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C.E.N. BULLETIN « EUROPEAN CENTRE FOR NUMISMATIC STUDIE S » « CENTRE EUROPÉEN D’ÉTUDE S NUMISMATIQUE S » VOLUME 49

N° 3

Message du Président – Les nouveaux statuts du CEN

C

réé en 1964, le cercle d’études Numismatiques est devenu une « association sans but lucratif » en 1968. Un sérieux rafraîchissement des statuts s’avérait nécessaire : la version vieille d’un demi-siècle ne permettait plus une gestion efficace de nos activités. Une équipe placée sous la houlette de J. Moens et G. Testa a travaillé pendant plusieurs mois afin de proposer des nouveaux statuts qui ont été adoptés lors de notre assemblée générale extraordinaire du 27 octobre 2012. Il nous a semblé utile de faire connaître à tous nos membres cette nouvelle version publiée au mb du 16/xi/2012. Article 1 – Dénomination et siège L’association porte la dénomination « Cercle d’Études Numismatiques », en abrégé « CEN ». Cette dénomination peut, sur simple décision du conseil d’administration, être complétée d’un sous-titre en français et éventuellement dans une autre langue. Le siège de l’association est établi au Blvd. de l’Empereur, 4, 1000 Bruxelles, arrondissement judiciaire de Bruxelles. Article 2 – But et moyens d’action L’association a pour but l’étude de la numismatique et le développement de sa connaissance dans le sens le plus général. Ce but peut être réalisé de toutes manières et notamment, sans que l’énu-

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SEPTEMBRE – DÉCEMBRE 2012 mération soit limitative, par la création de cercles spécialisés ou régionaux, la publication de périodiques ou d’ouvrages à l’intention de ses membres, l’organisation de cours, conférences, congrès ou expositions ou la participation à des manifestations similaires organisées par d’autres, la création de prix ou l’octroi de subsides. L’association peut faire tous actes quelconques se rattachant directement ou indirectement à son but ou pouvant en amener le développement ou en faciliter la réalisation. Elle peut prêter tout concours et s’intéresser de toutes manières à tous groupements, associations ou organismes ayant un but analogue ou connexe ou pouvant aider à la réalisation ou au développement de son but. Dans la poursuite de ses activités, l’association veille à maintenir une tonalité européenne. Article 3 – Durée L’association est constituée pour une durée illimitée. Article 4 – Membres L’association se compose de membres effectifs et de membres adhérents. Leur nombre n’est pas limité. Celui des membres effectifs ne peut être inférieur à quatre. Les membres effectifs sont des personnes physiques, majeures d’âge, qui souscrivent aux objectifs de l’association et

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expriment le souhait de contribuer activement à leur réalisation. L’assemblée générale définit les critères d’appartenance à la catégorie des membres effectifs (tels que participation aux activités, études, publications, support financier, etc.). Le conseil d’administration se prononce seul sur les demandes d’admission comme membre effectif. Seuls les membres effectifs, en ordre de cotisation, participent à l’assemblée générale en y disposant du droit de vote et peuvent être nommés en tant que membres du conseil d’administration. Les membres adhérents sont les personnes physiques ou morales qui partagent les objectifs de l’association et souhaitent en suivre les activités dans leurs différentes formes, notamment au travers de l’une des publications périodiques éditées par l’association à l’intention de ses membres. Leur admission n’est soumise à aucune condition particulière. Si les conditions définies pour les membres effectifs ne sont pas remplies au moment de sa demande, le candidat sera admis comme membre adhérent ; il pourra introduire de nouvelles demandes d’admission comme membre effectif au début de chaque période de douze mois à dater de sa première demande. L’admission comme membre effectif ou adhérent dans l’association implique sans réserve le respect des présents statuts et de toutes les décisions régulièrement prises ou à prendre conformément aux statuts. Les membres effectifs et adhérents n’encourent vis-à-vis des tiers aucune obligation personnelle du chef des engagements sociaux. Article 5 – Perte de qualité de membre La qualité de membre effectif ou adhérent de l’association se perd par décès, 74

dissolution de personne morale, démission ou exclusion. Un membre effectif ou adhérent démissionnaire, sortant ou exclu ou les ayants droit d’un membre effectif ou adhérent déﬔnt n’ont aucun droit à faire valoir sur l’avoir social. Ils ne peuvent exiger de relevé ou de reddition de compte. Les cotisations payées ne sont en aucun cas restituées. Article 6 – Démission d’un membre Tout membre effectif ou adhérent est libre de se retirer de l’association. La démission doit être adressée par écrit au siège de l’association. Elle ne produit d’effet, quant à la cotisation et aux obligations du démissionnaire, qu’à l’expiration de l’année au cours de laquelle elle aura été donnée. Peut être déclaré démissionnaire le membre effectif ou adhérent qui, nonobstant trois rappels, ne paie pas les cotisations dont il est débiteur. Le conseil d’administration se prononce souverainement sur les cas de défaut de paiement persistant. Article 7 – Exclusion d’un membre Peut être exclu de l’association, le membre effectif ou adhérent qui se rend coupable d’un manquement grave aux obligations qui lui incombent en qualité de membre ou qui faillit aux lois de l’honneur et de la probité. Le conseil d’administration peut élaborer un règlement d’ordre intérieur et un règlement déontologique ; ces règlements n’entrent en vigueur qu’après avoir été approuvés par l’assemblée générale ; les infractions graves à ces règlements peuvent justifier l’exclusion. L’exclusion d’un membre effectif ou adhérent est proposée par le conseil d’administration, à la majorité simple des voix des administrateurs présents. Le membre intéressé est préalablement

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invité à présenter ses moyens de défense. La décision lui est notifiée par lettre recommandée. Il peut prendre son recours devant l’assemblée générale qui statue souverainement à la majorité des deux tiers des membres présents. S’il s’abstient de prendre ce recours dans la quinzaine qui suit l’envoi de la lettre recommandée, il est censé accepter son exclusion telle que proposée par le conseil d’administration. Lorsque le conseil d’administration estime devoir proposer l’exclusion d’un membre effectif ou adhérent, il peut décider d’inviter préalablement le membre en cause à présenter sa démission. L’association, ses mandataires et ses membres sont exonérés de toute responsabilité en raison des dommages qui pourraient résulter directement ou indirectement de l’exclusion prononcée conformément aux statuts. Article 8 – Recettes Les recettes de l’association se composent : ▪

des cotisations que les membres ont l’obligation de payer annuellement ;

des dons ;

des subventions qui peuvent lui être accordées ;

des produits financiers issus de l’organisation d’événements, de la réalisation d’actions de communication, de l’acquisition par des tiers de publications éditées par l’association à l’intention de ses membres ;

d’une manière générale, de toute ressource dont l’association peut légalement disposer.

Article 9 – Cotisations Le montant des cotisations est précisé dans un tarif qui tient compte des publications périodiques de l’association qu’un membre effectif ou adhérent sou-

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haite recevoir, étant entendu que la qualité de membre effectif ou adhérent comporte la réception d’au moins une des publications périodiques éditées par l’association. Ce tarif sera élaboré par le conseil d’administration en appliquant les modalités fixées dans un règlement d’ordre intérieur approuvé par l’assemblée générale. Les cotisations imposées ne peuvent dépasser en aucun cas la somme de 200 euros par an, par périodique et par membre effectif ou adhérent. Les cotisations sont payables à l’avance et dues pour l’année entière quelle que soit la date d’entrée ou de sortie du membre. Toutefois, le conseil d’administration peut admettre des dérogations en faveur des nouveaux membres effectifs ou adhérents qui demandent leur admission au cours de l’année sociale. L’acquisition de certaines publications éditées par l’association et la participation à certaines activités organisées ou co-organisées par l’association peuvent être subordonnées au paiement d’une contribution particulière à titre de contribution aux frais. Article 10 – Conseil d’administration L’administration de l’association est confiée à un conseil d’administration nommé en son sein et révocable par l’assemblée générale des membres à la majorité simple ; celui-ci est composé de trois membres au moins. La fonction d’administrateur n’est pas rémunérée ; seuls les frais réellement encourus dans l’exécution de son mandat seront remboursés. Les administrateurs sont nommés pour quatre ans ; leur mandat est renouvelable. Les administrateurs élisent parmi eux un président, un trésorier et un secrétaire ; ces fonctions ne sont pas cumu75


lables. Le conseil d’administration peut aussi créer en son sein d’autres fonctions qu’il définira. Le président, le secrétaire, le trésorier, ainsi que, le cas échéant, le(s) vice-président(s) du conseil d’administration portent les mêmes titres et exercent les mêmes fonctions pour l’assemblée générale et l’association. En cas d’absence du président ou à sa demande, les administrateurs présents et représentés peuvent désigner entre eux un président de séance pour la durée de la réunion. Le conseil d’administration peut aussi confier à n’importe lequel de ses membres d’autres fonctions qu’il définira ou charger un de ses membres de missions qu’il déterminera. En cas de vacance d’un poste d’administrateur, le conseil peut pourvoir à son remplacement par un membre effectif jusqu’à la prochaine assemblée générale, laquelle décidera de confirmer ou non cette désignation pour la durée du mandat restant à couvrir. Est considéré comme vacant tout poste d’administrateur soit ouvert par l’assemblée générale sans qu’elle n’y ait désigné un titulaire, soit libéré définitivement, pour quelque raison que ce soit, par son titulaire. Le conseil d’administration a les pouvoirs les plus étendus pour la réalisation du but de l’association et la gestion de celle-ci. Ainsi, tout ce qui n’est pas expressément réservé à l’assemblée générale par la loi ou les statuts est de la compétence du conseil d’administration. Il prépare les travaux de l’assemblée générale. Le conseil d’administration a dans sa compétence tous les actes relevant de l’administration sociale dans le sens le plus large. Il peut notamment et sans que cette énumération soit limitative, faire et recevoir tous paiements et exiger ou donner quittance ; faire et recevoir tous dépôts ; accepter et recevoir 76

tous legs et donations; contracter tous emprunts, avec ou sans garantie ; consentir et accepter tous cautionnements et subrogations ; contracter et effectuer tous prêts et avances ; renoncer à tous droits obligationnels ou réels, ainsi qu’à toutes garanties réelles ou personnelles ; stipuler l’exécution forcée ; dispenser le conservateur des hypothèques de prendre inscription d’office ; donner mainlevée, avant ou après paiement, de toutes inscriptions, saisies, ou de tous autres empêchements ; plaider, tant en qualité de demandeur que de défendeur, devant toutes les juridictions et instances extra-judiciaires, exécuter ou faire exécuter tous jugements, contrats, conventions et accords ; transiger, compromettre. Les actes qui engagent l’association autres que ceux de gestion journalière sont signés, à moins d’une délégation spéciale du conseil, par deux administrateurs qui n’ont pas à justifier vis-à-vis des tiers des pouvoirs donnés à cette fin par le conseil d’administration. Les actes de gestion journalière sont valablement accomplis par un administrateur ou par la personne ayant reçu à cette fin délégation du conseil d’administration. Les actions judiciaires, tant en demandant qu’en défendant, sont intentées ou soutenues au nom de l’association par le conseil d’administration, poursuites et diligences du président ou de deux administrateurs. Le conseil d’administration se réunit sur convocation du président ou de deux administrateurs aussi souvent que l’intérêt de l’association l’exige. Les décisions sont prises à la majorité des voix ; en cas de partage, le président peut déclarer sa voix prépondérante. Les abstentions ne sont pas prises en compte pour le calcul de la majorité.

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Tout administrateur empêché d’assister à une séance peut donner mandat à un autre administrateur.

L’assemblée générale délibère suivant les règles établies par les articles 7 et 8 de la loi du 2 mai 2002.

Le président peut inviter ou autoriser toute personne à participer, à titre consultatif, ordinairement ou exceptionnellement, aux travaux du conseil d’administration ou à certains d’entre eux, à condition d’en avoir préalablement averti les autres administrateurs. Tout autre administrateur peut le faire après concertation préalable avec le président et dans les mêmes conditions.

Sauf dans les cas prévus par la loi, l’assemblée générale peut délibérer sur les points qu’elle aura décidé en début de séance d’ajouter à l’ordre du jour.

Les délibérations sont constatées par rapports inscrits dans un registre ad hoc et signés par le président et le secrétaire et par les autres administrateurs qui le désirent, tous pour autant qu’ils aient assisté à la réunion. Article 11 – Assemblée générale L’assemblée générale se compose des seuls membres effectifs et détient le pouvoir souverain de l’association. Le conseil d’administration peut inviter ou autoriser toute personne à participer, à titre consultatif, ordinairement ou exceptionnellement, aux travaux de l’assemblée générale ou à certains d’entre eux, à condition de l’avoir mentionné sur la convocation. Sont réservées à la compétence de l’assemblée générale : 1) les modifications aux statuts, 2) la nomination et la révocation des administrateurs, 3) l’approbation des comptes et des budgets, 4) la dissolution volontaire de l’association, 5) l’approbation des règlements d’ordre intérieur ou déontologique, 6) les exclusions de membres, conformément à l’article 7 des présents statuts.

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Sauf dans le cas où la loi ou les statuts en disposent autrement, les décisions peuvent être prises si au moins quatre membres effectifs sont présents ou représentés. Si le quorum nécessaire n’est pas atteint, une seconde réunion convoquée au moins quinze jours d’avance délibérera valablement, quel que soit le nombre de voix présentes ou représentées, sur les points qui, pour cette raison, n’ont pu être délibérés. Tout membre effectif a l’obligation de signaler quand ses intérêts personnels pourraient être directement ou indirectement impliqués dans une décision de l’assemblée générale et ne pourra pas participer au vote de cette décision, les conditions du quorum étant alors adaptées en conséquence. L’assemblée générale ordinaire a lieu chaque année au cours du premier semestre de l’année civile, au siège social à moins qu’il n’en soit décidé autrement par le conseil d’administration. Des assemblées extraordinaires peuvent être convoquées à tout moment lorsque le conseil d’administration en ressent la nécessité ou lorsqu’un cinquième des membres effectifs en fait la demande. Tout point présenté par écrit, signé d’un vingtième au moins des membres effectifs, et transmis au président par courrier recommandé au moins deux semaines avant la réunion, sera porté à l’ordre du jour. Les convocations contenant l’ordre du jour établi par le conseil d’administration, sont signées par le président et un autre administrateur, et sont adressées à leurs destinataires par pli non recom77


mandé, par fax ou par courrier électronique, au moins dix jours francs avant la réunion. L’assemblée est présidée par le président ou, en cas d’empêchement de celui-ci, par un président de séance désigné par les administrateurs présents et pour la durée de la réunion. Tout membre effectif en ordre de cotisation a le droit de participer à l’assemblée générale, soit en personne, soit en donnant procuration à un mandataire, membre effectif lui-même, qui assiste à cette assemblée générale. Le nombre de procurations par mandataire n’est pas limité. Le vote a lieu au scrutin secret pour les élections, les révocations et les questions de personne. Les décisions sont consignées dans des rapports qui, après révision par le conseil d’administration, sont inscrits dans un registre ad hoc, conservé au siège de l’association. Ces rapports sont signés par le président, le secrétaire, les autres administrateurs présents et les membres qui le désirent, tous pour autant qu’ils aient assisté à la réunion. Tout membre effectif ou adhérent de l’association peut en prendre connaissance ; des tiers pouvant justifier d’un intérêt légitime ne peuvent le faire qu’avec l’autorisation du président de l’association ou d’un administrateur désigné par lui. Les extraits sont signés par le président et le secrétaire ou par deux administrateurs. Article 12 – Comptabilité et vérification des comptes L’année sociale commence le 1er janvier et finit le 31 décembre. Le compte des recettes et des dépenses au 31 décembre est dressé par le trésorier et arrêté par le conseil d’administration, en distinguant les recettes et dépenses relatives au fonctionnement général et à chaque publication ou activité.

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L’assemblée générale désigne en dehors du conseil un ou plusieurs vérificateurs aux comptes. Le compte de l’exercice écoulé, après rapport du ou des vérificateurs aux comptes, et le budget de l’exercice ﬔtur sont soumis à l’approbation de l’assemblée générale au cours du premier semestre de chaque année. Article 13 – Dissolution En cas de dissolution volontaire, l’assemblée générale désignera un ou plusieurs liquidateurs et déterminera leurs pouvoirs. Dans tous les cas de dissolution, l’actif social restant après acquittement des dettes et apurement des charges sera affecté par l’assemblée générale à un ou plusieurs autre(s) organisme(s) sans but lucratif dont le but se rapproche de celui de l’association, soit au moment de la décision de dissolution, soit ultérieurement sur convocation des liquidateurs. Article 14 – Disposition générale Pour tout ce qui n’est pas prévu aux présentes, sont d’application les dispositions de la loi du 2 mai 2002 et, subsidiairement, celles du droit commun. 

Décision additionnelle prise par l’assemblée générale du 27 octobre 2012 Les nouveaux statuts entrent en vigueur dès leur publication au Moniteur belge. À partir de ce moment-là, les membres actuels doivent préciser au conseil d’administration, endéans un délai de trois mois, s’ils veulent s’associer comme membre effectif ou comme membre adhérent. Un avis à cet effet sera diffusé dans les publications de l’association. À défaut de précision, ils seront considérés comme membres adhérents.

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Nicolas TASSET – Une contremarque espagnole non répertoriée sur le monnayage nîmois *

rpc i 523 ; ric i 155. Pour la contremarque : Howgego [3] –. 3

Commentaires

Dupondius de Nîmes (type 1 réduit [1]), antérieur à 8 av. J.-C.

Ce dupondius provient d’une vente espagnole de 2012 [4]; malheureusement, le vendeur n’a pas pu donner plus d’informations quant au lieu de trouvaille exact, précisant néanmoins qu’il devait sans doute s’agir de l’Espagne.

a Têtes adossées d’Agrippa à g. portant la couronne rostrale et d’Auguste à dr. représenté tête nue, entre la légende IMP/DIVI F

On peut en effet raisonnablement supposer que cette monnaie a été découverte dans la péninsule ibérique et plus spécifiquement en Tarraconaise, du fait de la présence de multiples concrétions et dépôts de terre typiques de cette région. Ces dépôts apparaissent aussi bien dans les interstices de la gravure que dans les creux de la contremarque ellemême ; la patine est elle-même assez caractéristique des monnaies provenant de la partie nord-est de l’Espagne [5].

Description

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1

r Crocodile enchaîné à trois palmes surmontées d’une couronne de laurier entre la légende COL–NEM, le tout figurant une ancre de marine dans la tradition romaine des trophées militaires navals ; l’ensemble de la composition évoquant un navire animalisé [2]. 2

Ae : 10,83 g ; Í ; 25 mm. __________ * Je remercie V. Geneviève et J.-M. Doyen pour leurs observations judicieuses et leur travail de relecture. [1] La typologie que nous reprenons est celle établie par H. Zehnacker, avec la collaboration de J.-Cl. Richard & J.-N. Barrandon, La trouvaille de la Villeneuve-au-Châtelot (Aube), Trésors Monétaires, vi, 1984. [2]

A. Veyrac, Le symbolisme de l’as de Nîmes au crocodile, Montagnac, 1998, p. 19-20 ; M. Bar, La date et la signification symbolique des premiers bronzes de Nîmes au crocodile, xiii Congresso Internacional de Numismatica – Actes, Madrid, 2003, p. 824 et N. Tasset, Note concernant la symbolique du dupondius de Nîmes au crocodile, bcen 46/1, janvier-avril 2009, p. 115-122. Ce revers singulier fait vraisemblablement référence à la victoire navale d’Agrippa et Octave contre les forces coalisées d’Antoine et Cléopâtre à Actium, en Grèce, le 2 septembre 31 av. J.-C.

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La contremarque présente au droit est bien connue des numismates et collectionneurs de bronzes romains hispaniques. Elle représente les contours d’une tête d’aigle à laquelle on attribue généralement une origine militaire. Il en existe de plusieurs types et de styles différents : têtes d’aigle tournées vers la gauche ou vers la droite et traitées avec plus ou moins de détails. On les retrouve exclusivement sur les moyens bronzes (asses) datés des règnes d’Auguste (27 av.-14 ap. J.-C.) et de Tibère __________ [3]

C.J. Howgego, Greek imperial countermarks. Studies in the provincial coinage of the Roman Empire, London, 1985. [4] Vente Lucernae, Vcoins, septembre 2012, lot n° 934. [5] Ce type de concrétions avec dépôts argileux de couleur jaune orangé associé à une patine noire présentant une nuance de vert foncé s’observe sur beaucoup de bronzes celtibères ou romains, que ceux-ci aient été frappés ou non en Espagne et mis au jour dans la Péninsule, plus généralement encore dans la région de Tarraconaise et autour de Caesaraugusta.

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(14-37 ap. J.-C.) frappés dans la plupart des colonies et des grands municipes de la péninsule ibérique. Toutefois, on observe une plus forte proportion de ces monnaies contremarquées à la tête d’aigle dans les cités de la province romaine de Tarraconaise et, plus généralement encore, dans celles situées à proximité de la colonie de Caesaraugusta (Saragosse) et au sud de l’Ebre, à l’exception de la cité d’Osca, qui se trouve quant à elle aux pieds des Pyrénées [6]. Citons à titre d’exemple les colonies et municipes de Calagurris, Graccurris, Osca, Cascante (Municipium Cascantum), Clunia, Turiaso, Bilbilis ou Celsa. 6

On notera encore que ce type de contremarque est également connu sur certains moyens bronzes émis à Carthago Nova (Carthagène) située plus au sud, sur la côte méditerranéenne, ou encore à Emerita Augusta (Mérida), colonie romaine située dans la province de Lusitanie [7]. Cette liste n’est toutefois pas exhaustive. 7

Si l’origine militaire de la majorité de ces contremarques est admise par les chercheurs [8], la difficulté est d’en con8

__________ [6]

Voir la page internet http://www.tesorillo. com/hispania/contramarcas.htm, page consultée le 5/xi/2012 ; Á. Morillo Cerdán, Contramarcas militares en monedas de la submeseta norte, in Anejos del Archivo Español de Arqueologia XX, 1999, p. 71-90 ; M. P. García Bellido, Las contramarcas – Los campamentos romanos de Hispania, Servicio de Publicaciones csic, Madrid, 2006. [7]

Voir M.P. García Bellido et alii, Los Campamentos romanos en Hispania (27 a.C.192 d.C.) : El abastecimiento de moneda, 2 vol., Anejos de Gladius, Consejo Superior de Investigaciones Científicas Ediciones Polifemo, Madrid, 2006, 829 p. et carte de répartition (cf. fig. 13). [8]

A. Burnett, M. Amandry & P.P. Ripollès, Roman Provincial Coinage, vol. I, part. I, London & Paris, 1992, p. 809-810 ; Morillo Cerdán, op. cit., p. 71-90 ; I. Villaronga & J. Benages, Ancient Coinage in the Iberan Penin-

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naître la fonction et, éventuellement, de pouvoir les attribuer à une légion en particulier. Pour tenter de répondre à ces questions, revenons un moment sur l’histoire de la dernière étape de la conquête de l’Espagne qui eut lieu sous le règne d’Auguste : à la suite des guerres cantabriques qui se sont déroulées de 29 à 19 av. J.-C. [9], Auguste et Agrippa se rendirent maîtres de l’Hispanie. Cette annexion se fit après la reddition des Cantabres et des Astures, finalement vaincus par huit légions et plusieurs troupes auxiliaires. Parmi ces légions l’on comptait la IV Macedonica, la VI Victrix et la X Gemina qui ﬔrent par la suite honorées sur le monnayage de Caesaraugusta (cf. fig. 10-12), lieu choisi par Auguste pour établir une colonie de vétérans ayant pour fonction à la fois d’assurer la défense du territoire et d’établir un point d’ancrage au monde romain (cf. fig.9) [10]. 9

10

Les monnaies contremarquées de la tête d’aigle, voire peut-être même de la tête de sanglier (unité auxiliaire ?) (cf. fig. 5), remplissaient donc une fonction d’ap__________ sula, Greek/Punic/Iberian/Roman. Les Monedes de l’Edat Antiga a la Península Ibèrica, Institut d’Estudis Catalans, Societat Catalana d’Estudis Numismàtics, Barcelona, 2011. [9] La Cantabrie et l’Asturie se situent dans le nord-ouest de l’Espagne. Ces guerres ont été décrites par Dion Cassius, Histoire romaine, liii-liv et Florus, Abrégé de l’histoire romaine, iv [10]

La colonie de Caesaraugusta a été fondée entre 19 et 14 av. J.-C. (cf. Fr. Des Boscs-Plateaux, Un parti hispanique à Rome ? Ascension des élites hispaniques et pouvoir politique d’Auguste à Hadrien (27 av. J.-C.-138 ap. J.-C.) (Bibliothèque de La Casa de Velázquez, vol. 32), Ciudad Universitaria, Madrid, 2005, p. 52 et note 121 concernant le débat sur les origines de la colonie). La cité a également reçu du premier empereur de Rome le droit de frapper des monnaies d’or (aurei) et d’argent (denarii) pour le compte des légions stationnées en Tarraconaise.

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propriation de la monnaie pour être utilisée en contexte militaire, outre le fait qu’elles pouvaient représenter, par leur sigle, une forme de dissuasion à l’attention de tous ceux qui chercheraient à se révolter ou à générer des troubles, que ce ﬔsse à l’intérieur comme à l’extérieur des murs des cités. On peut donc envisager que ces contremarques aient représenté ces trois armées en plus de la Légion V Alaudae dont des vétérans avaient été envoyés fonder la colonie d’Emerita Augusta en 25 av. J.-C. [11]. 11

La singularité de la forme adoptée par ces contremarques légionnaires peut encore être mise en relation avec le choix du lieu d’apposition du poinçon sur les monnaies. En effet, on constate de manière générale que les contremarques à tête d’aigle ont été frappées à des endroits précis de la monnaie : toujours à l’avers, où figure le portrait impérial, et placées la plupart du temps de manière à associer voire à confondre son portrait avec celui de l’oiseau. Certains poinçons figurent ainsi à la gauche du portrait, tête tournée vers l’empereur (cf. fig. 1 et 8), d’autres se situent sur son cou (cf. fig. 2, 6 et 7), d’autres encore épousent les propres traits du portrait impérial comme sur certaines représentations de Tibère ; le nez aquilin de ce dernier n’étant certainement pas étranger au phénomène et accentue d’autant plus cette assimilation (cf. fig. 3 et 4) [12]. Sur certaines 12

__________ [11]

Cf. supra. Ces vétérans étaient également accompagnés d’anciens compagnons d’armes issus de la légion X Gemina. Cf. R. Étienne, À propos du territoire d’Emerita Augusta (Mérida), dans M. Clavel-Lévêque & R. PlanaMallart (dir.), Cité et territoire, ier Colloque européen, Béziers, 14-16 octobre 1994, Besançon, 1995, p. 27. [12]

L’aigle est pour Rome le symbole du pouvoir par excellence. Il s’agit de l’animal associé à Jupiter, maître du Panthéon romain, et à l’Empire. Par ailleurs, l’association de la figure impériale avec cet animal (pour les associa-

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monnaies enfin, ils sont simplement contremarqués au centre du portrait. La contremarque que nous publions est toutefois d’un style particulier. Sa forme générale est plus élémentaire, plus basi__________ tions les plus flatteuses) a été reprise par différents auteurs antiques dont Suétone, secrétaire impérial vivant sous le règne d’Hadrien (117138 ap. J.-C.) qui dépeint en ces termes une fraction du portrait du premier empereur romain Auguste : « ses yeux étaient vifs et brillants ; il voulait lui-même faire croire qu’il y avait dans son regard comme une force divine et, quand il le fixait sur quelqu’un, il aimait à le voir baisser la tête, comme ébloui par le soleil. » Cf. Suétone, Vies des xii Césars, Auguste, 79. Ce passage évoque bien entendu une création littéraire de son auteur mais traduit néanmoins une certaine manière de fonctionner propre à l’esprit de l’homme ; le citoyen romain ne fait pas exception en la matière. Rappelons que, plus près de nous encore, l’empereur français Napoléon Ier, de par la position qu’il occupait au sein de l’État, sera lui-même surnommé l’Aigle et son fils, l’Aiglon… En outre, on constate encore que les plus grands pamphlets romains ont poussé ces « analogies » à l’extrême. Ainsi, certains traits physiques attribués à tel ou tel souverain (toujours largement exagérés voire complètement inventés pour les besoins de la comparaison) pouvaient-ils être sciemment rapprochés de ceux d’un animal en particulier, association au dessein souvent peu flatteur. En effet, lorsque l’on sait qu’à chaque animal était traditionnellement attribué un certain nombre de comportements, il devenait par analogie dès lors possible pour celui qui utilisait ce procédé, appelé physiognomonie, de déterminer le profil psychologique d’un individu. C’est ainsi que Suétone rapproche Auguste, fondateur du Principat, de l’aigle, animal au regard pénétrant et souverain, largement associé à l’Empire. En même temps la comparaison avait pour effet de rendre le personnage très austère, peu sympathique. D’autres ont cependant eu moins de chance ; en effet, Suétone dans ses Vies des xii Césars, entreprit d’associer Caligula à la chèvre (cf. Vie de Caligula, l) et Néron à la hyène, animal considéré comme « nauséabond et couvert de taches » (cf. Vie de Néron, li). Cf. M. Dubuisson, Université de Liège, Séminaire de littérature latine (année académique 2000-2001) sur le thème de « La légende noire des JulioClaudiens ».

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que que la normale. Son contour est constitué d’un trait continu fermé et la forme générale de la tête d’aigle est très schématisée, constituée d’une forme rectangulaire dont les angles ont été arrondis pour représenter l’essentiel de la tête, et d’un bec construit de manière non moins schématique. La contremarque ne présente aucun élément de détail apparent.

Catalogue des monnaies espagnoles portant des contremarques à l’aigle

On note encore que, contrairement aux observations qui ont été faites sur les autres contremarques de même type, bien que la tête d’aigle apparaisse au droit, comme sur les autres exemplaires observés (en l’occurrence dans ce cas précis : du côté d’Agrippa, général qui, comme nous l’avons vu, a également prit part aux opérations militaires romaines en Espagne), celle-ci est cette fois présentée de manière totalement inversée, bec pointé vers le haut, son extrémité posée sous le nez du stratège, ce qui semble être en opposition avec une règle spécifique à ce type [13].

Règne d’Auguste (27 av.-14 apr. J.-C.), Æ As de Calagurris. Masse : 12,59 g. a MVCALIVLIAAVGVSTVS Tête d’Auguste laurée à droite. r LBÆBPRISCOCGRANBROC II VIR dans le champ à droite, taureau debout à droite. Références : SNG Cop. 580 ; RPC I 441. Contremarque à la tête d’aigle tournée vers la droite, apposée au droit, à gauche du cou de l’empereur.

Fig. 1

13

Il est toutefois possible que le préposé qui ﬔt chargé de frapper le poinçon ait voulu profiter du champ d’avers resté vide (le portrait d’Auguste est hors flan, ce qui a agrandi la surface lisse à l’avers, du côté d’Agrippa) pour marquer la monnaie à cet endroit. Le nez d’Agrippa aurait quant à lui pu servir de point de repère au moment de la frappe. La contremarque semble a priori officielle si l’on tient compte de sa conception schématique au demeurant quasi parfaite. Ce type de poinçon hispanique semble absent du répertoire des contremarques rattachées aux monnaies nîmoises [14]. 14

__________ [13]

Nous nous basons ici sur la description de 23 exemplaires contremarqués à la tête d’aigle. [14] Les meilleures références en la matière restent R. Majurel, Les contremarques sur as nîmois, ogam xvii (1965), p. 243-278 et pl. 6573 ; le site internet de J.-P. Terrien, http://

82

Fig. 2

Règne de Tibère (14-37 apr. J.-C.), Æ As de Calagurris. Masse inconnue. a TIAVGVSDIVIAVGVSTIF IMPCAESAR, tête laurée de Tibère à droite. r LFVLSPARSOLSATVRNINO IIVIRMCI, taureau debout à droite. Références : AB 429. Pour la contremarque : Howgego –. __________ www.asdenimes.com, huit pages consacrées exclusivement aux contremarques présentes sur les dupondii de Nîmes, site consulté le 5/xi/2012, ainsi que la page web de ﬈e Roman Numismatic Gallery, http://www.romancoins. info/CMK-Nemausus-Aug.html, Countermarks on Nemausus and Spanish Provincial Coins of Augustus, page consultée le 5/xi/2012.

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Contremarque à la tête d’aigle tournée vers la gauche, apposée à l’avers, sur le cou de l’empereur. N.B : La monnaie a été découpée en son centre pour épouser la forme d’un objet ou plus probablement d’une tête d’animal (tête de sanglier ?).

Ex. collection Paulo Leitao. Contremarque à la tête d’aigle tournée vers la droite, apposée à l’avers, sur la joue de l’empereur.

Fig. 5 Fig. 3

Règne de Tibère (14-37 apr. J.-C.), Æ As de Cascante. Masse : 9,40 g. a TICAESAR DIVI. AVGF AVGVSTVS, tête laurée de Tibère à droite. r MVNICIP – CASCANTVM, taureau debout à droite. Références : AB 691 ; RPC I 428. Pour la contremarque : Howgego : –. Contremarque à la tête d’aigle tournée vers la droite, apposée à l’avers, sur la joue de l’empereur, de manière longitudinale (bec vers le bas).

Règne de Tibère (14-37 apr. J.-C.), Æ As de Clunia. Masse : 10,83 g. a TICAESARAVGFAVGVSTVS IMP, tête laurée de Tibère à droite. r CAEMMETOTCORMATEL CAECPRESCAELCAVOIIII VIR, taureau debout à gauche ; CLVNIA dans le champ supérieur.

Références : H. 4 ; Burgos 1494v. Contremarques : idem. Contremarque représentant un sanglier entier au droit, apposée sur le cou de l’empereur et deuxième contremarque représentant une tête de sanglier à droite, apposée sur le flanc du taureau.

Fig. 6 Fig. 4

Règne de Tibère (14-37 apr. J.-C.), Æ As de Clunia. Masse : 11,60 g. a TICAESARAVGFAVGVSTVS IMP, tête laurée de Tibère à droite. r CNPOMPMAVOTIANTO MIVLSERANIIIIVIR, taureau debout à gauche ; CLVNIA dans le champ supérieur. Références : sng Cop. 622 ; Burgos 836 ; rpc i 452. Pour la contremarque : idem.

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Règne d’Auguste (27 av.-14 apr. J.-C.), Æ As de Turiaso frappé après l’an 2 av. J.-C. Masse : 9,92 g. a IMPAVGVSTVS PP, tête laurée d’Auguste à droite. r MVN dans une couronne de laurier - TVRIASO dans le champ inférieur. Références : rpc i 405. Pour la contremarque : idem.

83


Contremarque à la tête d’aigle tournée vers la gauche, apposée à l’avers, sur le cou de l’empereur.

Fig. 7

Règne d’Auguste (27 av.-14 apr. J.-C.), Æ As de Bilbilis. Masse : 10,14 g. a AVGVSTVS DIVIF, tête nue d’Auguste à droite. r Cavalier tenant une lance, galopant à droite ; BILBILIS à l’exergue. Références : abh 215 ; rpc i –. Contremarque à la tête d’aigle tournée vers la droite, apposée à l’avers, sur le cou de l’empereur.

Fig. 8

Régne d’Auguste (27 av.-14 apr. J.-C.), Æ As de Celsa frappé vers 5-3 av. J.-C. Masse : 9,42 g. a IMPCAESARDIVI. F AVGVSTVS COS XII, tête laurée d’Auguste à droite. r CVICELCNDOMITIO. (dans le champ supérieur) CPOMPEIO. (dans le champ inférieur) IIVIR. (dans le champ droit), taureau debout à droite. Références : rpc i 278. Collection de l’auteur. Contremarque à la tête d’aigle tournée vers la droite, apposée au droit, à gauche du cou de l’empereur.

84

Quelques bronzes provenant de l’atelier de Caesaraugusta (Espagne Tarraconaise)

Fig. 9

Règne d’Auguste (27 av.-14 apr. J.-C.), Æ As de Caesaraugusta frappé vers 1918 av. J.-C. Masse : 12,44 g. a AVGVSTVS DIVIF, tête laurée d’Auguste à droite. r CAESAR AVGVSTA – QLVATI MFABIO – II VIR à l’exergue ; prêtre traçant les limites de la colonie au moyen d’une charrue conduite par deux bœufs. Références : rpc i 305.

Fig. 10

Règne d’Auguste (27 av.-14 apr. J.-C.), Æ Semis de Caesaraugusta frappé vers 8-1 av. J.-C. Masse : 5,46 g. a AVGVSTVS DIVI F, Tête laurée d’Auguste à droite. r CAESARAVGVSTA M PORCI CN FAD – II VIR dans le champ, de part et d’autre d’un étendard. Références : rpc i 315.

Fig. 11

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Règne de Tibère (14-37 apr. J.-C.), Æ sesterce de Caesaraugusta frappé vers 31-32 ap. J.-C. Masse : 21,47 g. a TICAESARDIVIAVGF AVGVSTVSPONTMAXTR POTXXXIII, Tibère assis à g. sur

une chaise curule, tenant un sceptre vertical de la main g. et une patère de la main droite. r LVETTIACVS – MCATO – II VIR (à l’exerque), CCA dans le champ supérieur, LEG IV – LEG VI – LEG X de part et d’autre d’un vexillum central, lui-même placé entre deux étendards circulaires (Imagines Clipeatae ou simples boucliers circulaires ?). Ex. collection Alberto Campana. Références : rpc i 346.

Fig. 12

Règne de Tibère (14-37 apr. J.-C.), Æ Semis de Caesaraugusta. Masse : 7,12 g. a TICAESARDIVIAVGF AVGVSTVS, tête laurée de Tibère à gauche. r CLEMENSETLVCRETIVS– II VIR à l’exergue ; CCA entre deux enseignes militaires et une enseigne aquilifère centrale. Références : rpc i 353.

Fig. 13 – Localisation des villes citées dans le texte

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Briac MICHAUX ‒ Chronologie et typologie des antoniniens émis durant le règne de Gordien III dans les ateliers de Rome et d’Antioche *

L

e règne de gordien iii commence en 238 [1]. Ce jeune garçon de 13 ans, issu d’une famille sénatoriale aisée [2], n’était pas en âge de prendre les armes et se retrouva propulsé à la tête des armées suite à la « révolution » de 238. Pour comprendre la succession des événements de cette année 238, il faut remonter le temps de quelques années, jusqu’en 235 et l’arrivée sur le trône de Maximin Ier le ﬈race suite à l’assassinat de Sévère Alexandre (222-235) [3]. 1

2

3

Le contexte historique Maximin [4] était un excellent stratège ; il remporta de nombreuses victoires mi4

__________ * Je remercie R. Bland de m’avoir transmis sa thèse inédite et d’avoir corrigé une première version de ce texte ; C. Clay qui m’a communiqué la photo de la fig. 3 avec autorisation de publication au nom de Gemini Auction mais aussi pour l’autorisation de publication de la fig. 9 ; J. van Heesch qui m’a communiqué la photo de la fig. 1 avec autorisation de publication. Le texte, corrigé par M. Moreaux, a été revu et complété par J.-M. Doyen et N. Tasset. [1] Date corroborée par une inscription retrouvée dans le sud de la Syrie et étudiée par M. Sartre, Le dies imperii de Gordien III. Une inscription inédite de Syrie (= Ann.Epigr., 1984, 921bis), Syria, lxi (1984), p. 49-61. [2] Vita Gord., iv, 2. Le fait que son père ait appartenu à l’ordre sénatorial est attesté par l’Epitome de Caesaribus, xxvii, 1. [3] Hérodien, vi, 8, 4–9, 8 ; Eutrope, Bréviaire, viii, 23 ; Aurelius Victor, Livre des Césars, 24 ne fait pas mention de l’assassinat ; Epitome de Caesaribus, xxxiv, 4. [4] Pour la chronologie et les émissions monétaires du règne de Maximin Ier : X. Loriot, Les premières années de la grande crise du iiie siècle : de l’avènement de Maximin le ﬈race (235) à la mort de Gordien III (244), anrw ii/1, 1975, p. 657-787 ; M. Alram, Die Münzprägung des Kaisers Maximinus I. ﬈rax (235/ 238), Wien, 1989 (mir 27).

86

litaires qui sécurisèrent les frontières mais durant ses trois années de règne, afin de financer sa lutte contre les peuples barbares, il mit l’Empire à sac [5]. Entre les pillages de temples, les massacres de l’élite intellectuelle et le rançonnement des sénateurs, le mécontentement touchait toutes les classes de la population. C’est dans la province d’Afrique du Nord que la révolte éclata [6]. Le peuple obligea le sénateur Gordien I à revêtir la pourpre impériale. Gordien I, alors octogénaire, s’associa son fils Gordien II afin d’éliminer Maximin Ier. Ils réussirent presque par miracle à prendre Carthage mais cette victoire ne ﬔt qu’éphémère car les troupes basées en Numidie vinrent à la rescousse et en moins de trois semaines, Gordien II ﬔt tué au combat et Gordien I se pendit de désespoir [7]. Le Sénat, qui avait suivi la révolte africaine en massacrant tous les partisans romains de Maximin, ﬔt pris de panique. En apprenant la défaite des Gordien, il ﬔt contraint à une ﬔite en avant avec, dans un premier temps, l’annonce de la disgrâce de Maximin et, dans un second temps, l’élection par le Sénat de deux empereurs de pouvoir équivalent, Balbin et Pupien, avec pour tâche d’éliminer Maximin Ier. Pupien n’était guère aimé par le peuple à cause de son passé trop autoritaire en tant que Préfet, couplé au fait que la famille des Gordiani n’était pas récompensée pour sa bravoure. Cette situation poussa le peuple à assiéger les sénateurs au Capitole pendant près d’un mois, 5

6

7

__________ [5]

Hérodien, vii, 3, 5 ; cf. inscription de Scaptopara (auj. Blagoevgrad en Bulgarie), cil, iii, 12336 = igr, i, 674, G. Mihailov (I.G. Bulg., iv, 2236) et Kl. Hallof, Die Inschri﬇ von Skaptopara: neue Dokumente und neue Lesungen, Chiron, xxiv, 1994, p. 405-444 dénonce des faits de réquisitions abusives qui se sont produites à la fin du règne de Maximin (fin 237 ou début 238) ; X. Loriot, op. cit., p. 685. [6]

Hérodien, vii, 4-5 ; Vita Max., xvi, 4. Hérodien, vii, 9, 4 et 9, 9 ; Zonaras, xii, 17 ; Ammien Marcelin, xxvi, 6, 20. [7]

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jusqu’à la nomination en tant que césar de Gordien III, petit-fils de Gordien I et neveu de Gordien II [8]. La réaction de Maximin ne se fit pas attendre : il avança avec son armée sur l’Italie afin de tenter de reprendre le pouvoir, mais en arrivant à Aquilée, la tactique de la terre brûlée imposée par Pupien – qui consistait à festoyer à l’intérieur de la place forte assiégée alors que les assiégeants mouraient de faim – fit largement son effet. Maximin Ier, déstabilisé, fit éliminer plusieurs de ses généraux en les accusant de défaitisme et se fit finalement assassiner avec son fils, le césar Maxime, par ses propres troupes [9].

de la première série antiochienne de Gordien III.

8

Cinq types de bustes se distinguent sur les antoniniens d’Antioche émis entre 238 et 239. On rencontre ainsi : A. Le buste radié cuirassé à gauche, vu de dos ( fig. 1).

Fig. 1

9

En mai 238, les soldats de la garde prétorienne restés secrètement fidèles à Maximin assassinèrent Balbin et Pupien ne laissant alors que le jeune Gordien III sur le trône. La révolte de 238 était terminée. Bien trop jeune pour régner seul, il subit durant les premiers mois les influences du Sénat, de sa mère ainsi que des eunuques dont elle s’était entourée. Les données numismatiques Il semble que Gordien se soit rendu dans les provinces orientales de l’Empire en 238-239 afin de réaliser une « tournée d’inspection » du fait de l’agitation agressive qui régnait par delà la frontière. Ce déplacement est en effet prouvé par l’existence d’un tétradrachme d’Alexandrie daté de l’an 2 (LB au revers) conservé au British Museum, montrant une scène classique d’adventus : Gordien à cheval le bras levé. Nous pouvons également y joindre quelques rares antoniniens d’Antioche au même type, avec la légende PMTRPIICOSPP ( fig. 2) [10]. C’est durant cette période que ﬔrent émises toutes les monnaies

r FIDES MILITVM, Fides debout de face, la tête à gauche, tenant un étendard dans la main droite et une corne d’abondance dans la main gauche [11]. 11

Fig. 2

B. Le buste radié drapé cuirassé à gauche, vu de face ( fig. 2).

r PM TRP COS II PP, Gordien III à cheval à gauche, levant la main droite et tenant une lance oblique dans la main gauche. C. Le buste radié et cuirassé à gauche, vu de face ( fig. 3).

10

Fig. 3

__________ [9]

r P M TR P II COS PP, Providentia debout à gauche tenant un globe de

[10]

__________

[8]

Hérodien, vii, 10, 7.

Hérodien, viii, 5, 9 ; Vita Max., xxxii, 4. Cabinet des Médailles de Bruxelles, inv. 51004.

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[11]

Auction Gemini IV, 8/i/2008, no 471.

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la main droite et un sceptre transversal de la main gauche [12]. 12

D. Le buste radié drapé cuirassé à droite vu de face ( fig. 4).

Fig. 5 Fig. 4

r CONCORDIA AVG, Concordia debout de face, la tête à gauche tenant une patère dans la main droite audessus d’un autel et une corne d’abondance dans la main gauche [13]. 13

E. Le buste radié drapé cuirassé vu de ¾ arrière à droite, identique au buste de Rome ( fig. 6-11). Les trois bustes à gauche ainsi que le buste à droite vu de face n’existant pas à Rome, ils sont, malgré leur rareté (ils représentent entre 5 et 10% de ce monnayage), d’une très grande efficacité pour nous apprendre à isoler le style des monnaies d’Antioche. En effet, on peut observer sur ces monnaies, des portraits très semblables à ceux des tétradrachmes ( fig. 5), avec des fronts relativement hauts, des visages très allongés et des occiputs surdéveloppés ; ces trois caractéristiques ne sont pas suffisantes pour attribuer la monnaie à Antioche mais elles constituent les bases de l’identification. L’analyse épigraphique nous donne également d’autres points d’identification, comme l’a démontré naguère J. van Heesch [14], à commencer par la lettre M 14

qui, en simplifiant quelque peu, à Antioche est formée de deux I entre lesquels se trouve un V formant IVI alors que pour Rome, on aura plus l’impression de voir deux chevrons juxtaposés (ou deux lettres grecques &) formant alors &&. Cette différence, bien que la plus importante et caractéristique, n’est pas la seule : le lettrage est plus massif et régulier à Antioche qu’à Rome, la barre horizontale du T sur MANT a tendance à être courbée à Rome alors qu’elle ne l’est pas à Antioche. Pour illustrer clairement les dernières variantes mentionnées, nous proposons de mettre en parallèle les images des deux ateliers. Gordien ayant été nommé empereur par la garde prétorienne et l’armée, le type FIDES MILITVM (Fides debout à droite, tenant un étendard et un sceptre transversal) semble s’imposer comme modèle de comparaison. Ce type, répertorié à Rome en tant que ric 1 ( fig. 6) [15], l’est également à Antioche sous la référence ric 182v corrigé ( fig. 7) [16]. 15

__________

16

Collection Christophe Morand (France) : http://antoniniens-de-gordieniii.wifeo.com/atelier-dantioche-p-z.php [13] Collection de l’auteur.

__________ Gordien III émis à Antioche, bcen 30/2 (1993), p. 25-29. [15] Collection de l’auteur.

[14]

[16]

[12]

88

J. van Heesch, Un antoninien refrappé de

Collection de l’auteur.

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Fig. 9

Fig. 6

Fig. 7

Notons au passage que le ric 182 fait référence à un buste tourné à gauche. De plus, les auteurs du catalogue oublient de mentionner la présence du sceptre transversal du fait que la monnaie qui servit de base à la description était trop usée [17]. 17

Or c’est le 10 décembre 239 que Gordien entre dans sa troisième année tribunicienne, et aucune monnaie d’Antioche n’est connue avec la légende P M TR P III COS P P correspondant à cette période. Il faut également y coupler le fait qu’en mars 240, l’atelier de Rome change la titulature de droit sur les antoniniens de Gordien qui portent alors IMP CAES GORDIANVS PIVS AVG et LIBERALITAS AVG II, avec Liberalitas debout de face tête à gauche tenant un abaque dans la main droite et une double corne d’abondance dans la main gauche ( fig. 10) [20]. 20

Il reste cependant un problème chronologique quant à la date précise du retour de Gordien à Rome. En effet, il existe deux antoniniens d’Antioche au type LIBERALITAS AVG II (Liberalitas debout de face, la tête tournée à gauche, tenant un abaque dans la main droite et une corne d’abondance dans la main gauche : fig. 8) [18]. 18

Fig. 8

Cette même légende est connue à Rome et est classée par le ric dans la 3e émission (janvier-décembre 240) ; elle porte la référence ric 36 ( fig. 9) [19]. 19

Fig. 10

On pourrait penser que ces deux antoniniens d’Antioche mentionnés plus haut sont des erreurs de gravure, ce qui est relativement courant dans ce monnayage, mais pour ce faire, il faudrait que ces deux monnaies aient été émises avec le même coin de revers or il n’en est rien. Il a aussi été proposé que le premier exemplaire, tant qu’il était unique, au vu du mauvais état de conservation du droit soit en réalité de Rome mais depuis la « découverte » du second en janvier 2010 ( fig. 8) [21], ce doute n’est plus possible. 21

__________ [17]

Selon R. Bland, la description est basée sur une monnaie du musée de Vienne (no d’inventaire 57114), dont le sceptre est particulièrement fin, et sur un exemplaire du British Museum usé sur lequel il pense voir un sceptre. [18] Collection de l’auteur. [19]

Collection de l’auteur.

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Il est donc actuellement impossible de dire avec certitude à quelle date Gordien a quitté le front oriental pour rentrer dans la capitale. De même, les moy__________ [20] Collection de l’auteur. [21] Collection de l’auteur.

89


ens de transports utilisés tant à l’aller qu’au retour ne sont pas clairs. D’un coté nous avons Gordien en armes à cheval (cf. fig. 2) qui symbolise le retour victorieux de l’empereur, et de l’autre une monnaie (fig. 11) découverte en 2009 par Curtis Clay, portant au revers la légende P M TR P II COS P P et illustrant un Neptune debout à gauche, la jambe droite posée sur la proue d’un navire, tenant un dauphin dans la main droite et un sceptre vertical de la main gauche [22], revers qui indiquerait un voyage impérial par la mer. Il reste ainsi de nombreuses découvertes à faire sur cette période souvent mal documentée de l’histoire romaine. 22

Michel MOREAUX ‒ Une fausse monnaie de Constantia (326 apr. J.-C.) * 23

Ce que l’on peut découvrir sur les plateaux « tout à ₫ 5 » de certains vendeurs, lors de grandes bourses aux monnaies, est absolument étonnant. Il y a un an, à Bruxelles, une pièce m’est échue qui sortait des habituels faux découverts sur les plateaux en vrac ! Après examen, j’identifiai une imitation moderne de Constantia, la sœur de Constantin, l’épouse de Licinius, une des monnaies les plus rares parmi les Constantiniennes. Flavia Iulia Constantia, peut-être née en 295, était une des deux filles de l’empereur Constance I et de ﬈éodora, sa deuxième épouse. Elle était donc la demisœur de Constantin [1]. La jeune femme connut une vie tragique, d’abord parce que sa branche de famille ﬔt persécutée comme rivale de celle de Constantin, mais aussi à cause de son mariage arrangé avec Licinius, le concurrent occasionnel de Constantin. 24

Fig. 11

Gordien reviendra à Antioche en 241 afin de mener la guerre contre les Perses sassanides de Sapor I durant laquelle il perdra la vie. Sources R. Bland, ﬈e coinage of Gordian III From the mint of Antioch and Caesarea (thèse inédite). H. Mattingly, E.A. Sydenham & C.H. V. Sutherland, ﬈e Roman Imperial Coinage. Vol. iv, Part iii. Gordian III – Uranius Antoninus, London, 1949. A. Jürging, Die erste Emission Gordians III., Jahrbuch für Numismatik und Geldgeschichte 45 (1995), p. 95-128.

__________ [22]

Collection Curtis Clay, analyse sur : www. forumancientcoins.com/board/index.php?topi c=53570.0, site internet consulté le 2/xi/2012.

90

Constantia ﬔt fiancée à Licinius vraisemblablement en 312 [2], moment où Constantin cherchait un allié contre Maxence et Maximin II Daïa. Le mariage ﬔt célébré en février 313 à Milan, où Constantin et Licinius s’étaient rencontrés pour sceller leur alliance et discuter de ce qui, plus tard, sera appelé « le rescrit de Milan », une lettre circulaire accordant la liberté des cultes, attribuée à Constantin et destinée à être affichée dans les territoires contrôlés par Licinius [3]. 25

26

__________ * Nous remercions vivement A.-M. Schmitt, dont la thèse en cours porte précisément sur le règne de Constantin, pour la relecture de notre texte et pour ses commentaires éclairés. [1] Pour les liens familiaux dans la dynastie constantinienne, voir T.D. Barnes, ﬈e New Empire of Diocletian and Constantine, Camridge y London, 1982, p. 265. [2] Lactance, De Mortibus Persecutorum, éd. J. Moreau (Sources Chrétiennes), Paris, xliii, 2. [3] Lactance, De mort. pers., xlv, 1 ; Eusèbe de Césarée, Historia Ecclesiastica, x, v, 3 ;

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Bien que Constantin et Licinius aient débuté simultanément leur carrière lors de la troisième Tétrarchie sous la direction de Galère, ils en vinrent, après la mort de Maximin (fin de l’été 313) [4], à une rivalité acerbe qui mit Constantia dans une situation difficile. 27

En 313, Constantia ﬔt cependant honorée du titre d’augusta et donna naissance, en 315, à un fils [5]. Mais le bonheur familial ﬔt de courte durée : en fin 316, un premier conflit opposa Constantin et Licinius [6] ; en 324, cependant, un conflit plus important se termina par la défaite totale de Licinius. En une nuit, Constantia persuada son époux de se rendre à Constantin et, le jour suivant, elle négocia la reddition de Licinius et son fils, ce qui incluait la vie sauve pour tous les deux. Cependant, quelques mois plus tard, Constantin revint sur sa promesse et les deux Licinii ﬔrent exécutés [7]. 28

29

30

Constantia, privée de son titre d’augusta, resta à la cour de Constantin jusqu’à sa mort en 330 [8]. Elle y conserva

cependant un certain pouvoir. Fin 324, Constantin éleva sa mère Helena et son épouse Fausta au rang d’augustae. Il conféra à sa demi-sœur le titre de nobilissima femina [9]. 32

En 326, ﬔt émise l’unique monnaie de Constantia à l’atelier récemment ouvert de Constantinople [10]. 33

Les monnaies de Constantia Il est curieux que Licinius ne fît frapper aucune monnaie au nom de sa femme quand elle devint augusta, surtout après qu’elle lui eut donné un fils. Les bronzes émis par Constantin portent la mention nobilissima femina aussi bien que soror Constantini. Cette pièce est excessivement rare : il en existe d’ailleurs fort peu de photos. Le Roman Imperial Coinage note la pièce R4 et il semble qu’il n’y en ait que deux ou trois répertoriées. Aucune vente aux enchères récente n’a fait figurer dans ses catalogues de monnaie de Constantia.

31

__________ Anonyme de Valois, Origo Constantini, éd. I. König, Trèves, 1987, 13 ; Zosime, Historia nova, éd. F. Paschoud, Paris, 1971, ii, 17. [4] Lactance, Mort. Pers., xlix, 1.

Fig. 1 – Nummus de Constantia du Musée de l’Ermitage, Saint-Péterbourg, d’après Lafaurie, 1955, pl. ix, no 10

[5]

Zosime II, 20, 2 ; Aurelius Victor, Epitome Caesaribus, éd. M. Festy, Paris, 1999, xli, 4. [6]

Dans ce conflit elle accompagna son mari : Anonyme de Valois, 17. [7]

Aurelius Victor, Epit. Caes., xli, 7-8 ; Anonyme de Valois, 28. [8]

Malgré la mort de son mari et de son fils, elle conserve une place d’influence au sein de la famille constantinienne et intervient peut-être lors du concile de Nicée : Philistorge, Historia Ecclesiastica, éd. J. Bidez, Leipzig, 1913, i, 9-10. À sa mort, le port de Maiuma prend son nom en son honneur (Eusèbe de Césarée, Vita Constantini, trad. S. Horst, (Fontes Christiani vol. 83), Turnhout, 2007, iv, 38 ; Sozomene, Historia Ecclesiastica, trad. J.-A. Festugière (Sources Chrétiennes n° 306), Paris, 1983, ii, v, 7-8). Dans la traduction de Festugière, Constantia est traduit comme la ville de

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Fig. 2 – Nummus de Constantia de la BnF, d’après Maurice, ii, pl. xvi, no 2 : 3,05 g __________ Constance. Ce n’est pas le cas, c’est bien un hommage à la demi-sœur de Constantin. [9]

H. Cancik & H. Schneider (éd.), Der neue Pauly, vol. 3, Stuttgart-Weimar, 1997, p. 135. [10]

ric vii, Constantinople, 15, pl. 18.

91


CONSTANTIA N F

Buste drapé à droite, portant une coifﬔre simple où les cheveux sont retenus par un bandeau. Autour du cou, un collier. SOROR CONSTANTINI AVG

autour d’une couronne de laurier portant un médaillon à son sommet. Dans la couronne : PIET / ASPVB / LICA en trois lignes. À l’exergue : CONSB

que Nationale, à Paris, a une masse de 3,06 g, selon J. Maurice. Le lettrage est trop « léger » pour être authentique, mais les inscriptions sont correctes. À noter toutefois le S au droit qui est trop incliné. La finesse des lettres et du buste indique que nous n’avons pas affaire à une monnaie coulée.

Atelier de Constantinople, 2ème officine ; émission datée de 326-327 par le ric vii. Références ric vii, 15 et pl. 18 ; Maurice, p. 519 et pl. xvi, no·2. En-dehors du British Museum, un exemplaire est connu à Leningrad (coll. Stroganoff achetée à Osman Noury Bey en 1914, cf. Pridik, zn 1930, p. 76, no 12, pl. iii, no 12 et J. Lafaurie, Médaillon constantinien, rn5, tome xvii (1955), p. 227-250 et pl. ix, no 10, notre fig. 1). L’exemplaire illustré par J. Maurice fait partie de la collection de la Bibliothèque nationale de France (fig. 2). Les deux exemplaires sont issus de coins de droit et de revers différents, supposant une émission malgré tout d’une certaine ampleur.

Fig. 4 – Antoninien de Severina (ric 4)

Étant donné l’aspect de la pièce et l’apparent « martelage » qui affecte la moitié du droit et du revers, je pense qu’il peut s’agir d’une pièce de récupération, un nummus ou plutôt un denier de bronze (aucun croissant n’apparaît effectivement sous le buste), sur lequel a été frappée ou gravée une nouvelle légende. L’aspect général du buste fait penser à Severina (270-275 apr. J.-C., fig. 4) plus qu’à aucune autre augusta, la coiffure du nummus authentique, en effet, ne ressemble pas du tout à celle de notre pièce.

Notre fausse monnaie de Constantia

Fig. 5

Fig. 3 – Imitation moderne de Constantia (coll. de l’auteur)

La monnaie (fig. 3) mesure 21 mm de diamètre ; elle a une masse de 2,54 g, ce qui est un peu léger, vu que les monnaies de cette émission (datée de 326327) ont une masse comprise entre 2,90 et 3,10 g. L’exemplaire de la Bibliothè-

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Fig. 6

Enfin, sur le Forum Ancient Coins, deux fausses monnaies de Constantia sont signalées (fig. 5 et 6) : toutes deux por-

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tent le même buste que notre pièce, mais l’une est coulée et l’autre est très corrodée (artificiellement, je suppose). Notre faux semble unique : en quarante ans de collection, jamais je n’avais découvert de fausse « Constantia » avant l’achat de cette pièce ! On peut d’ailleurs se demander quel est l’intérêt pour un faussaire de fabriquer un tout petit nombre d’exemplaires d’une pièce qui se vendra – avec beaucoup de chance – ₫ 5 ou 10 ! Mais où le faussaire a-t-il eu le modèle de cette pièce ? La seule photo correcte que j’aie pu trouver est celle du Roman Imperial Coinage. Pour l’origine de la pièce, il me suffira de dire que le marchand qui l’a vendue est originaire de l’est de l’Europe…

Jacques DRUART – De l’esterlin à la livre sterling

C

’est au roi d’écosse david ier (1124-1153) que revient le privilège d’avoir fait frapper la première monnaie qui va prendre le nom générique d’esterlin. L’esterlin sera alors regardé comme un étalon monétaire valant 1/20 once.

Esterlin de David Ier

Bibliographie complémentaire T.D. Barnes, ﬈e New Empire of Diocletian and Constantine, Cambridge y London, 1982. P.M. Bruun, ﬈e Roman Imperial Coinage. vii : Constantine and Licinius ad 313337, London, 1966. H. Cancik & H. Schneider (éd.), Der neue Pauly, vol. 3, Stuttgart y Weimar, 1997. R.A.G. Carson, Late Roman Bronze Coinage, ad 324-498, London, 1967. H. Heinen, Trier und das Trevererland in römischer Zeit, Trier, 1985. H. Heinen, Frühchristliches Trier, Trier, 1996. J.A. Martindale, Prosopography of Later Roman Empire, vol. 1, Cambridge, 1971. J. Maurice, Numismatique constantinienne, 3 vol., Paris, 1908-1911. H.A. Pohlsander, Constantia, Ancient Society 24 (1993), p. 151-167. D.L. Vagi, Coinage and History of the Roman Empire, Sydney, Ohio, 1999.

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Denier de Stephen

En fait, cette monnaie a été créée selon le modèle anglais du denier et, plus particulièrement, d’après celui du roi Stephen (1135-1154), de la dynastie angevine. Il est plutôt connu chez nous sous le nom d’Étienne de Blois. Les deniers de son successeur, Henri II, prendront à leur tour ce nom d’esterlin. La masse de ces monnaies était alors fixée à 32 grains. La qualité toujours très précaire de ces deux monnaies s’explique par deux motifs différents : pour David Ier, le fait que l’Écosse sort à peine des Dark Ages et, pour Étienne de Blois, la guerre civile et l’anarchie qui résultent de sa prise du pouvoir. À partir du règne d’Édouard Ier d’Angleterre (1271-1307), la qualité de ce type de pièce s’améliore considérablement, jusqu’à atteindre un très haut degré dans la finesse de la gravure. Fait de 1,46 g de 93


bon argent titrant ~925‰, il va se répandre dans nos régions. Cette propagation est encore accentuée du fait de l’ingérence grandissante des Britanniques en territoire français et de l’essor du commerce résultant des Croisades. Cette petite monnaie bien frappée, représentant l’effigie couronnée du souverain, a donc tout pour focaliser la confiance des négociants. Aussi, ce modèle est-il immédiatement accaparé par les seigneurs continentaux qui le copient plus ou moins servilement.

Esterlin d’Édouard Ier

Nous trouvons des exemplaires produits aussi bien par de grands princes que par de petits hobereaux campagnards. Et les principautés ecclésiastiques ne sont pas en reste… Dans son étude datant de 1871, J. Chautard recense, du Portugal à l’Estonie, plus de 70 principautés, royaumes et autres seigneuries, ayant battu esterlins.

Aix-la-Chapelle : Louis IV de Bavière (1314-1328)

Evêché de Dorpat (Estonie) : Dietrich IV Ressler (1413-1441)

En Angleterre, la production d’esterlins va se poursuivre jusqu’au milieu du xvie siècle. Les pièces d’Henry VII gardent encore les caractéristiques générales des modèles classiques, mais celles d’Henry VIII s’écartent définitivement de ce style, pour devenir plus réalistes, et c’est désormais le nom de penny qui sera utilisé.

Esterlin ou penny d’Henry VII (1485-1509)

Quelques exemples pour illustrer le phénomène :

½ groat et groat d’Henry VIII (1509-1547) Duché de Lorraine : Ferry IV (1282-1328) avec Amédée de Savoie, évêque de Toul

Seigneurie de Florennes : Gaucher de Châtillon (1250-1329) (atelier d’Yves)

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C’est donc la qualité de la teneur en argent, son aloi, qui a surtout contribué au succès de ce monnayage et c’est notamment ce facteur qui est à l’origine de l’appellation « argent sterling » pour désigner cette qualité d’alliage. De là viendra aussi l’expression « livre sterling », désignant aussi bien la masse que la monnaie elle-même.

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Cependant, un fait cocasse et paradoxal est attaché à cette monnaie. Il repose sur un problème d’étymologie. Contrairement à ce que certains ont avancé, le mot esterlin n’a rien à voir avec la bonne ville écossaise de Stirling. Il n’est probablement pas non plus, comme d’autres le prétendent, dérivé du bas latin esterl inG us. Ce mot est tout simplement une francisation du mot Easterling, pouvant se traduire par « qui vient de l’est ». Paradoxalement, nous autres Continentaux avons gardé la même terminologie et, dès lors, nous avons appelé « monnaie venant de l’est » une monnaie nous étant venue de l’ouest ! Voici donc une fois de plus une de ces bizarreries générées par nos insulaires voisins, cherchant par tous les moyens à contrarier les Continentaux, poussant le principe jusqu’à conduire du mauvais côté de la route…! Voilà donc ainsi souligné le côté amusant de la chose, mais quand on replace l’affaire dans son contexte, tout cela redevient logique. N’oublions pas que l’expression esterlin est d’origine britannique et que, dans ce pays, le modèle initial était le penny, dérivé lui-même du denier carolingien, inspiré au départ du monnayage romain. De ce point de vue, il s’agit donc bien, pour un Anglais, d’une monnaie venue de l’est. L’ambiguïté réside donc tout simplement du point de vue d’où l’on se place. La linguistique nous avait déjà apporté un autre exemple du même type, une expression qui tire également ses origines d’un contexte historique bipolaire. Lorsque nous quittons une société sans nous faire remarquer, nous disons que « nous filons à l’anglaise ». Cependant, les Anglais placés dans cette situation, disent exactement le contraire: «To take French leave», c.-à-d. « Filer à la françai-

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se ». Ce qui semble paradoxal peut ici encore s’expliquer en toute logique. Du Moyen Âge à l’Entente cordiale, le torchon a constamment brûlé entre la France et l’Angleterre : prétentions dynastiques, conflits d’intérêts politiques, économiques. Aussi, au cours des guerres quasi constantes que se faisaient les deux pays, il n’était pas rare qu’il y ait des prisonniers. Ce fait a connu son apogée au cours de la colonisation des terres nouvelles, cette vaste compétition à laquelle se sont livrées les puissances européennes et qui se traduisait par de constantes agressions navales. Ces épopées épiques nous sont connues par les exploits de corsaires tels que Jean Bart et Robert Surcouf du côté français, et Francis Drake pour les Anglais. On imagine aisément que le but premier des marins capturés lors d’abordages et emprisonnés en terre ennemie était de s’évader et de rejoindre la mère patrie sans se faire voir. Et cela, d’un côté comme de l’autre ! D’où ces expressions, semblables mais inverses…

Jacques BERTRAND – Les monnaies « à secret » : procédés de fabrication et essai de classement (suite) * 347

L

a garnison de strasbourg se rallia à l’Empereur le 6 juin 1815 pendant la période des Cent Jours (20 mars 1815-22 juin 1815) ; la frappe des un décime au  couronné ﬔt reprise mais datés de 1815 ( fig. 16). Le second siège de la ville débuta le 26 juin 1815, lorsque l’armée du Rhin se replia sur Strasbourg pour continuer la lutte engagée sur les frontières contre les armées alliées. Reprise de la frappe des un décime au  couronné mais da__________ * La première partie a été publiée dans le bcen

vol. 49, no 2, p. 67-72.

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tés de 1815 ( fig. 17). La garnison accepta de rendre la ville le 4 septembre 1815, deux mois après le retour de Louis XVIII : Seconde Restauration (22 juin 1815-24 février 1848). Il semblerait que la frappe des pièces d’un décime au  couronné datées de 1815 se soit poursuivie jusqu’en 1816. Nous pouvons également supposer que ces monnaies à secret ont pu contenir tout autre chose qu’une pièce en or. C’est ce que n’a pas manqué de faire le célèbre romancier Victor Hugo (18021885) qui avait entendu parler ou vu un exemplaire de l’une de ces « monnaieboîte » ou « boîte-monnaie », qu’il trouva judicieux d’introduire dans son roman « Les Misérables » [1], et dont il fit une excellente description. 357

Voici l’extrait en question : « L’enquête judiciaire, à laquelle le guetapens de la masure Gorbeau donna lieu par la suite, a constaté qu’un gros sou, coupé et travaillé d’une façon particulière, ﬔt trouvé dans le galetas, quand la police y fit une descente ; ce gros sou était une de ces merveilles d’industrie que la patience du bagne engendre dans les ténèbres et pour les ténèbres, merveilles qui ne sont autre chose que des instruments d’évasion. Ces produits hideux et délicats d’un art prodigieux sont dans la bijouterie ce que les métaphores de l’argot sont dans la poésie. Il y a des Benvenuto Cellini au bagne, de même que dans la langue, il y a des Villon. Le malheureux qui aspire à la délivrance trouve moyen, quelquefois sans outils, avec un eustache, avec un vieux couteau, de scier un sou en deux lames minces, de creuser ces deux lames sans toucher aux empreintes monétaires, et de pratiquer un pas de vis sur la tranche du sou de manière à faire adhérer les lames de nou__________ [1]

Victor Hugo, Les Misérables, Bruxelles, Lacroix, Verboeckhoven & Cie, 1862, troisième partie – Marius ; livre huitième – Le mauvais pauvre ; chapitre xx – Le guet-apens.

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veau. Cela se visse et se dévisse à volonté ; c’est une boîte. Dans cette boîte, on cache un ressort de montre, et ce ressort de montre bien manié coupe des manilles de calibre et des barreaux de fer. On croit que ce malheureux forçat ne possède qu’un sou ; point, il possède la liberté. C’est un gros sou de ce genre qui, dans des perquisitions de police ultérieures, ﬔt trouvé ouvert et en deux morceaux dans le bouge sous le grabat près de la fenêtre. On découvrit également une petite scie en acier bleu qui pouvait se cacher dans le gros sou. Il est probable qu’au moment où les bandits fouillèrent le prisonnier, il avait sur lui ce gros sou qu’il réussit à cacher dans sa main, et qu’ensuite, ayant la main droite libre, il le dévissa, et se servit de la scie pour couper les cordes qui l’attachaient, ce qui expliquerait le bruit léger et les mouvements imperceptibles que Marius avait remarqués »… Il n’y a rien à ajouter à la description vraisemblable que fit Victor Hugo de cette « monnaie-boîte » ; appelée à tort « monnaie de forçat » ou encore « monnaie de bagnard » sans doute propagées par les lecteurs influencés par son œuvre. Quant à la légèreté dont il fit preuve pour en décrire la fabrication, elle est issue de l’utopisme de ce grand romancier. En effet, nous avons vu la complexité de l’usinage, du tronçonnage, de l’alésage, du taraudage et de l’ajustage demandés pour la réalisation de cette « monnaie à secret » alors de là à en fabriquer une avec un simple « canif » ﬔsse-t-il à cran d’arrêt… Mais peut-être l’a-t-il fait sciemment dans le but précis de nous faire tester notre esprit de réflexion ? 

Durant le Second Empire également (1852-1871), des pièces à secret ﬔrent fabriquées avec des monnaies de 10 centimes « Napoléon III à tête nue » de 1852 à 1857 ( fig. 18), ainsi qu’avec des pièces de 10 centimes « Napoléon III à BCEN vol. 49 no 3, 2012


tête laurée » de 1861 à 1865 ( fig. 19). La transformation n’a demandé qu’une seule monnaie (procédé 1). Ces deux types existent soit avec des « couvercles » à emboîter par pression (procédé 1 – fermeture a), soit, comme l’exemple suivant ( fig. 19), avec des faces à

a

Avers et sa face intérieure alésée

visser (procédé 1 – fermeture b). Sur la photographie de la face arrière du disque du revers ( fig. 18), des traces de soudures sont bien visibles à certains endroits du pourtour de la couronne (intérieur entre 1 et 3 h ainsi qu’à l’extérieur entre 7 et 8 h).

b

Revers et sa face intérieure à couronne soudée

Fig. 18 – France – Second Empire (1852-1870). Pièce à secret de 10 centimes de 1853 B (atelier de Rouen) – Tête nue. Graveur : Jean-Jacques Barre – Bronze – n 30 mm – Masse initiale 10 g – Épaisseur 2 mm. Une couronne munie d’un pas de vis a été soudée sur le revers – Le droit a été transformé en couvercle à visser. Classement type : Procédé 1 – Fermeture b Ces pièces de 10 centimes ont été démonétisées en 1934 (Loi du 31 octobre 1934)

a aʹ Avers et sa face intérieure alésée

b bʹ Revers et sa face intérieure à couronne soudée

Fig. 19 – France – Second Empire (1852-1870). Pièce à secret de 10 centimes de 1865 K (atelier de Bordeaux) – Tête laurée. Graveur : Jean-Jacques Barre – Bronze – n 30 mm – Masse initiale 10 g – Épaisseur 2 mm – Masse après détourage 7,04 g – Profondeur obtenue : 1 mm – « Couvercle » à emboîter (n intérieur 24 mm) – Épaisseur du boîtier fermé 2,02 mm. Classement type : Procédé 1 – Fermeture a Ces pièces de 10 centimes ont également été démonétisées en 1934 (Loi du 31 octobre 1934)

Fig. 20

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Fig. 21

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Ces monnaies à secret ( fig. 18 et 19) ne pouvaient contenir qu’une très fine pièce en or, comme par exemple celle de 10 francs or Napoléon III grand module (M 19 mm – masse : 3,225 g – épaisseur de la tranche environ 1 mm) ou de 5 francs or Napoléon III grand module (M 17 mm – masse : 1,612 g – épaisseur de la tranche d’un peu moins de 1 mm) ( fig. 20 et 21). Il est également possible – nous le verrons un peu plus loin – qu’elles ﬔrent destinées à un tout autre usage. Procédé 3 – Fermeture e – Un troisième procédé ( fig. 22 et 23), assez différent des deux premiers, nécessitait également l’utilisation de deux pièces de monnaies. Comme un dessin vaut mieux qu’une longue explication, on trouvera aux p. 99-100 le développement illustré. Il est peu probable que ce type de monnaie à secret ait pu contenir une pièce en or, si petite soit-elle. Le système de fermeture à clapet (fermeture e) semble peu fiable pour résister aux entrechocs si elle était dissimulée parmi d’autres pièces normales. Par contre, ayant été créée pour camoufler ou protéger quelque chose, il est possible qu’elle ait servi à contenir un souvenir, un message ou une photographie … et pourquoi pas, servi à l’acheminement et à la transmission d’une microphotographie ou d’un microfilm. N’oublions pas que nous sommes encore une fois dans une période très perturbée suite à la guerre franco-prussienne qui opposa le Second Empire au Royaume de Prusse et ses Alliés, du 19 juillet 1870 au 29 janvier 1871 et qui eut pour conséquences, entre autres, la bataille et la défaite de Sedan (31 août-1er septembre 1870), la déchéance de Napoléon III et donc la chute du Second Empire (4 septembre), le siège et la capitulation de Paris (4 septembre 1870-21 janvier 1871), la perte de l’Alsace-Lor98

raine (traité de paix de Versailles du 26 février 1871, confirmé par le traité de Francfort du 10 mai 1871), l’occupation d’une partie du territoire français, dont Verdun, jusqu’en septembre 1873, etc. D’autre part, un photographe et inventeur français dénommé Prudent RenéPatrice Dagron (1819-1900) ﬔt le premier à breveter un procédé de microfilm en 1859. En 1860, il réussit à regrouper une micro-vue avec l’aide de la loupe de Stanhope. Cette loupe était constituée par un bloc de verre cylindrique avec une face plane et une face sphérique qui permettait d’observer à l’infini une petite vue photographique collée sur la face plane et éclairée par transparence. Dagron colla les vues sur une baguette de verre de 3 mm de diamètre sur 5 à 6 mm de longueur. Le grossissement ﬔt d’environ 100 fois. À l’Exposition universelle de 1867, il présenta des « micro-points », c’est-à-dire des photographies tellement réduites qu’elles ne pouvaient être vues qu’avec le microscope de Stanhope. Ce procédé ﬔt décrit dans de nombreux ouvrages dont Les Merveilles de la Science ou Description populaire des Inventions modernes, de Louis Figuier (Jouvet, 1870). En 1870, lors du siège de Paris, Dagron réalisa des micro-dépêches pour Rampont, directeur général des Postes. Le 11 décembre, il parvint à produire une microphotographie de qualité. Entre-temps, les troupes prussiennes avançant toujours, Léon Gambetta, membre du Gouvernement de Défense nationale, quitta Paris en montgolfière pour se retirer à Bordeaux où ﬔt établi le Gouvernement Provisoire. Dagron s’y rendit également pour produire les clichés des dépêches à faire parvenir. C’est ainsi que plus de cent mille dépêches parvinrent à Paris durant le siège.

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Exemples concrets

Fig. 22 – Pièce à secret 10 centimes 1856 D (atelier de Lyon) Classement type : Procédé 3 – Fermeture e Découpe de la première pièce

Découpe de la seconde pièce

Assemblage des découpes (Avers, clapet ouvert)

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a Avers, « clapet » fermé (a) et ouvert

b Revers, « clapet » fermé (b) et ouvert Fig. 23 – France – Second Empire (1852-1870) – Pièce à secret de 10 centimes de 1854 A (atelier de Paris) – Napoléon III tête non laurée. Graveur : Jean-Jacques Barre – Bronze – n 30 mm – Masse initiale 10 g – Épaisseur 2 mm. Classement type : Procédé 3 - Fermeture e

La société de Dagron proposait d’enchâsser des photos dans des bijoux, bagues ou pendentifs… Alors, pourquoi pas dans les monnaies à secrets de type 10 centimes Napoléon III qui, circulant

depuis 1852, ne ﬔrent démonétisées qu’en 1934. Voici maintenant une autre monnaie à secret très rare, réalisée durant la Troisième République :

Pièce no 1 alésée du côté du droit jusqu’aux bords intérieurs du listel pour obtenir le boîtier comportant l’empreinte monétaire du revers. L’intérieur sera ensuite taraudé

Pièce no 2 dont le listel du droit sera en partie alésé ; la pièce sera ensuite taraudée et tronçonnée pour obtenir le « couvercle » de la fig. 24

Pièce reconstituée Fig. 25

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Fig. 26 – France – Troisième République (1871-1940) – Pièce à secret de 10 centimes de 1873 A (atelier de Paris) – Cérès. Graveur : Eugène-André Oudiné (1810-1887) – Bronze – n 30,3 mm – Masse initiale 10 g – Épaisseur 2 mm – « Couvercle » à visser. Classement type : Procédé 4 – Fermeture d Monnaies frappées de 1872 à 1898 - Retirées en 1934 et démonétisées en 1935

Procédé 4 – Fermeture d – Ce quatrième procédé de fabrication assez particulier nécessitait également l’utilisation de deux monnaies. Pour la réalisation du boîtier avec l’empreinte du revers au dos, le droit de la première pièce était alésé du centre jusqu’au listel « dentelé » et jusqu’au ⅔ de l’épaisseur, puis taraudé pour créer le pas de vis intérieur ( fig. 24). Pour le « couvercle », le revers de la pièce était sacrifié. La pièce subissait soit un surfaçage, soit était tronçonnée ou encore meulée sur les ⅔ de l’épaisseur de la tranche. On obtenait un disque de 1 mm d’épaisseur comportant l’empreinte du droit. Ensuite, le bord de ce disque était meulé ou limé pour supprimer le listel « dentelé » ; notez qu’avant l’obtention de ce disque, le listel pouvait également avoir été supprimé par fraisage avant le tronçonnage. Il ne restait plus qu’à créer un pas de vis. Une minuscule encoche ou entaille était réalisée sur le bord du « couvercle » (le droit) pour pouvoir le visser ou le dévisser plus aisément ( fig. 25 et 26). L’avantage de ce procédé, c’est qu’il ne laissait aucune trace sur le pourtour de la tranche. Remarque : C’est suivant une partie de ce procédé ( fig. 24 et 25) que certains personnages mercantiles et malveillants transforment une pièce « frappe monBCEN vol. 49 no 3, 2012

naie » en pièce « frappe médaille » ou encore qui, dans notre pays à l’ancien double monnayage « bilingue » (une pièce en français et une pièce en néerlandais annuellement), transforment certaines pièces unilingues en pièces « bilingues », c’est-à-dire avec un côté en français et l’autre en néerlandais ! 

Il existe d’autres monnaies à secret en différents métaux et de divers pays datant de ces époques ; en voici un petit aperçu : lombardie Le 9 juin 1815, le Congrès de Vienne décida la création du Royaume de Lombardie et plaça la Vénétie sous l’autorité autrichienne… En janvier 1848, des émeutes éclatèrent contre les Autrichiens dans plusieurs États italiens. Le 18 mars 1848 vit l’insurrection de Milan contre les troupes autrichiennes de Lombardie, et le 22 mars, les Autrichiens ﬔrent chassés. Les Lombards sollicitèrent le soutien de Charles-Albert de Savoie, qui déclara la guerre à l’Autriche le 24 mars 1848 … Le 24 juillet, les troupes piémontaises sont battues par le maréchal Radetsky à Custoza, et Milan est reprise le 6 août 1848. La ville va rester autrichienne jusqu’à la guerre franco-autrichienne de

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1859. En 1860, Milan et la Lombardie seront échangées contre la Savoie et le comté de Nice (Traité de Turin du 24 mars 1860).

mai. Malgré la loi autrichienne de démonétisation de cette même année, rendant l’utilisation et la détention de ces pièces illégales, elles ne ﬔrent démonétisées qu’en 1927. Des monnaies en or de 40 et 20 lires ﬔrent également frappées avec ce même millésime. france

Fig. 27 – Lombardie – Gouvernement provisoire (1848) – Monnaie à secret de 5 lire italienne 1848 M (Atelier de Milan). Argent 900‰ – n 37,5 mm – Masse initiale 25 g – Masse observée 16,49 g – n intérieur 25 mm – Tranche cannelée – Épaisseur 3 mm. Classement type : Procédé 2 – Fermeture d (Couvercle à visser) – © cgb (Paris)

Les pièces utilisées pour la réalisation de cette monnaie à secret ne ﬔrent frappées qu’en 1848, suite au décret du 27

Droit (couvercle) et intérieur du disque du revers (boîtier)

La Première Guerre mondiale coûta si cher à la France qu’elle ne se releva qu’à partir de 1920, voire 1928 pour la monnaie avec le franc « Poincaré ». La crise de 1929 ne se fit sentir qu’à partir de 1932 mais dura jusqu’en 1939 ; durant cette période, l’instabilité ministérielle ﬔt très importante. Vacillant en 1934, la Troisième République trouva un nouveau ciment unitaire avec l’antifascisme qui permit l’arrivée au pouvoir du Front populaire en 1936. Mais, paralysée face à l’Allemagne, la France s’enlisa dans une « drôle de guerre » et connaîtra l’une des plus grandes défaites de son histoire en juin 1940.

Revers (boîtier) et intérieur du disque du droit (couvercle)

Fig. 28 – France – Troisième République – Monnaie à secret de 20 francs 1933 – Paris – Argent 680‰ – n 35 mm – Tranche cannelée – Masse initiale 20 g – Graveur Pierre Turin Pièce démonétisée par l’ordonnance du 31 mars 1945 avec effet au 16 avril. Classement type : Procédé 2 – Fermeture d

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Fig. 29 – usa – Five cents 1948 – Type ﬈omas Jefferson – Cu 75% Ni 25% – n 21,21 mm – Tranche lisse – Épaisseur 1,95 mm – Masse 5 g

des monnaies « à secret » au service de l’espionnage Voici pour suivre, des monnaies à secret plus contemporaines, il s’agit de véritables monnaies transformées pour servir l’espionnage. Leurs retours remontent probablement à la Seconde Guerre mondiale puis durant la période dite de la « Guerre froide » (1947-1991) entre les États-Unis d’Amérique et le bloc de l’Est, c’est-à-dire l’Union des Républiques Socialistes Soviétique (urss). En 1991, l’implosion de l’alliance des pays communistes sonna le glas du Pacte de Varsovie conclu le 14 mai 1955, prétexte sous-jacent, destiné à faire contrepoids à l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (otan) ayant vu le jour le 4 avril 1949. Les deux résumés suivant ont, bien entendu, un rapport avec le thème initial de cette étude. Il s’agit d’un rappel des faits entre, d’une part, l’affaire du Hollow Nickel et de Rudolph Ivanovitch Abel [2] qui débuta en 1953, et d’autre part, l’incident de l’U-2 et de son pilote Francis Gary Powers (1960). Histoires à priori différentes mais que l’épilogue réunira : 1

__________ [2]

fbi History.

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usa – New York – Brooklyn – Le 22 juin 1953, un jeune livreur de journaux recevait une bien étrange pièce de monnaie, plus légère que d’habitude. Il s’agissait d’une monnaie à secret de 5 cents 1948 en nickel ( fig. 29) munie d’un minuscule petit trou servant à introduire une tête d’épingle, permettant d’ouvrir la pièce fermée par simple pression. Cette pièce truquée contenait un microdocument codé. Le fbi, averti deux jours plus tard, récupéra le tout et interrogea le garçon. L’examen de la monnaie révéla qu’une partie de la pièce en question datait effectivement de 1948, mais que la seconde moitié, au vu des alliages dont les deux parties étaient composées, avait été frappée entre 1942 et 1945. L’examen du micro-document révéla un alignement constitué de 207 groupes de cinq chiffres répartis en 10 colonnes ( fig. 29). Pendant près de quatre ans, le fbi tenta sans succès de décoder le message secret et de découvrir l’origine de la pièce. Ce n’est que grâce à un événement survenu à Paris, en mai 1957, où un exemployé de l’Organisation des Nations Unies (onu), rappelé à Moscou définitivement, fit défection au cours de son voyage de retour en descendant à Paris, que le fbi ﬔt en mesure de relier la

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pièce en nickel à des agents soviétiques du Comité pour la Sécurité de l’État, le kgb (Komitet Gosoudarstvennoï Bezopasnosti = Комитeт Γоcyдapcтвeнной Бeзопacноcти). Cet homme procura des informations permettant la découverte de deux espions en poste à New York : un certain Svirin et Fisher chargés principalement d’obtenir des informations sur le programme atomique et sur les sous-marins des États-Unis. Par la suite, il révéla le code de déchiffrage permettant de traduire le contenu du mystérieux message, qui se révéla être d’importance secondaire. Lors des perquisitions, plusieurs markka finlandais trafiqués ﬔrent également découverts. Svirin étant retourné en Union soviétique en octobre 1956, Fisher ﬔt seul à être arrêté. En tant qu’espion russe, il ﬔt traduit devant la Cour Fédérale de New York en octobre 1957 et condamné, pour l’une des trois charges d’accusation, à trente années de réclusion. urss – Le 1er mai 1960, un Lockheed U-2, avion américain de reconnaissance et d’espionnage utilisé intensivement durant la Guerre froide, qui décolla de Peshawar (Pakistan), ﬔt abattu au-dessus de Sverdlovsk (Ekaterinbourg), à plus de 1.300 miles (ca 2.000 km) de la frontière à l’intérieur du territoire soviétique. Son pilote, le capitaine Francis Gary Powers, recruté par la cia (Central Intelligence Agency), n’ayant pas pu déclencher l’autodestruction de l’avion, parvint tout de même à s’éjecter. Bien que revêtu d’un uniforme de l’armée de l’air soviétique, il ﬔt rapidement découvert et intercepté. À cette époque, la cia procurait aux pilotes en mission spéciale [3] un kit de « survie » composé, entre autres, de faux papiers d’identité, d’une carte, d’une boussole, de quelques roubles et kopecks ainsi qu’une pièce en or ; mais 2

__________ [3]

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également d’une capsule de cyanure, d’un dollar contenant une aiguille empoisonnée au curare ou selon certains auteurs, empoisonnée à l’aide d’un dérivé de saxitoxine. Le « libre-arbitre » était laissé aux pilotes en ce qui concerne l’utilisation, ou non, de ces derniers éléments en cas de capture. Il semblerait que Powers ait jeté sa capsule de cyanure et ce « dollar en argent », probablement une pièce d’un demi dollar en argent ( fig. 30), transformée en monnaie à secret qui, dans ce cas précis, était loin des fonctions habituelles décrites précédemment. Lors de son arrestation, il était en possession d’une broche-insigne munie d’une aiguille également empoisonnée au curare.

Fig. 30 – usa – Half dollar 1954 – Type Franklin – Ag 900‰ – n 30,60 mm – Tranche cannelée – Épaisseur 2,15 mm – Masse 12,50 g. Pièces frappées de 1948 à 1963

Le capitaine Powers, ayant avoué les faits, ﬔt reconnu coupable d’espionnage le 19 août 1960 et condamné à trois ans de prison et sept ans de travaux forcés. Le 10 février 1962, après 21 mois d’emprisonnement, il ﬔt échangé contre l’espion soviétique Rudolph Abel alias William Fisher sur le Pont de Glienicke reliant Potsdam en Allemagne de l’Est à Berlin-Ouest. c’était hier … des « monnaies » qui « mouchardent » ? Washington – En 2007, le Département américain de la Défense aurait mis en garde des entrepreneurs américains sur l’existence d’une nouvelle méthode

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d’espionnage. Il serait question de monnaies à secret canadiennes dans lesquelles seraient insérés de minuscules transmetteurs rfid (en anglais Radio Frequency IDentification). Trois cas se seraient révélés entre octobre 2005 et janvier 2006 à la suite d’une visite effectuée par des cadres de la Défense au Canada. Ces monnaies trafiquées auraient permis de suivre les faits et gestes de ces personnalités ayant accès à des informations de hauts niveaux. Ces pièces auraient été glissées à leur insu. Le rapport de la Sécurité de la Défense américaine n’a communiqué aucune autre information à ce sujet classé, selon eux, de Top Secret. Le Service Canadien du Renseignement de Sécurité (scrs) affirmerait ne rien savoir à ce sujet mais qu’il collaborerait bien volontiers avec les Américains. Selon les experts, le ou les pays qui sont à la base de ces faits, s’ils s’avéraient réels, disposeraient d’une technologie de pointe des plus avancée. La monnaie canadienne de circulation la plus volumineuse étant la pièce de deux dollars (n 28 mm – ép. : 1,8 mm), il semble peu probable, vu son bimétallisme, que celle-ci fût la pièce choisie pour réaliser cette transformation et insertion. Les dimensions de la pièce d’un dollar (n 26,5 mm – ép. 1,75 mm) ne sont pas à négliger ; par contre, celles de la pièce de cinquante cents, avec des di-

mensions de 27,13 mm de diamètre sur une épaisseur de 1,95 mm, seraient idéales pour réaliser ce travail si cet avertissement s’avérait réel et justifié. La cia admettait par ailleurs que ses propres espions utilisaient soit de véritables pièces de monnaies creusées, soit des imitations de monnaies ( fig. 31) pour cacher des messages, ou des photographies. Au centre, la photographie publiée par la cia montrant une imitation d’un dollar du type Eisenhower. Cette « monnaie » à secret dont le flan monétaire semble réalisé en cuivre argenté, alors que la pièce originale est en cuivre nickelé, a des empreintes monétaires légèrement différentes de celles du dollar initial. L’avantage de cet exemplaire est qu’il est plus facilement reconnaissable lorsqu’il est mélangé à d’autres monnaies, évitant ainsi son utilisation accidentelle lors d’une quelconque transaction financière. Pour la comparaison, voici de chaque côté, le droit et le revers du véritable dollar de circulation en cuivre nickelé (Cu 75% – Ni 25%) frappé de 1971 à 1978. Son diamètre est de 38,5 mm et l’épaisseur de la tranche cannelée est de 2,58 mm pour une masse de 22,7 g. Le revers est une représentation de l’insigne de la mission Apollo 11. Cette pièce a également été frappée, pour les collectionneurs uniquement, en plaqué argent avec modification de la tranche.

Fig. 31

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aujourd’hui encore… Sur Internet, plusieurs sites comme Dereu & Sons Mfg Co. et Brands On Air proposent des monnaies à secret pourvues d’un système de fermeture par pression (fermeture a), réalisées avec de véritables pièces, pouvant contenir une micro carte mémoire de données numériques allant de 1 à 128 Go. pour conclure Nous avons vu quatre procédés de fabrication de monnaies à secret ainsi que cinq systèmes de fermeture, mais il existe des variantes ; ainsi, en général, le droit d’une pièce devient souvent le couvercle et le boîtier ou le contenant est réalisé avec le revers comme fond extérieur. Il arrive que cet ordre soit inversé, c’est-à-dire que le droit devient le fond extérieur du boîtier et vice-versa. Il y a d’autres variantes en ce qui concerne la couronne ajoutée (soudée) ou réalisée dans la masse ; qu’il s’agisse de

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son épaisseur ou de sa largeur mais également de sa forme. La majorité est plate, mais il s’en trouve dont la partie supérieure est de forme convexe (bombée). Il y a également des différences de largeurs entre la tranche et le bord intérieur du boîtier, bien évidemment en rapport avec le type de couvercle façonné ou qui le sera. Le contenu d’une monnaie trafiquée devait parfois être lesté, permettant ainsi de se rapprocher plus exactement du poids initial de la pièce normale. Il pouvait encore être emballé ou callé pour éviter qu’il ne bouge et fasse du bruit révélant ainsi sa présence aux oreilles indiscrètes. sources et références Les différents schémas ou dessins explicatifs sont de l’auteur. À l’exception de la figure 19, toutes les illustrations proviennent de sites ou de blogs de collectionneurs particuliers ou professionnels dont la grande majorité est répertoriée ci-dessous. BCEN vol. 49 no 3, 2012


Wikipedia – L’encyclopédie libre cgb.fr

avalon.law.yale.edu/20th_century/ u2.asp#note2

www.cgb.fr/bn/pdf/bn063.pdf

www.cia.gov/news-information/featuredstory-archive/strangers-on-a-bridge.html

www.cgb.fr/monnaies/vso/v23/fr/monnaies2 610.html?depart=2191&nbfic=2502

fr.wikipedia.org/wiki/Incident_de_l'U-2

www.cgb.fr/monnaies/vso/v19/fr/monnaies2 0a6.html?depart=1162&nbfic=2014

fr.wikipedia.org/wiki/Francis_Gary_Powers

Mayday For ﬈e U-2

InfoNumis

area51specialprojects

www.infonumis.info/historique&description/ index.htm

com/u2_mayday.html

www.infonumis.info/autres_monnaies/siege/ index.htm#strasbourg

iNumis www.inumis.com/vso/V00011/secondempire-boite-de-for%C3%A7at-dans-dixcentimes-tete-nue-1856-lyon-a16819.html

﬈ierry Dumez Numismatique : « Curiosités Numismatiques » Numismativy 56 : thématiques de collections – Pièces à secret numismativy.free.fr/dossier/gene_objet.htm

Histoire du microfilm ﬈e History of Microfilm: 1839 to the Present ; Rene Dagron [archive] – University of California www.manchestermicroscopical.org.uk/ danchom.html

Monnaies canadiennes pour espions www.msnbc.msn.com/id/16572783/ns/ us_news-security/t/defense-dept-warnsabout-canadian-spy-coins/

Site de pièces pour espions « Dereu & Sons Mfg Co. » : spy-coins.com/ products.htm

« Brands On Air » www.brandsonair.com/produits/high-tech/ pieces-monnaie-creuses

B. Gille, Histoire des techniques, Paris, 1978. J. De Mey & B. Poindessault, Répertoire de la numismatique française contemporaine, Bruxelles y Paris, 1976. Nous remercions M. M. Prieur (cgb, Paris) de nous avoir fourni plusieurs illustrations originales.

fr.wikipedia.org/wiki/Ren%C3%A9_Dagron

Définition de l’eustache (CNRTL) www. cnrtl.fr/definition/eustache

FBI History archive.wikiwix.com/cache/?url=www.fbi.gov /libref/historic/famcases/abel/abel.htm&title =Histoire%20du%20FBI%2C%20cas%20c% C3%A9l%C3%A8bres%C2%A0%3A%20le% 20cas%20d%E2%80%99une%20pi%C3%A8 ce%20de%20monnaie%20creuse

Hollow Nickel Spy Case www.prc68.com/I/NickelSpy.shtml

Archive Multilingue – « WorldLingo » www.multilingualarchive.com/ma/enwiki/fr/ Concealment_device

Nickel Hollow – William Fischer fr.wikipedia.org/wiki/William_Fischer

L’incident de l’U-2

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Trésors Monétaires, tome xxiv, 2009/2010, Paris, Bibliothèque nationale de France, 2011, 4, 1999 p., 27 pl. en n/b + 8 pl. en coul. Prix : ₫ 50.

L

e 24ème volume de la belle série des Trésors Monétaires éditée par le Cabinet des Médailles de la BnF sous la direction de Michel Amandry, nous apporte quatre dépôts que l’on peut qualifier de « majeurs ». Deux sont romains, un est gaulois et le dernier est médiéval. Le dépôt monétaire des Sablons, découvert en 1997 au Mans (Sarthe) est étudié par G. Aubin, Cl. Lambert et le regretté J.-N. Barrandon. Il se compose de 152 statères en or allié appartenant à trois séries monétaires. D’une part, les a. distinguent

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une série à « l’hippocampe en cimier », attestée par 20 exemplaires, qui est retirée aux Vénètes au profit (éventuel car ils ne tranchent pas) des Diablintes, des Cénomans ou des Andécaves. D’autre part deux séries « à la boucle sur la joue », attribuées aux Aulerques cénomans et représentées par 132 exemplaires. Les a. détaillent les accidents affectant les flans et s’intéressent aux problèmes technologiques (métrologie, composition métallique, charactéroscopie). Des éléments importants sont fournis dans le chapitre consacré à la restitution du volume de l’émission. En retenant une estimation modérée de 15.000 exemplaires par paire de coins, la seule émission de statères « au personnage tenant deux objets » des Aulerques cénomans, soit 915.000 unités, aurait nécessité 3,4 tonnes d’or, 2,5 tonnes d’argent et presque 1 tonne de cuivre. Cet or pourrait être, au moins en partie, d’origine locale. Mais l’interprétation du statut de cette importante émission, mise en parallèle avec les données issues du monde grec (avec de nombreuses références aux travaux de G. Le Rider ou de Fr. de Callataÿ) butte finalement sur des problèmes de durée de l’émission : quelques mois ou plusieurs décennies. Le deuxième texte, très attendu, est la synthèse consacrée par S. Estiot au trésor d’or romain de Lava, en Corse. Les premières monnaies sont apparues sur le marché en 1957, et la suite ﬔt assez rocambolesque ; du reste, ses aspects judiciaires sont loin d’être terminés. L’inventaire actuel est certainement partiel puisque les estimations portent sur environ 1.200 ou 1.400 monnaies. Cet ensemble regroupe des aurei laurés, radiés, des multiples d’or et de l’orfèvrerie, immobilisés par un naufrage en 272/273 apr. J.-C. Il offre, selon les termes de S. Estiot, « une vision en coupe de ce qu’un haut fonctionnaire romain pouvait recevoir des libéralités impériales, ainsi que des modalités de leur distribution ». Dans son état actuel, le trésor de Lava comprend quatre

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monnaies antérieures à 260, 40 de Gallien (règne seul), 87 de Claude II, 19 de Quintille et 297 d’Aurélien. Découvert sans doute à la fin des années 1950 au large des côtes de la Sicile, le trésor dit « de Partinico » est considéré depuis longtemps comme l’une des plus spectaculaires trouvailles de monnaies d’or du Bas-Empire. L’enquête menée par V. Drost et G. Gautier a permis de « retrouver » 174 exemplaires, dont 35 multiples d’or et 139 aurei s’échelonnant de 276/277 à 308 apr. J.-C. La composition de l’ensemble montre que la thésaurisation s’est effectuée selon deux principes. D’une part, une ponction régulière sur les aurei alors en circulation, et d’autre part par l’accumulation de « multiples » issus de donativa successifs. L’apport du trésor est en particulier fondamental pour la connaissance des émissions de métaux précieux datant du début du règne de Maxence (88 exemplaires) qui, rappelons-le, a fait l’objet de la thèse de V. Drost, actuellement sous presse. Le quatrième et dernier dépôt, édité par Fr. Dumas, est constitué par un ensemble mixte (or et argent) datant du xve s. et découvert à Martigné-sur-Mayenne (Mayenne). Il est composé d’un ensemble de 255 monnaies d’or, thésaurisées selon un processus lent durant le 2e et le 3e tiers du xve s. Est venu s’y ajouter un lot homogène de 86 monnaies d’argent d’un type unique, correspondant « à un paiement effectué vers 1475 ou à une thésaurisation plus brève, entre 1450 et 1475. La diversité des espèces d’or, françaises et étrangères, loin d’être une exception, reflète la réalité de la circulation telle que la font connaître textes officiels et découvertes monétaires ». Jean-Marc Doyen

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