99/00
00/01
01/02
02/03
03/04
04/05
05/06
06/07
08/09
09/10
10/11
Stock de riz
Consommation
Production
07/08
700
250 200
650
150 600
45 100
550
50
500
0 99/00
00/01
01/02
02/03
03/04
04/05
05/06
06/07
08/09
09/10
10/11
Stock de blé
Consommation
Production
07/08
900
250 200
800
2,44%
150
1,03% Blé
500
700
-0,7%
Maïs
100 600
-3,4%
-3,5%
50
500
0 99/00
CAGR production
CAGR consommation
00/01
01/02
02/03
03/04
04/05
05/06
06/07
07/08
08/09
CAGR stocks Production
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAPRI, 2011.
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
2.3 niveaux des stocks
Consommation
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAPRI, 2011.
Stock de maïs
09/10
10/11
46
Figure 2.10. Corrélation entre le rapport stock-utilisation et le niveau des prix du blé (1990-2012) 40%
$ 400
35%
$ 350
30%
$ 300
25%
$ 250
20%
$ 200
15%
$ 150
10%
$ 100
40%
$ 700
35%
$ 600
30%
$ 500
25% $ 400 20% $ 300 15% $ 200
10% 5%
$ 100
0%
$0 99/00
00/01
01/02
02/03
03/04
04/05
05/06
06/07
07/08
Rapport stock-utilisation riz
08/09
09/10
10/11
Prix moyen du riz
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAPRI, 2011.
47
Figure 2.12. Corrélation entre le rapport stock-utilisation et le niveau des prix du maïs (1999-2011) $ 250
35% 30%
$ 200 25% $ 150
20% 15%
$ 100
10% $ 50 5%
5%
$ 50
0%
$0
Rapport stock-utilisation blé
Prix moyen du blé
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAPRI, 2011
11/12
10/11
09/10
08/09
07/08
06/07
05/06
04/05
03/04
02/03
01/02
00/01
99/00
98/99
97/98
96/97
95/96
94/95
92/93
91/92
90/91
0% 93/94
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Il existe un lien fort entre les niveaux des stocks et l’évolution des prix
Figure 2.11. Corrélation entre le rapport stock-utilisation et le niveau des prix du riz (1999-2011)
$0 99/00
00/01
01/02
02/03
03/04
04/05
Rapport stock-utilisation maïs
05/06
06/07
07/08
08/09
Prix moyen du maïs
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAPRI, 2011.
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
les stocks diminués sont utilisés pour satisfaire la demande croissante
La figure 2.8. montre comment de 2000 à 2011 le taux annuel de croissance de la production et de la consommation au niveau mondial a été déséquilibré. Les consommations ont augmenté en moyenne plus que la production et, pour satisfaire la demande croissante, les stocks ont été utilisés, et sont donc en diminution. La diminution des stocks est une donnée à travers laquelle les marchés8 élaborent leurs prévisions sur le niveau futur des prix et des disponibilités réelles, Sur la base de ces prévisions, les États pourvoient à modifier leurs politiques commerciales en appliquant des impôts, en fournissant des subventions, ou en faisant recours aux stocks selon les nécessités9. Le phénomène de la réduction des stocks de ces dernières années est dû aussi aux démantèlements des programmes d’intervention pour soutenir les prix dans certains Pays OCDE et au degré d’exactitude des informations sur les volumes stockés par les nations productrices et consommatrices. En observant ces graphiques (figure 2.9.), on constate, pour toutes les matières premières analysées, une période de grand déséquilibre en faveur de la consommation de 2001 à 2004, qui correspond à une diminution des stocks à des niveaux insuffisants pour résister à la crise de 2007-2008. L’écart entre la production et la consommation s’est progressivement orientée vers un lent processus de reconstitutions des stocks, même si les dernières analyses signalent une nouvelle réduction. Il est utile maintenant d’examiner le comportement des prix par rapport à l’évolution des stocks : la figure 2.10. montre, dans le cas du blé, la corrélation entre le rapport stock-utilisation10 et le prix du blé de 1990 et les estimations pour 2012. Une augmentation du niveau des prix correspond à une réduction des stocks (qui dans le graphique est représentée par une courbe stocks-utilisation négative), comme le montrent les chocs de 1995-1996 ou de 2008-2009 ; au contraire, les prix tendent à diminuer lors d’une augmentation des stocks (qui dans le graphique correspond à une courbe stocks-utilisation positive), comme dans la période 1996-2002. L’indice de corrélation souligne qu’entre les deux séries, il y a une forte corrélation négative (-0,73), ce qui suggère un lien fort entre les niveaux des stocks et l’évolution des prix. On peut observer la même relation pour le riz et le maïs.
09/10
10/11
48
rareté croissante des ressources naturelles au niveau global, réussira-t-elle à tenir le rythme de la forte croissance de la demande des produits alimentaires ? De combien devra-t-elle augmenter la productivité agricole ? La disponibilité limitée des ressources naturelles, relative, en particulier à l’input comme l’eau et les terres arables, représente une entrave très importante à la croissante de la capacité productive de l’agriculture mondiale.
D
Le monde d’aujourd’hui est à même de produire de la nourriture pour tous
Cependant, les processus de distribution alimentaire sont inadéquats
à l’avenir, la production agricole mondiale sera en mesure d’équilibrer la croissance de la demande
ans les paragraphes précédents, nous avons analysé les principales variantes qui influencent les dynamiques de la demande des produits alimentaires dans le monde, aussi bien dans la courte que dans la moyenne-longue période, comme les phénomènes liés à l’évolution des scénarios démographiques, au changement des styles alimentaires et au développement des Pays émergents. Le scénario présenté ici semble, donc, esquisser un futur caractérisé par une forte croissance de la demande des biens alimentaires au niveau global. En revanche, l’offre devra donc compenser ce phénomène de croissance de la demande : d’un point de vue purement économique, plus l’offre sera capable de se moduler et de s’adapter pour atteindre une condition d’équilibre de marché, plus il sera possible d’éviter des situations d’instabilité et donc d’extrême volatilité des prix. Actuellement, l’inefficience des dynamiques économiques intrinsèques sur le marché des matières premières alimentaires sur le front de l’offre doit se reconduire à différents facteurs, mais pas à une production agricole insuffisante : en effet, le total global de calories journalières produites par personne a été estimé à 2720 kcal11. D’un point de vue technique-quantitatif, donc, le monde d’aujourd’hui est à même de produire de la nourriture suffisante pour tous, mais, comme malheureusement le démontrent les 925 millions de personnes sous-alimentées dans le monde, de grandes inefficiences subsistent sur le marché. Parmi elles, par exemple, les problématiques liées à l’accès au marché, le gaspillage des biens alimentaires aussi bien dans les phases de production que dans celles de consommation12, l’inefficience des modèles et des processus de distribution et les styles alimentaires des Pays industrialisés. Parmi les facteurs précèdemment énumérés, la cause principale des déséquilibres sur le front de l’offre sont des processus inadéquats de distribution alimentaire, qui semblent préférer la commercialisation et la monétisation des produits agroalimentaires plutôt que la valorisation de la disponibilité et l’accès à la nourriture de la part de toutes les couches de la population. Il suffit de penser au paradoxe selon lequel de nombreux Pays, depuis toujours de grande importance dans la production agricole mondiale, qui enregistrent un nombre élevé de personnes sous-alimentées : à cet égard, en effet, on estime qu’environ 75% des Pays qui présentent des phénomènes de sousalimentation sont des exportateurs de nourriture dans le monde13. En 2000, par exemple, l’Inde, malgré ses 238 millions d’habitants souffrant de sous-alimentation, avait destiné à l’exportation 60 millions de tonnes de céréales produites sur son territoire. Cependant, même si aujourd’hui la production des matières premières agricoles peut être considérée en théorie comme suffisante pour faire face aux besoins alimentaires mondiaux14, de sérieux doutes et des inquiétudes subsistent quant aux développements potentiels du scénario agricole et alimentaire du futur. La production agricole mondiale, tenant compte de la
la contrainte des ressources naturelles limitées
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
2.4 Production agricole et pénurie des ressources
49
Phil Schermeister/National Geographic Stock
Dans l’ensemble, notre planète dispose d’environ 1,4 milliard de km3 d’eau. En théorie, toutefois, seulement un peu moins de 45.000 km3 d’eau (c’est-à-dire 0,003% du total) peuvent être exploités et seulement 9-14.000 (à savoir 0,001% du total) sont effectivement disponibles pour l’utilisation de la part de l’homme, car d’assez bonne qualité et à des coûts accessibles. Actuellement, l’agriculture irriguée emploie à elle seule environ 70% de la consommation mondiale d’eau douce15. La demande d’eau, déjà très élevée, augmentera de manière constante dans le futur, en provoquant une progressive pénurie, surtout dans certaines zones de la planète, et de graves conséquences sur la filière agricole/alimentaire. Comme le montre la figure 2.13., en effet, selon des estimations, en 2030 l’agriculture représentera encore le secteur qui consomme la plus grande part de ressources hydriques mondiales16. Les données relatives à l’accès à l’eau pour le futur ne sont pas rassurantes car, à cause de la croissance démographique, du coût élevé des techniques d’irrigation qui souvent sont supérieures aux possibilités économiques des petits agriculteurs de nombreux Pays en voie de développement, de la persistance de pratiques d’irrigation
La dégradation du sol est un processus dégénératif à long terme de la fonction et de la productivité des écosystèmes18. Il s’agit d’un appauvrissement du sol du point de vue de la fertilité, qui se manifeste à travers des phénomènes tels que la désertification, l’érosion (l’exportation progressive du sol), la salinité et la présence de polluants. Le processus de formation et de régénération du sol est très lent et, pour cette raison, il est considéré comme une ressource essentiellement non renouvelable. Le déboisement, la déforestation, l’extraction des substances nutritives des terres agricoles, la conversion urbaine, l’irrigation et la pollution sont parmi les causes principales de la dégradation du sol. Par ailleurs, ce phénomène est engendré aussi par la gestion inadéquate du territoire, par l’exploitation intensive des terres et par les techniques d’irrigation inefficaces. D’après certaines études19 d’observation du phénomène pendant vingt ans, la dégradation du sol augmente constamment et se diffuse progressivement dans de nombreuses parties du monde. Actuellement ce phénomène touche plus de 20% de toutes les surfaces cultivables, 30% des forêts et 10% des prairies.
Source : WBCSD, Facts and Trends - Water, cit.
Terres agricoles (% sur le total des terres disponibles au niveau global) Source : FAO, http://faostat.fao.org/site/377/default.aspx
hectares par habitant
2008
0,6 2004
33 2000
0,8
1996
34
1992
1,0
1988
35
1984
1,2
1980
36
1976
2030
2020
2010
2000
1990
1980
1960 1970
Usage domestique
1,4
1972
Usage industriel
37
1968
Usage agricole
1,6
1964
Total d’eau utilisée
51
38
1961
spectives futures
En outre, selon d’autres chercheurs20, chaque année 20.000-50.000 km2 de terres deviennent inutilisables, avec des pertes majeures de 2 à 6 fois en Afrique, en Amérique Latine et en Asie par rapport à l’Amérique du Nord et à l’Europe. En conclusion, comme le montre le graphique de la figure 2.14., la part de terrains destinée à l’agriculture a connu une très forte réduction, créant de graves répercussions sur toute la filière alimentaire. Les répercussions les plus grandes toucheront de plus en plus la productivité agricole ; il est important de rappeler que l’érosion, la désertification et la salinisation ont des impacts directs sur les rendements agricoles. En effet, suite à ces phénomènes, la productivité de certaines zones s’est réduite de 50%. Par exemple, en Afrique, le continent le plus sévèrement touché par ce phénomène21, les pertes oscillent dans une marge comprise entre 2 et 40%, avec une perte moyenne estimée à 8,2%, calculée sur tout le territoire. Au niveau global, les répercussions du phénomène ont causé une perte de productivité comprise entre une marge de 1-8% qui équivaut à une perte annuelle de 400 milliards de dollars22, à savoir 70 dollars par personne.
Figure 2.14. Le quota des terres a atteint le pic % de la superficie globale des terres
inefficaces et de la croissante compétition pour l’utilisation des ressources hydriques, on estime que un quota compris entre 15 et 35% des prélèvements d’eau actuels pour l’irrigation ne sera plus durable dans le futur17. En tenant compte du fait que les sols irrigués produisent un rendement 2-3 fois supérieur (20% environ de la surface mondiale cultivable) – et qu’ils assurent 40% de la production mondiale – par rapport à ceux qui exploitent uniquement l’apport hydrique pluvial (80% des sols), l’urgence du phénomène de la pénurie de l’eau apparaît encore plus évidente. Le rapport entre l’eau et la production agricole reste, donc, un des défis les plus difficiles pour le futur du genre humain, car il sera crucial d’éviter un ultérieur empirement de la situation déjà critique et inacceptable de la sous-alimentation et de la soif dans le monde. Etant donné le grand problème de la pénurie des ressources hydriques (qui touche plus de 1,2 milliard de personnes et en touchera plus de 1,8 milliard en 2025), une réflexion approfondie ayant pour objectif l’identification d’un modèle de croissance structurelle qui devra être poursuivi par des approches intersectorielles et internationales, s’impose, surtout en fonction de la durabilité de la production agricole future.
Figure 2.13. Le prélèvement des ressources hydriques par typologie de secteur : les per-
1950
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
La dégradation des sols Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables BCFN impliquées Index 2011
50
La pénurie de l’eau aujourd’hui et demain
Terres agricoles (hectares par habitant)
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
La productivité agricole globale a continué à augmenter, même si à des taux décroissants
Figure 2.15. Le rendement global des céréales23 (1961-2010)
3500
CAGR 1961-1990 : +1,84% 3000
2500
CAGR 1991-2010 : +1,22%
2000
1500 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972 1973 1974 1975 1976 1977 1978 1979 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données The World Bank, juillet 2011.
© Corbis
52
Par conséquent, la croissance de la productivité agricole sera d’une importance fondamentale, à savoir le rendement des terres utilisées à des fins agricoles, aussi bien à travers l’utilisation de nouvelles technologies qu’à travers la diffusion de meilleures pratiques et de technologies agricoles, même dans les Pays en voie de développement. Dans l’ensemble, ces cinquante dernières années, la productivité agricole globale a continué à augmenter même si à des taux décroissants. La raison de ce ralentissement doit être identifiée dans la fin des effets de la “révolution verte”, où l’introduction et l’utilisation massive de techniques agricoles innovatrices (en particulier les pesticides et les fertilisants chimiques) ont permis à la productivité de faire un grand bond en avant vers la fin des années 1960-1970. Comme le montre clairement le graphique de la figure 2.15., par exemple, le rendement des terres cultivées en céréales a constamment augmenté depuis 1960, en suivant cependant deux vitesses différentes. Des années 1960 aux années 1990, en effet, le taux annuel moyen de croissance a été supérieur de 50% par rapport aux vingt années suivantes ; au contraire, aujourd’hui la productivité agricole s’accroît moins rapidement que par le passé et, surtout, moins rapidement que la croissance de la demande. Pour les prochaines années aussi, le même ralentissement est prévu, du fait du manque d’avancements technologiques importants qui représentent, donc, le vrai défi pour assurer une production agricole globale adéquate dans un futur proche.
Figure 2.17. Production mondiale de biocarburants par macro-régions géographiques (20052009, milliers de barils/jour)
173
155 138 113
68 58
L
es objectifs de sécurité énergétique et le problème de l’épuisement des combustibles fossiles sont deux facteurs qui ont déterminé une attention croissante envers les énergies renouvelables24, aussi bien de la part des Pays occidentaux que de ceux en voie de développement. Parmi les sources d’énergie “verte”, la part de production et de consommation des biocarburants25, a augmenté rapidement ces dernières années et selon les prévisions, elle continuera à augmenter aussi dans un futur proche. En effet, au niveau global, la production des biocarburants est passée en quelques années de 49,6 milliards de litres en 2007 à 88,6 milliards de litres en 201026. Cette croissance a été stimulée surtout par les politiques énergétiques nationales et supranationales (comme les mandats sur les quotas des carburants et les objectifs de production des énergies renouvelables), par les subventions, les allégements fiscaux et les mesures de protection27. Par ailleurs, l’utilisation des biocarburants ne demande pas de particulières évolutions technologiques dans l’ingénierie des moteurs modernes, et constitue ainsi une alternative facile aux combustibles fossiles. Comme le montrent les figures 2.16. et 2.17., le scénario mondial de la production de biocarburants est divisé en deux macro-régions : d’un côté, le Brésil et les Etats-Unis, deux grands producteurs d’éthanol ; et de l’autre, les Pays de l’Union Européenne où, par exemple, se
54
États-Unis
Brésil
Europe
Chine
2653
1858
4573
2009
2094
2613
1647
3937
2008
2052
24.900 1934
340
1900
24.500 2777
1694
28.975
40.125
34.069 2007
300
1840
2159
19.000
24.600
48.457
Figure 2.16. Production mondiale d’éthanol : les principaux Pays producteurs (2007-2010, millions de litres)
2010 Thaïlande
Autres
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données USDE (United States Department of Energy), 2010.
1
2
6
2005 Europe
0,3
2
9
17
46
39
34
39
29
35
15 16
2006 Amérique centrale et du Sud
2007 Asie et Océanie
4
3
1
0,3
2008
2009
Amérique du Nord
Eurasie
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données USDE, 2009.
concentre la production du biodiesel, dont la matière première de départ (les huiles végétales) provient de l’UE, du Brésil et du sud-est asiatique. On distingue les biocarburants de première et de deuxième génération. Selon une définition de l’Agence Internationale de l’Energie (AIE), les biocarburants de première génération sont généralement l’éthanol de canne à sucre, de racines ou de maïs et le biodiesel. Les matières premières employées dans la production des biocarburants de première génération proviennent de la fermentation d’aliments à haut teneur en sucre, tels que le saccharose, les racines (dans le cas du biodiesel) et les huiles de graines oléagineuses ou les fruits exotiques et les graisses animales, qui peuvent être consommés comme nourriture ou comme fourrage pour les animaux. Au contraire, les biocarburants de deuxième génération sont produits avec des substances organiques non alimentaires telles que la cellulose, la hémicellulose et la lignine. Ils présentent donc des caractéristiques de plus grande durabilité dans la production par rapport à la première génération. Cependant, leur production est actuellement très complexe et coûteuse et dans un futur proche, leur quota sur le total restera plutôt bas : en effet, selon des estimations, en 2020 la production d’éthanol de deuxième génération représentera seulement 2,8% du total28. Donc, aujourd’hui, la production croissante de biocarburants entre en compétition directe avec l’utilisation de matières premières dans le secteur alimentaire et des fourrages. Á ce propos, il a été observé, que, parmi les matières premières agricoles, la production de biocarburants a un impact surtout sur la demande de blé, de maïs, de sucre et d’huiles de graines. En effet, de 2008 à 2010 la production de bioéthanol a été réalisée principalement avec des céréales brutes et du sucre de canne, tandis que celle de biodiesel avec des huiles végétales (le 90% de la production du biodiesel est obtenue à travers le traitement a utilisé des huiles végétales, tout comme l’éthanol qui est produit avec 55% de céréales brutes et 35% de sucre de canne)29. Certaines données sont utiles pour saisir la portée du phénomène. La grande utilisation du maïs pour la production d’éthanol aux États-Unis a d’importantes conséquences à l’échelle globale, représentant un tiers de la production mondiale et deux tiers des volumes exportés.
Les biocarburants de première et de deuxième génération
La production de biocarburants entre en compétition avec la production de nourriture
La grande utilisation du maïs aux États-Unis
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
2.5 Production des biocarburants
55
30 25 Pourcentage de croissance
Les biocarburants auront un poids de plus en plus important dans la production mondiale de céréales, de sucre de canne et d’huiles végétales
la production de biocarburants pourrait contribuer sérieusement à la croissance des prix des produits agricoles
Figure 2.18. Effets d’une croissance de la demande des produits agricoles pour le biocarburant de 30% et d’une baisse de la même demande de 15% sur les prix des produits agricoles dans la période 2008-2009-2010
20 15
57
10
5 0 Blé
Riz
Maïs
Huiles végétales
0 -2 Pourcentage de réduction
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
56
Toutefois, une nouvelle croissance des volumes de biocarburants pourrait contribuer sérieusement à l’augmentation des prix des matières premières alimentaires. La relation entre la production de biocarburants et les prix des produits agricoles a été estimée par la FAO, qui a calculé les effets sur les prix des produits agricoles suite à une utilisation massive ou minime de biocarburant, élaborant deux scénarios alternatifs : - augmentation de la demande de froment, de sucre et d’huiles végétales pour la production de biocarburant de 30% ; - réduction de la demande de froment, de sucre et d’huiles végétales pour la production de biocarburant de 15%. Les résultats de cette estimation sont représentés par la figure 2.18., où on peut observer que les effets les plus importants en termes de variation des prix sont liés au sucre et au maïs.
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
En Europe sont très utilisés les huiles végétales
En 2010, les États-Unis ont employé 38,4% de la production totale du maïs pour réaliser de l’éthanol. De 2004 à 2007, l’utilisation du maïs pour la consommation alimentaire a augmenté à un taux annuel de 1,5%, tandis que le quota réservé à l’éthanol, dans la même période, a enregistré une croissance de 36%. Le même discours vaut pour la production du biodiesel pour laquelle, en Europe par exemple, 8,6 millions de tonnes d’huiles végétales (environ 3% de la production mondiale) sont utilisées. L’usage industriel des huiles végétales a augmenté de 15% sur base annuelle dans la période 2004-2008 : une tendance très supérieure par rapport au taux de croissance de la production pour usage alimentaire du même bien, qui s’élève à 4,2% dans la même période. Au-delà des chiffres relatifs au quota croissant de certaines productions agricoles absorbées par le secteur des biocarburants, le problème des productions alternatives d’énergie ne peut pas se limiter à la seule quantité de récolte utilisée dans la production du combustible, mais il faut l’élargir aussi à la quantité de terres qui peuvent être destinées ou converties uniquement à la production pour l’industrie du biocarburant, dans une logique de commerce extérieur pour l’utilisation du sol. On a assisté aux États-Unis de 2001 à 2007 à une expansion de 23% des zones destinées à la culture du maïs, en réponse à l’augmentation de la demande pour la production de l’éthanol. Par conséquent, il a été enregistré une diminution de 16% des zones destinées à la culture de graines de soja, dont la production s’est réduite, ce qui a provoqué une augmentation de 75% des prix relatifs. Alors qu’aux États-Unis, les cultures de maïs à buts industriels augmentent au détriment des cultures de graines de soja, en Europe et dans d’autres Pays exportateurs, l’huile de graines est de plus en plus remplacée par un substitut du blé. L’expansion de la production de biodiesel en Europe est devenue ainsi une des causes premières du ralentissement de la croissance des cultures de blé et de froment. En outre, les prix de l’huile de colza brut sont passés de 660 dollars/tonne métrique en 2004 à plus de 1000 dollars/tonne métrique en 2010. L’augmentation des prix des huiles de graines conduit actuellement à des variations substantielles dans la composition agronomique des cultures, en faveur du colza, du tournesol et, surtout dans le sud-est asiatique, de l’huile de palmier. à partir de 2010, les plus grands exportateurs mondiaux de grain ont augmenté les zones destinées à la culture de l’huile de graines de 36% (8,4 millions d’hectares), alors que celle réservées à la culture du blé ont diminué de 1%. Les biocarburants auront un poids de plus en plus important dans la production mondiale de céréales, de sucre de canne et d’huiles végétales. En 2020, 12% de la production globale de céréales brutes (contre 11% enregistrés de 2008 à 2010) et 33% de la production de sucre (contre 21% actuellement) seront utilisées pour produire de l’éthanol. 16% de la production globale d’huiles végétales seront destinées à la production de biodiesel (contre 11% actuellement). Toujours dans la période 2010-2020, 21% de la production globale des céréales brutes, 29% de celle des huiles végétales et enfin 68% de celle des sucres30 seront utilisées pour produire le biocarburant. Néanmoins, il n’est pas sûr que ces estimations soient confirmées car il n’existe aucune certitude sur l’évolution future des productions de biocarburants, la durabilité économique dépend fondamentalement des aides des gouvernements et des politiques de soutien, et également des politiques adoptées par les Pays sur les thèmes de la durabilité environnementale et de l’énergie (politiques d’approvisionnement, accords internationaux, financement de la recherche, engagement écologique, etc), la dynamique du prix du pétrole (dont le prix est encore plus grand lorsque les stimulations du marché augmentent vers le développement de formes alternatives d’énergie) et la technologie qui sera disponible en relation à la production et à l’utilisation des biocarburants (économicité des productions, impact environnemental des établissements, sécurité, efficience, etc).
-4 -6 -8
-10 -12 2008 Source : The State of Food and Agriculture in 2008, FAO, 2008.
2009
2010
Sucre
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
58
Le lien entre la production de biocarburants et le prix des matières premières avec lesquelles ils sont produits semble être confirmé aussi par les données présentées dans les figures 2.19. et 2.21., qui montrent la relation entre la production d’éthanol et de biodiesel et le prix des matières premières respectives (maïs et huile de colza) aux États-Unis et en Europe. La figure 2.19. montre le degré de corrélation (indice de Pearson égal à 0,9) entre la tendance de la production d’éthanol et l’évolution des prix du maïs. La forte croissance de la production d’éthanol entraîne l’augmentation du prix du maïs qui constitue la matière première pour la réalisation du biocarburant. Etant donné que les États-Unis sont les plus grands producteurs de maïs, un changement de destination d’usage si massif (+ 35% d’augmentation annuelle de production d’éthanol) a provoqué une flambée du niveau des prix, contribuant ainsi à la crise des prix de 2007-2008. En outre, l’effet exercé sur le maïs se répercute sur tout le secteur des céréales, car elles sont liées entre elles par un bon niveau de substituabilité dans la production d’aliments pour animaux. De l’analyse de la production du biodiesel et du prix du colza, il ressort aussi dans ce cas une évidente croissance du prix de l’huile de colza entre 2000 et 2007 (275%), qui a coïncidé avec l’introduction et le développement rapide du biodiesel. La figure 2.20. met en évidence la croissance des prix réels du blé et des graines de soja aussi, due à la substitution dans les cultures. En Europe, deux données importantes ont été enregistrées : la production de l’huile de colza a augmenté de manière significative avec la production du biodiesel (+78% de 2000 à 2007, avec un taux de croissance annuelle de 7%) et le quota de la production de l’huile de colza destiné à la production du biodiesel a doublé (en 2010, 84% de la production d’huile de colza ont été destinés à cette production, contre 41% en 2005).
Figure 2.20. Évolution du prix du maïs, des graines de soja et du blé (2000–2010)
Figure 2.19. Corrélation entre la production d’éthanol (millions de gallons) et prix du maïs (dollars/tonne métrique) aux États-Unis (2000-2011)
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAPRI, 2010.
$ 250
14.000
$ 600
$ 500
$ 400
$ 300
$ 200
$ 100
$0 2000
2001
2002
2003
2004
2005
Prix du maïs dollar/tonne métrique
2006
2007
2008
2009
2010
Prix des graines de soja dollar/tonne métrique
Prix du blé dollar/tonne métrique
59
Figure 2.21. Corrélation entre la production du biodiesel en Europe (millions de gallons) et prix de l’huile de colza dans le monde (dollar/tonne métrique) 3500
$ 1600
3000
$ 1400
12.000 $ 200 10.000
$ 1200
2500 $ 150
8000
$ 1000
2000
$ 800
6000
$ 100
1500 $ 600
4000
1000 $ 400
$ 50 2000
500
0
$0 2000
2001
2002
2003
2004
2005
Production d’éthanol
2006
2007
2008
2009
2010
Prix du maïs dollars/tonne métrique
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAPRI, 2010.
2011
$ 200
0
$0 2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
Prix de l’huile de colza dans le monde (dollar/tonne métrique) Production du biodiesel Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAPRI, 2010.
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le lien entre la production de biocarburants et le prix des matières premières avec lesquelles ils sont produits
2008
2009
2010
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
La jatropha, une nouvelle plante énergétique
La racine de cassave a été pendant longtemps un aliment important et à la base de certains produits alimentaires de l’homme et des fourrages pour les animaux. En 2010, 98% du volume de cassave exporté par la Thaïlande (le plus grand exportateur mondial) ont été destinés à une seule nation, la Chine, et dans le seul but de produire du biocarburant. En effet, en 2007 le gouvernement chinois a interdit l’utilisation de céréales pour la production de biocarburant, inquiet pour les répercussions possibles sur la croissance des prix et les éventuelles famines sur son territoire. Les chercheurs chinois ont développé ainsi un processus pour obtenir du carburant de la cassave, une racine qui permet d’assurer un bon retour énergétique. En plus d’amplifier sa culture interne, la Chine a commencé à en acheter de grandes quantités du Cambodge, du Laos et en particulier de la Thaïlande. À partir de 2008, la quantité de cassave exportée de la Thaïlande a quadruplé et le prix a doublé à cause de la demande chinoise.
Le jatropha est une plante originaire d’Amérique du Sud qui, dès l’antiquité, était utilisée comme médicament antiseptique. Au XVI siècle, lorsqu’ils arrivèrent sur les côtes de l’Amérique du Sud, les commerçants portugais découvrirent le jatropha et commencèrent à le transporter le long des routes commerciales en Asie et en Afrique, en l’utilisant dans les champs pour défendre leurs récoltes des animaux sauvages grâce à ses propriétés toxiques. Actuellement, le jatropha pousse dans les forêts pluviales du Brésil aux Îles Fidji. L’huile végétale de jatropha, obtenue en écrasant les graines du plant, fut largement utilisée au XIX siècle comme huile pour l’éclairage. Grâce à cette caractéristique, elle se diffusa amplement sur les marchés de l’époque, pour être ensuite abandonnée au profit de la paraffine. Les graines de jatropha contiennent entre 30 et 38% d’huile non comestible mais qui peut être utilisée directement comme simple combustible, à savoir comme carburant (à travers une simple opération de filtration) pour les moteurs diesel conçus pour cette utilisation ou transformée en biodiesel et utilisée par tous les moteurs diesel sans aucune modification particulière. Le jatropha a été souvent identifié comme une source de développement durable pour les populations des Pays les plus pauvres : il permet, en effet, de produire un
© Corbis
En 2009, le quota de la cassave employé pour la production de l’éthanol s’est élevé ainsi à 52 % par rapport à 10% en 2008. Etant donné que la cassave n’est pas une composante essentielle du régime asiatique (à l’inverse de certains Pays africains), la Chine a pensé que la production de carburant à partir de cette racine n’aurait pas influé sur l’évolution des prix des biens alimentaires, sur son territoire du moins. Cependant, les problèmes liés à cette politique apparaissent rapidement. La cassave étant normalement utilisée comme fourrage dans les élevages, la nouvelle demande pour la production de biocarburants est en train de causer une augmentation du prix final de la viande et des produits laitiers. Par ailleurs, stimulés par l’augmentation du prix de cette matière première, les Pays du sud-est asiatique remplacent les cultures d’autres produits alimentaires tels que le riz et les céréales par la cassave pour soutenir la croissance de la demande chinoise.
combustible de grande qualité à faible viscosité, deuxième seulement derrière l’huile de palmier (dont la culture, par contre, a besoin d’une grande quantité d’eau). Cette plante ne rentre pas en compétition avec la production de denrées alimentaires parce qu’elle n’est pas comestible, une faible quantité d’eau lui suffit, ne soustrayant donc pas d’eau potable à l’usage humain, et elle pousse dans des zones arides où, de toutes façons, peu d’autres cultures seraient possibles. En outre, étant donné que le jatropha peut être cultivé dans des zones arides, il pourrait réduire la désertification et l’érosion des sols. La culture à l’échelle industrielle est actuellement encore à ses débuts, en couvrant une superficie totale de 90.000 hectares. Plus de 85% des plantations sont en Asie, en particulier dans le Myanmar, en Inde, en Chine et en Indonésie. L’Afrique possède 12% de la production divisée entre Madagascar et la Zambie, le quota restant est produit en Amérique du Sud, en particulier au Brésil. En 2015, la culture mondiale de jatropha atteindra probablement le quota de 12,8 millions/hectare. La FAO estime que l’Indonésie sera le plus grand producteur en Asie, avec 5,2 millions/hectare, et que le Ghana et Madagascar atteindront 1,1 million/hectare et le Brésil 1,3 million/hectare31.
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables BCFN impliquées Index 2011
60
La Chine e le cas de la cassave
61
62
Le changement climatique menace la durabilité de la production agricole future
en 30 ans, les prix des céréales ont augmenté de 18,9% à cause du seul effet du changement climatique
L
e phénomène du changement climatique est reconnu comme une grave menace pour la durabilité de la production agricole future au niveau mondial. Il comporte un double effet : d’une part, la hausse des températures sur le moyen-long terme provoquera certainement une réduction de la productivité agricole et, donc, elle contribuera à l’augmentation des prix des matières premières alimentaires ; de l’autre, l’intensification des évènements climatiques défavorables – qui provoquent des pertes imprévisibles des récoltes – influera sur l’augmentation de la volatilité des prix sur le court terme. Une étude récente32 a quantifié l’impact du réchauffement climatique sur la production et sur le prix des céréales de ces trente dernières années. Sans tenir compte d’autres facteurs comme la compétition pour l’utilisation du sol et la croissance de la demande, la hausse des températures et les variations des précipitations ont déterminé une croissance des prix des céréales de 18,9% de 1980 à aujourd’hui. En d’autres termes, sans phénomène de changement climatique, les prix des matières premières agricoles seraient plus bas de 20%. De 1980 à aujourd’hui, les changements climatiques ont en effet réduit de 3% la production mondiale des céréales : dans le cas du blé et du maïs, l’impact négatif a été respectivement de 5,5% et de 3,8%, tandis que pour les autres cultures (comme le soja et le riz), la baisse du rendement dans certaines zones a été compensé par une augmentation dans d’autres zones. La Russie (dont la production de blé s’est réduite de 15%), la Turquie et le Mexique ont été parmi les pays les plus touchés. D’autres recherches ont évalué l’impact que le changement climatique pourrait avoir sur la production mondiale future des céréales. Surtout dans les zones les plus pauvres du monde, où la capacité d’adaptation au changement climatique est la plus faible, un important fléchissement sur la production des céréales a été enregistré, alors que dans d’autres zones – comme dans les Figure 2.22. Impact estimé du changement climatique sur la production mondiale des céréales (estimations 1990-2080, variation en pourcentage)
RÉGION
VARIATION 1990-2080 %
Monde Pays développés Pays en voie de développement Sud-est asiatique Asie du Sud Afrique Subsaharienne Amérique Latine
de -0,6 à -0,9 de 2,7 à 9 de -3,3 à -7,2 de -2,5 à -7,8 de -18,2 à -22,1 de -3,9 à -7,5 de 5,2 à 12,5
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données IFPRI (International Food Policy Research Insitute) et deTubiello F.N., G. Fischer, 2007.
Pays développés et les nations de l’Amérique Latine – les données suggèrent une croissance de la production des céréales en raison aussi du phénomène de la fertilisation de carbone. Des conditions météorologiques défavorables (sécheresse, inondations, évènements extrêmes) et d’autres catastrophes naturelles imprévues ont eu un poids remarquable sur les récoltes des céréales dans la période 2005-2010. Les conséquences sur la production se manifestent à travers une augmentation du niveau d’incertitude présent sur les marchés et par une hausse soudaine des cotations et de la volatilité du marché. Si ces évènements naturels ont toujours représenté un facteur de risque évident pour la production agroalimentaire, une aggravation est attendue aussi bien en termes de fréquence que de sévérité à cause du changement climatique en cours. En particulier, depuis maintenant deux ans, les mauvaises récoltes engendrées par les évènements climatiques défavorables – telle que la sécheresse de l’été 2010 d’abord en Russie, puis en Argentine, ou les fortes pluies au Canada et en Australie début 2011 – ont contribué en partie au pic actuel du niveau des prix alimentaires. Par exemple, le phénomène de la “Niña”33 a fait rage durant les premiers mois de 2011 en causant des hivers plus froids dans l’hémisphère Nord, une sécheresse dans le sud des États-Unis et une augmentation des pluies en Indonésie, en Malaisie et en Australie. L’impact pourrait se traduire par une réduction de la production des plantations dans les principaux Pays producteurs de matières premières alimentaires, comme dans le cas des graines de soja en Argentine et au Brésil et du café en Colombie. Comme le montre la figure 2.23., dans la dernière année, l’importante croissance des prix des céréales (approximations de l’Indice FAO des prix des céréales) a été fondamentalement accompagnée par l’apparition de conditions météorologiques défavorables, qui ont déterminé un impact négatif sur la production agricole. Une série d’évènements concentrés en 12 mois seulement ont drastiquement réduit les prévisions sur l’augmentation de la production globale et sur le niveau des stocks en 2010, en contribuant ainsi à une hausse du niveau des prix. Etant donné la persistance du changement climatique, les producteurs, les consommateurs et les décideurs politiques devront faire des choix d’adaptation pour soutenir la productivité
le changement climatique sera responsable d’une baisse de la production globale des céréales
les événements climatiques défavorables plus fréquents et plus intenses déclenchent la croissance de prix
63
Figure 2.23. Évolution des prix des céréales (Indice FAO des prix des céréales, 100 = octobre 2005) et principaux évènements climatiques (juin 2010-avril 2011) Baisse des estimations de production de graines de soja indonésiennes à cause des pluies excessives
250
200
De fortes pluies endommagent les récoltes de blé en Australie
Une sécheresse accentuée et des incendies importants ont réduit les prévisions de production de blé en Russie
Fortes pluies et inondations Mauvaises récoltes détruisent les dans les régions agricoles chinoises ; en plantations de maïs dans la Corn Belt Une bonne partie de Inde, le froid endomla zone du blé rouge mage les cultures des (ceinture de maïs) des États-Unis (Hard Red Winter) aux céréales États-Unis souffre de précipitations rares
150 Les cultures de blé rouge sont atteintes par la sécheresse aux États-Unis
100 juin 2010
juil 2010
août 2010
sept 2010
oct 2010
nov 2010
déc 2010
jan 2011
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données USDA et FAO, 2011.
fév 2011
mar 2011
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
2.6 ChAngement CLIMATIque
avr 2011
mai 2011
juin 2011
Les politiques ex post ont pour objectif la réduction des pertes économiques et de bien-être
64
les actions gouvernementales seront décisives
Mustafiz Mamun/National Geographic My Shot/National Geographic Stock
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Les politiques ex ante visent à la différentiation des cultures
agricole. Les recherches dans ce domaine ont formulé des hypothèses sur la constitution d’un système de mesures et des politiques adéquates au problème du changement climatique. Les politiques à adopter peuvent être de deux types34: les mesures ex ante, c’est-à-dire des actions qui visent à anticiper et à mitiger l’effet des évènements climatiques défavorables, et les mesures ex post. Les politiques ex ante se concentrent principalement sur la différenciation des cultures, essayant de favoriser les changements climatiques en cours dans une période de temps déterminée. Une des principales mesures ex ante, de difficile réalisation en raison des coûts élevés qu’elle comporte et de la conséquente perte de productivité, est la flexibilité des cultures. En outre, de nombreux Pays (dont la Russie) ont un écart de productivité encore très élevé par rapport à l’Europe, aux États-Unis et au Brésil, qui pourrait être comblé à travers le développement de bonnes pratiques de culture. Par contre, les politiques ex post, ayant pour objectif la réduction des pertes économiques et de bien-être causées par les évènements climatiques défavorables, sont plus faciles à réaliser. Certaines de ces stratégies impliquent une réduction de la liquidité des réserves de dépôt, le recours aux crédits bancaires et la vente d’assets fondamentaux. Malheureusement, pas toutes ces stratégies peuvent être adoptées par les agriculteurs et, généralement, elles n’arrivent pas à garantir la sécurité alimentaire et l’accès à la nourriture. Dans les Pays avancés, d’un côté, les agriculteurs peuvent adopter des systèmes de sécurité sociale ou faire recours aux marchés financiers pour s’assurer contre les risques de la production, ou recevoir de l’assistance financière par le gouvernement qui garantit un niveau suffisant de l’offre dans les marchés internes. De l’autre côté, les consommateurs sont moins sensibles aux variations des prix déterminées par les réductions de productivité causées, à leur tour, par les variations climatiques, même s’ils utilisent une faible part de leur revenu à l’achat de biens alimentaires. Au contraire, dans les Pays pauvres, les effets de soudaines réductions de productivité agricole sont plus dramatiques à cause de l’absence de mesures préventives ou de sécurité. En outre, du point de vue des consommateurs, de légères augmentations du niveau des prix peuvent aussi engendrer de graves problèmes sociaux. De ce fait, en l’absence d’interventions de l’État ou d’un système de sécurité sociale, les politiques ex ante peuvent prévenir le risque de pertes importantes dans les périodes de mauvaises récoltes, mais elles ne constituent pas une base pour créer un revenu dans les périodes favorables. En effet, pour se défendre de la variabilité météorologique, les agriculteurs ont dû cultiver des produits moins risqués (moins sensibles aux changements climatiques), mais aussi moins rentables (comme l’avoine et l’orge généralement utilisées comme fourrage pour les animaux et qui sont très résistantes aux changements climatiques). En principe, les politiques ex post (comme, par exemple, la liquidation d’actifs essentiels ou de terres) engendrent des effets bénéfiques sur la consommation dans le court terme, mais ils finissent par réduire la capacité productive dans la longue période. Le changement climatique engendre donc le besoin de réponses d’adaptation de la part des agriculteurs auxquels, à chaque variation de facteurs fondamentaux (comme le niveau des pluies et les écarts des températures locales), il est demandé d’intervenir pour assurer un niveau suffisant de l’offre et pour maintenir, ou modifier progressivement, le niveau courant des prix. En même temps, des interventions de la part des gouvernements nationaux sont nécessaires, afin de favoriser, d’une part, l’adoption de politiques d’adaptation aux changements climatiques pour contenir le phénomène35 et, de l’autre, la diffusion de bonnes pratiques de culture qui mitigent les effets négatifs des variations climatiques. Une recherche de l’IFPRI36 estime que sans interventions des gouvernements qui visent à soutenir les politiques d’apaisement et de la flexibilité dans les cultures, le prix du riz augmentera de 31,2% d’ici 2050 et celui du maïs même de 100,7%.
le coût de l’energie a une incidence sur les coûts des carburants
250
$ 140 $ 120
200
$ 100 150
$ 80 $ 60
100
$ 40 50 $ 20 0 4/2011
1/2011
7/2010
10/2010
4/2010
1/2010
7/2009 10/2009
1/2009 4/2009
7/2008
Indice FAO des prix des produits alimentaires
10/2008
4/2008
1/2008
10/2007
7/2007
4/2007
1/2007
7/2006
10/2006
4/2006
1/2006
7/2005
10/2005
4/2005
1/2005
7/2004
10/2004
$0 4/2004
66
la hausse du prix du pétrole a une incidence sur des nombreuses activités du cycle productif
Figure 2.24. Corrélation entre le prix du pétrole et les prix alimentaires (novembre 2000août 2011)
1/2004
L
a sécurité dans l’approvisionnement des matières premières pour la production de l’énergie aujourd’hui est au centre de l’agenda des décideurs politiques mondiaux. En particulier, l’attention se concentre sur le niveau des stocks du pétrole, qui a un marché dominé par de grands gisements, dont 500 réalisent 60% de la production mondiale37. Le débat sur la réelle disponibilité de pétrole dans les prochaines décennies envisage des scénarios différents et contradictoires. En effet, si d’un côté des recherches récentes supposent une réduction progressive de la capacité globale des gisements de pétrole : en 2008, 580 sur 651 parmi les plus grands producteurs de pétrole ont déclaré qu’ils avaient dépassé le pic de productivité et maintenant ils sont en train d’extraire en moyenne 6% de pétrole en moins par an. Cette tendance à la baisse des extractions de pétrole a été confirmée par une recherche indépendante réalisée par l’université de Uppsala en Suède38 qui a estimé une réduction dans la production de pétrole de 84 millions de barils par jour en 2007 à 76 millions en 2030. D’autre part, les enquêtes qui mitigent le risque d’épuisement sur le court terme des stocks des hydrocarbures fossiles et l’apparition de nouvelles crises pétrolières, ne manquaient pas. Les scénarios énergétiques esquissés par l’Agence Internationale de l’Énergie (IEA) pour 2035 estiment que la production globale n’atteindra pas son pic d’ici cette année-là, alors que – si l’on poursuit un parcours énergétique qui vise à une limitation des gaz à effet de serre dans l’atmosphère – une demande de pétrole plus faible fera en sorte que le pic de production sera atteint un peu avant 2020 (avec 86 millions de barils par jour) pour ensuite céder le pas à une réduction importante39. La récente crise économique globale – qui a fait monter le prix du pétrole à 132 dollars le baril en juillet 2008 – a obligé les principaux exportateurs à revoir leurs plans énergétiques selon des logiques de conservation, d’épargne et un usage plus accentué de sources alternatives, ce qui, combiné avec les doutes sur la force de la reprise économique, a empêché aux prix d’atteindre à nouveau le maximum de 2008. Même si la récession économique a, donc, contribué au fléchissement des prix du pétrole, une forte stimulation à la hausse dérive de la croissante demande des Pays en voie de développement, en augmentant ainsi l’écart entre la demande et l’offre. En tous cas, puisque la demande de pétrole augmente à des rythmes plus élevés par rapport à la production, aussi bien l’Agence Internationale de l’Énergie que l’Energy information Administration (EIA) américaine estiment que le prix du pétrole tournera autour de 190 dollars le baril au niveau nominal (par rapport à la valeur actuelle comprise entre 115 et 120 dollars). Le coût de l’énergie est un des facteurs qui influencent surtout les coûts opérationnels dans le secteur agricole. En particulier, l’augmentation du prix du pétrole a des impacts sur toute une série d’activités liées au cycle productif tout entier de la filière agricole, de la culture des terres à la logistique et à la distribution des produits finis.
Les effets se transmettent – de manière directe et indirecte – sur le coût : - du carburant pour faire fonctionner les tracteurs et les machines agricoles pour les opérations d’ensemencement, de fertilisation, de désherbage, d’arrosage, de broyage et de récolte ; - des fertilisants, dont l’augmentation de prix influe remarquablement sur les coûts de production des cultures (et en particulier des céréales, qui ont besoin d’un apport importants de fertilisants) ; - du carburant pour le chauffage des étables, des locaux de séchage des fourrages destinés à l’alimentation des animaux et des serres ; - des services liés au secteur agricole (croissance du coût de la facture de l’énergie électrique) ; - du carburant des moyens de transport des graines (camions, trains, avions, etc) pour la distribution de produits semi-finis et finis. La figure 2.24. confirme que le degré de corrélation entre l’indice des prix alimentaires de la FAO et le prix du pétrole sur base mensuelle est élevé (Indice de corrélation = 0,84).
Prix du pétrole (dollar le tonneau)
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAO et IMF, 2011.
Généralement, il est possible d’observer que les deux pics enregistrés entre 1960 et 2010 par l’Indice FAO des prix des produits alimentaires ajusté à l’inflation (1971-1973 et 2001-2009) coïncident avec la première crise du pétrole du 1973 et avec le début de la crise financière globale commencée en 2007 : dans ces moments historiques, la croissance des prix peut être expliquée, donc, aussi par l’augmentation du prix du pétrole et par la dépréciation du dollar40. Dans ce document, nous avons cherché à mettre en évidence l’importance du lien entre les coûts des fertilisants et l’évolution du prix du pétrole, avec les conséquentes rechutes sur le prix des matières premières agricoles. Au niveau global, la consommation de fertilisants (azote, phosphore et potassium) entre 2006 et 2010 à un taux annuel moyen composé de 2%, à 175,3 millions de tonnes la dernière année. La moitié environ de la demande mondiale des fertilisants est destinée à la culture du blé (15% sur la demande totale de 2010), du maïs (14,6%), du riz (14%) et du soja (5,8%). En particulier, la consommation de fertilisants pour les cultures de soja et de maïs ont enregistré une tendance respectivement égale à 3% et à 2,3% durant la période 2006-2010. Parmi les plus grands utilisateurs de fertilisants, figurent les économies émergentes comme celles de la Chine (28,8 millions
le prix du pétrole a une incidence directe sur le coût des engrais
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
2.7 Coût de l’énergie e prix du pétrole
67
Figure 2.25. Évolution de l’Indice FAO des prix des produits alimentaires, 1961-2011 (2002-2004 = 100, valeurs ajustées à l’inflation)
350
Index (2002-2004 = 100)
300 250
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Figure 2.27. Principaux consommateurs globaux de fertilisants (2010, milliers de tonnes métriques)
200
28.866 150
19.800
16.988
100
11.584 8095
50
1516 2011
2009
2007
2005
2003
2001
1999
1997
1995
1993
1991
1989
1987
1985
1983
1981
1979
1977
1975
1973
1971
1969
1967
1965
1963
0 1961
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAO, 2011.
68 Figure 2.26. Évolution de la demande globale de fertilisants et de la destination d’utilisation (2006-2011, milliers de tonnes métriques) 28.000
180.000
26.000
178.000
24.000
176.000
22.000
174.000
20.000
172.000
18.000
170.000
16.000
168.000
14.000
166.000
Chine
États-Unis
Inde
Unione Européenne
Brésil
Russie
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des donnée FAPRI, 2011 (estimes pour l’année 2011).
Le fait que de nombreux fertilisants soient obtenus directement du traitement des gaz naturels ou du pétrole explique encore mieux ce lien étroit entre l’augmentation des prix des matières premières alimentaires et celle du prix du pétrole, comme le montre la figure 2.28 Même si les fertilisants comme le potassium et le phosphore ne sont pas dérivés directement des sources fossiles, pour les extraire il faut une grande quantité d’énergie, en alignant donc le niveau des prix de ces produits à celui du pétrole. Par conséquent, le coût élevé des fertilisants influence le prix final des produits agricoles (et, indirectement les biens alimentaires) : la figure 2.29. montre la corrélation entre le prix annuel moyen du pétrole (Oil Price Index), l’indice des prix des céréales (FAO Cereal Price Index) et les prix des principaux fertilisants (azote et phosphore).
69
Le coût des fertilisants influence le prix final des produits agricoles
Figure 2.28. Évolution du prix du pétrole et des principales fertilisants (1991-2011, dollars/tonne) $ 900
$ 250
$ 800
Riz
Soja
Source : adaptation de European House-Ambrosetti à partir des données FAPRI, 2011 (estimations pour l’année 2011).
Azote (dollar le tonneau)
Phosphore (dollar le tonneau)
Potassium (dollar le tonneau)
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données USDA et FAO, 2011.
2011
2010
2009
2008
2007
2006
2005
2004
Maïs
2003
Blé
2011
2002
Demande globale
2010
2001
2009
2000
2008
$0 1999
2007
$0 1998
2006
$ 50
$ 100 1997
160.000
$ 200
1996
8000
$ 100
$ 300
1995
162.000
$ 400
1994
10.000
$ 150
$ 500
1993
164.000
$ 600
1992
12.000
$ 200
$ 700
1991
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
400
de tonnes, qui équivaut à 16,5% de la demande globale de 2010), de l’Inde (9,7%) et du Brésil (4,6%), à côté des États-Unis (11,3%) et de l’Union Européenne (6,6%). En termes d’utilisation, entre 2006 et 2010, la demande des fertilisants au Brésil a augmenté dans l’ensemble d’un taux annuel moyen de 5,7% (10,6% pour le blé et 7,4% pour le soja) ; en comparaison, le taux annuel de croissance aux États-Unis a été de 3,2% (6,5% pour le riz et 3,7% pour le maïs). Aux États-Unis, 50% des fertilisants sont destinés aux cultures du maïs, alors que dans les Pays européens, c’est la destination vers les cultures de blé (39% du total) qui prédomine ; parmi les BRIC [Brésil, Russie, Inde, Chine et Etats-Unis] le riz absorbe un tiers de la demande de fertilisants en Inde (39%) et en Chine (32%), de même que le Brésil destine 43% des fertilisants aux plantations de soja.
Oil Price Index
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
70
Figure 2.29. Impact du prix du pétrole et des principaux additifs fertilisants sur le prix des céréales d’après les données FAO (1991-2011) $ 900
$ 250
$ 800 $ 200
$ 700 $ 600
$ 150
$ 500 $ 400
$ 100
$ 300 $ 200
$ 50
$ 100
Azote (dollar le tonneau)
Cereal Price Index
Phosphore (dollar le tonneau)
2011
2010
2009
2008
2007
2006
2005
2004
2003
2002
2001
2000
1999
1998
1997
1996
1995
1994
1993
1992
$0 1991
$0
Oil Price Index
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données USDA 2011, Oil Price Index 2011 et FAO, 2011.
2.8 Politiques commerciales
L
es barrières commerciales et non commerciales (telles que les restrictions qualitatives de nature fictive, ou des contrôles excessivement longs), les politiques agricoles et les subventions peuvent représenter un facteur de distorsion des dynamiques entre la demande et l’offre des matières premières alimentaires. Sur le front de l’offre, par exemple, ces dernières années les Pays producteurs de céréales (la Chine, l’Union soviétique, les États-Unis et l’Inde) se sont souvent orientés vers la réduction de la quantité échangée sur les marchés internationaux. Ce choix a engendré une forte réduction de l’offre alimentaire mondiale, qui a contribué à augmenter aussi bien la volatilité que le niveau des prix sur le marché. En outre, ce genre d’interventions, politiques, est souvent imprévisible et comporte, par conséquent, une augmentation du niveau d’incertitude sur l’évolution des marchés. D’autres politiques aussi créent des conditions de restriction des flux commerciaux internationaux. Si nous pensons, par exemple, à toutes ces activités qui visent à protéger leur marché interne (droits de douane, limitations des importations et/ou des exportations) ou, au contraire, à le soutenir sur le scénario global (subventions aux exportations, accords). L’imposition de droits/subventions sur les importations (taxes/subventions sur les biens importés) ou sur les exportations (paiements/prélèvements fiscaux aux producteurs nationaux qui vendent un bien à l’étranger) généralement ne vise pas à influencer les raisons d’échange42 du Pays. Les motivations de telles interventions du gouvernement, en effet, sont souvent liées à des inquiétudes quant à la distribution du revenu, à la protection des secteurs considérés comme particulièrement importants et à l’équilibre de la balance des paiements43. Ce qui caractérise les droits et les subventions c’est qu’ils établissent une différence entre les prix avec lesquels ils sont échangés sur le marché international et les prix à l’intérieur du pays qui les impose. Il est donc évident que ces politiques, mises en oeuvre surtout pour répondre aux prix élevés des denrées alimentaires, visent à générer des bénéfices directs sur le marché interne, mais en même temps, étant donné la forte interrelation entre les marchés, elles ont la capacité d’engendrer des effets et des déséquilibres dans le court terme sur les cotations mondiales. En outre, ces politiques créent souvent de fortes fluctuations imprévisibles dans le revenu des producteurs agricoles en provoquant, avec une réaction en chaîne, encore plus de déséquilibres dans l’offre. Les prix bas comportent des bénéfices à la demande (même si souvent ils n’arrivent pas aux consommateurs et alimentent donc des opportunités spéculatives), mais dépriment la production agricole. Afin de comprendre la relation entre l’adoption de certaines politiques commerciales et l’évolution des prix, la figure 2.30. montre l’évolution de l’indice des prix des céréales entre octobre 2007 et avril 2011 et certaines mesures politiques mises en oeuvre par les principaux Pays importateurs et exportateurs de céréales.
certaines politiques commerciales peuvent avoir des effets de distorsion sur le niveau des prix des denrées alimentaires
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
la tendance du prix du pétrole influence aussi l’advantage de la productione de biocarburants
Le degré de corrélation entre l’indice des prix des céréales et les prix réels de l’azote et du phosphore semble très élevé (indice de corrélation = 0,91), puisque de par sa nature, la culture des céréales demande une ample utilisation de ces éléments. Un commentaire similaire peut être fait aussi dans le cas de l’indice des prix du pétrole : la corrélation du prix de l’azote et du phosphore avec le prix du pétrole équivaut respectivement à 0,93 et à 0,88. La production de biocarburants aussi (comme nous l’avons vu dans le Paragraphe 2.5) est étroitement liée à l’évolution du prix du pétrole. Les biomasses représentent, en effet, une des alternatives possibles pour atténuer la dépendance des sources fossiles pour la production d’énergie, puisqu’elles peuvent être portées à l’état liquide et être utilisées comme un carburant de substitution au pétrole. La production de biocarburants déclenche une réaction en chaine liée à l’évolution du prix du pétrole : quand le prix du pétrole augmente, il devient plus avantageux de faire des investissements dans la production de biocarburants. Á son tour, la croissance de la production de biocarburants stimule la demande de cultures destinées à ce but (maïs, canne à sucre, colza, soja, etc), en amplifiant ainsi le phénomène du déplacement de cultures destinées à l’alimentation des hommes et des animaux à celles de produits agricoles ayant pour objectif la production de biocarburants et, en même temps, du changement dans la combinaison des cultures. Si nous tenons compte,par exemple, de la production de bioéthanol, l’augmentation de la demande de ce carburant fait accroître la demande de maïs et détermine une augmentation – de manière directe – du prix de l’éthanol et du maïs même. Toutefois les effets se transmettent de manière indirecte aussi sur le reste de la filière agroalimentaire, car la variation du prix du maïs provoque des ajustements dans les autres marchés/filières agricoles (comme, par exemple, celle du blé, avec lequel le maïs est en concurrence pour l’utilisation des terres, et des produits des élevages), en créant enfin une variation systémique des prix des produits agricoles et alimentaires. Enfin, un commentaire semble nécessaire sur le lien entre l’évolution du prix du pétrole, la richesse des principaux Pays producteurs (tout d’abord ceux qui appartiennent à l’OPEC41) et les impacts sur la demande globale des céréales. Lorsque le prix du pétrole augmente, les nations où se concentrent les stocks de pétrole sont, en effet, capables d’influencer de manière significative la demande en achetant de grandes quantités de produits alimentaires aussi bien pour augmenter leurs stocks que pour des logiques spéculatives, ou bien, comme il est arrivé dans le cas de « l’Arab Spring » (voir le Paragraphe 2.11), pour faire face aux désordres internes déclenchés par l’augmentation des prix des biens alimentaires.
71
les politiques locales peuvent provoquer des Déséquilibres sur les marchés globaux
72
Restrictions qualitatives aux exportations : Argentine, Ukraine, Inde et Vietnam Réduction des impôts sur les importations : Inde, Indonésie, Serbie, Thaïlande, Union Européenne, Corée et Mongolie
200
La Russie suspend les impôts sur les importations
Achats à prix élevés : Maroc et Venezuela
avr 2011
fév 2011
diminution du rapport stock-utilisation
juin 2010
oct 2009
août 2009
juin 2009
avr 2009
déc 2008
oct 2008
août 2008
juin 2008
avr 2008
fév 2008
déc 2007
fév 2009
augmentation du rapport stock-utilisation
diminution du rapport stock utilisation
0
avr 2010
50
oct 2007
La Turquie réduit l’impôt sur l’importation privée du blé de 130% à 0
Vente exceptionnelle de céréales aux États-Unis
déc 2010
Impôts sur les exportations : Chine, Argentine, Russie, Kazakhstan, Malaisie et Indonésie
100
Nouvel impôt sur les exportations de blé en Russie
fév 2010
150
800.000 tonnes de blé à 380 dollars la tonne
oct 2010
250
août 2010
300
L’Union Européenne suspend les impôts sur les importations de blé et d’orge
déc 2009
La Chine élimine les subventions aux exportations
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des recherches USDA et Cereal Price Index (FAO).
la réponse des pays exportateurs à la hausse des prix
les politiques protectrices des pays importateurs
A l’automne 2007, suite à des prévisions à la baisse des récoltes futures et de la hausse du niveau international des prix, certains Pays exportateurs ont modifié la direction de leurs politiques commerciales de manière à décourager les exportations et à favoriser le commerce et la consommation interne. L’objectif a été d’augmenter l’offre interne et de limiter l’effet interne de l’augmentation globale des prix alimentaires. Certains exemples44 de ces politiques commerciales sont l’élimination des subventions aux exportations, comme il s’est produit en Chine, par exemple, où les remboursements sur la taxation sur la valeur ajoutée des céréales exportées et produites ont été éliminés. D’autres exemples concernent l’introduction d’impôts sur l’exportation : - la Chine après avoir éliminé les remboursements des impôts sur la valeur ajoutée a imposé une taxe sur l’exportation des céréales ; - l’Argentine a augmenté les impôts sur l’exportation du blé, du maïs, du soja, de la farine et de l’huile de soja ; - la Russie et le Kazakhstan ont augmenté les taxes sur l’exportation du blé ; - la Malaisie et l’Indonésie ont imposé des taxes sur l’exportation d’huile de palmier. D’autres mesures de ce type sont représentées par les restrictions quantitatives aux exportations (limites volumétriques aux exportations) et par les interdictions absolues (par exemple l’Ukraine, la Serbie et l’Inde ont interdit les exportations de blé). Début 2008, les Pays importateurs ont commencé à adopter des politiques de tutelle, afin de se défendre de l’augmentation globale des prix alimentaires. Leur but a été de s’assurer un niveau suffisant de stocks de façon à contenir la hausse des prix internes. Dans ce cas aussi, nous pouvons énumérer certaines politiques adoptées à cette fin. Des Pays ont réduit les droits de douane sur les importations : - Inde (farine) ; - Indonésie (graines de soja et blé) ; - Union Européenne (céréales) ; - Serbie (blé).
Par ailleurs, des Pays comme le Maroc et le Venezuela ont acheté des matières premières à des prix élevés et ont subventionné leur distribution aux consommateurs. Ces interventions de politique commerciale ont conduit à une augmentation généralisée de la demande de matières premières alimentaires, qui a influé sur le niveau des prix déjà en croissance. De façon spéculaire, les politiques de restriction des exportations de la part des Pays exportateurs, afin de réduire l’inflation sur les prix alimentaires, ont continué à réduire l’offre mondiale. De cette façon, les importateurs ont eu moins de ressources à disposition et ils ont été obligés de payer des prix toujours plus élevés pour garantir un niveau suffisant des stocks internes. Ce déséquilibre entre la demande et l’offre a été une des causes du pic des prix alimentaires qui a duré jusqu’au mois d’avril 2008. Egalement dans la deuxième période de forte croissance des prix (juin 2010-avril 2011), de nombreux Pays ont adopté des politiques agricoles et commerciales d’adaptation, parmi lesquelles : - la fixation des restrictions aux exportations : la Russie, septième pays exportateur de blé dans le monde en 2010, le 4 août a imposé un impôt sur les exportations de blé à cause des mauvaises récoltes et de l’augmentation des prix ; - la réduction ou la suspension des barrières aux importations : l’Union Européenne a réduit les impôts sur l’importation de blé et d’orge et la Turquie a éliminé la taxe sur les importations de blé dans le secteur privé ; - les subventions à la consommation de biens déterminés : l’Algérie, premier importateur de blé au monde, a acheté de grandes quantités de blé à des prix élevés, pour les revendre dans son marché interne à un prix plus bas. Le phénomène algérien, en partie dicté par les émeutes internes, causées aussi par la croissante difficulté d’accès aux denrées alimentaires, est connu comme “Aggressive Buying Practices”45. Dans des conditions d’incertitudes sur le futur de l’offre et des prix des biens alimentaires globaux, il se trouve que les pays importateurs doivent s’assurer un niveau correct de ressources alimentaires, en négociant l’achat de plus grandes quantités avec les Pays exportateurs. Quand la Russie, par exemple, a imposé des restrictions aux importations de blé, dans une période de croissance des prix, les importateurs ont commencé à en demander de plus grandes quantités. Cela suggère qu’en conditions d’équilibre, les importateurs négocient des quantités suffisantes dans un horizon de court terme ; alors que quand l’instabilité et l’incertitude croissent, l’intervalle temporel augmente. Un autre exemple des impacts négatifs des restrictions des marchés dérive des négociations en cours au Doha Round. D’après des estimations, un accord de réduction des barrières au commerce international sur les produits agroalimentaires engendrerait en faveur des Pays en voie de développement une croissance annuelle de 40 milliards de dollars environ sur les exportations. Toutefois, si d’un côté une ouverture au commerce international de tous les Pays représente un choix souhaitable et nécessaire pour alléger les effets de distorsions des subventions et des mesures protectionnistes, de l’autre il n’est pas suffisant, car il doit être accompagné de politiques parallèles de caractère économique et social qui limitent les risques d’une telle ouverture, spécialement pour les couches les plus vulnérables de la population. Pendant la crise des prix alimentaires de 2007-2008, les économies les plus touchées en termes d’accès aux denrées alimentaires ont été, en effet, les plus ouvertes, justement à cause de l’absence de mesures économiques et sociales de sécurité suffisantes. Par conséquent, une profonde réflexion sur les politiques commerciales, agricoles et sociales au niveau local, national et international devient d’une importance capitale.
après la crise de 2008, nous assistons de nouveau à des politiques commerciales de distorsion
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Figure 2.30. Politiques commerciales internationales et l’Indice FAO des prix des céréales (octobre 2007-avril 2011)
73
Pendant la crise des prix alimentaires de 2007-2008, les économies les plus touchées en termes d’accès à la nourriture ont été, en effet, les plus ouvertes
74
Le cas du riz a été au centre de l’attention des décideurs politiques asiatiques de 2007 à 2008. Une série d’évènements et de décisions de politique interne ont conduit à une augmentation exceptionnelle des cotations des céréales, causant de sérieux problèmes d’accès aux denrées alimentaires dans les Pays du sudest asiatique46. Les préoccupations des gouvernements quant aux perspectives inflationnistes
sur les prix des principales matières premières alimentaires furent à l’origine de la crise du prix du riz. En juillet 2007, le Vietnam, deuxième exportateur mondial de riz, interdit les exportations de riz à cause de la pénurie des stocks. Quelques mois plus tard, le ministre des finances indien annonce le blocus des exportations de riz non Basmati (la meilleure qualité de riz) pour favoriser
Figure 2.31. Volume des exportations et niveaux des prix du riz (1999-2011) Le riz “tendre” des Philippines dépasse les 700 dollars/ par tonne 17.000
13.000
Le gouvernement de l’Inde subventionne la consommation du riz au lieu du blé
Le Vietnam interdit de nouvelles ventes
9000
7000
3000
Le Vietnam rouvre les exportations
L’Inde interdit l’exportation de riz non-Basmati
11.000
5000
* *
L’Inde restreint les exportations de riz Basmati
15.000
* * * *
* * *
L’Inde atteint le niveau record de stocks de 30 millions de tonnes et rouvre le commerce international
*
$ 600
$ 500
*
*
$ 700
$ 400
$ 300
$ 200
$ 100
1000
-1000
$0 99/00
00/01
Inde
01/02
02/03
Pakistan
03/04
04/05
05/06
Thaïlande
06/07
07/08
Vietnam
08/09
*
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAPRI.
09/10
10/11
Prix moyen du riz
la consommation interne et la reconstitution des stocks. Les mois suivants, on enregistre de la part des Pays importateurs (dans ce cas surtout la Chine, les Philippines, le Bangladesh et l’Égypte) des achats à des prix élevés, qui ont contribué à faire augmenter le prix des différentes typologies de riz. En mars 2008, le ministre du commerce thaïlandais annonce que les prix atteindront le pic de 1000 dollars/par tonne, en déclenchant des politiques agressives d’achat de la part des Pays importateurs. La crise s’est conclue seulement quand l’Inde et le Vietnam ont atteint le niveau de stock stratégique préalablement fixé et ont aboli les restrictions sur les importations. Le cas du riz suggère une réflexion : tant que l’offre globale des principales matières premières alimentaires ne se positionnera sur des niveaux optimaux (permettant de faire correspondre la demande à des prix équilibrés), les
importateurs devront s’assurer la disponibilité des biens alimentaires primaires dans leurs marchés internes, en adoptant des politiques d’achat «agressives», alors que les exportateurs s’inquièteront de limiter le risque de croissance sur les prix internes à travers des politiques d’exportation « conservatives » (impôts ou quotas sur l’exportation). Quand l’offre globale se positionnera sur des niveaux d’équilibre, les importateurs ne sentiront plus le besoin d’acheter des volumes supplémentaires à titre de précaution et les prix commenceront à baisser. Des achats de quantités réduites feront diminuer la demande mondiale des importations et le niveau des prix, comme nous l’avons justement constaté après la crise de 2008. En outre, il est opportun de vérifier que les prix du marché d’origine sont suffisamment rentables afin de stimuler la production agricole aussi bien par rapport aux coûts de production qu’aux cultures concurrentes.
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables BCFN impliquées Index 2011
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le cas du prix du riz de 2007 à 2008
75
La dépréciation du dollar : une croissance de la demande, la hausse des prix des genres alimentaires et une augmentation du pouvoir d’achat des Pays importateurs
D
ans le commerce agricole, la monnaie de change prédominante est encore le dollar américain. La monnaie américaine s’est dépréciée de manière significative par rapport aux autres devises. La cotation du dollar a favorisé l’importation de matières premières alimentaires vers les Pays qui ont bénéficié d’une appréciation de leur monnaie nationale. Cette situation, grâce aussi à un fort développement des économies émergentes a déclenché une forte demande de denrées alimentaires de la part de ces Pays et, successivement, une hausse des prix des genres alimentaires dans le moyen terme de la part des producteurs agricoles. Par exemple, au mois de mars 2011, les États-Unis ont exporté 8,5 millions de tonnes de blé, plus du double de la moyenne des cinq dernières années. En particulier, puisque les États-Unis sont les principaux exportateurs de matières premières agricoles du monde et de nombreux prix sont donnés en dollars, la dépréciation de la devise américaine comporte une augmentation du pouvoir d’achat des Pays importateurs
250
0,85 0,8
200 0,75 150
0,7 0,65
100
0,6 50
Entre mars 2006 et novembre 2007, les exportations américaines de céréales augmentent de 46%
De juillet 2008 à juillet 2009, les exportations américaines diminuent de 29%
Suite à la récente dépréciation du dollar, les exportations américaines augmentent de 56%
Indice des prix des produits alimentaires
Indice des prix des céréales
5/2011
3/2011
1/2011
9/2010
11/2010
7/2010
5/2010
3/2010
1/2010
9/2009
11/2009
7/2009
5/2009
3/2009
1/2009
9/2008
11/2008
7/2008
5/2008
3/2008
1/2008
11/2007
9/2007
7/2007
5/2007
3/2007
1/2007
11/2006
9/2006
7/2006
5/2006
0
0,55 0,5
dollars/euros
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données USDA, OECD et FAO.
Une valeur basse de la monnaie comporte une hausse des prix alimentaires et un déclenchement de phénomènes de spéculation
77
Figure 2.32. Taux de change euro/dollar et Indice des prix des produits alimentaires et des céréales (mars 2006-juin 2011)
3/2006
76
Le dollar américain est la monnaie de change prédominante dans le commerce agricole mondial
qui implique une croissance de la demande d’importations, en contribuant au déséquilibre entre l’offre et la demande internationale et à une surchauffe des prix. La figure 2.32. montre clairement la relation inverse entre l’évolution de la valeur du dollar et l’indice des prix de toutes les matières premières agricoles et des céréales47 entre mars 2006 et juin 2011, période qui a vu l’alternance de dévaluations et de réévaluations de la monnaie américaine. Par ailleurs, il faut tenir compte des impacts de l’énorme volume de liquidité introduite par la Federal Reserve dans le système économique mondial ces dix dernières années, à travers les politiques d’expansion quantitative. Une valeur basse de la monnaie, en effet, comporte une hausse des prix alimentaires et déclenche des phénomènes de spéculation, car la nourriture peut être considérée comme une matière première parfaite, dans un marché déséquilibré. De plus, cette liquidité s’est orientée vers les Pays en voie de développement, en Chine par exemple, où l’impact de l’inflation est plus accentué en raison du taux de change fixe.
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
2.9 Le marché des changes
Emory Kristof/National Geographic Stock
79
700.000 600.000 500.000 400.000 300.000 200.000
oct 10
fév 11
juin 10
oct 09
fév 10
juin 09
oct 08
fév 09
juin 08
oct 07
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données Kansas City Board of Trade, 2011.
fév 08
fév 07
juin 07
oct 06
juin 06
oct 05
fév 06
fév 05
juin 05
oct 04
juin 04
oct 03
fév 04
fév 03
juin 03
oct 02
juin 02
oct 01
fév 02
juin 01
100.000 oct 00
Deux types d’investisseurs : les opérateurs commerciaux et les opérateurs non commerciaux
Le volume de contrats futures échangés
Figure 2.33. Volume mensuel de contract futures sur le blé (février 2000-février 2011)
fév 01
Les spéculateurs et les investisseurs financiers sont très attirés par les contrats futures
juin 00
Les contrats futures représentent une « couverture » contre les risques de fluctuation des prix
fév 00
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
L
e marché des matières premières agricoles a été caractérisé ces dernières années par un croissant recours à des instruments financiers, souvent complexes et articulés tels que les contrats “futures” ou «à terme», qui sont devenus un aspect important pour les impacts potentiels sur le secteur alimentaire. Un future peut être défini comme un instrument dérivé constitué par un contrat à terme relatif à une opération d’achat/vente d’une marchandise (biens, matières premières ou semifinis) ou à une activité financière subordonnée (actions, taux d’intérêt, etc), où le moment de la livraison est différé et les divers éléments du contrat (quantité, caractéristiques qualitatives, lieu et date de livraison, etc) sont standardisés, à l’exception du prix48. En impliquant l’obligation formelle de vendre ou d’acheter une quantité déterminée de marchandise à un prix spécifique et à un certain moment, ce genre de contrat représente pour les agriculteurs et pour les opérateurs une importante défense, ou « couverture », contre les risques de fluctuation des prix : pour le producteur de matières premières alimentaires (par exemple, le blé), l’avantage d’un contrat future consiste dans la sécurité d’un prix fixé avant d’avoir effectué la récolte ou encore avant les semailles. Mais, d’autre part, il faut tenir compte du fait que seuls 2% des contrats à terme se concluent avec la livraison physique de la marchandise, car habituellement il sont négociés avant la date d’échéance. Par conséquent, ces contrats attirent un nombre croissant de spéculateurs et d’investisseurs financiers, parce que – surtout dans les périodes de hausse de l’inflation – ils permettent d’offrir des profits alléchants lorsque les actions et les obligations semblent des investissements peu attrayants. La spéculation sur le marché des matières premières joue un rôle important dans l’équilibre macroéconomique et permet le transfert du risque de prix de ceux qui ont une hostilité majeure envers le risque aux investisseurs plus habiles et orientés vers le risque (les “spéculateurs”). Très souvent les “positions” prises sur le marché sont rapidement inversées et il devient alors important de savoir distinguer entre deux types d’investisseurs : d’un côté, les opérateurs commerciaux (investisseurs commerciaux avec une forte hostilité envers le risque) et de l’autre, les opérateurs non commerciaux (sans intérêt commercial et avec une haute propension au risque). Les fonds communs d’investissement49, qui diversifient leur portefeuille en incluant des futures de matières premières et qui opèrent selon une logique de long terme, mais aussi les spéculateurs agressifs orientés surtout sur le court terme pour tirer des profits des variations des prix des futures appartiennent à cette deuxième catégorie. L’action combinée de ces sujets contribue au fonctionnement efficace du marché à travers la quantité de transactions effectuées : la spéculation n’est pas nécessairement négative pour des fins d’assurance, car il peut apporter de la liquidité pour les « hedger » (opérateurs
qui se couvrent contre les risques de fluctuation des prix sur le marché, ou « hedging » couverture) étant donné que les spéculateurs s’assument des risques que les distributeurs commerciaux ne sont pas disposés à prendre. Les producteurs, les usagers et les négociateurs ont donc la possibilité d’utiliser les informations données par le marché des dérivés pour une plus grande efficacité d’allocation de biens. Un indicateur du niveau de spéculation à l’intérieur du marché peut être offert, en plus de la croissance des Commodity Index Fund50, du rapport entre le nombre d’investisseurs non commerciaux et la totalité des acteurs sur le marché. Cet indice s’est accru de 2006 à 2008, et dans le cas du maïs, il est passé d’une moyenne de 0,29 en 2005 à 0,49 durant les premiers cinq mois de 200851. Pour apprécier l’entité et l’évolution de la spéculation sur le marché des matières premières agricoles, deux indicateurs peuvent être analysés : - la quantité des contrats futures échangés (volume) ; - le total d’intérêts ouverts. Le volume de contrats futures échangés chaque mois est un indicateur qui donne le nombre total d’échanges de matières premières, en agrégeant des contrats avec une échéance différente. Le graphique présent dans la figure 2.33. montre les volumes échangés sur le marché du blé auprès du Kansas City Board of Trade (KCBT), une des principales places mondiales d’échange de futures et d’options des matières premières agricoles52. Les données montrent que les contrats futures sur le blé ont augmenté de manière significative ces dernières années : de 2004 à 2006, le volume des échanges des futures sur le blé a augmenté de 30%, de la même façon que ce qui s’est passé à d’autres biens alimentaires tels que le maïs (+60% dans la période 2005-2006) et le riz (+40%)53. Quant au blé, dans la dernière période observée, on constate une nouvelle tendance à la hausse, en tenant compte du fait que généralement, en octobre les contrats se clôturent et les échanges physiques des marchandises ont lieu. Une raison à l’augmentation des négociations et de l’impact sur le niveau des prix des matières premières peut être trouvée dans la participation toujours plus active de la part des spéculateurs sur le marché des matières premières alimentaires.
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
78
2.10 La spéculation sur les marchés des matières premières alimentaires
Le deuxième indicateur sont les intérêts ouverts qui représentent le nombre de contrats futures non terminés (pas encore compensés par une position opposée ou avec la marchandise à livrer) : à chaque fois qu’un opérateur de marché prend une position54, une position ouverte se crée immédiatement et va durer tant que le négociateur même ne prendra pas de position opposée ou jusqu’à l’échéance du contrat55. Comme le montre la figure 2.34., le total d’intérêts ouverts aussi est en croissance et, dans le cas du blé, de 2005 à 2006 on a assisté à une croissance de 60%, alors que de 2007 à 2008 on a enregistré une diminution en raison de la crise financière. La tendance à la croissance est reprise en 2009 pour se positionner sur le maximum historique au mois d’octobre 2010 (+125% par rapport à octobre 2008). Les données sur les intérêts ouverts peuvent refléter l’entrée des spéculateurs sur le moyen et long terme sur le marché des matières premières. Figure 2.34. Intérêts ouverts sur le blé (février 2000-février 2011)
250.000 200.000 150.000 100.000 50.000
80 oct 10
fév 11
juin 10
oct 09
fév 10
juin 09
oct 08
fév 09
juin 08
oct 07
fév 08
juin 07
oct 06
fév 07
juin 06
oct 05
fév 06
juin 05
oct 04
fév 05
juin 04
oct 03
fév 04
juin 03
oct 02
fév 03
juin 02
oct 01
fév 02
juin 01
oct 00
fév 01
juin 00
fév 00
0
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données Kansas City Board of Trade, 2011.
Figure 2.35. Évolution de volumes de futures échengés et du prix du blé (2000-2011)
6.000.000
$ 400 $ 350
5.000.000
$ 300 4.000.000
$ 250
3.000.000
$ 200 $ 150
2.000.000
$ 100 1.000.000 0
$ 50
00/01
01/02
02/03
03/04
04/05
05/06
Volume des futures sur le blé
06/07
07/08
08/09
09/10
10/11
$0
Prix moyen du blé
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAPRI et USFCTC (U.S. Futures Commodity Trade Commission), 2011.
Cependant, il reste à contrôler le degré de corrélation entre ce qui peut indiquer le niveau de spéculation et le prix des matières premières alimentaires. La figure 2.35. montre comment la corrélation est marquée jusqu’en 2006 (R = 0,82 durant la période 2000-2006), lorsque, d’une part, une grande quantité de positions longues détenues par les Index Fund56 a été enregistrée et, de l’autre, le marché des négociations télématiques futures57 s’est encore plus développé. Suite à la croissance constante des échanges télématiques, le volume des contrats futures échangés augmente vertigineusement et au début, il n’a pas une forte corrélation avec le prix du blé (R = 0,2). Le lien de cause à effet entre le changement des positions possédées et l’évolution des prix des matières premières alimentaires fait l’objet de nombreuses études sur la relation entre l’activité de spéculation sur les marchés des futures et l’augmentation des prix des aliments. Les analyses statistiques menées jusqu’à maintenant ont mis en évidence la difficulté de démontrer l’existence d’une relation directe entre les deux variantes58. Comme nous l’avons vu dans le premier Chapitre, un autre phénomène constaté au cours des deux crises alimentaires du début du millénaire, est la volatilité des prix des matières premières. L’effet de la volatilité sur l’économie réelle est déstabilisant, car il augmente l’incertitude sur le niveau futur des prix. Néanmoins, les causes de son origine sont encore incertaines et font l’objet de débat. Des économistes pensent qu’un rôle déstabilisant ne peut pas être attribué au marché des futures car, par définition, le marché réagit à des signaux externes et contribue à atteindre un prix d’équilibre. De cette façon, toutefois, la présence de grands investisseurs aux patrimoines financiers importants et à haut pouvoir de marché n’est pas prise en compte. La tendance croissante d’une matière première determinée pourrait engendrer un volume élevé et constant d’achats liés aux perceptions et aux attentes, qui pourrait créer un effet de distorsion sur la conformation des prix comme résultat des soit-disant fondamentaux (stocks, productions, consommations, importations-exportations). Les fonds indiciels sont un exemple de grands investisseurs capables d’influencer l’évolution du marché : en plus d’injecter de grosses sommes d’argent, ils conservent les contrats pendant une longue période, ce qui pourrait altérer la dynamique entre l’offre et la demande sur le front de l’offre, en faisant augmenter les prix. Actuellement il n’est pas possible, d’un point de vue empirique, de démontrer la relation entre l’activité de spéculation sur le marché des dérivés et la volatilité des prix alimentaires, comme l’ont révélé de nombreuses études importantes de la littérature scientifique. En outre, il faut constater que les phénomènes de haute volatilité sont présents aussi sur les matières premières non traitées sur le marché des dérivés. D’ailleurs, l’échange de futures ne conduit pas à la formation de prix d’équilibre, car chaque contrat peut être reconduit un nombre infini de fois afin que, pour chaque niveau de demande, il y ait toujours un niveau correspondant d’offre – contrairement à ce qui ce passe sur le marché réel.
La corrélation entre le niveau de spéculation et le prix des matières premières alimentaires reste incertaine
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Les intérêts ouverts
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Les fonds indiciels sont un exemple de grands investisseurs capables d’influencer l’évolution du marché
82
Même si ses origines remontent au Japon du XVII siècle, le marché des futures – à travers une série de développements technologiques, historiques et législatifs – se diffuse à Chicago dans la première moitié du XIX siècle59. Vers 1840, les agriculteurs de l’Illinois obtenaient, en effet, d’abondantes récoltes de blé destinées à l’alimentation humaine et de maïs pour l’élevage des animaux. La partie de la récolte qui n’était pas consommée était fermée dans des sacs et envoyée par bateau ou par wagons à Saint Louis ou à Chicago. Les commerçants en ville prenaient des échantillons de récolte des différentes plantations des États-Unis et en fixaient le prix à travers des négociations sur place (spot). Le marché dénommé “sackbased” (c’est-à-dire sur la base des sacs de blé excédentaires) était, par conséquent, très cher à cause du transport par mer ou par wagons et à cause de la gestion physique des sacs. À partir de 1848, deux innovations qui modifièrent radicalement la manière de mener les échanges furent introduites : le développement du réseau du chemin de fer aux alentours de Chicago – qui donna la possibilité d’étendre les cultures et, donc, de transporter l’offre de blé – et l’introduction des monte-charge à vapeur, qui améliorèrent la capacité de gestion des marchandises en ville. Par ailleurs, pour augmenter l’efficience, les sacs furent éliminés de façon à pouvoir vendre le blé en gros. En 1848, le CBOT (Chicago Board of Trade) fut institué, une association privée ayant pour objectif la promotion du commerce, d’abord en général et, à partir des années 1850, du blé. Entre 1853 et 1856, la quantité de blé destinée à Chicago tripla et en 1856 le CBOT commença à distinguer les types et la qualité des céréales, identifiant trois types de blé. Au début. il y eut des problèmes, car les marchandises étaient vendues mélangées et non plus distinguées par lieu d’origine. Le blé changea sa nature commerciale, passant
de produit de simples agriculteurs à matière première. En outre, grâce à la diffusion du télégraphe, les informations sur les prix commencèrent à circuler plus rapidement que les marchandises (qui mettaient des semaines pour arriver sur le lieu d’échange), conduisant à la naissance des contrats “to arrive” (selon lesquels la livraison de la marchandise était différée à la stipulation du contrat). De cette façon, les acheteurs et les vendeurs définissaient un prix auquel devait correspondre un échange à une certaine date, réduisant ainsi le risque de prix pour les deux. Les banques s’intéressèrent immédiatement à ce nouveau type de contrats et commencèrent à prêterde l’argent et à utiliser comme garantie le contrat “to arrive” précédemment stipulé. Ensuite, les spéculateurs aussi – c’est-à-dire ceux qui n’étaient ni producteurs ni acheteurs de blé – commencèrent à acheter et à vendre les contrats sur la base des estimations de l’évolution future du niveau des prix, contribuant ainsi à rendre le marché beaucoup plus liquide pour les agriculteurs et les acheteurs. Alors que les contrats “to arrive” prévoyaient la livraison des marchandises, les spéculateurs commencèrent à verser ou à toucher la différence monétaire entre le prix fixé par le contrat et le prix du marché à l’échéance, sans la réalisation physique de l’échange. En 1856, le CBOT créa les contrats “futures”, régularisant et donnant ainsi un standard aux contrats “to arrive”. Selon les timations de l’époque, en 1875, le volume d’affaire des futures était dix fois supérieur à celui des marchandises réelles, alors qu’en 1887 le rapport entre les contrats futures et les contrats d’échange traditionnels était de 20 à 1. Le CME Group (Chicago Mercantile Exchange), formé par une série de fusions et d’acquisitions entre petites organisations, doit sa conformation actuelle à la fusion avec le CBOT en 200760 et à l’acquisition suivante du NYMEX Holdings en 2008.
Lynn Johnson/National Geographic Stock
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le marché des futures et le Chicago Board of Trade : origines et évolution
écemment, nous avons assisté à plusieurs émeutes populaires causées par l’augmentation des prix des denrées alimentaires des Pays les moins avancés. Les « émeutes du pain » se propagent en partant de l’appauvrissement croissant des couches moyennes et basses de la population. Un nombre toujours plus élevé de personnes prétend, comme exigence vitale, le maintien des prix subventionnés pour de nombreux biens essentiels, à partir du pain et des produits alimentaires de base, dans un contexte où, désormais et de plus en plus, beaucoup de Pays doivent faire face à des budgets profondément appauvris par la crise financière généralisée en essayant de couper ces éléments de plus en plus coûteux. Pour des millions d’habitants surtout du Tiers Monde, chaque augmentation de prix et de tarif même minime signifie affecter des revenus dont il ne reste désormais que des miettes. En particulier, en coïncidence avec la crise alimentaire qui a atteint son sommet vers la moitié de 2008, lorsque les prix de la nourriture ont augmenté de 51% en une seule année61, nous avons assisté à l’explosion de différentes émeutes dans de nombreux Pays africains et asiatiques (figure 2.36.).
la crise alimentaire est à la base des récentes révoltes en afrique et en asie
Figure 2.36. Principales émeutes (entre parenthèses le nombre de victimes) et évolution de l’Indice FAO des prix des produits alimentaires et du prix du pétrole brut (2004-2011)
Haïti (5), Egypte (3) Côte d’Ivoire (1)
250
200
Tunisie (1) Inde (1) Soudan (1)
Mauritanie (2) Inde (4) Somalie (5)
150
Bahreïn (31) Maroc (5) Iraq (29) Yemen (800 +) Algérie (4) Syrie (900+) $ 140
Somalie (5)
Sudan (3) Cameroun (40) Yémen (12)
Egypte (800+)
$ 120
Libye (10.000+) Tunisie (300+)
$ 100
Mozambique (13)
$ 80 Burundi (1)
$ 60
100
$ 40 50
$ 20 $0
Indice FAO des prix des produits alimentaires
Prix du pétrol brut
Source : adaptation de The European-House Ambrosetti à partir des données FAO et Reuters, 2011.
4/2011
1/2011
10/2010
7/2010
4/2010
1/2010
7/2009
10/2009
4/2009
1/2009
10/2008
7/2008
4/2008
1/2008
7/2007
10/2007
4/2007
1/2007
7/2006
10/2006
4/2006
1/2006
7/2005
10/2005
4/2005
1/2005
7/2004
10/2004
4/2004
0 1/2004
84
R
Le phénomène des « émeutes du pain »
« L’Arab Spring »
D’un point de vue historique, il est possible de reconduire les émeutes populaires au niveau des prix des denrées alimentaires
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
2.11 dynamiques géopolitiques
De fin 201062 à la première partie de 2011, le phénomène connu comme « l’Arab Spring » a débuté, une série d’émeutes et d’agitations encore en cours dans les régions du Moyen et Proche Orient et de l’Afrique du Nord, qui ont causé de violentes émeutes en Algérie, en Tunisie, en Egypte, en Libye et en Syrie et la fin de régimes historiques tels que ceux de Ben Ali en Tunisie et de Moubarak en Egypte. Les causes qui ont déclenché les protestations sont nombreuses et comprennent la corruption, l’absence de libertés individuelles, la violation des droits de l’homme et les dures conditions de vie, qui dans de nombreux cas touchent ou frôlent l’extrême pauvreté. Toutefois, l’augmentation du prix des denrées alimentaires et de la faim est aussi considérée comme l’une des principales causes du mécontentement. La corrélation entre les évènements de la première partie de 2011 et le niveau des prix des matières premières reste, tout de même, une hypothèse examinée par les chercheurs en géopolitique, car l’opération d’isoler un phénomène systémique et de marché comme l’augmentation des prix des biens alimentaires et d’en étudier l’effet sur les changements politiques et sociaux est difficile. Toutefois, les émeutes attribuables à des traumatismes dérivés du niveau des prix des denrées alimentaires ont été très fréquentes durant les siècles derniers. Une étude de Rudé (1964), par exemple, analyse l’évolution du prix des denrées alimentaires et des facteurs interdépendants dans la période entre 1709 et 1789. En effet, cette recherche met en évidence comment, en France en 1709, commença une période d’extrême pénurie des récoltes et d’évènements climatiques défavorables qui menèrent à une demande croissante de blé anglais, déclenchant une brusque augmentation au niveau des prix internationaux. Les phénomènes de pénurie et les prix élevés s’accentuèrent de 1775 à 1785, jusqu’à l’explosion de révoltes populaires qui conduisirent à la Révolution française. Ce qui arriva en France avant la grande révolution peut être adopté comme un schéma interprétatif pour mieux comprendre les causes et les effets déstabilisants qui se sont manifestés et se manifesteront suite aux évènements au Moyen Orient. Les pays de la zone intéressée par les principales révoltes de « l’Arab Spring » (Egypte, Tunisie, Algérie, Yémen, Syrie, Libye, Arabie Saoudite, Bahreïn) ont des caractéristiques communes sur le plan de l’offre et de la demande de nourriture. De par son manque naturel de ressources fondamentales comme la terre arable et l’eau, la région Moyen Orient Afrique du Nord (MOAN) présente le niveau d’importations par habitant le plus haut du monde, avec entre 25 et 30% de la consommation totale interne63. En Egypte, les familles dépensent en moyenne 40% de leurs revenus en biens alimentaires, l’inflation globale a été de 20% de 2010 à 2011 et certains produits ont vu leur prix multiplié par dix. En outre, 40 millions d’Egyptiens (sur 84 millions) s’appuient sur le système de subvention de l’état pour le pain, dernièrement très critiqué par l’opinion publique à cause du taux élevé de corruption. La révolte « l’Arab Spring », en plus de compter parmi ses propres causes l’augmentation des prix des biens alimentaires, semble représenter un phénomène qui permet d’amplifier le problème et de déclencher une ultérieure aggravation dans la crise des prix des denrées alimentaires mondiales à travers l’application de deux variantes (déjà décrites dans les paragraphes précédents) : l’augmentation du prix du pétrole et les politiques d’achat « agressives » mises en oeuvre par les États qui risquent des émeutes populaires. La figure 2.37. montre que dans la période comprise entre le début et l’intensification de « l’Arab Spring », le prix du pétrole a augmenté de 2,3% en moyenne sur base mensuelle, surtout en raison du fait que dans la zone intéressée par les désordres et les tensions, de grandes quantités de pétrole brut et de gaz sont extraites. Avec cela, le prix des céréales aussi, déjà élevé, a continué à augmenter à un taux mensuel de 1,6%, avec un pic enregistré en avril, peu après le « jour de la colère au Moyen Orient ».
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En Egypte, les familles dépensent en moyenne 40% de leurs revenus en biens alimentaires
Augmentation du prix du pétrole et politiques d’achat « agressives » mises en oeuvre par les États qui risquent des émeutes populaires
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Figure 2.37. Principaux évènements de « l’ Arab Spring », évolution du prix du pétrole et Indice FAO des prix des céréales (2011) Début de l’Operation Odissey Dawn en Libye, Après 18 jours de protestation de la plus grande offensive contre un régime masse, le vice président égyptien arabe, de la parte de l’Occident après celle déclare la défaite de Moubarak contre l’Iraq en 2003 et la fin de son regne Jour de la colère au Moyen Orient et Aggravation des répressions dans plusieurs Pays en Syrie de la part de l’armée de la région
Ben Ali s’en fuit en Arabie Saoudite à travers Malte
240 230 220 210 200 190 180 170 160 150
21 morts en Egypte après les affrontements avec la police, Moubarak annonce de dures répressions des mouvements de protestation Début des émeutes en Tunisie aprés le suicide de l’étudiant Mohamed Buazizi
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* * * 9/2010
10/2010
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Un autre phénomène provoqué par l’augmentation progressive des prix des biens alimentaires et par les conditions socio-économiques difficiles de certains États qui appartiennent à la zone intéressée par « l’Arab Spring » est l’acquisition de la part de ces Pays de grandes quantités de denrées agricoles à des prix élevés, afin de les redistribuer sur les marchés internes comme subventions. Comme illustré précédemment dans le Paragraphe 2.8, ces politiques sont mises en oeuvre dans des périodes de forte instabilité et d’incertitudes des gouvernement nationaux : dans une période d’émeute comme actuellement, il s’est produit une forte augmentation des achats de la part des Pays de la zone Moan, de denrées agricoles à des prix élevés. Ce phénomène introduit d’autres distorsions sur l’équilibre du marché mondial. En conclusion, il est possible de soutenir que l’augmentation des prix des biens alimentaires et l’apparition de déséquilibres géopolitiques dans des Pays aux conditions socio-économiques précaires soient liés entre eux, en particulier si ces Pays sont des importateurs nets de denrées alimentaires. En outre, dans certains cas, la précipitation des événements dans ces Pays peut influencer par la suite la dynamique des prix au niveau international : c’est le cas de « l’Arab Spring », qui a causé une flambée du prix du pétrole – qui s’est transmise à celui des matières premières alimentaires – et une croissance des achats de denrées alimentaires à un prix élevé de la part de ces Pays.
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11/2010
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6/2011
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Indice FAO des pris des céréales
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti à partir des données FAO, Index Mundi et “The Guardian”, 2011.
Figure 2.38. Indice de prix de céréales et “Politiques d’achat aggressive” (octobre 2005=100), 2011 L’Afghanistan, l’Indonesie et l’Egypte négocient poue des fournitures de blé très considérables
200
L’Algerie achète 800.000 tonnes de blé à un prix très élevé elevato
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La Jordanie et l’Algérie achètent des quantités record de blé
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Liaison entre l’augmentation des prix des biens alimentaires et l’apparition de déséquilibres géopolitiques
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Prix du pétrole
250
De grandes quantités de denrées agricoles achetées à des prix élevés pour les distribuer comme subventions internes
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
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Dans cette période, la corrélation entre les deux variantes a été de 0,82. Cette donnée peut être lue comme une confirmation (par rapport à ce qui est décrit dans le Paragraphe 2.7) d’une forte corrélation (même de manière indirecte) entre le prix du pétrole et l’évolution du prix des céréales, compte tenu aussi du fait qu’elle n’a duré que quelques mois, et qu’apparemment aucune autre variable capable d’influencer avec force la dynamique des prix n’a agi, à part celle de la manifestation de la prévision d’une aggravation des variables climatiques pour certaines régions géographiques (Paragraphe 2.6).
1/2011
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La zone MOAN augmente les quantités importées des États-Unis, de l’Union Européenne et de l’Ukraine pour constituer des stocks de sécurité
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L’Iraq importe 350.000 tonnes de blé et la Tunisie 100.000, une quantité étrange pour ces deux États
2/2011
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4/2011
5/2011
Source : adaptation de The European House Ambrosetti à partir des données USDA, 2011.
6/2011
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3. Conclusions et recommandations
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D
Volatilité des prix et risque d’une croissance continue de ces prix sur le long terme les liens de hasard et les corrélations à la base des phénomènes
Il ne semble pas qu’il soit possible d’ordonner les facteurs analysés suivant leur degré d’influence, plus ou moins grande, sur le niveau et sur la volatilité des prix
ans ce document, nous avons voulu dresser un cadre méthodologique rigoureux, qui puisse mettre en évidence de manière suffisamment claire les relations entre les différentes variables-clés et les leviers d’interventions, sur le court et le moyen terme, du marché des denrées alimentaires. Dans le but de favoriser une bonne compréhension du problème et d’évaluer des mesures de politique efficaces, il nous a semblé utile d’offrir, dans le deuxième Chapitre, une analyse des variables les plus importantes. Il ressort de cette analyse un cadre extrêmement complexe, qui doit être interprété d’un point de vue systémique, en tenant compte des éléments qui contribuent à créer la situation actuelle de déséquilibre. Ce déséquilibre se traduit par une forte volatilité des prix sur le court terme, et par le risque d’une croissante continue des prix sur le moyen-long terme. Dans le chapitre précédent, nous avons analysé un à un, sur la base du modèle interprétatif mis au point, les différents facteurs qui ont une incidence sur le niveau et sur la volatilité des prix des denrées alimentaires et nous avons identifié et décrit les liens de causalité et les corrélations éventuelles entre eux. En particulier, nous avons essayé de comprendre, pour chaque facteur le “comment” et le “pourquoi” du rapport qui s’établit avec l’évolution des prix. Dans certains cas, où les variables peuvent être mesurées par des indices ou indicateurs de quantité (comme, par exemple, le prix du pétrole, le taux de change des devises, le volume des produits dérivés échangé, etc), il a été possible d’apprécier des corrélations statistiques plus ou moins évidentes avec l’évolution des prix ; dans d’autres cas, où ce sont des variables de type qualitatif qui interviennent, l’analyse s’est basée sur l’observation empirique de la réalité, qui a permis de mettre en relation certains évènements (par exemple, des épisodes climatiques défavorables, des choix de politique commerciale, etc) avec des changements importants de l’évolution des prix. La contribution d’expérience d’économistes et de décideurs politiques qui ont accepté de commenter ce document a été extrêmement importante pour sa réalisation, ainsi que l’implication d’opérateurs financiers sur les marchés analysés. Les résultats du travail effectué nous permettent de formuler une première considération importante : il ne semble pas possible – étant donné les connaissances dont nous disposons – de classer tous les facteurs analysés suivant leur degré d’influence sur le niveau des prix et sur la volatilité, à cause des relations souvent biunivoques et difficilement quantifiables avec précision qui existent entre les variables. Cela exige, en effet, des approfondissements ultérieurs de la part de la communauté scientifique et des institutions internationales pour élaborer des mesures d’intervention de plus en plus ciblées et efficaces. Cependant, il faut souligner que cette limite, bien qu’elle soit importante, ne nous empêche pas pour autant de comprendre certains facteurs déterminants et d’élaborer, par conséquent, des indications pour des politiques ponctuelles.
Il est fondamental pour cela de répartir les facteurs analysés sur la base de la possibilité d’intervenir concrètement sur ces mêmes facteurs afin de réduire la volatilité et d’empêcher une flambée des prix, ce qui mettrait en danger la sécurité alimentaire mondiale et le développement du secteur agroalimentaire. Il est crucial de tenir compte de l’horizon temporel dans lequel ces mesures d’intervention devraient être effectuées. A notre avis, il est donc possible de distinguer entre : - facteurs contextuels : ils agissent directement du côté de l’offre/demande, ou bien indirectement sur l’évolution des prix des denrées alimentaires, mais ils représentent des constantes sur lesquelles il ne semble pas opportun d’intervenir. Il s’agit de la croissance démographique et du phénomène de l’urbanisation, de la croissance économique des Pays en voie de développement, de l’évolution des marchés des devises, des dynamiques géopolitiques internationales et du lien étroit entre le coût de l’énergie et le prix du pétrole et les facteurs de la production agricole. Même si nous avons affaire à des variables qui font l’objet d’intervention (coût de l’énergie), il n’est pas envisageable de réaliser des interventions visant en priorité des objectifs liés aux prix des denrées alimentaires ; - facteurs structurels : ils peuvent être abordés par des mesures qui donneront leurs fruits seulement sur le moyen-long terme et les problèmes qu’ils posent peuvent trouver une solution dans des processus d’adaptation du système aux changements des conditions structurelles de l’offre et de la demande. Il s’agit ici du problème de la productivité agricole, du gaspillage et des pertes le long de la filière agroalimentaire, des contraintes venant des limites des ressources naturelles à disposition, des effets du changement climatique et du phénomène de l’occidentalisation du régime alimentaire dans de nombreuses régions émergentes de la planète, d’une augmentation plus généralisée de la consommation moyenne de calories. Par rapport à ces thèmes, il nous semble nécessaire d’entamer un processus très vaste de changement des styles de vie et de restructuration de certains éléments de la filière agroalimentaire. Les aspects d’innovation, les développements technologiques, les diffusions des meilleurs pratiques agricoles, la réduction des gaspillages et des pertes, l’adaptation et l’atténuation des événements météorologiques défavorables et la réorientation des choix alimentaires et des styles de consommation entrent ici en jeu, dans un cadre de durabilité et de santé. Il s’agit là de facteurs décisifs sur le long terme, mais qui malheureusement ne sont pas alignés sur les cycles de la politique et sont souvent, de ce fait, négligés ; - facteurs contingents : ils peuvent déterminer des résultats sur le court terme par des solutions adéquates et des mesures de caractère technique et politique. Il s’agit en particulier d’interventions au niveau des problématiques suivantes : la pénurie de stocks de matières premières agricoles ; les primes à la production de biocarburants de premières génération ; l’excès de spéculation et de financiarisation des marchés des denrées alimentaires ; l’implémentation de politiques commerciales de distorsion du marché de la part des Pays exportateurs et importateurs. Ces derniers sont les leviers d’intervention efficaces sur le court terme, fondamentaux pour faire face aux urgences, mais insuffisants s’ils ne sont pas accompagnés d’interventions sur les facteurs structurels. Le BCFN a déjà abordé dans plusieurs ouvrages récemment publiés les principales problématiques qui peuvent être ramenées aux facteurs structurels. Par la suite, nous reviendrons donc seulement sur certaines des nombreuses recommandations et indications politiques déjà formulées, renvoyant le lecteur aux revues de position spécifiques pour les approfondissements1. Ces recommandations ne sont pas étroitement liées au thème des prix des denrées alimentaires, mais leur implémentation pourrait s’avérer décisive pour l’équilibre de moyen et long terme des marchés agricoles, et donc pour la stabilité des prix.
les variables divisées par la possibilité d’intervenir afin de reduire la volatilité et d’empecher une flambée des prix Facteurs contextuels
Facteurs structurels
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
3. Conclusions et recommandations
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Facteurs contingents
DÉMOGRAPHIE Croissance de la population Urbanisation
MARCHÉ DES CHANGES
POLITIQUES COMMERCIALES
DYNAMIQUES GÉOPOLITIQUES
CROISSANCE ECONOMIQUE DES PAYS EN DEVELOPPEMENT NIVEAUX DES STOCKS
Productivité Technologie/innovation Gaspillages et pertes
BIOCARBURANTS
STYLES ALIMENTAIRES Augmentation des calories consommées “Occidentalisation” du régime alimentaire
PRODUCTION AGRICOLE
DEMANDE
PRIX
MARCHÉ FINANCIERS (SPÉCULATION)
Facteur contextuels
OFFRE
PRIX DU PÉTROLE ET DE L’ENERGIE
LIMITES DES RESSOURCES NATURELLES Terres Eau
CHANGEMENT CLIMATIQUE Hausse des témperatures Variation des précipitations Événements climatiques défavorables
Facteur structurels
Facteur contingents
Source : adaptation de The European House-Ambrosetti, 2011.
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Production agricole Le rôle de l’innovation continue Actions de soutien aux Pays en voie de développement Le maintien et le développement des “systèmes locaux” de production/distribution Opposition aux politiques fiscales et commerciales pouvant causer des distorsions des marchés agroalimentaires mondiaux Approfondir les développements dans le domaine technologique
Le défi est d’innover continuellement, en visant particulièrement le développement de modèles agricoles à haute productivité, de plus grande qualité et de moindre impact environnemental. La recherche scientifique et technologique sur ces thèmes, favorisée aussi par des flux importants d’investissements publics, est un facteur décisif. - Il faut favoriser des actions de soutien aux Pays en voie de développement à travers le transfert de connaissances scientifiques, de bonnes pratiques agricoles, de techniques agronomiques appropriées et de programmes ad hoc visant à combler l’écart qui existe aujourd’hui entre les Pays avancés et les Pays arriérés. - Il est nécessaire de favoriser, par des politiques adéquates et des mesures d’incitation/ dissuasion, le maintien et le développement des “systèmes locaux” de production-distribution consommation des denrées agroalimentaires, en préservant les productions de qualité soucieuses de la biodiversité et de la bio durabilité. - Il faut s’opposer aux politiques fiscales et commerciales qui détournent les marchés agroalimentaires mondiaux, surtout au détriment des Pays en voie de développement. Ces mesures, associées avec une utilisation plus rationnelle du territoire permettent à elles seules d’obtenir des résultats importants. - D’autres voies, liées aux progrès technologiques – comme les biotechnologies – sont certainement à explorer en parallèle, tout en sachant que de nombreux profils relatifs à leur usage doivent encore faire l’objet d’approfondissements et d’analyses attentives. Le facteur de la productivité agricole a aussi un effet direct sur un des facteurs contingents, le niveau des stocks. L’on reviendra sur cette notion au paragraphe consacré à ce thème.
Ressources naturelles limitées Comme nous l’avons vu dans le Paragraphe 2.4, les limites à la disponibilité des ressources naturelles, et en particulier en liaison aux intrants comme l’eau et les terres cultivables – représentent une contrainte très importante à la croissance de la capacité productive de l’agriculture mondiale. Quant à l’eau, par exemple, il est nécessaire d’intervenir afin d’en réduire l’utilisation dans les processus de production et de culture, en particulier dans les régions où il y a pénurie d’eau pluviale. Pour cela, il existe d’amples marges de manoeuvre aussi bien du côté de la réduction des gaspillages que de celui de l’usage de technologies en mesure d’augmenter la productivité de la ressource eau (obtenant ainsi des extrants quantitativement plus importants à parité d’intrants : « plus de grains par goutte d’eau »). - Il est nécessaire d’introduire des formes d’incitation aux investissements dans les technologies déjà disponibles qui permettent d’économiser les volumes d’eau utilisée dans les processus de production, en particulier dans les régions ayant un recours massif à l’irrigation et de bas niveaux d’eau pluviale. - L’agriculture prélevant 70% de la consommation globale d’eau, il faut encourager l’adoption de techniques avancées de collecte d’eau pluviale pour l’irrigation. Par ailleurs, la diffusion de technologies et d’outils de gestion de l’irrigation agricole, visant à en maximiser l’efficience ne se traduit pas toujours en investissements importants en technologies, mais souvent, et plus simplement, en une diffusion de connaissances et de savoir-faire. - Il faut prêter une plus grande attention à la localisation des cultures en rapport à l’efficience de l’eau. En particulier, lors de la localisation de certains types de cultures, les opportunités de maximiser la consommation de green water (eau pluviale) de l’empreinte hydrique par rapport à la consommation de blue water (eau provenant de nappes et bassins d’eau)2 pourraient être saisies. - Il est possible de profiter des opportunités offertes par la libéralisation croissante du commerce international en orientant les échanges de biens à haut contenu en eau virtuelle des régions les plus riches en ressources hydriques vers d’autres plus pauvres, en suivant des logiques de virtual water trade. Quant aux terres cultivables, là aussi le défi à relever est d’obtenir des rendements par hectare cultivé plus élevés grâce aux actions recommandées au sujet de la productivité agricole.
Changement climatique Les études les plus accréditées au sujet du changement climatique montrent que le scénario à venir – celui qui a les plus grandes probabilités de se vérifier – prévoit une baisse de la productivité agricole, à parité de surface travaillée, si des mesures radicales ne sont pas adoptées. De plus, les effets du changement climatique pourraient avoir des retombées négatives sur certaines régions et sur leur capacité de garantir des niveaux de production élevés par rapport aux volumes actuels, surtout à cause de la hausse de la température et de conditions plus sévères quant à l’accès aux ressources en eau (les retombées les plus importantes seraient au niveau de la bande équatoriale, de la région de la Méditerranée, de l’Australie, etc). Enfin, le changement climatique cause une intensification d’évènements climatiques défavorables (sécheresse, crues, etc) qui peuvent entraîner des pertes importantes de récoltes. En excluant la possibilité d’éliminer les effets du changement climatique (puisqu’il s’agit d’un phénomène considéré désormais comme irréversible) et en nous limitant au contexte agricole, nous pourrions nous concentrer sur les points suivants.
Réduction des gapillages et une plus grande productivité des ressources en eau
Encourager l’investissement dans les technologies Favoriser l’adoption de techniques de pointe pour la collecte de l’eau
Prêter une plus grande attention à la localisation des cultures par rapport à l’efficience de l’eau Orienter les échanges de biens à haute teneur en eau virtuelle
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Figure 3.1. Le modèle interprétatif des facteurs influant sur le niveau et sur la volatilité des prix des denrées alimentaires : facteurs contextuels, structurels et contingents
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Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
des actions d’adaptation au changement climatique
- Encourager la mise en oeuvre d’actions visant à pallier le problème, comme par exemple une meilleure gestion des cultures et des pâturages afin d’augmenter les réserves en carbone du sol, la restauration des sols de tourbière cultivés et des terres dégradées, l’amélioration des techniques de production du riz et d’élevage et de la gestion des engrais pour réduire les émissions de CH4, l’amélioration des techniques d’application de fertilisants à base de nitrates pour réduire les émissions de N2O, l’amélioration de l’efficience énergétique, etc. - Soutenir des actions d’adaptation au changement climatique, visant à soutenir la productivité agricole, comme par exemple la différenciation des cultures (ex ante) et la réduction de la liquidité et des stocks, le recours aux crédits bancaires ou informels et la vente d’actifs fondamentaux (ex post).
Styles alimentaires La composition de la demande globale est un facteur déterminant de la durabilité future du système agricole
94 attention croissante envers la durabilité dans le pays industrialisés et en voie de dévéloppement
L’importance de choisir des modèles alimentaires durables : la Double Pyramide alimentaire et environnementale
Etant donné les changements qu’il est d’ores et déjà possible d’observer et qui vont s’intensifier dans un avenir proche (croissance économique et occidentalisation du régime alimentaire dans les Pays en voie de développement, ou diffusion de modèles plus sophistiqués de consommation de la part de larges couches de la population – voir Paragraphe 2.2), la future composition de la demande de biens alimentaires représente un facteur déterminant de la durabilité future du système agricole. L’impact sur l’environnement et la consommation des ressources naturelles (terre, eau, etc) associées aux différents choix en matière d’alimentation peuvent être extrêmement différents. Le Western diet et le régime méditerranéen, par exemple, diffèrent surtout en quantités de viande consommée : les modèles de consommation trop déséquilibrés à cause d’une consommation excessive de viande et de produits alimentaires d’origine animale peuvent en effet affecter négativement dans le temps la sécurité alimentaire mondiale. Pour la première fois dans l’histoire, l’action de gouvernance et d’orientation des modèles alimentaires qui tiennent compte d’un profil de durabilité sont en passe de devenir une variable décisive de politique économique. Cela est en train de se concrétiser dans les Pays développés, où il est impératif de faire face à un état d’urgence sanitaire liée à la diffusion de maladies métaboliques, cardio-circulatoires et tumorales dues à l’adoption de mauvaises habitudes alimentaires. Il s’agit cependant d’une question cruciale pour les pays en voie de développement aussi, du fait de son impact sur les équilibres du marché mondial des biens alimentaires. Par ailleurs, le choix de modèles alimentaires durables pour l’avenir permet de diminuer l’importance attribuée aux gains de productivité, qui influence à son tour les ressources naturelles et la durabilité environnementale. Dans ce but, le BCFN a élaboré et met à la disposition des décideurs un modèle, celui de la Double Pyramide Alimentaire et Environnementale, qui montre que les comportements alimentaires les plus favorables au maintien d’une bonne santé sont aussi les plus durables du point de vue de l’environnement. Ce modèle a été conçu pour les Pays occidentaux, mais, s’il était décliné suivant les différentes traditions et habitudes alimentaires, ses indications pourraient être efficaces pour tous les Pays. Après avoir exprimé une série de recommandations et d’indications politiques sur les facteurs structurels, nous allons offrir ci de suite aux décideurs politiques et institutionnels la contribution du BCFN sous forme de proposition quant aux quatre facteurs contingents sur lesquels il nous semble urgent d’intervenir pour mettre rapidement un frein à la croissance abrupte et incontrôlée des prix des denrées alimentaires et à la volatilité excessive de ces marchés.
Politiques commerciales Réduire les différentes formes de restriction commerciale, surtout les interdictions, les quotas et les taxes à l’exportation Comme nous l’avons vu au Paragraphe 2.8, l’imposition de barrières/aides commerciales représente un facteur de distorsion des dynamiques de l’offre et de la demande sur le marché international. Pendant la période 2008-2010, suite aux baisses escomptées des futures récoltes et à la hausse attendue du niveau international des prix, des Pays exportateurs de biens agricoles ont éliminé les aides à l’exportation (dans certains cas, ils ont même introduit des taxes à l’export) pour faire croître l’offre interne et limiter l’effet interne de la hausse mondiale des prix alimentaires. En même temps, des Pays importateurs ont adopté des politiques de protection (réduction ou élimination des droits de douane sur les denrées en entrée) pour garantir un niveau de stock suffisant afin de contenir l’augmentation des prix internes. Ces dynamiques sont en train de se reproduire depuis quelques mois et sont responsables de la nouvelle et rapide hausse des prix. Un des principaux défis auxquels la communauté internationale se trouve aujourd’hui confrontée concerne la nécessité de construire un système d’échanges commerciaux transparent, “responsable” et fondé sur des règles multilatérales qui garantissent l’accès à la nourriture au niveau mondial. Généralement, un moindre recours aux barrières à l’importation, des aides à l’exportation et d’autres restrictions commerciales sont souhaités. Il semble tout particulièrement nécessaire de : - réduire les outils de soutien de la demande interne qui causent des distorsions, surtout quand ils sont appliqués par les Pays développés ; - améliorer de manière significative l’accès au marché, en gardant des systèmes adéquats de protection pour les Pays en voie de développement, visant à améliorer leur efficience et leur compétitivité et à renforcer leur intégration sur les marchés internationaux ; - eliminer les aides à l’exportation en vue de créer des conditions de parité sur le marché international, en en augmentant ainsi l’efficience ; - rendre les aides humanitaires exemptes de toute restriction afin d’éviter la spéculation. Enfin, afin de maintenir la stabilité des prix au niveau régional3, la création d’une Autorité supranationale qui garantirait l’équilibre entre l’offre et la demande et un accès équitable à la nourriture à l’intérieur des différentes macro-régions serait envisageable. Compte tenu aussi des liens étroits entre les politiques d’approvisionnement, le stockage et les aides aux principales denrées alimentaires (illustrée au Chapitre 2), une réglementation du commerce par l’imposition de plafonds de sens opposé aux importations et aux exportations est souhaitable : - dans le cas des importations : afin d’éviter des politiques d’achat agressives de la part des Pays importateurs pendant les périodes d’incertitude4, l’Autorité à constituer pourrait dicter des limites volumétriques au-dessus desquels un impôt progressif directement proportionnel à la quantité serait appliqué. Cela contribuerait à limiter le phénomène et constituerait un supplément de recette à la disposition de l’Autorité, qui aurait pour tâche de le redistribuer aux Pays exportateurs afin de limiter l’effet d’inflation sur le niveau des prix et permettre d’adopter des politiques de conservation (augmenter le niveau des réserves ou aider les cultivateurs victimes d’évènements climatiques nocifs) sans toutefois réduire le flux d’exportations ; - dans le cas des exportations : la fixation d’un plafond volumétrique minimum en dessous duquel se déclencherait le mécanisme décrit précédemment serait souhaitable. Les recettes supplémentaires pourraient ensuite être redistribuées vers les Pays importateurs qui pourront investir les nouveaux capitaux en projets de R&D dans le domaine agricole, dans la constitution d’un système multilatéral de réserves alimentaires pour les Pays importateurs5 et dans l’implémentation de politiques ex-ante pour l’adaptation aux conditions climatiques locales.
les barrières/ aides commerciales représentent un facteur de distorsion des dynamiques de l’offre et de la demade sur le marché international
La construction d’un système d’échanges commerciaux fondés sur des règles multilatérales pour assurer l’accès à la nourriture au niveau mondial Réduire les outils de la demande interne Améliorer l’accès au marché Eliminer les aides à l’exportation Eviter la spéculation Garantir l’équilibre entre l’offre et la demande Imposition de plafonds de sens opposé aux importations et aux exportations
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
des actions visant à attenuer les effets du changement climatique
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Niveau de stocks
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Un lien entre la variation des stocks et l’évolution des prix des denrées alimentaires
Diffusion de bonnes pratiques agronomiques et de connaissances techniques et scientifiques
Constituer un système multilatéral de réserves de nourriture Accroître la transparence des marchés et les flux d’information
Au cours des dernières années, différents facteurs (voir au Paragraphe 2.3) ont poussé à un recours aux stocks accumulés au fil des années pour satisfaire la demande croissante de denrées alimentaires (dont la croissance a été plus rapide que celle de l’offre) et pour stabiliser les prix internes. Les analyses effectuées durant cette étude ont montré un lien très étroit entre la variation des stocks et l’évolution des prix des denrées alimentaires. En particulier, dans un horizon temporel suffisamment large, une réduction du rapport stockutilisation de céréales s’accompagne fondamentalement d’une hausse du niveau des prix ; au contraire, le prix tend à baisser dans le cas d’une augmentation du rapport stock-utilisation. Afin de modérer cet effet, l’adoption des mesures suivantes est proposée : - poursuivre la croissance de la productivité agricole, notamment dans les Pays en voie de développement, par la diffusion de bonnes pratiques agronomiques et de connaissances scientifiques et techniques, la réalisation d’infrastructures d’irrigation, de production, de transport et de stockage, l’augmentation des investissements publics en recherche et développement, etc. L’accroissement de la productivité agricole est une condition nécessaire pour obtenir le surplus de production qui permettrait de reconstituer les stocks ; - constituer un système multilatéral de réserves de nourriture, régionales et transfrontalières, afin d’accroître les marges d’élasticité du système alimentaire mondial. Il est donc nécessaire de favoriser la coordination des politiques de stockage au niveau international ; - accroître la transparence des marchés quant au partage d’informations sur l’offre, la demande, les stocks et les dynamiques d’import-export. Cette action non seulement contribuerait à atténuer le phénomène de la volatilité récente des prix alimentaires, mais – en liaison aux lignes directrices relatives à la constitution d’une Autorité supranationale pour le contrôle de l’équilibre entre l’offre et la demande – elle garantirait aussi la présence d’un système d’informations capable de collecter des données fiables et d’offrir aux acteurs des analyses et des bases statistiques. Pour soutenir les décisions des Gouvernements nationaux, il est particulièrement important de collecter des données concernant le niveau des stocks et la diffusion d’estimations de la demande et de l’offre par des mécanismes de prévision des volumes des récoltes.
Production des biocarburants Réduire l’aide à la production de biocarburants de première génération et en compétition avec les productions alimentaires au bénéfice de ceux de deuxième génération, augmenter les investissements dans les nouvelles technologies et parvenir à une plus grande ouverture commerciale dans ce secteur Le prix des denrées alimentaires apparaît étroitement lié à celui du pétrole
Réduire les politiques d’aide à la production et à la consommation de biocarburants de première génération
Au niveau international le prix des denrées alimentaires apparaît étroitement lié à celui du pétrole (voir au Paragraphe 2.7). En effet, les hausses du prix du pétrole rendent les biocarburants plus compétitifs et entraînent une plus grande demande au niveau international. En outre, puisque la plupart des biocarburants (de première génération) sont produits avec les mêmes intrants destinés à l’alimentation ou à l’élevage (céréales, canne à sucre, etc), cela déclenche une compétition entre le secteur de l’énergie et le secteur alimentaire pour l’utilisation des matières premières agricoles. Des variations du prix du pétrole et des politiques d’aide à la production de biocarburants sont ainsi responsables des épisodes de forte volatilité et des hausses des prix sur les marchés alimentaires (voir au Paragraphe 2.5). Par conséquent, il est nécessaire de : - il est souhaitable que les gouvernements (en particulier en Europe et aux Etats-Unis) réduisent de manière significative les politiques d’aide à la production et à la consom-
mation de biocarburants de première génération : étant produits par transformation de matières premières alimentaires, la plupart sont en concurrence directe – en termes de destination d’usage– avec les produits pour l’usage alimentaire et l’élevage ; - sans la suppression de ces aides, lorsque les marchés mondiaux sont sous pression et que les fournitures alimentaires sont réduites, les gouvernements devraient élaborer des plans d’urgence pour réglementer (du moins sur le court terme) les politiques stimulant la production et la consommation de biocarburants ; - il nous semble opportun de soutenir en parallèle les biocarburants de seconde génération, produits à partir de cultures qui ne sont pas en compétition, quant à l’usage des terres, avec les cultures à usage alimentaire, et de favoriser l’activité de recherche sur des nouvelles technologies pour la production de biocarburants, afin de répondre à la demande croissante d’énergie au niveau global et de réduire les effets sur le marché des matières premières agricoles ; - outre la limitation des aides, il est important aussi de favoriser l’ouverture des marchés internationaux, de manière à obtenir pour les biocarburants des conditions d’avantages économiques.
réglementer les politiques sur la production et la consommation des biocarburants Soutenir les biocarburants de seconde génération
Favoriser l’ouverture des marchés internationaux
Marchés financiers Réglementer la spéculation financière excessive sur les denrées alimentaires Les marchés des futures sont une partie intégrante du marché des denrées alimentaires et exercent deux fonctions importantes : ils facilitent la gestion de la volatilité des prix et contribuent à la formation du prix. Cependant, la crise financière globale des dernières années a conduit les investisseurs « non commerciaux » (fonds de retraite, banques, fonds souverains, etc) à augmenter les investissements dans les dérivés des denrées agricoles pour diversifier leur portefeuille (voir au Paragraphe 2.10). L’augmentation de la part de contrast aux mains d’investisseur non commerciaux pourrait avoir provoqué des phénomènes spéculatifs, typiques d’autres biens non alimentaires, comme le pétrole. Bien que le rôle effectif de ce phénomène sur le niveau de prix agricoles soit largement débattu, la spéculation financière dans le marché des denrées agricoles pourrait en avoir amplifié la volatilité sur le court terme. Sans vouloir diaboliser l’activité des intermédiaires financiers, des mesures permettant d’amener plus de transparence, d’ordre et d’équilibre sur les marchés, sans pour autant en entraver l’action, peuvent être envisagées : - d’un côté, afin de permettre aux Autorités de Réglementation d’identifier des anomalies des cours financiers et de prévenir de possibles comportements spéculatifs, le flux d’informations et la transparence des opérations hors bourse (OTC) devraient être améliorés par un monitorage de l’activité des spéculateurs (grâce à un système de reporting de transactions/ positions et d’obligations d’enregistrement des acteurs) et par l’imposition éventuelle d’un plafond maximum à leurs activités. Des mécanismes de diversification entre les acteurs commerciaux et non commerciaux, pourraient par exemple être introduits, de manière à imposer des limites à ceux qui agiraient dans un but spéculatif pour prévenir des “paris” excessifs sur les mouvements des prix tout en laissant au marché “réel” sa liberté d’action ; - de l’autre côté, il semble souhaitable de favoriser l’introduction de règles6 pour la définition d’un périmètre d’action des intermédiaires financiers sur le marché des denrées agricoles, vers une harmonisation progressive des échanges sur ces marchés. Comme le rapporteur des Nations Unies pour le Droit à la Nourriture, Olivier De Schutter l’a récemment souligné, lors du Sommet des Ministres de l’Agriculture du G-20 à Paris en juin 2011, les Etats-Unis légifèrent en matière de dérivés financiers depuis environ un an et le G-20 pourrait encourager les autres puissances économiques à agir dans cette même direction.
Le rôle croissant des investisseur « non commerciaux » sur le marché des denrées alimentaires
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Création d’un système multilatéral de réserves alimentaires et amélioration de la transparence sur les flux et les stocks
97 La « financiarisation » des denrées alimentaires pourrait avoir provoqué des phénomènes spéculatifs Amener une plus grande transparence des marchés financiers Une meilleure information et une plus grande transparence sur les opérations Hors bourse
Méchanismes de diversification entre les différents types d’investisseurs
William Albert Allard/National Geographic Stock
notes et RĂŠfĂŠrences
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3 D’après le FMI, les marchés émergents sont des nations socialement et économiquement en croissance où un processus d’industrialisation se diffuse actuellement. On a recensé environ 28 marchés émergents, parmi lesquels la Chine et l’Inde où vivent 70% de la population des marchés émergents. 4 Selon une évaluation des Nations Unies. 5 Ces dernières années, la population urbaine dans le monde s’est accrue beaucoup plus vite que la population rurale et, d’après les Nations Unies, en 2050, 69,6% de la population mondiale vivra en ville. 6 En Chine le nombre de vaches laitières est passé de 5 millions environ en 2000 à 15 millions en 2011, soit une augmentation de 10% en moyenne par an.
ChAPITre 1
7 On signale, par exemple, que dans la Bible, la Genèse (41, 48-49) exalte la ruse de Joseph, qui après avoir expliqué son rêve prémonitoire au Pharaon, lui conseille d’accumuler des stocks de blé pendant les sept années d’abondance pour qu’ils puissent être distribués au peuple pendant les sept années de famine suivantes.
1 Paris, les 22-23 juin 2011.
8 Le niveau des stocks est toujours difficile à évaluer, puisque les données se fondent sur des déclarations spontanées de chaque nation.
2 Le plan d’action élaboré par les Ministres de l’Agriculture du G-20 sera soumis aux leaders des différents Pays. Son approbation devrait avoir lieu en novembre 2011.
4 Food Outlook – Global Market Analysis, FAO, juin 2011.
9 Les États-Unis entre 1930 et 1970 ont favorisé des projets de soutien du prix du blé en utilisant les soi-disant “stocks tampon”. Les stocks-tampons ont joué un rôle fondamental : ils ont assuré un équilibre entre l’offre et la demande. Dans le cas d’une demande excessive, le gouvernement avait recours aux stocks pour stabiliser le prix, mais si l’offre était exagérée, le produit excédent était stocké en vue d’une utilisation future. Voir aussi : Wright B., International Grain Reserves and their Instruments to Adress Volatility in Grain Markets, The World Bank, Policy Research Working Paper.
5 Price Volatility in Food and Agricultural Markets: Policy Responses, FAO, IFAD, FMI, OCSE, UNCTAD, WFP, World Bank, WTO, IFPRI et UN HLTF, mai 2011.
10 Le ratio stock-utilisation est le quotient entre le niveau des stocks et la consommation d’une marchandise pendant une année.
6 La déviation standard est un indicateur de la volatilité : elle mesure l’écart moyen du prix par rapport à son cours dans le moyen-long terme.
11 FAO, 2010.
3 Les variables qui influencent la dynamique des prix des matières premières agricoles seront analysées plus en détail dans le chapitre suivant.
7 Les variables qui influencent d’une façon directe et indirecte le prix des matières premières alimentaires seront analysées de manière approfondie dans le chapitre suivant. 8 Elle représente les attentes du marché sur la volatilité future des prix et correspond au pourcentage de l’écart attendu de variation du futur prix d’une matière première (après six mois) d’un actif sousjacent. En général, une augmentation de la volatilité implicite montre que les conditions du marché et les événements imprévus produisent une augmentation de l’incertitude des opérateurs de marché. 9 Behind Concerns about Volatility Lie Concerns about Price Levels and behind both, Lie Concerns about Food Security, in Price Volatility in Food and Agricultural Markets: Policy Responses, FAO, IFAD, FMI,OCSE, UNCTAD, WFP, World Bank, WTO, IFPRI et UN HLTF, mai 2011. 10 Price Volatility in Food and Agricultural Markets: Policy Responses, FAO, IFAD, FMI,OCSE, UNCTAD, WFP, World Bank, WTO, IFPRI e UN HLTF, mai 2011 ; Agricultural Outlook 20112020, OECD-FAO, juin 2011. 11 La transmission des variations des prix se vérifie d’abord dans les zones urbaines et après dans les zones rurales puisque ces dernières se trouvent souvent dans une situation d’isolement par rapport aux événements extérieurs.
ChAPItre 2 1 Pour mesurer le niveau des prix, on utilisera comme référence l’Indice des Prix des produits alimentaires et parfois on n’utilisera comme référence que l’Indice FAO des prix des céréales. 2 Agricultural Outlook 2010-2020, OECD-FAO.
12 Le FAO a évalué, d’après des calculs, qu’un tiers environ de la nourriture produite pour la consommation humaine est perdue par les distributeurs ou les consommateurs (surtout dans les Pays développés), ou qu’elle est perdue pendant les processus de production (surtout dans les Pays en voie de développement) : il s’agit au total de 1,3 milliard environ de tonnes. 13 Anuradha Mittal, The Oakland Institute. 14 Le taux de croissance enregistré au cours des dernières années a été, en moyenne, toujours supérieur au changement démographique. Les données FAO montrent que 7 milliards environ de personnes qui vivent aujourd’hui dans le monde ont une disponibilité d’aliments supérieure de 15% par rapport aux 4 milliards d’habitants des années 1980. 15 Cette valeur est encore plus élevée dans les Pays à moyen et bas revenu (elle atteint 95% dans certains Pays en voie de développement) ; alors que dans les pays développés, le poids de l’industrie dans les dépenses totales est en grande partie prédominante (59%). 16 D’après des évaluations sur une très longue durée, en 2050 l’agriculture représentera 90% de la consommation d’eau au niveau global. Voir : World Water Assessment Program, 3rd United Nations World Water Development Report : Water in a Changing World, UNESCO. 17 WBCSD, Facts and Trends – Water. 18 « Land which due to natural processes or human activity is no longer able to sustain properly an economic function and/or the original ecological function » texte tiré de Land Degradation Assessment in Drylands (LADA ), FAO-UNEP, 2008. 19 Land Degradation Assessment in Drylands (LADA), FAO-UNEP, 2008 ; Global Assessment of Human-induced Soil Degradation (GLASOD), ISRIC, 2008. 20 Biggelaar A.H. et al., 2004. 21 Biggelaar A.H. et al., 2004 ; Henao J., C.A. Baanante, 2006.
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
NOTEs et RéFérences
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22 Calculé sur la perte de 75 milliards de tonnes de sol causée par l’érosion.
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24 L’Union Européenne, par exemple, dans le cadre de la Stratégie 2020, s’est fixé un objectif : en 2020, la quantité d’énergie produite à partir des sources renouvelables par rapport à la consommation finale d’énergie doit correspondre à 20% au moins du total. En particulier, la Directive européenne 2009/28/CE 23 avril 2009 fixe à 10% l’utilisation des énergies renouvelables pour les transports, en mettant l’accent surtout sur le remplacement progressif des biocarburants obtenus à partir des cultures alimentaires par des biocarburants de seconde génération (produits à partir des déchets, résidus, matières cellulosiques d’origine non alimentaire et matières lignocellulosiques). 25 Le biocombustible est un type de combustible qui dérive indirectement des biomasses et comprend les carburants liquides (éthanol et biodiesel) et différents biogaz. L’éthanol est obtenu par la fermentation des sucres contenus dans les matières végétales, surtout du sucre et de l’amidon contenus dans les céréales. Il peut être utilisé comme combustible sous sa forme pure, même si généralement il sert d’additif à l’essence : il augmente son indice d’octane et réduit les émissions. Le biodiesel produit à partir d’huiles végétales, de graisses animales ou d’huiles recyclées, peut lui aussi sous sa forme pure être utilisé comme combustible (le moteur diesel a été inventé en utilisant de l’huile de colza), mais il sert également, comme l’éthanol, surtout d’additif aux combustibles diesel traditionnels parce qu’il permet de réduire le niveau de monoxyde de carbone et d’hydrocarbures.
37 Höök H., R. Hirsch, K. Aleklett, Giant Oil Field Decline Rates and Their Influence on World Oil Production, dans “Energy Policy”, 37, 2009. 38 Aleklett K., et al., The Peak of the Oil Age: Analyzing the World Oil Production Reference Scenario, dans World Energy Outlook 2008, et dans “Energy Policy”, 38, 2010. 39 World Energy Outlook 2010, International Energy Agency (IEA), 2010. 40 Pour ce qui concerne les États-Unis, 9 récessions américaines sur 10 à partir de 1945 (sauf celle de 1960) ont été précédées par une augmentation sensible du prix du pétrole. Voir : Balke S., S. P. A. Brown, M.K. Yücel, Globalization, Oil Price Shocks and U.S. Economic Activity, Federal Reserve Bank of Dallas, 2004. 41 La production totale de pétrole des Pays OPEP, d’après les évaluations de l’Agence Internationale de l’Énergie, augmentera sans cesse jusqu’en 2035 et dépassera 50% de la production globale. Voir : World Energy Outlook 2010, International Energy Agency (IEA), 2010. 42 Les termes de l’échange dérivent du rapport entre la variation des prix à l’exportation et la variation des prix à l’importation dans un délai de temps précis. 43 Krugman P.R., M. Obstfeld, Teoria e politica del commercio internazionale, Edizioni Pearson, 2007. 44 Les exemples ont été tirés du document USDA, Why Have Food Commodity Prices Rise Again, juin 2011.
26 United States Department of Agricolture (USDA), 2010.
45 Arezki R., M. Bruckner, Food Prices and Political Instability, FMI Working paper, mars 2011.
27 Les États-Unis ont établi une aide de 0,51 $ pour chaque gallon d’éthanol, contre un droit de douane de 0,54 $ pour son importation, et une mesure identique de protection a été adoptée également pour les producteurs de biodiesel. Le Congrès a d’abord fixé un plafond pour la production de 7,5 milliards de gallons de biocarburants dans la période comprise entre 2005 et 2012. Le US Renewable fuel Standard (RFS-2) a fixé des objectifs à atteindre en termes de volume pour les différents types de biocombustibles : d’ici 2020, 1 milliard de gallons de biodiesel, 3,5 milliards de biocombustibles de seconde génération et 15 milliards de gallons de bioéthanol seront consommés. Enfin, la réglementation actuelle des États-Unis établit que sur les territoires nationaux, d’ici 2020, la production d’éthanol doit redoubler et celle de biodiesel tripler. L’Europe aussi a établi un droit de douane de 0,192 ¤/litre sur l’importation d’éthanol et un impôt ad valorem de 6,5% pour le biodiesel ; elle a réduit considérablement la fiscalité pour les producteurs et a établi des standards de production rigoureux.
46 Slayton T., Rice Crisis Forensics: How Asian Governments Caressly set the World Rice Market on Fire, Center for Global Development.
28 Agricultural Outlook 2011-2020, OECD-FAO. 29 Agricultural Outlook 2011-2020, OECD-FAO. 30 Agricultural Outlook 2011-2020, OECD-FAO. 31 Brittaine R., NeBambi Lutaladio, Jatropha : A Smallholder Bioenergy Crop The Potential for Pro-Poor Development, Cambridge University Press, 2010. 32 Lobell D., W. Schlenker, J. Costa-Roberts, Climate Trends and Global Crop Production Since 1980, dans “Science”, mai 2011. 33 La Niña est un phénomène climatique fréquent qui se vérifie dans l’Océan Pacifique central en décembre et en janvier, en moyenne tous les cinq ans, mais dont la périodicité varie entre trois et sept ans. La Niña cause des inondations, la sécheresse et d’autres perturbations qui changent à chaque manifestation de ce phénomène : les Pays en voie de développement situés le long des côtes de l’Océan Pacifique qui dépendent fortement de l’agriculture et de la pêche ont été les plus frappés. 34 Voir à ce propos : Burke M., D. Lobell, Food Security and Adaptation to Climate Change: What Do We Know?, dans “Advances in Global Change Research”, 37, 2010. 35 Voir, entre autres : Lobell D.B. et al., Prioritizing Climate Change Adaptation Needs for Food Security in 2030, dans “Science”, 2008, pp. 319, 607.
47 Where are food prices heading?, Deutsche Bank Research, mars 2011. 48 Les produits dérivés peuvent, en effet, être négociés de façon standardisée et transparente sur des places boursières (par exemple les produits dérivés listés), ou être négociés de gré à gré (OTC) de façon bilatérale entre deux contreparties (par exemple entre une entreprise et une institution bancaire). 49 Les grands fonds spécialisés dans les contrats sur les marchandises détiennent désormais environ 25-35% de tous les contrats à terme agricoles et, avec d’autres investisseurs, sont devenus une source importante de liquidités pour le marché. Voir aussi : FAO, Price Surges in Food Markets: How Should Organized Futures Markets be Regulated ?, Policy Brief 9, juin 2010. 50 Un fond indiciel de marchandises est un produit financier qui offre aux investisseurs la possibilité de détenir une position courte sur le marché des matières premières sans aucun échange physique. Ces fonds sont créés et se multiplient parce qu’ils permettent un accès facile au marché sans disposer d’informations spécifiques sur chaque marchandise. 51 Robles M., M. Torero, J. Von Braun (éds.), When Speculation Matters, IFPRI (International Food Policy Research Institute) Issue Brief 57, février 2009. 52 Le KCBT est spécialisé dans la négociation de contrats pour le blé dur rouge d’hiver, l’un des ingrédients principaux du pain. Les deux autres marchés importants des futures (contrats à terme) sur le blé sont le CBOT (Chicago Board of Trade) – CME (Chicago Mercantile Exchange), qui cote le Soft Red Winter, et le MGEX de Minneapolis, spécialisé dans le Hard Red Spring. 53 Pour approfondir, voir aussi les analyses présentées dans: Robles M., M. Torero, J. Von Braun (éds.), When Speculation Matters, IFPRI (International Food Policy Research Institute) Issue Brief 57, février 2009. 54 On définit “position” l’ensemble des investissements d’un sujet utilisant le capital disponible. Elle est “ouverte” si les fluctuations du prix des marchandises provoquent des variations dans l’évaluation du portefeuille ; elle est “couverte” si la hausse de la valeur de certains composants du portefeuille provoque la diminution de la valeur des autres, par conséquent le patrimoine dans son ensemble ne change pas.
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
23 Le rendement des céréales, calculé en kg par hectare de terrain, comprend : blé, riz, maïs, orge, avoine, seigle, millet, sorgo, sarrasin et des céréales mixtes. Les données sur la production des céréales ne se réfèrent qu’aux récoltes de blé sec.
36 Nelson G., et al. (éd), Food Security, Farming, and Climate Change to 2050: Scenarios, Results, Policy Options, International Food Policy Research Institute (IFPRI), 2010.
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56 Il s’agit d’un type d’opérateurs — qu’ils soient commerciaux (par exemple des fonds d’investissement et des fonds de pension) ou non commerciaux (les spéculateurs) – qui ont une position longue. 57 Par exemple, en 2006, le CME Group de Chicago a acheté Swapstream, une plateforme de négociation électronique située à Londres. En 2007, plus d’un milliard de contrats ont été échangés par voie électronique dans une seule année par le CME Group.
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58 Voir, entre autres : Robles M., M. Torero, J. Von Braun (éds.), When Speculation Matters, IFPRI (International Food Policy Research Institute) Issue Brief 57, février 2009; Irwin S.H., D.L. Good, P. Garcia, E.L. Kunda (éds.), Comments on Permanent Senate Subcommittee on Investigation Report “Excessive Speculation in the wheat market”, University of Illinois – Department of Agricultural and Consumer Economics, juillet 2009.
Associazione Alessandro Bertola, Per una politica dei sistemi agricoli e alimentari dell’UE, 2010.
59 Pour approfondir le sujet de la naissance et les choix stratégiques réalisés par le Chicago Board of Trade, nous vous conseillons de lire le document : Reinhardt F., J. Weber (éds.), CME Group, Harvard Business School, Case 711-005, 26 avril 2011.
Balke N.S., S.P. Brown, M.K. Yücel, Globalization, Oil Price Shocks and U.S. Economic Activity, Federal Reserve Bank of Dallas, 2004.
60 CME Group est aujourd’hui non seulement la bourse financière la plus grande et la plus diversifiée, mais c’est aussi le marché des contrats à terme et d’option le plus grand au monde. En 2009, CME Group, a réalisé des recettes de 2,6 milliards de dollars et a géré au total plus de 2,5 milliards de contrats pour une valeur totale de 1.000 trillions de dollars. 61 Indice FAO des prix des produits alimentaires. 62 De nombreux observateurs situent le début de cette période au mois de décembre, après le suicide de Mohamed Bouazizi, l’activiste tunisien devenu le symbole des émeutes du peuple en Tunisie de 2010-2011. Il s’est immolé par le feu pour protester contre les conditions économiques de son propre Pays. 63 Jones S., J. Mazo, Global Warming and the Arab Spring, avril-mai 2011.
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ChAPITre 3 1 Accesso al cibo: sfide e prospettive, mai 2011; Water economy, avril 2011; Doppia Piramide 2011: alimentazione sana per tutti e sostenibile per l’ambiente, juillet 2011; Cambiamento climatico, agricoltura e alimentazione, juin 2009. 2 La consommation d’eau verte a un fort impact sur l’équilibre de l’environnement par rapport à celle de l’eau bleue qui, au contraire, constitue la ressource en eau la plus stratégique et la plus importante. 3 Par “régional” on entend un groupe de Pays limitrophes avec des caractéristiques agricoles hétérogènes, ce qui permet d’éviter la coexistence de groupes d’États avec les mêmes intérêts commerciaux. 4 Pensez, par exemple, aux aides à la consommation intérieure qui viennent d’être lancées par l’Algérie (premier importateur de blé du monde), qui a acheté de grandes quantités de blé à des prix élevés et les a revendues ensuite à des prix plus bas. 5 Ce qui a été fait, par exemple, par l’ASEAN, avec un stock commun de riz de 85.000 tonnes. 6 Dans l’état actuel, certains opérateurs européens du marché physique et certains produits dérivés de matières premières ne font l’objet d’aucun contrôle ni d’aucune réglementation, puisqu’ils bénéficient de dérogations (et de lacunes) des directives MIFID (sur les marchés des instruments financiers) et MAD (sur les abus de marché).
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Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
Le coût de la nourriture et la volatilité des marchés agricoles : les variables impliquées
55 Le marché des futures est caractérisé par la correspondance, à n’importe quel moment, du nombre des contrats achetés et celui des contrats vendus : il n’existe qu’une contrepartie qui gère le marché et assure, si les garanties économiques des opérateurs sont appropriées, que tous les engagements pris soient respectés.
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